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Nouvelles de Jérusalem numéro 104

Le nouveau numéro des Nouvelles de Jérusalem est sorti ! Au programme : zoom sur les travaux, la mise en valeur des éléments archéologiques dont nous disposons, et retour sur des voyages et des découvertes !

Le nouveau numéro des Nouvelles de Jérusalem est sorti ! Au programme : zoom sur les travaux, la mise en valeur des éléments archéologiques dont nous disposons, et retour sur des voyages et des découvertes !

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Nouvelles de Jérusalem

Lettre aux amis de l’École biblique

et archéologique française

N° 104 - Octobre 2022

École

biblique et

archéologique

française de

Jérusalem


A Dominican Biblical institute housed at the priory of St Stephen

since 1890, the École biblique et archéologique française de

Jérusalem, welcomes students and researchers from all over the

world and offers them a unique study experience.

The École thus continues the project of its founder, Father Marie-

Joseph Lagrange: to study the Bible in the land of the Bible, to

bring together both ‘document’ and ‘monument’ in an academically

rigorous way. To do this, the École offers an exceptional study

environment:

Specialised library

International team of teacher-researchers

Regular visits to archaeological sites

Fraternal atmosphere to foster dialogue

How you can help us ?

Let others know about the École

Recommend our courses

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France: associationdesamis@ebaf.edu

Canada: cfeb.aceb@gmail.com

United States: admin@intldom.org

Belgium : orient.oosten@skynet.be

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Account holder: Couvent des dominicains à Jérusalem

Branch code: 30066 - Sort code: 10041

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IBAN : FR76 30066 10041 00011282301 77

(BIC) : CMCIFRPP

École biblique et archéologique française de Jérusalem

Nablus road 83-85 -POB 19053 -IL 911 9001 Jerusalem

Tél. : 972 2 626 44 68 ext 238 - Fax. : 972 2 628 25 67

www.ebaf.edu - secretariat.ebaf@gmail.com

Couverture : Wadi Rum en Jordanie. Un étudiant de l’école contemple le désert au cours

d’un voyage d’étude.


Éditorial

Les dominicains n’ont pas la maladie de la pierre. Un abbé de grande abbaye

en France me confiait : « Chaque génération de moine doit pouvoir

dire qu’elle a construit sa maison. Voilà pourquoi on abat ici pour élever

ailleurs… ». Rien de tout cela chez les frères prêcheurs qui construisent

ce qu’il faut, quand il le faut. Il est significatif qu’après leur toit, les frères

bâtirent ici une école avant même la basilique destinée au culte de saint

Étienne, le pourtant premier et prestigieux martyr de l’ère apostolique.

Leurs amis et bienfaiteurs les y aidèrent. Les frères contractèrent alors

une immense dette de gratitude. Les plaques apposées sur les murs de la

basilique en témoignent.

Nous vous présentons ici le premier grand projet d’une série qui émaillera

ce siècle, nous l’espérons. En effet, la bibliothèque sera -vraiment-, pleine

d’ici cinq ans nous affirme le frère Bernard, bibliothécaire : « Impossible

alors d’y faire entrer quoi que ce soit ».

Sous peu, le jubilé de la mort de saint Étienne nous obligera et nous inspirera.

Avec l’Agence française de développement (A.F.D.) et le Consulat général

de France, des discussions sont en cours à propos de notre jardin et des

éléments archéologiques qui fleurissent sur notre domaine.

Enfin, et c’est le chantier de l’année, nous repensons à frais nouveaux les

chambres situées dans le bâtiment de l’École lui-même. L’entretien sérieux

et régulier du bâtiment originel ne suffit plus pour garantir des conditions

d’accueil dignes du 21 ème siècle et nous projeter dans l’avenir.

Aujourd’hui encore vous pouvez nous aider.

Par exemple en recrutant de nouveaux adhérents pour notre association,

en suscitant des dons… Surtout, en nous accompagnant demain comme

aujourd’hui. Soyez-en remerciés !

Fr. Benoît Vandeputte, o.p.

Curator auxiliorum


Vie de l’École

Une année de grands travaux de rénovation

L’École biblique et le couvent de

Saint-Étienne se lancent cet automne

dans de gros travaux de modernisation

d’une des deux résidences étudiantes

du campus. L’ampleur, la

complexité et le coût de l’opération

méritent quelques explications.

Pourquoi ce chantier ? L’École loge

à l’année environ 25 étudiants, et

accueille en outre des chercheurs de

passage. Elle dispose pour cela de

deux résidences. L’ancien couvent,

qui a fait l’objet durant l’année du

Covid d’un chantier de rafraichissement

: peintures, électricité, mobilier.

On ne touchera pas à la structure

du bâtiment ; datant de l’époque

ottomane, il est bien qu’il restât

« dans son jus ». L’ensemble a du

cachet et offre un confort suffisant,

le WiFi apportant aux étudiants les

moyens de bien travailler.

4

La seconde résidence, qui compte

aussi une douzaine de chambres, est

située au-dessus de la grande salle

de conférence de l’École et date de

fin 1891, lorsque le P. Lagrange a

fondé l’École. Elle méritait, elle, de

vrais travaux. Les mœurs ont évolué

depuis le 19 ème siècle, et les étudiants

attendent aujourd’hui plus de

confort, en particulier la présence de

douches et de toilettes dans chaque

chambre.

Quand aura lieu le chantier ? A partir

de l’automne 2022, car les plans sont

prêts et le financement quasi bouclé.

Nous profitons d’une année académique

un peu moins nombreuse. Un

certain nombre d’étudiants de l’Institut

catholique de Paris ou du Biblicum

de Rome n’ont pu commencer

leur cycle il y a deux ans en raison

du Covid et ne sont donc pas prêts à

nous rejoindre. Cela nous donne une

Nouvelles de Jérusalem - N° 104 - Octobre 2022


fenêtre favorable pour entreprendre

des travaux qui vont immobiliser la

résidence pendant une dizaine de

mois, l’objectif étant de pouvoir

à nouveau accueillir des étudiants

à la rentrée d’octobre 2023. Pour

l’année académique qui commence,

l’ancienne résidence du vieux couvent

et quelques chambres louées

dans le voisinage nous permettent

tout de même d’accueillir une nouvelle

promotion. Le plus compliqué

est de consolider la dalle sous les

chambres.

Comment cela va-t-il se passer ?

Après mûre réflexion, nous optons

pour un système qui fasse à la

fois chauffage et climatisation, ce

qui n’est pas du luxe pour les étés

chauds de Jérusalem.

Qui paie ? Vu sa complexité, il

s’agit d’un chantier coûteux, d’environ

800 000 €. Bien entendu, le

couvent Saint-Étienne et l’École ne

peuvent couvrir qu’une petite partie

de ce budget, en puisant dans leurs

réserves. Il a donc fallu faire appel

à divers donateurs, principalement

des institutions catholiques qui

aident les religieux en Orient. Des

plans et devis ont été présentés, sont

en voie d’examen par les comités

de sélection des projets, mais nous

avons déjà l’assurance d’être suffisamment

aidés pour nous lancer

dans cette entreprise.

comme les nôtres, qui parviennent

vaille que vaille à couvrir leurs frais

de fonctionnement mais n’ont pas

les moyens de faire de gros investissements

sur leurs fonds propres. Or,

depuis des années, nous avons pu

grâce à diverses générosités, entreprendre

d’importants et nécessaires

travaux : réfection des adductions

d’eau de la propriété, création d’un

foyer des étudiants et d’une lingerie

moderne, pose de nouvelles fenêtres

isolantes au rez-de-chaussée

du couvent, rénovation de chambres

d’hôtellerie, aménagement de la

mezzanine du musée, étanchéité

des voûtes de l’atrium de la basilique,

réfection de l’orgue, installation

de bureaux pour la Bible en ses

traditions, pose de la fibre optique

sur l’ensemble du campus ; et, ces

deux dernières années, restauration

des vitraux de la basilique.

Les principaux chantiers à venir

sont l’éclairage de la basilique et,

dans quelques années, une extension

de la bibliothèque. Un grand

merci aux donateurs, agences

d’aide, bienfaiteurs et à l’économe,

frère Stanislaw, qui suit tout cela

avec un dévouement exemplaire.

Fr. Jean-Jacques Pérennès, o.p.

Directeur

Gratitude. Ce chantier est l’occasion

d’attirer l’attention sur la générosité

dont bénéficient des institutions


Portrait

Du projet à sa mise en œuvre

Le frère Stanislaw Gurgul porte le

chantier concret des travaux. Ce

qui n’est pas une mince affaire !

Il est né en 1957 pas trop loin de

Cracovie. À ce jour il a passé près

de 30 ans au service de ses frères

de par le monde : France, Irlande,

Trinidad et Tobago, Cameroun…

Il vit à Jérusalem depuis 2015 et

terminera sa charge en octobre

prochain. Administrateur de

l’École, il est nommé par le Maître

de l’Ordre, et, par voie de conséquence,

devient syndic du couvent.

Sa tâche ? Tout ce qui pourrait bloquer

la machine complexe d’une

Institution comme la nôtre est détecté

et traité sans tarder : tout doit

fonctionner au mieux !

Par vote du chapitre, les frères lui

ont demandé de mener à bien son

dernier grand chantier. Ce vote, il

y tenait ! Parmi les charmes dominicains,

celui des discussions éternelles

n’est pas le moindre. Rançon

de la vie capitulaire, chacun

a un avis -même s’il est incompétent

ou arrive à contre-temps-. Et

puisqu’on en a parlé, le sujet est

traité (même si rien n’est décidé) !

Il a ainsi fallu des années pour

trancher notre prochaine aventure

6


bâtisseuse. C’est chose faite, tous

rendent, aujourd’hui, grâce au ciel.

Et ce qui apparaissait comme perte

de temps et décourageait souvent,

a permis aux choses de mûrir, à la

plus grande unanimité d’émerger.

Elle est largement acquise pour

Stan, désormais « patron » des travaux.

Il travaille main dans la main

avec Gerhard Riedwyl, un architecte

suisse vivant à Jérusalem depuis

30 ans, lui aussi « voté » par

les frères.

Rénover, oui, mais comment ? La

question sanitaire étant vite réglée

(douche/WC chez chacun), la vraie

question se pose vite. Comment

traiter le froid d’hiver (800 m. d’altitude)

et la chaleur estivale (parfois

écrasante) ?

Écouter Stan ici est assez fascinant :

- « Nous avions une pompe à chaleur

mais reliée à des radiateurs :

inefficace. On décide de la relier à

un chauffage par le sol. Oui, mais

le sol est le plafond de la Salle de

conférence en dessous. Et le style

ottoman du bâtiment est à préserver.

Couler une dalle en béton était

impensable car trop lourde. On

opte donc pour une dalle partielle

qui, finalement renforcera la structure

existante plutôt que de la fragiliser.

À partir de là, les rendezvous

s’enchainent : ingénieurs en

BTP, électriciens, plombiers…

Nous avons aussi décidé que les

fenêtres nouvelles seraient aux

normes, en intégrant un interrupteur

qui débranchera la clim si la

fenêtre est ouverte, mais en style

originel ». Ou comment tirer de

son trésor du neuf et de l’ancien...

Stan, qui est aussi ingénieur, n’a

pas l’air trop inquiet du contexte

local de travail :

- « Chacun a répondu présent et

très sérieusement jusqu’à présent.

Les travaux commenceront en octobre,

inch’Allah ».

Son vrai souci ? Pas tant les impondérables

culturels ou conflictuels

mais le taux de change et l’envolée

des prix de cet automne :

- « Toutes nos ressources sont extérieures.

En 2015, 10000 euros

nous donnaient 42000 shekels ;

aujourd’hui 32000 ! »… Une certitude

en tout cas : tout doit être

fini au plus tard, le 31 août 2023

pour préparer l’accueil des futurs

chercheurs et étudiants le premier

octobre suivant.

Rendez-vous donc dans un an !

Fr. Benoît Vandeputte, o.p.

Curator auxiliorum

Nouvelles de Jérusalem - N° 104 - Octobre 2022

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Histoire

Le bâtiment originel : une école !

Éloquente architecture… Une fois

leur toit assuré, des bénédictins

auraient, à coup sûr, commencé par

l’abbatiale. Quand ils reviennent en

Terre sainte, les frères prêcheurs,

élèvent, eux…une école ! Récit.

Si les quatre lopins de terrain du futur

couvent ont été achetés fin 1882,

ce n’est qu’à partir de fin 1884 que

les frères dominicains s’installent

à Jérusalem chez eux. Le père Lagrange

ne fait pas encore partie de

l’équipe, qui repose sur les épaules

du père Matthieu Lecomte, premier

supérieur, et il n’est pas encore question

d’École biblique.

De 1884 à 1888, des aménagements

sont faits dans les anciens bâtiments

ottomans, pour la petite communauté

: fermeture des arcades en

rez-de-chaussée, ajout de chambres

sur la terrasse, extension de la cuisine

primitive dans la courette, et,

surtout, construction d’une chapelle

en angle droit du bâtiment turc. Ce

n’est qu’avec l’arrivée du père M.-J.

Lagrange, comme fondateur de

l’École biblique, en 1890, qu’un véritable

projet de constructions se met

en place. L’urgence étant la nouvelle

École pratique d’études bibliques, et

non les bâtiments conventuels, le père

Lagrange se lance dans l’édification

d’un bâtiment avec salles de classes

et de conférences au rez-de-chaussée,

et une douzaine de chambres autour

d’un patio à ciel ouvert à l’étage. Il lui

faut absolument des salles de classes

et du logement pour les étudiants…

Le bâtiment « école » est un projet

architectural autonome par rapport

8


au patrimoine d’origine ottomane.

La première pierre est posée le 5 juin

1891, et le tout terminé en six mois,

le 7 décembre 1891. L’architecte M.

Boutaud est déjà celui de la future

basilique reconstruite sur l’emplacement

des ruines byzantines. Le premier

bâtiment, l’école proprement

dite, est intégré dès l’origine au grand

projet que portera le père Étienne Le

Vigoureux, prieur de 1895 à 1901 :

la basilique, son atrium, le clocher,

la première aile du nouveau couvent,

la seconde aile. De 1891 à 1901,

les religieux continuaient à loger

et prier dans l’ancien couvent. Les

jeunes dominicains, dits novices

alors, logent à l’étage de la nouvelle

école, avec quelques étudiants nondominicains,

prêtres diocésains ou

religieux. Au tout début, le nouveau

bâtiment reprend l’appellation noviciat

; un père d’âge mûr y est détaché

comme Maître des novices, et y loge.

Les deux photographies, présentées

ici, se suivent de quelques mois.

On note que les ouvriers taillaient

les pierres sur place. Le jardin est

curieusement un immense “tas de

cailloux”, les débris de carriers encombrant

toute la surface entre les

maigres oliviers. Ce sont les restes

du débitage sauvage des ruines du

complexe byzantin, probablement

lors de la reconstruction de la muraille

de Jérusalem par Soliman le

Magnifique. Sur la première photographie,

on voit au centre-gauche le

début du creusement des fondations

et de la cave. Le petit train Decauville

est là, ayant déjà aidé au dégagement

de la basilique (centre-droit).

Éparpillés près de la petite porte sur

la rue, les poutres en fonte apportées

de France par bateau, et montées à

Jérusalem à dos de chameau (le train

n’est pas encore inauguré). Au loin,

le dôme d’église, dans le ciel, est

celui des Éthiopiens… Fin 1891, à

l’achèvement du bâtiment, l’emplacement

de la future basilique est nettoyé,

celui de l’atrium aussi, dont les

pierres d’attente du chaînage dans le

mur de l’école se découpent bien ; à

gauche, l’ancien couvent ; à droite,

le Saint-Sépulcre.

Fr. Jean-Michel de Tarragon, o.p.

Archiviste

Nouvelles de Jérusalem - N° 104 - Octobre 2022


Academical life

Teaching in Jerusalem

Fr. Antony Giambrone is vice-Directeur

of the École biblique. He details

how the teaching has evolved along

the years since the beginning. Both a

tribute and a promise.

Visitors to the École have often observed

a pillar in the refectory where

hangs a beautifully penned scholastic

program for the academic year

1907-8 at the “Collège St. Etienne”.

Alongside a rigorous diet of ancient

languages—Aramaic, Coptic, Assyrian,

Arabic—some quaint surprises

also appear. Canon law was taught

twice a week, on Mondays and Fridays

at 4:45 pm. Courses in dogmatic

and moral theology also formed part

of the salubrious program, which in

those days still targeted young Dominicans

in initial formation. The

only lectures on this syllabus offered

by Père Lagrange himself were part

of a special “cours préparatoire” designed

to equip students to pass the licentiate

examinations before the Pontifical

Biblical Commission in Rome.

By 1907—the year of Lamentabili

but still shortly before Lagrange’s

own personal “année terrible”—the

École was already humming and

a new generation of scholars was

well advanced in the making. The

first academic program of the school

had first been published in La Terre

Sainte magazine in 1890. Shortly

thereafter, in 1892, in the inaugural

10

issue of the Revue biblique, we find

the official, proud announcement

of the new institution: « Une école

d’études bibliques a été fondée par

le R me P. Maître général des Frères

Prêcheurs, au couvent de Saint-Étienne

à Jérusalem, avec l’approbation

de Sa Béatitude M gr le Patriarche,

et de Sa Sainteté le Pape Léon

XIII » (RB 1 [1892] 126-32). Letters

of notable persons were ceremonially

cited attesting to the high interest

of the new adventure and an ambitious

two-year cycle of courses, already

underway since the previous

the academic year (1891-92), was

presented to the public and opened

to “Catholics of all nationalities.”

In addition to an announced schedule

of voyages and local excursions,

eight courses were on the program.

1. Topography and History of Jerusalem

– Year 1, Jerusalem in the

OT; Year 2, Jerusalem in the NT

2. Geography and History of Holy

Land

3. Biblical Archeology –

Year 1, OT; Year 2, NT


4. Biblical Exegesis –

Year 1 OT; Year 2 NT

5. Hebrew;

6. Biblical Greek

7. Arabic

8. Assyrian/Babylonian

Through the disruptions of World

War I and beyond the teaching continued,

as the new crop of professors—figures

like Abel, Vincent, and

Dhorme—slowly assume an increasingly

visible place in the “programme

de l’année scolaire.” By the eve of

World War II, the (familiar) names of

new, new professors are again to be

seen—e.g. Roland de Vaux and Pierre

Benoit—yet, with some small variations

and some increased specialization

in the general course offerings,

the program essentially maintained

much of its original form and was

specifically advertised as a two-year

preparation for the obtaining the

pontifical license (cf. RB 1937 [479-

80]). An impressive regularity indeed

marks these yearly syllabi, right down

to the end of the De Vaux era.

A peek at the academic program for

1973-74 reveals signs of a slowly

shifting scholastic landscape (RB

[1973] 319-20). Courses on theology

have returned (Dreyfus) and hermeneutics

have been added (Dubois and

Dreyfus), while Hebrew and Greek

have vanished leaving only more recondite

languages like Coptic, Akkadian,

Sumerian, and Syriac. Another

language also appears: teaching in English

on extra-canonical themes is now

prominent on the schedule: notably,

Jerome Murphy-O’Connor’s seminar

on the Dead Sea Scrolls and (present

Yale professor) Bentley Layton’s

seminar on second-century Gnosticism.

Of course, old standbys like

“archéologie biblique” remain solidly

place, even though the names of the

instructors have once again changed.

Today’s hundred-page course catalogues

are imposing dossiers in comparison

with these modest two-page

programs of the past. Emphasis at

the École is now placed upon a rigorous

doctoral program, though guided

preparation for the license is also

still available as a tutorial project.

At the same time, the school’s wide

pedagogical activities today also

reach a larger public than ever before,

open to people of all nations

and creeds. Yet, in the midst of this

change and impressive growth, the

Ecole’s continuous work of teaching

Biblical exegesis and archeology

here in Jerusalem, to an international

public and at the very highest academic

level, remains an unbroken

tradition, a clear institutional mission,

and a source of corporate focus

for whatever new names, new opportunities,

and new challenges future

years may bring.

Fr. Antony Giambrone, OP

Vice-Director

Nouvelles de Jérusalem - N° 104 - Octobre 2022


Témoignages

Une Chinoise à Jérusalem

Lauréate cette année de la meilleure

thèse présentée à l’Institut catholique

de Paris, Thérèse Wang a illuminé

la vie de l’École en 2022-2023

par sa joie et ses sourires radieux.

Elle nous livre son témoignage.

Depuis onze ans, je caressais ce

rêve : venir à Jérusalem, étudier à

l’Ébaf, et surtout, arpenter le pays de

Jésus et en fouler le sol de mes pieds.

Les trois voyages d’études effectués

en Galilée, au Néguev et en Jordanie

m’ont donné de découvrir trois

panoramas différents. Face au lever

du soleil sur lac de Galilée nous

sommes emportés d’admiration pour

la création ; le désert de Néguev nous

ouvre à la contemplation du silence ;

et le mont Nébo en Jordanie nous

élève dans l’espérance de la Terre

Promise.

d’archéologie : marcher au wadi

Qelt, se baigner dans la mer morte,

grimper jusqu’à Massada…

La fraternité a vaincu mon vertige :

j’ai pu marcher sur des sentiers escarpés,

guidée et protégée par les autres

étudiants. Cet exercice de confiance

fut aussi enrichissant que les connaissances

scientifiques, archéologiques

et bibliques acquises. Mon rêve s’est

donc merveilleusement concrétisé

dans les études bibliques, l’activité

archéologique, la célébration liturgique

et la vie fraternelle.

Oserais-je résumer cette année ? «

Venez et voyez » (Jn 1,39).

Thérèse-Dan Wang

Étudiante

Les visites topographiques exaltent

le goût de la Parole de Dieu. L’année

liturgique est particulièrement riche

car « tout se passe ici » : la marche de

Jérusalem à Bethléem dans la nuit de

Noël, la Semaine Sainte célébrée au

Cénacle, à Gethsémani, au Golgotha

et au Saint-Sépulcre, l’Ascension, la

Pentecôte… En outre, les sorties des

dimanches organisées par les étudiants

viennent compléter les cours

12 Nouvelles de Jérusalem - N° 104 - Octobre 2022


Deux questions à Grégoire Sabatié-Garat

Étudie-t-on à l’Ébaf de la même manière

qu’ailleurs ? Un jeune prêtre

du diocèse de Versailles répond.

N de J : Au plan scientifique,

comment l’École biblique se distingue-t-elle

des autres instituts

que vous avez fréquentés ?

Abbé Grégoire Sabatié-Garat : J’ai

apprécié le primat donné au travail

sur les sources (bibliques, historiques,

épigraphiques, archéologiques)

par rapport à la littérature

secondaire et la grande liberté à

laquelle les étudiants sont invités

dans l’étude de ces sources. Le

cours d’archéologie du P. Cabaret

et le cours du P. Giambrone sur la

numismatique, la papyrologie et

l’épigraphie du Nouveau Testament

m’ont particulièrement aidé

en ce sens.

Elle est communautaire. En dehors

de la bibliothèque, la vie commune

avec les professeurs et les étudiants

fut riche pour les études ellesmêmes.

D’abord, les échanges informels

sur les travaux de chacun

permet de s’ouvrir à des problématiques

nouvelles. Aussi les liens

amicaux qui peuvent se nouer sont

précieux pour vivre joyeusement

l’aridité de la recherche scientifique.

Enfin, la vie de prière au

couvent m’a rappelé chaque jour

que la Bible avait vocation à devenir

une Parole adressée aujourd’hui

par Dieu à l’Église.

Abbé Grégoire Sabatié-Garat

Étudiant

Comment la vie au couvent vous

a-t-elle aidé pour les études ?

13


Bibliothèque

La « résurrection » d’un manuscrit

Spécialiste d’épigraphie médiévale,

Estelle Ingrand-Varenne a travaillé au

Centre de recherche français à Jérusalem

(C.R.F.J) sur la piste des traces

écrites monumentales aux Royaume

latins de Terre sainte. Elle revient,

émerveillée, sur une découverte majeure

dans notre bibliothèque.

Avec ses onze kilomètres linéaires

de livre – soit la distance entre Jérusalem

et Bethléem – la bibliothèque

14

de l’Ebaf est connue de tous ceux qui

travaillent sur la Bible, les lieux saints

et l’archéologie du Proche-Orient.

À force de la fréquenter, on pourrait

croire que certains rayonnages n’ont

plus de secret, et pourtant… La célébration

des vingt ans de sa rénovation

a fait découvrir des fonds cachés

ou peu exploités : les fameuses

« pépites » du bibliothécaire, le frère

Bernard.


13 ème siècle, recueil de poèmes écrit

en copte bohaïrique avec traduction

en arabe médiéval, attendait d’être

révélé. Il le fut à cette occasion,

avant d’être exposé plus longuement

dans la bibliothèque. Quand on est

médiéviste, voir un manuscrit encore

inédit est exceptionnel ; mais voir

un manuscrit d’une telle richesse –

450 p., des croix en pleine page, des

ornements peints en vert, rouge et

doré en tête de chaque chapitre dont

une tortue qui revient à plusieurs reprises

– est tout à fait unique.

Cinquante-deux volumes ont ainsi

été placés sous le feu des projecteurs,

et non des moindres : de

la Bible polyglotte de Walton au

17 ème siècle au récit de Croisades de

Guibert de Nogent dans une édition

de 1611, en passant par les estampages

d’inscriptions réalisés par

Émile Puech.

Frère Bernard aime à dire que la bibliothèque

de l’EBAF est la bibliothèque

du « livre vivant ». Oui, les

livres vivent par leurs lecteurs, qui

manipulent, feuillettent, abiment parfois

l’objet matériel, mais surtout qui

en réaniment le sens à chaque lecture,

entament un dialogue, sont interpellés

parfois transformés par eux. De

l’Égypte où il fut copié il y a plus de

800 ans jusqu’à Jérusalem, ce manuscrit

a beaucoup à raconter et il y a fort

à parier que sa vie n’est pas finie…

Estelle Ingrand-Varenne

Médiéviste

Mais…déniché au fond d’un coffre,

abandonné depuis plusieurs dizaines

d’années, un manuscrit du 12 ème et

Nouvelles de Jérusalem - N° 104 - Octobre 2022


Publication

Pour redécouvrir le frère Roland de Vaux

16 Nouvelles de Jérusalem - N° 104 - Octobre 2022


Après plusieurs années de recherche

et de travail sur les sources et archives

du couvent de Saint-Étienne,

le frère Jean-Jacques Pérennès, biographe

dominicain reconnu (Pierre

Claverie, Serge de Beaurecueil,

Antonin Jaussen, Georges Anawati),

livre son portrait de l’archéologue

historique de Qumran.

N de J : Pourquoi avoir écrit une

biographie de Roland de Vaux 1 ?

Roland de Vaux a été une des figures

les plus marquantes de l’École biblique

depuis sa création. Né en 1903,

il arrive à Jérusalem en 1933 peu de

temps avant le départ du fondateur,

le Père Lagrange. Dès l’obtention de

la licence biblique, on lui confie très

vite des responsabilités : directeur de

la Revue biblique en 1938, directeur

de l’École en 1945, prieur du couvent

Saint-Etienne en 1950.

Il assure également le cours d’Histoire

ancienne de l’Orient et le cours

d’archéologie. Sa compétence vite

reconnue dans ces deux domaines

lui vaut d’être chargé des fouilles de

Qumran en 1949 au moment de la

découverte des manuscrits de la mer

Morte.

N de J : Quels sont les apports

marquants de la vie de Roland de

Vaux ?

Outre une carrière d’enseignant où il

était très apprécié – il a dirigé plus de

soixante-dix mémoires d’étudiant –

de Vaux a fouillé des sites importants

: Tell el-Far’ah et Qumrân, déjà

évoqués. Dans ses choix de sites, il

s’est efforcé d’articuler archéologie

et recherche biblique.

Il a aussi été à l’origine, avec le P.

Thomas Chifflot des éditions du

Cerf, du grand projet de la Bible de

Jérusalem. Enfin, il laisse un nombre

impressionnant d’articles et quelques

ouvrages de référence : Les institutions

de l’Ancien testament, et une

Histoire ancienne d’Israël, œuvre

monumentale inachevée en raison

de sa mort prématurée à l’âge de 68

ans, qui l’empêcha de poursuivre la

fouille de Tell Keisan. On peut dire

qu’il s’est usé au travail.

N de J : Quel homme était-il ?

Un religieux assez discret mais un

vrai meneur d’hommes ; un travailleur

acharné ; pour beaucoup, un

vrai maître.

1- Jean Jacques Pérennès, Le Père Roland de Vaux, OP.

Une biographie, Etudes bibliques, NS 96, Peeters, 2022.

Fr. Jean Jacques Pérennès, o.p.

Biographe

17


Découvertes

Voyages, voyages... d’études !

Intimement liés aux cours de Topographie

et d’Histoire du Proche-

Orient, les voyages d’études de

l’Ébaf font partie de l’A.D.N. de

l’École depuis les origines et sont

quasiment devenus une institution

dans l’institution.

Ils font fantasmer tous ceux qui

se penchent sur le programme des

cours de l’année. Illustration des

propos du Père Lagrange, « l’union

du document et du monument est la

plus féconde des méthodes*», ils

sont un complément efficace et indispensable

de l’enseignement théorique

dispensé en salles de classe.

En effet, ils permettent d’arpenter,

observer et appréhender la réalité

du terrain. Mais sous le vocable

« voyage d’études » se cachent

bien d’autres apprentissages que

ceux de l’archéologie et de l’histoire.

D’autres initiations qui font de

ces déplacements hors du cadre de

l’École une expérience humaine à

part entière et un des moments forts

de l’année académique.

Trois voyages sont ainsi proposés

aux étudiants : la Samarie/Galilée, la

Jordanie et le Néguev. Qu’ils durent

une semaine ou quelques jours, ils ont

toujours un programme bien rempli

avec parfois plus de cinq sites archéologiques

en une seule journée ! Les

anciens élèves vous diront qu’ « avant

c’était différent, on allait jusqu’au Sinaï

ou en Turquie », et vous parleront

avec nostalgie de plusieurs semaines,

voire mois, d’aventures dignes de

Lawrence d’Arabie ! Si la durée est

aujourd’hui plus courte, les frontières

politiques plus difficiles à franchir

18


et la logistique différente, la qualité

de l’enseignement, l’intensité de la

découverte et la richesse des sites

restent les mêmes. Ainsi, des plus touristiques

aux plus secrets, de l’âge du

Bronze à l’époque ottomane, les sites

archéologiques visités font passer par

toutes les périodes de l’Histoire et permettent

d’intégrer, si ce n’était déjà

fait, la chronologie et la topographie

levantines. Car c’est en gravissant les

tells, en s’enfonçant dans les wadis

et en suivant les lignes de crête que

l’on mesure un peu mieux pourquoi

des peuples ont choisi certains lieux

pour y construire des habitations, des

lieux de culte, des silos, des citernes,

des palais ou des murailles…

Impossible de tous les citer, mais

voici pour moi quelques lieux mémorables

: Meggido et son palais, Hippos

au coucher du soleil, Beth Shéan

avec ses colonnades écroulées, Sepphoris

et ses mosaïques, Horvat Omri

et ses temples « gigogne », bien sûr

Pétra, les gravures rupestres du Wadi

Rum, la forteresse hérodienne de

Machéronte, le palais hellénistique de

Iraq al Amir, la montée des scorpions

dans le désert, la ville nabatéenne de

Shivta dans le sud Néguev, Gamla en

promontoire sur le lac de Tibériade, le

plateau du Golan avec la Syrie à portée

de main, le temple chalcolithique

de Timna…

de Pétra, trimbalant valises et packs

d’eau dans le no man’s land entre les

frontières israélienne et jordanienne,

écoutant la messe célébrée à voix

basse sous une tente bédouine à six

heures du matin…

Sans oublier tous ces instants où nous

nous sommes transformés en apprentis

archéologues, analysant portes à

tenailles, murs de brique crue, chapiteaux-corbeille

et tessons de poterie,

sous le regard attentif du Frère Dominique-Marie,

archéologue aussi

passionné que passionnant et guide

suprême de ces voyages d’études.

Voyages auxquels, volontaire à la

bibliothèque et étudiante « à temps

partiel », j’ai eu le bonheur et le privilège

de participer. Ainsi, merci à

tous ceux, direction et administration

de l’École, frères dominicains,

étudiants et volontaires, qui ont fait

de ces voyages une expérience inoubliable

et resteront un symbole fort

et durable d’une année de vie au

couvent et d’étude à l’École. Et bons

voyages à tous les étudiants à venir !

* Le père Lagrange au service de la

Bible, souvenirs personnels. Paris :

les Éditions du Cerf, 1967.

Isabelle Dauphin

Bibliothécaire

Au souvenir de ces lieux s’ajoutent

tous les moments de rire, surprise, et

complicité du groupe : admirant le

lever de soleil sur le lac de Tibériade,

partageant des beignets de Hanoucca

offerts par des familles à Hippos, grelottant

dans le froid inattendu du Sik

Nouvelles de Jérusalem - N° 104 - Octobre 2022


Document

« Le document et le monument » ?

Souvent évoqué ou cité, le Père

Lagrange donne, par ces mots,

l’esprit de l’enseignement mis en

œuvre à l’Ébaf. Ils demeurent la

marque, la note, de l’École biblique

aujourd’hui encore.

la situation où elle nous met. Mais

elle nous invite aussi à agir. Mon

ancien projet de former des biblistes

pouvait se réaliser ; bien plus, à ces

étudiants privés de leur pays par fidélité

à leur vocation nous devions un

enseignement complet. Le fait dissipait

le doute. Il y avait à craindre que

nous fussions gênés dans l’exploration

du pays par la nécessité de faire

des cours réguliers ; c’est cependant

à quoi nous nous résolûmes, et à

quoi nous avons toujours tenu. Cette

union du document et du monument

est la plus féconde des méthodes.

De plus, dominicains, spéculatifs

par vocation et par éducation, nous

ne pouvions nous désintéresser des

conclusions historiques ou même

théologiques entrevues à la suite des

recherches sur le sol ou sous le sol ».

« Que devait en être le programme ?

On eût pu hésiter entre deux solutions.

La plus simple eût été de nous

regarder, le Père Séjourné et moi,

comme en mission permanente pour

étudier le pays, pratiquer les fouilles,

en faire les honneurs aux savants

et professeurs de passage en Terre

sainte (…).

Le P. Berthier m’avait enseigné le

principe qu’il ne faut pas regarder à

côté et seulement envisager ce que la

Providence nous autorise à faire par

Le Père Lagrange au service de la

Bible, souvenirs personnels. Paris :

les Éditions du Cerf, 1967, pp 35-36.

20


Terre sainte

Le retour de Jérusalem à son destin

2021-2022 a vu le retour des pèlerins,

amis et touristes. Comme

avant ? Et si… se demande le frère

Benoît arrivé en plein confinements

il y a deux ans...

Comme une effraction. Arriver à Jérusalem

en décembre 2019 releva de

la chance. Pour atterrir ici…comme

dans une île. Vivre ici allait donc ressembler

à ça. Vivre comme un ilien.

Quelle ironie pour qui aime Molène

Nouvelles de Jérusalem - N° 104 - Octobre 2022

et Ouessant ! Toute frontière, port et

aéroport fermés, en guerre officiellement

avec plusieurs de ses voisins

(il n’existe pas de traité de paix

entre Israël et le Liban, la Syrie…),

au bord de la rupture sanitaire, mais

pionnière des vaccinations, Israël et

les Territoires furent littéralement

coupés du monde.

Il faut avoir pu divaguer des semaines

durant dans une vieille ville

devenue fantôme, il faut avoir joui

21


d’un Saint-Sépulcre littéralement

vide. Il faut avoir vu Bethléem réduite

à la misère et à la quasi-mendicité,

sans filet social, devenue grise

comme la faim et la tristesse. Il faut

avoir déçu de jeunes Palestiniens

qui nous demandaient, l’espoir à

l’œil, si l’aéroport avait réouvert

puisque nous étions là. Il faut avoir

vu la crainte affolée des Israéliens

aux soulèvements des villes mixtes

supposées tranquilles pendant la

guerre de Gaza au printemps 2021.

Oui, il faut tout cela pour mesurer

en creux s’il en était besoin, le statut

unique de cette terre, de cette ville,

berceau de l’humanité où « tout a

commencé ».

Jérusalem ! Par métonymie, chacun

lui donne un nom : Sion, esplanade

du Temple, esplanade des mosquées,

HaKotel HaMa’aravi (le mur occidental),

Al Ahram al Sharif (le sanctuaire

noble)… Abraham y fut arrêté

dans son geste alors qu’il allait sacrifier

son fils Isaac. Jésus y prêcha,

mourut, ressuscita à deux pas. Oui,

mais l’esplanade ? Ne serait-elle que

la trace des templiers qui y établirent

leurs quartiers ?

Bien plus, au-delà, elle demeure

le nombril du monde, l’Omphalos,

cher aux anciens : les Grecs eurent

Delphes, Byzance eût le dôme de

Sainte-Sophie et son Christ Pantocrator.

en y posant le doigt. « C’est là que

tout commença. Est-ce là que tout

finira ?», s’interrogeait un ami.

Voilà pourquoi, risquons-le, Jérusalem

renaît toujours de ses cendres et

enflamme chacun, souvent au-delà

du raisonnable.

Tout va-t-il y « recommencer comme

avant » ? Tourisme religieux et business

as usual ? On annonce un million

de pèlerins depuis janvier, deux

millions pour l’année. Venir. Revenir.

Garder le lien, ce lien unique.

Vous savez en venant que vous êtes

légitime ici, car cette terre est aussi

la vôtre, spirituellement, depuis Jésus.

Il y a ainsi plus d’églises que de

mosquées ou synagogues en vieille

ville.

Mais il existe cette autre légitimité,

celle d’un retour rêvé à la normale

pour qui aspire à cette ville comme

à la ville universelle, la ville de tous

puisque « tout a commencé là ».

Fr Benoît Vandeputte, o.p.

Curator auxiliorum

Tous, nous avons ce lieu en commun,

ce point focal universel où

Dieu, dit la tradition, créa le monde

22


Partenaria

La ville-monde de Vincent Lemire

en bande-dessinée

UnE pUiSsaNtE mUrAiLle eNtOuRe lA ViLle jUsQu’aU

mOnT SiOn, qUi étAiT aUtReFOiS à l’eXtéRiEuR.

… AiNSi, lA fOnTAiNe dE

SiLoé eSt désOrMAiS

pRoTégée pAr lA

nOuVeLle eNcEiNtE.*

L’impératrice Eudoxie meurt en 460 ; elle est inhumée dans

la basilique Saint-Étienne, qu’elle a fait construire au nord de la ville.

ReQUiEm

AeTeRnAm…

ReQUiEsCaT

iN pAcE !

AmEn.

Détruite en 614 par les Perses, ses ruines seront

redécouvertes à la fin du 19 e siècle, sous le site de

l’actuelle École biblique et archéologique française.

La basilique contient les reliques d’Étienne, disciple de Jésus,

considéré comme le premier martyr chrétien de Jérusalem.

* Eucher, Topographie de Jérusalem.

Grand ami de l’école, Historien,

directeur du C.R.F.J., incollable sur

Jérusalem, Vincent Lemire nous propose

un parcours émouvant dans la

ville des trois religions, version BD.

71

JERUSALEM [215x290] 001-256.indd 71 01/09/2022 14:37

N de J : Comment ce projet a-t-il

émergé ?

Les éditions Les Arènes m’ont proposé

ce projet… il y a plus de six

ans ! À cette époque, je venais de terminer

la coordination d’une première

synthèse de l’histoire de Jérusalem

aux éditions Flammarion (Jérusalem.

Histoire d’une ville-monde, 2016), je

me sentais donc à peu près légitime

pour me lancer dans cette folle aventure.

Le succès de cette première synthèse,

puis sa traduction en plusieurs

langues (en italien chez Einaudi, en

anglais chez University of California

Press), m’ont finalement décidé : le

moment était venu.

N de J : Quels ont été les principaux

défis à relever ?

D’abord, il fallait se donner du temps

(trois ans de travail de documentation

Nouvelles de Jérusalem - N° 104 - Octobre 2022 23


Pas facile de comprendre comment cette petite ville perdue

au milieu des montagnes est devenue le nombril du monde.

D’abord, Jérusalem est presque

dépourvue d’eau potable… Jusqu’au

milieu du 20 e siècle, ce sera une vraie

contrainte pour son développement.

Il y a bien une maigre source, le Gihon,

qui coule au pied du mont des Oliviers…

C’est autour de ce point d’eau que les

premières populations sédentaires se

sont installées il y a environ 4 000 ans,

à l’époque où je suis né.

J’ai vu alors apparaître les premières sépultures, sur le

versant oriental de la vallée du Cédron… et cela n’a jamais

cessé depuis.

Je suis bien placé pour savoir que le climat de Jérusalem est particulièrement rude.

Pas une goutte de pluie pendant six mois de l’année, entre avril et octobre… Des hivers rigoureux,

des tempêtes de neige, des étés suffocants, des nuits froides, des orages, du vent…

b…

Dans la Ville sainte, le ciel se rappelle souvent au bon souvenir des hommes !

24

12

JERUSALEM [215x290] 001-256.indd 12 01/09/2022 14:35


puis trois ans de production) et de

l’espace (plus de 250 pages). Ensuite

je ne voulais pas que cette BD soit une

simple chronique des guerres et des

conquêtes. De fait, le recours à l’image

permet de valoriser les paysages et les

réagencements permanents des lieux

saints, pour que le lecteur ressente la

ville dans sa matérialité.

Enfin, je voulais éviter une simple

« narration illustrée » et donc donner

la parole aux habitants eux-mêmes.

Ainsi, les dialogues sont entièrement

extraits de plus de 200 sources

publiées ou d’archives inédites. Rien

n’est inventé, tout est sourcé, le lecteur

accède directement aux documents

originaux.

N de J : Dans cette BD, qui prend

en charge la narration ?

Ces 4000 ans d’histoire sont racontés

par Zeïtoun, un olivier millénaire

planté au sommet de la colline qui

porte son nom. Narrateur paisible et

bienveillant, profondément enraciné

dans le territoire qu’il décrit, il porte

un récit sensible et incarné, attentif

aux cassures du temps mais aussi à la

continuité des lieux : le relief, le climat,

la sécheresse en été, les tempêtes

en hiver, la lumière éblouissante, les

ciels changeants …

Les personnages de cette histoire se

reposent sous son feuillage ombragé,

ce qui offre au lecteur un poste d’observation

continu pour s’approprier

peu à peu cette histoire millénaire.

Nouvelles de Jérusalem - N° 104 - Octobre 2022

N de J : Comment avez-vous travaillé

avec le dessinateur et avec la

coloriste ?

D’abord, le dessinateur Christophe

Gaultier est venu sur place pour s’imprégner

des lieux et photographier la

ville sous toutes les coutures. Ensuite,

je lui ai envoyé des pré-storyboards,

chapitre par chapitre, accompagnés du

texte et de nombreux documents iconographiques.

À partir de ce matériau,

après 2 ou 3 navettes, on validait un

storyboard final, qui débouchait enfin

sur le dessin définitif, en noir et blanc.

Commençait alors le travail de colorisation,

qui a exigé beaucoup

d’échanges avec Marie-Odile Galopin,

sur les costumes, les parures, les

végétaux, l’architecture … pour obtenir

finalement un résultat que j’espère

accessible mais aussi convaincant

pour tous les lecteurs, des plus érudits

aux grands débutants, de 9 à 99 ans !

Vincent Lemire et Christophe Gaultier,

Histoire de Jérusalem, Les arènes

BD, octobre 2022, 27 €.

25

/09/2022 14:35


Expositions

Comment l’École s’expose en francophonie

Dhuy (Belgique), Conférence en grange. Fr Christian à la baguette

Ancien de Saint-Étienne, désormais

prieur du couvent de Louvain-la-

Neuve en Belgique, le frère Christian

Eeckhout est l’infatigable et

intarissable ambassadeur de l’Ébaf.

Vers 1890, quand l’École biblique

ouvre ses portes, les frères A. et L.

Lumière mettent à la disposition du

grand public, à partir de Lyon, leurs

négatifs sur plaques de verre, revêtues

de gélatino-bromure d’argent.

Pouvoir fixer un instantané de la réalité

ambiante sur ces plaques sèches

est un exploit. Auraient-ils pu imaginer

que 125 ans après elles soient

agrandies jusqu’à 40 fois grâce aux

procédés de numérisation et d’impression

sur toile souple et solide ?

Cette double performance provient

de l’exploitation du fonds photographique

ancien de l’École biblique.

La netteté des visages est époustoufflante

et la précision fournie sur les

paysages montrés est magnifique. À

ces onze grandes bannières s’ajoute

un ‘patchwork’ de 25 photos cou-

26 Nouvelles de Jérusalem - N° 104 - Octobre 2022


Ibrahim, le patriarche de la famille Twal, ancêtre du Patriarche de Jérusalem Fouad Twal

(2088-2016) s’expose à Dhuy (Belgique).

leur, illustrant les activités de la

bibliothèque et de la vie de l’École,

de l’archéologie à Qumrân, Gaza et

Samra, ainsi que des célébrations

des églises de Jérusalem. Chaque

photo est assortie d’une légende en

français qui en précise le lieu, la date

et l’objet.

En mettant ainsi à disposition du

grand public une collection inédite de

représentations de la vie quotidienne

de la fin du 19 e siècle jusqu’au début

du 21 e siècle en terre biblique, le

dynamisme de l’École se fait largement

connaître : en France (Lourdes,

Le Mans, Angers, Lille, Cambrai,

Douai, Pontorson, Mondoubleau et

Lorient), en Suisse (Saignelégier),

en Andorre (Sant Julià de Loria) et

en Belgique (Dhuy).

Autant d’expositions temporaires

qui donnent lieu, en même temps,

à des conférences sur l’histoire et la

géographie du Levant !

Fr. Christian Eeckhout, o.p.

Commissaire des expositions


Vie de l’Association

Un bureau renouvelé

pour l’Association des Amis de l’EBAF

Un bel hommage a été rendu les 26

et 27 mai dernier à Jean Guéguinou,

ancien président de l’Association

des Amis de l’Ébaf, décédé en

juin 2021. Nous l’avons organisé

en lien avec le monastère bénédictin

d’Abou Gosh auquel Jean Guéguinou

était également très lié. Un

arbre a d’ailleurs été planté à sa mémoire,

le jour de l’Ascension, dans

le jardin du monastère.

Cette occasion nous a valu la venue

à Jérusalem d’Alain Rémy, nouveau

président de notre Association des

Amis de l’École biblique et de Bruno

de Trémiolles, nouveau secrétaire

général. L’Association bénéficie aussi

de l’aide précieuse d’une nouvelle

trésorière, Chantal Pithois-Latapie,

trois personnes que nous sommes

heureux de présenter.

Alain Rémy n’est pas

un inconnu à Jérusalem,

puisqu’il y a

été consul général de

France de 2005 à 2009.

Il a ensuite poursuivi sa

carrière comme ambassadeur

dans plusieurs

pays dont l’Ukraine et la République

démocratique du Congo. Alain Rémy

prépare actuellement un ouvrage sur

les domaines nationaux français en

Terre sainte.

La vie d’une association

dépend aussi

beaucoup de ceux

qui la font tourner

au long des mois :

un secrétaire général,

une trésorière.

Ces fonctions sont

désormais assurées

par Bruno de Trémiolles,

à la retraite

d’une carrière dans

l’industrie, et Chantal

Pithois-Latapie,

laïque dominicaine

jadis ingénieure, naguère

banquière et toujours viticultrice

en Champagne. L’un et l’autre

prennent la suite d’Alain Saglio et

Odile des Déserts qui ont servi l’Association

avec beaucoup de générosité

durant des années. Nous les en

remercions chaleureusement.

Avec ce bureau renouvelé, l’Association

des Amis de l’Ébaf, fondée il

y a 50 ans, va trouver un nouvel élan.

Fr. Jean-Jacques Pérennès, o.p.

Directeur

28


Les rendez-vous du 222

Alors que l’association des Amis de

l’École cherche à se renouveler, un

riche programme de conférence est

proposé annuellement à ses membres.

L’Association des Amis de l’École

biblique et archéologique française

propose chaque année deux conférences

sur des sujets divers touchant

aux études bibliques et à l’archéologie.

Ces conférences ont lieu le plus

souvent au couvent de l’Annonciation,

rue du Faubourg Saint Honoré,

à Paris. Elles attirent un public composé

en majorité d’amis de l’École,

dont bon nombre de biblistes, d’archéologues

ou d’anciens étudiants.

Depuis qu’elles sont annoncées dans

les médias (La Croix et Radio Notre

Dame), elles rassemblent plus largement

des personnes intéressées par

les thèmes abordés.

Grâce aux ressources numériques,

elles n’ont pas été interrompues

par la crise sanitaire. Ainsi, en avril

2021, la conférence de Katell Berthelot

sur « La relation entre Juifs et

Romains et son reflet dans les textes

rabbiniques » s’est tenue en visioconférence

et a permis à des non-parisiens

d’en profiter.

Depuis novembre 2021, elles se déroulent

de nouveau en « présentiel ».

Après la conférence d’archéologie

donnée par Marie-Laure Derat sur

« Jérusalem à Lalibela (Éthiopie) »,

et une conférence biblique par Béatrice

Oiry sur « La terre et sa fécondité

: lecture de Gn 1–9) », viendront, à

l’automne 2022, celle du Père Jean-

Baptiste Humbert (archéologue), et,

au printemps 2023, celle du frère

Olivier-Thomas Venard sur la Best.

Le temps d’échange qui leur fait

suite témoigne, non seulement de

leur qualité scientifique et du grand

intérêt qu’elles suscitent, mais aussi

de l’attachement des auditeurs pour

l’École biblique.

Odile Flichy

Vice-Présidente de l’Association des

Amis de l’Ébaf

Nouvelles de Jérusalem - N° 104 - Octobre 2022


Nouvelles de l’École et des anciens élèves

Soutenance de thèse

Francisco MARTINS, SJ, étudiant à l’Ébaf en 2014-2015, a publié sa

thèse : Treasures Lost. A Literary Study of the Despoliation Notices in the

Book of Kings (BZAW, 543), de Gruyter, 2022.

Alain de BOUDEMANGE, étudiant à l’Ébaf 2011-2012 et 2018-2020 a

publié sa thèse : L’école de Jésus dans l’Évangile de Matthieu (Analecta

Biblica. Dissertationes, 236), Roma, Gregorian & Biblical Press, 2022.

Tiphaine LORIEUX (assistante de La Bible en ses Traditions en 2015-

2016) a soutenu, le 30 Juin 2022, sa thèse de doctorat en Sciences de

l’Antiquité (mention Religions et Systèmes de pensée), préparée à

3

l’École Pratique des Hautes Études sous la direction de Mme Marie-Odile

Boulnois et intitulée : «Le Commentaire sur les douze prophètes de Théodoret

de Cyr (prologue, Osée, Joël) : édition, traduction, analyse.»

Ordinations et nominations

Le Père Vincent SENECHAL, étudiant à l’Ébaf durant

le premier semestre 2006-2007, a été élu supérieur général

des Missions étrangères de Paris le 18 juillet 2022.

Frère Norbert JORION de l’abbaye de Mondaye des

Prémontrés, étudiant à l’Ébaf durant le premier semestre

2021-2022, a été ordonné prêtre le 22 juillet en la cathédrale

de Bayeux par le Cardinal Schönborn, o.p., archevêque

de Vienne.

L’abbé Piotr PRZYBOREK, étudiant à l’Ébaf en 2009-

2010, a été nommé évêque auxiliaire de l’archidiocèse de

Gdańsk en Pologne. Son ordination a eu lieu le 20 août

2022 en la cathédrale de Gdańsk.

30 Lettre aux amis de l’ÉBAF - N° 95 - Printemps 2018


Décès

Soeur Odette SARDA, o.p. (1945-2022), est décédée le 17

Mars 2022. Elle a été prieure générale de la Congrégation

des Petites Soeurs Dominicaines de 1994 à 2002. Elle a été

auditeur libre à l’Ébaf en 1973-1974.

Le frère Bernardo BOSCHI, o.p., de la Province Saint-

Dominique-en-Italie, est décédé le 4 juillet 2022 à Bologne.

Bibliste et archéologue, il avait été étudiant à

l’Ébaf en 1964-1965.


Avec ses étudiants, chercheurs et volontaires,

l’École biblique vous souhaite une rentrée pleine de découvertes.

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