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360° Magazine / mars 2021

No.201 / MUSIQUE

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360° N 0 201

Mars 2021

Le magazine

queer suisse

Enquête :

luxure lucrative

sur OnlyFans

Weekend :

on s'évade

à Lugano

Interview :

Olga Baranova lève le voile

sur le mariage égalitaire

Musique

Yelle


Provo

THÉÂTRE

le

Aux Eaux-Vives en 2021

Esplanade Alice-Bailly 1 | 1207 Genève

quer

réel

comedie.ch



spectacles

hors les murs

Rédaction en chef

Alexandre Lanz

→ alexandre@magazine360.ch

Rédaction textes

Antoine Bal, Katja Baud-Lavigne,

Lana Cueto, Edmée Cuttat,

Marlon Dietrich, Dr Hazbi,

Annabelle Georgen,

Antoine Gessling, Christine

Gonzalez, Greta Gratos,

Alexandre Lanz, Joshua Orsi,

Vagin Pirate

Corrections

Arnaud Gallay, Alexandre Lanz

Relecture experte en diversité

Marius Diserens

Rédaction image

Ester Paredes

Direction artistique et graphisme

Balmer Hählen

Illustration

Elisa Siro

Collages

Amina Belkasmi

(signes du zodiac)

Publicité

Philippe Scandolera

→ pub@360.ch

Jérémy Uberto

→ marketing@360.ch

Abonnement

Rolan Delorme

→ abo@360.ch

Expédition

Alain, André, Claude, Erdal,

Jacques, Laurentiù, Otto,

Giovanni, Jérôme

Editeur

Association Presse 360

Impression

Appi, Gland

Portrait édito

Ricardo Caldas

Couverture

Photo de Yelle, dont l’interview

est à découvrir en page 22.

360

36, rue de la Navigation

CP 2217 - CH-1211 Genève 2

Tél. 022 741 00 70

Toute reproduction est strictement

interdite pour tous les pays, sauf

autorisation écrite de 360 .

Des exemplaires vous sont offerts

dans tous les lieux partenaires

LGBTQ+ et friendly de Suisse romande.

360 est un magazine indépendant

dont le contenu rédactionnel

ne reflète pas nécessairement

les positions de l’Association 360 .

Sommaire

N 201

Édito

Actus

Dans le monde

p. 8 – 9

En Suisse

p. 10

L’humeur de Lana Cueto

p. 12

L’interview : Olga Baranova

La bataille pour le mariage

inclusif

p. 12 – 14

Société

L’enquête : OnlyFans

vécu de l’intérieur

p. 16 – 18

L’humeur de

Christine Gonzalez

p. 19

Sida : 40 ans

En mémoire de

Freddie Mercury

p. 20 – 21

L’humeur de Dr Hazbi

p. 21

Culture

p. 7 La rencontre : Yelle

L’icône contemporaine

p. 22 – 25

Retrouvez

toutes les infos

sur 360.ch

@magazine_360

@magazine_360

/magazine360lgbt

Le Quotient Queer

Colin Firth, le fidèle allié

p. 28 – 29

Mode

Les couleurs de l’année

En jaune et gris

p. 30

Vagin Pirate

Les pépites de mars

p. 32

Cinéma

Revoyons nos classiques

p. 34

Séries TV

Ryan Murphy

Encore ou assez ?

p. 36 – 37

Expo

Mersud Selman

brise le silence

autour du coming-out

dans les pays des Balkans

p. 38 – 39

Musique

Les albums qui

donnent des frissons

p. 40

Weekend

La dolce vita à Lugano

p. 42 – 43

Fragrances

Le monde selon Greta Gratos

p. 45

Horoscope

p. 46 – 47

Le questionnaire de Proust

Sandor

p. 50

N 201

5



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la presse

indépendante

et militante !

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Le magazine queer suisse

I’m

the

Par

Alexandre Lanz

Rédacteur en chef

B oy

J’avais 12 ans en 1984. Déjà, les indices pulsaient

dans mes veines, électrisées par la culture pop

pénétrant tous mes sens. Je découvrais Serge

Gainsbourg avec Love On The Beat, le titre éponyme

de son album culte. Au total, 8:04 minutes

sous haute tension sexuelle, un choc sismique pour

l’ado que j’étais. Gainsbarre dans toute la splendeur

des mots de la langue française qu’il savait si bien

manier : « D'abord je veux avec ma langue natale,

deviner tes pensées. Mais toi, déjà tu tangues, aux

flux et reflux des marées… »

Autour et à l’intérieur de cet album, tout

sentait le souffre, le cul, l’extrême, l’interdit.

Mandaté pour réaliser la pochette, William

Klein s’était appliqué à satisfaire Gainsbourg

qui lui avait donné pour mission de l’immortaliser

comme « une femme la plus

sublime possible ». Décadence rétro affichée

jusqu’au bout de sa clope qui se consume

dans son porte cigarette devant son œil

accentué à l’eyeliner: pari réussi pour l’artiste,

pour le coup homme blanc cis hétéro

privilégié. Soulignons.

Au beau milieu d’une décennie diabolisant l’homosexualité

à travers le spectre du sida dans les médias,

Gainsbourg tournait autour du pot et finissait

par s’emparer du sujet dans deux des 8 morceaux

gravés dans le sillon de son 16 e album studio. Il y a

Kiss Me Hardy. Mais surtout, I’m the Boy, « I’m the

boy that can enjoy invisibility, le garçon qui a le

don d’invisibilité… ». À travers le regard du voyeur

rôdeur, il fait une incursion dans les lieux de drague

d’alors. Forcément cachés, forcément nocturnes,

forcément invisibles aux yeux de l’écrasante hétéronormativité.

Le « don d’invisibilité ». J’étais fortement intrigué

par le refrain scandé par des hommes

aux voix haut perchées. Des mots qui sousentendent

qu’il existe un don de visibilité.

Plus tard, en me repassant certaines scènes

de ma vie en accéléré, j’ai compris la signification

de cette invisibilisation à laquelle nous

sommes confronté·e·x·s quotidiennement.

Contraint·e·x·s à la vigilance de se défendre,

à l’urgence de déconstruire ces privilèges

qui perpétuent nos inégalités.

Au cours de ma vie, j’ai appris à sillonner entre l’ultravisibilité

et l’invisibilité absolue. S’il ne s’agit pas d’un

don en soi, on peut peut-être parler d’une habileté

à se faufiler de l’un à l’autre. À jouer au chat et à la

souris avec moi-même. Et parfois même, en antidote

à la visibilité acquise de haute lutte, m’évader

dans l’invisibilité sur le somptueux et atmosphérique

Invisible des Pet Shop Boys.

© Ricardo Caldas

N 201

édito 7



DANS LE MONDE

Sous les palmiers

à huile,

des minorités

en péril

Par

Antoine Gessling

À l’approche de la votation du 7 mars

sur l’accord de libre-échange avec

l’Indonésie, rappel de la situation des

LGBTQ+ de cet immense pays.

Exhibés devant les médias, des jeunes arrêtés

lors d’une fête gay à Jakarta en août 2020.

© Humas PMJ

DANS LE MONDE

Biden face

à la vague de

panique

transphobe

© Twitter/@potus

À LIRE SUR 360.CH

POLOGNE

Nowa Dęba, une ville de 11’000 habitants,

a décidé qu’elle n’était plus une « zone

sans idéologie LGBT ». C’est la première – et

on l’espère, pas la dernière – à se retirer de

la déclaration adoptée par une centaine de

collectivités à travers la Pologne après que

l’UE a condamné la démarche.

© Bart Staszewski

Deux hommes flagellés en public pour avoir commis

des actes « contre nature ». Cette scène, qui s’est déroulée

en janvier dans la province d’Aceh, a servi de

rappel aux électeurs suisses: on ne peut réduire l’Indonésie

à un marché prometteur, ni à un pays où l’huile de

palme est produite à grands coups de déforestation.

C’est aussi un État où les minorités religieuses, ethniques

et sexuelles voient leurs conditions de vie

se dégrader. Un contexte qui pousse Pink Cross à

appeler à voter «non» le 7 mars. « Nos droits sont apparemment

moins importants que de bonnes relations

commerciales » déplore son directeur, Roman Heggli.

Hormis dans plusieurs juridictions (dont Aceh), l’homosexualité

est encore tolérée en Indonésie. Mais en

2016-2017, ce statu quo a volé en éclats sous la pression

des islamistes. Face à eux, le pouvoir a donné des

gages de « moralité » : déclarations antigay, censure

des thèmes LGBTQ+ dans les médias, groupes bannis

BIRMANIE

La société civile birmane a donné au monde une leçon

de résilience après le coup d’État du 1 er février. Dans

l’extraordinaire mobilisation pour la démocratie, les

arcs-en-ciel de la communauté LGBTQ+ locale sont

loin d’être passés inaperçus.

des universités. « Des maisons ont été prises d’assaut,

des personnes LGBTQ+ expulsées, et c’est arrivé

avec la légitimation de ministres, maires et officiels »,

racontait une militante d’Arus Pelangi à The Guardian.

RAIDS À RÉPÉTITION

Aujourd’hui, les LGBTQ+ indonésiens sont

à la merci d’une nouvelle flambée de haine.

En janvier 2020, il a suffi du procès d’un

Indonésien au Royaume-Uni, coupable de

multiples viols d’hommes, pour que les autorités

de sa ville natale organisent des raids

contre les lieux gay. De telles opérations

sont menées périodiquement à Jakarta sous

divers prétextes légaux. Les suspects sont

exhibés devant les caméras et parfois promis

à une « rééducation » en prison, comme s’en

est félicité en 2019 un ministre javanais.

© Twitter/@mymomowatt

En légitimant les politiques de discrimination dans les

domaines de la santé, de l’éducation et du logement

aux États-Unis, Donald Trump aura laissé un champ

de ruines à son successeur. Sitôt arrivé à la Maison-

Blanche, Joe Biden a tenté de remettre de l’ordre dans

la politique fédérale vis-à-vis des minorités. En matière

LGBTQ+, la mesure la plus symbolique est sans

doute la levée de l’interdiction faite aux personnes

trans de servir dans les forces armées, décidée par

Obama, mais gelée par Trump.

Tout un symbole, alors que la question trans

semble focaliser de plus en plus les conservateurs.

Les organisations LGBTQ+ ont constaté

une inquiétante multiplication des projets de

loi au niveau des États. Il y est question d’exclure

les étudiants trans* des compétitions

sportives, de permettre au personnel soignant

de ne pas recevoir des patient·e·x·s en

transition et même, dans le New Hampshire,

de poursuivre des parents pour « abus » s’ils

aident leur enfant à changer de sexe.

LIECHTENSTEIN

Coutumier des amalgames nauséabonds

entre homosexualité et pédophilie, le

prince Hans-Adam II en a rajouté une couche

sur ce thème, lors d’une interview le 12 février.

Il a laissé entendre qu’il pourrait utiliser son

veto contre l’instauration dans le micro-État

d’un mariage égalitaire qui reconnaîtrait la

parentalité des couples de même sexe.

FINLANDE/RUSSIE

Le Comité des droits de l’enfant a

condamné la Finlande, qui a refusé l’asile à

un couple de femmes et à leur fils de 5 ans,

victimes de harcèlement et de menaces en

Russie. C’est la première fois que l’organe

de l’ONU basé à Genève statuait sur le cas

d’un enfant discriminé en raison de son appartenance

à une famille arc-en-ciel.

ÉTATS-UNIS

Le maintien de dance parties au plus

fort de la pandémie ont suscité des critiques

acerbes, autant contre les labels « cyniques »

que leur public gay « privilégié ». Au-delà du

Covid-shaming, certains s’interrogent sur

l’avenir de ce modèle d’événements.

TURQUIE

Confronté à des universités en

ébullition depuis la fin 2020, le pouvoir islamoconservateur

cherche à discréditer le

mouvement. Il le fait en attaquant une de ses

composantes : les étudiant·e·x·s queer.

SUISSE

Vous avez été près de 200 à répondre

au sondage lancé en décembre sur l’avenir de

360˚. Merci ! On vous propose un survol des

résultats de ce questionnaire et des remarques

que nous avons reçues.

8 ACTUS

360 MARS 2021 N 201 ACTUS

9



BAROMÈTRE

Par Alexandre Lanz

CHAUD

Mieux vaut tard que jamais : L’Angola

légalise enfin les relations entre personnes

de même sexe. Cette mesure conclut un

processus de dépénalisation extrêmement

long dans ce pays africain. Dans son nouveau

code pénal signé en novembre 2020 par le

président João Lourenço, l’Angola interdit

également la discrimation à l’égard des

personnes sur la base de leur orientation

sexuelle. Un grand pas pour l’humanité.

TIÈDE

Parmi la mosaïque des 185 actrices

et acteurs qui faisaient récemment un coming

out collectif en couverture du magazine de

la Süddeutsche Zeitung en Allemagne, figuraient

quatre comédiens suisses, dont l’acteur

suisse Jan Hutter. « Une action comme

#Actout serait nécessaire en Suisse », déclare-t-il

dans les colonnes du magazine gay

suisse alémanique Mannschaft. Chiche ?

© Max Selim

FROID

QAnon refait des siennes, et pas des

moindres. Le mouvement conspirationniste

venu des États-unis a une nouvelle théorie

bien nauséeuse stipulant que l’obtention du

vaccin pour le Covid-19 pourrait rendre gay.

Partagée sur la plateforme de médias sociaux

de droite Telegram, la théorie est inspirée de

la récente diatribe de l’ecclésiastique iranien

Abbas Tabrizian, qui prétend que les vaccins

transforment les gens en « robots contrôlés »

et en « homosexuels ». Mais oui Monsieur, et les

marmottes elles font quoi avec le chocolat ?

EN SUISSE

Haro sur

les charlatans

Le Grand Conseil genevois devrait se prononcer

le 5 mars sur une motion visant à interdire

les soi-disant « thérapies de conversion ». Si

la proposition, soutenue par des élu·e·s de la

gauche et du centre,est votée, il reviendra au

Conseil d’État de l’appliquer. Le canton serait

alors pionnier en Suisse. Le Conseil fédéral

a par deux fois écarté cette possibilité, estimant

le cadre juridique suffisant pour bannir

cette pratique « à rejeter d’un point de vue

humain, scientifique et juridique ». Plusieurs

cas ont pourtant défrayé la chronique dans

la période récente, comme celle d’un psychiatre

schwytzois proposant à ses patients

de guérir de l’homosexualité en deux ans,

une cure remboursée par la LAMal.

Agressions

contre les LGBTQ+

recensées

Le Valais et la ville de Zurich s’apprêtent à le

faire. La police cantonale fribourgeoise est la

première de Suisse à recenser les délits à caractère

discriminatoire contre des personnes

LGBTQ+. Douze faits de ce type ont été dénombrés

en 2020 dans le canton, pour neuf

plaintes. « La pointe de l’iceberg », selon le

commandant de la police, Philippe Allain, cité

par « La Liberté ». À terme, il s’agit de mieux

cibler les situations où surviennent ces

agressions, en collaboration avec les associations

LGBTQ+ locales Sarigai et LAGO.

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Grütopie 20-22

Grütopie 20-22

10 ACTUS

360 MARS 2021



L’HUMEUR DE LANA CUETO

VIVE LES

MARIÉ·X·ES !

Chroniqueuse sur les questions de genre,

Lana Cueto cherche à construire une approche

positive du corps, de l’identité et de la sexualité.

À peine le Parlement fédéral a légiféré en faveur

du mariage pour tou·te·x·s, que l’opposition

s’élève déjà, de quoi s’indigner. À chaque fois

que la lumière progressiste illumine notre pays,

pourquoi faut-il que des forces occultes s’élèvent

pour répandre leurs ombres sur nos vies ? Des

comités référendaires récoltent en ce moment

même des signatures pour contester cette avancée

sociale majeure que représente le mariage

pour tou·te·x·s ne faisant une fois de plus que ralentir

un processus inéluctable.

Cette question hante mes nuits : pourquoi

des individus raisonnables et rationnels

dépensent-ils autant de temps, pour activer

les plus dignes rouages de notre

démocratie dans le but de s’opposer aux

droits fondamentaux de leurs prochains ?

J’ai lu dans un article que cette opposition

serait une affaire de conviction personnelle.

Si la vue du bonheur des autres vous

dérange, il suffit de détourner votre regard,

non ? Pas besoin d’exciter toute la nation !

Moi aussi j’ai une conviction, elle porte sur la défense

des fondements de la démocratie : dans une

société qui se réclame de la liberté et de l’égalité,

il est injuste que le mariage – et les privilèges que

celui-ci offre notamment en termes d’accès aux

biotechniques reproductives – puisse être réservé

à une seule catégorie de famille. Or, s’il y a bien une

chose que j’exècre encore plus que les petitesses

iniques, ce sont les injustices institutionnelles, d’où

mon engagement politique sur cette problématique.

Messieurs et mesdames les opposantes au

mariage pour tou·te·x·s, vous qui ne savez

pas quoi faire de votre temps, je ne sais pas

moi, recentrez-vous sur des choses essentielles

comme le bonheur de votre famille,

faites un puzzle ou relisez les classiques

de la philosophie libérale, ça pourrait peutêtre

vous rafraîchir la mémoire quant à la

raison d’être de ce principe démocratique

que vous détournez de façon abusive.

L’INTERVIEW

«Nous

allons entendre

des propos

extrêmement

violents »

La Genevoise Olga Baranova a pris la

direction de la campagne Mariage civil

pour tou·te·x·s. L’occasion de faire le

point avec elle sur ce sujet qui nous occupera

jusqu’à la fin de l’année.

Par

la rédaction

Figure bien connue des milieux politiques

romands, et reconnue pour sa pugnacité,

Olga Baranova est en ordre de marche pour

couper la route aux trois comités référendaires

constitués pour faire capoter le projet

adopté par les Chambres, fin 2020. Les opposant·e·s

ont jusqu’au 12 avril pour récolter

50’000 signatures.

© Alan Humerose

Olga Baranova, quel est le calendrier sur lequel vous

tablez ?

Si les opposant·e·s arrivent à leurs fins en

termes de signatures, deux dates sont hautement

probables : la votation de fin septembre

ou celle de novembre 2021. Les

Suisse·sse·s devraient donc être fixé·e·s

cette année. La campagne se déploiera

concrètement dès le mois de juin.

Quelle est la stratégie que vous poursuivez pour cette

campagne ?

Il s’agit avant tout d’une campagne de mobilisation

de celles et ceux qui sont favorables

au mariage civil pour tou·te·x·s. Il s’agira bien

sûr de convaincre, à la marge, les indécis. Il

sera également important pour nous de limiter

la casse. Nous allons entendre un certain

nombre de propos homophobes extrêmement

violents dans les médias. Il ne faut pas

oublier que nos adversaires sont des réactionnaires.

Ce sera l’occasion de voir à quel

point la nouvelle norme anti-discrimination

va pouvoir nous aider. Quoiqu’il en soit, nous

allons préparer nos bénévoles à faire face

à ces propos et leur donner les outils pour

pouvoir répondre de manière adéquate.

Il s’agira d’une campagne de terrain afin

de renforcer les communautés LGBTQ+

dans les régions. En Suisse, nous avons un

énorme potentiel pour le community building.

Le message est celui de l’égalité et de

l’ouverture. Une ligne de campagne tout à

fait universelle.

Olga Baranova, directrice

de la campagne Mariage civil

pour tou·te·x·s.

12 ACTUS

360 MARS 2021 N 201 ACTUS

13



Est-ce qu’il y a un enjeu autour des régions linguistiques

?

Si l’on regarde les différentes statistiques à

disposition, il n’y a pas vraiment de röstigraben

sur cette question. C’est un sujet qui dépasse

également les frontières partisanes.

En tant que Romande, je suis ravie que les

francophones soient d’emblée partie prenante.

Il n’y aura pas deux campagnes, mais

une campagne nationale adaptée aux régions.

Mon ambition de directrice, c’est

aussi d’avoir suffisamment de ressources

pour que nous soyons mobilisés au Tessin,

par exemple.

Qui sont les adversaires au mariage pour toutes et

tous, quel est leur vrai visage?

Il y a deux groupes distincts. Le premier

groupe est celui de l’extrémisme religieux.

Il s’agit de l’UDF et consorts. Ils portent des

croyances extrêmement traditionalistes

des relations humaines et de la société. Cela

ne sert à rien d’essayer de les convaincre.

Cela sera également compliqué pour eux de

rallier largement, puisqu’ils ont une forme

de mépris pour des modes de vie au-delà de

l’acronyme LGBTQ+. Ce groupe représente,

si j’ose le dire comme ça, le moindre de nos

problèmes.

L’autre groupe est beaucoup moins religieux, beaucoup

plus politique. Je pense bien évidemment aux

membres de l’UDC et du PDC. Certains de ceux qui

s’affichent comme opposants ont déjà été condamnés

pour racisme. Nous les connaissons bien. Il y a

peu de personnalités surprenantes, mais ils savent

parler aux médias et les médias leur donnent de la

place. Ils sont aussi beaucoup plus stratèges que les

premiers. Ils utiliseront sûrement les enfants comme

cheval de bataille avec tous les arguments que nous

connaissons aussi. La bonne nouvelle, c’est que nous

avons la science et l’expérience des autres pays de

notre côté pour infirmer leurs thèses. Nous ferons

tout notre possible pour ne pas se faire amener sur

ce terrain ultra-émotionnel.

Retrouvez toutes les informations utiles pour

vous engager dans la campagne Mariage civil

pour tou·te·x·s sur mariage-oui.ch

SOUS-SECTION

Henry Purcell

Didon

et Énée

2 – 11.5.2021

14 ACTUS

360 MARS 2021

DÈS CHF 17.-

N 201

GTG.CH

Société 15



L’ENQUÊTE

Only

Fans:

Avec les confinements, l’usage d’OnlyFans a explosé. Les fans et les créateur·trice·x·s

de contenus explicites de ce réseau social payant redéfinissent

les contours du travail du sexe numérique.

Par

Antoine Bal

C’est « l’Insta du porno ». Ou son ubérisation. À l’ère

de l’entreprise virtuelle de soi-même, OnlyFans est

rentré dans la langue et Beyoncé en fait des rimes.

Pornstars et pros du sexe y côtoient l’influenceur de

niche comme le quidam débutant pour poster photos

et vidéos exclusives, sur abonnement à tarifs

variables, pour leur cercle de fans. Créé en 2016,

OnlyFans n’était pas foncièrement pornographique

au départ. L’idée était de s’adresser plus directement

à sa communauté en jouant sur la proximité. On y

promouvait de la musique, une pose attractive, un

bout de quotidien. Mais la réglementation permissive

et libérale de la plateforme en matière de contenus

explicites n’a pas tardé à la transformer en autoroute

du sexe monétisé. OnlyFans est une sorte d’héritage

entre les sites de sexcam et la culture influenceurs:

ici, on veut suivre une personne plutôt que fétichiser

une pratique sexuelle. On fait tout soi-même, on gère

sa propre production et surtout, sa propre rémunération.

La plateforme ramasse 20% sur toutes les

transactions avec les utilisateurs.

rime,

trique

t tricks

« Aujourd’hui, je suis mon

propre monteur vidéo,

mon propre styliste de suce,

et mes fans savent qu’ils

peuvent déjà trouver à peu

près tout ce qu’ils veulent

de moi sur mon compte. »

Blew Velvet

PORNO DE SURVIE

Certes, un paquet bien monté de followers

existants facilite la percée. Mais OnlyFans

n’est pas l’apanage des stars ou des influenceurs

déjà puissants sur d’autres réseaux

sociaux. Des lambdas se lancent en masse

depuis le premier confinement. En mars, le

nombre de créateurs avait presque doublé,

et fin 2020 OnlyFans affichait plus de 1 million

de créateurs pour 50 millions d’utilisateurs.

Chaque jour, 7000 à 8000 nouvelles

personnes proposent des contenus. Pour

certaines, c’est un outil de survie.

« À New-York, on est tou·te·x·s dessus maintenant. Il

n’y a qu’avec ça que j’ai pu me maintenir à flot, cette

année », décrit Blew Velvet, « pédé bimbo déviante »,

musicien et performeur de 27 ans. Comme beaucoup

d’ados queer virés de chez eux, il confie que

le travail du sexe a toujours été sa source de revenus

principale: « J’ai vite appris à capitaliser sur mes

compétences de drague comme de baise. » Inscrit

sur OnlyFans depuis le printemps dernier, Blew

Velvet était pourtant réticent à se lancer. « L’arrivée

de la plateforme tuait un peu le prestige de faire du

porno. Ça frustrait beaucoup de monde dans l’industrie,

mais la Covid et la fermeture des studios a

accéléré la migration d’une foule de modèles porn

vers OnlyFans.» Ils y trouvent une liberté dans l’autogestion

tout en jouissant déjà, pour certains, d’une

réputation avantageuse. « Aujourd’hui, je suis mon

propre monteur vidéo, mon propre styliste de suce,

et mes fans savent qu’ils peuvent déjà trouver à peu

près tout ce qu’ils veulent de moi sur mon compte.»

Illustration :

Elisa Siro

DES TITANS AU TRAVAIL

Davide est un club kid non-binaire de 30

ans. Quand il ouvre son compte en 2018, il

est l’un des pionniers du porn amateur via

OnlyFans, en Italie. « J’ai tout de suite com-

16 Société 360 MARS 2021

N 201

Société 17



pris le potentiel, combiné avec une bonne

stratégie de promotion par Insta et Twitter. »

Avec la crise, OnlyFans est devenu son job

à plein temps. « Le porn c’est vraiment super

fun, mais il faut un cerveau pour le faire.

Le corps ne suffit pas ! » C’est un travail de

Titan. Sur la BBC, Lexi, une créatrice de

Manchester, soulignait que « la charge mentale

de travail non rémunéré pour cette activité

est largement sous-estimée. » Car il n’y a

pas que la création de contenus ou la réponse

aux requêtes de fans. La clé de la réussite est

un savant travail de relations publiques. Cela

se joue principalement sur Twitter, via des

comptes porn où les créateurs postent des

extraits vidéos courts que le réseau social

tolère, en tout cas pour l’instant.

Pour Blew Velvet, OnlyFans est un formidable terrain

des possibles, mais il faut les épaules pour ne pas

s’y paumer psychiquement. Pour lui, la vraie facette

obscure et « super démoralisante » réside dans la

compétition féroce qui se joue sur ce terrain ultralibéral,

sans véritable règles : on se livre des batailles

de tweets et retweets pour taper dans l’oeil des plus

influent·e·x·s, ou on s’acoquine pour pouvoir tourner

des scènes avec des créateur·ice·x·s déjà très suivis.

L’affaire Bella Thorne l’illustre. L’été dernier, la star de

Disney s’était fait plus de 1 million de dollars en 24h

sur le réseau, s’attirant les foudres de travailleuses

du sexe. Elles dénonçaient ces stars privilégiées qui

s’accaparent des espaces de travail du sexe investis

par des personnes déjà marginalisées. Un phénomène

de gentrification du réseau.

SEXE PUBLIC VS. SPHÈRE PRIVÉE

S’il trouve qu’OnlyFans contribue à déstigmatiser

le travail du sexe, Blew Velvet n’y

met pas toutes ses billes. D’abord parce

que dans un New York déserté, il tente de

maintenir quelques clients de confiance

en présentiel. Ensuite parce qu’il craint de

brouiller la distinction entre pratique professionnelle

et moments choisis. « Aujourd’hui,

je pourrais sortir mon téléphone ou mon trépied

n’importe quand pour me filmer avec un

crush ou un pote de baise. Mais je ne peux

pas concevoir d’organiser ma vie en monétisant

chaque instant de ma vie sexuelle. »

« Est-ce qu’on ne génère pas du contenu pour mieux

s’aimer soi-même ? » se demande Damian. Sur Only-

Fans, cet artiste trentenaire basé à Madrid, décrit une

vraie beauté et un pouvoir dans la représentation de

soi assumée. Un sentiment d’appartenance aussi,

car il se reconnaît dans des imaginaires autoproduits

moins normatifs, moins enfermants que dans

le porno mainstream. Et donc plus excitants. Comme

la page de l’acteur porno gay Rhyheim Shabazz. Avant

de scroller ses 312 vidéos, on est prévenus : « Je suis

pour la créativité, le respect, l’honnêteté et l’unité ».

Ici, les scénarios et la proximité construites sont « plus

domestiques, plus réalistes », suggère Damian, très

touché par ce compte. Sur fond de weed et de R&B, ça

baise souvent sur un fauteuil gonflable au milieu d’une

piscine. Soudain, l’hôte superstar, son caméraman

et ses invités éclatent de rire parce que le Husky de

la maison qui passait par là vient renifler, curieux, la

bite de son maître. « On est pas ce genre de chiennes,

baby. » C’est vrai qu’on est loin de Pornhub.

Blew Velvet ne sait pas si l’engouement durera

après la pandémie. Pour lui, l’avantage

d’OnlyFans est qu’il ouvre une conversation

nouvelle et globale sur le rapport moral

qu’entretiennent nos sociétés avec le travail

du sexe. Davide, lui, est catégorique : « Bien

sûr que ça a changé ma sexualité, je suis devenu

le fantasme de milliers de personnes !

Faire du porn en ligne ne m’aide pas seulement

économiquement. Ça m’a apporté de

la confiance et libéré sexuellement. Je me

sens fort et indépendant.»

NOSTALGIE DYSTOPIQUE

Buzz estival à New York. Des jeunes se sont

mis à poster sur leur OnlyFans des vidéos de

plans culs tournés dans un spot de cruising

bien connu depuis les années 70, tombé en désuétude

avec la pandémie et l’avènement des

apps. « C’est cool et désolant à la fois, soupire

Blew Velvet, ça donne un nouveau souffle à

des lieux oubliés tout en capitalisant sur l’aura

secrète et sacrée qu’avait l’endroit ». Alors,

vertige libérateur ou dystopie accélérée de

nos sexualités sur les écrans ? On se demande

bien à quoi ressembleront nos vies sexuelles

quand on pourra socialiser de nouveau…

© Blew Velvet

Par

SOUS-SECTION

L’HUMEUR DE CHRISTINE GONZALEZ

LE POTENTIEL ÉROTIQUE

DU MASQUE

Christine Gonzalez,

animatrice de Question Q

sur RTS-La Première.

Samedi matin, mon meilleur ami me traîne dans

un magasin à Berne. « Viens, on entre là vite fait,

je veux m’acheter un masque en tissu noir satiné,

c’est hyper sex. » Sa hâte sonnait comme l’achat

d’un jockstrap en latex dans un festival berlinois.

Et voilà comment, en quelques mois sous

l’ère Covid-19, notre désir ne tenant plus

qu’à un élastique, nous nous sommes mis

à érotiser des bouts de tissus lavables à

60˚. Ou plutôt ce qu’ils couvrent, cette

bouche Ô combien sensuelle, Ô combien

impudique, Ô combien interdite.

Une bouche qui embrasse, caresse, lèche, suce.

Cette même bouche qui postillonne, devenant

en 3-2-1 l’arme fatale du coronavirus. Le danger

et l’intimité se déplacent alors peu à peu,

soumettant le désir à une équation quasi implacable

: qui masque cache, qui cache suggère,

qui suggère excite.

La bouche, évacuée de l’espace public,

est désormais un nichon que l’on planque

dans un soutien-gorge. Que reste-t-il

alors ? Les yeux. Mes yeux dans tes yeux.

Un regard à soutenir, avec toute l’audace

et l’intensité du monde (si tu sais pas trop

comment faire, demande à une pote

gouine, elle, elle sait).

Je veux ta bouche, je drague tes yeux. Au fil des

mois, de vagues en vagues, notre compréhension

du regard de l’autre s’affine. Il y a une année encore,

nous faisions à peine la différence entre un

regard « passe-moi le sel » et un regard « prendsmoi

là tout de suite ». Maintenant on sait. Enfin...

on sait un peu mieux.

Jouons donc avec ce que l’on cache, repensons

aux torrides masques vénitiens

d’Eyes Wide Shut de Stanley Kubrick, où

jamais masque n’eut une telle charge

sexuelle. Et en attendant le « monde

d’après », celui où tout le monde baise,

danse et s’enlace, envisageons le potentiel

érotique du masque.

« Une

question ?»

drgay.ch

Comme j‘aime sucer, je voudrais

savoir si on peut être infecté

par le VIH et si avaler du sperme

est risqué ?

Merci de ta question.

Pour les enjeux infectieux, la fellation n’est pas un

mode de transmission avéré du VIH. Il existe un

risque théorique et celui-ci augmente avec la

présence de sperme dans la bouche et a fortiori si

celui-ci est ingéré. Pour autant, il n’y a pas de cas

totalement avéré. Dans les études sur la question,

le risque est tellement faible qu’il n’a pas pu être

chiffré. Ainsi, il n’y a pas de recommandation de

prescription systématique d’un traitement

d’urgence VIH (PEP) après une fellation sans

préservatif.

Le VIH se transmet pour l’essentiel lors de pénétrations

(anales ou vaginales) sans protection (préservatif

et/ou PrEP) avec un·x·e partenaire dont on ne

connait pas le statut VIH avec certitude et qui vit

avec le VIH sans le savoir.

En revanche, la fellation est un mode de transmission

courant d’autres IST comme la syphilis ou la

gonorrhée. C’est pourquoi, si l’on a des rapports

sexuels en dehors d’une relation stable exclusive

sexuellement, il est recommandé de faire un

régulièrement dépistage, même en l’absence de

symptômes. Ce bilan devrait notamment inclure

une prise de sang ainsi qu’un frottis pharyngé

(fonds de gorge), anal (bulle rectale) et génital

(méat urétral) ou un prélèvement d’urine. Un délai

d’au moins 15 jours est nécessaire pour pouvoir

détecter les infections virales (VIH, hépatites) et

exclure une infection bactérienne (syphilis,

gonorrhée, chlamydia).

Cher Dr Gay J'ai eu une situation à risque, mais

cela fait plus de 48h. Je dois attendre 3 mois pour

faire des dépistages pour les IST surtout le VIH?

18 Société 360 MARS 2021

N 201

Société 19



SIDA : 40 ANS DÉJÀ

À l’issue de l’insouciance des années 1970, le spectre du sida entrait avec fracas

dans nos vies en 1981. Une des pires tragédies du 20 e siècle. 40 ans plus tard,

les auteur·e·x·s de 360 O se souviennent des artistes qui les ont marqué·e·x·s,

emporté·e·x·s trop tôt.

L’HUMEUR DE DR. HAZBI

Fre ddie

Rhapsody

Fauché en pleine gloire par le sida à tout

juste 45 ans, Freddie Mercury est entré

dans la légende par la grande porte.

Et dans ma vie pour toujours.

Par

Katja

Baud-Lavigne

Freddie Mercury et moi avons fait connaissance sur

la banquette arrière de ce qui devait être une Golf au

milieu des années 80. Plus exactement, j’étais sur

la banquette et lui dans l’autoradio de mon tonton

Philippe. Ce qui au fond importe peu, tant cette rencontre

a marqué durablement mon existence. J’avais

une dizaine d’années et son Radio Gaga a résonné

comme une révélation. C’était rock, c’était glam, et

cela ne ressemblait à rien de ce que j’avais pu entendre

jusque-là. Un homme capable de chanter avec autant

de force et d’émotion ne pouvait être qu’exceptionnel.

Un coup de foudre qui débouchera quelques mois

plus tard sur l’acquisition de mon premier lecteur

CD portable et du Queen live Magic. L’occasion

de découvrir Bohemian Rhapsody, l’indétrônable

hymne qui ne cesse de me vriller l’âme et les tripes

depuis lors. Celui que j’écoutais tous les soirs en

cachette sous la couette avant de m’endormir. Qui,

toujours et encore, me redonne du cœur à l’ouvrage

quand je n’ai plus le courage de rien. Et qui continue

de m’arracher des larmes, même quand tout

va bien.

Dire qu’à l’époque, tandis que Freddie admirait le lac

depuis sa terrasse de Territet, je crapahutais non loin de

là sur les rochers du côté d’Yvoire. Casque vissé sur les

oreilles, je me gavais de son incroyable voix, rêvant du

jour où j’aurais la chance d’admirer son mythique jeu de

scène, à Wembley de préférence. Cadeau Ô combien

symbolique que je comptais réclamer pour mes 15 ans.

Hélas, le sort en a décidé autrement. Dix-neuf

jours après mon quatorzième anniversaire,

Freddie perdait son combat contre le sida le

24 novembre 1991. Subitement, cette maladie

un peu lointaine devenait cruellement réelle à

mes yeux. Ce dimanche-là, assise sur un ponton

de bois humide avançant dans le Léman

qu’il aimait tant, j’ai pleuré la perte d’un être

cher que je n’avais pourtant jamais rencontré.

Aujourd’hui, j’approche de l’âge que Freddie avait lorsqu’il

nous a quitté. Il m’a accompagnée durant toutes

les petites et grandes étapes de ma vie. Au fil des ans,

quatre enfants sont venus peupler la maison. Il n’est

d’ailleurs pas rare d’en entendre un m’appeler en hurlant

« Maaammmaaaaaaaa ! », pendant que les autres

répondent en chœur « Hou hou houhouuuuuuu ! ». Il est

vrai qu’ils ont écouté Queen bien plus souvent qu’Henri

Dès. Et que nos visites à Montreux passent inlassablement

par l’imposant bronze du bord du Lac.

Avec le recul, je réalise que grâce à Freddie

Mercury, j’ai découvert un nombre important

de notions qui ont forgé l’adulte que je tente

encore de devenir. On citera notamment l’univers

queer, l’humour anglais, la meilleure façon

de passer l’aspirateur, et le fait que nos choix

importent moins que la façon dont nous les assumons.

Pour tout ça Freddie, je te dis merci.

RÉFLEXIONS, POSÉX

DANS MON LIT

Dr. Hazbi est enseignantx à diverses universités

romandes, programmateurx à la Fête du Slip

et compose de la musique albacore sous le nom

de Yougo Girl.

Couche

#1

Ne soyons pas que queer. Soyons géopolitiques

aussi, soyons économiques.

Rappelons-nous que nous battre pour

une amélioration des conditions économiques

aide tout autant les personnes

queer et fragilisées que nos chemins de

déconstruction. Avoir accès à l’éducation,

la santé, la politique, c’est tout aussi

important que de discuter des pronoms

et de la matrice sexe-genre-désir.

#2 Est-ce qu’on peut réellement dire du langage

épicène qu’il est inclusif ? Je suis

d’accord qu’il inclut plusieurs identités de

genre, mais il exclut les personnes qui ont

des difficultés avec la langue française,

presque à en devenir élitiste. Je dirais

plutôt qu’il est visibilisant. Un langage

réellement inclusif, pour moi, serait un

langage où seuls les radicaux des mots

sont utilisés, sans les déclinaisons.

#3 Je me réjouis du jour où je pourrai fumer

de la Swiss Fenty.

#4 Je me souviendrai toujours du pincement

au cœur que j’ai eu quand ma mère m’a

dit qu’elle s’était affamée pour pouvoir

m’acheter du lait quand j’étais bébé. Elle

en a fait des sacrifices ! Je sens qu’elle

m’aime. Je le sais. Comment conjuguer

cet amour infini avec son rejet lorsque

j’ai fait mon premier coming out ? Est-ce

qu’elle m’aimait seulement pour la projection

qu’elle avait de moi ?

20 Société 360 MARS 2021

N 201

Société 21



LA RENCONTRE

Idole de la nouvelle scène LGBTQ+, Yelle rafle la mise avec des clips sexy et un

style de la trempe des icônes absolues. Interview.

© Jerome Lobato

Ovni pop rescapé de MySpace dans le paysage de la

chanson française, Yelle a conquis le monde entier.

Derrière les couleurs acidulées et les punchlines à lire

entre les lignes, Julie Budet et son compagnon Jean-

François Perrier, alias GrandMarnier, composent des

morceaux « pour pleurer et danser en même temps ».

On aime. En septembre 2020, le duo sortait L’Ère du

Verseau, un quatrième album porté aux nues par la

critique et les fans. Aussitôt culte, forcément. Et ce

n’est certainement pas son concert reporté prévu

aux Docks de Lausanne en décembre qui va nous faire

changer d’avis. « Allô, Julie? », on lui dit « tu», elle répond

en « nous ».

Tu es très suivie par la communauté LGBTQ+, comment

expliques-tu ce lien?

Il s’est fait naturellement. Depuis nos débuts,

la liberté de ton de nos textes permet à

nos fans de s'y reconnaître. En venant à nos

concerts, ils savent que le public est bienveillant,

respectueux et que tout le monde

a sa place.

Tu parles d’un espace de liberté en quelque sorte ?

C’est ce que nous revendiquons dans nos

chansons. Sur scène et dans nos clips, je ne

me bride pas et ne m’autocensure jamais.

Notre message est : « Faites attention à la

personne à côté de vous, chacun a le droit

de s’exprimer dans le respect de l’autre. »

Propos

recueillis par

Alexandre

Lanz

Que t’inspire la communauté LGBTQ+ ?

Elle m’inspire cette liberté d’être soi-même.

Une liberté qui s’obtient par des combats

qui ne sont pas identiques partout dans le

monde, ou même d’une région à l’autre d’un

même pays. Entre la ville et la campagne par

exemple, j’imagine qu’on ressent un niveau

d’acceptation différent.

«J’ai

toujour s

aimé

doubles

messages»

les

Qu’en est-il en Bretagne, d’où tu viens ?

J’ai eu la chance de grandir dans une famille

très ouverte, sans aucun tabou et mes parents

avaient des amis gays. J’avais une

ouverture d’esprit que d’autres n’avaient

pas forcément autour de moi.

Qu’est-ce qui te touche le plus dans ce combat ?

Je suis émue par les jeunes qui se font virer

de chez eux après avoir fait leur coming-out.

Il m’est impossible de comprendre comment

on peut rejeter son enfant pour cette

raison, c’est extrêmement violent. En plus

cela demande tant de courage de s’exprimer

pour être ce que l’on veut être ! J’ai

l’intention de me rapprocher d’associations

pour les soutenir.

Ton nom d’artiste, acronyme de You Enjoy Life, se

prononce comme le pronom neutre iel. Quel regard

portes-tu sur les questions de genre actuelles ?

Je trouve la fluidité pour les jeunes générations

23 – celles et ceux qui ont 18 ans

aujourd’hui – très positive. Notre regard est

en train de changer. Quand j’étais au lycée,

on assistait aux prémices, mais ce n’était

pas simple de parler d’homosexualité pour

mes amis, ils ne le revendiquaient pas.

Aujourd’hui, il y a plus de partages d’histoires

entre les adolescents, leurs proches et leurs

parents. Il existe également des soutiens extérieurs

et des outils pour comprendre, se

faire aider, se libérer lorsqu’on n’y parvient

pas tout seul. Tout n’est pas parfait, il reste

du chemin à faire.

22 CULTURE

360 MARS 2021 N 201 CULTURE

23



Une figure LGBTQ+ qui t’inspire ?

Quand j’étais enfant et que je chantais dans

ma chambre, je me déguisais en Madonna.

Je récupérais les collants déchirés de ma

mère et j’en faisais des gants et des tenues.

J’adorais m’imaginer en elle. Elle amenait

cette énergie très sexuelle qui m'inspirait

déjà beaucoup à l’époque. Je la trouvais

révolutionnaire et incroyable !

Elle t’a donné le goût de la provoc’ ?

Ça a tellement infusé depuis que je suisgamine,

ça doit bien transpirer d’une manière

ou d’une autre!

On parle d’icône gay dans son cas, le terme fonctionne

pour toi ?

Je suis trop timide pour le revendiquer, mais

j’avoue que quand des fans me le disent, ça

me fait plaisir. Moi qui était subjuguée par

des artistes telles que Kylie Minogue ou Lio

et Mylène Farmer en France, je trouve ça

chouette d’être considérée comme un icône !

On sent que c’est sincère chez toi. Parle-nous de ton

clip tellement gay J’veux un chien.

Haha, le mec est beau, n’est-ce pas ? je trouvais

cool que son corps parle autant aux

hétéros qu’aux homos, ça crée une sorte

d’imagerie où tout le monde peut piocher

son fantasme perso.

Le clip de Je t’aime encore a été réalisé par Loïc

Prigent et le coiffeur Charlie Le Mindu. Êtes-vous

une clique ?

Il s'agit avant tout de rencontres et de coups

de cœur amicaux. En Bretagne, on n'a pas vraiment

de bande, je préfère papillonner avec

Le clip très hot de J’veux un chien,

extrait de l’album L’ère du Verseau de Yelle.

des amis de milieux différents. On connaît

Charlie depuis longtemps, nous le croisions

en soirée à Paris et nous avions déjà

collaboré sur le clip de Comme un enfant

en 2011. Loïc et lui se sont rencontrés artistiquement

par notre intermédiaire, j’aime

bien cette idée. Quant à Nicolas Maury, on

se parlait déjà sur Instagram, puis un jour

une amie commune nous a réunis. Nous

avons passé quatre jours à nous marrer !

On a immédiatement pensé à lui pour le clip

deVue d’en face.

As-tu le trac avant de monter sur scène ?

Beaucoup, mais jamais au point de me sentir

mal physiquement. Dix minutes avant d’y

aller, ça monte très sérieusement. Le trac est

un phénomène assez étrange, à la fois désagréable

et nécessaire pour me mettre dans

l’état que je souhaite atteindre sur scène. Ça

se dissipe très vite, le temps d’une chanson

et je me trouve dans autre chose.

Dans quoi ?

C’est une grosse montée d’adrénaline, une

vraie drogue. Il y a vraiment ce truc de shoot

de joie et d’amour qui fait qu’on a envie d’y retourner

tout de suite. Après un concert, je suis

épuisée et surexcitée. Il me faut trois heures

pour que ça redescende. C’est chimique.

Un concert qui t’a marquée ?

The Cure au festival des Vieilles Charrues il

y a quelques années. J’étais complètement

happée par Robert Smith, il est tellement

captivant. Je ne pouvais pas me détacher

de sa personne et de sa voix. Il y avait une

vraie communion avec le public.

Le disque qui a changé ta vie ?

Running Up That Hill de Kate Bush. Je l’ai entendue

la première fois quand j’avais 9 ans,

nous partions en vacances la nuit avec

mes parents. Il faisait chaud, je regardais

les phares des voitures que l’on croisait, je

garde un souvenir très cinématographique

de la basse et la rythmique de ce morceau.

J’ai immédiatement ressenti la force qu’il

me transmettait et me donne encore aujourd’hui.

L’esthétique et la manière de créer

de Kate Bush sont fascinantes.

Comment définis-tu la musique de Yelle ?

C’est de la musique pour pleurer et danser

en même temps.

Tu définis ton album L’Ère du Verseau comme léger et

profond, mélancolique. Des caractéristiques que l’on

retrouve chez William Sheller, dont tu as repris récemment

Le carnet à spirales. Pourquoi cette chanson?

J’avais commencé une petite liste des

morceaux de la chanson française qui me

plaisent, William Sheller arrive toujours en

premier. J’ai redécouvert ses albums lorsqu’on

m’a offert un coffret il y a quelques années.

Ses orchestrations sont incroyables.

Pour moi, il aurait dû avoir plus de succès. Sa

musique est-elle trop grandiose pour être

comprise ? C’est un génie.

Depuis tes débuts, ton image est très pop, acidulée et colorée.

D’où te vient et comment nourris-tu cette culture ?

Sans être une dingo de mode, ma mère achetait

parfois le ELLE. J’étais fascinée par certaines

publicités et l’univers de Jean-Paul Gaultier.

J’avais ce goût du vêtement, de le transformer,

de m’amuser avec. Le déguisement a toujours

fait partie du jeu. Ensuite quand j’ai commencé,

j’ai toujours tenu à me changer sur scène, aussi

pour vaincre ma timidité. Grâce à mon métier,

j’ai eu accès à des designers dont j’aime le

travail. La mode a ce pouvoir de libérer et permet

d’explorer d’autres façons de s’exprimer,

c’est génial.

Parle-nous de ta collaboration avec Pierre Alexis

Hermet, ton styliste sur L'ère du Verseau et les clips

qui l’accompagnent.

Nous nous sommes rencontrés sur la pochette

de l’album, pour lequel nous voulions

une ambiance plus sombre, des formes et

des matières différentes de ce que nous

avions expérimenté jusque-là. Il a ce regard

qui lui permet de voir d’où on vient et où il

peut nous emmener. Pendant le shooting

à Varsovie et les essais lumière, il tentait

des trucs. Je sentais bien qu’il n’était pas

content. À un moment il m’a dit : « Viens

avec moi dans la loge, je voudrais essayer

quelque chose. » Il m’a fait une sorte de

cagoule avec un body, c’était le twist manquant

qui faisait le lien avec cet univers un

peu marin. Dans le clip de J’veux un chien, je

porte cette combinaison très sexy et qui en

même temps ne montre que peu de peau.

J’ai toujours aimé les doubles messages.

Et le manteau couette de Vue d’en face ?

On voulait quelque chose qui s’apparente au

cocon. Tant qu'à s'envelopper, Pierre Alexis a

imaginé ce manteau en couette, à l’image de

ce que l’on vit en ce moment de confinement.

Mais je tiens à préciser que le scénario avait

été écrit avant !

© Marcin Kempski

As-tu déjà fait des collab avec des designers de mode ?

Pas pour l’instant. Enfin, nous avons eu une

collab avec Reebok, mais c’est plus une

marque qu’un designer. J’ai beaucoup travaillé

avec le designer belge Jean-Paul

Lespagnard pour la création de mes costumes

et sur les pochettes d’albums. Avec Jean-

Charles de Castelbajac, c’était plutôt pour

du live et les clips. Et puis Jean-Paul Gaultier

m’a prêté des tenues pour un clip aussi.

Et Moschino ?

C’est marrant, parce que Jeremy Scott est un

des premiers à m’avoir prêté des vêtements

quand je tournais aux États-Unis. Il m’envoyait

des sacs remplis de fringues, des pièces incroyables

de l’époque de sa collection pour

Adidas, des joggings complètement fous que

je garde précieusement!

24 CULTURE

360 MARS 2021 N • 201

CULTURE

25



SOUS-SECTION

SOUS-SECTION

L’ADC bénéficie du soutien de la Ville de Genève

Pour sa transition au Pavillon de la danse, l’ADC bénéficie du soutien de la Loterie romande

design—oficio.ch / photo—Voetvolk / Lisbeth Gruwez—Piano Works Debussy © Danny Willems

Place Sturm 1

1206 Genève

pavillon-adc.ch

26 Société 360 MARS 2021 N 201 Société 27



QUOTIENT QUEER

Colin Firth,

Hétéro à la ville, Colin Firth revient dans le rôle d’un homme gay dans le film

dramatique Supernova du réalisateur britannique Harry Macqueen. Nous avons

calculé son Quotient Queer.

Le grand public l’avait découvert dans les mégahits

au cinéma Bridget Jones et Love Actually au début

des années 2000. Puis, la communauté LGBTQ+ avait

fondu pour lui dans A Single Man, adaptation du roman

de Christopher Isherwood et premier long-métrage

de Tom Ford en 2009. Sa bouleversante interprétation

d’un prof d’université gay endeuillé dans le Los

Angelesdes années 1960 lui avait valu la récompense

du Meilleur acteur aux BAFTA Awards en 2010. En

2021, l’acteur de 60 ans revient avec un autre rôle de

personnage gay dans Supernova aux côtés de Stanley

Tucci, dont le récit s’articule autour de la démence. Et

pose au passage une nouvelle fois la question de la

légitimité d’un acteur hétérosexuel pour interpréter

un personnage homosexuel. Voici quelques éléments

de réponses par Colin Firth « himself ».

Stanley Tucci et Colin Firth

dans Supernova de Harry Macqueen

fidèle allié

Par

Alexandre

Lanz

UN HÉTÉRO DANS LA PEAU D’UN GAY

Interrogé à ce propos par le magazine gay

Attitude, l’acteur anglais ne prend pas la

chose à la légère, bien au contraire. « Après

toutes ces années à jouer la comédie, je n'ai

pas de position définitive à ce sujet, a-t-il répondu.

« La question est toujours d'actualité,

j'y ai beaucoup réfléchi avant de faire

mon choix. À chaque fois, pour chacun des

rôles que je choisis, j’ai le sentiment d’une

présomption insupportable. Quel droit aurais-je

de jouer tel ou tel personnage ? C’est

toujours le point de départ. Que sais-je de

la vie de cette personne ? Comment puis-je

présumer une appropriation du vécu de cette

personne, comment essayer de la représenter

? » Hmmm, ça en fait des questions,

Colin. Pour éviter de répondre à la question

initiale ? Cette façon d’éluder est un rien agaçante,

tout comme la question de départ estiment

certain·e·x·s. Mais elle n’enlève rien

à la charge dramatique des personnages

7 homosexuels interprétés par l’acteur, diamétralement

opposé aux clichés du genre.

10

LE COMBAT CONTRE

L’HOMOPHOBIE À HOLLYWOOD

Dans la course pour l’Oscar du meilleur acteur

pour son rôle dans A Single Man en 2010,

c’est Jeff Bridges qui avait remporté la statuette

cette année-là. Questionné à propos

de la difficulté d’incarner un personnage gay

quelques mois plus tard, Colin Firth répondait

– non sans humour – dans les colonnes

du Japan Times : « C’est marrant, on ne se

demande jamais comment jouer un hétérosexuel.

Cela dépend du caractère individuel.

Quant au « risque » en tant qu’acteur, on voit

très souvent dans des films hollywoodiens

des acteurs pas gay jouer un personnage

gay et être nominés pour des prix. Un gay

incarnant un gay n’est généralement pas

nominé. Je pense que le système hollywoodien

maintient les acteurs homosexuels

dans le placard, l’industrie les discrimine.

Il y a encore très peu d’hommes de premier

plan ouvertement homosexuels ». Des propos

recueillis il y a dix ans, beaucoup d’eau

a heureusement coulé sous les ponts depuis.

Ce qui est certain, c’est que Colin Firth

a toujours œuvré pour la visibilité des acteurs

homosexuels dans l’industrie du cinéma.

UNE FILMOGRAPHIE TRÈS GAY

Il y a une vie avant et après A Single Man dans

la carrière de Colin Firth. En 1988, l’acteur

âgé de 28 ans campait son premier personnage

gay dans le film culte Apartment Zero.

Il y incarnait un Britannique sous le charme

d’un Américain terroriste de droite. Vingt ans

plus tard et deux ans avant le film de Tom

Ford, il rejoignait le casting de la comédie

musicale Mamma Mia ! dans le rôle de Harry

Bright, un des pères possibles de Sophie ouvertement

gay. Lui-même dit ne pas s’expliquer

pourquoi on lui propose systématiquement

ce type de rôle. « Peut-être parce que

je suis timide, ou simplement parce que je

suis britannique, déclarait-il toujours dans

le Japan Times. À Hollywood, on considère

qu’être anglais et gay est assez proche. » En

tout cas à celles et ceux qui en doutent encore,

Colin Firth prouve que l’humour anglais

8

l’emporte à tous les coups.

RÉSULTATS :

HUMAIN AVANT TOUT

Avec 8.3 sur 10, Colin Firth remporte un score

plus qu’honorable. Loin d’être le premier acteur

à incarner des rôles gay à l’écran, il ne

force pas le trait contrairement à beaucoup

d’autres. Par ailleurs, il n’est jamais tenté par

une interprétation clownesque de ses rôles,

qu’il prend très au sérieux. Diamétralement

opposé à l’inoubliable Michel Serrault dans

La Cage Aux Folles, Colin Firth ne cherche

pas à « performer » et dans le cas de George

dans A Single Man, l’acteur réussit ce tour de

force de rendre secondaire le fait que son personnage

soit homosexuel, jusqu’à le rendre

terriblement humain, tout simplement. Ce qui

se révèle certainement le meilleur des éclairages

sur la communauté LGBTQ+.

BARÈME DU QQ

8.3

1 hostile

2 méprisant

3 indifférent

4 opportuniste

5 amical

6 défenseur

7 allié

8 engagé

9 très engagé

10 militant

10

28 CULTURE

360 MARS 2021 N 201 CULTURE

29



MODE

Jaune & joli·e·x

© PANTONE

RÊVONS ENSEMBLE

à une réouverture prochaine !

Comme chaque année, l’entreprise

américaine PANTONE ® a défini son

nuancier de couleurs stars pour 2021 :

le jaune « illuminating » flanqué du gris

« ultimate ».

Par

Alexandre

Lanz

Sans PANTONE ® , l’iconographie des pages de votre

magazine préféré serait limitée au noir et blanc et tous

les gris entre deux. Pareil pour votre vestiaire. Pas

que cela nous déplaise, mais avouons, au-delà des

50 nuances de gris, la vie serait monotone sans les

couleurs de l’arc-en-ciel. Pantone est le spécialiste

des nuanciers de couleurs sans qui les imprimeurs et

les stylistes seraient bien embêtés. Après la mauvaise

farce de 2020, le fournisseur de couleurs a décidé d’irradier

2021 du jaune PANTONE ® 13-0647 Illuminating,

dont l’éclat sera réhaussé du PANTONE ® 17-5104

Ultimate Gray tout au long de l’année. Comme le yin

et yang. « Un mariage de couleurs véhiculant un message

de force et d’espoir à la fois durable et édifiant »,

comme le titrait l’entreprise dans son communiqué de

presse du 10 décembre 2020.

LA COMBI CHROMATIQUE CHOC

Le jaune confirme ainsi son ère de gloire, initiée il

y a maintenant quelques saisons avec des Tee et

sweatshirts couleur canari. On peut donc continuer

de les mettre sans avoir à rougir en jaune. Le

gris quant à lui n’est pas qu’un simple faire-valoir,

bien au contraire. Sa force tranquille est solide

comme un roc. L’étoffe des grands, la classe discrète

des seigneurs. Leatrice Eiseman, directrice

exécutive du Pantone Color Institute, déclare :

« La sélection de deux couleurs indépendantes

met en évidence l’idée qu’il ne s’agit pas d’une

seule couleur ou d’une seule personne, mais de

plusieurs. Cette union exprime un message de

positivité soutenu par la force d’âme. » La messe

est dite. Ne reste plus qu’à faire le tri dans nos

placards pour ne conserver que la plus éclatante

des combinaisons chromatiques.

30 CULTURE

360 MARS 2021

www.vernier.ch/culture

Culture et communication · 022 306 07 80 · scc@vernier.ch

www.vernier.ch/billetterie · VilledeVernier

théâtre

danse

musique

cirque

© Gabin Corredor / Beaver Dam



Les pépites de mars

VAGIN PIRATE

Vagin Pirate est un compte Instagram lesbien romand qui s’engage à amplifier

les messages des communautés marginalisées.

Notre Vagin est un vagin mental, c’est un totem au féminisme

queer, anti-terf et intersectionnel. Nous partageons

notre temps entre le repost de memes sur Cate

Blanchett et la colle sauvage de stickers dans les rues

romandes. Cuisinées par un algorithme gavé de pop music,

drama gouins et nouvelles chaudes du Queeristan,

les pépites étincelantes de Vagin Pirate sont servies

tout en douceur, avec une pointe de cyprine. Voici notre

sélection de gourmandises multicolores.

Instagram : @vaginpirate

Ezra Michel

appel appel

aux aux

écritures

écritures

LGBTIQ+

Paulette éditrice crée

Grattaculs, une collection d’écrits LGBTIQ+.

LE COUP DE CŒUR

GOTTMIK

La visibilité trans dans le monde drag

L'année démarre en trombe dans l’univers de la culture

drag mainstream : RuPaul Drag Race nous gratifie pas

d’une, mais de deux saisons : la saison 13 version US

et la saison 2 version UK. Notons que la version US

accueille pour la première fois un concurrent trans :

Gottmik, jeune makeup artiste basé à L.A. qui a su

nous emballer dès le premier épisode par son talent

et ses looks très léchés. Petit coup de cœur pour les

sublimes visuels de lancement de la saison créés par

le Studio Moross, studio de design dirigé par Kate

Moross, artiste, designer et activiste trans* vivant à

Londres qui a également signé l'identité visuelle du

comeback des Spice Girls en 2019 !

Vagin Pirate aime la visibilité que Gottmik

amène aux personnes trans* dans le monde

drag. Le show ayant souvent été épinglé pour

sa transphobie par le passé, nous saluons

cet avancement et espérons encore plus

d’évolutions pour le futur.

Découvrir la suite de notre sélection

sur 360.ch

LA DOUCEUR

EZRA MICHEL

Man of my dreams

Jeune artiste trans vivant à L.A., Ezra Michel propose

son premier titre Man of my Dreams en écoute sur

Spotify ou version Lyrics Video sur YouTube. Dans

une chanson pleine de douceur et de positivité, l’artiste

raconte qu’il est devenu l’homme de ses rêves

grâce à sa transition.

Vagin Pirate aime cette bulle d’amour et suit

la vie militante d’Ezra sur Instagram.

LA DOULEUR

KING PRINCESS

Pain

King Princess, l'auteure-compositrice-interprète de

Brooklyn, revient à la charge avec Pain, un single synthpop

très efficace, toujours co-produit par Mark Ronson.

Le hit est accompagné d’un superbe clip réalisé par sa

meuf, Quinn Wilson, également directrice artistique

de Lizzo. Selon King Princess, la vidéo a l’ambition de

« créer un clip lesbien qui lui aurait fait du bien à l’adolescence

». En parlant sans détour d’homosexualité

dans ses chansons depuis ses débuts, King Princess

offre à la communauté lesbienne une représentation

mainstream bénéfique.

Vagin Pirate aime la douleur, l’attitude, et

glousse en voyant Stella Maxwell, l’ex de

Kristen Stewart et Miley Cyrus, lécher le visage

de King Princess. Pain!

© DR

Pour l’inaugurer, elle lance un

appel aux écritures.

Tous formats et genres bienvenus

Envoi en pdf jusqu’au dimanche 28 mars

contact@paulette-editrice.ch

Voir modalités sur www.paulette-editrice.ch

écrivez ce que vous avez

toujours eu envie de lire !

32 CULTURE

360 MARS 2021



CINÉMA

Revoyons

nos

classiques

Pour mieux patienter en attendant la réouverture des salles de cinéma, voici

notre sélection de films queer à voir et à revoir sans modération.

Par

Edmée Cuttat

De Carol à Maurice, en passant par Victor Victoria,

La vie d’Adèle ou Le Secret de Brokeback Mountain,

tous ces chefs-d’oeuvre ont marqué le cinéma d’une

empreinte queer. Pour se préparer à cette année prometteuse

en la matière, replongeons-nous dans ces

œuvres qui ont pavé le chemin sur grand écran.

CAROL

DE TODD HAYNES

sorti en 2015

Ce bijou de mélo adapté de Patricia Highsmith

évoque le coup de foudre condamné entre

une riche bourgeoise new-yorkaise homosexuelle

malheureuse dans son mariage et

une timide petite vendeuse subjuguée par sa

classe. Des regards, quelques mots, une paire

de gants oubliée et c’est l’étincelle... Face à

la caméra de Todd Haynes, Cate Blanchett et

Rooney Mara bousculent les normes d’une

Amérique des fifties corsetée, surfant sur les

différences sociales et sexuelles.

MOONLIGHT

DE BARRY JENKINS

sorti en 2016

Oscarisée en 2017, l’œuvre évoque trois

périodes-clé de l’existence de Chiron,

orphelin noir, pauvre, qui doit assumer son

homosexualité dans l’univers hostile du ghetto

de Miami miné par la drogue. Sa douloureuse

et bouleversante quête d’identité, faite

de rejets, de brimades et d’insultes, finira par

mener cet être déchiré à l’acceptation de soi.

Un film rare, sous haute tension, marqué par

la grâce et la sensualité.

Alex Hibbert

© David Bornfriend

Découvrir la suite de notre sélection

sur 360.ch

120 BATTEMENTS PAR MINUTE

DE ROBIN CAMPILLO

sorti en 2017

Grand Prix cannois l’année de sa sortie, le

film choral, fort et poignant, évoque la lutte

contre le sida dans les années 1990. Une

œuvre rare sur la nécessité d’alerter, mais

aussi de bousculer les choses dans une

mise en scène très maîtrisée où alternent

les scènes d’intimité, d’action et de débats.

Le réalisateur insiste beaucoup sur la libération

de la parole à cette époque. Un flot de

mots après dix ans d’une épidémie tragique,

ignorée, que traduisent de passionnantes

discussions entre les militants.

34 CULTURE

360 MARS 2021



SÉRIES TV

En une décennie, il est devenu Monsieur récits LGBTQ+ en

série sur les petits écrans. Sauf que devant la parfaite recette

Ryan Murphy, notre engouement commence à tiédir.

Par Antoine Bal

mais en étant maîtresses du récit. Il l’a fait avec Pose,

où de nombreuses actrices ou scénaristes trans* (MJ

Rodriguez, Janet Mock…) étaient d’ailleurs aux manettes

de la représentation de leurs propres identités, complexes,

imparfaites, entières quoi ! Et bien sûr qu’on a

autant besoin de ces visibilités à grande échelle que

des contes de renversement des codes et des pouvoirs.

PÉPITES DE

LA GALAXIE MURPHY

LE S

DE

The Proma achevé l’année 2020 sur Netflix, et nous

avec. Ryan Murphy n’aurait-il pas livré la fête de trop ?

Pourtant, quoique méfiants, on voulait croire aux

promesses faussement naïves de son dernier film.

Grâce à Meryl Streep surtout, sidérante dès les premières

minutes. C’est que Ryan Murphy, pape des

récits queer pour la grande diffusion, est connu pour

peupler d’étoiles ses créations, presque toujours

pour le meilleur : autour de sa muse, Sarah Paulson,

on retrouve Jessica Lange, Lady Gaga, Kathy Bates,

Angela Basset (American Horror Story) Julia Roberts

(The Normal Heart) ou encore Sharon Stone (Ratched).

Dans The Prom, Murphy convoque ses premières

amours de comédie musicale et

les années lycée de Glee, série qui l’a fait

connaître. Trois artistes de Broadway entachés

par la critique veulent se racheter une

âme et une réputation en sauvant une lycéenne

à qui l’on interdit d’assister au bal de

fin d’année en compagnie de sa petite amie.

L’homophobie devient la bonne cause à défendre

pour ce trio narcissique new-yorkais

venu faire la leçon dans un trou de l’Indiana. Le

seul vrai intérêt est que dans tout ça, Murphy

critique la condescendance de classe de

ses personnages et leur appropriation d’un

combat pour briller un peu plus eux-mêmes

REVANCHE DES OUTSIDERS

La première impression est toujours l’esthétique léchée,

généreuse voire jubilatoire. Ryan Murphy a le

talent des idées, de l’horrifique à la comédie ; l’amour

du cinéma, des figures oubliées, des idoles et des

correspondances. Génial, d’imaginer la vie de Miss

Ratched, nurse dérangée de Vol au-dessus d’un nid

de coucou ! Ou encore l’uchronie d’Hollywood, pour se

demander avec nous : Et si ? Et si à l’Âge d’Or du cinéma,

des personnes racisées avaient signé des scénarios

de blockbusters produits par des femmes ? Et si les

gays avaient pu percer tout en étant out ? Est-ce qu’on

aurait changé le monde ? C’est bien le projet Murphy :

réinventer le monde par la fiction, où les personnes

marginalisées prennent la lumière sans être victimes,

LOI S

MUR

PHY

The Prom(2020, Netflix)

de Ryan Murphy, avec Meryl Streep,

Nicole Kidman et James Corden…

S’ÉGARER DE TROP PRODUIRE ?

Mais dernièrement, la force s’étiole au profit

d’une répétition à l’identique du dénouement

« feel good » et tire-larmes. Parfois même,

alors qu’il veut tout renverser, Murphy flirte

avec le token racial sans se débarrasser vraiment

du trope du « sauveur blanc », quand les

vieux producteurs riches demeurent les faiseurs

de réussite à Hollywood. Et pour les opprimés,

la beauté Colgate semble le seul horizon

politique. The Prom en est l’exemple le

plus complaisant, qui s’éteint aussi vite qu’un

feu de bengale : l’édulcorant chanté et les

bons sentiments finissent par ennuyer sévère.

Même si le plaisir décomplexé des codes du genre

est assumé, la machine Murphy est comme trop bien

huilée. Trop sucrées, ses revanches minoritaires

manquent d’aspérités. Et pour le coup, c’est la loi des

séries. Hollywood au printemps, Ratched à l’automne.

Dans ces dernières productions, le malaise est perceptible

à chaque saison. Or on imagine bien que ce

n’est précisément pas l’objectif de Ryan Murphy.

Alors, produit-il trop, trop vite ? Prochain essai sur

Netflix : Monster : The Jeffrey Dahmer Story, une mini-série

autour de la vie de ce sérial killer ouvertement

gay, coupable d’avoir tué et démembré 17 hommes

entre 1978 et 1991. C’est en tournage, espérons que

ses égarements ne soient que passagers et désavouent

cette décevante loi de Murphy.

RATCHED

(2020, Netflix, série)

comme co-créateur

Elle reste la plus convaincante de

ses productions de l’année 2020,

tant les costumes, les couleurs et

l’esthétique fifties sont jouissives.

Dans ce prequel de Vol au-dessus

d’un nid de coucou, Sarah Paulson

(photo ci-dessus) captive, Judy Davis

en cheffe infirmière encore plus.

THE NORMAL HEART

(2014, HBO, téléfilm)

comme réalisateur

Mark Ruffalo bouleverse en activiste

gay complexe qui lutte pour

faire reconnaître la maladie aux

pouvoirs publics dans les toutes premières

années sida à New York. Le

téléfilm est d’une justesse à pleurer

sur canapé.

POSE

(2018, Canal+, série)

comme créateur

et producteur

Dans le New York des années 80,

entre queerness, drame et voguing,

la flamboyance des personnages

de Pose traverse l’histoire de leurs

luttes aux avant-postes du pire de

la pandémie de sida.

CIRCUS OF BOOKS

(2019, Netflix, film)

comme producteur

La réalisatrice de ce surprenant documentaire

raconte comment

ses parents deviennent un peu par

hasard propriétaires du sex-shop

gay le plus emblématique de West

Hollywood.

© Netflix

36 CULTURE 360 MARS 2021 N 201 CULTURE 37



EXPO

FaireFace

L’artiste rom bosnien Mersud Selman a longtemps tu son homosexualité par

crainte d’être rejeté. De cette honte est né « Do not spit in my face », expo virtuelle

où il fait son coming out et invite d’autres personnes LGBTQ+ issues des

Balkans à briser le silence.

Par

Annabelle

Georgen

« Ne me crachez pas dessus » : avec ce titre

qui claque, Mersud Selman veut attirer l’attention

sur la stigmatisation dont sont victimes

les personnes queer. Et surtout faire face

aux préjugés, aux insultes, aux menaces, s’y

confronter une bonne fois pour toutes, pour

mieux les balayer d’un revers de main. L’artiste

peintre de 34 ans a lui-même longtemps vécu

dans le placard. À Bihać, la ville du nord-ouest

de Bosnie-Herzégovine où il a grandi, l’homosexualité

reste aujourd’hui encore taboue.

« Au sein de ma famille et de la communauté

rom, il n’y avait personne avec qui j’aurais

pu parler de mon orientation sexuelle quand

j’étais jeune. Je vivais dans la honte de qui

j’étais », explique Mersud, qui a gardé le silence

jusqu’à il y a peu.

Mersud Selman s’est lancé dans une série d’autoportraits

jouant avec les codes du masculin et du féminin.

Enfant, il préfère jouer à la poupée plutôt

qu’avec les jouets destinés aux garçons.

Mais c’est vers le dessin et la peinture qu’il

se tourne très tôt, suivant l’exemple d’un

de ses grands frères, Ferdinand, qui devient

à la fois son mentor et son modèle.

Les deux frères affûtent leur talent en se

dessinant l’un l’autre sur les trottoirs du

village. Une fois grands, ils partiront ensemble

faire leurs études à l’Académie

des beaux-arts de Banja Luka. C’est là, loin

de ses parents et du village, que Mersud

osera pour la première fois dévoiler son

homosexualité à quelques camarades

d’études. Mais ce n’est que lorsqu’il s’installera

à Berlin en 2017, après un passage

à Budapest, qu’il osera enfin commencer

à vivre sans se cacher.

ROUGE SANG

Spécialisé dans le portrait, Mersud croque ses contemporain·e·s

d’un trait habile, rapide, qui donne

l’impression d’être suspendu dans le mouvement.

Les tons chauds dominent dans ses toiles : l’orangé,

le pourpre, et le rouge surtout. « C’est la couleur

de l’amour mais aussi celle du sang », explique

Mersud, qui rappelle qu’il est « un enfant de la

guerre ». Durant le conflit de Bosnie-Herzégovine,

au début des années 1990, il a vu beaucoup de

sang couler dans les rues. Des images traumatiques

qui se sont incrustées dans sa mémoire et

qu’il sublime aujourd’hui par la peinture, en célébrant

le vivant. « Le rouge est devenu la couleur

qui symbolise mon identité », explique Mersud.

Quand la pandémie de coronavirus a mis

le monde sur pause au printemps 2020

et qu’il s’est retrouvé confiné dans sa

chambre-atelier à Berlin, Mersud a eu envie

de mettre à profit ce temps passé seul,

en retrait du monde, pour se lancer dans

une série d’autoportraits, en prenant cette

fois pour fil rouge son identité gay : Jouant

avec les codes du masculin et du féminin, il

se représente tantôt maquillé, tantôt paré

d’un rang de perles, ou bien posant avec

les couleurs du drapeau LGBTQ+. C’est sur

cette trame intime qu’il a bâti l’exposition

virtuelle « Do not spit in my face », en ligne

depuis fin janvier.

L’artiste veut également avec cette exposition

donner la parole à d’autres personnes

LGBTQ+ membres de la communauté rom ou

vivant dans les Balkans. « Je veux les encourager

à ne pas avoir honte de qui elles sont,

à ne pas être obligées de porter un masque

toute leur vie. » Recueillir des témoignages

par le biais d’un appel lancé sur les réseaux

sociaux n’a pas été une mince affaire, plusieurs

intéressé·e·x·s s’étant défilé·e·x·s au

dernier moment par peur des représailles,

d’autres ayant refusé de se faire tirer le portrait.

Sa bouteille à la mer a également valu

à Mersud plusieurs messages anonymes insultants

et menaçants. Pas découragé pour

autant, il s’en est servi comme point de départ

pour une performance en ligne. Pensée

comme un work in progress, sa galerie de

portraits devrait s’étoffer au fil des mois.

Visiter l’exposition :

mersudselman.com/do-not-spit-in-my-face/

RÉCONCILIER DEUX IDENTITÉS

Ce projet constitue pour l’artiste une tentative émancipatrice

de réconcilier deux identités stigmatisées

qui coexistent en lui : rom et gay. Une double appartenance

difficile à assumer au sein de la société

bosniaque, très religieuse et encore régentée par

des valeurs patriarcales. Mersud s’est donc résolu

à franchir une nouvelle étape : faire son coming-out

vis-à-vis de sa famille restée au pays. « J’ai appelé

ma mère en visioconférence et je lui ai annoncé que

j’aimais les hommes. Jusque-là, je n’avais jamais osé

lui en parler car j’avais honte et peur de sa réaction »,

explique Mersud. Contrairement à ses craintes, sa

mère a plutôt bien réagi et a même accepté de prendre

part à l’exposition.

38 CULTURE 360 MARS 2021 N 201 CULTURE 39



MUSIQUE

Les albums qui donnent

des frissons

Par Joshua Orsi

AISH DEVINE

THE SEX ISSUE

CLAUD

SUPER MONSTER

ALBERTINE SARGES

THE STICKY FINGERS

LE COUP DE CŒUR DU MOIS

ARLO PARKS

COLLAPSED IN SUNBEAMS

Transgressive Records

Sorti le 29 Janvier, Collapsed In Sunbeams nous parle

de tristesse, de blessures et surtout de guérison. Anaïs

Oluwatoyin Estelle Marinho nous offre un mélange de

néo soul, de R’n’B et de jazz racontant son adolescence

et les personnes qui l’ont forgée. Un portrait

magnifique d’une génération mélancolique née dans

les années 2000, bercé dans le chagrin et perdu dans

la violence du monde actuel sans outils ni vision d’un

futur possible. Un sentiment si bien exprimé dans un

de ces premiers morceaux, Super Sad Generation.

Nous partageons ici les albums qui magnétisent

ce début d’année. Tous ces

disques sont disponibles en version

physique chez votre disquaire favori.

AISH DEVINE

THE SEX ISSUE

Auto Production

Le titre du disque dit tout : le deuxième

album d’Aish Devine, artiste

indien basé à New York, analyse

l’amour et la sexualité modernes.

Un bel assortiment explosif d’électro

et de pop contemporaine.

CLAUD

SUPER MONSTER

Saddest Factory Records

Premier artiste signé sur le nouveau

label de Phoebe Bridgers, Claud sort

un adorable disque de bedroom pop.

Un genre musical qui évoque le sentiment

que le tout a été conçu en toute

intimité dans sa propre chambre.

ALBERTINE SARGES

THE STICKY FINGERS

Moshi Moshi

Avec un mélange de post-punk et

d’art pop à la David Byrne ou même

Kate Bush, la chanteuse berlinoise

nous plonge tout droit dans la théorie

féministe, sa bisexualité et les

stéréotypes de genre.

40 Culture 360 MARS 2021



ÉVASION

Weekend à

© Suisse Tourisme

OÙ MANGER LE SOIR

On ne peut pas se tromper avec le Bottegone del Vino

au centre de Lugano. La qualité de la carte des vins et

des mets, tous d’inspiration italienne, est comblée par

l’ambiance allègre et l’accueil, toujours très sympa. Plus

économique, non moins gourmand et LGBTQ+ friendly, la

pizza du Grotto Valletta saura mettre vos papilles en émoi.

Changement de décor pour une ambiance

dolce vita au bord de l’eau : l’Antica Osteria

del Porto Lugano s’impose comme l’atout

romantique du séjour.

Bottegone del Vino, Via Magatti 3

Grotto Valletta, Via dei Platani 1, Massagno

Antica Osteria del Porto Lugano, Via Foce 9

OÙ VOIR UNE EXPO

Offspace itinérant depuis 2013, Sonnenstube est dédié

à l’art contemporain et parfois à la musique avec

des concerts live. Signifiant la chambre ensoleillée en

suisse alémanique, le terme est utilisé par nos voisins

germanophones pour décrire le Tessin.

Inauguré en septembre 2015, le centre culturel

LAC – acronyme de Lugano Arte e Cultura –

est également une adresse incontournable du

circuit des arts visuels, de la musique et des

arts de la scène. Son impressionnante architecture

est le fruit du tessinois Ivano Gianola.

diesonnenstube.ch

LAC Lugano, Piazza Bernardino Luini 6

On dirait le Sud, pourtant c’est la Suisse : le Tessin

demeure une valeur sûre du tourisme helvétique.

Au Top 3 des villes distillant le glamour à la tessinoise,

il y a Locarno la cinématographique, Ascona

la chic, mais aussi Lugano et son charme 100%

suisse à mi-chemin entre un Rio miniature et une

Riviera étincelant de son luxe passé. S’y rendre en

train avec le Gotthard Panorama Express transforme

le voyage en périple enchanteur. En 2018, Lugano

organisait sa toute première Gay Pride. Sans briller

par le foisonnement de ses activités queer – quasi

inexistantes – la ville n’est pas non plus une ville

hostile à la communauté LGBTQ+, généralement

bien accueillie. Cerise sur le gâteau, l’Italie n’est pas

loin. Pendant que Côme et Milan font les yeux doux

au Tessin, Carlotta Zarattini, activiste culturelle,

co-fondatrice de l’association Turba et la résidence

artistique Lago Mio, partage quelques bons plans.

Lugano

Lugano est la destination parfaite pour un weekend placé sous le signe de la

dolce vita. À quelques heures de train seulement.

Par

Alexandre

Lanz

OÙ POSER SES VALISES

Situé en plein centre-ville, le studio-maison indépendant

de l’Impact Hub Ticino jouit néanmoins d’un

environnement verdoyant avec son grand jardin.

Tout confort avec son design soigné et son lit matrimonial,

le studio de 35 m 2 est adapté à des séjours

de courte ou de longue durée.

À proximité des magasins et du centre

historique, il dispose également d’un parking

privé. Workalcooliques, soyez rassuré·e·x·s

: la villa principale abritant l’espace

de travail de l’Impact Hub Ticino vous accueille

également les bras ouverts.

ticino.impacthub.net/airbnb

OÙ PRENDRE L’APÉRO

Pour les amateurs de Negroni, tous les chemins

mènent au Bar Laura. L’endroit est accueillant et

festif, sans prise de tête. Les passionné·e·x·s de vins

naturels trouveront leur compte au Bar Pinard.

Quant à celles et ceux en quête d’une certaine

idée du luxe d’antan, le bar Belle

Époque de l’Hôtel Splendide Royal offre

une vue imprenable sur le lac.

Bar Laura, Via Emilio Bossi 3

Bar Pinard, Piazza Molino Nuovo 5

Hotel Splendide Royal Lugano, Riva Antonio Caccia 7

OÙ DANSER

Un long drink ou un fancy cocktail dans un bar après le

digestif ? Celles et ceux qui acquiescent seront comblé·e·x·s

à l’Auberge. Bar au rez-de-chaussée, piste

de danse au premier, l’endroit est relax, accueillant

et on s’entend parler au bar.

L’âge n’étant qu’un chiffre, les plus de 35 ans

ne se sentiront pas les figurants de Jurassic

Park, argument positif et non négligeable.

Auberge Lugano, Corso Enrico Pestalozzi 21

OÙ FAIRE DU SPORT

Le lac est incontestablement la véritable splendeur

de Lugano, en toute saison. Rien de tel que de commencer

sa journée par un jogging dans le somptueux

Parco Ciani au bord de l’eau.

Les accros au yoga ne seront pas en reste avec

les cours proposés par Yoga Roof à Lugano

Sud ou Lugano centre. Inscriptions en ligne.

yogaroof.com

OÙ PRENDRE SON PETIT-DÉJEUNER

L’air de rien, le petit-déjeuner détermine souvent l’humeur

du reste de la journée. Un café, un croissant et

plus si affinités : pour bien la commencer et établir

son plan d’attaque de découverte de la ville, le Mauri

Concept saura concilier harmonieusement le réveil,

l’appétit du matin et les perspectives à venir.

Mauri Concept, Via Gerolamo Vegezzi 4

OÙ FAIRE DU SHOPPING

Versace n’y a plus pignon sur rue, mais la Via Nassa

demeure la shopping avenue principale de Lugano.

Notre coup de cœur est l’indétrônable antre du design

et de la déco Nordisk Store sur plusieurs étages.

Un must. Fly me to the Monn : la mode classique,

intemporelle et de qualité a également

son enseigne prestigieuse à Lugano.

Nordisk Store, Via Nassa 1

Monn, Piazza Dante 10

OÙ SE RELAXER

Conciliant santé du corps et de l’âme,rien ne vaut

un traitement ayurveda pour rester en pleine forme.

C’est exactement ce que propose le centre spécialisé

dans la médecine traditionnelle indienne Jayurveda,

tenu par Jay et ses mains d’expert.

Notons que dans son cas, son prénom ne

rime pas avec gay ! Le Gothic Sauna saura

assouvir les ardeurs des mecs en quête de

sensations fortes.

Jayurveda, Via G. Carducci 4

Gothic Sauna, Vicolo Vecchio 3, Massagno

42 Culture 360 MARS 2021

N • 201

Culture 43



C

hange

m ent

SOUS-SECTION

Lutte contre

les discriminations

Egalité des droits pour

les personnes LGBTIQ+

Pôle Trans*

Service juridique

FRAGRANCES

Par

Greta

Gratos

Permanence

d’accueil

Conseils

Soutien, accompagnement, écoute

Pôle Familles LGBTQ+

Groupe Tamalou

360

lutte pour

vos droits

et contre les

discriminations

envers les LGBTIQ+

SOUTENEZ !

Soutenez l’association en devenant

membre et/ou en faisant un don

La cotisation annuelle

est de CHF 55.– pour les membres individuels

et de CHF 100.– pour les couples ou les familles

Tous dons petits ou grands

sont les bienvenus

Par e-banking – Postfinance

IBAN CH50 0900 0000 1759 6500 6

Par internet

association360.ch

Formation et sensibilisation

association360.ch

Echanges, convivialité

Projet Aîné.e.s

LGBTQ+

Groupe Babayagas

Groupe BiPan+

Exit mes chants nocturnes. Pour aller vers quoi ? Je ne sais vraiment. Car, si elle

peut en prendre les atours, la Nuit ne devient pas pour autant le Jour. Changement.

Ce mot des temps que j’entends

si souvent ; mot-désir exacerbé

par les vagues successives d’une

crise qui trop longtemps dure,

révèle injustices, peurs, antagonismes.

Offre une tribune de choix

à celleux qui détiennent la vérité ultime,

affirment, s’érigent en juges,

en prophète·sse·x·s. Se prétendent

chantres de la Liberté et, dissimulé·e·x·s

ou non derrière une obscène

lettre Q, diffusent à mots plus ou

moins travestis des idées des plus

nauséabondes.

Maître·sse·x·s en pâtisserie, iels

cultivent la science du mille-feuille,

mêlant aux couches de leur crême

édulcorée xénophobie, racisme,

sexisme ; tout ce contre quoi, avec

mes pauvres mots, je m’insurge et

me bats. Iels s’autoproclament parfois

gourou·te·x·s auréolé·e·x·s de

lumière divine, rassembleur·euse·s

de brebis et autruches égarées,

tout en prônant l’exclusion. On

pourrait en sourire si le nombre

de leurs ouailles n’allait croissant.

Et plus je les entends, moins je

supporte leurs menaces à peine

déguisées de spécialistes de tout

qui déchirent l’Humanité, promettant

l’enfer à celleux qui ne sont

pas assez éveillé·e·x·s à leur goût

et n’appliquent pas à la lettre leurs

injonctions professorales. À ces

certitudes frelatées je préfère mes

doutes ; ils sont mon véhicule, tout

comme la bienveillance est mon

carburant. Face à ces déchaînements

de violence plus ou moins

brune, je tombe parfois en panne

sèche. Je me refuse à toute moralisation

mais ne peux me résoudre

à faire silence. Car la résistance,

le changement, ne leur en déplaise,

ça n’est pas ça. En tous les

cas pas pour moi qui me voudrais,

comme le dit si bien Marie-Monique

Robin*, lanceuse d’avenir plutôt que

d’alerte. Mais avant, il me faudrait

sortir de la confusion qui règne et

m’entrave.

*Journaliste d’investigation, réalisatrice et

écrivaine française.

44 Culture 360 MARS 2021

N 201

Culture 45



HOROSCOPE

La tête dans

les étoiles

Un peu d’esprit, d’humour et d’astrologie

fantaisiste, la formule est infaillible

: pour garder les pieds sur terre,

rien ne vaut un plongeon la tête dans

les étoiles. Ce mois-ci, le signe des

Poissons est à l’honneur.

Par

Marlon

Dietrich

CANCER

21 JUN – 22 JUL

LION

23 JUL – 22 AOÛ

VIERGE

23 AOÛ – 22 SEP

BALANCE

23 SEP – 22 OCT

SIGNE

DU MOIS

POISSONS

19 FÉV – 20 MAR

Libre·x·s sur le marché et les apps de drague, le temps

est venu de laisser votre timidité légendaire au placard

pour montrer votre tempérament de feu. En couple, il

va falloir redoubler d’imagination pour rompre avec le

traintrain quotidien. Côté job, vous faites preuve d’audace

sur la longueur pour un projet qui vous tient à cœur,

maintenez le cap. Quant à votre santé, optez pour de

bonnes petites bouffes préparées avec amour plutôt

que des snacks vite faits, ça requinque. Votre charisme

naturel et votre dynamisme se verront décuplés de pareil

bon traitement pour votre corps et âme.

Stop aux scènes de ménages,

on se réconcilie en

couple. Les autres, libre·x·s

comme l’air, vous n’êtes

pas presser de vous ranger

à deux et c’est tant mieux,

profitez ! Côté tirelire, un

budget un peu ric-rac s’impose

pour éviter de s’endetter

avant l’été. Le moral

qui flanche ? Remontez la

pente en vous bichonnant

à coup de petits plats gourmands

et réconfortants.

Votre pouvoir de séduction

est au beau fixe. Par contre,

pour les personnes en couple,

essayez de rompre avec

cette sale manie de vous

mettre en compèt’ avec

votre partenaire, ça devient

lassant à la longue. Tout

vous sourit au boulot avec

une opportunité irrésistible

et une augmentation de salaire

en conséquence. Une

cure de vitamines s’impose

pour mordre dans le printemps

à pleines dents.

Entre engueulades et réconciliations,

votre couple

c’est les montagnes russes.

Faites gaffe à ne pas trop

user votre partenaire. Les

âmes solitaires pourraient

bien devoir changer certaines

vieilles habitudes,

une rencontre amoureuse

est imminente. La

souplesse est de mise au

boulot, où tout peut changer

du jour au lendemain.

Maintenez le cap, vous avez

le bon état d’esprit.

En couple, c’est tendu mais

la complicité revient. Après

l’orage, l’accalmie. Le bonheur

de vos proches vous

est cher, vous y accordez

beaucoup de temps et

d’énergie qui vous revient

comme un boomerang.

Côté finances personnelles,

la période est propice à

des placements judicieux,

n’hésitez pas à demander

conseil auprès d’une personne

de confiance.

BÉLIER

21 MAR – 20 AVR

TAUREAU

20 AVR – 20 MAI

GÉMEAUX

21 MAI – 20 JUN

SCORPION

23 OCT – 21 NOV

SAGITTAIRE

22 NOV – 21 DÉC

CAPRICORNE

22 DÉC – 19 JAN

VERSEAU

20 JAN – 18 FÉV

Collages : Amina Belkasmi

Rien ni personne ne résiste

à votre charme,

votre sex-appeal fait des

ravages sur votre passage.

Même topo au boulot, ou

vous êtes prêt·e·x·s à déplacer

des montagnes et

ça vous réussit. Toutefois,

prenez garde à ne pas vous

faire entourlouper par une

personne malintentionnée.

Les fumeur·euse·x·s

en quête de booster pourraient

bien arrêter la cigarette

et se mettre à manger

bio.

Votre tempérament fougueux

refait des siennes

au sein de votre couple.

Restez à l’écoute pour

rester constructif·ve·x·s.

Single, le coup de foudre se

cache peut-être au coin de

la rue, gardez l’œil alerte !

En attendant, vous cartonnez

dans votre vie professionnelle,

tout vous réussit

comme vous l’aviez prévu.

Rien de tel que le sport et

la relaxation pour lâcher la

pression.

Non, vous n’hallucinez pas :

tous les regards se retournent

sur votre passage. En

couple, votre niveau d’exigence

aurait tendance à

vous frustrer, commencez

par montrer l’exemple si

vous souhaitez que votre

partenaire se surpasse à

votre égard. Côté finances,

une promotion doublée

d’une augmentation de salaire

n’est pas impossible. A

vous de jouer. En attendant

le printemps, privilégiez les

activités en plein air. Rien de

tel qu’une rando pour maintenir

le niveau d’énergie et

d’inspiration !

Vous êtes d’humeur débordante

et cela vous

réussit. En couple, vous

déballez tout et les attentions

que vous accordez

à votre partenaire donneront

du piquant dans

votre vie. Célibataire,

vous n’avez que la fête en

tête. Votre carrière traverse

également une belle

phase, encline à enrichir

votre carnet d’adresses.

L’humour sauve des vies,

vous le savez bien.

Le bilan provisoire sur

votre couple est positif,

vous roucoulez au diapason.

Si vous êtes sur le

marché et que votre quête

d’amour vous semble laborieuse,

souvenez-vous

qu’il n’y a rien de tel que

la sincérité pour séduire.

Tombez le masque, le

reste suivra. Vous aviez

quelque peu délaissé ce

projet qui vous tenait tant

à cœur ? Il est peut-être

temps de le reconsidérer :

l’heure est au changement

de cap professionnel.

Célibataire, l’aventure

c’est l’aventure ! Rien ne

vous arrête. En couple,

vous ne supportez plus

qu’on vous dicte votre

comportement et vous

avez bien raison. Ça passe

ou ça casse ! On ne vous le

dira jamais assez, le tact

et la diplomatie sont vos

meilleurs atouts au travail.

Usez-en pour arriver

à vos fins. Comptez sur

vos proches, qui sauront

vous changer les idées et

recharger vos batteries

pour relever tous les défis

que vous vous êtes fixés !

Une rencontre pourrait

déboucher sur une relation

sérieuse, locale

ou à longue distance.

Prêt·e·x·s pour l’aventure

romanesque ? En couple

tout roule, vous êtes comblé·e·x·s.

Un peu raplapla

au boulot, de nouvelles

responsabilités pourraient

booster votre égo qui en a

besoin. Côté santé, vous

vous sentez infaillible·x·s

et combattif·ve·x·s, vous

n’avez pas tort. Ce qui ne

veut pas dire que vous

êtes indestructible·x·s.

Ménagez-vous et évitez

de tomber dans les excès.

46 Culture 360 MARS 2021 N 201 Culture 47



Agenda

DEVIENS MEMBRE DE PVA-GENÈVE EN 2021

VOTRE SOUTIEN EST ESSENTIEL, CETTE ANNÉE PLUS QUE LES PRÉCÉDENTES !

LA COTISATION 2021 RESTE À CHF 60.- À VERSER SUR LE COMPTE:

PVA-GENÈVE CCP 12-4193-9

VOTRE NOUVELLE CARTE DE MEMBRE VOUS PARVIENDRA DIRECTEMENT CHEZ VOUS !!!

Association Genevoise

des Personnes Vivant Avec

le VIH/SIDA et leurs proches

Lu. / Je. 14h00 - 18h00

Rue des Pâquis 35

1201 Genève - 5ème étage

T. +41 22 732 44 45

secretariat@pvageneve.ch

www.pvageneve.ch

Soutenez PVA en devenant

membre ou en faisant un don :

PVA-Genève, 1201 Genève

CCP 12-4193-9

C’EST L’HEURE DE LA DECLARATION D’IMPÔTS ?

LE SERVICE SOCIAL DE PVA EST LÀ POUR VOUS AIDER

Bonjour à toutes et à tous,

En ces temps quelques peu déroutant nous souhaitons vous informer que le Service

Social est ouvert de manière différente en 2021.

Chloé, notre assistante sociale, est présente dans les locaux de PVA de 14h à 17h

les lundis et les vendredis, une semaine sur deux.

« Chères et chers membres de PVA,

Je vous invite à me contacter soit par téléphone au 022/732.44.45 dans les jours

et horaires d’ouverture du Service Social , soit à l’adresse mail : assistantesociale@

pvageneve.ch afin de faire un premier point sur votre demande. Ensuite nous

conviendrons d’une manière de procéder: soit nous pourrons mettre en place un

échange dans les locaux de PVA avec la mise en place des mesures de sécurité

sanitaire (port du masque obligatoire, 5 personnes maximum dans les locaux, etc.),

soit par courrier par exemple.

En ce qui concerne les déclarations d’impôts, je vous propose d’envoyer par courrier

ou de venir déposer vos documents dans la boîte aux lettres de l’association

directement. Je me charge de faire le nécessaire (seule) au bureau avant de vous

renvoyer, à votre domicile, votre déclaration à signer et à transmettre au service

compétent.

Dans l’attente de pouvoir vous revoir, je vous souhaite tout le meilleur. »

Chloé

Assistante Social

PVA - Genève

TOUTES LES COULEURS

DE NOS DIFFERENCES

Lancement de la Consultation

en santé sexu-elle de Lestime

Une consultation de prévention et promotion de

la santé, ouverte à toutes les femmes, transgenres,

non-binaires, intersexes, qui se reconnaissent comme

lesbiennes, et aussi toutes celle·x·s non uniquement

hétérosexuelles qui ne se reconnaissent pas dans

ces catégories.

DE QUOI PARLE-T-ON ?

◗ Fonctionnement du

corps (clitoris, plaisir,

grossesse, ménopause,

etc.) et projet d’enfant

◗ Compréhension

du cycle (mensuel),

des cycles (puberté,

ménopause, etc.)

◗ Questionnements sur

l’orientation affective

et sexuelle et le genre

◗ Infections sexuellement transmissibles (IST)

et dépistages

◗ SexualitéS et désir

◗ Difficultés relationnelles, toutes formes de violence

Les consultations sont assurées dans un cadre bienveillant

par des professionnelles de la santé sexuelle

appartenant à la communauté LGBTIQ+.

En partenariat avec Dialogai

Rendez-vous et questions : entre.nous.consult@lestime.ch

Langues : Français, italien et anglais

Et bien plus encore sur

www.lestime.ch

Le Pôle Santé de Lestime propose une Consultation en Santé

Sexuelle pour les femmes qui ont du sexe avec les femmes.

Contact : entre.nous.consult@gmail.com

Devenez membre en vous inscrivant sur notre site

Faire un don : CCP 17-177538-7

Lestime, communauté lesbienne

5, rue de l‘Industrie | 1201 Genève | Tél. 022 797 27 14

info@lestime.ch | www.lestime.ch



© Lara Défayes

LE QUESTIONNAIRE DE PROUST

Entre la sortie de son dernier single Molosse et celle de son deuxième album

en 2021, la chanteuse lausannoise se prête au jeu du questionnaire de Proust,

un grand classique dont on ne se lasse pas. Elle a sélectionné dix questions

auxquelles elle répond en toute sincérité.

LA QUALITÉ QUE JE PRÉFÈRE CHEZ UNE FEMME

Je suis sapiosexuelle, à savoir attirée par les personnes

intelligentes, instruites et charismatiques

selon la définition officielle, mais j’aime aussi les

femmes quand elles sont un peu masculines et

qu’elles me font un peu peur.

MON PRINCIPAL DÉFAUT

Il m’arrive de jouer l’avocat du diable et de m’attirer

les foudres de mon entourage. Au fond de moi

je sais que c’est mal, mais le moment venu je ne

peux plus faire marche arrière, « because I have »

ma dignité !

MON RÊVE DE BONHEUR

Top secret. Juste un indice : dedans il y a une personne

que j’aime et une cabane sur une plage déserte,

un peu comme au début de la saison 3 de

Casa de Papel. Si quelqu’un nous traque, c’est

uniquement pour nous servir des cocktails Old

Fashioned.

LE PAYS OÙ JE DÉSIRERAIS VIVRE

Celui où l’amour et l’humour surpasseraient les

idées.

MES HÉROÏNES FAVORITES DANS LA FICTION

Le lieutenant Ellen Ripley (Alien), la Dalva de Jim

Harrison et Dee Dee McCall dans Rick Hunter et…

ok, j’avoue : Fantômette en bibliothèque rose.

Sandor,

avocate du

diable

jamais

rassasiée

MES COMPOSITEURS PRÉFÉRÉS

Philip Glass, Bryan Ferry, Michel Berger et Véronique

Sanson.

MES PEINTRES FAVORIS

J’élargis aux artistes, photographes et performers :

Gerhard Richter, Steve McQueen, Richard Billingham,

Nan Goldin, Cindy Sherman, et tant d’autres.

En Suisse, je dirais le photographe Christian Lutz

que j’adore.

LE DON DE LA NATURE QUE JE VOUDRAIS AVOIR

Le sentiment de satiété. Je crois que les fabricants

ont omis de le mettre dans le système. Plus

sérieusement, je suis heureuse d’être en bonne

santé!

COMMENT J’AIMERAIS MOURIR

Accompagnée ! Je sais que c’est beaucoup demander

mais pitié, que quelqu’un me donne la

main pour l’éternité. Et pas n’importe qui !

MON ÉTAT D’ESPRIT ACTUEL

Je suis actuellement dans une période très créative.

Je déborde d’idées et je ne sais pas comment

je vais pouvoir me canaliser. J’espère les réaliser

toutes les unes après les autres, mais je sais déjà

qu’une vie ne me suffira pas. J’ai le feu sacré et je

me sens portée par des forces invisibles.

En ces temps difficiles, il est essentiel de

retisser du lien social, reconstruire des

ponts entre nous, visibiliser nos luttes et

continuer à éduquer et à former nos communautés

et allié.e.x.s. Nous souhaitons

que cette prochaine Pride soit le lieu de

partages heureux et créatifs.

Surprenez-nous !

Avec le slogan « FIER·E·X·S ! » l’équipe de

la Geneva Pride 2021 met l’inclusion et les

diversités au centre de sa programmation

Une place toute particulière sera faite aux

projets locaux présentés sous des formes

alternatives : infiltrer les espaces publics,

imaginer des projets itinérants à travers

des lieux insolites de Genève comme de

Suisse romande. Nous cherchons à multiplier

les genres artistiques : expositions et

installations, fresques, capsules performatives

ou performances, musique et concerts,

tables rondes, ateliers, projections,

mapping …

Appel à projets

Geneva Pride 2021

Participez à la programmation artistique et

culturelle militante de la Geneva Pride 2021!

Cette année la Geneva Pride aura lieu du 8 au 12 septembre 2021

Nous prévoyons également une série d’événements en juin 2021

(sous réserve des mesures sanitaires en vigueur)

Geneva Pride 2021

Personnes physiques, collectifs et/ou associations,

envoyez-nous vos projets avant

le 31 mars 2021. Vous trouverez toutes les

informations et le formulaire d’inscription

sur notre site internet :

www.genevapride.ch

50 Culture

360 MARS 2021



SOUS-SECTION

Semaine de l’égalité

en Ville de Genève

Graphisme & illustration : olga-olga.ch

ELLE-X-S

SONT DANS

LA PLACE

du 27 février au 8 mars 2021

www.semaine-egalite.ch

!

52 Culture 360 MARS 2021

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