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■<br />
Unter der Lupe: PORSCHE DESIGN<br />
SOMMER 2010 / 7 EURO / 12 FS / CAN$ 9,50<br />
JOURNAL<br />
SUISSE<br />
D’HORLOGERIE<br />
SONDERSEITEN
N° <strong>106</strong><br />
JUILLET - AOÛT 2010<br />
Rédaction, administration<br />
et service des abonnements:<br />
Promoédition SA<br />
35, rue des Bains<br />
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Ont collaboré à ce numéro:<br />
Marco Barbera, Danièle Chambas,<br />
Cristina d’Agostino, Jean-Louis Felfli,<br />
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ISSN 1661-1810<br />
SUISSE<br />
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© 2010, Promoédition SA<br />
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toutes ses formes éditoriales ou électroniques.<br />
MADOFF, KERVIEL ET LES<br />
HORLOGERS Il me revient à l’esprit<br />
une récente discussion – de bistrot certes,<br />
mais entre gens de bonne compagnie,<br />
experts patentés et intellectuels de bon<br />
niveau – à propos des turpitudes de<br />
Bernard Madoff, de Jérôme Kerviel et, plus<br />
généralement, sur le rôle des grandes<br />
banques et des agences de notation dans la<br />
crise financière actuelle. Le propos était de<br />
savoir comment on en était arrivé là, comment<br />
des gens aussi sérieux, clients et banquiers<br />
du monde entier appliquant des<br />
modèles scientifiques imparables, avaient<br />
pu laisser se développer sans broncher pendant<br />
vingt ans le système Madoff, comment<br />
un Kerviel avait pu prendre des<br />
risques aussi importants au sein de sa<br />
banque sans que les garde-fous ne jouent<br />
leur rôle. Bref, même après avoir retourné le<br />
problème pendant des heures, réévalué,<br />
soupesé encore et toujours toutes les hypothèses et probabilités, personne n’était parvenu<br />
à une conclusion satisfaisante quand, soudain, l’un des intervenants asséna la vérité<br />
suprême, indiscutable, insupportable en raison de son aveuglante évidence: «Tout cela et<br />
tout le reste n’a qu’une seule explication: la cupidité humaine», balança-t-il. D’un coup d’un<br />
seul, le silence se fit avant que l’assemblée ne s’engage dans une tout autre discussion. La<br />
cupidité! Une réponse tellement simple qu’elle insultait l’intelligence du noble aréopage. Et<br />
pourtant. Par la suite, je n’ai pu m’empêcher de me demander si ce péché capital n’était pas<br />
également à l’origine des errances de certains horlogers ces derniers mois et si l’obsession<br />
de la maximisation des profits ne conduisait pas à des erreurs stratégiques dangereuses…<br />
La réponse est dans la question. Cela dit, dans le domaine horloger comme dans d’autres,<br />
il existe des acteurs qui pensent différemment, qui réfléchissent en termes de responsabilité<br />
sociale, environnementale et de développement durable. C’est eux que nous avons<br />
choisi de mettre en valeur et de défendre, non seulement dans cette édition mais dans toutes<br />
celles qui suivront. Christopher Cordey, le consultant que nous avons interviewé, a raison:<br />
dans le secteur du luxe, qu’il soit horloger, bijoutier ou joaillier, les marges sont telles<br />
que beaucoup d’entreprises peuvent se permettre un petit effort, en pensant peut-être un<br />
peu moins à leurs actionnaires et un peu plus à tous les partenaires concernés par le processus<br />
de production.<br />
Thierry Brandt, rédacteur en chef<br />
© Karine Bauzin<br />
ÉDITOHEURE<br />
3
p.3_ÉDITOHEURE<br />
Madoff, Kerviel et les horlogers.<br />
p.9_ACTUHORLOGÈRE<br />
Saint Nicolas Hayek a rejoint le paradis des horlogers, p. 9<br />
Tout beau, tout neuf, le Musée Omega à Bienne, p. 10<br />
En bref. Cannes: le trop-plein; Antoine Preziuso à Dubai, p. 10<br />
Swatch & Art 2010: une grande party londonienne, p. 11<br />
Edox: un chrono dédié au Championnat du monde de rallye WRC, p. 12<br />
Echos du 2 e Forum de la haute horlogerie, à Genève, p. 14<br />
Cabestan et Ferrari: une histoire de moteurs, p. 15<br />
Bell & Ross: le style vintage lui va si bien, p. 16<br />
La démarche originale de Vincent Plomb, p. 16<br />
p.19_LANCEMENTSHEURE<br />
Une sélection des plus belles montres présentées ce printemps dans les salons horlogers.<br />
p.30_COMMENTÇA MARCHE?<br />
Tout, tout, tout, vous saurez tout sur le tourbillon.<br />
p.32_NOUVEAUTÉSHEURE<br />
MB&F: HM3 Frog, p. 32<br />
Richard Mille: RM 027 Rafael Nadal, p. 34<br />
Armand Nicolet: L08, p. 36<br />
p.38_SOUSLALOUPE<br />
Porsche Design<br />
Pour tous les passionnés de beaux objets et de design moderne, Porsche Design fait figure de<br />
référence. En matière d’horlogerie, il en va de même, avec, en plus, un contenu technique qui<br />
ne cesse de progresser. Aujourd’hui, la marque poursuit son aventure dans l’esprit de son<br />
créateur, Ferdinand Alexander Porsche, désormais adossée à l’entreprise soleuroise Eterna. C’est<br />
à Granges, sous le même toit, avec le même team directorial et les mêmes équipes techniques<br />
qu’elles se développent toutes les deux. Cette année, le fruit du travail de fond entamé par<br />
Porsche Design a pour nom P’6780 Diver.<br />
p.42_DÉVELOPPEMENTDURABLE<br />
Interview du consultant Christopher Cordey, p. 42<br />
La responsabilité sociale et environnementale d’IWC. Interview de Georges Kern, p. 44<br />
Agenhor: un bâtiment entièrement pensé pour économiser l’énergie, p. 48<br />
Les ambitions de Frédéric de Narp, patron de Harry Winston, p. 50<br />
p.7_SUITESOMMAIRE<br />
SOMMAIREHEURE<br />
5
p.53_EPHJ-EPMT<br />
Bilan 2010 plutôt positif.<br />
p.54_FOCUSHEURE<br />
Quand Marvin décomplexe l’horlogerie, p. 54<br />
Atlantic, marque séculaire mais presque inconnue en Suisse, p. 55<br />
p.57_DESIGNHEURE<br />
L’Art du Temps: le tableau horloger du designer Illi prend forme.<br />
p.58_MANAGEHEURE<br />
Une pensée pour les sous-traitants.<br />
p.60_ENCHÈRESHEURE<br />
Mises record à Genève au mois de mai.<br />
p.68_JOAILLERIEHEURE<br />
Dialogue entre bijoux et minéraux au Musée Barbier-Mueller, dans le cadre de<br />
l’exposition «Bijoux de l’homme, bijoux de la terre».<br />
p.70_SHOPPINGHEURE<br />
Les incontournables de l’été.<br />
p.72_CHRONIQUEHEURE<br />
Le prix de l’Histoire.<br />
p.64_ÉCHO DES FABRIQUES<br />
Cambriolages d’œuvres d’art: un livre qui oublie le casse de la route de Malagnou.<br />
Le Musée d’art et d’histoire avale le Musée de l’horlogerie et de l’émaillerie.<br />
Vacheron Constantin et Barbier-Mueller: partenariat à visage humain.<br />
p.66_CHRONOMÈTRESDE MARINE<br />
L’histoire passionnante de John Arnold et Thomas Earnshaw.<br />
SOMMAIREHEURE<br />
7
SAINT NICOLAS HAYEK A REJOINT LE PARADIS DES<br />
HORLOGERS<br />
Sacré Nicolas Hayek! Il est décédé le<br />
lundi 28 juin dernier, à 82 ans, dans<br />
son bureau du Swatch Group, à<br />
Bienne, sans avoir jamais pris un jour de<br />
retraite. «La retraite, c’est bon pour les<br />
généraux battus», avait-il coutume de<br />
dire, en donnant ainsi de mauvaises idées<br />
aux Pascal Couchepin, Nicolas Sarkozy et<br />
tous ceux qui veulent nous faire travailler<br />
plus longtemps… Mais trêve de plaisanterie,<br />
si le charismatique patron horloger a<br />
bossé jusqu’à son dernier souffle, ce n’est<br />
pas pour faire injure aux salariés du<br />
monde entier, c’est uniquement parce<br />
qu’il nourrissait une passion inextinguible<br />
pour son métier, parce qu’il avait trop<br />
de projets à mener à bien pour envisager<br />
de s’arrêter un jour. Il savait qu’il mourrait<br />
au combat.<br />
On ne reviendra pas ici sur les circonstances<br />
qui ont amené Nicolas Hayek à bâtir,<br />
dès le milieu des années 80, le premier<br />
empire horloger mondial à partir des<br />
miettes d’un secteur alors laminé par la<br />
révolution du quartz. Empire qui compte<br />
aujourd’hui une vingtaine de marques,<br />
plus de 20 000 collaborateurs et qui a<br />
généré, en 2009, un chiffre d’affaires de<br />
5,4 milliards de francs. En ce sens, il fut<br />
effectivement un visionnaire, à qui tous<br />
les acteurs d’une branche désormais florissante<br />
doivent beaucoup, si ce n’est<br />
tout. Et surtout, ce patron hors norme a<br />
réussi à consolider un outil industriel<br />
intelligemment conçu, dont les velléités<br />
hégémoniques posent parfois problème, il<br />
est vrai. Mais à qui la faute, si ce n’est à<br />
ceux qui ont longtemps bénéficié, à peu<br />
de frais, sans trop de risques et sans vergogne,<br />
de ce système de production, profitant<br />
ainsi indirectement des lourds<br />
investissements consentis par le Swatch<br />
Group? Cette situation fut à l’origine de<br />
Nicolas Hayek comme il aimait à se présenter, avec ses montres préférées sur les deux avant-bras. La mort de cette figure<br />
légendaire de l’horlogerie suisse aura sans doute un impact sur l’ensemble du secteur dans les mois à venir.<br />
plusieurs coups de gueule de Nicolas<br />
Hayek, dont le verbe haut, la vivacité<br />
d’esprit et la liberté de ton contribuaient à<br />
amplifier la portée.<br />
Vrai: tant par son parcours d’industriel et<br />
ses choix stratégiques que par sa forte<br />
personnalité, Nicolas Hayek en imposait.<br />
Comme jadis la Pythie à Delphes, on<br />
venait le consulter comme l’oracle de<br />
l’horlogerie mondiale. A tel point qu’il<br />
était parfois très gênant de voir certains<br />
se prosterner devant lui pour obtenir un<br />
avis ou une faveur. Vrai encore: du haut<br />
de son trône d’empereur, il pouvait aussi<br />
se montrer cassant à l’égard des impudents<br />
qui osaient contester ses choix.<br />
Bref, Hayek senior était devenu en<br />
quelque sorte intouchable, incontestable.<br />
Sans forcément le vouloir vraisemblablement,<br />
car l’homme était fondamentalement<br />
modeste. L’automne dernier, dans<br />
les colonnes de ce même magazine, alors<br />
que nous lui demandions de quoi il était<br />
le plus fier, il avait répondu en ces termes:<br />
«Je ne tire de tout cela aucune fierté personnelle.<br />
Je suis simplement un homme<br />
heureux d’avoir pu réaliser certaines choses<br />
dans ma vie, surtout d’avoir créé des<br />
richesses et des places de travail pour<br />
beaucoup de monde. Que cela soit, au<br />
début, dans la Ruhr, en créant des usines<br />
nouvelles et des produits nouveaux, ou<br />
dans le Swatch Group ou chez Belenos.» Un<br />
vrai entrepreneur, quoi. ■ Thierry Brandt<br />
ACTUHORLOGÈRE<br />
9
ACTUHORLOGÈRE<br />
10<br />
BRÈVES<br />
Cannes: le trop-plein<br />
Pour ceux qui l’ignoraient,<br />
Cannes est un festival de cinéma.<br />
Mais voilà, la «peopolisation» à<br />
outrance du show-biz fait qu’on<br />
ne parle plus, ou presque, du<br />
7 e art depuis longtemps.<br />
Horlogers et bijoutiers participent<br />
d’ailleurs au phénomène,<br />
bombardant jour après jour les<br />
rédactions de communiqués de<br />
presse et de photos pour annoncer<br />
que tel ou telle portait les<br />
créations de tel ou telle durant<br />
la montée des marches… Intérêt<br />
de tout ce bla-bla promotionnel?<br />
Zéro. Réfléchiront-ils un jour à<br />
d’autres formes de communication?<br />
(THB)<br />
Antoine Preziuso à Dubai<br />
Le créateur horloger genevois a<br />
ouvert, le 1 er février dernier, à<br />
Dubai, sa quatrième boutique.<br />
Elle est située au cœur du très<br />
chic Wafi City Mall, un concentré<br />
de quelque 350 magasins de<br />
luxe. Après Genève, Tokyo et<br />
Kiev, c’est à dessein qu’Antoine<br />
Preziuso s’est tourné vers le<br />
Moyen-Orient, avec lequel il<br />
tisse depuis longtemps des relations<br />
privilégiées. Dans les vitrines<br />
figurent l’ensemble de ses collections<br />
de montres et les bijoux<br />
signés Laura Preziuso.<br />
L’inauguration officielle est prévue<br />
en septembre. (Réd.)<br />
L’ALPHA ET L’OMÉGA D’OMEGA<br />
Il y a plein de bonnes raisons de visiter<br />
le Musée Omega, à Bienne. D’abord, il<br />
s’agit du plus ancien musée de marque<br />
en Suisse. Ensuite, l’établissement vient<br />
d’être entièrement rénové et repensé,<br />
offrant une présentation désormais en<br />
phase avec les codes muséographiques<br />
actuels. De plus, cette remise à jour a<br />
permis à ses responsables de faire un<br />
sérieux tri dans les archives et de retrouver<br />
des pièces dont ils ne connaissaient<br />
même plus l’existence. Enfin, l’exposition<br />
permet de retracer l’histoire de l’une<br />
des marques emblématiques du savoirfaire<br />
horloger helvétique.<br />
Dans les vitrines de la première salle sont<br />
exposés quelques-uns – les plus importants<br />
– des 600 mouvements inventés par<br />
la marque. Autour, dans les pièces attenantes,<br />
figurent des objets qui sont<br />
directement liés à son histoire. On plonge<br />
dans l’univers du chronométrage sportif,<br />
avec les horloges qui ont fixé à jamais<br />
les records les plus fous dans les stades<br />
du monde entier et les plots de départ à<br />
partir desquels les nageurs de légende se<br />
sont élancés. On rêve de cinéma avec les<br />
montres utilisées lors des tournages des<br />
James Bond. On est propulsé dans l’espace,<br />
grâce à un exemplaire grandeur nature<br />
du Lunar Rover, qui a servi de véhicule<br />
Le célèbre agent 007 et ses Omega.<br />
aux astronautes américains, sans oublier<br />
une partie du tableau de commandes<br />
installé dans la salle de contrôle de la<br />
NASA, à Houston, durant les missions<br />
Gemini, Mercury et Apollo. On plonge<br />
dans la politique et le monde scientifique<br />
Le Musée Omega, à Bienne, fait la part belle à la conquête spatiale.<br />
avec les montres portées par le président<br />
John Fitzgerald Kennedy et Albert<br />
Einstein. On admire la vision des artistes<br />
qui ont travaillé avec Omega: Salvador<br />
Dali, Max Bill, Richard Paul Lohse,<br />
Valerio Adami, Gilbert Albert, entre autres.<br />
Passionnant, et pas seulement pour les<br />
amateurs d’horlogerie. ■ THB<br />
Le musée est ouvert du lundi au vendredi,<br />
de 9 h à 17 h. Visites guidées possibles.<br />
Entrée libre.<br />
Tél. +41 (0)32 343 92 11<br />
www.omegawatches.com/spirit/history/museum
SWATCH PARTY À LONDRES<br />
Pas de doute, Swatch demeure encore<br />
et toujours une marque hyperbranchée.<br />
Le 6 mai dernier, pour présenter<br />
les quatre artistes choisis cette<br />
année pour animer sa collection Swatch<br />
& Art, elle avait réservé un lieu culte de<br />
la capitale britannique: le Shunt. Des<br />
entrepôts désaffectés, nichés sous la gare<br />
de London Bridge, dont les voûtes de<br />
briques un rien mystérieuses abritent<br />
régulièrement des événements originaux.<br />
Présentation suivie, le soir même,<br />
d’une étonnante party qui a réuni<br />
quelque 800 invités venus du monde<br />
entier.<br />
Pour Arlette Elsa Emch, c’était aussi l’occasion<br />
de fêter un anniversaire d’importance:<br />
celui de la première année passée<br />
à la tête de la marque biennoise. «Pour<br />
moi, c’est comme si ces douze mois<br />
avaient représenté une minute. Tout a<br />
été si intense durant cette période»,<br />
expliquait la blonde présidente qui, par<br />
ailleurs, a parfaitement assuré son rôle<br />
de maître de cérémonie. Après avoir rappelé<br />
les liens tissés depuis vingt-sept ans<br />
par Swatch avec le monde de l’art,<br />
Arlette Elsa Emch a présenté en quelques<br />
mots les quatre personnalités dont les<br />
œuvres, très variées, vont désormais se<br />
balader sur tous les continents aux poignets<br />
des aficionados: le styliste indien<br />
Manish Arora, qui s’inspire de l’univers<br />
de Bollywood, Cassette Playa, styliste et<br />
plasticienne anglaise branchée sur le<br />
street art, le sculpteur de lumière chilien<br />
Ivan Navarro et, enfin, Enki Bilal, dessinateur,<br />
bédéiste et réalisateur français.<br />
Pourquoi ce choix? La patronne de<br />
Swatch l’explique en ces termes: «C’est à<br />
chaque fois l’histoire d’une rencontre<br />
avec un artiste et son travail, une affaire<br />
d’émotion et de partage», résume-t-elle.<br />
Avis partagé par les artistes concernés,<br />
qui parviennent tous à s’exprimer de<br />
Cassette Playa, Ivan Navarro, Manish Arora et Enki Bilal: quatre artistes pour une nouvelle collection très diversifiée.<br />
manière fort différente dans le tout petit<br />
espace imposé par le cadran (et parfois le<br />
bracelet) d’une montre. Un exercice de<br />
style plus difficile qu’il n’y paraît, mais<br />
qu’un homme comme Enki Bilal a particulièrement<br />
apprécié: «Je n’ai pas vraiment<br />
réfléchi avant de me mettre à ma<br />
table de travail, mais dès que j’ai empoigné<br />
mes crayons, j’ai décidé de me focaliser sur<br />
des visages. C’est ce que je pouvais le<br />
mieux mettre en valeur dans un cercle.<br />
Aujourd’hui, je suis satisfait de ce choix<br />
et ravi de penser que, partout dans le<br />
monde, des gens vont porter cette montre<br />
et interpréter mon dessin de toutes les<br />
manières possibles. C’est une seconde<br />
balancée comme ça, simplement, dans<br />
l’histoire du temps», conclut-il, poétique.<br />
■ THB<br />
11
ACTUHORLOGÈRE<br />
12<br />
EDOX: TOUT L’ESPRIT DU SPORT AUTOMOBILE<br />
Petite marque jurassienne qui vit à<br />
fond la caisse, Edox est engagée<br />
depuis longtemps dans la compétition<br />
sportive: voile, off-shore et, depuis<br />
peu, le très relevé Championnat du<br />
monde de rallye WRC, dont elle est pour<br />
trois ans le chronométreur officiel. Pour<br />
marquer de manière forte ce nouveau<br />
contrat joliment décroché, il lui fallait, au<br />
minimum, un modèle dédié. C’est chose<br />
faite depuis ce printemps.<br />
En fait, à Bâle, Edox a présenté deux<br />
modèles. Le premier, baptisé Chronorally,<br />
est la pièce maîtresse de la collection,<br />
avec son mouvement (quartz, Soprod)<br />
entièrement pensé pour ce genre de compétition.<br />
Outre les fonctions habituelles,<br />
il offre, comme son nom l’indique, un<br />
chronographe au dixième de seconde, un<br />
compte à rebours, un mode recomptage<br />
(replay). Enfin, il permet de chronométrer<br />
le temps de chaque épreuve spéciale<br />
et, mieux encore, de conserver en<br />
mémoire le total cumulé des temps en<br />
question. Tout cela est piloté au moyen<br />
des poussoirs et des couronnes qui sont, en<br />
l’occurrence, surdimensionnés, de manière<br />
à permettre une activation avec des<br />
gants. D’ailleurs, pour faciliter encore la<br />
lecture pendant la compétition, la montre<br />
affiche un diamètre imposant de 48 mm.<br />
Des dimensions très généreuses qui ne<br />
perturbent en rien l’allure générale de<br />
l’instrument, dont le look est très réussi.<br />
Une jante de voiture de course? Oui, sur le fond de la montre Edox.<br />
Engagée dans le Championnat du monde de rallye WRC, Edox a conçu une montre<br />
qui devrait plaire aux amateurs de la spécialité.<br />
Prix public de cette montre destinée aux<br />
passionnés de rallye: 2400 francs. Pour<br />
quelque 400 francs de moins, on pourra<br />
s’offrir la petite sœur du Chronorally, le<br />
chrono quartz (mouvement Ronda) WRC<br />
X-Treme Pilot Limited Edition (1000 pièces),<br />
tout de noir vêtu (traitement PVD),<br />
dont l’originalité réside, notamment,<br />
dans son mouvement pivoté de 180°.<br />
L’idée étant, là aussi, de faciliter la prise<br />
en main et l’utilisation des fonctions<br />
durant la conduite. Bref, chez Edox, on<br />
sait restituer l’esprit de la course jusque<br />
dans les moindres détails. ■ THB
ACTUHORLOGÈRE<br />
14<br />
2 E FORUM DE LA HAUTE HORLOGERIE À GENÈVE:<br />
LE LUXE EST ÉTERNEL<br />
to rethink»: tel était le thème<br />
de la deuxième édition de ce forum<br />
«Time<br />
organisé à Genève, le 29 avril<br />
dernier, sous l’égide de la Fondation de<br />
la haute horlogerie. Une journée de<br />
réflexion qui a vu se succéder au micro<br />
une série d’intervenants très divers, parfois<br />
enthousiastes, parfois critiques, mais<br />
tous de grande qualité.<br />
Une question était dans tous les esprits: le<br />
secteur horloger est-il sorti de la crise?<br />
«Oui», a répondu Rémy Bersier, de la<br />
banque Julius Baer. «Mais attention, a-t-il<br />
précisé, compte tenu des indicateurs de la<br />
production industrielle, il nous faut rester<br />
humbles et modestes. Il reste beaucoup de<br />
travail devant nous, comme le démontre<br />
la situation difficile que vivent encore<br />
certaines grandes économies comme<br />
l’Allemagne. A l’inverse, on observe que<br />
la croissance mondiale est à nouveau<br />
dominée par les pays émergents.»<br />
Concernant plus précisément le domaine<br />
du luxe, deux conférenciers ont soutenu<br />
que celui-ci était quasi éternel. Le premier<br />
intervenant, Vincent Bastien, professeur<br />
à HEC Paris, a affirmé que le luxe,<br />
«considéré comme une pénurie positivée<br />
en rareté», était consubstantiel à l’homme.<br />
Selon lui, «la notion de luxe est vitale<br />
pour l’être humain qui en a besoin pour<br />
nourrir ses rêves et son image.» Par<br />
conséquent, à l’avenir, Vincent Bastien<br />
ne voit se profiler «aucun problème<br />
majeur» pour l’horlogerie. Même tonalité<br />
dans le discours de Valéry Giscard<br />
d’Estaing, ancien président de la<br />
République française: «Le luxe constitue<br />
cette strate supérieure de l’activité économique,<br />
tant du point de vue du coût<br />
que de l’acquisition. Mais s’il est possible<br />
de produire n’importe où dans le monde<br />
des objets appartenant à la catégorie du<br />
Pour Valéry Giscard d’Estaing, la culture et la créativité<br />
sont consubstantielles du luxe.<br />
luxe, ces derniers ne sont pas des produits<br />
de luxe pour autant. La créativité et<br />
la culture sont en ce sens essentielles,<br />
raison pour laquelle l’horlogerie suisse<br />
est très bien positionnée, vu son fort<br />
ancrage culturel», a-t-il affirmé.<br />
Au fil de la journée, il a bien évidemment<br />
aussi été question de communication et<br />
de multimédia, domaines qui sont en<br />
plein bouleversement avec le développe-<br />
ment des supports mobiles. Mais les horlogers<br />
ont-ils bien mesuré l’impact de<br />
cette révolution médiatique? Pas vraiment,<br />
selon le photographe italien Oliviero<br />
Toscani, célèbre notamment pour ses<br />
pubs Benetton, qui a secoué l’assemblée<br />
avec des propos très critiques: «Vous<br />
pensez qu’en montrant George Clooney<br />
ou Angelina Jolie portant vos montres,<br />
tout le monde voudra leur ressembler.<br />
Quelle illusion! Vous savez pourtant ce<br />
que sont la qualité et l’excellence, mais<br />
en matière de communication, c’est<br />
comme si vous l’aviez oublié, tant vos<br />
campagnes manquent de créativité et<br />
d’imagination, ces deux qualités qui<br />
amènent un surplus d’intelligence», a-til<br />
martelé. On ne s’est pas ennuyé au<br />
2e Forum de la haute horlogerie! ■ THB<br />
Le photographe italien Oliviero Toscani n’a pas hésité à secouer l’assemblée avec ses propos très critiques à l’encontre<br />
des horlogers et de leur manque de créativité en matière publicitaire.
JEAN-FRANÇOIS RUCHONNET: «C’EST LA FORÊT<br />
DE SHERWOOD QUI A GAGNÉ!»<br />
Il prétend avoir le triomphe modeste,<br />
mais savoure tout de même intensément<br />
le joli tour qu’il vient de jouer<br />
aux grandes marques horlogères. Il faut<br />
dire qu’en décrochant un contrat avec<br />
Ferrari, Jean-François Ruchonnet et<br />
Cabestan dament le pion à tous ceux qui<br />
rêvaient d’associer leur nom à l’écurie<br />
mythique, dont le groupe Swatch.<br />
«Je suis content et fier, parce que cette<br />
histoire est vraiment le fruit de nos passions<br />
respectives. Et cela prouve qu’une<br />
petite marque indépendante comme<br />
Cabestan peut parfaitement tirer son<br />
épingle du jeu. Je me marre aussi un<br />
peu, c’est vrai, parce que je sais très bien<br />
que je suis une grande gueule et que je<br />
n’ai pas un caractère facile. Dans le<br />
milieu horloger, je suis le clou qui<br />
dépasse et qui attire le marteau. Mais on<br />
a tellement cassé de sucre sur mon dos<br />
et prétendu que tout ce que j’entreprenais<br />
ne marcherait pas que j’apprécie<br />
cette petite revanche. C’est Robin des<br />
Bois, c’est la forêt de Sherwood qui a<br />
gagné!» jubile Ruchonnet.<br />
La prochaine montre Ferrari haute horlogerie<br />
– donc réservée à ceux qui possèdent<br />
déjà un bolide de la marque et un<br />
portefeuille bien garni (la montre vaudra<br />
un petit demi-million de francs) –<br />
sera donc une Cabestan customisée et<br />
fabriquée à la vallée de Joux. Il faut<br />
écouter le volubile et très speed Jean-<br />
François Ruchonnet raconter comment<br />
il est entré en contact avec les responsables<br />
de Maranello, cela ne s’invente pas:<br />
«Nous nous sommes rencontrés en 2009<br />
à Monaco pendant le Grand Prix. J’avais<br />
une Cabestan au poignet, qui a beaucoup<br />
intéressé le directeur des ventes<br />
pour l’Europe de Ferrari. Nous avons<br />
discuté un moment et j’ai fini par lui<br />
Voilà ce que seuls les possesseurs<br />
d’une Ferrari pourront s’offrir: une Cabestan customisée,<br />
imaginée par le très habile Jean-François Ruchonnet.<br />
Un vrai moteur, non?<br />
dire que s’il cherchait un nouvel horloger,<br />
je me mettais aussitôt sur les rangs»,<br />
avance-t-il. Et le même de poursuivre:<br />
«Peu après, je me suis rendu une première<br />
fois en Italie, mais pas avec un<br />
ordinateur bourré de tableaux Excel et<br />
des plannings de vente. J’ai parlé de mes<br />
passions pour l’horlogerie et la course<br />
automobile… et voilà, les choses ont<br />
commencé comme ça. Même Timothy<br />
Bovard, le propriétaire de Cabestan, n’y<br />
croyait pas; il pensait que c’était trop<br />
gros. Mais franchement, même s’ils nous<br />
ont passés au scanner pour savoir si<br />
nous étions capables de réaliser ce que<br />
nous proposions, ils ont aussi marché au<br />
feeling, à l’italienne quoi», conclut celui<br />
qui dit d’ores et déjà développer d’autres<br />
projets avec le constructeur italien. ■<br />
THB<br />
ACTUHORLOGÈRE<br />
15
16<br />
ACTUHORLOGÈRE<br />
BELL & ROSS: ÉLOGE DE LA SIMPLICITÉ<br />
que les gens aiment la<br />
crois<br />
marque parce qu’elle propose «Je<br />
des montres simples, fonctionnelles,<br />
lisibles et robustes, dont le design<br />
épuré est en même temps très moderne.»<br />
Roberto Passariello, le directeur de la<br />
communication de Bell & Ross, a raison:<br />
c’est effectivement les éléments qui font<br />
la force de cette (encore) jeune marque<br />
franco-suisse. A tel point que sa collection<br />
la plus célèbre, Instrument, a été<br />
l’une des plus copiées ces dernières<br />
années. Parmi les grands crus du millésime<br />
2010 présenté à Bâle, on a dégusté<br />
avec plaisir la BR01-92 Radar, dont l’effet<br />
est garanti, la BR03-92 Military<br />
Ceramic, teintée de vert militaire, et enfin<br />
la Vintage BR Carbon, expression parfaite<br />
Croisé au détour d’une escale à<br />
Baselworld, le constructeur Vincent<br />
Plomb, à l’heure des confidences<br />
sur fond de brouhaha festivalier, lève le<br />
voile sur sa première création. Tournis<br />
de planètes… La formule en souscription<br />
n’est pas nouvelle. Elle permet, dans une<br />
aventure entrepreneuriale naissante, la<br />
prise mesurée de risque. Fin 2009,<br />
Laurent Favre a prévendu 24 exemplaires<br />
de sa Phoenix 10.1 Quantième à<br />
Grand Affichage Rotatif pour relancer<br />
A. Favre & Fils, une raison sociale<br />
d’avant l’existence de Favre-Leuba.<br />
Ainsi circule ces jours une souscription<br />
portant sur les 100 premières GMT-3<br />
VicenTerra. Dans le registre nirvana<br />
complicationnel, ce tonneau d’esthète<br />
recèle un cœur issu d’un ETA 2892<br />
(automatique), le calibre REA-GMT-3,<br />
auquel s’ajoute un disque jour-nuit posé<br />
au zénith (12 h), un indicateur d’ensoleillement<br />
– aube à 6 h, coucher à 8 h –<br />
cédant la nuit à un ciel étoilé saupoudré<br />
de la sobriété horlogère contemporaine.<br />
Une réussite stylistique encore rehaussée<br />
par l’utilisation de la couleur sable pour<br />
la finition des aiguilles, index et chiffres,<br />
sans oublier celle du bracelet en cuir<br />
naturel qui lui fait écho. La Vintage 2010<br />
existe en version classique (heures,<br />
minutes et seconde indépendante,<br />
mouvement automatique ETA 2895,<br />
2700 francs) ou chronographe deux<br />
compteurs (mouvement automatique ETA<br />
2894, 4200 francs). ■ THB<br />
Le style vintage selon Bell & Ross: une vraie réussite.<br />
VICENTERRA: LA GMT-3 ET SES COMPLICATIONS PLANÉTAIRES<br />
Vincent Plomb a trouvé une manière originale de réaliser<br />
son projet en lançant une souscription.<br />
de diams. Une date rétrograde squatte<br />
l’index 2 h, tandis qu’un globe terrestre<br />
miniature (Ø 6,5 mm), posé à 5 h, tourne<br />
sur lui-même en vingt-quatre heures.<br />
Profond et poétique, ce concentré de<br />
temps planétaire ne laissera pas indifférent<br />
celui qui chine hors des sentiers<br />
battus. ■ JAG / TàG Press +41<br />
Pour tout renseignement:<br />
Vincent Plomb, tél. +41 (0)78 808 92 88,<br />
mail: realis.vp@vtxnet.ch
Breguet<br />
Type XXII Chronographe<br />
10 Hz Retour en Vol<br />
Précision exceptionnelle grâce au mouvement<br />
chronographe avec échappement et spiral en silicium<br />
(72 000 alt./h.) Une deuxième aiguille permet de<br />
compter les minutes en additionnant les séquences<br />
de 30 secondes. Cerise sur le gâteau: la fonction<br />
retour en vol pour une remise à zéro et<br />
un redémarrage du compteur en un seul geste.<br />
Second fuseau horaire à 6 h. Boîte en acier<br />
44 mm, lunette tournante bidirectionnelle,<br />
cadran noir oxydé, bracelet intégré. ■<br />
Bulgari<br />
Octo Bi-Retro Steel Ceramic<br />
Son boîtier acier est équipé du mouvement automatique manufacturé GG7722,<br />
présentant deux compteurs rétrogrades. Une fenêtre à 12 h révèle les heures sautantes.<br />
Quant à l’aiguille des minutes, elle court sur un arc de cercle de 210°. Les sept clous de<br />
la lunette en céramique permettent de lire les minutes intermédiaires dans chacun des<br />
segments par zone de dix minutes. La date rétrograde s’affiche au pied du cadran. ■<br />
TechnoMarine<br />
Cruise Sport<br />
Mandarine, rose shocking, bleu outremer, vert pomme, bleu ciel,<br />
noir désir et blanc pur... La nouvelle collection Cruise Sport, version<br />
classique ou chronographe, fait merveille sur la plage, en croisière ou au<br />
night-club. Le bracelet en silicone, extrêmement agréable au poignet,<br />
peut facilement être changé pour l’assortir aux vêtements ou à l’humeur.<br />
Boîtier de 40 ou 45 mm, étanche à 200 m. ■<br />
LANCEMENTSHEURE<br />
19
LANCEMENTSHEURE<br />
20<br />
Chopard<br />
Cartier<br />
Calibre de Cartier<br />
Cette montre homme de caractère (42 mm de diamètre)<br />
réinterprète les principaux codes de la marque:<br />
puissance des lignes, robustesse de la boîte et<br />
ergonomie racée. Au dos, le fond saphir transparent<br />
laisse apparaître le calibre 1904 MC, le premier<br />
mouvement mécanique à remontage automatique<br />
100% Cartier. Grâce au double barillet, la précision<br />
chronométrique est maîtrisée et stabilisée. ■<br />
Davidoff<br />
Very Zino Champion Collection<br />
Une nouvelle collection bien dans l’esprit de la marque, synonyme de qualité et<br />
d’élégance. Le boîtier, légèrement ovale, en acier traité PVD de 46 mm, cache un<br />
mouvement automatique symbolisant l’endurance et la finesse de tout champion.<br />
Cadran gris fumé avec une trotteuse centrale, un compteur 30 minutes et<br />
une petite seconde à 6 h, 12 h et 9 h. La classe. ■<br />
Grand Prix de Monaco Historique<br />
Time Attack MF<br />
<strong>Heure</strong>s, minutes et secondes sont indiquées par les aiguilles centrales. Date, compte<br />
à rebours, deuxième fuseau horaire, alarmes (il y en a deux) et chronographe précis<br />
au centième de seconde figurent sur un écran numérique placé sur le bas du<br />
cadran, à 6 h. Un élégant chrono quartz (certifié COSC), dont le côté vintage ne<br />
cède en rien à sa modernité et à son caractère sportif bien affirmé. ■
Gucci<br />
Unisex Classic<br />
Un modèle parfaitement fidèle aux codes de la marque florentine avec, sur le cadran,<br />
sa bande vert-rouge-vert à 3 h et l’emblématique «G» en filigrane. Assez imposante,<br />
cette pièce unisexe est équipée d’un mouvement quartz ETA avec les fonctions heures,<br />
minutes, seconde, date, chrono et tachymètre. Boîtier en acier ou en PVD noir, bracelet<br />
Breitling<br />
Bentley Supersports<br />
Une éblouissante série spéciale:<br />
boîtier acier s’ornant d’une lunette au<br />
relief moleté, cadran style tableau de<br />
bord avec un compteur 60 minutes<br />
au centre, une trotteuse à 3 h et une<br />
échelle centrale pour les centièmes<br />
d’heure ou de minute, plus un<br />
tachymètre variable avec règle<br />
de calcul circulaire. Sous ce<br />
châssis puissant, le calibre<br />
Breitling 26B for Bentley.<br />
Une mécanique de très haute précision. ■<br />
acier ou caoutchouc vert ou noir. E viva l’Italia! ■<br />
Christian Jacques<br />
Explorator<br />
Avec son ergonomie particulièrement bien étudiée, cette aventurière<br />
s’adapte parfaitement au poignet. Elle est prête à tout, partir avec vous<br />
dans la jungle ou jusqu’à votre prochain rendez-vous. Son boîtier<br />
acier 45 mm, d’une belle architecture contemporaine, est équipé d’un<br />
mouvement mécanique à remontage automatique (ou quartz) et<br />
d’un cadran guilloché en fibre de carbone. Etanche à 100 m. ■<br />
21
LANCEMENTSHEURE<br />
22<br />
Eberhard & Co<br />
Chrono 4 Bad Boy<br />
Il n’a pas vraiment le look d’un mauvais garçon ce chrono sport, l’un des plus<br />
réussis de sa catégorie. On le reconnaît entre mille grâce à ses quatre<br />
compteurs en ligne, mis en valeur par un cadran à différents<br />
niveaux soigneusement travaillé. Basé sur un mouvement ETA 2894,<br />
ce modèle fait montre d’une identité forte sans être trop chargé,<br />
comme beaucoup de garde-temps à caractère sportif. ■<br />
Jean d’Eve<br />
Quarta Automatique<br />
La firme de La Chaux-de-Fonds inaugure une lecture du temps pour le moins originale.<br />
Les heures se divisent en quatre compteurs de trois heures. Une fois les trois heures<br />
accomplies sur le premier cadran, l’aiguille revient dans sa position initiale et passe<br />
le relais au deuxième compteur et ainsi de suite. Look futuriste, boîte en acier étanche<br />
à 30 m, mouvement mécanique, cadran noir ou argenté. ■<br />
Frédérique Constant<br />
Maxime Manufacture Lady<br />
Cette miss ultraféminine, d’une élégance sage, est<br />
équipée du calibre FC 700, entièrement manufacturé<br />
dans les ateliers de Plan-les-Ouates. On l’aime pour<br />
sa boîte en acier 39 mm, sa lunette acier/or rose,<br />
sertie de diamants ou non, et son délicat cadran<br />
nacré avec un guilloché soleil au centre et six index<br />
en diamants. Bracelet en galuchat noir ou brun et,<br />
dans la version soir, en satin gris ou vanille. ■
Panerai<br />
L’Astronomo, Luminor 1950<br />
Equation of Time<br />
Tourbillon Titanio 50 mm<br />
Tourbillon avec équation du temps, indication des heures de<br />
lever et de coucher du soleil dans une ville choisie, avec, sur<br />
le fond, la représentation cartographique de la voûte céleste<br />
de ladite ville. Le calibre P.2002/G (375 éléments) est équipé<br />
d’un régulateur à tourbillon et d’une réserve de marche<br />
de quatre jours. Ce modèle, d’un diamètre de 50 mm,<br />
séduira les amateurs de grandes complications. ■<br />
Certina<br />
DS Podium Valjoux<br />
Azzaro<br />
Coastline<br />
Un look de sportive et un zeste d’élégance: la Coastline se porte<br />
en croisière ou en plongée. Un mouvement quartz est logé dans sa<br />
boîte de 40 mm, étanche à 100 m, en acier ou or rose, équipée d’une<br />
lunette tournante unidirectionnelle noire, bleue ou blanche et d’un<br />
bracelet caoutchouc dans les mêmes tons. Et pour les soirées<br />
mondaines, on choisit la version sertie de 36 ou 72 diamants. ■<br />
Une pièce sport chic, robuste et contemporaine, aux détails raffinés<br />
avec des contrastes de surfaces planes et biseautées et des compteurs<br />
qui s’entremêlent avec les chiffres et les index. Etanche à 100 m,<br />
son boîtier acier de 42 mm est équipé du mouvement mécanique à<br />
remontage automatique ETA Valjoux 7750 et d’un cadran argent<br />
ou noir. Livrée avec un bracelet cuir ou acier. ■<br />
23
LANCEMENTSHEURE<br />
24<br />
Piaget<br />
Altiplano Automatic 43 mm<br />
Pour les 50 ans du légendaire calibre 12P, place au calibre<br />
1208P qui, avec ses 2,35 mm d’épaisseur devient le mouvement<br />
mécanique à remontage automatique le plus mince de sa<br />
catégorie. Pareille prouesse impose une boîte ronde et une lunette la<br />
plus fine possible pour une épaisseur totale de 5,25 mm, soit la<br />
montre mécanique à remontage automatique la plus plate du monde<br />
actuellement. ■<br />
Tissot<br />
Veloci-T Lady<br />
Total look acier pour la version féminine équipée, comme son alter ego<br />
masculin, du nouveau calibre ETA CO1.211. Etanche à 100 m, elle affiche une<br />
allure énergique – avec boîtier, cadran et bracelet caoutchouc immaculés –,<br />
relevée d’une touche PVD rose sur la lunette et les cercles entourant les petits<br />
cadrans. Une fenêtre ronde sur le fond de la boîte laisse entrevoir le balancier<br />
du mouvement. ■<br />
Concord<br />
C1 Vintage<br />
Il s’agit du modèle C1 Code dont l’apparence a été vieillie. Il n’a pas<br />
pour autant perdu son anatomie d’athlète et son dynamisme puisqu’il<br />
est équipé d’un mouvement chronographe automatique certifié COSC.<br />
Le boîtier acier PVD de 44 mm a subi un polissage mécano-chimique qui<br />
a érodé sa surface et ses arêtes pour un aspect mat, rehaussé par l’anneau<br />
Concord en caoutchouc placé sur la carrure. ■
Rodania<br />
Themis Automatic<br />
Elégance intemporelle, classicisme et sobriété: Themis est l’incarnation parfaite des<br />
codes de la collection Swiss Chic. Equipé d’un mouvement automatique ETA 2824-2,<br />
le boîtier acier 40 mm, au design épuré, se pare d’un cadran noir ou blanc et d’un<br />
bracelet noir. A porter du matin au soir, ce que préfèrent les hommes. ■<br />
Oris<br />
Oscar Peterson<br />
Limited Edition<br />
Oris aime certes l’aviation et le sport<br />
automobile mais aussi les musiciens de<br />
jazz, auxquels elle rend régulièrement<br />
hommage. Témoin, cette montre dont<br />
les index en forme de touches de<br />
piano évoquent la légende d’Oscar<br />
Peterson. Le tout sur un cadran<br />
noir d’une élégante simplicité,<br />
au centre duquel sont gravés des<br />
sillons concentriques, comme ceux<br />
des disques vinyle. Un classique<br />
superbement traité. ■<br />
Versace<br />
Destiny Spirit<br />
Glamour en diable, elle ne peut être que griffée Versace, cette Destiny Spirit! Grâce à<br />
sa sobriété très sophistiquée, mais surtout grâce à ses nombreuses minisphères dorées<br />
qui vont et viennent sensuellement au gré des mouvements du poignet. Boîtier acier<br />
PVD or jaune, cadran émaillé noir portant la célébrissime méduse. Mouvement quartz<br />
et bracelet croco noir, évidemment. ■<br />
25
LANCEMENTSHEURE<br />
26<br />
Movado<br />
Master TM<br />
Avec son cadran asymétrique au motif grillagé noir mat ou blanc et<br />
l’emblématique point à 12 h, qui se pare d’une sorte de poussoir, la collection<br />
Movado Master TM explore un nouveau design sans renier sa fidélité au<br />
«cercle dans le cercle». La version homme abrite un mouvement automatique<br />
et un cadran avec des index luminescents. ■<br />
Vulcain<br />
Cricket Golden Heart<br />
Le fameux mouvement réveil – à remontage manuel – qui a fait la célébrité<br />
de Vulcain se trouve ici magnifiquement mis en valeur. D’une part, grâce au<br />
cadran largement squeletté; d’autre part, grâce au traitement anthracite de ses<br />
différents composants. Deux barillets assurent à la montre une réserve de<br />
marche de 42 heures et une sonnerie de 20 secondes. ■<br />
Quinting<br />
Chrono Mystérieux<br />
La marque poursuit son magnifique<br />
travail sur les mouvements transparents<br />
et présente cette année, entre autres, ce<br />
chronographe à remontage manuel qui<br />
dispose de quatre moteurs dissimulés<br />
dans la circonférence de la montre.<br />
Technologiquement remarquable et<br />
esthétiquement fascinant… comme de<br />
coutume. Lunette sertie de diamants<br />
sur demande. ■
Van Cleef & Arpels<br />
Midnight Tourbillon Nacre<br />
Le cadran en nacre blanche travaillé tout en volume à la main<br />
et totalement débarrassé d’index, de minuterie ou de chiffres,<br />
mis à part une petite seconde à 6 h, semble n’avoir été conçu<br />
que pour magnifier la beauté extrême du tourbillon. Décliné<br />
dans une boîte en or blanc de 42 mm, sertie ou non de brillants,<br />
ce modèle, limité à 100 exemplaires, fait partie des<br />
«complications poétiques» lancées au SIHH. ■<br />
L’Epée<br />
Le Duel<br />
Maurice Lacroix<br />
Pontos Décentrique Phases de Lune<br />
Ce garde-temps en titane séduira les amateurs de complications<br />
et ceux qui aiment lire le temps différemment. Sur son cadran<br />
noir décentré à 10 h, une aiguille piste les minutes, tandis que<br />
des heures traînantes surgissent progressivement sur un disque.<br />
A 4 h, deux disques superposés dévoilent phases de lune<br />
et indication jour/nuit. A 6 h, dans la fenêtre<br />
d’une glace métallisée, le quantième. ■<br />
Une pendulette intéressante avec ses deux épées croisant le fer, une complication<br />
originale permettant à celles-ci de s’ouvrir peu à peu. Au bout de quarante jours,<br />
le logo s’inverse. Deux autres épées rétrogrades suivent la cadence de ce duel<br />
pendant vingt secondes avant de retrouver leur position «en garde». Mouvement<br />
mécanique à remontage manuel plaqué palladium, décor Côtes de Genève. ■<br />
27
LANCEMENTSHEURE<br />
28<br />
Carl F. Bucherer<br />
Patravi EvoTec BigDate<br />
Voici la première montre dame équipée du calibre manufacturé<br />
CFB A1003, avec une réserve de marche de 55 heures.<br />
La boîte acier met en valeur une lunette où brillent<br />
56 diamants et le cadran, argenté ou en nacre<br />
noire, accueille un guichet grande date<br />
à 10 h 30. Esthétisme et technique sont<br />
alliés à un choix intéressant de<br />
bracelets: cuir en serpent de mer,<br />
python, veau laqué ou alligator. ■<br />
Jovial<br />
Limited Edition 80 Years<br />
Jovial prolonge les festivités de son anniversaire avec cette montre<br />
commémorative délicieusement chocolatée! Une pièce incarnant le renouveau de<br />
la marque et totalement dans la ligne de la collection caractérisée par des boîtiers<br />
high-tech, mettant en valeur des jeux de structure et de volume ainsi que des<br />
finitions particulièrement soignées. Boîtier 42 mm, cadran et bracelet chocolat. ■<br />
Longines<br />
PrimaLuna<br />
Un look classique, rehaussé par l’éclat de l’acier et la<br />
chaleur de l’or rose pour cette nouvelle PrimaLuna.<br />
Son délicat cadran nacré, blanc ou argent, se pare de<br />
diamants sur un boîtier en acier ou or rose de<br />
différentes tailles. En son cœur, un mouvement<br />
automatique (ou quartz). Une composition d’une douce<br />
harmonie qui sied à tous les âges de la femme. ■
30<br />
LE TOURBILLON, ORGANE RÉGLANT<br />
EN FORME DE CHEF-D'ŒUVRE<br />
Côté cadran<br />
Sans conteste, Abraham Louis Breguet<br />
(1747-1823), Neuchâtelois d'origine qui<br />
adopta la nationalité française, est le plus<br />
prestigieux horloger de tous les temps. Les<br />
ouvrages de l'horloger de la Marine française,<br />
membre de l'Académie des sciences, se<br />
distinguent par la perfection de leur<br />
exécution, leur originalité et leur élégance<br />
fonctionnelle. Il est l'auteur d'un très grand<br />
nombre d'inventions qui ont porté l'horlogerie<br />
au plus haut niveau de perfection.<br />
Abraham Louis Breguet imagine le tourbillon vers<br />
1795. Il le fait breveter le 26 juin 1801 et ne le<br />
commercialise qu'à partir de 1805. Ce système sera<br />
présenté pour la première fois au public lors de la<br />
grande exposition nationale à Paris, inaugurée le<br />
24 septembre 1806 pour une durée d'un mois.<br />
Le stand de l'horloger, au sommet de son art – deux<br />
médailles d'or de 1798 et 1802 – abrite quelques pièces<br />
étonnantes. Sous la description de sa «montre compensant<br />
toutes les inégalités qui peuvent se trouver dans le<br />
balancier et dans le ressort-spiral» apparaît enfin, pour la<br />
première fois au public, le tourbillon, breveté le<br />
7 messidor an IX (26 juin 1801). Cette invention, que<br />
son auteur a baptisée d'un terme emprunté à<br />
l'astronomie - le mot tourbillon est synonyme<br />
de système planétaire dans le langage des<br />
savants du XVIIe étonnantes. So<br />
toutes les inég inégalités inéggalités<br />
qui peuvent<br />
balancier et daans<br />
le ressort-spiral<br />
première fois s au public, le tourbb<br />
7 messiddor<br />
an IX (26 juin 188<br />
son auteur a a baptisée d'<br />
l'astronomie<br />
- le mo ot<br />
de système planét<br />
savants ddu<br />
XVII<br />
siècle - suscite, de nos<br />
jours jjours encore, encoree,<br />
un attrait majeur.<br />
L'inspiration L'insp L piratioo<br />
de son invention prend<br />
source souurce<br />
sur su<br />
un fait indéniable: la<br />
marche m e d'une montre diffère<br />
selon la position verticale dans<br />
laqu laquelle e elle est observée. Un<br />
effe effet e généré par le déséqui-<br />
lib libre r qui existe entre le<br />
ba balancier al et le spiral. Pour<br />
co compenser o ces différences, il<br />
es est st nécessaire que le centre<br />
de<br />
e gravité du système<br />
ba balancier-spiral a<br />
soit au<br />
ce centre n de rotation et s'y<br />
ma maintienne ai pendant les<br />
osc oscillations. i La finalité de ce<br />
méc mécanisme a n'est pas de<br />
suppr supprimer r ces différences, mais<br />
de dde<br />
les<br />
aatténuer<br />
jusqu'à les<br />
co compenser mpenns<br />
entièrement.<br />
Pour<br />
r y par pa parvenir, Abraham Louis<br />
Br Breguet reguet<br />
con conçoit un mécanisme<br />
capa capable able de fai faire prendre à l'ensemble<br />
échapp échappement-balancier peme ent-ba toutes les<br />
positions<br />
poss possibles. sibles Pour ce faire, il impose à<br />
cet<br />
ensemble<br />
e une<br />
rotation qu'il définit à un tour<br />
par minute. min minute. Il en<br />
résu résulte dès lors un brassage des<br />
positions verticales et,<br />
, ce ffaisant,<br />
une marche moyenne<br />
dite dit dite d'équilibre. d'é d'équilibre. ilib<br />
Il faut préciser que Breguet<br />
avait mis au point ce<br />
mécanisme complexe pour les montres de poches, la<br />
plupart du temps en position verticale. Pour les montresbracelets<br />
haut de gamme actuelles, ce système ne s'impose<br />
guère, celles-ci subissant déjà au porter un brassage des<br />
positions. L'effet de ce dispositif serait pratiquement nul<br />
quant aux corrections qu'il est censé apporter. Selon<br />
certaines théories, il pourrait même être perturbateur<br />
puisqu'il consomme de l'énergie en puisant celle nécessaire<br />
à sa rotation sur un mobile du mouvement. N'empêche que<br />
l'invention de Breguet garde toute la saveur, la beauté et<br />
l'ingéniosité d'une réalisation complexe. Un chef-d'œuvre<br />
qui donne une noblesse certaine à la montre.
Infographies Grégoire Gonthier<br />
Côté mouvement<br />
Roue de moyenne<br />
A<br />
Roue de centre<br />
Pour simplifier, on peut dire que le système réglant fonctionne<br />
comme le mobile de seconde entraîné par un rouage classique<br />
(barillet, roue de centre, roue de moyenne). La cage (A), solidaire<br />
du pignon de seconde (B) et entraînée par la roue de moyenne,<br />
renferme les organes distributeur – roue d'échappement/ancre<br />
– et régulateur – balancier/spiral. Pendant la rotation de la cage,<br />
le pignon d'échappement (D) est entraîné en rotation, provoqué<br />
par son engrènement dans la denture de la roue de seconde (C),<br />
combiné à un mouvement de révolution à la manière d'un<br />
satellite tout en tournant sur son axe.<br />
Bien que la cage pivote (un tour en une minute) en entraînant<br />
avec elle tous les organes qu'elle renferme, les mobiles conservent<br />
leurs emplacements respectifs. Les fonctions d'échappement<br />
restent donc semblables à celles des montres classiques.<br />
A la complexité de ce système s'ajoute une contrainte de poids:<br />
la cage et les pièces que celle-ci contient doivent être aussi<br />
légères que possible.<br />
D<br />
C<br />
B<br />
C<br />
B<br />
A<br />
D<br />
Pont de rouage<br />
Platine<br />
Roue de centre<br />
Barrette inférieure<br />
Roue de seconde<br />
Pignon de seconde<br />
Elément de cage inférieure<br />
Cage supérieure avec<br />
l'échappement et le balancier<br />
Tout Touut<br />
le dispositif d balancier-spiral<br />
ainsi a que q l'échappement est<br />
porté<br />
é par la cage A en deux<br />
part parties i reliées par trois<br />
pilie piliers. e<br />
Elle<br />
e se trouve elle-même<br />
fix fixée xé sur le pignon de<br />
se seconde c B, qui est séparé<br />
de<br />
e la roue de seconde C<br />
se sertie er sur la barrette infé-<br />
rie rieure e (côté mouvement).<br />
La<br />
a denture de cette roue<br />
en engrène ng avec le pignon<br />
d'é d'échappement éc D.<br />
La cage, c l'axe de balancier,<br />
la roue roo<br />
de seconde et le<br />
pigno pignon o du même nom sont<br />
da dans ans un une n parfaite coaxialité.<br />
Raquetterie (réglage avance-retard<br />
et pivotement du balancier)<br />
Barrette supérieure<br />
Roue de moyenne<br />
Barillet<br />
COMMENTÇA MARCHE?<br />
31
NOUVEAUTÉSHEURE<br />
32<br />
MAX ET SON NOUVEAU<br />
MAXIMONSTRE<br />
Avant la sortie de la très attendue Thunderbolt, MB&F présente une variante<br />
étonnante de la HM3, baptisée, non sans humour, Frog en raison de ses deux yeux globuleux. Par Thierry Brandt<br />
Singulière et passionnante aventure<br />
décidément que celle de Max<br />
Büsser et de ses amis, dont les créations<br />
apportent à chaque fois une dimension<br />
nouvelle à la haute horlogerie. Les<br />
voilà en plus qui se mettent à faire de<br />
l’humour et à baptiser leurs montres avec<br />
des noms d’animaux! Frog: il est vrai<br />
que cette nouvelle version de la HM3<br />
(Horological Machine) ne pouvait en<br />
porter un autre, elle qui fait penser à un<br />
batracien avec ses gros yeux globuleux,<br />
deux dômes pivotant en aluminium, surmontés<br />
de verres saphir. En tout cas, ses<br />
concepteurs assument complètement ce<br />
côté décalé, un peu «destroy», comme<br />
aime à le dire Maximilian Büsser:<br />
«Clairement, nous ne nous adressons pas<br />
à des clients qui sont accrochés à la tradition<br />
séculaire. Aujourd’hui, la plus<br />
belle raison de s’intéresser à la belle horlogerie<br />
mécanique est sa dimension<br />
d’œuvre d’art, de même que sa bienfacture.<br />
Si la bienfacture, le développement<br />
technique et les finitions sont du plus<br />
haut niveau, pourquoi ne pas s’aventurer<br />
dans une autre dimension artistique?»<br />
argumente le trublion, qui poursuit:<br />
«Parfois, c’est vrai, nous avons l’impression<br />
de parler le klingon (n.d.l.r.: espèce<br />
extraterrestre originaire de la planète<br />
Kronos, voir Star Trek) et que bien peu<br />
de personnes comprennent notre démarche.<br />
Mais ceux qui comprennent adorent.<br />
Ce sont des clients extrêmement<br />
fidèles.»<br />
En fait, l’idée de la HM3 Frog est née en<br />
même temps que la HM3 originelle, mais<br />
les contraintes techniques – modification<br />
du mouvement, conception des dômes<br />
en aluminium et en saphir – ont nécessité<br />
plus de dix-huit mois de mise au<br />
point. Ce qui n’a l’air de rien représente<br />
en fait une différence fondamentale. Et à<br />
l’échelle d’un moteur horloger, une différence<br />
fondamentale signifie une avalanche<br />
de casse-tête à résoudre. Par rapport<br />
à sa devancière, la Frog a demandé le<br />
développement d’un nouveau mouve-<br />
Avec ses gros yeux globuleux, la HM3 Frog se donne<br />
effectivement des airs de batracien.<br />
ment (conçu par Jean-Marc Wiederrecht,<br />
sur une base Girard-Perregaux). Car,<br />
d’une part, ce ne sont plus les aiguilles<br />
des heures et des minutes qui se déplacent<br />
autour d’un cône, mais les dômes<br />
eux-mêmes qui tournent. D’autre part, le<br />
dôme des heures de la Frog accomplit<br />
une révolution complète en douze heures,<br />
tandis que l’aiguille de la HM3 faisait<br />
de même en vingt-quatre heures. En<br />
outre, il a fallu résoudre le problème de<br />
l’usinage des demi-sphères en saphir.<br />
Autant d’improbables défis… qui sont<br />
pourtant à la base de tout le travail de<br />
MB&F: «J’ai la chance que mon associé,<br />
Serge Kriknoff, qui est beaucoup plus<br />
doué que moi au niveau technique, adore<br />
repousser les limites de ce qui a été fait<br />
dans l’horlogerie. Il va chercher des solutions<br />
dans d’autres domaines, comme,<br />
par exemple, dans le médical ou l’automobile»,<br />
souligne Max Büsser. A chaque<br />
nouvel épisode de l’aventure MB&F,<br />
toujours très attendu, l’horloger est<br />
contraint de présenter un truc toujours<br />
plus fou, toujours plus compliqué que le<br />
précédent. Flippant? «Non, pas vraiment.<br />
Les attentes des autres ne seront jamais<br />
aussi élevées que celles que j’ai envers<br />
moi-même… Nous continuerons de surprendre,<br />
mais justement, pas forcément<br />
par là où l’on nous attend. La beauté<br />
de MB&F est que l’entreprise peut évoluer<br />
sans contraintes d’ADN. C’est un<br />
laboratoire expérimental qui nous permet<br />
de jouer sur tous les registres.<br />
Préparez-vous à quelques étonnements!…»<br />
conclut-il, hilare. ■
NOUVEAUTÉSHEURE<br />
34<br />
JEU, SET ET MATCH<br />
POUR RICHARD MILLE<br />
Rafael Nadal a porté la RM 027 pendant tout le tournoi de Roland-Garros. Et<br />
la montre a tenu! Richard Mille peut désormais se vanter d’avoir inventé le tourbillon non seulement le plus léger<br />
mais aussi le plus solide de l’histoire horlogère. Par Thierry Brandt<br />
Toute nue, elle pèse environ 13 g.<br />
Avec son bracelet en polycarbonate,<br />
elle prend certes un peu de poids<br />
mais sans dépasser 18 g. Ce qui doit<br />
effectivement faire de la RM 027 l’un des<br />
tourbillons les plus légers de l’horlogerie,<br />
si ce n’est le plus léger. Mais peu<br />
importe le record en l’occurrence. Ce qui<br />
compte, c’est, d’une part, le joli coup<br />
médiatique réalisé par Richard Mille et,<br />
d’autre part, la construction de l’objet qui<br />
constitue une prouesse technique remarquable.<br />
Et voilà comment une montre<br />
partie des Breuleux se balade désormais<br />
sur les courts du monde entier au poignet<br />
de celui qui est redevenu, début juin, le<br />
numéro un mondial du tennis. Et voilà<br />
comment naît une légende horlogère,<br />
pour laquelle une poignée de collectionneurs<br />
sont prêts à débourser un demimillion<br />
de francs!<br />
Côté design, la RM 027 Rafael Nadal<br />
adopte la forme tonneau chère à la<br />
marque. Le boîtier a été réalisé dans un<br />
matériau composite à base de carbone,<br />
histoire d’allier la plus grande résistance<br />
à la plus extrême légèreté. Toujours dans<br />
la même optique, la carrure et le fond de<br />
la montre sont monobloc. Quant au mouvement,<br />
il est composé de titane et de<br />
Lital, un alliage utilisé dans l’aéronautique<br />
contenant lithium, aluminium,<br />
cuivre, magnésium et zirconium. On<br />
dirait la notice explicative d’un aliment<br />
énergétique; il ne manque plus que les<br />
vitamines… Quoi qu’il en soit, il fallait<br />
bien ça pour que le taureau de Manacor<br />
accepte de jouer tous ses matches avec sa<br />
Richard Mille. Certes, Nadal est gaucher<br />
et porte sa montre au poignet droit, mais,<br />
attention, ce n’est pas parce que la montre<br />
n’aurait pas tenu le choc de l’autre<br />
côté, dixit Richard Mille. «Dieu sait si<br />
nous l’avons testée, cette montre, rigolet-il!<br />
Lors des premiers essais, la couronne<br />
a valdingué quelque part dans l’espace et<br />
les aiguilles n’ont pas tenu. Mais nous<br />
avons poursuivi son développement<br />
pendant des mois et, maintenant, je peux<br />
vous dire qu’elle tient parfaitement le<br />
coup. D’ailleurs, comme Nadal joue ses<br />
revers à deux mains, la montre subit le<br />
même genre de traitement. Non, s’il ne<br />
peut pas la porter à gauche, c’est tout<br />
simplement parce qu’elle l’empêcherait<br />
de mouvoir normalement son poignet»,<br />
conclut l’heureux patron de la marque.<br />
Le plus amusant, dans cette histoire, c’est<br />
qu’au départ, Richard Mille n’a jamais<br />
vraiment cherché à courtiser le tennisman<br />
pour en faire son ambassadeur. «Les<br />
choses se sont faites un peu par hasard.<br />
La rencontre a eu lieu grâce à des amis<br />
communs. J’ai tout de suite trouvé que ce<br />
type était épatant, charmant, abordable,<br />
d’une grande humilité. Et c’est au fil de la<br />
discussion, comme ça, que l’idée d’un<br />
projet commun est née. D’ailleurs, ce<br />
jour-là, il a dû me prendre pour un zozo<br />
et se dire que jamais je ne pourrais revenir<br />
avec une telle montre», se souvient<br />
celui qui s’est fait une solide réputation<br />
dans les produits extrêmes. Aujourd’hui,<br />
le partenariat s’est consolidé. Et il est<br />
d’ores et déjà annonciateur d’évolutions<br />
pour l’année prochaine. ■<br />
Avec la RM 027 RN (Rafael Nadal), Richard Mille renforce encore sa position dans le créneau des montres extrêmes.
NOUVEAUTÉSHEURE<br />
36<br />
ARMAND NICOLET ET SA L08:<br />
UNE ACCESSIBLE INTEMPORELLE<br />
Sans être originale, l’histoire de la marque Armand Nicolet reste de celles qui<br />
plaisent aux amoureux d’une horlogerie d’épure, vraie, riche en valeurs historiques mais n’hésitant pas à se réclamer<br />
de potentiels à venir… Par Joël A. Grandjean / TàG Press +41<br />
Il était une fois un entrepreneur, féru<br />
de montres, connaisseur et actif dans<br />
la branche deux décennies durant. Il<br />
rencontre, en 1987, Willy Nicolet, fils<br />
d’Armand Nicolet, un horloger d’entre les<br />
deux siècles passés ayant sévi à<br />
Tramelan, haut lieu d’une horlogerie<br />
historique florissante. L’ancienne manufacture<br />
revivra, sera restaurée et restera<br />
habitée par les signes distinctifs de son<br />
fondateur, tout en s’ouvrant aux marchés<br />
actuels.<br />
Armand Nicolet, fils d’horloger, entre<br />
donc en horlogerie comme on entrait<br />
autrefois dans les ordres. Vocation et<br />
passion. A la fin du XIXe siècle, au<br />
sortir de son apprentissage, il ouvre<br />
son premier atelier d’horlogerie. Et,<br />
en 1902, s’illustre dans l’univers de<br />
la montre de poche soignée, titillant<br />
parfois celui des complications telles que<br />
les répétitions minutes, quarts ou heures,<br />
les calendriers perpétuels… Encore prisé<br />
par les collectionneurs, au détour d’un<br />
catalogue de ventes aux enchères ou<br />
d’une transmission d’héritage, ce nom est<br />
également synonyme, durant les fifties,<br />
de la production, à Tramelan, de la<br />
presque totalité des calibres Venus.<br />
Rappelons que cette ville était, à<br />
l’époque, le troisième pôle horloger de<br />
Suisse, avec la concentration de 800<br />
horlogers et 105 fabriques.<br />
Les montres ont-elle une âme? C’est la<br />
question que pose la L08,<br />
sur le mode de l’édition<br />
limitée en multiples<br />
de 150 (50 pour la<br />
version sertie). Pour<br />
la boîte, ronde et<br />
classique, la noblesse<br />
d’un acier efficace cède<br />
parfois, pour la lunette, à<br />
l’or rose ou aux diamants.<br />
Le fameux guilloché du<br />
cadran en relief, devenu<br />
signe reconnaissable<br />
du style Armand<br />
Nicolet, s’entrouvre<br />
sur des détails triés<br />
d’un calibre vintage<br />
18 000 alternances<br />
par heure, le AN0711A,<br />
concentré de nouvelles<br />
Des premières montres de poche aux<br />
garde-temps d’aujourd’hui, la tradition<br />
de la belle horlogerie classique perdure.<br />
Armand Nicolet, qui ouvrit son premier atelier<br />
d’horlogerie à la fin du XIX e siècle.<br />
technologies saupoudré des composants<br />
du calibre UT 600 de 1957, retrouvés<br />
dans les combles et les tiroirs de la maison<br />
originelle. Ce moteur à remontage<br />
manuel, dont il ne reste par définition<br />
qu’un nombre limité d’exemplaires, se<br />
distingue par son épaisseur réduite. Oh,<br />
pas celle d’une extraplate, mais déjà avec<br />
l’élégance des discrètes qui en jettent<br />
sans chercher à s’imposer.<br />
Tenu en laisse par un bracelet cuir<br />
de crocodile, le temps servi par cette<br />
réincarnation des valeurs originelles de<br />
l’horlogerie se devait de s’entourer<br />
d’attentions subtiles: décorations Côtes de<br />
Genève, rhodium perlé, index appliqués à<br />
la main, étanchéité à 5 atmosphères et<br />
réserve de marche de 36 heures. ■
SOUSLALOUPE<br />
38<br />
PORSCHE DESIGN OU LA<br />
CONJUGAISON PARFAITE DU STYLE ET<br />
DE LA FONCTIONNALITÉ<br />
Pour tous les passionnés de beaux objets et de design moderne, épuré et<br />
fonctionnel, Porsche Design est une référence. En matière d’horlogerie, il en va de même, avec en plus un<br />
contenu technique qui ne cesse de progresser. Par Thierry Brandt<br />
Porsche Design: un nom, une référence en matière de produits<br />
de luxe à inspiration technique. Le label a été créé<br />
en 1972, à Zell am See, en Autriche, par Ferdinand<br />
Alexander Porsche en personne. Un bureau dont le style est<br />
reconnaissable entre mille, qu’il se décline dans le domaine de<br />
la mode et du sport (chaussures), de l’électroménager (bouilloires,<br />
robinetterie), des accessoires (bagages, lunettes), des parfums<br />
pour hommes ou des produits électroniques (téléphones<br />
portables), entre autres.<br />
Dès le début, l’ambition du créateur de la légendaire 911 est de<br />
créer de beaux produits qui puissent être également de véritables<br />
compagnons de vie, classiques, utiles et fonctionnels. Il<br />
cherche à mettre en œuvre sa vision des choses: «Quand on<br />
s’interroge sur la fonction d’un objet, sa forme s’impose souvent<br />
à vous comme une évidence», argumente-t-il. Et quand il<br />
débarque dans le monde horloger, il frappe d’emblée un grand<br />
coup avec le lancement, en 1972, d’une montre-bracelet entièrement<br />
noire. Laquelle bénéficie d’un traitement de surface<br />
révolutionnaire à l’époque, le Physical Vapour Deposition, ou<br />
PVD.<br />
Huit ans plus tard, en 1980, Porsche Design revient avec une<br />
nouveauté qui, elle aussi, fera des émules: un garde-temps dont<br />
le boîtier est composé de titane, suivi, quelques années plus<br />
tard, d’une montre de plongée, elle aussi en titane, destinée aux<br />
nageurs de combat de la marine allemande. En l’occurrence, ce<br />
n’est pas par hasard que ce matériau a été utilisé. A l’époque<br />
en effet, une montre de plongée se devait d’être entièrement<br />
Ferdinand Alexander Porsche, le créateur de la célèbre 911, est également le fondateur<br />
d’un bureau de design qui fait aujourd’hui référence, notamment en horlogerie.<br />
antimagnétique, pour éviter le déclenchement par inadvertance<br />
d’une mine.<br />
Aujourd’hui, Porsche Design poursuit son aventure horlogère<br />
dans le même esprit, désormais solidement adossée à une<br />
marque helvétique de légende, Eterna. Et c’est à Granges, sous
le même toit, avec le même team directorial et les mêmes<br />
équipes techniques qu’elles se développent toutes les deux.<br />
Cette année, le fruit du travail de fond entamé par Porsche<br />
Design a pour nom P’6780 Diver. Une montre de plongée<br />
qui fait une nouvelle fois parler d’elle. Et pour cause.<br />
P’6780 DIVER<br />
UN HABILLAGE UNIQUE<br />
A la base de ce très bel objet, il y a un mouvement<br />
automatique classique et éprouvé:<br />
le 2892 d’ETA, étanche à 1000 m. Côté<br />
conception et habillage, la montre se<br />
distingue par une série de caractéristiques<br />
remarquables. Le container rond<br />
en acier inoxydable, qui abrite le<br />
cadran et le mouvement, est logé<br />
dans un pont en titane microbillé,<br />
intégrant aussi le bracelet en<br />
caoutchouc. Dispositif technique<br />
ingénieux destiné à protéger le<br />
container basculant, qui doit<br />
être sorti de son logement pour<br />
effectuer les réglages. Ce système<br />
permet d’éviter tout déplacement<br />
ou endommagement involontaire<br />
de la couronne. Quant à la lunette,<br />
elle est bloquée une fois le container<br />
ancré dans le pont, afin que le temps<br />
de plongée ne puisse pas être modifié.<br />
Et même si la Diver n’est pas, au sens<br />
strict du terme, un instrument de plongée<br />
professionnel, elle n’a rien à envier à ces derniers.<br />
Elle dispose, en effet, d’un système de<br />
joint original, en forme de U, qui rend inutile<br />
aussi bien une soupape à hélium qu’une couronne<br />
vissée. Même dans quelques centimètres d’eau, la<br />
pression garantit une étanchéité parfaite. Enfin, l’extension<br />
spéciale du bracelet permet de porter la montre<br />
par-dessus la combinaison de plongée, sans avoir à<br />
ouvrir la boucle déployante.<br />
Reste le cadran, qui a évidemment été travaillé dans le<br />
respect des codes dévolus à ce genre de montre. Les<br />
aiguilles sont surdimensionnées, les grands chiffres et les<br />
index bâtons sont revêtus d’une substance luminescente<br />
blanche, afin que le cadran soit toujours parfaitement lisible.<br />
De plus, les indications blanches contrastent avec le cadran<br />
noir. Le guichet dateur se trouve à 9 h. A noter, sur le rehaut,<br />
la minuterie qui permet de régler le temps de plongée par une<br />
39
SOUSLALOUPE<br />
40<br />
FICHE TECHNIQUE<br />
MOUVEMENT: AUTOMATIQUE, ETA 2892-A2, RÉSERVE DE MAR-<br />
CHE DE 42 H, 28 800 ALT./H., 21 RUBIS, MASSE OSCILLANTE<br />
PORSCHE DESIGN<br />
FONCTIONS: HEURES, MINUTES ET SECONDES, DATE<br />
CADRAN: NOIR, INDICATION DE LA DATE À 9 H, INDEX BÂTONS<br />
ET CHIFFRES ARABES REVÊTUS DE SUBSTANCE LUMINESCENTE<br />
BLANCHE, REHAUT AVEC INDICATION DU TEMPS DE PLONGÉE ET<br />
MINUTERIE<br />
AIGUILLES: AIGUILLE CENTRALE HEURES NOIRE AVEC POINTE<br />
GRISE REVÊTUE DE SUBSTANCE LUMINESCENTE BLANCHE,<br />
AIGUILLE CENTRALE MINUTES NOIRE AVEC POINTE JAUNE REVÊ-<br />
TUE DE SUBSTANCE LUMINESCENTE BLANCHE, AIGUILLE CEN-<br />
TRALE SECONDES NOIRE AVEC POINTE BLANCHE BOÎTIER ET FOND: CONTAINER EN ACIER ET PONT EN TITANE<br />
MICROBILLÉ, GLACE SAPHIR ANTIREFLETS DOUBLE FACE<br />
INRAYABLE, COURONNE NON VISSÉE GRÂCE AU SYSTÈME DE<br />
JOINT SPÉCIAL, DÉCOR CLOUS DE PARIS, FOND EN TITANE VISSÉ<br />
PAR QUATRE VIS, ÉTANCHE JUSQU’À 1000 M (100 ATM), DIAMÈ-<br />
TRE 46,8 MM, ÉPAISSEUR 17,05 MM<br />
rotation dans le sens contraire des aiguilles et dont la courbe<br />
jaune vif fait ressortir les quinze premières minutes.<br />
Design épuré parfaitement maîtrisé, solutions techniques<br />
innovantes en matière d’habillage, combinaison réussie des<br />
matériaux et des différents types de finitions: pas de doute, la<br />
P’6780 Diver possède tous les atouts pour prétendre au statut<br />
d’icône. ■<br />
INTERVIEW CROISÉE DE PATRICK<br />
SCHWARZ, CEO, ET PATRICK KURY, DIRECTEUR<br />
TECHNIQUE D’ETERNA ET DE PORSCHE DESIGN<br />
LA FAMILLE PORSCHE A RACHETÉ ETERNA EN 1995 ET A<br />
CONFIÉ À CETTE MÊME ENTREPRISE LA LICENCE PORSCHE<br />
DESIGN. QUELLE EST LA STRATÉGIE QUE VOUS CHERCHEZ À<br />
METTRE EN ŒUVRE DEPUIS LORS? Patrick Schwarz: C’est une<br />
stratégie à long terme qui vise une verticalisation maximale.<br />
Nous voulons retrouver la compétence technique qui était celle<br />
d’Eterna durant les grandes années. A terme, chez Eterna<br />
BRACELET ET BOUCLE: BRACELET EN CAOUTCHOUC NOIR,<br />
BOUCLE DÉPLOYANTE EN ACIER ET TITANE MICROBILLÉ AVEC<br />
EXTENSION DE PLONGÉE ■<br />
comme chez Porsche Design, nous allons continuer à développer<br />
nos propres mouvements, qui équiperont les modèles haut<br />
de gamme. Dans ce but, nous avons beaucoup investi dans le<br />
bureau technique et dans le parc de machines. Pour ce qui est<br />
des produits d’entrée de gamme, nous avons l’intention de<br />
poursuivre notre collaboration avec des tiers. Plus globalement,<br />
nous avons la chance de pouvoir travailler en parallèle sur deux<br />
marques qui ne se cannibalisent pas. D’un côté, Eterna propose<br />
des produits de tradition plutôt classiques; de l’autre, Porsche<br />
Design se profile sur un créneau plus sportif.<br />
Patrick Kury: Chez Porsche Design, il ne s’agit pas seulement de<br />
travailler sur le design, mais aussi sur la fonctionnalité. Ce<br />
qui paraît simple de l’extérieur demande souvent beaucoup de<br />
technologie en amont. Nous en avons un bon exemple avec la<br />
réalisation de la P’6780 Diver.<br />
CETTE STRATÉGIE DE REDÉPLOIEMENT DES DEUX MARQUES<br />
DOIT POUVOIR S’APPUYER SUR UN RÉSEAU DE DISTRIBUTION.
TRAVAILLEZ-VOUS ÉGALEMENT LÀ-DESSUS? P.S.: Bien sûr.<br />
Nous avions prévu de mettre l’accent sur la distribution en<br />
2009, mais, compte tenu de la crise, nous avons un peu ralenti<br />
le processus l’année dernière.<br />
ET EN 2010? P.S.: Je suis très satisfait des résultats de<br />
Baselworld. La distribution a bien compris ce que nous voulions<br />
faire. Les détaillants sont venus nous voir en nombre. J’ai même<br />
été surpris par l’excellente réaction de plusieurs marchés<br />
asiatiques. A leurs yeux, nos produits sont judicieusement<br />
positionnés. Nous allons donc nous développer sur les marchés<br />
en question. Ailleurs, là où nous sommes déjà présents depuis<br />
longtemps, nous allons faire des efforts qualitatifs.<br />
ETERNA, POUR NE PARLER QUE DE CETTE MARQUE, EST DONC<br />
BIEN PARTIE POUR RETROUVER SON LUSTRE D’ANTAN? P.S.: Je le<br />
crois. Cela faisait effectivement un moment qu’Eterna avait<br />
perdu son ADN. C’est pour cela que nous avons, dans une<br />
première phase, opéré un travail de fond. Et maintenant, nous<br />
pouvons aller voir nos clients non seulement avec quelques<br />
modèles, mais avec un vrai concept et des collections cohérentes.<br />
Aujourd’hui, chez Eterna, marque qui se situe dans le<br />
segment intermédiaire, nous sommes capables de proposer des<br />
collections manufacture à des prix abordables, qui commencent<br />
à 5600 francs.<br />
C’EST UN PEU LA POLITIQUE DES PETITS PAS ADAPTÉE À L’HOR-<br />
LOGERIE… P.S.: Oui. Ce n’est pas le genre de la maison de se<br />
montrer agressif. Nous avons opté pour une politique de développement<br />
modeste et sage. D’autre part, nous insistons beaucoup<br />
sur la qualité et la fiabilité de nos produits. Tout ce qui<br />
Les chevilles ouvrières du redéploiement d’Eterna et de Porsche Design:<br />
Patrick Schwarz, CEO (à gauche), et Patrick Kury, directeur technique.<br />
quitte la maison ici à Granges ne doit jamais y revenir, sauf bien<br />
sûr pour les révisions habituelles.<br />
CÔTÉ MARKETING ET PUBLICITÉ, VOUS NE FAITES APPEL À<br />
AUCUN AMBASSADEUR, VOUS NE METTEZ EN AVANT QUE LES<br />
PRODUITS. EST-CE PAR MANQUE DE MOYENS? P.S.: Ici, chez<br />
Eterna comme chez Porsche Design, nous n’avons qu’un objectif:<br />
la clientèle doit être convaincue par la qualité et la fiabilité<br />
des produits. Ce sont eux et rien d’autre que nous mettons en<br />
avant. Alors bien sûr, c’est moins tapageur que d’utiliser des<br />
stars et cela prend plus de temps. Mais c’est notre stratégie.<br />
Maintenant, si une personnalité faisait la demande pour porter<br />
une de nos montres, nous serions bien entendu ouverts. Nous<br />
savons, par exemple, que Bruce Willis porte une Porsche<br />
Design… S’il veut venir ici, nous le recevrons bien entendu avec<br />
plaisir. ■<br />
Le siège d’Eterna à Granges, dans le canton de Soleure.<br />
41
DÉVELOPPEMENTDURABLE<br />
42<br />
LE SECTEUR HORLOGER<br />
DOIT MONTRER L’EXEMPLE<br />
Economiser l’énergie c’est bien. Respecter un bilan carbone neutre, aussi.<br />
Développer une filière or propre et éthique, encore mieux. Mais les marques suisses d’excellence doivent faire<br />
plus d’efforts en matière de responsabilité sociale et environnementale. Telle est l’analyse du consultant<br />
Christopher Cordey. Propos recueillis par Thierry Brandt<br />
VOUS AVEZ TRAVAILLÉ PLUS VINGT ANS EN SUISSE ET EN ASIE<br />
POUR LE COMPTE DE PLUSIEURS MULTINATIONALES ACTIVES<br />
DANS LE SECTEUR DU LUXE. QU’EST-CE QUI VOUS A POUSSÉ À<br />
VOUS INTÉRESSER AU PROBLÈME DE LA RESPONSABILITÉ<br />
SOCIALE ET À DEVENIR CONSULTANT EN LA MATIÈRE? La<br />
responsabilité sociale est, au XXIe siècle, une des grandes chances<br />
des entreprises du luxe, et horlogères en particulier. Notre<br />
idée, c’est de démontrer que la maximisation des profits n’est<br />
pas une fin en soi et que de s’engager pour un monde meilleur<br />
fait partie des exigences indispensables. Nous essayons d’introduire<br />
dans la culture de ces grandes entreprises la notion de<br />
partage. Nous les amenons à prendre conscience que, dans<br />
beaucoup de secteurs, elles doivent changer de comportement.<br />
DONNEZ-NOUS UN EXEMPLE… Prenons le problème de<br />
l’approvisionnement en matières premières, comme l’or par<br />
exemple. Chacun voit bien qu’il y a un monde entre les deux<br />
extrémités de la chaîne, entre le salaire du chercheur d’or et le<br />
prix de la montre ou du bijou qui figure dans<br />
la devanture d’une boutique. Dans le domaine,<br />
les entreprises pourraient parfaitement<br />
diminuer leurs marges, qui sont souvent<br />
gigantesques, pour mettre en place des<br />
filières plus propres, plus éthiques. L’idée<br />
n’est pas de donner des leçons de morale et<br />
de jouer les ayatollahs, mais d’attirer l’attention,<br />
de rendre les choses un peu meilleures.<br />
Un certificat de traçabilité pour tout bijou ou toute montre vendue sur le marché?<br />
Une bonne idée à développer par tous les acteurs de la branche.<br />
BEAUCOUP D’ENTREPRISES, COMME CARTIER POUR NE CITER<br />
QUE CET EXEMPLE, FONT DÉJÀ DES EFFORTS EN LA MATIÈRE,<br />
NON? Beaucoup d’entreprises, non, mais quelques-unes en tout<br />
cas. Il y a effectivement des actions pour moraliser la chaîne<br />
d’approvisionnement de l’or, des diamants et des pierres<br />
précieuses. On peut citer l’action du Responsible Jewellery<br />
Council (RJC). Mais il s’agit rarement de la priorité N° 1 sur les<br />
agendas. Pour l’heure, la prise de conscience se fait au niveau<br />
de quelques CEO. Il faut, à terme, qu’elle concerne tout le management<br />
et tous les acteurs de la chaîne de distribution. C’est<br />
comme cela que les choses peuvent changer.<br />
QUELS AVANTAGES LES ENTREPRISES CONCERNÉES PEUVENT-<br />
ELLES TIRER D’UN CHANGEMENT DE COMPORTEMENT? Ils sont<br />
innombrables. D’abord, c’est une question de réputation et<br />
d’image. Lesquelles sont capitales quand on est acteur dans le<br />
domaine du luxe et qu’on propose des<br />
produits d’excellence. Ces entreprises-là<br />
doivent montrer l’exemple. C’est également<br />
un bon moyen de changer son business<br />
model, de réévaluer sa position stratégique<br />
sur les marchés et de réfléchir plus profondément<br />
aux relations homme/entreprise et<br />
entreprise/environnement. Dans un premier<br />
temps, il est vrai que cela peut engendrer des
coûts supplémentaires, mais, à plus long terme, les économies<br />
d’échelle peuvent être considérables. Au final, tous ces éléments<br />
positifs donnent des arguments de vente supplémentaires aux<br />
marques. Dans l’alimentation et la cosmétique, on est désormais<br />
en mesure de démontrer la traçabilité des produits que l’on met<br />
en vente, certificat à l’appui. Ces principes sont parfaitement<br />
applicables dans l’horlogerie et la bijouterie.<br />
A CE PROPOS JUSTEMENT, LE CONSOMMATEUR, OU LE CLIENT,<br />
A-T-IL UN RÔLE À JOUER? Evidemment. A l’échelon individuel<br />
comme à celui des ONG, il peut exercer une forme de pression<br />
importante. Aujourd’hui, pour reprendre l’exemple de l’alimentation<br />
ou de la cosmétique, on estime que 6 à 8% des consommateurs<br />
se renseignent en profondeur avant tout achat. Quelle<br />
est la composition de la crème que je mets sur ma peau? Ce que<br />
je donne à manger à mon enfant est-il sain? Telles sont les<br />
questions qu’ils se posent. Et les clients de demain, dans cinq,<br />
dix ou quinze ans, comment réagiront-ils? Je fais le pari que<br />
leur niveau de conscience et d’exigence va beaucoup augmenter.<br />
On ne pourra plus les berner. Ce sera pareil pour les<br />
Christopher Cordey, consultant, invite les entreprises à plus de<br />
responsabilité sociale et environnementale.<br />
De l’extraction à la création de bijoux et de montres, la filière d’approvisionnement<br />
de l’or n’est pas toujours transparente.<br />
consommateurs de biens de luxe. Mieux: avant les autres, ils<br />
voudront montrer l’exemple. Naturellement aussi, le personnel<br />
de vente devra être mieux formé et capable de donner toutes les<br />
infos nécessaires aux clients.<br />
VOUS, EN TANT QUE CONSULTANT, QUE POUVEZ-VOUS<br />
APPORTER AUX ENTREPRISES INTÉRESSÉES? Je vous réponds<br />
d’abord par une question: quelle est l’entreprise horlogère qui,<br />
aujourd’hui, a fait l’analyse complète du cycle de vie d’une<br />
montre et de tous les composants de celle-ci, au-delà du bilan<br />
carbone des bâtiments et des usines? Aucune, sans doute. Voilà<br />
pourquoi la première chose est de faire comprendre aux<br />
dirigeants d’entreprise qu’il s’agit d’un pari sur l’avenir, d’un<br />
processus à long terme. C’est la première étape, indispensable:<br />
la prise de conscience. Ensuite, par un travail d’analyse et de<br />
conseil, nous leur proposons des solutions pour mettre en<br />
œuvre et développer les principes dont on vient de parler à tous<br />
les échelons. Enfin, nous sommes également capables de<br />
mettre en relation l’entreprise avec d’éventuels partenaires<br />
intéressants pour elle, comme, par exemple, un fournisseur d’or<br />
propre. Bref, notre rôle est de jeter des ponts, de jouer les<br />
facilitateurs. Plus généralement, nous organisons également des<br />
rencontres et des séminaires pour promouvoir la responsabilité<br />
sociale au sein de l’entreprise. ■<br />
Pour tout renseignement:<br />
WholeBeauty SA – Chemin de Terre Bonne 1 – 1262 Eysins<br />
Tél. 022 362 51 88 – www.wholebeauty.ch<br />
43
DÉVELOPPEMENTDURABLE<br />
44<br />
GEORGES KERN: «IWC SE<br />
CONCENTRE SUR SES FONDAMENTAUX»<br />
Le patron de la manufacture la plus orientale de Suisse revient brièvement<br />
sur l’année 2009, commente la stratégie de la marque et insiste sur ses engagements en matière de développement<br />
durable et de responsabilité sociale. Propos recueillis par Thierry Brandt<br />
REVENONS SUR L’ANNÉE 2009.<br />
VOUS AVEZ RÉGULIÈREMENT<br />
AFFIRMÉ QU’IWC S’EN ÉTAIT MIEUX TIRÉE QUE LES AUTRES. CES<br />
PRÉVISIONS SONT-ELLES CONFIRMÉES AUJOURD’HUI PAR LES<br />
CHIFFRES? Chez IWC, notre objectif a toujours été de surperformer<br />
quand les marchés s’envolent et de mieux résister que les<br />
autres quand ils stagnent. En 2009, même si nous avons<br />
souffert comme les autres, nous avons réussi notre pari et nous<br />
n’avons jamais été dans la situation de devoir licencier.<br />
QUELLES SONT LES LEÇONS À TIRER DE LA CRISE? EST-ELLE EN<br />
TRAIN DE GÉNÉRER DE NOUVELLES HABITUDES DE CONSOMMA-<br />
TION? Si la marque résiste mieux, c’est parce qu’elle dispose<br />
d’une longue histoire et qu’elle défend de vraies valeurs<br />
horlogères. Ce sont des choses qui parlent aux clients qui,<br />
aujourd’hui, n’achètent plus comme autrefois. Désormais, l’acte<br />
d’achat est plus réfléchi. Les gens s’informent en amont et ne<br />
veulent plus prendre de risque, a fortiori quand ils sont intéressés<br />
par une belle montre. Donc, ils se replient volontiers sur des<br />
valeurs sûres.<br />
Georges Kern, un patron de la nouvelle génération pour qui le développement<br />
durable n’est pas qu’une formule de marketing.<br />
PRÉCISÉMENT, CÔTÉ PRODUITS,<br />
QUELS SONT CEUX QUI ONT MIEUX<br />
RÉSISTÉ À LA CRISE? Ceux qui appartiennent aux collections<br />
classiques comme la Portugaise, la Pilote ou la Portofino. Quant<br />
à l’Aquatimer, que nous venions de restyler, elle est arrivée au<br />
bon moment. Bref, nous avons bien fait de ne pas nous<br />
aventurer sur des terrains qui n’étaient pas les nôtres, de<br />
résister aux sirènes du bling-bling et de nous concentrer sur<br />
nos fondamentaux. Cette gamme solide et variée nous permet<br />
d’aller sur de nouveaux segments et de moduler notre offre en<br />
fonction des pays et des marchés.<br />
QUELLES SONT LES PERSPECTIVES POUR 2010 ET LES ANNÉES<br />
SUIVANTES? IWC VA-T-ELLE CONTINUER DE SE DÉVELOPPER? LA<br />
GAMME DES PRODUITS VA-T-ELLE S’ÉTOFFER? EXISTE-T-IL DES<br />
NOUVEAUX SEGMENTS À OCCUPER? Première chose: dans le<br />
segment de la haute horlogerie, nous allons poursuivre notre<br />
politique de développement de nos propres mouvements. Pour<br />
les produits d’entrée de gamme, nous allons bien entendu continuer<br />
de travailler avec ETA. Dans le domaine, on ne peut pas
faire mieux. Dans l’ensemble, nous cherchons à consolider<br />
notre héritage, en essayant de surprendre avec ce qui existe<br />
déjà. Comme dans l’automobile, tous les quatre ou cinq ans,<br />
nous faisons évoluer l’une ou l’autre de nos collections.<br />
PRÈS DE 40 MILLIONS ONT ÉTÉ INVESTIS DANS LA TRANSFOR-<br />
MATION DE LA MANUFACTURE DE SCHAFFHOUSE. D’AUTRES<br />
INVESTISSEMENTS ONT-ILS ÉTÉ PLANIFIÉS EN LA MATIÈRE?<br />
Notre but n’est pas de nous lancer dans une course folle à<br />
la croissance et au prestige. Ce que nous allons faire prochainement,<br />
c’est agrandir le service après-vente et transférer une<br />
partie de la production dans des locaux que nous venons de<br />
racheter, non loin de notre usine mère.<br />
CÔTÉ MARCHÉ ET DISTRIBUTION, IWC VA-T-ELLE POURSUIVRE<br />
SA POLITIQUE D’OUVERTURE DE FLAGSHIP STORES, COMME À<br />
HONGKONG? C’est la voie stratégique que nous avons choisie<br />
notamment en Asie, là où le réseau des détaillants n’est pas<br />
suffisamment structuré. En Europe, nous continuons de<br />
travailler avec notre réseau habituel. Les boutiques propres<br />
coûtent relativement cher, mais elles nous permettent de<br />
raconter notre histoire et de mettre en scène l’univers que nous<br />
avons choisi. On les utilise à la fois comme plateformes<br />
commerciales et de communication.<br />
IWC COMMUNIQUE BEAUCOUP SUR SON ENGAGEMENT DANS LE<br />
DÉVELOPPEMENT DURABLE (FONDATIONS COUSTEAU ET<br />
CHARLES DARWIN, PROJET PLASTIKI, LAUREUS, ETC.) LA CRISE<br />
A-T-ELLE MIS UN FREIN À CET ENGAGEMENT? Pour nous, il<br />
s’agit d’un engagement fondamental, pas simplement d’un outil<br />
A Schaffhouse, au bord du Rhin, la manufacture IWC, entièrement rénovée,<br />
est un des plus belles de Suisse.<br />
de marketing. Notre objectif est vraiment de travailler dans la<br />
durée et de défendre des projets importants. Nous cherchons à<br />
privilégier des aventures à la fois humaines et technologiques.<br />
Je trouve qu’il est beaucoup plus intéressant de fonctionner<br />
comme cela que de payer très cher pour coller un logo sur le<br />
casque d’un pilote de Formule 1. Je sais bien que nous n’allons<br />
pas sauver le monde et que notre premier souci est tout de<br />
même de vendre des montres, mais nous essayons de faire au<br />
mieux dans le contexte qui est le nôtre et dans notre sphère<br />
d’influence, en apportant un peu de rêve, en mettant en valeur<br />
des projets intelligents.<br />
VOUS INSISTEZ RÉGULIÈREMENT SUR LE RÔLE SOCIAL DE<br />
L’ENTREPRISE. QU’EST-CE QUE TOUT CELA A À VOIR AVEC LE<br />
BUSINESS? Je crois que toute société sérieuse doit travailler à<br />
sa responsabilité civile et sociale. Par exemple, nous avons fait<br />
en sorte que nos bâtiments respectent un bilan neutre en CO2. Nous calculons le coût énergétique de toutes nos activités, de<br />
nos déplacements, du chauffage. Et, le cas échéant, nous<br />
achetons des certificats pour compenser de trop grandes<br />
dépenses énergétiques. En interne, c’est une source de motivation<br />
et de fierté importante pour tous les collaborateurs, qui<br />
doivent trouver chez nous les meilleures conditions de travail<br />
possible. C’est enrichissant pour tout le monde. Là de nouveau,<br />
nous essayons de faire le maximum dans notre sphère<br />
d’influence. Je pense que tôt ou tard, toutes les entreprises<br />
devront tendre à ce genre de modèle. Si elles ne le font pas<br />
d’elles-mêmes, elles seront de toute façon condamnées à subir<br />
d’énormes pressions extérieures. ■<br />
Voir également les nouveautés IWC en page suivante.<br />
45
DÉVELOPPEMENTDURABLE<br />
46<br />
2010, ANNÉE DE LA PORTUGAISE<br />
C’est l’une des collections phares d’IWC, née à la fin des années 30 à la suite<br />
d’une commande de deux importateurs portugais. Dans la livraison 2010, une gamme qui va d’un chrono simple et<br />
élégant à une série de grandes complications (tourbillons), en passant par un quantième perpétuel et une répétition<br />
minutes. Par Thierry Brandt<br />
Comment naissent les grandes<br />
collections et quels sont les<br />
facteurs qui font que tel ou tel<br />
modèle accède au rang de classique<br />
intemporel, voire même d’icône? La<br />
conception et la fiabilité du mouvement?<br />
Oui. La beauté d’une forme, d’un galbe?<br />
Certainement. Le choix des matériaux?<br />
Bien sûr. La qualité des finitions et des<br />
terminaisons? Evidemment. Mais il y a<br />
chaque année des dizaines de modèles<br />
qui répondent à ces critères que l’on peut<br />
qualifier d’objectifs. Restent ceux qui<br />
échappent à l’analyse la plus exhaustive<br />
et qui tiennent à l’histoire, à l’émotion, à<br />
tous ces petits détails qui échappent<br />
inévitablement à ses concepteurs.<br />
Le Yacht Club Chronographe Flyback.<br />
Chez IWC, la fameuse gamme des<br />
Portugaise est née à la fin des années 30,<br />
à la suite d’une commande de deux<br />
importateurs de Lisbonne et de Porto,<br />
désireux d’obtenir des instruments de<br />
mesure de grande taille, portables au<br />
poignet, fiables et précis. La manufacture<br />
de Schaffhouse répondit à la demande en<br />
dotant ses nouveaux garde-temps de<br />
mouvements de montres de poche.<br />
Depuis, la famille, toujours vaillante, a<br />
généré de nombreux héritiers, tout en<br />
conservant ses principaux codes originels,<br />
comme les boîtiers ronds, classiques<br />
et élégants, de grande dimension, et des<br />
cadrans très ouverts afin de faciliter la<br />
lecture de l’heure.<br />
Difficile de faire son choix parmi les neuf<br />
références 2010 de la collection… Mais<br />
on mettra tout de même en avant, de<br />
manière purement subjective, le Yacht<br />
Club Chronographe Flyback qui, pour la<br />
petite histoire, est la seule pièce de la<br />
famille à posséder des aiguilles et des<br />
index lumineux.<br />
Quant à la Grande Complication, c’est un<br />
des musts du genre. Limité à 50 exemplaires,<br />
le modèle (chrono automatique)<br />
en impose avec son diamètre de 45 mm,<br />
mais sans tapage et dans une belle<br />
élégance. Il vaut évidemment aussi pour<br />
sa technicité: quantième perpétuel,<br />
phases de lune, petite seconde avec<br />
mécanisme d’arrêt, répétition minutes, en<br />
plus des fonctions traditionnelles.<br />
Le Tourbillon Mystère Rétrograde.<br />
Last but not least, le Tourbillon Mystère<br />
Rétrograde, qu’on ne peut passer sous<br />
silence en raison de son magnifique<br />
cadran blanc (ou gris perle). Lequel possède<br />
un tourbillon minute placé à midi<br />
(une sorte de «douze vivant», comme on<br />
aime à dire à Schaffhouse), une réserve<br />
de marche de sept jours et un affichage<br />
rétrograde de la date. Le tout placé dans<br />
un généreux boîtier de 44,2 mm. ■<br />
La Grande Complication.
DÉVELOPPEMENTDURABLE<br />
48<br />
LE BÂTIMENT MODÈLE<br />
D’AGENHOR: UNE SACRÉE COMPLICATION<br />
Tandis qu’un vent de bonne conscience environnementale souffle sur<br />
l’horlogerie, certains ont une longueur d’avance. Jean-Marc Wiederrecht s’illustre en dehors du cadre des<br />
complications horlogères. Par Joël A. Grandjean / TàG Press +41<br />
environnementale<br />
occupe la pensée ambiante,<br />
L’éthique<br />
même dans le monde du luxe. Nombre de marques<br />
exploitent le filon sur le plan de leur communication, brandissant<br />
leurs louables efforts. Ici un label Minergie, là une visite de<br />
manufacture où s’énumèrent, à force de détails techniques, les<br />
avancées significatives, les récupérations et économies d’énergie<br />
réalisées. Jean-Marc Wiederrecht, principalement connu en<br />
horlogerie pour être un maître ès complications, devient aussi,<br />
dans le monde de la construction architecturale, une référence<br />
citée.<br />
LE W-ZÉRO CO 2<br />
, NOUVELLE NORME? Avoir de la suite dans les<br />
idées. Le Chaux-de-Fonnier d’origine est depuis longtemps<br />
sensible au respect de l’environnement. L’histoire commence par<br />
le sujet du master de son fils Nicolas, au sortir de sa formation<br />
universitaire HEC. L’élève planche sur les solutions qui permettraient<br />
à Agenhor – Atelier genevois d’horlogerie, l’entreprise<br />
familiale qu’il s’apprête à rejoindre, de réussir sa mue. Car à<br />
Bernex, où elle est domiciliée, et même avec la volonté de rester<br />
une société à taille humaine, tout est devenu trop petit. Tous les<br />
scénarios sont envisagés. Déménager, louer, réaménager?…<br />
A Meyrin (GE), le bâtiment d’Agenhor se veut un modèle du genre:<br />
le développement durable appliqué à l’architecture<br />
et au fonctionnement de tous les services.<br />
Finalement, un budget «construction»<br />
est arrêté. La chance veut qu’un<br />
terrain à bâtir se présente à Meyrin. C’est alors que les choses<br />
se compliquent. Papa Wiederrecht ressasse depuis toujours le<br />
rêve utopique de bâtir une usine qui n’ait aucun impact sur<br />
l’environnement. Zéro émission de CO2, rien de moins. Il va<br />
sans dire qu’un tel leitmotiv engendre des contraintes et écarte<br />
d’emblée les options architecturales. Le nouveau bâtiment et ses<br />
habitants devront donc produire au moins autant d’énergie<br />
qu’ils en consomment. Qui dit «au moins» sous-entend même<br />
qu’ils pourraient en produire plus que nécessaire! Naîtrait alors<br />
une nouvelle notion, celle des «charges négatives». Autrement<br />
dit, un bâtiment qui pourrait même reverser de l’énergie à la<br />
communauté.<br />
Longuement ruminée par Jean-Marc Wiederrecht, l’idée est,<br />
selon lui, une question de bon sens: construire des dalles<br />
supérieures de plus grande taille que le bâtiment, comme des<br />
«casquettes», doit permettre, en hiver, de faire pénétrer le soleil<br />
par les surfaces vitrées, apportant sa contribution au chauffage<br />
intérieur. Ces mêmes dalles, en été, pourraient «briser les<br />
rayons», les empêchant de taper sur les façades. Autre contrainte<br />
revendiquée: se passer d’énergie fossile. Ni pétrole ni gaz. Reste
la pompe à chaleur, puisant les calories<br />
dans le sol. Deux puits de 140 m de<br />
profondeur sont creusés. A ce niveau<br />
souterrain, la température est constante,<br />
à 12° C environ. Un fluide caloporteur<br />
(de l’eau et de l’alcool pour faire simple)<br />
transporte les calories supplémentaires<br />
(l’hiver, l’air est plus frais) et les stocke<br />
au sortir d’un processus mêlant dilatation<br />
et pression, jusqu’à obtenir une eau<br />
à 30° C, laquelle infiltrera alors la tuyauterie<br />
du chauffage au sol.<br />
SOLAIRE ET SOIN DU DÉTAIL Si extraire et<br />
faire circuler ce liquide requiert tout de<br />
même une certaine consommation<br />
d’électricité, celle-ci est quatre à cinq fois<br />
inférieure aux besoins normaux. Là où<br />
100 unités électriques auraient été<br />
nécessaires, seules 20 suffiront. La<br />
prochaine étape, autre phase d’investissement,<br />
sera l’installation de panneaux<br />
solaires. Les prévisions sont mesurables:<br />
avec 200 m2 de panneaux, on répondra<br />
aux 30 000 kWh nécessaires au fonctionnement<br />
de l’ensemble du bâtiment,<br />
ordinateurs, éclairages et machines compris.<br />
Comme dans l’horlogerie, tout est dans le<br />
détail, le «mieux que nécessaire» ou le<br />
réglage. Ici, l’isolation entoure même le<br />
sous-sol. La masse des dalles en béton a<br />
été augmentée, rendant optimales leur<br />
inertie et leur capacité de réfraction.<br />
Tantôt restituent-elles la chaleur, tantôt<br />
la fraîcheur. L’été, un ingénieux système<br />
d’aération permet à l’air frais nocturne de<br />
circuler, toutes fenêtres ouvertes et, le<br />
jour venu, de rester prisonnier des<br />
volumes. L’effet thermos! Les fameuses<br />
«casquettes» protègent les vitres closes et<br />
hermétiques du soleil tapant.<br />
LA FABRIQUE AGENHOR EN QUELQUES LIGNES<br />
– ARCHITECTE: VINCENT ROESTI<br />
– CÔTÉ MATÉRIAUX, LA SIMPLICITÉ: LE BÉTON ET BEAUCOUP D’ISOLANTS<br />
– TROIS NIVEAUX (SOUS-SOL, REZ-DE-CHAUSSÉE, 1ER ÉTAGE)<br />
POUR ENVIRON 450 M2 ET 4000 M3 - APRÈS L’HIVER RIGOUREUX 2009-2010, LA CONSOMMATION DE<br />
LA PREMIÈRE ANNÉE EST DE 30 000 KWH. ■<br />
Jean-Marc Wiederrecht s’illustre non seulement<br />
pour ses mouvements d’exception mais aussi pour<br />
sa démarche écologique.<br />
Les horlogers, épargnés par une luminosité<br />
trop directe, ont été placés au nord,<br />
les services administratifs au sud. Entre<br />
deux, le passage doit son éclairage à un<br />
«solar dôme» posé sur le toit: ses ramifications<br />
réfléchissantes en forme de<br />
conduits transportent une lumière<br />
totalement exempte de consommation<br />
électrique. Le reste des luminaires, à très<br />
basse consommation, se règle en fonction<br />
de la luminosité.<br />
Jean-Marc Wiederrecht ne voulait pas de<br />
climatisation; il voulait pouvoir ouvrir<br />
les fenêtres, pour entendre l’eau couler<br />
– une marre a été creusée – et les oiseaux<br />
chanter. Utopique? Grâce à son usine<br />
laboratoire, à son écobilan positif et aux<br />
«charges négatives», il démontre que le<br />
respect de l’environnement est un modèle<br />
économique viable. D’ailleurs, son<br />
bâtiment pourrait même lui rapporter de<br />
l’argent, puisque les SIG, fournisseur<br />
officiel genevois d’électricité, rachètent à<br />
bon prix tout surplus d’énergie renouvelable<br />
produit par des particuliers… ■<br />
49
DÉVELOPPEMENTDURABLE<br />
50<br />
LA MANUFACTURE HARRY<br />
WINSTON: UN JOYAU EN DEVENIR<br />
Frédéric de Narp, nommé président et CEO d’Harry Winston en janvier dernier,<br />
a déjà solidement tracé la stratégie de la marque et clairement placé les objectifs qui devraient mener les activités<br />
joaillières et horlogères vers de grands développements à l’horizon 2015. Par Cristina d’Agostino<br />
de la manufacture Harry Winston de Planles-Ouates<br />
tranche avec le cadre très industriel des<br />
L’architecture<br />
environs. Pourtant faite de verre, de bois et de marbre,<br />
inaugurée il y a seulement trois ans, elle possède une<br />
singularité, une certaine patine qui se dégage à l’identique de<br />
l’espace Harry Winston à Baselworld. Certainement la résultante<br />
d’une adéquation réussie de matériaux nobles. Et, en résumé, le<br />
credo même de la marque – savoir allier le diamant, le<br />
platine ou le zalium – pour n’en offrir que d’exclusives<br />
interprétations. Visite guidée.<br />
Divisée en deux blocs reliés par une passerelle, la manufacture<br />
Harry Winston développe à l’interne quelques étapes importantes<br />
du processus de production et le potentiel d’en intégrer<br />
quelques-unes de plus. En enfilade, les départements se suivent.<br />
Une équipe créative, en place depuis trois ans et dirigée par<br />
Marie-Laure Cerede, est dédiée au dessin des parures joaillières<br />
comme des modèles horlogers. Un département technique,<br />
principalement occupé à la construction de l’habillage, est<br />
Dans la zone industrielle de Plan-les-Ouates, l’architecture du bâtiment<br />
de Harry Winston tranche assurément.<br />
composé également d’un ingénieur mouvement, concentré<br />
exclusivement sur le développement de modules additionnels<br />
(même si, pour l’heure, 80% d’entre eux proviennent d’Agenhor)<br />
et de deux ateliers d’horlogerie, où une vingtaine d’horlogers
travaillent à l’assemblage des sept modules de la marque, à<br />
l’emboîtage et au service après-vente. Un parc de cinq<br />
machines CNC dernier cri, devenu indispensable à la maîtrise<br />
des codes stylistiques de la marque, est aujourd’hui le lieu<br />
d’usinage de tous les boîtiers (à l’exception encore de ceux en<br />
zalium) et des bracelets de la marque. Et pour terminer,<br />
incontournables, un atelier de sertissage et un laboratoire de<br />
gemmologie, savoir-faire et réputation obligent. En tout,<br />
116 personnes travaillent au quotidien dans l’entreprise de<br />
Plan-les-Ouates. Une manufacture dirigée depuis deux ans par<br />
Didier Decker, dont la position récemment confortée le place à<br />
la vice-présidence d’Harry Winston Manufacture.<br />
Au vu des derniers développements de modules et de<br />
mouvements entrepris en collaboration avec des horlogers<br />
reconnus et le souhait de voir la production doubler d’ici cinq<br />
ans, le potentiel de la manufacture reste vaste. A quand un<br />
mouvement Harry Winston intégré? La question pourrait être<br />
d’actualité plus vite qu’on le croit.<br />
INTERVIEW, DE NEW YORK, DE<br />
FRÉDÉRIC DE NARP, PRÉSIDENT ET CEO<br />
D’HARRY WINSTON<br />
QUE REPRÉSENTE HARRY WINSTON POUR VOUS? La marque<br />
représente à mes yeux l’ultime expression de l’exclusivité et de<br />
la rareté. C’est une histoire magique en laquelle les gens croient.<br />
Lorsque je vais voir nos clients, je me rends compte du sens<br />
donné à Harry Winston, avant tout choisie pour célébrer les<br />
moments importants de leur vie.<br />
Le potentiel de développement de la manufacture est vaste.<br />
Frédéric de Narp, frais émoulu CEO d’Harry Winston,<br />
prévoit d’importantes évolutions à l’horizon 2015.<br />
QUELS EN SONT LES POINTS FORTS? L’élément essentiel, celui<br />
qui fait la force d’Harry Winston, est d’avoir su ne jamais se<br />
compromettre et de toujours rester fidèle au credo de son<br />
fondateur: créer uniquement l’exceptionnel.<br />
VOUS AVEZ LONGTEMPS TRAVAILLÉ POUR CARTIER.<br />
AUJOURD’HUI, VOUS DIRIGEZ HARRY WINSTON. QU’EST-CE QUI<br />
DIFFÉRENCIE FONDAMENTALEMENT LES DEUX MARQUES?<br />
Cartier est le joaillier le plus large au monde et Harry Winston le<br />
plus exclusif. C’est une différence fondamentale. Harry Winston<br />
travaille la série limitée, la pierre précieuse ou un mouvement<br />
exceptionnel pour n’en proposer que quelques exemplaires<br />
uniques ou, tout au plus, une centaine de déclinaisons. Et cette<br />
exclusivité en tout point a permis à Harry Winston, marque de<br />
haute horlogerie, de gagner le cœur des collectionneurs, qui,<br />
aujourd’hui, l’estiment en tant que telle. En vingt ans, Harry<br />
Winston a réussi à se positionner dans le domaine quand<br />
d’autres ont mis 250 ans à le faire. Grâce à des concepts très forts<br />
comme l’Opus ou le zalium, le temps agit en notre faveur.<br />
51
DÉVELOPPEMENTDURABLE<br />
52<br />
ET LES AMÉLIORATIONS À APPORTER?<br />
Le positionnement de niche d’Harry<br />
Winston a aussi pour conséquence de ne<br />
lui concéder qu’une présence confidentielle<br />
sur les marchés. Il faut porter<br />
la marque vers les clients qui ont le<br />
goût pour l’excellence sans limite.<br />
Aujourd’hui, Harry Winston est bien<br />
implantée aux Etats-Unis, au Japon et<br />
au Moyen-Orient, mais il reste encore<br />
fort à faire ailleurs dans le monde, et<br />
particulièrement en Asie, en Chine bien<br />
évidemment, mais également en Europe.<br />
Il y a encore beaucoup de terrains<br />
vierges. En résumé, il faut maintenant<br />
lui apporter un management plus global<br />
et vraiment international.<br />
AVEC QUELLE STRATÉGIE? Toujours en<br />
choisissant les détaillants les plus exclusifs<br />
dans les villes à grand potentiel. Le<br />
développement doit se faire autant en<br />
termes de «retail» qu’en termes de<br />
«wholesale», qui, chez Harry Winston,<br />
est resté assez limité jusqu’à aujourd’hui.<br />
Nous avons un réseau de 250 points de<br />
vente dans le monde et nous comptons<br />
en ouvrir d’autres. En joaillerie également,<br />
avec 19 magasins actuellement et<br />
un vingtième qui va ouvrir ses portes en<br />
Russie très bientôt, nous ne couvrons<br />
pas la demande et le potentiel d’une<br />
clientèle qui a les moyens. Les Chinois<br />
comprennent la marque et nous le montrent,<br />
c’est la raison pour laquelle d’autres<br />
magasins sont prévus dans le pays, mais<br />
également au Japon, où la marque est<br />
installée depuis cinquante ans et où il<br />
reste un fort potentiel de développement.<br />
A ce titre, au Japon, Harry Winston a été<br />
une des seules marques dans l’univers<br />
du luxe à avoir connu, en 2009, un<br />
exercice positif par rapport à l’année<br />
précédente.<br />
LE PORTEFEUILLE DE COMMANDES EN<br />
HAUTE JOAILLERIE EST EN TRAIN DE<br />
REPRENDRE DE LA VIGUEUR SUR LE<br />
MARCHÉ AMÉRICAIN, SELON VOS DIRES.<br />
QU’EN EST-IL DU PORTEFEUILLE DES<br />
COMMANDES EN HORLOGERIE APRÈS<br />
BÂLE? Le portefeuille de commandes en<br />
joaillerie a été exceptionnel aux Etats-<br />
Unis, mais cela s’est également vérifié en<br />
Russie, en Asie et au Moyen-Orient.<br />
Cela répond à cette quête d’unicité et<br />
d’authenticité que la marque offre. Les<br />
clients voient aujourd’hui dans le joyau<br />
une dimension d’investissement, relativement<br />
nouvelle mais propre à l’époque<br />
actuelle. Dans l’horlogerie, nous avons<br />
eu un très bon Bâle. L’Opus X, cette<br />
année particulièrement portable, a<br />
beaucoup plu, tout comme la collection<br />
alarme en zalium, une montre plus<br />
accessible qui plaît énormément. Le<br />
portefeuille nous laisse présager de<br />
bonnes choses.<br />
QUELLES SONT LES PERSPECTIVES DE<br />
DÉVELOPPEMENT D’ICI À CINQ ANS?<br />
Harry Winston pourrait se permettre<br />
d’être un peu plus accessible en horlogerie,<br />
tout en demeurant la marque la<br />
plus exclusive au monde, mais sans<br />
forcément garder son prix moyen actuel<br />
Vue des ateliers ultramodernes installés à Plan-les-Ouates (GE).<br />
qui est de 40 000 dollars. Et donc<br />
d’orchestrer un vrai développement et ne<br />
pas se contenter de quelques milliers de<br />
montres. Dans la joaillerie, l’extraordinaire<br />
début d’année enregistré dans le<br />
domaine nous rappelle qu’il y a une<br />
véritable demande. Il ne faut pas oublier<br />
que nous sommes le joaillier du diamant<br />
par excellence, car des pierres historiques,<br />
comme le diamant Lesotho, ont<br />
été taillées par Harry Winston. Il y a de<br />
l’espace sur tous les segments des<br />
métiers que nous connaissons et pour<br />
lesquels nous possédons un vrai savoirfaire,<br />
tant au niveau de l’horlogerie, avec<br />
la manufacture en Suisse, qu’au niveau<br />
de la joaillerie à New York. C’est à moi<br />
de faire le pont entre les deux langages.<br />
LA MANUFACTURE VA-T-ELLE S’AGRAN-<br />
DIR? Nous sommes très fiers de cette<br />
manufacture récente, mise en place pour<br />
être capable d’absorber une augmentation<br />
du volume des montres, même si<br />
nous n’irons jamais au-delà de 15 000 à<br />
20 000 pièces. Le but est de rester<br />
l’horloger de l’exceptionnel. ■
SALON EPHJ-EPMT:<br />
PRUDENCE SUR LE FRONT DE LA SOUS-TRAITANCE<br />
Début juin à Lausanne, le rendez-vous des fournisseurs de l’horlogerie s’est<br />
terminé sur une note plutôt positive. Globalement, les affaires reprennent timidement. Quant au potentiel créatif des<br />
entreprises, il est intact. Exemples. Par Thierry Brandt<br />
Contre mauvaise fortune, bon<br />
cœur. C’est la devise de tous les<br />
sous-traitants de l’horlogerie qui,<br />
avec le temps, ont appris à composer<br />
avec les crises successives. Celle qui a<br />
durement frappé le secteur en 2009 est<br />
encore bien présente, même si les signes<br />
de reprise sont patents: «Je crois qu’on<br />
peut dire maintenant qu’on a touché le<br />
fond. L’ambiance est bien meilleure que<br />
l’année dernière. Cela dit, le secteur n’est<br />
pas complètement tiré d’affaire. Compte<br />
tenu de l’inertie inhérente aux processus<br />
de production, le redémarrage ne va<br />
se faire en quelques jours», analyse<br />
André Colard, l’un des organisateurs<br />
du salon EPHJ-EPMT (Environnement<br />
professionnel horlogerie et joaillerie –<br />
Environnement professionnel microtechnologies).<br />
De Genève à Granges, dans l’Arc jurassien,<br />
le taux de chômage des entreprises<br />
du secteur demeure très élevé, à 10,8%<br />
(près de trois fois la moyenne nationale).<br />
Encore aujourd’hui, beaucoup d’entre<br />
elles fonctionnent toujours avec des<br />
mesures de chômage partiel ou s’apprêtent<br />
seulement à les supprimer. Pour tenir<br />
le coup, certaines avouent accepter des<br />
travaux moins valorisants et moins<br />
bien payés. «Cela dit, argumente André<br />
Colard, la sous-traitance a désormais<br />
beaucoup mûri. L’une des forces de ces<br />
petites et moyennes entreprises, c’est leur<br />
réactivité. Elles ont souvent des patrons<br />
qui ont appris à se mouiller. Elles peuvent<br />
également se montrer très créatives»,<br />
conclut-il. ■<br />
L’ART DE GRAVER LE CAOUTCHOUC<br />
EXEMPLE DU DYNAMISME ET DE LA CRÉATIVITÉ DE CERTAINS EN MATIÈRE D’HABILLAGE:<br />
LA COLLABORATION ENTRE AJS PRODUCTION, À PORRENTRUY, ET VALIANCE, À BIENNE.<br />
LA PREMIÈRE EST ACTIVE DANS LA CONCEPTION ET LA PRODUCTION DE COMPOSANTS<br />
HORLOGERS, LA SECONDE DANS LE MOULAGE ET LE SURMOULAGE DE BRACELETS EN<br />
CAOUTCHOUC. LES DEUX ENTREPRISES ONT MIS AU POINT UN PROCESSUS DE GRAVURE<br />
DU CAOUTCHOUC PAR LASER, QUI PERMET DÉSORMAIS PRESQUE TOUTES LES FANTAI-<br />
SIES AVEC UN DEGRÉ DE PRÉCISION ET DE FINITION REMARQUABLE. UNE IDÉE APPA-<br />
REMMENT SIMPLE MAIS PAS SI FACILE QUE CELA À DÉVELOPPER… «AU DÉBUT, NOUS<br />
AVONS ESSAYÉ TOUTES SORTES DE CHOSES, MAIS AVEC LA CHALEUR DU LASER, NOUS<br />
AVONS BOUSILLÉ TOUTE LA MATIÈRE. ET UN JOUR, NOUS AVONS EU L’IDÉE DE CONGE-<br />
LER LE CAOUTCHOUC AU MOMENT DE LA GRAVURE. EURÊKA! CELA A TRÈS BIEN FONC-<br />
TIONNÉ ET, DU COUP, NOUS AVONS BREVETÉ NOTRE PROCÉDÉ», RACONTENT ANDRÉ ET<br />
ANTHONY SAUNIER, D’AJS PRODUCTION, TOUT FIERS D’UNE TROUVAILLE QUI<br />
A RAPIDEMENT FAIT LE TOUR DU SALON<br />
LAUSANNOIS. GAGEONS QUE LEUR<br />
TECHNIQUE VA TRÈS VITE INTÉ-<br />
RESSER UN GRAND NOMBRE<br />
DE MARQUES… ■<br />
EPHJ-EPMT<br />
53
FOCUSHEURE<br />
54<br />
MARVIN SANS COMPLEXE<br />
Depuis que Cécile et Jean-Daniel Maye ont racheté cette entreprise<br />
neuchâteloise moribonde, il souffle un petit air printanier et très agréable sur Marvin. La maison est petite, mais<br />
ambitieuse et, surtout, décomplexée. Par Thierry Brandt<br />
Allez faire un petit tour sur le site internet de la marque<br />
(www.marvinwatches.com) et vous verrez tout de suite<br />
de quoi il en retourne. Il y est, bien sûr, question de<br />
montres et de collections, mais de plein d’autres choses aussi.<br />
Vous pourrez, par exemple, tester votre humeur ou alors découvrir<br />
la vie de ceux qui «font partie de la famille», autrement dit<br />
ceux qui ont acheté une montre comme Kevin et Francis<br />
Mitchell de Dundee, en Ecosse. Bref, c’est décontracté, original<br />
et vivant, comme sur les meilleurs sites communautaires dont<br />
celui-ci est clairement inspiré. Et ce n’est pas tout: d’ici peu, les<br />
clients pourront utiliser les services d’une e-boutique pour<br />
passer commande. Tant qu’on y est et qu’on est une marque en<br />
pleine renaissance, branchée sur la modernité, autant utiliser<br />
Cette esquisse donne une idée de ce que sera le chrono Sébastien Loeb chez Marvin.<br />
En bas, le régulateur de la nouvelle collection Malton.<br />
toutes les possibilités qu’offre le Net. «C’est comme cela que<br />
nous voyons notre marque, classique mais moderne, avec des<br />
côtés surprenants et décalés. Nous ne cherchons pas à nous<br />
positionner en fonction des concurrents mais en étant nousmêmes»,<br />
résume la vibrionnante Cécile Maye.<br />
Bref, pour faire une comparaison audacieuse, Marvin voudrait<br />
être un peu à l’horlogerie ce que Mac et Apple sont à l’informatique.<br />
«J’aime bien cette image, mais je l’emploie en toute<br />
modestie. Effectivement, Apple ne détient peut-être que 6% du<br />
marché des ordinateurs mais joue un rôle de leader, de prescripteur»,<br />
confie Cécile Maye.<br />
Ce que l’on note également d’emblée chez Marvin, c’est la<br />
cohérence des collections et leur déclinaison aussi bien dans le<br />
quartz que dans le mécanique – avec des mouvements ETA,<br />
Ronda et Sellita –, et toujours dans une gamme de prix soigneusement<br />
étudiée. La marque est clairement positionnée dans le<br />
segment moyen, avec des prix s’échelonnant de 540 francs,<br />
pour les modèles quartz, à 3500 francs pour les automatiques.<br />
«Aujourd’hui, il y a autant de gens qui veulent du quartz que<br />
du mécanique. J’en ai marre de ces terroristes qui nous<br />
condamnent a priori parce que nous ne serions pas des<br />
horlogers. C’est absurde et cela ne correspond à plus rien! Nous,<br />
nous voulons que chacun puisse se faire plaisir en achetant une<br />
Marvin, quelle qu’elle soit. Et nous nous attachons à ce qu’elles<br />
soient aussi belles et bien terminées les unes que les autres»,<br />
poursuit Cécile Maye.<br />
L’un des grands coups de l’année 2010, c’est l’arrivée dans<br />
l’équipe, en tant que consultant, d’un autre personnage<br />
bouillonnant de l’horlogerie suisse, Jean-François Ruchonnet<br />
himself. Lequel, avec le concours du designer Sébastien Perret,<br />
a supervisé la conception de la collection Malton. Une vraie<br />
réussite, il faut le dire. C’est également lui qui a permis à Cécile<br />
et Jean-Daniel Maye de rencontrer Sébastien Loeb, sextuple<br />
champion du monde de rallye WRC. Lequel aura bientôt son<br />
propre chrono chez Marvin. Ce sera, à n’en pas douter, le hit de<br />
l’automne. D’autant que la pièce, que nous avons découverte<br />
sous forme d’esquisse, s’annonce super bien lookée: vive,<br />
sportive mais sans fioritures.<br />
Forte de tous ces éléments positifs,<br />
Marvin, qui fête cette année son<br />
150e anniversaire, peut<br />
partir à la conquête du<br />
monde à fond la<br />
caisse. ■
ATLANTIC, UNE ALERTE<br />
CENTENAIRE SI MAL CONNUE EN SUISSE<br />
La marque de Lengnau (SO), qui produit quelque 80 000 pièces par année, très<br />
active en Europe de l’Est et au Moyen-Orient, n’est quasiment pas présente sur le marché intérieur. Le point avec son<br />
président, Jürg Bohne. Par Thierry Brandt<br />
Jürg Bohne, patron d’une marque méconnue<br />
en Suisse alors qu’elle produit tout de même<br />
quelque 80 000 montres par année.<br />
Comme Titoni, Atlantic appartient<br />
au club de ces très anciennes<br />
marques helvétiques qui sont<br />
presque inconnues sur leur propre territoire.<br />
Fondée à Bettlach en 1888 par<br />
Eduard Kummer, sous le nom d’EKB,<br />
l’entreprise soleuroise est pourtant toujours<br />
vaillante cent-vingt-deux ans après<br />
sa création, produisant chaque année<br />
quelque 80 000 montres, toutes labellisées<br />
Swiss Made, dans le segment moyen.<br />
Autrement dit, dans une fourchette de<br />
prix allant de 200 à 1000 francs. Grosso<br />
modo, elle régate donc dans la même<br />
catégorie que des géants comme Tissot<br />
ou Certina, avec des standards de qualité<br />
et de finition à peu près comparables.<br />
Atlantic se veut d’ailleurs une alternative<br />
à ces marques du groupe Swatch.<br />
Au catalogue: 13 collections et près de<br />
800 références. Impressionnant! Car ils<br />
ne sont plus très nombreux, en Suisse, les<br />
horlogers à proposer autant de modèles.<br />
Ces dernières années, la tendance a<br />
plutôt été inverse. «C’est vrai, mais nous,<br />
nous sommes de vrais généralistes. Nous<br />
nous devons d’avoir le plus de références,<br />
de variantes possible, pour pouvoir<br />
répondre à la demande des marchés»,<br />
argumente Jürg Bohne, président<br />
d’Atlantic depuis 1998. Lequel poursuit<br />
sa démonstration en ces termes: «Sur les<br />
marchés émergents, où nous sommes très<br />
présents grâce à nos prix attractifs, il y a<br />
régulièrement de nouvelles marques qui<br />
arrivent. Par conséquent, c’est aussi une<br />
manière de réagir et de démontrer que<br />
nous sommes créatifs. Chaque année,<br />
nous proposons également un “face lift”<br />
de toutes les collections.»<br />
C’est effectivement dans ce créneau-là<br />
que la concurrence est la plus vive. Il est<br />
plus facile de vendre une montre à<br />
1 million de francs que 50 000 montres à<br />
200 francs. «Pour nous, le plus dur est de<br />
conserver ce rapport qualité-prix, car<br />
Ci-dessus: Look vintage assumé pour cette Worldmaster<br />
1888 Small Second, qui renvoie à l’année de fondation<br />
d’Atlantic. Ci-dessous: Blackshark, un chrono full black<br />
au caractère sportif bien trempé.<br />
nous ne transigeons pas sur la qualité des<br />
matériaux que nous utilisons, ni sur les<br />
processus de production et encore moins<br />
sur les contrôles», souligne un Jürg<br />
Bohne qui voit cependant un joli potentiel<br />
de croissance pour la marque en Asie.<br />
«Notre positionnement est bon et nos<br />
produits plaisent là-bas. Le feed-back<br />
post-Baselworld est très positif. J’espère<br />
pouvoir ouvrir de nouveaux marchés<br />
prochainement», dit-il. Et quelle est la<br />
situation en Suisse, plus particulièrement<br />
en Suisse romande? «Je ne me fais pas<br />
beaucoup d’illusions. Ici, le marché est<br />
saturé et tellement contrôlé…» conclut le<br />
patron de la marque, dont le nom et le<br />
logo – un sextant – évoquent plus les<br />
grandes aventures maritimes que les<br />
randonnées montagnardes. Ceci explique<br />
peut-être cela. ■<br />
FOCUSHEURE<br />
55
L’ART DU TEMPS: LE<br />
PROTOTYPE SERA PRÊT EN SEPTEMBRE<br />
Le tableau horloger du designer Illi et de son associé Julien Ado va bientôt<br />
passer du stade de maquette à celui de prototype. Ce devrait être chose faite en septembre. Le point avec ces deux<br />
créateurs qui vont révolutionner l’art d’afficher le temps. Propos recueillis par Thierry Brandt<br />
L’Art du Temps: le tableau horloger conçu par le designer Illi (photo du bas) est en passe de devenir réalité.<br />
C’est dans le Jura, à Saignelégier, qu’il sera élaboré.<br />
ILLI, JULIEN, ON VOUS AVAIT LAISSÉS LE<br />
PRINTEMPS DERNIER DANS VOTRE<br />
ATELIER PARISIEN AVEC UNE MAQUETTE<br />
EN CARTON DE VOTRE FUTUR TABLEAU<br />
HORLOGER. OÙ EN ÊTES-VOUS AUJOUR-<br />
D’HUI? Cette fois, nous passons à la<br />
première phase de production, avec la<br />
réalisation d’un prototype du tableau. Il<br />
devrait fonctionner en septembre.<br />
QUE VOUS DISENT LES INGÉNIEURS? Que<br />
ça devrait marcher bien sûr (rires)!<br />
Comme prévu, chaque plaque du tableau<br />
sera montée sur un petit vérin motorisé.<br />
Et le tout sera piloté par une carte mère,<br />
dont la programmation devrait tout de<br />
même prendre quelque 600 heures de<br />
travail! Le tableau devant réagir à l’activité<br />
de la pièce où il sera placé, il y aura<br />
également des capteurs de lumière, de<br />
mouvement et de son. C’est la mise au<br />
point de tous ces éléments qui nécessite la<br />
construction d’un prototype à l’échelle 1:1.<br />
POUR L’AFFICHAGE DU TEMPS PROPRE-<br />
MENT DIT, COMMENT ALLEZ-VOUS<br />
PROCÉDER? Il fonctionnera avec un<br />
système de petites plaquettes mobiles, qui<br />
seront éclairées par des LED. Nous<br />
sommes en train de créer une typographie<br />
originale pour cette partie-là.<br />
QUI A PRIS EN CHARGE LE DÉVELOPPE-<br />
MENT TECHNIQUE DU TABLEAU? C’est<br />
Fabrice Thueler, de Swiss Finest, à<br />
Saignelégier, qui s’occupe de tout depuis<br />
le début. On a cherché le meilleur et on<br />
n’est pas déçus. Au départ, il a été dur<br />
avec nous, il a placé la barre très haut, il<br />
a d’emblée mis le doigt sur les difficultés<br />
techniques. En fait, c’était sa manière à<br />
lui de nous tester, de voir s’il ne s’agissait<br />
pas simplement d’une folie de jeune<br />
designer. Finalement, quand il a compris<br />
qu’on en voulait vraiment, qu’il était<br />
question d’un projet ambitieux et à long<br />
terme, il nous a soutenus à fond.<br />
ET APRÈS, QUELLE SERA LA PROCHAINE<br />
ÉTAPE? Dès que le prototype aura validé<br />
les solutions envisagées, nous allons<br />
communiquer et lancer la commercialisation<br />
du tableau. Si nous respectons<br />
notre échéancier, les premiers exemplaires<br />
devraient être disponibles le printemps<br />
prochain.<br />
ET ENSUITE? Difficile de se projeter<br />
comme ça dans l’avenir, mais nous voudrions<br />
vraiment poursuivre notre travail<br />
et notre réflexion sur la manière de lire<br />
le temps. Au départ de tout cela, je vous<br />
le rappelle, il y avait le projet d’une<br />
montre-bracelet. Nous ne l’avons pas<br />
abandonné. Nous allons tirer parti de<br />
notre expérience pour aller dans ce sens,<br />
en tout cas vers quelque chose de plus<br />
horloger. ■<br />
www.by-illi.com<br />
DESIGNHEURE<br />
57
MANAGEHEURE<br />
58<br />
RETOUR DANS LES ANNÉES 80:<br />
UNE PENSÉE POUR LES SOUS-TRAITANTS<br />
C’est désormais certain: après l’annonce des derniers chiffres de l’association<br />
faîtière des horlogers suisses, l’éclaircie s’annonce et il faut s’en réjouir. Mais après dix-huit mois de difficultés, le réveil<br />
donne un peu le mal de tête, un peu comme une gueule de bois après la fête. Par Jean-Louis Felfli et Marco Barbera*<br />
Grâce à la nouvelle portance économique qui s’est quelque<br />
peu affermie, le nouveau paysage du monde horloger<br />
apparaît comme transformé, voire même déformé.<br />
D’autres observateurs n’iraient pas jusqu’à cette affirmation,<br />
car à l’analyse microéconomique, le maillage spécifique au<br />
monde horloger suisse semble être devenu plus clair et moins<br />
encombré. Toutefois, ce gain en netteté semble être payé par<br />
une catégorie d’acteurs bien spécifique du monde horloger.<br />
Nous ne parlons pas ici de quelques marques ou sociétés<br />
horlogères anémiques pour lesquelles la «crise» n’a fait que<br />
précipiter les choses, mais bien d’un pan entier d’acteurs sans<br />
nom ni grade que nous pouvons injustement appeler les soustraitants.<br />
Comme dans bien des cas à l’intérieur de microcosmes, la<br />
«biodiversité» horlogère a été atteinte et fragilisée dans la<br />
strate des «petits». En effet, pendant ces nombreux mois de<br />
stress horloger, les capitaines de manufactures ont dû acquérir<br />
Pour tous les sous-traitants et fournisseurs de l’horlogerie,<br />
l’après-crise est encore synonyme de gueule de bois.<br />
des réflexes de survie qui ont fait évoluer radicalement leurs<br />
biotopes. Pendant toutes ces années passées à externaliser<br />
outrancièrement de la production et du service afin d’atteindre<br />
des ratios dignes du top 100 au NASDAQ (antérieurs aux années 80),
nos capitaines ont compris que la soustraitance<br />
était une composante bien<br />
connue dans les «business plans» pour ses<br />
flexibilités financière, technique et,<br />
enfin, productique. Mais également et<br />
surtout pour sa transparence marketing<br />
et sa faible notoriété. Bref, des inconvénients<br />
qui sont de fait des avantages<br />
stratégiques pour les marques.<br />
Dans la gestion de la «crise», la compréhension<br />
de nos capitaines de «manufactures»<br />
ainsi que leur vision se sont<br />
arrêtées à la proue de leur navire. Leurs<br />
approches radicales ont remplacé un<br />
dogme par un autre, ce qui avait au<br />
moins l’avantage d’apporter quelque<br />
chose de nouveau. 2009 et 2010 sont<br />
des années marquées par le signe de la<br />
rupture avec les sous-traitants.<br />
Avec le retour du beau temps, nos<br />
capitaines relèvent la tête et changent de<br />
point de vue. L’horizon s’élargit, mais<br />
nous ne pouvons pas dire que la profondeur<br />
de vision ait véritablement changé.<br />
Entre-temps, ils auront su récompenser<br />
leurs petits sous-traitants loyaux et<br />
corvéables en les laissant mourir. Il faut<br />
toutefois relever que cette largesse,<br />
associée à des aides économiques cantonales<br />
indirectes, a permis de maintenir de<br />
justesse leur profitabilité coutumière.<br />
Bref, le bas de bilan est sauvé et il ne<br />
reste qu’à relancer la machine industrielle<br />
en faisant appel aux petites mains et aux<br />
cerveaux de la sous-traitance...<br />
Mais voilà, une grande partie des sansnom<br />
a disparu et, encore une fois, il ne<br />
reste que les grands de la sous-traitance<br />
qui appartiennent majoritairement au<br />
numéro un mondial horloger. Cette situation<br />
engendre déjà un changement dans<br />
le rapport de l’offre et de la demande,<br />
qui se traduira inévitablement par une<br />
tension entre tous les acteurs. Cette<br />
tension va d’ailleurs notablement<br />
s’amplifier, car la référence dans l’industrie<br />
horlogère a décidé de restreindre<br />
encore plus drastiquement l’accès à ses<br />
Les leçons de la crise de 2009<br />
ont-elles vraiment été tirées?<br />
mouvements et à sa technologique par<br />
des tiers. Cette décision stratégique d’affaiblir<br />
ses concurrents par leurs propres<br />
faiblesses est une approche d’entreprise<br />
qui s’apprend en première année de gestion<br />
des organisations et elle reste redoutablement<br />
efficace et saine sur le plan<br />
concurrentiel et sur le plan économique à<br />
long terme. Soyons rassurés, car tous nos<br />
capitaines «horlogers» maîtrisent bien<br />
leurs «business models» et il se peut qu’en<br />
dernière page, ils découvrent quelques<br />
lignes instructives sur la productique. Et<br />
lorsque les clignotants dans ce domaine,<br />
mais aussi dans la recherche, le développement<br />
et les achats s’allumeront en cascade,<br />
la captation de nouvelles ressources se<br />
fera au prix fort pour les uns, voire pas<br />
du tout pour les autres. Mais ils jureront<br />
tous haut et fort devant la COMCO qu’il<br />
y a eu distorsion de concurrence, voire<br />
même une position de monopole. Un<br />
discours qui rappelle fortement les<br />
années 80…<br />
En fin de compte, peu de choses ont<br />
réellement changé depuis ces années-là,<br />
et les livres d’histoire ne sont que très<br />
rarement au chevet des capitaines, tout<br />
comme les boussoles d’ailleurs... Le<br />
niveau de complication de ces instruments<br />
de navigation n’évoque certainement<br />
pas le prestige et le glamour, mais<br />
certains de ces capitaines seraient bien<br />
inspirés d’en manufacturer quelques<br />
exemplaires ou, comble de l’ironie, d’en<br />
déléguer la fabrication à leurs soustraitants!<br />
■<br />
*Jean-Louis Felfli & Marco Barbera<br />
www.felfli-associes.ch<br />
Recrutement de Cadres & Gestion de<br />
Carrière en Horlogerie & Joaillerie<br />
Les grands de la sous-traitance appartiennent majoritairement aux grands groupes.<br />
59
ENCHÈRESHEURE<br />
60<br />
ENCHÈRES GENEVOISES:<br />
UNE MONTÉE DE SÈVE DE 42 MILLIONS DE FRANCS<br />
La crise semble oubliée dans le monde de la haute horlogerie. Les collectionneurs<br />
asiatiques, les Chinois en particulier, sont de plus en plus nombreux à acheter. Adjugée pour 6,259 millions de<br />
francs, la Patek Philippe réf. 1527 bat un record mondial. Par Danièle Chambas<br />
Deux fois par an, en mai et en novembre, Genève<br />
devient la capitale mondiale des ventes de montres et de<br />
bijoux. Des rendez-vous très importants, d’abord pour<br />
les collectionneurs, mais aussi pour les commissaires-priseurs et<br />
experts, qui ont joué les fins limiers afin de dénicher un maximum<br />
de très belles pièces.<br />
Du 7 au 12 mai dernier, quatre maisons de ventes aux enchères<br />
– Christie’s, Sotheby’s, Antiquorum et O. Patrizzi – ont proposé<br />
1450 garde-temps à leurs clients du monde entier ayant fait le<br />
voyage, misé par téléphone ou on-line. Dans les salons des cinq<br />
étoiles, 1200 lots et documents horlogers ont donc rapidement<br />
changé de mains pour un total de 42,115 millions de francs,<br />
dont 55% réalisés par la maison Christie’s avec 23,13 millions.<br />
Si la crise semble appartenir au passé, les collectionneurs sont<br />
plus exigeants que jamais sur la qualité et la rareté des pièces<br />
dont ils rêvent et qu’ils réussissent parfois à obtenir. Reste une<br />
constante: Patek Philippe demeure, encore et toujours, le leader<br />
des ventes genevoises. La nouveauté, c’est la confirmation de la<br />
puissance du marché chinois – il ne représentait que quelques<br />
pourcents il y a cinq ans – qui adore les émaux, l’or rose et toutes<br />
les montres à complications, y compris les sonneries,<br />
avec un goût très prononcé pour la marque<br />
Patek Philippe. A méditer: le nombre des milliardaires<br />
chinois a augmenté de 30% en 2009, passant<br />
de 101 à 130, juste derrière les Etats-Unis,<br />
avec une moyenne d’âge de 42 ans. Et comme<br />
ceux-ci s’intéressent beaucoup à l’art, ce<br />
secteur ne peut que connaître une forte<br />
expansion dans le futur.<br />
CHRISTIE’S VEND LA «MONA LISA DU XXE SIÈCLE»<br />
Lundi 10 mai, dès 10 h, la foule envahit le<br />
grand salon du Four Seasons Hôtel des<br />
Bergues. La vente, orchestrée par un Aurel Bacs<br />
– coprésident international du département<br />
montres – plus en verve que jamais, propose une<br />
partition très relevée: 370 pièces soigneusement<br />
sélectionnées, dont 14 Patek Philippe d’exception<br />
Quand la domination de Patek Philippe sur les enchères s’arrêtera-t-elle?<br />
cédées par le même collectionneur italien qui avait déjà vendu,<br />
en novembre 2009, dix chefs-d’œuvre de la même marque pour<br />
4,9 millions de francs. A 11 h 45 arrive la star de la vente, celle<br />
qu’Aurel Bacs appelle avec émotion la «Mona Lisa du XXe siècle ».<br />
Il s’agit de l’unique modèle Patek Philippe réf. 1527 de 1943, en<br />
or jaune avec chronographe, calendrier perpétuel et phase de<br />
lune, en mains privées depuis vingt ans. Chacun retient son<br />
souffle, tant les chiffres défilent rapidement sur l’écran.<br />
En deux minutes, les 4 millions sont dépassés.<br />
Restent en lice deux enchérisseurs, l’un dans la<br />
salle et l’autre au téléphone… lequel renonce<br />
après dix minutes. Le vainqueur, le Musée<br />
Patek Philippe, l’emporte à 5,5 millions, soit<br />
6,259 millions de francs avec les frais (estimation:<br />
1,5-2,5 millions).<br />
L’adjudication des 14 lots de ce même collectionneur<br />
se monte à 9,784 millions (estimation<br />
4-6 millions), soit 40% du total de la<br />
vente Christie’s. D’autres Patek Philippe se sont<br />
très bien vendues, telles la réf. 2597 Calatrava or<br />
rose (1963) pour 555 000 francs, la réf. 1518 chronographe<br />
or rose (1947) pour 675 000 francs,<br />
le chrono à un seul bouton poussoir (1924) pour<br />
Rolex: autre marque phare des ventes aux enchères genevoises.
723 000 francs et la réf. 530 en acier<br />
(1942) pour 603 000 francs. A noter<br />
qu’une très rare Rolex réf. 6036, triple<br />
date, or rose (1955), a été adjugée pour<br />
447 000 francs, la célèbre Rolex SARU sertie<br />
de saphirs et rubis pour 219 000 francs<br />
et une très belle Greubel Forsey, 2007,<br />
double tourbillon, édition limitée, pour<br />
363 000 francs. Une très jolie Cartier<br />
manchette, or blanc et diamants, a trouvé<br />
preneur en Chine à 141 000 francs, alors<br />
qu’une pendulette de la même marque,<br />
1925, en jade et laque noire, est partie<br />
pour 62 500 francs. Christie’s et Aurel<br />
Bacs signent là une vente exceptionnelle.<br />
SOTHEBY’S CONFIRME L’ENGOUEMENT<br />
POUR LES MONTRES DE POCHE<br />
Geoffroy Ader, directeur du département<br />
Haute horlogerie pour l’Europe, a sélectionné<br />
266 lots, dont un tiers de montres<br />
de poche et plusieurs pièces historiques<br />
très intéressantes. Ader a tenu le marteau<br />
avec brio pendant presque quatre heures<br />
devant une salle comble. Pour la première<br />
fois, les collectionneurs pouvaient aussi<br />
LES DIAMANTS SONT ÉTERNELS<br />
enchérir on-line. Au final, 214 lots changent<br />
de mains pour un montant total de<br />
6,854 millions de francs.<br />
Comme prévu, l’automate La Bergère,<br />
fabriqué en 1805 pour le marché chinois<br />
par les Genevois Piguet et Capt, qui faisait<br />
partie de la collection du roi Farouk,<br />
marque le meilleur score en trouvant preneur<br />
à 746 500 francs (estimation 400-<br />
Belle et mystérieuse, une pendulette des années 20<br />
signée Cartier.<br />
SOTHEBY’S A PRÉSENTÉ UNE EXCEPTIONNELLE SÉLECTION DE BIJOUX (425 LOTS), TANT<br />
PAR LEUR PROVENANCE QUE PAR LEUR RARETÉ ET LEUR BEAUTÉ. SOUS LE MARTEAU DE<br />
DAVID BENNETT, DIRECTEUR DU DÉPARTEMENT JOAILLERIE POUR<br />
L’EUROPE ET LE MOYEN-ORIENT, UNE BAGUE, SERTIE D’UN<br />
DIAMANT BLEU TRÈS RARE DE 7,64 CARATS, EST ADJU-<br />
GÉE POUR 8,930 MILLIONS, NOUVEAU RECORD,<br />
DEVANÇANT DE PEU UN AUTRE DIAMANT TAILLE<br />
ÉMERAUDE DE 52,82 CARATS, VENDU 8,818 MIL-<br />
LIONS. LA DOUBLE BAGUE TOI ET MOI (DIAMANTS<br />
BLEU/BLANC), D’ALEXANDRE REZA, TROUVE PRENEUR<br />
À 7,026 MILLIONS. LA SÉLECTION DE BIJOUX D’ORIGINE<br />
NOBLE ATTEINT 9,1 MILLIONS. TOTAL DE LA VENTE:<br />
60 MILLIONS.<br />
CHEZ CHRISTIE’S (220 LOTS), SOUS LE MARTEAU DE JEAN-MARC LUNEL, RESPONSABLE<br />
DU DÉPARTEMENT JOAILLERIE, C’EST ÉGALEMENT UN DIAMANT – DE 40,21 CARATS – QUI<br />
FAIT LE MEILLEUR SCORE AVEC 5,7 MILLIONS, SUIVI PAR UNE EXCEPTIONNELLE RIVIÈRE DE<br />
DIAMANTS DE 155,17 CARATS, QUI PART EN ASIE POUR 5,251 MILLIONS. UN TRÈS BEAU<br />
BRACELET ART DÉCO TUTTI FRUTTI DE CARTIER EST ADJUGÉ POUR 1,023 MILLIONS. TOTAL<br />
DE LA VENTE: 37,628 MILLIONS. ■<br />
La pendulette Boucheron remise au général de Gaulle en<br />
1960, à l’occasion du baptême du paquebot France.<br />
500 000 francs). Il s’agit d’un objet d’art<br />
d’une qualité remarquable, tant par son<br />
décor émaillé que par son mécanisme<br />
horloger en parfait état de fonctionnement.<br />
On le retrouvera au Musée Patek<br />
Philippe. Une magnifique pendule mystérieuse<br />
Cartier, en cristal et diamants<br />
(1928), est partie pour 338 500 francs<br />
alors que la pendulette de table<br />
Boucheron, remise au général de Gaulle<br />
lors de l’inauguration du paquebot France<br />
le 11 mai 1960, est acquise pour 98 500<br />
francs. Une série de vingt montres de<br />
poche émaillées du XVIIIe siècle est adjugée<br />
pour 368 125 francs, certaines triplant<br />
leur estimation la plus haute. Parmi<br />
les montres-bracelets, une Patek Philippe,<br />
1982, or jaune, automatique, calendrier<br />
perpétuel et phase de lune, part en Asie<br />
pour 284 500 francs suivie par une<br />
IWC, or rose, tourbillon, édition<br />
limitée (1999), qui, elle, reste en<br />
Suisse pour 206 500 francs. Mais<br />
la vente la plus surprenante, c’est<br />
celle de 37 cadrans émaillés fabriqués<br />
en 1956 à Bienne, qui sont<br />
vendus en Asie pour 146 500 francs, alors<br />
que l’estimation ne dépassait pas<br />
8000 francs! «Voici une preuve de plus de<br />
l’engouement des Asiatiques pour les très<br />
belles pièces émaillées. La Chine est le<br />
nouvel eldorado et nous nous réjouissons<br />
d’accueillir ces nouveaux collectionneurs»,<br />
conclut Geoffroy Ader.<br />
61
ENCHÈRESHEURE<br />
62<br />
SEPT MANUSCRITS BREGUET POUR<br />
2,3 MIL LIONS DE FRANCS<br />
Parmi les 315 lots mis à l’encan par<br />
Osvaldo Patrizzi, le 7 mai, les sept derniers<br />
– des manuscrits – constituent le<br />
clou de la vente. Il s’agit d’une sorte de testament<br />
du génial horloger Abraham Louis<br />
Breguet, décrivant par le menu ses inventions<br />
et innovations ayant révolutionné le<br />
monde de l’horlogerie, telles la montre à<br />
tact, la montre perpétuelle, le chronomètre<br />
de marine, le tourbillon et tant<br />
d’autres. Le tout corrigé de sa main. «J’ai<br />
eu la chance qu’on me propose ces documents,<br />
qui avaient été vendus, puis<br />
oubliés», explique Osvaldo Patrizzi. Après<br />
une lutte épique, les sept manuscrits ont<br />
été adjugés pour 2,3 millions de francs à<br />
Etonnante: une mappemonde-horloge lumineuse<br />
de 1935.<br />
Nicolas Hayek pour son Musée<br />
Breguet. Ils seront publiés avant<br />
d’être exposés. Le montant total de<br />
la vente s’élève à 5,8 millions,<br />
130 lots n’ayant pas trouvé preneur<br />
en partie pour cause de panne<br />
du service on-line, au grand désespoir<br />
du commissaire-priseur.<br />
Quant à Antiquorum, parmi les 500 lots<br />
proposés les 8 et 9 mai, c’est comme prévu<br />
le dernier, la Grande et Petite Sonnerie<br />
Tourbillon de Victorin Piguet, qui a couronné<br />
la vente avec 366 000 francs.<br />
Chez Jaeger-LeCoultre, une pièce unique,<br />
Grande Complication Gyrotourbillon 1<br />
Les manuscrits d’Abraham Louis Breguet ont naturellement été achetés par Nicolas Hayek.<br />
en platine, déjà vendue en 2007, est<br />
adjugée pour 342 000 francs. De la même<br />
marque, une soixantaine de pendulettes,<br />
Bracelet Art Déco signé Cartier.<br />
dont plusieurs de style Art Déco, ont suscité<br />
beaucoup d’intérêt, certaines quadruplant<br />
leur estimation la plus basse.<br />
Parmi celles-ci, l’étonnante Mappemonde,<br />
un globe lumineux avec horloge<br />
(1935), s’est vendue 11 400 francs. Une<br />
Patek Philippe, réf. 5101P, 10 Days<br />
Tourbillon, pour la première fois aux<br />
enchères, est partie pour 246 000 francs.<br />
A signaler encore dans les montres<br />
récentes, une Gérald Genta, or blanc,<br />
tourbillon, calendrier perpétuel squelette,<br />
réf. G4010.4, adjugée pour 121 000<br />
francs. Total de la vente: 6 327 428<br />
francs pour 420 lots. ■<br />
Les montres de poche, en particulier les séries spéciales, font toujours recette.
ECHODESFABRIQUES...<br />
64<br />
MUSÉES PILLÉS, MUSÉES OUBLIÉS…<br />
Par Joël A. Grandjean | jgrandjean@jsh.ch<br />
«LE MUSÉE INVISIBLE» ET<br />
SES ŒUVRES MANQUANTES<br />
Raconter dans un livre la plupart des affaires de vols de tableaux ou<br />
d’œuvres d’art: voici une «belle balade dans la nature» qui débouche<br />
sur ce livre de Nathaniel Herzberg, Le musée invisible. Les chefsd’œuvre<br />
volés (Editions du Toucan, 208 pages). L’auteur, journaliste au<br />
JOURNAL SUISSE D’HORLOGERIE<br />
Monde, s’est visiblement inspiré d’un autre bouquin, antérieur, celui de<br />
Simon Houpt, nommé Tableaux Volés (Editions Bachès). Mais<br />
qu’importe les connivences littéraires, l’un comme l’autre font preuve<br />
d’un oubli de taille! Même s’ils racontent les cambriolages commis en<br />
2008 à la Fondation Bührle de Zurich ou ceux qui ont démuni la<br />
Fondation Neumann de Gingins en 2004, pas de trace du casse de la<br />
route de Malagnou, à Genève, là où était sis le Musée de l’horlogerie<br />
et de l’émaillerie, autre espace patrimonial devenu invisible depuis. ■
GENÈVE… MUSÉE RAYÉ DE LA CARTE?<br />
Le Musée de l’horlogerie et de l’émaillerie aurait-il été rayé de la carte?<br />
C’est l’histoire d’un musée devenu invisible pour avoir trop longtemps<br />
été fermé suite à un casse mémorable. Difficile à gober! Si c’était vrai,<br />
la foule serait descendue dans la rue, les citoyens auraient hurlé au<br />
L’ancien Musée de l'horlogerie et de l'émaillerie.<br />
VACHERON CONSTANTIN ET BAR BIER-<br />
MUELLER: L’HUMAIN AU CENTRE<br />
A l’heure où un grand nombre de marques horlogères ou d’ailleurs<br />
s’engouffrent sur le terrain de la planète en danger et des désastreuses<br />
conséquences y relatives pour les animaux et les environnements,<br />
Vacheron Constantin s’embarque dans une aventure qui s’intéresse<br />
aux êtres humains. Décalage? Son soutien va au collectionneur genevois<br />
Jean Paul Barbier-Mueller, créateur d’une fondation pour étudier<br />
les ethnies et les microcultures en voie de disparition. L’occasion<br />
rêvée pour l’enseigne horlogère de<br />
poursuivre sa «Patrimony Story» et<br />
d’aller à contre-courant. L’intérêt de<br />
la démarche vient du fait qu’elle<br />
émane d’un éminent amasseur du<br />
tangible – trésors archéologiques<br />
retrouvés, statues ou écrits dénichés<br />
(musées à Genève et Barcelone,<br />
bientôt à Dallas) – soudainement<br />
rattrapé par la réalité de l’éphémère.<br />
En effet, bon nombre de ces<br />
© photo: Gérard Pétremand (Centre Multimédia, Département de la culture)<br />
Jean Paul Barbier-Mueller et Juan-Carlos Torres,<br />
CEO de Vacheron Constantin.<br />
scandale, les marques horlogères, avec leurs grands moyens, auraient<br />
redressé la barre. Tous auraient houspillé le conseiller administratif qui,<br />
avouant sa bévue, aurait présenté ses plus plates excuses aux grands<br />
horlogers disparus, à la mémoire des ouvriers suant et trimant durant<br />
des siècles, aux huguenots accueillis par Genève, ainsi qu’aux 18 000<br />
œuvres en déshérence. La Julie (Tribune de Genève) en aurait fait<br />
quelques manchettes, quitte à mettre de l’huile sur le feu. Hélas… en<br />
creusant un peu, la réalité est crue: ce musée n’a plus d’entité propre.<br />
Son titre de «filiale du Musée d’art et d’histoire (MAH)», obtenu entre<br />
1969 et 1972, a simplement été biffé. Avalé par le MAH! Tout a été<br />
habilement enrubanné dans une communication officielle qui cite les<br />
«nouveaux horizons» et parle d’intégration. Aucun PV de séance ne<br />
parle de rature. Les mots sont si anodins et si innocents qu’il valait<br />
mieux ne pas les laisser traîner dans un PV de séance. En filigrane, un<br />
message clair: on veut bien que l’horlogerie soit industrie, économie,<br />
mais de là à la considérer comme une culture… D’accord, elle est aussi<br />
art et histoire! Elle a juste quelque chose de plus: c’est qu’elle appartient<br />
à Genève et à la Suisse plus généralement, comme la grappa à<br />
Bassano del Grappa, Henry Ford à Detroit, la porcelaine à Limoges…<br />
Finalement, Genève est plus traumatisée par ses richesses que par le<br />
pillage de celles-ci. Une capitale mondiale de la haute horlogerie? Oui,<br />
sans musée horloger public, tout au plus disposant d’un vague département<br />
du genre… Ce n’est pas une blague. ■<br />
Lire également le billet sur www.horlogerie-suisse.com<br />
groupes isolés, régis pourtant par une organisation sociopolitique<br />
complexe, gorgée de riches traditions médicinales ou musicales, sont<br />
menacés par l’expansion des sociétés dominantes ou l’effet de la<br />
démographie. Car ils usent, dans leurs pratiques culturelles ou religieuses,<br />
d’objets périssables, absents des musées: statues en terre crue,<br />
transmissions orales, préoccupations religieuses aniconiques…<br />
Au programme, des observations menées sur le terrain et via la publication<br />
de résultats sur trois petits peuples de Côte d’Ivoire, dont les<br />
créations plastiques sont à ce jour absentes des musées, ainsi que sur<br />
un groupe d’environ 6000 individus<br />
du Burkina Faso sud-ouest, à propos<br />
duquel aucune donnée scientifique<br />
n’existe. Des missions de la dernière<br />
chance – la globalisation menace<br />
–, qui offrent une certaine parenté<br />
avec la préservation patrimoniale<br />
des métiers horlogers et le savoirfaire<br />
entretenu par Vacheron<br />
Constantin, entre autres… ■<br />
65
CHRONOMÈTRESDE MARINE<br />
66<br />
JOURNAL SUISSE D’HORLOGERIE<br />
ARNOLD ET LA PRODUCTION AU XVIIIE SIÈCLE<br />
Le Journal Suisse d’Horlogerie, magazine créé en 1876, en est à sa 134e année de parution. A feuilleter ses archives,<br />
certains sujets surgissent comme les éclairages historiques d’une actualité étonnante. Comme cette petite perle, également<br />
mise en ligne sur le site horlogerie-suisse.com. Par Joël A. Grandjean, rédacteur en chef JSH | Proposé par Eric Cosandey, professeur |<br />
Auteur de l’époque: Paul Ditisheim<br />
John Arnold et Thomas Earnshaw sont les deux horlogers anglais<br />
qui, au XVIIIe siècle, en développant sur une échelle importante la<br />
fabrication du chronomètre de marine, ont contribué à en généraliser<br />
l’emploi. Jusqu’alors, la plupart des éléments constitutifs de ces<br />
instruments devaient sortir des mains mêmes des constructeurs. Leur<br />
production restait donc étroitement limitée. Il fallut à John Harrison<br />
trois ans pour terminer successivement ses dernières montres marines<br />
N° 4 et N° 5. Ce délai fut également nécessaire à Kendall pour livrer au<br />
Board of Longitude la réplique de ce N° 4. Ce n’est qu’après trois<br />
années de travail que Mudge parvint à terminer son premier chronomètre<br />
de marine…<br />
Le commandant Gould a relevé dans The Marine Chronometer la portée<br />
de ces longs délais, en ajoutant que si la production totale du célèbre<br />
Ferdinand Berthoud s’est élevée à une septantaine d’appareils en<br />
une quarantaine d’années, il ne lui a pas été possible d’exécuter ses<br />
chronomètres à une allure dépassant annuellement deux ou trois unités<br />
[…] Au cours de cette même période, Arnold comme Earnshaw sont<br />
parvenus à produire plus d’un millier de chronomètres de marche très<br />
satisfaisante. Leur mode de fabrication permit de les livrer à des conditions<br />
de prix bien inférieures à celles des horlogers venant d’être cités.<br />
Les types qu’ils créèrent ont de plus servi de guide aux fabrications<br />
entreprises dans d’autres pays.<br />
Cette production n’a pu être atteinte qu’en faisant appel à la division<br />
du travail. Arnold et Earnshaw […] consacrèrent leurs efforts à une<br />
réalisation rationnelle, recourant à des artisans spécialisés pour les opérations<br />
d’ébauche, la fourniture des rouages, pierres, ressorts, cadrans,<br />
aiguilles, boîtiers. Ceux-ci ne manquaient pas dans le district horloger<br />
de Clerkenwell ou dans le Lancashire. Ils eurent cependant à former le<br />
personnel voulu pour exécuter certaines parties, telles l’échappement et<br />
le balancier, tout en se réservant les opérations finales de la pose du spiral<br />
et du réglage, considérées comme de précieux secrets de fabrication.<br />
Arnold et Earnshaw ne furent cependant pas meilleurs amis que Pierre<br />
Le Roy et Ferdinand Berthoud. Comme le commandant Gould l’a fait<br />
remarquer, ils se sont âprement disputé la priorité de l’origine de tous<br />
les perfectionnements apportés à l’échappement du chronomètre de<br />
marine et à la constitution de ses organes réglant.<br />
On voit alors apparaître le premier dispositif de balancier compensateur,<br />
exécuté en 1773, où deux masses diamétralement opposées s’éloignent<br />
John Arnold, 1736-1799. Son nom revit sous l’appellation «Arnold & Son, Master of The<br />
Longitude in London Since 1764». Elle a son siège à La Chaux-de-Fonds.<br />
www.arnoldandson.com<br />
ou se rapprochent du centre sous l’effet d’une lame bimétallique enroulée<br />
en spirale. Dès 1779, le mode d’actionnement des masses compensatrices<br />
fut modifié et remplacé par une paire de bilames symétriques<br />
repliées en S. […] L’échappement offrait l’inconvénient d’exiger la<br />
présence de l’huile aux parties agissantes: ceci provoquait de sérieuses<br />
perturbations de marche. Il y a plusieurs points communs entre ce<br />
dispositif et la construction d’un autre échappement à détente pivotée<br />
d’Arnold. La roue d’échappement portait une double denture, mais les<br />
fonctions présentaient, côté huiles, les mêmes inconvénients que le<br />
dispositif précédent.<br />
Arnold substitua à cet échappement le dispositif pour lequel il avait<br />
obtenu un brevet d’invention. La détente ne repose plus sur des pivots,<br />
mais elle est fixée à sa base sur la platine; elle est amincie en ressort de<br />
manière à pouvoir fléchir près de son point d’attache. Earnshaw a<br />
revendiqué la paternité de cette nouvelle disposition, comme il l’a indiqué<br />
dans Longitude, an Appeal to the Public, volume de 314 pages<br />
publié en 1808. Il donne les détails les plus précis sur les conditions<br />
dans lesquelles il réalisa sa découverte. Il s’était rendu compte des
Montre de poche réalisée par John Arnold. Visuel extrait des archives de JSH.<br />
Chronomètre de marine Hamilton dans sa boîte.<br />
(Repro ID: F3196-1 © National Maritime Museum,<br />
Greenwich, London)<br />
inconvénients inhérents à l’emploi d’un axe<br />
pivoté pour supporter la pièce intermédiaire<br />
de l’échappement; pour y obvier, il avait terminé<br />
son nouveau dispositif à détente ressort,<br />
mais les moyens lui faisaient défaut pour<br />
protéger lui-même par un brevet cette importante<br />
transformation. Le compte rendu de ses<br />
tribulations est un cruel exemple du sort qui<br />
bien souvent est réservé aux inventeurs.<br />
Le dispositif de l’échappement à détente<br />
ressort d’Earnshaw continue à être employé<br />
dans tous les chronomètres de marine,<br />
sous une forme pratiquement inchangée<br />
depuis lors. Un modèle agrandi, exécuté<br />
par l’inventeur pour le compte du Board<br />
of Longitude, a été reproduit d’après l’original<br />
conservé à l’Observatoire de Greenwich,<br />
dans notre publication commémorative<br />
de 1921, «Le Centenaire de Thomas<br />
Earnshaw», par Paul Ditisheim, Journal<br />
Suisse d’Horlogerie, 1929.<br />
Extrait John Arnold, né en 1736 dans<br />
un village des Cornouailles, était fils d’horloger,<br />
auprès duquel il commença son<br />
apprentissage. Mais, à la suite d’une dispute<br />
de famille, il quitta la maison paternelle<br />
et s’embarqua bien jeune pour le<br />
continent. Après avoir voyagé d’abord en<br />
Hollande, puis en Allemagne, en gagnant<br />
péniblement sa vie, parfois comme armurier<br />
lorsque le travail d’horloger faisait<br />
défaut, Arnold rentra en Angleterre. Il<br />
connaissait un peu les langues, son esprit<br />
était déjà mûri par les années passées à<br />
l’étranger. Il s’établit à Londres et se fit<br />
bientôt connaître par une petite montre à<br />
sonnerie insérée dans le chaton d’une<br />
bague. Il fut admis à présenter cette pièce<br />
au roi en 1764. Ce tour de force lui valut la<br />
faveur de la cour et de nombreux clients.<br />
C’est en 1770 qu’il entra en relations avec<br />
le Board of Longitude et soumit à<br />
l’Observatoire de Greenwich son premier<br />
chronomètre de marine.<br />
Chronomètre de marine «Arnold» visible<br />
au Musée de Greenwich. (Repro ID: L0242-001 © National<br />
Maritime Museum, Greenwich, London)<br />
Dessins de la main de John Arnold. Deux balanciers commentés par le maître.<br />
67
JOAILLERIEHEURE<br />
68<br />
DIALOGUE ENTRE BIJOUX ET MINÉRAUX<br />
Les bijoux et les minéraux se donnent la réplique au Musée Barbier-Mueller,<br />
jusqu’au 15 septembre, dans le cadre de l’exposition «Bijoux de l’homme, bijoux de la terre». Par Odile Habel<br />
un dialogue étonnant entre<br />
minéraux et parures ethniques<br />
C’est<br />
que le Musée Barbier-Mueller a<br />
mis en scène, présentant quelque deuxcents<br />
bijoux de toutes les époques et de<br />
tous les continents, auxquels répondent<br />
des minéraux multicolores aux formes<br />
insolites.<br />
Cette exposition est née de deux passions:<br />
celle du Musée Barbier-Mueller<br />
pour les bijoux, à qui on doit la très belle<br />
exposition «Parure» en 1994, et celle<br />
d’Alexis, petit-fils des fondateurs du<br />
musée, Jean Paul et Monique Barbier-<br />
Mueller, qui s’est très jeune intéressé aux<br />
minéraux. Fasciné par l’étrangeté de certains<br />
spécimens et par leurs couleurs<br />
somptueuses, il a créé une collection qui<br />
2_<br />
allie beauté et rareté. Composée de matériaux<br />
bruts, de coquillages et de pierres<br />
semi-précieuses, elle dévoile des ornements<br />
à l’aspect primitif, polis par les<br />
siècles. Chacun des bijoux raconte une<br />
histoire. Celle des hommes qui les ont<br />
façonnés et portés.<br />
L’exposition, qui comprend 45 bijoux et<br />
45 minéraux, montre que les populations<br />
d’Afrique, d’Asie ou des Amériques ont<br />
peu utilisé les pierres semi-précieuses<br />
dont raffolait l’Antiquité, même s’il existe<br />
les colliers de la civilisation de Chavin,<br />
au Pérou, constitués de boules de cristal<br />
de roche, confectionnés sans l’aide d’outils<br />
en métal et vieux de trois-mille ans.<br />
Derrière la beauté des bijoux, de nombreuses<br />
questions se profilent. Pourquoi<br />
1_<br />
les mêmes civilisations des Andes, disposant<br />
à profusion de cristaux d’améthyste,<br />
ne les ont-elles pas utilisés ? Pourquoi les<br />
Congolais n’ont-ils jamais incorporé<br />
l’amazonite, plus dure et d’un bleu-vert
3_<br />
1_Pendentif figurant un batracien. Costa Rica, région de<br />
Diquis? Période VI: environ 1000-1500 après J.-C.?<br />
2_Améthyste Magallesburg, Afrique du Sud.<br />
3_Collier. Nord de la Thaïlande, Triangle d’Or. Groupe<br />
Hmong ou Mien? XIX e-XX e siècle. Argent.<br />
4_Collier wuasagale. Mélanésie, îles Fidji. XIX e-XX e siècle.<br />
Défenses de cachalot, fibres.<br />
Anc. coll. Josef Mueller. Inv. 5014-C.<br />
5_Boucles d’oreilles thandatti. Inde du Sud, Tamil Nadu.<br />
XIX e-XX e siècle. Feuille d’or et laque.<br />
6_Bracelet khã-nikhãga to’yo. Burkina Faso. Style gan.<br />
XIX e-XX e siècle. Alliage cuivreux.<br />
5_<br />
© Musée Barbier-Mueller<br />
Photos: Studio Ferrazzini-Bouchet<br />
plus raffiné que la turquoise, dans leurs<br />
parures, alors qu’ils l’exportaient jusqu’au<br />
Maroc où les Berbères la privilégiaient?<br />
L’agate ou le lapis-lazuli se retrouvent<br />
exclus des bijoux des tribus turkmènes,<br />
qui préféraient la cornaline, tout comme<br />
celles du Béloutchistan ou encore<br />
bédouines, alors que ces pierres étaient<br />
très prisées chez les peuples occupant les<br />
mêmes régions du Moyen et du Proche-<br />
Orient avant notre ère.<br />
Captivante par sa beauté, l’exposition est<br />
aussi technique, réservant une place<br />
importante à la pratique des fondeurs de<br />
bijoux en alliage de cuivre. La technique<br />
employée est celle de la «cire perdue», qui<br />
consiste à placer un modèle de cire dans<br />
une gangue d’argile, de petits bâtonnets<br />
de fer plongeant dans la terre jusqu’à la<br />
cire. L’argile est cuite, les bâtonnets retirés,<br />
la cire s’écoule, laissant au milieu de<br />
la gangue de terre désormais cuite la<br />
forme modelée par l’artiste. Le métal en<br />
fusion est ensuite coulé par les trous<br />
ayant servi à évacuer la cire. L’argile brisée<br />
révélait ensuite un objet parfait ou<br />
incomplet en raison de la formation<br />
d’une bulle d’air ayant empêché le métal<br />
de remplir toute la cavité. ■<br />
4_<br />
6_<br />
69
SHOPPINGHEURE<br />
70<br />
ODILE HABEL<br />
EAU DESIGN<br />
La carafe créée par Pil<br />
Bredahl joue l’élégance.<br />
La taille cintrée de la<br />
carafe permet une bonne<br />
prise en main et<br />
le bouchon<br />
est équipé d’un<br />
astucieux mécanisme<br />
qui s’ouvre<br />
automatiquement<br />
quand on<br />
verse. Le bouchon<br />
retient les glaçons, le<br />
citron et les feuilles de<br />
menthe.<br />
Carafe de Pil Bredahl.<br />
www.pilbredahldesign.dk<br />
CHAMPAGNE FLOTTANT<br />
Soleil, humour et champagne chez Piper-<br />
Heidsieck, qui a imaginé son bar flottant<br />
«Piscine Island», réinventant ainsi l’art de<br />
déguster le champagne. Sans attache ni<br />
ancre, le bar flottant «Piscine Island» vogue,<br />
libre et insubmersible, à la surface de l’eau.<br />
A l’intérieur, une bouteille de Piper-Heidsieck<br />
Cuvée Brut avec quatre coupes exclusives<br />
spécialement conçues pour la piscine.<br />
«Piscine Island» de Piper-Heidsieck, édition<br />
limitée en vente chez Jelmoli et Hofer Weine,<br />
Zurich.<br />
RÉVEIL EN MUSIQUE<br />
Musique maestro! Sony vient de concocter une toute nouvelle station<br />
d’accueil spécialement dédiée aux produits mobiles Apple. Non seulement<br />
cette station recharge l’appareil, mais elle distille en plus un son stéréo éton-<br />
nant pour une taille réduite. Le système Bass Reflex et les haut-parleurs avec<br />
sortie RMS de 3,5 W + 3,5 W assurent des basses profondes et fidèles.<br />
Station d’accueil ICF-DS11iP de Sony.
GALLIANO GIRL<br />
L’Eau de parfum John Galliano entre en scène cet été dans une version plus légère,<br />
l’Eau de toilette. Le parfum s’ouvre sur un soupçon de violette et une envolée de<br />
roses avant de révéler un cœur composé d’iris et escorté par la rose. Le fond boisé,<br />
un musc tissé de cèdre, mêle sensualité et originalité. Un cocktail unique<br />
d’absolu et d’essence de rose du Maroc, d’essence de cèdre de l’Atlas et<br />
d’absolu d’iris d’Italie, le tout soutenu par une partition pétillante<br />
d’aldéhydes.<br />
Eau de toilette John Galliano.<br />
TROIS ANS D’AUTONOMIE<br />
Un kit clavier-souris sans fil pour ordinateur<br />
portable, on connaît. Il n’empêche que le<br />
dernier-né du fabricant helvétique est<br />
particulièrement innovant avec une<br />
autonomie de batterie pouvant aller jusqu’à<br />
trois ans pour le clavier et la souris. Un<br />
record! Autre innovation: l’utilisation de la<br />
technologie sans fil 2,4 GHz, qui allie les<br />
avantages du wireless et la fiabilité du filaire.<br />
Kit Wireless Desktop MK710 de Logitech.<br />
RHUM D’ARTISTE<br />
La bouteille de Malibu se décline cet été dans deux versions réalisées par<br />
Niark1 et The Feebles, deux célèbres graphistes du street art. Chacun des<br />
artistes propose sa propre interprétation de la silhouette iconique de Malibu.<br />
Niark1 rompt avec la blancheur originelle de la bouteille avec un design d’un<br />
bleu éclatant et des motifs aux couleurs vives, tandis que The Feebles a imaginé<br />
un univers plus doux, avec des teintes légères et des tons pastel.<br />
Rhum Malibu designé par Niark1 et The Feebles, édition limitée.<br />
71
CHRONIQUEHEURE<br />
72<br />
LE PRIX DE L’HISTOIRE Après s’être momentanément interrompue, la<br />
course à la conquête d’une aura patrimoniale se poursuit au sein des marques qui ont à<br />
la fois des moyens et une histoire demeurée intacte, même partiellement. Une histoire<br />
dont il reste suffisamment d’éléments une fois la poussière poutzée, malgré les rachats et<br />
les reventes, malgré le syndrome de la table rase exercé presque maladivement par tout<br />
repreneur qui se respecte. Malgré aussi les errances de certains managers qui, notamment<br />
au sortir de la crise des années 1970, ont mené à la benne à ordures tant de trésors<br />
irremplaçables, sous prétexte qu’ils s’avéraient bien inutiles face aux nouveaux enjeux<br />
d’une horlogerie virant au quartz. S’ils avaient su! Dans le sillage du retour aux arts<br />
mécaniques, ce culte de l’histoire est devenu un enjeu sensible auprès des<br />
consommateurs. D’autant que, durant ces trente dernières années, les excellentes<br />
performances des ventes aux enchères horlogères, panachées de records et de démesure,<br />
ont fait office de facteur amplifiant. D’un seul coup, la récente crise a stoppé ces élans. A<br />
l’orée d’une esquisse de reprise, les affaires historiques reprennent. Le musée Omega<br />
rouvre, flambant refait, la Heritage Gallery de Jaeger-LeCoultre relance son programme<br />
d’expositions temporaires, mettant l’invention à l’honneur. Quant à la Piaget Time Gallery,<br />
elle est habitée par une tournante dédiée à son mythique modèle Polo, si cher à la famille<br />
Piaget et pourtant vigoureusement décrié par le repreneur juste après le rachat de la<br />
marque! Reste que ces initiatives, pilotées par les départements communication plus que<br />
par un attaché de la direction, sont porteuses de messages dirigés et partiaux. Et même<br />
si le métier d’historien est entré en horlogerie, après avoir été empiriquement exercé par<br />
des employés affublés du titre de «mémoire vivante de l’entreprise», il se peut que<br />
l’Histoire et ses vérités en souffrent. En effet, les intérêts divergent. D’un côté, la louange<br />
d’une enseigne se nourrissant de son propre prestige, gommant ses errances et ses<br />
passages à vide; de l’autre, l’univers des chercheurs indépendants, avides de découvertes<br />
désintéressées. Tel Joseph Florès, passionné d’histoire qui, après avoir consulté un<br />
manuscrit daté du 23 décembre 1878 de l’Académie royale des sciences de Paris, a<br />
démontré que le père de la première montre automatique était Dieudonné-Hubert Sarton<br />
(1748-1828), horloger liégeois, et non pas Abraham-Louis Perrelet (1729-1826), comme<br />
il est communément admis depuis que l’ont affirmé Alfred Chapuis et Eugène Jaquet<br />
dans leur ouvrage de 1952. Juste un exemple… A l’heure où le «H» majuscule de l’Histoire<br />
horlogère pourrait être consolidé, certains de ses garants y perçoivent non pas ses ouvrières<br />
origines, mais son versant alerte-au-luxe-dans-un-monde-en-crise. Ils ont tout faux:<br />
à Genève, ils viennent même de supprimer le Musée de l’horlogerie et de l’émaillerie,<br />
transformant en corpus de collections ce qui était, depuis 1969-1972, une filiale<br />
autonome du Musée d’art et d’histoire.<br />
Joël A. Grandjean<br />
Rédacteur en chef JSH – Journal Suisse d’Horlogerie<br />
«A l’orée<br />
d’une esquisse<br />
de reprise,<br />
les affaires<br />
historiques<br />
reprennent.»