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En supprimant le cloisonnement entre génétique et
environnement physique et social, l’épigénétique
constitue un premier pas dans le renouvellement
de la réflexion. Mais il est urgent d’aller plus loin.
L’incontournable changement de rapport de force,
pour passer d’une réflexion sur le parcours de soins
à une action sur le parcours de vie
Faut-il agir sur les causes sociales, économiques
et environnementales, ou continuer à cibler les facteurs
proximaux et l’individu ? Un choix doit être
opéré, qui impose d’aller contre certains lobbies et
d’en écouter d’autres, comme les associations de
patients.
Les stratégies de promotion de la santé et de protection
sociale restent largement cloisonnées,
dans notre pays. Lors de la pandémie de Covid-19,
par exemple, la prise en charge du chômage partiel
a été décidée au nom de la protection sociale
et non dans une optique d’amélioration de la santé
– pourtant, les effets bénéfiques pour la santé ont
été réels. Cette logique freine indubitablement le
développement de la santé publique plus qu’elle
ne l’améliore. De fait, la santé ne se résume pas à
la politique de soins. Les politiques de l’emploi du
logement, du transport, de la santé au travail ou encore
de l’urbanisme ont également des incidences
en la matière. Aussi importe-t-il que l’ensemble de
la société se mobilise.
Par ailleurs, continuer à opposer l’individuel et le
collectif n’a pas de sens. L’essor d’une approche
plus personnalisée voire prédictive de la santé
n’est ainsi pas contradictoire avec la dimension
collective de la santé publique. La médecine dite
individuelle concerne d’ailleurs plutôt des petits
groupes que des individus stricto sensu. En outre,
en appréhendant le patient de façon totalement
dissociée de son contexte global, elle n’a que
peu d’impact sur les déterminants de pathologies
comme le diabète, les maladies cardiovasculaires
ou l’obésité.
ne serait-ce que parce qu’elle repose à la fois sur
l’analyse de l’évolution de la société et sur l’évaluation
fine de l’impact des politiques publiques sur la
santé de la population.
Un travail interdisciplinaire est indispensable
pour suivre les évolutions sociales et leur impact
sur la santé, or il n’est pas encore suffisamment
poussé. Les études sur le comportement des adolescents
ou sur le développement des réseaux
sociaux, notamment, font cruellement défaut. Plus
globalement, la France manque de statistiques, notamment
pour suivre le lien entre déterminants sociaux
et santé. C’est d’autant plus regrettable que
l’expérience montre que dans les pays nordiques,
le système de registre permet de monitorer en continu
l’état de santé de la population. L'inscription
dans la durée et la progressivité expliquent d’ailleurs
la réussite exemplaire du Programme national
nutrition santé.
En somme, placer la santé publique au centre de
l’arène et lui permettre d’exprimer toute sa puissance
impose de sortir des débats d’experts et de
l’entre-soi, de mobiliser et coordonner l’ensemble
de la société civile et de revoir notre rapport au
temps. Peut-être faut-il aussi sortir des rapports
scientifiques trop policés et tenir un discours plus
agressif. En tout état de cause, le temps est venu
de passer de la rhétorique aux actes.
Synthèse de la soirée débat du 29/03/2022 rédigée
par Voyelles Rédaction – www.voyelles.net
LES MARDIS DE COOPÉRATION SANTÉ - Fil rouge
2022 : Après la Covid 19, un regain pour la santé
publique ?
La nécessaire réhabilitation du temps long, pour infuser
les politiques publiques.
L’approche holistique de la santé publique se pense
et se construit nécessairement sur le long terme,
Édition spéciale Santé Publique - Mai 2022 7