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Recueil des oeuvres de l'expostion "EMPREINTE(S)" et quelques poèmes

Le thème du 24ème printemps des poètes était « l’éphémère ». Quel rapport avec l’empreinte nous direz-vous ? L’éphémère est un paradoxe en ce sens qu’il peut être un bref instant de vie susceptible d’influencer ou de transformer le cours de toute une vie. En fait l’éphémère nous renvoie aux deux notions que sont le temps et la fragilité ! Or qui mieux que l’homme incarne ces deux pôles ? Sa finitude le fragilise et l’inscrit dans une durée très brève par rapport à l’Histoire. Pour Lamartine : « l’homme n’a point de port, le temps n’a point de rive, il coule et nous passons » Quant à Brassaï il disait : « C’est la hantise et le désir de l’homme de laisser une trace indélébile de son éphémère passage sur cette terre qui donne naissance à l’art » La poésie et l’art en général ouvrent le champ à un vaste questionnement sur ce caractère éphémère de l’humain qui ne fait que passer sans passer vraiment puisque chaque individu est capable de laisser derrière lui, de par sa production ou ses actes, une trace anonyme ou pas, de son passage. Nous avons donc invité les artistes à réfléchir à ce caractère éphémère et fragile de l’homme et à laisser une empreinte, la trace de leur passage sur cette terre : ce peut être un message personnel pour les générations futures, un souvenir ou un rêve à préserver ou encore un témoignage de la fragilité et des espoirs de notre époque…

Le thème du 24ème printemps des poètes était « l’éphémère ».

Quel rapport avec l’empreinte nous direz-vous ?
L’éphémère est un paradoxe en ce sens qu’il peut être un bref instant de vie susceptible d’influencer ou de transformer le cours de toute une vie.

En fait l’éphémère nous renvoie aux deux notions que sont le temps et la fragilité ! Or qui mieux que l’homme incarne ces deux pôles ?
Sa finitude le fragilise et l’inscrit dans une durée très brève par rapport à l’Histoire.

Pour Lamartine :
« l’homme n’a point de port, le temps n’a point de rive, il coule et nous passons »
Quant à Brassaï il disait :
« C’est la hantise et le désir de l’homme de laisser une trace indélébile de son éphémère passage sur cette terre qui donne naissance à l’art »

La poésie et l’art en général ouvrent le champ à un vaste questionnement sur ce caractère éphémère de l’humain qui ne fait que passer sans passer vraiment puisque chaque individu est capable de laisser derrière lui, de par sa production ou ses actes, une trace anonyme ou pas, de son passage.

Nous avons donc invité les artistes à réfléchir à ce caractère éphémère et fragile de l’homme et à laisser une empreinte, la trace de leur passage sur cette terre : ce peut être un message personnel pour les générations futures, un souvenir ou un rêve à préserver ou encore un témoignage de la fragilité et des espoirs de notre époque…

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Dans le cadre du printemps des poètes 2022

EXPOSITION COLLECTIVE

DU 12/03 AU 03/04/2022

EMPREINTE(S)

rECUEIL DES OEUVRES

... et quelques poèmes



Merci aux artistes et au

collectif éphémère,

qui ont marqué de leur

empreinte cette 10ème

exposition organisée par

PROMETHEAS



EMPREINTE(S)

Le thème du 24ème printemps des poètes était « l’éphémère ».

Quel rapport avec l’empreinte nous direz-vous ?

L’éphémère est un paradoxe en ce sens qu’il peut être un bref instant de

vie susceptible d’influencer ou de transformer le cours de toute une vie.

En fait l’éphémère nous renvoie aux deux notions que sont le temps et la

fragilité ! Or qui mieux que l’homme incarne ces deux pôles ?

Sa finitude le fragilise et l’inscrit dans une durée très brève par rapport à

l’Histoire.

Pour Lamartine :

« l’homme n’a point de port, le temps n’a point de rive, il coule et nous

passons »

Quant à Brassaï il disait :

« C’est la hantise et le désir de l’homme de laisser une trace indélébile de

son éphémère passage sur cette terre qui donne naissance à l’art »

La poésie et l’art en général ouvrent le champ à un vaste questionnement

sur ce caractère éphémère de l’humain qui ne fait que passer sans passer

vraiment puisque chaque individu est capable de laisser derrière lui, de par

sa production ou ses actes, une trace anonyme ou pas, de son passage.

Nous avons donc invité les artistes à réfléchir à ce caractère

éphémère et fragile de l’homme et à laisser une empreinte, la trace de

leur passage sur cette terre : ce peut être un message personnel pour

les générations futures, un souvenir ou un rêve à préserver ou encore

un témoignage de la fragilité et des espoirs de notre époque…


Index des Travaux du Vent

Adonis

J'ai écrit mon identité

A la face du vent

Et j'ai oublié d'écrire mon nom.

Le temps ne s'arrête pas sur l'écriture

Mais il signe avec les doigts de l'eau

Les arbres de mon village sont poètes

Ils trempent leur pied

Dans les encriers du ciel.

Se fatigue le vent

Et le ciel déroule une natte pour s'y étendre.

La mémoire est ton ultime demeure

Mais tu ne peux l'y habiter

Qu'avec un corps devenu lui-même mémoire.

Dans le désert de la langue

L'écriture est une ombre

Où l'on s'y abrite.

Le plus beau tombeau pour un poète

C'est le vide de ses mots.

Peut-être que la lumière

T'induira en erreur

Si cela arrive

Ne craint rien, la faute est au soleil


Dominique Cesaro

dominique.cesaro@gmail.com


De cet amour ardent je reste

émerveillée

Andrée Chedid

Je reste émerveillée

Du clapotis de l’eau

Des oiseaux gazouilleurs

Ces bonheurs de la terre

Je reste émerveillée

D’un amour

Invincible

Toujours présent

Je reste émerveillée

De cet amour

Ardent

Qui ne craint

Ni le torrent du temps

Ni l’hécatombe

Des jours accumulés

Dans mon miroir

Défraîchi

Je me souris encore

Je reste émerveillée

Rien n’y fait

L’amour s’est implanté

Une fois

Pour toutes.

De cet amour ardent je reste émerveillée


Isabelle Vigo

lizabelle06@yahoo.fr


Le mythe de Sisyphe (extrait)

Albert Camus

Au fond de toute beauté gît quelque chose d’inhumain et

ces collines, la douceur du ciel, ces dessins d’arbres, voici

qu’à la minute même, ils perdent le sens illusoire dont nous

les revêtions, désormais plus lointains qu’un paradis perdu.

L’hostilité primitive du monde, à travers les millénaires,

remonte vers nous. Pour une seconde, nous ne le

comprenons plus puisque pendant des siècles nous n’avons

compris en lui que les figures et les dessins que

préalablement nous y mettions, puisque désormais les

forces nous manquent pour user de cet artifice.

Le monde nous échappe puisqu’il redevient lui-même. Ces

décors masqués par l’habitude redeviennent ce qu’ils sont.

Ils s’éloignent de nous. De même qu’il est des jours où,

sous le visage familier d’une femme, on retrouve comme

une étrangère celle qu’on avait aimée il y a des mois ou des

années, peut-être allons-nous désirer même ce qui nous

rend soudain si seuls. Mais le temps n’est pas encore venu.

Une seule chose : cette épaisseur et cette étrangeté du

monde, c’est l’absurde.


Bénédicte Capdeville

benedicte06370@orange .fr


Mythe

Cesare Pavese

Un jour viendra où le jeune dieu sera un homme,

sans souffrance, avec le sourire mort

de l’homme qui a compris. Le soleil lui aussi glisse au loin,

en rougissant les plages. Un jour viendra où le dieu

ne saura plus où étaient les plages de jadis.

On s’éveille un matin : l’été est déjà mort,

dans les yeux grondent encore des splendeurs,

comme hier, et à l’oreille le fracas du soleil

devenu sang. Le monde a changé de couleur.

La montagne ne touche plus le ciel ; les nuages

ne s’amoncellent plus comme les fruits ; dans l’eau

pas un galet n’affleure. Un corps d’homme

se courbe pensif, où respirait un dieu.

C’est la fin du grand soleil d’été et de l’odeur de terre

et de la route libre, animée par un peuple

qui ignorait la mort. On ne meurt pas l’été.

Si quelqu’un venait à disparaître, il y avait le jeune dieu

qui vivait pour les autres et ignorait la mort.

Sur lui, la tristesse n’était que l’ombre d’un nuage.

Son pas étonnait la terre.

Maintenant,

la lassitude pèse sur les membres de cet homme,

sans souffrance : la calme lassitude d’une aube

ouvrant un jour de pluie. Les plages assombries

sur lesquelles jadis il n’avait qu’à poser son regard

ne connaissent plus le dieu. Et l’océan de l’air

ne revit plus au souffle. Les lèvres de l’homme

se plissent résignées, pour sourire devant la terre.


Keriaki Moustaki


Le lac

Alphonse de Lamartine (extraits)

Ainsi, toujours poussés vers de nouveaux rivages,

Dans la nuit éternelle emportés sans retour,

Ne pourrons-nous jamais sur l’océan des âges

Jeter l’ancre un seul jour ?

Ô lac ! l’année à peine a fini sa carrière,

Et près des flots chéris qu’elle devait revoir,

Regarde ! je viens seul m’asseoir sur cette pierre

Où tu la vis s’asseoir !...

« Ô temps ! suspends ton vol, et vous, heures propices !

Suspendez votre cours :

Laissez-nous savourer les rapides délices

Des plus beaux de nos jours ! »...

« Mais je demande en vain quelques moments encore,

Le temps m’échappe et fuit ;

Je dis à cette nuit : Sois plus lente ; et l’aurore

Va dissiper la nuit. »

« Aimons donc, aimons donc ! de l’heure fugitive,

Hâtons-nous, jouissons !

L’homme n’a point de port, le temps n’a point de rive ;

Il coule, et nous passons ! »

Temps jaloux, se peut-il que ces moments d’ivresse,

Où l’amour à longs flots nous verse le bonheur,

S’envolent loin de nous de la même vitesse

Que les jours de malheur ?

Eh quoi ! n’en pourrons-nous fixer au moins la trace ?

Quoi ! passés pour jamais ! quoi ! tout entiers perdus !

Ce temps qui les donna, ce temps qui les efface,

Ne nous les rendra plus !

Éternité, néant, passé, sombres abîmes,

Que faites-vous des jours que vous engloutissez ?

Parlez : nous rendrez-vous ces extases sublimes

Que vous nous ravissez ?….


Miss Hélène Mignot

misshelenemignot@gmail.com


François Cheng

(extraits)

Suivre le poisson, suivre l'oiseau.

Si tu envies leur erre, suis-les

Jusqu'au bout. Suivre leur vol, suivre

Leur nage, jusqu'à devenir

Rien. Rien que le bleu d'où un jour

A surgi l'ardente métamorphose,

***

Mais l'oiseau point d'empreinte

Ne laisse. Son empreinte est

Son vol même. Nulle trace

Autre que l'instant-lieu,

Joie du pur avènement :

Lieu deux ailes qui s'ouvrent.

Instant un coeur qui bat.

***

Dans l'Ouvert, toutes choses se révèlent présences

Leur voie n'est point écoulement-épuisement

Présence à présence, elles se suscitent et s'élèvent

Transformant la marche droite et horizontale

En fumée bleue de l'accueil. Corps ailés tendus

Vers le clair et le haut, mouvement même du Tao

Ah, élan du souffle, pur jaillissement, chant!


Laure Hochereau

laure.hochereau@orange.fr


Le Droit et le Devoir de Vivre

Paul Eluard

Il n'y aurait rien

Pas un insecte bourdonnant

Pas une feuille frissonnante

Pas un animal léchant ou hurlant

Rien de chaud rien de fleuri

Rien de givré rien de brillant rien d'odorant

Pas une ombre léchée par la fleur de l'été

Pas un arbre portant des fourrures de neige

Pas une joue fardée par un baiser joyeux

Pas une aile prudente ou hardie dans le vent

Pas un coin de chair fine pas un bras chantant

Rien de libre ni de gagner ni de gâcher

Ni de s'éparpiller ni de se réunir

Pour le bien pour le mal

Pas une nuit armée d'amour ou de repos

Pas une voix d'aplomb pas une bouche émue

Pas un sein dévoilé pas une main ouverte

Pas de misère et pas de satiété

Rien d'opaque rien de visible

Rien de lourd rien de léger

Rien de mortel rien d'éternel

Il y aurait un homme

N'importe quel homme

Moi ou un autre

Sinon il n'y aurait rien.


Elodie Jonville- Gueutal

elodiegueutal@free.fr


L’âme vers l’éternité

Hélène Dorion

Feuilles, petites aiguilles qui claquent

comme claque le vent contre les jours

et perce peu à peu le brouillard

Voici le temps, mon âme. Retourne-le sans hâte.

Traverse chacune des arches qu’il érige ;

prends dans ta main les pierres

qui jalonnent le passage

de la terre jusqu’au ciel

et de nouveau à la terre

Il n’existe aucun chemin ;

la quête que nous poursuivons

repose en chaque chose approchée

en chaque instant qui délivre ses clartés.

Le temps ne s’écoule pas. Le temps

brûle à nos côtés, silencieux

et bordé de roc qu’il fissure

lentement, dans le désert intérieur.

Aucun chemin. Juste quelques pas

à la lisière de l’aube.


Thalis

phv06@wanadoo.fr


Nous Sommes Cendre et Flamme

Amina Saïd

dans le cercle du monde

car la flamme brûle en nous qui en sommes le souffle

et notre lutte

est ce tremblement de lumière

vivace identique à elle-même

elle est en toute chose

nos yeux faits pour la contempler

séparés de sa source nous nous absentons pour mieux

nous unir à elle

alors nous serons cendre car la mort viendra messager

sans message

ses orbites de pierre

aussi éloignées de soi que l'étoile

de l'énigme du regard

la vie tiendra tête disant

je suis filtre puissant contre la mort

demeureront quelques brins du passé dans l'herbier du

temps quelques souvenirs entre ses pages

quelqu'un peut-être

sera la mémoire de notre attente

et se demandant qui nous étions fera l'histoire de notre

solitude

alors se rallumeront les feux intimes qu'offre la lumière


Christine Atmani

chrysart@ymail.com


Contre-Temps

Claude Roy

Les racines du vent se glissent dans un cœur se

nourrissent d'un sang encore embué de nuit et

ramènent au jour ombragé de douleur un enfant ébloui

Soleil dans ses yeux purs jette ton sable d'or et tes

pigeons de neige au front du bel enfant éclabousse de

feu le trébuchant essor de l'ange adolescent

Le soleil et le vent ont des philtres trompeurs pour

écarter de nous les menaces du temps La mer chante à

ses pieds quand Narcisse se meurt et plonge à contretemps

La mer chante à ses pieds et tresse son écume sa

broderie jaunie de sable et de limon comme au ciel du

sommeil une étoile s'allume lorsque nous nous aimons

Écartez-vous marins des rivages menteurs où chante la

sirène aux flancs de goémons La plage et ses détours

le sable et sa torpeur sont pièges du démon

Ainsi que le soleil ou sa flamme caresse et blesse ou

bien guérit le nageur incertain ainsi de notre mort qui

ralentit ou presse le pas de nos destins (...)


Lucas Rebuffo


Aux premières loges

Rhita Benjelloun

Spectatrice, j’observe la scène de la vie

Où des personnages surgissent,

Dans les moments de joie ou de dépit

Où le rêve devient illusion et meurt avec mépris

Où le mensonge devient vrai et la vérité au fond du puits

Mais qui suis-je dans ce monde plein d’acteurs ?

Où chacun monte sur l’estrade,

Joue son rôle comme ses prédécesseurs

Qui suis-je quand moi-même j’ai un rôle dans cette scène ?

J’observe, je souffre

Mais j’applaudis tous ces mensonges réels

Que serait le monde s’il n’était pas une fiction

Si ces scènes étaient bien réelles et faites avec passion

Je jure devant Dieu que j’assisterais tous les jours

Je serais l’héroïne de la gaieté

De la confiance et de l’amour

J’applaudirais jusqu’à ne plus en pouvoir

Et j’appellerais les âmes chagrinées pour venir la voir

Mais hélas la scène de la vie demeure la même

Et je demeure aux premières loges

Avec ou sans mes applaudissements le rideau s’ouvre et

se ferme


Eva Attal


L'Horloge

Charles Baudelaire

Horloge ! dieu sinistre, effrayant, impassible,

Dont le doigt nous menace et nous dit : » Souviens-toi !

Les vibrantes Douleurs dans ton coeur plein d’effroi

Se planteront bientôt comme dans une cible,

Le plaisir vaporeux fuira vers l’horizon

Ainsi qu’une sylphide au fond de la coulisse ;

Chaque instant te dévore un morceau du délice

A chaque homme accordé pour toute sa saison.

Trois mille six cents fois par heure, la Seconde

Chuchote : Souviens-toi ! – Rapide, avec sa voix

D’insecte, Maintenant dit : Je suis Autrefois,

Et j’ai pompé ta vie avec ma trompe immonde !

Remember ! Souviens-toi, prodigue ! Esto memor !

(Mon gosier de métal parle toutes les langues.)

Les minutes, mortel folâtre, sont des gangues

Qu’il ne faut pas lâcher sans en extraire l’or !

Souviens-toi que le Temps est un joueur avide

Qui gagne sans tricher, à tout coup ! c’est la loi.

Le jour décroît ; la nuit augmente, souviens-toi !

Le gouffre a toujours soif ; la clepsydre se vide.

Tantôt sonnera l’heure où le divin Hasard,

Où l’auguste Vertu, ton épouse encor vierge,

Où le repentir même (oh ! la dernière auberge !),

Où tout te dira : Meurs, vieux lâche ! il est trop tard ! »


Axlight


Bien souvent je revois…

Théodore de Banville

Bien souvent je revois sous mes paupières closes,

La nuit, mon vieux Moulins bâti de briques roses,

Les cours tout embaumés par la fleur du tilleul,

Ce vieux pont de granit bâti par mon aïeul,

Nos fontaines, les champs, les bois, les chères tombes,

Le ciel de mon enfance où volent des colombes,

Les larges tapis d’herbe où l’on m’a promené

Tout petit, la maison riante où je suis né

Et les chemins touffus, creusés comme des gorges,

Qui mènent si gaiement vers ma belle Font-Georges,

À qui mes souvenirs les plus doux sont liés.

Et son sorbier, son haut salon de peupliers,

Sa source au flot si froid par la mousse embellie

Où je m’en allais boire avec ma soeur Zélie,

Je les revois ; je vois les bons vieux vignerons

Et les abeilles d’or qui volaient sur nos fronts,

Le verger plein d’oiseaux, de chansons, de murmures,

Les pêchers de la vigne avec leurs pêches mûres,

Et j’entends près de nous monter sur le coteau

Les joyeux aboiements de mon chien Calisto !


Gabriel Giordano

giordanogabrielaline@yahoo.fr


Les sanglots longs

Des violons

De l’automne

Blessent mon coeur

D’une langueur

Monotone.

Tout suffocant

Et blême, quand

Sonne l’heure,

Je me souviens

Des jours anciens

Et je pleure

Et je m’en vais

Au vent mauvais

Qui m’emporte

Deçà, delà,

Pareil à la

Feuille morte.

Chanson d’automne

Paul Verlaine


Véronique Piotto

veroniquepiotto83@sfr.fr


Je chante pour passer le temps (extraits)

Louis ARAGON

Je chante pour passer le temps

Petit qu’il me reste de vivre

Comme on dessine sur le givre

Comme on se fait le coeur content

A lancer cailloux sur l’étang

Je chante pour passer le temps

J’ai vécu le jour des merveilles

Vous et moi souvenez-vous-en

Et j’ai franchi le mur des ans

Des miracles plein les oreilles

Notre univers n’est plus pareil

J’ai vécu le jour des merveilles

(...)

Et j’en dirais et j’en dirais

Tant fut cette vie aventure

Où l’homme a pris grandeur nature

Sa voix par-dessus les forêts

Les monts les mers et les secrets

Et j’en dirais et j’en dirais

Oui pour passer le temps je chante

Au violon s’use l’archet

La pierre au jeu des ricochets

Et que mon amour est touchante

Près de moi dans l’ombre penchante

Oui pour passer le temps je chante

Je passe le temps en chantant

Je chante pour passer le temps


Muriel Costero

costero.muriel@sfr.fr


L’Autoroute des funambules

Laetitia Sioen

Tous rêveurs passent le passage étroit

de la petite porte à la grande porte.

Sur le fil fébrile, la vie défile.

Les heures, minutes et secondes,

Nées de la poussière d’étoiles,

S’évaporent un jour.

La trace d’une petite graine qui pousse,

L’espoir qui grandit du minuscule,

L’immensité du vide, nous attire.

La flamme de la bougie vacille,

Et danse car il suffit d’un souffle.

Plongé dans l’abîme de la cime des arbres,

l’équilibre de la ligne tendue trace la route.


Esti Reich

esti.reich@orange.fr


Éphémérides

Esther Granek

Le temps d’un cri

C’est le temps qui commence

Le temps d’un rire

Et se passe l’enfance

Le temps d’aimer

Ce que dure l’été

Le temps d’après

Déjà time is money

Le temps trop plein

Et plus le temps de rien

Le temps d’automne

Il est là. Long d’une aune

Le temps en gris

Tout de regrets bâti

Le temps d’hiver

Faut le temps de s’y faire

Et trois p’tits tours

C’est le compte à rebours


Jacqueline Picquer

jacqueline.picquer@orange.fr


Il Meurt Lentement

Pablo Neruda

Il meurt lentement

celui qui ne voyage pas,

celui qui ne lit pas,

celui qui n’écoute pas de musique,

celui qui ne sait pas trouver

grâce à ses yeux.Il meurt lentement

celui qui détruit son amour-propre,

celui qui ne se laisse jamais aider.

Il meurt lentement

celui qui devient esclave de l’habitude

refaisant tous les jours les mêmes chemins,

celui qui ne change jamais de repère,

Ne se risque jamais à changer la couleur

de ses vêtements

Ou qui ne parle jamais à un inconnu Il meurt lentement

celui qui évite la passion

et son tourbillon d’émotions

celles qui redonnent la lumière dans les yeux

et réparent les coeurs blessés

Il meurt lentement

celui qui ne change pas de cap

lorsqu’il est malheureux

au travail ou en amour,

celui qui ne prend pas de risques

pour réaliser ses rêves,

celui qui, pas une seule fois dans sa vie,

n’a fui les conseils sensés.

Vis maintenant!

Risque-toi aujourd’hui!

Agis tout de suite!

Ne te laisse pas mourir lentement!

Ne te prive pas d’être heureux!


Nathalie Sakhinis

nathalie@terreentete.net


Marcel Proust

(extrait)

le temps efface tout , comme effacent les vagues

les travaux des enfants sur le sable aplani

nous oublierons ces mots si précis et si vagues

derrière qui chacun nous sentions l’infini


Renaud Lembo

renaudlembo@orange.fr


L'épopée des Nus

Tahar Bekri

Ils arrivèrent sombres et nus

Aux portes des villes repues

Le ciel sourd aux étoiles

Les mouettes pour seules compagnies

Et des rêves comme des mirages

Remplis d’or et de défi

Ils échouèrent sur le large des côtes

Où le partage a couleur d’oubli

Où ton nom

Déroule sa houle

Dans les affres du sable humilié sans merci

O vieil océan

Quel gouvernail pour attendrir les vagues

Quelle mer pour recevoir les fleuves et les rivières

Mêler sel et douce source

Sans bois morts

Sans eaux troubles

Mais le limon

Fertile et fraternel.


Serge dos Santos

serge@dossantos.com


Un souffle de fin de silence (extraits)

Jacques Gauthier

Je suis homme de mémoire

à côté de mon époque

en avance d’un rêve

en retard d’un éclair

traversé par l’espérance

que je largue dans l’avenir

habité par la confiance

qui déborde du présent

(...)

La quête n’est plus la même

depuis que le souffle me poursuit

dans les savanes de l’âme

où se cache un grand amour

qui m’attend et me survit


FFO

fredfontaine06@yahoo.fr


la Grande Faucheuse

Victor Varjac

Il vit la Grande Faucheuse

entrer dans sa chair

sans comprendre

car il ignorait

qu’elle se trouvait là

bien avant sa naissance !...

Il crut que la Mort

lui tirait les yeux

mettant du plomb fondu

dans ses entrailles

et qu’elle attachait ses jambes

au piquet de la douleur…

L’homme devait apprendre

avant le premier cri…

L’ignorance

sœur jumelle de l’absurde

défigure les mondes

et plonge les cœurs incultes

dans le chaudron

des tempêtes…

La Belle Edentée

ressemble à l’inconnu

lorsqu’elle trempe

sa figure

dans le miroir

de nos peurs…

La glaneuse et la vie

se tiennent par la main

depuis la Nuit des Temps

et « l’homme parenthèse »

cherche toujours sa place

dans le puits carnivore

de l’interrogation…


Charles Cermolacce

charlescermolacce@yahoo.fr


Néant

André Velter

Tu n'es pas né d'un songe ni d'une caresse ni d'un livre,

pas né d'une ombre d'une éclaircie d'un gouffre,

pas né de l'eau ni de la terre ni de la dernière pluie,

pas né d'hier de Jupiter de Jéhovah,

pas né d'un nom ni d'une stèle ni d'une croix,

pas né d'une louve d'une reine d'une déesse,

pas né d'un soupir ni d'un regret ni d'une rose,

pas né d'un acte de naissance

d'un pacte ni du moindre devoir,

pas né de l'aube ni d'une prière d'une espérance,

pas né de la vague ni de la pieuvre ni de la perle,

pas né d'un philtre d'une hébétude d'un printemps -

peut-être es-tu né de l'oubli d'un grand silence ou du soleil,

peut-être du vent de l'horizon d'un écho perdu,

peut-être d'un nuage d'un éclair d'un sablier,

peut-être d'un oracle d'une blessure d'un vertige,

peut-être d'une fille de la Nuit d'une

Moire ravaudeuse d'un cri par effraction,

peut-être d'un chemin d'une lisière d'une légende,

peut-être d'une poudrière d'une clairière d'une absence,

peut-être du feu d'une aile ou d'un chant,

peut-être d'un rien d'un désir d'un silex,

peut-être d'une inconnue d'une fugueuse d'une poupée,

peut-être d'une flèche peut-être d'une corde peut-être d'un arbre seul

ô mon néant de quoi es-tu né?


Marie Cagnasso

mariecagnasso@hotmail.com


L'homme qui du Désert...

Tahar Ben Jelloun

L'homme qui du désert connaît le secret ne peut vieillir.

La mort viendra, tournera autour de la dune puis repartira.

Le jour sera sévère, mais la nuit ne troublera point le regard profond de

ce visage qui bâtit des demeures dans la patience.

De ses mains il tiendra la vie en saison haute, inaccessible au malheur.

L'homme qui du désert ne saccage point la légende ne peut subir

l'outrage.

Il sera dépositaire d'une mémoire obscure tissée d'énigmes et de beauté.

Héritier du livre laissé par la nuit.

Les vents le maintiendront humble et fier debout hors de toute défaite.

L'homme qui du désert sera le témoin, maître d'un dessein délivré de la

souffrance,

habitera une maison où la faim n'entre plus.

Il sera peut-être sans haine, éternel dans le courage, enfant traversant le

siècle avec un cerceau d'étoiles dormant dans l'orgueil des ronces, sur la

ligne blanche, gardienne du ciel.

L'homme qui du désert sera le récit, livre de la passion et du pardon.

cœur ouvert, grand comme le pays et le temps,

cet homme ira comme un cheval libre hors l'aride et l'impénétrable.

Il mêlera les mots au sable pour ouvrir les portes des villes souterraines

et des nuits imprenables.

La liberté aura son visage, sa voix et sa folie.

Mais le désert est un malentendu, un mauvais lit pour le sommeil et le

songe, une page blanche pour la nostalgie.

Les bédouins sont dans la ville,

les chameaux dans la légende et les nomades

dans les cirques de l'âme fatiguée.


Jaga

jagavallauris@yahoo.com


L’éphémère

Alain Boudet

C’est une dentelle

Qui ne dure pas

Une aventure ajourée

Des milliers de caresses fragiles

Sur la joue du silence

Des petits tamis de lumière

Une fureur de vivre

Inutile peut-être

Et qui va te surprendre

Un seul jour

Mais c’est déjà beaucoup

Car dans l’aube qui vient

Soudain

Tout disparait


Richard Pellegrino

richardpellegrinoartplast@gmail.com



Le collectif « l’éphémère»

composé de :

Marie Cagnasso

Charles Cermolace

Jaga

Richard Pellégrino

présente l’installation

« Trace(s) d’un Éphémère »


L’éphémère invite à l’urgence, à vivre vite, à aller à l’essentiel.

Aussi partant de la citation de Brassaï :

« C’est la hantise et le désir de l’homme de laisser une trace indélébile de

son éphémère passage sur cette terre qui donne naissance à l’art ».

Nous avons voulu saisir par flashs quelques bribes de 35000 ans de

l’histoire de l’art pour d’une part souligner leur importance et d’autre

part dénoncer des problèmes sociétaux. Le but étant d’ouvrir sur un

questionnement multiple, ce qui pour nous est la fonction

essentielle de l’art.

S’agissant de l’éphémère on remarquera que par trois fois ce mot se

« matérialise » sous nos yeux :

Un collectif ---- une installation ----certains matériaux

qui ne dureront donc que le temps de cette exposition


L’installation débute par la sculpture qui est l’un des arts premiers.

L’empreinte sur la pierre de Charles Cermolacce donne naissance à

un univers chimérique qui lui est dicté par ses propres rêves mais

aussi par la nature et la surface de la pierre, sa forme, ses

anfractuosités ce qui n’est pas sans rappeler le travail de nos

premiers artistes sur les parois des cavités.


Face à ces pierres sculptées, le noir du monolithe de Jaga, comme le

reflet de l’obscurité des grottes.

La découverte de l’art pariétal a eu une influence capitale sur les

artistes du vingtième siècle et continue d’inspirer l’art contemporain

– en témoigne l’outrenoir de Pierre Soulage, auquel cette face se

veut être un clin d’œil.


Un deuxième panneau survole l’antiquité et l’art primitif au travers

d’une superposition de collages, alors que la face opposée est

dédiée à l’écriture.

N’oublions pas que la poésie qui est aussi un art premier prend sa

source dans les épopées d’Homère et la théogonie d’Hésiode. Les

deux nous ont transmis grâce à l’écriture, toute la mythologie

grecque dont notre culture est largement imprégnée.

Ici tel un concentré de BD des personnages de la mythologie invite à

une réflexion sur les migrations qui existent depuis la nuit des

temps, puisque nous sommes les descendants d’homo sapiens qui a

migré de l’Afrique vers les autres continents.


Au centre, un théâtre d’ombres qui n’est pas sans rappeler la

caverne de Platon sur les parois de laquelle se reflétaient de pures

illusions retenant loin de la réalité les personnes qui y étaient

enfermées.

Aujourd’hui devant nos écrans, baignant sans cesse dans des flashs

publicitaires, aliénés par la surconsommation ne sommes-nous pas

prisonniers des réseaux sociaux et autres mauvaises utilisations des

technologies modernes.

Le cadre en bois est une référence à l’accrochage muséal de la

peinture jusqu’à ce que le vingtième siècle révolutionne tous les

codes de l’art. Le drapé lui, d’abord utilisé dans la statuaire grecque,

a largement accompagné la peinture depuis la renaissance jusqu’à

nos jours ; le propos étant de cacher pour mieux révéler, ce qui était

aussi le cas des emballages de Christo . Quant aux projections

d’ombres elles sont encore utilisées dans l’art contemporain

(Christian Boltanski par exemple).


A gauche trois archétypes humanoïdes de Richard Pellegrino.

Les têtes de licorne soulignent à la fois le côté inventif et utopique de

l’homme mais aussi sa part d’animalité et de croyance. Ces «

personnages » portent des noms évocateurs qui sont représentatifs

de problèmes récurrents de notre société.

- « De quel bois je me chauffe » pour évoquer la déforestation,

l’épuisement des ressources énergétiques, le réchauffement

climatique au sens propre et malicieusement, une façon d’appeler

par un jeu de mot à réagir !

- « Réparer les blessés n°2 » qui évoque d’une part la guerre, les

attentats, les blessés de la vie mais qui se veut aussi un hommage

aux soignants.

- « Soudain la révolte » une façon de dénoncer les conditions

économiques qui engendre la contestation.


Et enfin, conçu par Marie Cagnasso, un énorme cerveau harponné,

dont la corde est prête à être saisie. Il nous renvoie à une mémoire

collective, dans laquelle serait emmagasinée toute l’histoire de

l’humanité, et dont il serait maintenant urgent de se saisir afin se

l’approprier pleinement.

En effet si culturellement les hommes ont des bases en commun il

est paradoxal de voir que l’Histoire se répète sans qu’ils ne tirent

jamais les leçons du passé. Cette métaphore du cerveau à

harponner pour signifier qu’il faut se souvenir de ce qui a été, afin de

corriger nos erreurs et limiter les dégâts.

Un message pour dire que tout n’est pas perdu à condition de

s’atteler rapidement à la tâche.

L’art en général, et la poésie en particulier sont des moyens de

bousculer le monde.

Les poètes sont en quelque sorte des lanceurs d’alerte qu’il faut

savoir écouter.


Antonio Machado nous dit :(extrait)

Tout passe et tout reste,

mais le propre de l’homme est de passer,

passer en faisant des chemins,

des chemins sur la mer…

Toi qui marches, ce sont tes traces

qui font le chemin, rien d’autre .

toi qui marches, il n’existe pas de chemin,

le chemin se fait en marchant.

En marchant on fait le chemin

et lorsqu’on se retourne

on voit le sentier que jamais

on n’empruntera à nouveau.

Voyageur, il n’existe pas de chemin

Rien que des sillages dans la mer ...

texte écrit par Jaga


Merci à l'AVEC pour la mise à disposition des salles

et aux visiteurs toujours aussi nombreux



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