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BUSINESS
GRAND
ANGLE
Stratégie commerciale
ARRÊTEZ
DE VENDRE,
MAIS AIDEZ
VOS CONTACTS
À ACHETER
Fini le temps de la vente “pushy” où le
commercial efficace était celui qui, connaissant
par cœur ses produits, déroulait une présentation
standardisée. Face à l’expertise grandissante
du client, à la pression concurrentielle et dans
un contexte de crise sanitaire qui impose
des relations commerciales pérennes, place
à la vente “aidante”. Il ne s’agit plus de créer
le besoin, mais de le faire émerger pour
soulager l’acheteur, qu’il soit
professionnel ou pas. Ce qui
demande une connaissance
précise du client et de ses
enjeux, un intérêt sincère
pour sa situation, et une
organisation rigoureuse
pour faire vivre la
relation. Bienvenue
dans l’univers du
vendeur-bâtisseur
(de solutions) !
SOMMAIRE
P. 26
Aiguisez votre ciblage
P. 30
Positionnez-vous
en “business partner”
P. 34
« Il faut dépasser
l’image de l’acheteur
“cost killer” »
Nathalie Leroy, déléguée
générale du CNA
(Conseil National
des Achats)
juin 2021 / Numéro 377 / Action Co 25
BUSINESS
graNd
aNglE
ArrêTez
de vendre
mais aidez
vos contacts
à acheter
Marketing. Pour être pertinente,
l’aide à l’achat doit s’adresser
au bon interlocuteur, au bon
moment et dans de bonnes
conditions. Ce qui nécessite
d’organiser un ciblage fin
et de pratiquer une veille
des enjeux du prospect.
AIGUISEZ
VOTRE CIBLAGE
→ Docteur-vendeur. L’appellation vous paraît
farfelue ? Pourtant, imaginez-vous un commercial
à l’écoute, son stylo-stéthoscope aiguisé, l’ordonnance
à portée de main, et qui s’apprêterait, après
diagnostic, à vous soulager de la douleur qui vous
a fait consulter… Chez les Anglo-Saxons, le terme
de “pain” (douleur) est ainsi employé pour qualifier
le besoin chez l’acheteur potentiel. Le commercial
endosse alors le rôle gratifiant de soulager les soucis
de son interlocuteur… un peu comme un soignant.
Un changement de prisme, qui enterre l’image
négative du commercial “rentre-dedans” et motive
les vendeurs en donnant à leur action du sens et de
la valeur. Cette approche novatrice implique tout
d’abord de bien cibler ses acheteurs-clé. « Pour aider
à acheter, il ne s’agit pas de s’escrimer à essayer de
vendre une offre à quelqu’un qui n’en a pas besoin,
rappelle Bruno Delezenne, fondateur du cabinet
de coaching commercial Friday Link. Au contraire,
il faut identifier précisément la cible à laquelle
on sera réellement utile. »
Classiquement, les experts en développement
commercial conseillent de créer des Persona :
« Si vous vendez une
offre très innovante,
le client idéal doit
posséder un côté
pionnier. »
Bruno Delezenne, fondateur
de Friday Link.
ces profils de client/prospect idéal, les plus
complets possibles et qui vont permettre d’avoir une
approche commerciale personnalisée. À qui dois-je
idéalement m’adresser ? Dans quelle situation
a-t-il besoin de mon offre ? Pourquoi ? Et quels sont
les bénéfices que je peux précisément lui apporter,
comparé à la concurrence ? « La découverte commerciale
va consister à déceler le contexte, le besoin et
les motivations de l’acheteur – sur le plan de son
entreprise, et au plan personnel, résume Benjamin
Floquet, fondateur de la société de conseil Analyz
Consulting. Une fois ces trois thématiques renseignées,
on pourra répondre avec une offre adaptée. »
reconstituer le puzzle des décideurs
Mieux : selon Benjamin Floquet, lorsqu’on a répondu
efficacement à ces trois paramètres, le critère du prix
devient secondaire. En B to B, il est primordial
d’identifier la chaîne complète des décideurs,
le poids des uns et des autres dans la décision et de
valider, bien sûr, l’existence d’un budget pour l’offre
que l’on soumet. En reprenant la métaphore de la
douleur, Bruno Delezenne précise : « En interne,
la douleur liée à la non-réponse à un besoin peut être
partagée par plusieurs décideurs : la douleur d’un
acheteur qui n’arrive pas à acheter va devenir la
douleur d’un directeur technique qui ne pourra pas
produire, celle d’un directeur commercial qui ne
pourra pas prévoir ses ventes ainsi que celle d’un
directeur financier aux prises avec les budgets. »
D’où l’intérêt pour le commercial de se mettre dans
la posture d’un aidant qui va régler un problème
interne qui sans lui, risquerait de faire tache d’huile.
26 Action Co / Numéro 377 / juin 2021 Plus d’actualités sur www.actionco.fr
À condition bien sûr, de savoir comment l’entreprise
cible fonctionne. D’une certaine façon, il s’agit
d’enquêter au sein de cette dernière, de glaner
des éléments qui vont permettre de reconstituer
un puzzle donnant l’image complète de l’interlocuteur.
Autre caractéristique du B to B : « Il ne faut pas
perdre de vue que l’on s’adresse à des gens qui ont
une fonction, par exemple la direction des achats,
mais qui ont aussi des enjeux personnels, des
moteurs et des peurs, qu’il est bon de connaître »,
prévient Charles Vérot, managing director de
Mercuri International France. Et de citer à titre
d’exemple : « Une entreprise de services numériques
Avis d’expert
Adoptez la bonne conjugaison
PLUS SUR ACTIONCO.FR
Prospecter et vendre
en temps de crise
→ À quel temps doit-on s’adresser à son client lors d’une vente-conseil ? Pour
Bruno Delezenne (Friday Link), la question est loin d’être incongrue et elle doit
même faire l’objet de toutes les précautions. « Lorsqu’on évoque les soucis
que vit un client, on parle au présent, estime le consultant. Le mode conditionnel
est utilisé pour suggérer la manière dont il pourrait être aidé. Mais à un
moment, il faudra employer le futur. » Ce temps plus directif est celui de l’action
concrète : « Nous pourrons faire ceci, nous interviendrons comme cela… » Attention
cependant à ne pas employer le futur trop vite, mais au moment opportun. Enfin,
un autre moment-clé du dialogue est le passage du “vous” et du “je” (« Vous
avez tel souci, je pourrais vous en libérer… »), au “nous”. Typiquement : « Comment
allons-nous convaincre votre patron ? ». Là aussi, tout est affaire de tact pour
se lancer au bon moment. Enfin, il est recommandé de tester l’acceptation
de ces formulations, qui permettent d’entrer dans la co-construction.
qui vend les compétences d’un expert placé en régie
chez un client peut ainsi se trouver confrontée aux
réticences d’un manager. Ce dernier peut redouter
de se voir personnellement déstabilisé, mis en
danger par l’intervention d’un expert extérieur. »
Dans la vente “aidante”, il faut ainsi déployer une
analyse fine des hommes et des situations.
Cultiver la curiosité
Sur le plan de l’entreprise-cible, il est nécessaire
de comprendre son ADN et ses valeurs, pour entrer
en résonance : « Si vous vendez une offre très
innovante, le client idéal doit posséder un côté
pionnier, suggère Bruno Delezenne. Rien ne sert
d’aller la proposer à une entreprise qui ne jure que
par les solutions éprouvées de longue date. » Plus
qu’une découverte, les experts en développement
commercial prônent une véritable investigation :
« Il s’agit d’inverser la tendance chez les commerciaux
qui passent beaucoup de temps à travailler
sur ce qu’ils vont dire, alors qu’ils devraient en
passer sur ce qu’ils doivent connaître et chercher
sur leur interlocuteur », prévient Charles Vérot.
La curiosité, le regard neuf sur son prospect ou
client, le questionnement sans crainte deviennent
ainsi des qualités utiles. Côté prospection, il est
conseillé de ne négliger aucune source : site web de
l’entreprise, médias, rapport annuel, compte rendu
d’assemblée générale et tout support mentionnant
la société. Le positionnement d’expert du commercial
l’amène en outre à recourir à des outils qualitatifs
pour générer des leads. « Une prospection davantage
orientée vers le “parler client” passe par exemple,
juin 2021 / Numéro 377 / Action Co 27
BUSINESS
grand
angle
Arrêtez
de vendre
mais aidez
vos contacts
à acheter
par la publication de posts sur internet, de livres
blancs qui apportent des solutions concrètes à la
résolution de certains problèmes ou encore l’animation
de webinars », indique Bruno Delezenne.
Prospecter en ligne
Les réseaux sociaux prennent de l’ampleur
en tant que source de prospection, car ils sont
riches d’informations, facilement accessibles
et permettent une prise de contact simple et rapide.
« LinkedIn, par exemple, renseigne de manière
plus personnelle sur les contacts à l’intérieur de
l’entreprise », rappelle Benjamin Floquet. En regardant
ce qu’une cible potentielle like, ce qu’elle poste,
Côté prospection, il est conseillé
de ne négliger aucune source : site
web de l’entreprise, médias, rapport
annuel, compte-rendu d’assemblée
générale...
commente ou partage, on obtient des informations
sur ses centres d’intérêt. Le but étant d’essayer
de trouver un terrain commun.
Par exemple, une DRH qui like un salon professionnel
ou qui y a pris la parole fait état d’un centre
d’intérêt. Il est alors plus facile, comme entrée en
matière, de signaler que l’on a soi-même visité ce
salon et d’échanger nos impressions. Pour Benjamin
Floquet, s’être bien renseigné en amont sur l’entreprise
et sur l’acheteur permet de bâtir une accroche
qui va toucher la cible. C’est fondamental lors d’un
appel téléphonique, qui représente encore la grosse
majorité des prospections, et où il faut avoir un
impact rapide dans les 10-15 premières secondes.
La clé étant bien entendu d’adapter son discours :
parler de retour sur investissement ou d’intérêt
financier à une assistante commerciale n’aura
« Les réseaux sociaux
renseignent de manière
personnelle sur les
contacts au sein de
l’entreprise. »
Benjamin Floquet, fondateur
d’Analyz Consulting.
Trois questions à
« Il faut se
sentir concerné
par la situation
du client »
Philippe Chaventré, directeur de la BU
Print solutions, sales and delivery chez HP
→→En quoi consiste, chez HP,
le fait d’“aider à acheter” ?
Il s’agit d’être dans une démarche de vente consultative,
où le commercial comprend les enjeux
de son client et l’aide à répondre au mieux
aux attentes de ses propres clients, internes
et externes.
→→Comment mettre cela en œuvre ?
Il faut élargir le champ des conversations avec
son client : s’intéresser par exemple à sa transformation
digitale en détail, à la question
de la RSE, au fonctionnement interne de l’entreprise,
aux projets… Cette information riche va
permettre au commercial de sensibiliser l’acheteur
et les décideurs internes sur les bonnes
solutions, dans un esprit de co-construction
et de progression.
→→Quelles qualités cela implique-t-il
de la part du commercial ?
Un bon commercial doit être curieux et nourrir
sa curiosité en se renseignant sur le client, en
l’interrogeant sans crainte, afin de comprendre
ses centres d’intérêt et de les faire converger
vers les siens. Cela passe par de la formation,
de l’entraînement, et par de la sincérité.
Pour bien vendre, il faut se sentir concerné.
que peut d’impact, contrairement à l’effet produit
sur un dirigeant. Enfin, les experts en développement
commercial s’accordent tous à dire que les
rendez-vous physiques se raréfiant avec la crise,
il est nécessaire de réinventer les interactions avec
son prospect ou client. Notamment en travaillant
son approche pour la rendre plus percutante
et en allant à l’essentiel. Lorsqu’un prospect
ou client vous reçoit, ce n’est pas pour répondre
à des questions dont vous pouvez obtenir la réponse
sur internet, ou en passant deux coups de téléphone
à votre réseau. /// Olga Stancevic
28 Action Co / Numéro 377 / juin 2021 Plus d’actualités sur www.actionco.fr
BUSINESS
GRAND
ANGLE
ARRÊTEZ
DE VENDRE
MAIS AIDEZ
VOS CONTACTS
À ACHETER
Business. Exit, l’envoi de propositions
commerciales machinales,
l’argumentaire produits
standardisé, la relation clients
court-termiste. Aider à acheter
passe par une co-construction,
de liens enrichissants
et suivis pour les deux
parties.
POSITIONNEZ-VOUS
EN “BUSINESS PARTNER”
→ Une relation forte. C’est le but à atteindre vis-à-vis
de son client, pour tout commercial qui veut pratiquer
la vente-conseil et aider celui-ci à acheter.
Benjamin Floquet, fondateur de la société de conseil
Analyz Consulting, rappelle : « Il y a une différence
entre vendre un produit banalisé, par exemple un
lave-linge pour lequel le client a exprimé un besoin
clair, s’est bien renseigné et qu’il commande
éventuellement sur internet sans l’aide d’un
commercial, et la vente à valeur ajoutée. Dans ce
dernier cas, c’est au vendeur de trouver le besoin
spécifique du client, ce qui n’est pas facile et nécessite
une grande écoute, de l’empathie et de l’habileté.
Il faut également ne pas rester focalisé sur un produit
en particulier, mais adapter son offre. »
De cette relation humaine entre le commercial
et son interlocuteur (prospect ou client) naîtra la
confiance et un lien durable, gage de ventes à long
terme et quels que soient les aléas du marché.
Ce qui, en période de pandémie, est appréciable.
« Les populations
avant-vente apportant
un œil neuf se
développent. »
Charles Vérot, managing director
de Mercuri International France.
Pour Charles Vérot, managing director de Mercuri
International France : « Il est nécessaire de mettre
en place un véritable pilotage avec le client, pour lui
adresser le bon service, en lien avec toute l’information
que l’on collecte au fur et à mesure de la relation. »
Pour être au fait de l’environnement du client et de
ses besoins, il est donc nécessaire de mener une
campagne de sensibilisation auprès des publics
concernés par votre offre en interne : directeur
technique, services généraux ou tout autre opérationnel
utilisateur et éventuellement prescripteur
de la solution. Cette sensibilisation, ou inf luence
d’avant-vente, permettra de vendre un peu plus cher,
car dans une consultation, les offres proposées se
tiennent généralement dans un même ordre de prix.
Un fournisseur qui fait la différence en ayant marqué
les esprits en interne met toutes les chances de son côté.
Un partenariat transparent
Il s’agit par exemple de rassurer le directeur qualité
sur la fiabilité des matières premières, le directeur
juridique sur la conformité de la fabrication avec
le devoir de vigilance de la société en matière de
respect des droits humains, etc. « Les acheteurs
professionnels se trouvent soumis à un nombre
croissant de contraintes, souligne Laurent Carayon,
président de JP Tricard conseil, consultant en
dynamique commerciale. En plus des enjeux
30 Action Co / Numéro 377 / juin 2021 Plus d’actualités sur www.actionco.fr
primaires de l’achat, ils doivent répondre aux
exigences de RSE, choisir des fournisseurs exempts
de tout reproche en conformité avec la politique de
leur maison mère, répondre aux critères de qualité
tout en respectant la politique de coûts, faire attention
à l’image de leur entreprise… Le tout sur fond
de pénurie de certaines matières premières
et de complications logistiques. »
D’où l’appétence des acheteurs pour les vendeurs qui
peuvent leur apporter des solutions à leur problématique,
et les faire “grandir” en interne en les
positionnant comme force de proposition. Mais
attention : l’action du commercial doit être en
permanence concertée avec l’acheteur. Il doit tenir
ce dernier au courant de ses démarches d’inf luence
en interne dans l’entreprise cliente : qui il a rencontré,
quand, et pour parler de quoi ? « L’acheteur ne doit pas
se sentir court-circuité, et la transparence nourrit
la confiance entre les deux partenaires commerciaux
», prévient Laurent Carayon. Avantage :
l’acheteur peut avertir son fournisseur des faux pas
à éviter, des personnes à ne pas contacter car cela
risque d’être mal pris.
Faire avancer l’acheteur
La co-construction est donc LE levier de la vente
“aidante”. Elle intervient sous la forme de rencontres
suivies, d’interactions riches entre le fournisseur
et son client, tandem efficace. « Il faut qu’à chaque
fois que l’on dialogue avec l’acheteur, cela l’aide à
avancer. Dans la compréhension de son problème,
dans la vision de ce qui peut se faire dans son
environnement, etc., relève Bruno Delezenne,
dirigeant du cabinet Friday Link. La co-construction
intervient quand on se focalise sur les enjeux-clés,
Avis d’expert
Le CAB, pour embarquer vos clients
→ Nourrir la stratégie de votre entreprise grâce à des interactions riches avec
vos clients, dont vous augmenterez la fidélité. C’est le principe du CAB
“Customer Advisory Board”, un concept anglo-saxon de réunions récurrentes,
sorte de club à valeur ajoutée. « Le CAB n’est pas un panel, car il ne fait pas
réagir les clients sur un produit déjà lancé. Il concerne l’avenir, et des sujets de
prospective industrielle ou marché qui intéressent clients et fournisseurs. Par
exemple : « Quel profil pour le voyageur de demain ? », dans le domaine
du voyage d’affaires », explique Carole Poillerat, fondatrice du cabinet conseil
Comsense et animatrice de CAB. L’avantage pour l’initiateur de la démarche est
de créer un club de pairs, avec des décideurs venant d’entreprises différentes,
sorte de think tank propice au benchmark. Les rencontres permettent en outre
de valider les tendances pressenties auprès de son cœur de marché. Points
impératifs : l’animation des réunions par un tiers, la récurrence des rencontres
(par exemple une fois par an), un suivi et des comptes rendus rigoureux.
et que l’on préconise la façon de les traiter. C’est
l’expertise non-négociable du fournisseur qui intervient,
il sait de quoi son client a besoin. »
Le projet s’élabore ensuite ensemble, sur la base
du constat partagé, autour des points clés. Par exemple :
le calendrier, les échéances, les moyens. La solution
émerge en commun. Le fait de bâtir la solution
conjointement aide à acheter, car on achète plus
volontiers un projet auquel on a soi-même contribué.
Dans le domaine de l’assistance (produits d’assurance
spécifiques qui couvrent notamment le rapatriement,
la prise en charge en cas d’accident de voiture ou le
service aux personnes), les garanties se construisent
en se nourrissant de l’expérience des clients.
juin 2021 / Numéro 377 / Action Co 31
BUSINESS
GRAND
ANGLE
Témoignage
ARRÊTEZ
DE VENDRE
MAIS AIDEZ
VOS CONTACTS
À ACHETER
Chez LexisNexis,
des Customer
Success au service
de la réussite
Matthieu Hallaire, directeur commercial
et marketing de LexisNexis.
Philippe Fassier, directeur commercial d’Allianz
Partners France explique : « Nous organisons des
comités de pilotage trimestriels avec nos partenaires
distributeurs, de façon à faire un point sur le fonctionnement
de nos garanties et à partager les retours du
terrain. Nous proposons même à nos partenaires une
double écoute sur nos plateaux d’assistance, qui leur
permet d’être directement au fait des cas concrets que
nous rencontrons avec l’utilisateur final. » Autant
d’informations précieuses pour éventuellement
adapter, ajuster les produits et leur pertinence.
Le tout dans une dynamique de co-construction
inscrite dans la durée.
Synthétiser l’information
Dans cette nouvelle dimension de vente “aidante”,
l’argumentaire commercial classique cède donc la
place à des interactions, les plus régulières possibles.
« L’année 2020 a mis en exergue la nécessité de faire
court et efficace lorsque l’on se réunit à distance,
observe Charles Vérot. Plutôt que de voir son client
une fois par mois longuement, on peut décider
de le contacter brièvement 3 ou 4 fois en visio. »
Il est également possible de faire participer des collègues
utiles à ces visioconférences. D’ailleurs, des populations
avant-vente se développent dans les entreprises.
Elles sont là pour apporter un œil neuf et pour creuser
certains points ou interpeller le client sur des questions
que le commercial n’aborderait pas. Point important :
la multiplication des interactions avec le client nécessite
d’avoir une bonne organisation. Il s’agit de noter
les étapes et l’information recueillie, de la synthétiser
et de savoir comment l’utiliser ensuite. Enfin, dans
l’argumentation commerciale, qui reste un exercice
classique du vendeur, il faut là aussi se départir de
→ Spécialiste de l’information juridique, LexisNexis
propose des logiciels et des outils de documentation
et de veille aux professionnels du droit,
aux entreprises et aux collectivités. « Notre équipe
commerciale de 100 personnes apporte des
réponses aux clients sur leurs enjeux stratégiques,
tels que la digitalisation pour les cabinets d’avocats
et le gain de temps : pour une profession
libérale qui facture au temps passé, c’est capital.
Tout ceci nécessite une démarche de vente
conseil », explique Matthieu Hallaire, directeur
commercial et marketing de LexisNexis. Il s’agit
de bien comprendre l’organisation et les besoins
du client, par exemple en termes de conduite
du changement pour ses salariés ou de formation.
« Par ailleurs, nous avons lancé en 2017
un programme de co-création, Lexis Intelligence,
où les professionnels du droit sont amenés à concevoir
avec nous les produits de demain », précise
Mattieu Hallaire. Enfin, l’éditeur vient de créer
un département Customer Success, avec des profils
travaillant en binôme avec les commerciaux qu’ils
accompagnent sur le terrain pour renforcer l’écoute
client et la détection des nouveaux besoins.
certaines habitudes pour en adopter d’autres. « Il s’agit
de sortir de l’argumentaire produits, qui a un côté
rassurant pour les commerciaux, pour aller vers
l’argumentaire client. Montrer à l’acheteur que l’on
peut aller loin avec lui, car on a compris ses enjeux,
par exemple l’impact d’une nouvelle réglementation
sur son activité », souligne Laurent Carayon.
La palme de l’efficacité va aux commerciaux
capables de réaliser un storytelling, de capter les
interlocuteurs et de leur donner envie. Enfin, côté
retombées, les directeurs commerciaux interrogés
sur l’efficacité de la vente “aidante” estiment qu’elle a
contribué à développer leur business, à fidéliser leurs
clients, voire à augmenter leur NPS - Net promoter
score - qui marque la propension de ces derniers
à les recommander. /// OLGA STANCEVIC
32 Action Co / Numéro 377 / juin 2021 Plus d’actualités sur www.actionco.fr
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ARRÊTEZ
DE VENDRE
MAIS AIDEZ
VOS CONTACTS
À ACHETER
« IL « IL FAUT DÉPASSER
L’IMAGE DE DE L’ACHETEUR
“COST KILLER” » »
Le Conseil National
des Achats
- Créé en 1944.
- Plus de 15 000
acheteurs privés
et publics.
- 130 web conférences
organisées
l’an dernier.
Interview. Nathalie Leroy, déléguée
générale du CNA (Conseil National
des Achats) partage sa vision
de la relation entre acheteurs
et commerciaux.
Que vous inspire l’affirmation selon laquelle
les commerciaux doivent aider leurs clients
à acheter ?
La fonction achats s’est beaucoup transformée ces
dernières années. Les acheteurs prennent de nouvelles
responsabilités au sein de leurs entreprises, entrent
de plus en plus dans la gouvernance, doivent faire face
à de nouveaux enjeux tels que la RSE, la compliance*,
la supply chain. En résumé, un acheteur professionnel
doit aujourd’hui “faire moins cher”, plus “vert”, plus
sociétal, entre autres contraintes. La relation client/
fournisseur doit répondre à cette tendance, tendre vers
un lien constructif. L’heure est à une relation vraie où
aider à acheter est effectivement indispensable. Il n’est
pas question de confrontation, et il est temps de dépasser
l’image de l’acheteur “cost killer” et du vendeur
qui veut vendre le plus cher possible.
Quel est l’impact de la crise sanitaire
sur les relations client/fournisseur ?
La crise a exacerbé les enjeux, côté achats. Elle a
engendré des ruptures d’approvisionnement dans le
monde entier, avec des usines fonctionnant au ralenti,
et tout le monde a encore en tête ce qui s’est produit
avec les masques. La pression sur les acheteurs a été
énorme. C’est là où le partenariat client/fournisseur
est clé. Il faut nourrir le respect et la loyauté mutuels,
ce qui passe par le respect des engagements contractuels.
Or, la crise sanitaire a vu se produire des
comportements irrespectueux. C’est dommage,
car il y a toujours moyen de résoudre une mauvaise
passe par le dialogue, et en faisant preuve de solidarité.
Si un vendeur rencontre des difficultés, dues par
exemple, à l’explosion du coût de certaines matières
premières, il ne doit pas hésiter à en informer son
client et à en discuter. Il est possible de trouver
ensemble des solutions qui évitent d’en arriver au litige
et à la rupture du contrat. Et s’il y a conflit, mieux vaut
tenter de le résoudre d’abord par la médiation.
Quelles sont les qualités d’un commercial
pour aider son client à acheter ?
Le commercial doit être très à l’écoute de son client,
le questionner pour l’amener à faire émerger son
besoin, ce qui va conduire à proposer des solutions
adaptées. Aider à acheter consiste à répondre à un
besoin, mais aussi à aller au-delà de la simple présentation
d’un produit ou d’un service, pour créer de la
valeur, des bénéfices clients, à travers la solution
proposée. Le vendeur doit donc faire un travail de
recherche, pour bien connaître l’entreprise cliente,
ses valeurs et ses enjeux. Les bons commerciaux sont
ceux qui entretiennent une relation de confiance avec
leurs clients, loyaux, et qui leur portent un réel intérêt.
De leur côté, les acheteurs se sont considérablement
professionnalisés et ont gagné en maturité. La
relation avec les commerciaux se traduit, par conséquent,
par un travail entre experts.
Le commercial peut-il faire grandir l’acheteur
au sein de sa structure ?
Oui, en adoptant une posture d’échange entre business
partners. Il faut savoir qu’en interne, l’acheteur est
au carrefour de plusieurs fonctions : la production,
le juridique, la finance, la recherche et développement,
etc. Par l’offre innovante qu’il va proposer, par ses
remontées d’informations, le vendeur peut participer
à la valorisation de l’acheteur qui sera lui-même
en capacité de mieux répondre à ses clients internes.
De façon générale, il faut tendre vers des relations
durables de co-construction et de co-innovation.
La relation client/fournisseur doit permettre de raisonner
en analyse fonctionnelle. /// OLGA STANCEVIC
* conformité juridique
34 Action Co / Numéro 377 / juin 2021 Plus d’actualités sur www.actionco.fr