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syndicom magazine No.34

Depuis longtemps déjà, nous nous engageons pour les droits du travail dans les domaines Logistique, Télécommunication et Médias. De bonnes conditions de travail résultent de succès communs. Joins notre mouvement et construis ton avenir avec nous. L’union fait la force!

Depuis longtemps déjà, nous nous engageons pour les droits du travail dans les domaines Logistique, Télécommunication et Médias. De bonnes conditions de travail résultent de succès communs. Joins notre mouvement et construis ton avenir avec nous. L’union fait la force!

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<strong>syndicom</strong><br />

N o 34 mars-avril 2023<br />

<strong>magazine</strong><br />

14 juin:<br />

on fait la<br />

grève !


Annonce<br />

Initiative pour<br />

un fonds climat<br />

Emplois de qualité et<br />

protection de l’environnement !<br />

L’initative pour un fonds climat…<br />

protège l’environnement<br />

:<br />

0.5 à 1 % du PIB seront investis<br />

dans la décarbonisation. Ainsi,<br />

les énergies renouvelables et<br />

les rénovations thermiques<br />

pourront progresser, sans que<br />

cela pèse sur le porte-monnaie<br />

des gens qui travaillent.<br />

créé des emplois<br />

de qualité :<br />

l’investissement dans des projets<br />

favorables au climat signifie<br />

de nombreuses nouvelles places<br />

de travail durables et bien<br />

payées. Le fonds climat finance<br />

aussi des formations et des<br />

reconversions. Ainsi, personne<br />

n’est laissé de côté.<br />

renforce le<br />

service public:<br />

la transition écologique n’est<br />

possible qu’en développant les<br />

transports publics et les énergies<br />

renouvelables. Ce qui assure<br />

durablement notre mobilité<br />

et notre approvisionnement.<br />

→ Signez l’initiative pour un<br />

fonds climat !<br />

www.uss.ch/fondsclimat


Sommaire<br />

4 Brèves/agenda<br />

5 L’invitée<br />

6 Dossier : Voix de<br />

femmes<br />

14 Au coeur de nos métiers<br />

18 Politique<br />

20 L’argent public pour<br />

Crédit Suisse<br />

21 Droit au but<br />

22 Suggestions<br />

26 Tous à la Grève<br />

féministe !<br />

27 Mots croisés<br />

28 Tranches de vie<br />

J’appelle à la grève féministe !<br />

Depuis la grève des femmes de 2019, le<br />

mouvement vers l’égalité est en marche. Nous<br />

avons élu davantage de femmes au sein des<br />

parlements, la valeur du travail de care souspayé<br />

est de plus en plus débattu et les inégalités<br />

salariales liées au genre sont thématisées<br />

dans les médias. Pourtant, je retournerai dans<br />

la rue le 14 juin prochain avec les milliers de<br />

personnes qui se reconnaissent dans la lutte<br />

féministe. Pourquoi ?<br />

Parce que je suis en colère. Je suis en colère<br />

contre un système qui me cantonne depuis ma<br />

naissance à un rôle de fille. Je suis en colère<br />

qu’on attende de moi que je mette au monde<br />

des enfants et qu’on me pénalise avec un salaire<br />

et une rente qui ne suffisent pas pour vivre<br />

décemment. Je suis en colère, car il n’existe<br />

quasiment aucune protection contre la violence<br />

faite aux femmes, aux personnes intersexuées,<br />

non binaires, trans, agenres et queer. Je suis<br />

en colère parce que depuis la fin de la puberté,<br />

mon corps ne m’appartient plus et que je dois<br />

tolérer le sexisme et la violence sexuelle.<br />

Je manifeste pour combattre un système<br />

profondément injuste, qui discrimine chaque<br />

jour les personnes en raison de leur genre, de<br />

leur orientation sexuelle, de leur origine, de leur<br />

statut social et/ou de leur handicap. La justice<br />

sociale est au coeur de notre activité syndicale.<br />

Si la grève générale de 1918 a marqué un tournant,<br />

la grève féministe de 2023 veut changer<br />

l’histoire. Brisons les chaînes du patriarcat et<br />

luttons pour un avenir respectueux des genres !<br />

6<br />

18<br />

28<br />

Catalina Gajardo, stagiaire communication<br />

<strong>syndicom</strong>


4 Brèves<br />

Nombreuses hausses salariales \ Calculateur de salaire pour La<br />

Poste \ Plan national pour la presse \ Indépendant-e-s assuré-e-s \<br />

Graphistes féministes \ Uber est un employeur comme un autre<br />

Fiers et fières des augmentations<br />

salariales !<br />

Syndicom a conduit de nombreuses<br />

négociations salariales. Chez Poste CH<br />

et PostFinance, IMS et Postlogistics SA,<br />

l’ensemble du personnel assujetti à la<br />

CCT obtient une hausse des salaires de<br />

2,5 %. Chez SPS Switzerland SA, la<br />

hausse s’élève quant à elle à 2,1 %.<br />

Un accord a également été trouvé avec<br />

skyguide. Dès le 1 er avril, les salaires de<br />

l’ensemble du personnel AOT, dont le<br />

salaire est compris dans la bande salariale,<br />

seront augmentés de 1,5 %. L’engagement<br />

et la forte pression exercée<br />

par les employé-e-s de CarPostal ont<br />

également payé. CarPostal augmente<br />

la masse salariale d’environ 2,5 %.<br />

Sécurité des journalistes<br />

Le rapport concernant le « Plan d’action<br />

national pour la sécurité des journalistes<br />

en Suisse », auquel nous avons<br />

participé au sein du sounding board,<br />

sera publié en mai. Les principales mesures<br />

présentées sont : la table ronde<br />

avec les professionnels des médias et la<br />

police, la collecte de données sur la situation<br />

sécuritaire des professionnels<br />

des médias, le dialogue sectoriel sur les<br />

cartes de presse uniformes, l’analyse<br />

des plaintes abusives et le document de<br />

discussion promis par le Conseil fédéral<br />

sur la question de la réglementation des<br />

plateformes de communication et de<br />

leurs exploitants en Suisse.<br />

Un calculateur de salaire pour<br />

les employé-e-s de La Poste<br />

Cette année, la masse salariale augmente<br />

de 2, 5 % pour les employé-e-s<br />

de La Poste ! Le versement sera effectué<br />

avec le salaire du mois d’avril. Tu peux<br />

calculer à quelle augmentation tu as<br />

droit cette année en entrant tes données<br />

dans le calculateur qui se trouve<br />

en ligne : <strong>syndicom</strong>.ch/salaireposte.<br />

Indépendant-e-s assuré-e-s<br />

Les indépendant-e-s en Suisse ne sont<br />

pas couvert-e-s en cas de perte de<br />

gain. <strong>syndicom</strong> et la Haute école spécialisée<br />

du Nord-Ouest de la Suisse<br />

(FHNW) ont développé un modèle d’assurance<br />

perte d’activité qui fonctionne<br />

sans subvention de l’Etat. Les indépendant-e-s<br />

et leurs mandants cotisent<br />

en effet à l’assurance en versant chacun<br />

une contribution de 4 % prélevée<br />

sur l’honoraire. Le modèle, qui se veut<br />

obligatoire, doit maintenant être présenté<br />

et discuté à grande échelle. Informations:<br />

<strong>syndicom</strong>.ch/apai.<br />

Uber doit payer les<br />

cotisations AVS<br />

Le 22 mars, le Tribunal fédéral confirmait<br />

que les entreprises qui travaillent<br />

avec l’application d’Uber sont assujetties<br />

à l’assurance sociale. En tant<br />

qu’employeuse établie durablement en<br />

Suisse, Uber est donc tenue de payer<br />

les cotisations AVS de ses chauffeuses<br />

et chauffeurs. <strong>syndicom</strong> demande aux<br />

cantons de prendre les mesures qui<br />

s’imposent pour régulariser les conditions<br />

d’emploi et mettre en place des<br />

partenariats sociaux, comme ce qui<br />

s’est fait dans le canton de Genève.<br />

Graphistes féministes<br />

Le groupe professionnel des graphistes<br />

– dans lequel seules des<br />

femmes se sont engagées jusqu’à présent<br />

– sera également présent lors de<br />

la journée de la grève féministe. Le<br />

14 juin et les semaines précédentes,<br />

les graphistes veulent faire ce qu’elles<br />

font le mieux : donner une voix aux<br />

autres grâce à leur créativité. Elles<br />

proposent des impressions sérigraphiques<br />

sur un t-shirt à amener soimême<br />

et manifester ainsi leur combat<br />

pour une politique de prix équitable<br />

dans la communication visuelle: <strong>syndicom</strong>.ch/branchen/visuelle-kommunikation/grafikdesign/<br />

Agenda<br />

Avril<br />

1 er -22<br />

Marche Bleue : des centaines de<br />

femmes rallient Genève à Berne tout<br />

au long d’un chemin découpé en<br />

diverses étapes, pour revendiquer<br />

0 émission nette. Infos et programme :<br />

lamarchebleue.ch<br />

Mai<br />

1<br />

Un 1 er mai combatif<br />

Toutes les informations sur les nombreuses<br />

actions prévues dans toute la<br />

Suisse : <strong>syndicom</strong>.ch/1 er mai23<br />

18-21<br />

Week-end d’écologie radicale<br />

Organisés par le groupe « Contre-Attaque<br />

et Autonomie », quatre jours<br />

d’ateliers, de conférences, de projections<br />

et de moments festifs, dans les<br />

environs de Lausanne. Plus d’infos :<br />

les_dissidentes@riseup.net<br />

Juin<br />

14<br />

Grève féministe !<br />

Prenons la rue tous ensemble ! Nous<br />

voulons qu’une vague violette submerge<br />

la Suisse ! Retrouvez toutes les<br />

manifestations prévues pour ce grand<br />

jour sur grevedesfemmes.ch<br />

17<br />

Assemblée des délégué-e-s<br />

de <strong>syndicom</strong><br />

Elle se tiendra cette année au Bierhübeli<br />

à Berne. Vos demandes sont<br />

à envoyer jusqu’au 5 mai. De plus<br />

amples informations disponibles sur<br />

my.<strong>syndicom</strong><br />

Jusqu’au 18<br />

« Comme une... à la poste »<br />

Cette expo à l’Espace des inventions,<br />

à Lausanne, revisite l’art timbré, une<br />

pratique ludique née dans les années<br />

1960. Entrée gratuite pour les<br />

employé-e-s de La Poste.<br />

<strong>syndicom</strong>.ch/agenda


L’invitée<br />

Une troisième grève des femmes,<br />

vraiment ? Oui, il le faut. La situation des<br />

femmes reste précaire sur le marché du travail.<br />

Y a-t-il eu des changements au niveau des<br />

conditions de travail misérables dans les soins<br />

et l’éducation ? Et le tour de passe-passe avec<br />

la réforme des rentes qui vient d’être adoptée<br />

par le Parlement : les petits revenus devront<br />

payer beaucoup plus, pour au final toucher encore<br />

moins de rentes puisque le taux de convertion<br />

ne cesse de baisser. Et qu’en est-il de l’employée<br />

enceinte qui craint de l’annoncer à ses<br />

supérieurs? Et que dire du congé maternité perçu<br />

par certaines entreprises comme un «abus»<br />

de la part des salariées? Il paraît que la pénurie<br />

de main-d’œuvre spécialisée donne pourtant<br />

aux employé-e-s un certain pouvoir de négociation.<br />

Quand et où exercer ce pouvoir ?<br />

Les syndicats, eux, ont fait des progrès : ils<br />

luttent bien plus en faveur des femmes. Grâce<br />

aux femmes qui ont eu le courage de prendre la<br />

tête du mouvement, grâce à celles qui leur ont<br />

succédé et qui, pour certaines, dirigent aujourd’hui<br />

nos syndicats. Grâce à des collègues<br />

déterminées qui ne craignent pas de déplaire,<br />

grâce à leurs collègues masculins qui n’ont pas<br />

peur de mettre le pied dans des portes aux<br />

gonds parfois rouillés.<br />

En 2023 aussi, c’est le minimum vital financier<br />

qui est en jeu. Le marché du travail ne s’est en<br />

effet pas beaucoup amélioré pour les femmes<br />

depuis juin 2019. Beaucoup travaillent dans de<br />

mauvaises conditions et subissent une pression<br />

énorme pour s’organiser au quotidien. Les<br />

primes d’assurance maladie grignotent quant à<br />

elles les salaires et les loyers augmentent. La<br />

classe politique et les employeurs lâchent du<br />

lest uniquement lorsque des milliers de personnes<br />

descendent dans la rue. Raison pour laquelle<br />

une troisième grève des femmes s’impose.<br />

Pourquoi reprendre<br />

la rue ?<br />

5<br />

Dore Heim est historienne à la retraite<br />

et s’engage aujourd’hui au sein de la<br />

Fédération des femmes protestantes de<br />

Zurich, qui propose des conseils sociaux<br />

aux femmes, gère un foyer pour enfant<br />

et une crèche et offre, avec le<br />

Brahmshof, des logements à prix modérés<br />

dans la ville de Zurich.<br />

En tant que responsable des femmes<br />

de l’Union suisse des journalistes, une<br />

organisation qui a précédé <strong>syndicom</strong>,<br />

elle a organisé la première grève des<br />

femmes en 1991.<br />

De 1999 à 2012, elle a dirigé le bureau<br />

de l’égalité de la ville de Zurich. Jusqu’en<br />

2020, elle a travaillé comme secrétaire<br />

centrale de l’Union syndicale suisse, où<br />

elle a notamment organisé le centenaire<br />

de la grève générale de 1918.<br />

Le référendum contre la révision de la<br />

LPP est lancé. Pour signer la pétition:<br />

https://baisse-des-rentes.ch/<strong>syndicom</strong>


Dossier<br />

Voix de<br />

femmes


7<br />

Photos<br />

Pour illustrer les milles facettes des<br />

luttes féministes, la photographe Brigitte<br />

Besson a suivi la manifestation<br />

organisée à Lausanne le 8 mars dernier<br />

lors de la Journée internationale des<br />

droits des femmes par le collectif vaudois<br />

de la Grève féministe. Elle était<br />

également sur place lors des actions de<br />

tractage organisées par <strong>syndicom</strong> à La<br />

Poste ce même 8 mars.<br />

Brigitte Besson vit et travaille en tant<br />

que photographe indépendante dans la<br />

région lausannoise. Elle aime particulièrement<br />

poser un regard bienveillant sur<br />

l’humain et mettre son travail au service<br />

de causes, de mouvements et de projets<br />

où des groupes et des individus se<br />

démènent pour faire bouger les lignes.<br />

Elle a notamment illustrer le dossier<br />

paru dans Femina dédié aux employé-e-s<br />

à bout de souffle dans le secteur<br />

parapublic vaudois. Brigitte s’engage<br />

également activement pour la<br />

cause climatique et pour la préservation<br />

du vivant.<br />

www.brigittebesson.com


14 juin 2023, grève féministe<br />

Du respect<br />

De l’argent<br />

L’égalité<br />

maintenant !<br />

En chemin vers …<br />

1971<br />

droit de vote et<br />

d’éligibilité des femmes<br />

au niveau fédéral<br />

1981<br />

le principe de l’égalité<br />

des droits ancré dans<br />

la Constitution fédérale<br />

14.6.1991<br />

Grève des<br />

1996<br />

femmes<br />

entrée en vigueur de la<br />

loi fédérale sur l’égalité<br />

14.6.2023<br />

Grève des femmes !!<br />

14.6.2019<br />

Grève des femmes<br />

2008<br />

40 % part inexpliquée de la<br />

différence salariale entre<br />

femmes et hommes<br />

2020<br />

47,8 % part inexpliquée de la<br />

différence salariale entre<br />

femmes et hommes<br />

Source: OFS<br />

Du respect<br />

Près d’une femme sur 3 et un homme sur 10<br />

subissent du harcèlement sexuel sur leur lieu de<br />

travail.<br />

De l’argent<br />

Presque la moitié de toutes les inégalités salariales entre<br />

femmes et hommes est «inexpliquée» : ce «trou» de 717 francs<br />

bruts par mois dans le portemonnaie des femmes ne s’explique<br />

ni par l’âge, la formation ou le niveau hiérarchique, ni par la<br />

branche économique.<br />

Hommes<br />

Femmes<br />

8 317 Salaire moyen par mois<br />

6 817 Salaire moyen par mois<br />

18 %<br />

différence de salaire expliquée 52,2 %<br />

différence de salaire inexpliquée 47,8 %<br />

Source: unia suisse<br />

Source: OFS<br />

Du temps<br />

En 2021, seules 41,4 % des femmes<br />

travaillaient à plein temps, contre 81,8 %<br />

d’hommes !<br />

Les principales raisons pour lesquelles les<br />

femmes disent avoir choisi un emploi à temps<br />

partiel sont la garde des enfants, suivie<br />

d’autres tâches familiales. Les hommes qui<br />

travaillent à temps partiel se disent plutôt<br />

motivés par le désir de suivre une formation,<br />

des études ou simplement parce qu’ils ne<br />

sont pas intéressés par le temps plein.<br />

27,0 %<br />

22,2 %<br />

23,4 %<br />

35,2 %<br />

4,2 %<br />

3,5 %<br />

6,9 %<br />

11,3 %<br />

… l’inégalité<br />

Cette différence se reflète dans la répartition<br />

inégale des tâches domestiques entre les<br />

partenaires. Répartition des tâches domestiques<br />

dans les ménages de couple, en 2018<br />

31,1 %<br />

Les deux<br />

partenaires<br />

62,4 %<br />

La femme<br />

Temps plein 90–100 %<br />

Temps partiel 50–89 %<br />

Temps partiel moins de 50 %<br />

Source: OFS<br />

50,8 %<br />

1991 2021 1991 2021<br />

Femmes<br />

41,4 %<br />

92,3 %<br />

Hommes<br />

81,8 %<br />

6,0 %<br />

L’homme<br />

0,5 %<br />

Une autre personne<br />

Source :OFS


Dossier<br />

9<br />

J’ai participé aux Assises nationales de la Grève féministe<br />

le 4 mars dernier à Fribourg, avec la commission des<br />

femmes et les plus de 250 participantes d’âges, d’origines<br />

et de professions différentes, venues de toute la Suisse.<br />

Les collectifs cantonaux, les organisations syndicales, au<br />

travers de leurs commissions égalité, et l’Union syndicale<br />

suisse se sont mobilisés pour lancer l’appel, forts des<br />

nombreuses et nécessaires revendications à la mobilisation<br />

de toute la Suisse le 14 juin prochain.<br />

Lors des ateliers, j’ai entendu des situations aussi diversifiées<br />

qu’il existe des lieux de travail, de vie, de formation<br />

et de loisirs, qui viennent s’ajouter à la longue liste<br />

des doléances récoltées au cours de ces sept dernières années<br />

en tant que responsable de l’égalité au sein de <strong>syndicom</strong>.<br />

J’ai senti aussi la détermination de toutes ces femmes<br />

réunies, malgré les avancées assez faibles, osons le dire,<br />

depuis la grève de 2019. Certes, la population a adopté le<br />

mariage pour toutes et tous ainsi qu’un congé paternité de<br />

deux semaines. Certes, la progression des femmes au Parlement,<br />

comme le dit Catalina Gajardo dans son édito, a<br />

atteint 42 % en 2019. Mais pour le reste, les autorités, gouvernements<br />

et le Parlement ont fait la sourde oreille. Plus<br />

grave, l’opposition à une réelle égalité se fait sentir. Je<br />

prends l’exemple de la santé sexuelle et reproductive, menacée<br />

par deux initiatives qui s’en prennent à la solution<br />

des délais en vigueur depuis 2002, ainsi que par le refus du<br />

Conseil national d’entrer en matière sur une initiative<br />

parlementaire demandant la dépénalisation de l’interruption<br />

de grossesse. Je mentionne encore la gifle reçue<br />

avec la votation sur AVS21. La réforme de la prévoyance<br />

professionnelle laisse quant à elle augurer le pire.<br />

Même si j’entends « mais qu’est-ce qu’elles veulent,<br />

l’égalité est acquise ! », je suis persuadée que l’égalité sera<br />

atteinte ensemble, et que de plus en plus de personne le<br />

savent. Les freins culturels et sociétaux sont simplement<br />

tellement ancrés, à l’école, à la maison, au travail, que les<br />

mentalités sont complexes à faire évoluer. Mais pour moi,<br />

le mouvement ne s’arrêtera pas tant qu’il restera des inégalités<br />

au travail, dans le couple, à la retraite, dans la formation,<br />

tant que les violences sexuelles et sexistes et le<br />

harcèlement n’auront cessé. Nous ne nous laissons pas<br />

abattre et je suis fière de l’énergie féministe, de la créativité,<br />

de l’inventivité et de l’humour que j’ai lus sur les pancartes<br />

brandies dans les cortèges du 8 mars. Je rêve d’une<br />

vague violette le 14 juin, mêlant les genres, les sexes, les<br />

classes sociales. Allons-y !<br />

Ce que tu peux faire<br />

Inscris-toi, participe : gleichstellung@<strong>syndicom</strong>.ch<br />

Des manifestations, des protestations et des actions<br />

créatives sont prévues dans toute la Suisse:<br />

grevedesfemmes.ch.<br />

Informe-toi, tu trouveras ici le manifeste :<br />

https://www.grevefeministe.ch/manifeste<br />

« Je suis fière de l’énergie,<br />

de la créativité, de l’inventivité et<br />

de l’humour que j’ai vus<br />

sur les pancartes<br />

brandies le 8 mars. »<br />

Patrizia Mordini


10 Dossier<br />

«Nous devons saisir l’occasion<br />

de #MediaToo pour évoquer<br />

durablement l’ambiance de travail<br />

dans le journalisme et surtout pour<br />

l’améliorer concrètement. »<br />

Miriam Suter<br />

La publication du témoignage d’Anuschka Roshani dans<br />

Der Spiegel nous avait choquées – mais pas surprises – à la<br />

rédaction elleXX. Nous avons intensément posté sur Instagram<br />

et de nombreuses femmes victimes de harcèlement<br />

nous ont contactées.<br />

Nous savons que le journalisme a un problème de<br />

sexisme : en 2019, la journaliste du Tages-Anzeiger Simone<br />

Rau publiait son enquête #MediaToo ; en 2020, 78 journalistes<br />

femmes dénonçaient, dans une lettre adressée à la<br />

direction de Tamedia, le sexisme au sein de l’entreprise et<br />

exigeaient des changements, lettre restée quasiment<br />

morte. En tant que journaliste, j’ai été profondément impressionnée<br />

par une femme qui a trouvé le courage de raconter<br />

en son nom comment elle a supporté et toléré des<br />

années durant un environnement de travail toxique et extrêmement<br />

problématique. Plusieurs médias ont pourtant<br />

monté cette histoire en épingle pour en conclure qu’il<br />

s’agissait de traîner des individus dans la boue. C’est insoutenable<br />

! Bien sûr, des témoignages divergent : d’ancien-ne-s<br />

employé-e-s de Magazin appuient les déclarations<br />

de Roshani et d’autres soutiennent le contraire.<br />

Mais cette maison d’édition n’est pas la seule à vivre des<br />

conflits liés au sexisme et aux abus de pouvoir : en 2020, la<br />

TSR vivait un immense scandale interne avec la dénonciation<br />

de plusieurs personnalités masculines. Et avant elle,<br />

en 2017, il s’agissait de Ringier : des histoires de harcèlement<br />

sexuel commençaient alors à circuler autour d’une<br />

personnalité masculine très en vue. Si quelques hommes<br />

ont été mis sur la touche, la plupart ont pu garder leur emploi<br />

ou en ont trouvé un autre dans le secteur des médias.<br />

Le journaliste vedette de Ringier occupe même une fonction<br />

dirigeante. Il y a néanmoins eu une rocade à la direction<br />

de Tamedia ; le « super rédacteur en chef » a été démis<br />

de ses fonctions.<br />

Enfin une note d’espoir ! Nous devons saisir l’occasion<br />

de #MediaToo pour évoquer durablement l’ambiance de<br />

travail dans le journalisme et surtout, travailler à l’améliorer<br />

concrètement. Par ailleurs, les entreprises devraient<br />

fournir des informations claires au personnel pour se protéger<br />

des abus sexuels et veiller à ce qu’un outil aussi<br />

simple et efficace, tel que celui qui permet d’enregistrer<br />

les jours de vacances, soit mis en place. Il faut une culture<br />

qui incite au courage et non pas une culture qui fomente<br />

la peur. La mauvaise nouvelle : nos rédactions sont encore<br />

trop peu souvent sûres pour les employées. La bonne nouvelle<br />

: nous pouvons toutes et tous faire partie du changement.


Dossier<br />

11<br />

« Coursière est un vrai métier.<br />

J’en suis fière et je veux montrer<br />

la réalité liée aux genres et aux<br />

conditions matérielles. »<br />

Marie Goy<br />

Je suis coursière à vélo. Je transporte des analyses médicales,<br />

papiers, pièces d’horlogerie, sacs de courses ou<br />

autres objets auprès d’entreprises ou de particuliers/ères<br />

qui en formulent le besoin. Toute l’année, par tous les<br />

temps, en respectant les délais et en soignant la marchandise.<br />

Mon entreprise est une coopérative, La Cyclone, basée<br />

à Neuchâtel et à La Chaux-de-Fonds. Nous sommes toutes<br />

et tous patron·ne·s. Jamais je n’aurais pensé être patronne<br />

! D’autres ont plus l’esprit entrepreneurial que<br />

moi, mais ici, nous choisissons d’être fort·e·s ensemble.<br />

Nous fonctionnons en gouvernance partagée avec une<br />

charte et des décisions prises au consensus. Chez nous,<br />

tout le monde roule et certain·e·s « dispatchent » également.<br />

Les autres tâches essentielles au fonctionnement<br />

de la coopérative, comme les ressources humaines, sont<br />

attribuées à des groupes de travail.<br />

Le montant de mon salaire ne dépend pas du nombre<br />

de courses effectuées. Je n’ai jamais eu de cadre de travail<br />

aussi en phase avec mes valeurs. Par contre, nos salaires<br />

avoisinent actuellement les 21CHF/heure nets et, après<br />

deux ans d’activités, les tâches « hors route » commencent<br />

à peine à être rémunérées. Notre liberté a un coût ; celui de<br />

devoir adapter nos dépenses et celles de nos communautés<br />

à nos bas revenus. Pour être en capacité d’augmenter<br />

nos salaires, nous sommes dépendant·e·s des prix du marché<br />

et de la concurrence d’autres commissionnaires aux<br />

conditions autrement précaires ; taxis, apprenti·e·s, retraité·e·s<br />

que des entreprises envoient « vite faire une<br />

course ». En d’autres mots : faire notre métier au rabais.<br />

Au quotidien, nous oscillons entre figures d’apitoiement<br />

et héroïsme, a fortiori en n’étant pas un homme cisgenre.<br />

Dans une récente publicité, la police zurichoise a<br />

même exploité le modèle de la coursière pour inviter à rejoindre<br />

leur institution : « Heute Velokurierin. Morgen Polizisten<br />

» ! Dans l’imaginaire collectif, il y a donc « du cool »<br />

à faire notre métier – mais seulement « avant de trouver un<br />

vrai métier ».<br />

Si je prends la parole, c’est en faveur d’une plus grande<br />

reconnaissance de notre métier et de nos savoir-faire.<br />

C’est pour évoquer – même brièvement – la diversité des<br />

genres et des réalités matérielles qui le compose. Pour visibiliser<br />

nos corps menstrués et nos corps de mères livreuses<br />

à vélo. Pour défendre – avec fierté et conviction –<br />

pourquoi nous sommes « coursière plutôt que policière ».<br />

Pour protéger nos acquis et améliorer constamment nos<br />

conditions de travail.


12<br />

Dossier<br />

« Ma rente<br />

ne suffira pas. »<br />

Marina Parazzini<br />

Hôtellerie, banque, horlogerie et les 20 dernières années<br />

chez Swisscom : j’ai travaillé plus de 45 ans, je prends ma<br />

retraite dans quelques mois et ma rente AVS ne me suffira<br />

pas.<br />

Lorsque j’ai participé à la première grève des femmes<br />

en 1991, avec mes collègues, nous scandions notre ras-lebol<br />

face au sexisme vécu au sein des équipes le plus souvent<br />

masculines au sein desquelles nous travaillions. Qui<br />

prend le protocole ? Qui gère la photocopieuse ? Nous dénoncions<br />

ces stéréotypes vécus au quotidien, nous criions<br />

surtout notre colère face au manque d’implication de nos<br />

hommes et des hommes en général dans la vie familiale et<br />

sociale, sans oublier les harcèlements sexuels et le mobbing<br />

en cours sur les lieux de travail. Nous étions des milliers<br />

dans la rue.<br />

En 2019, nous avons carrément bloqué la ville de Zurich<br />

lors de la deuxième grève. Rien n’avait bougé au niveau<br />

de nos politiques. Comment était-ce possible d’en<br />

demander autant aux femmes : travailler, cuisiner, élever,<br />

prendre soin des parents ? J’étais personnellement éreintée.<br />

En juin prochain, je descendrai dans la rue pour revendiquer<br />

une rente correcte. Mon cas particulier montre à quel<br />

point la situation peut vite devenir précaire. Mon deuxième<br />

pilier est affecté par les taux qui ont fluctué au cours de ma<br />

carrière, notamment à la naissance de mes fils. Et j’ai dû<br />

me battre pour conserver celui-ci intact lors de mon divorce.<br />

Malgré tout, les rentes que je recevrai ne me suffiront<br />

pas. La réforme de la LPP s’est faite sur le dos des<br />

femmes !<br />

J’ai grandi dans une famille ouvrière. Mes parents<br />

étaient syndicalisés, ma mère était très engagée et il était<br />

logique pour moi de me syndiquer. Je crois en la force du<br />

syndicat. Je me suis engagée dans plusieurs comités au<br />

sein de <strong>syndicom</strong>, deux mandats avec le comité central, le<br />

comité d’entreprise et je suis engagée depuis 20 ans dans<br />

la représentation du personnel Swisscom. En outre, actuellement,<br />

je participe en tant que déléguée aux négociations<br />

du contrat collectif de Swisscom.<br />

Je veux des salaires équitables, je veux un congé parental<br />

et un équilibre de vie sain. Je ferai grève pour les migrantes<br />

et pour toutes les femmes qui ne peuvent pas le<br />

faire ici et dans le monde.<br />

Pour signer le référendum<br />

contre la révision de la LPP.


Dossier<br />

Je suis aujourd’hui membre du comité central et du comité<br />

du secteur TIC, et travaille depuis janvier 2023 chez Localsearch<br />

(Swisscom Directories). Et depuis 2018, je suis<br />

conseillère communale PS à la ville de Zurich. Ce sont les<br />

débats sur l’égalité salariale qui m’ont politisée et m’ont<br />

fait rejoindre <strong>syndicom</strong> et le groupe d’intérêt (GI) Femmes.<br />

En juin 2015, je commençais un nouvel emploi chez YOL<br />

Communications GmbH – à l’époque une PME indépendante<br />

dans le secteur de la téléphonie mobile, qui a été reprise<br />

par Sunrise en 2017. Le dimanche avant mon entrée<br />

en fonction, je me suis rendue par curiosité à un événement<br />

de réseautage destiné aux femmes organisé par le<br />

syndicat Unia à Zurich. L’objectif était de permettre à des<br />

femmes qui n’étaient pas forcément engagées en politique<br />

ou dans un syndicat de débattre de l’égalité salariale<br />

et d’organiser éventuellement des actions. Le collectif Aktivistin.ch<br />

est né de cet événement. Comme Unia ne représentait<br />

pas les employées de ma branche, je me suis tournée<br />

vers <strong>syndicom</strong>. YOL n’avait alors pas de partenariat<br />

social avec <strong>syndicom</strong>, donc pas de CCT. Autrement dit, je<br />

n’avais aucune personne de référence pour le syndicat au<br />

sein de l’entreprise. C’est grâce au GI que j’ai pu rencontrer<br />

des personnes aux intérêts professionnels semblables<br />

aux miens.<br />

Le groupe d’intérêt (GI) Femmes de <strong>syndicom</strong> traite<br />

des questions de l’égalité dans le monde du travail. Il planifie<br />

la stratégie annuelle et organise des projets et campagnes<br />

sur des sujets de société comme l’égalité salariale,<br />

la conciliation entre profession et famille ou la protection<br />

au travail. C’est toujours un grand défi de motiver nos<br />

membres féminins à s’impliquer dans notre GI ! Mais<br />

c’est aussi ce qui me motive : assurer la communication<br />

entre les femmes de toutes les branches de notre organisation,<br />

qui sont encore majoritairement masculines. Cet<br />

échange personnel nous informe de première main sur<br />

les problèmes ou les thèmes centraux dans nos branches,<br />

et nos prises de position n’en sont que plus représentatives<br />

des situations vécues par les femmes au quotidien<br />

« Motiver les femmes à<br />

s’impliquer dans nos branches<br />

principalement masculines<br />

est un vrai défi ! »<br />

Nadia Huberson<br />

sur leur lieu de travail. Nous nous retrouvons au minimum<br />

quatre fois par an et nos propositions sont soumises au<br />

comité directeur, au comité central, à l’assemblée des délégué-e-s<br />

et au congrès. Comme nos membres ne font partie<br />

d’aucun comité de branche ou d’entreprise, elles<br />

peuvent s’investir davantage dans le travail syndical.<br />

Notre objectif ? Que les femmes se mobilisent au-delà du<br />

14 juin !<br />

13


14<br />

Au cœur de<br />

nos métiers<br />

Une (moitié de) vie consacrée<br />

au syndicat<br />

J’ai 64 ans et je prends ma retraite après 24 ans de travail<br />

syndical. J’ai vécu beaucoup de situations difficiles, dont de<br />

nombreuses où des femmes étaient concernées.<br />

Beatrice Müller avec<br />

Angelo Zanetti, secrétaire<br />

central médias, et<br />

Marco Geissbühler.<br />

(© <strong>syndicom</strong>)<br />

D’aussi loin que je me souvienne, j’ai<br />

toujours été attirée par le syndicalisme.<br />

Mon père dirigeait une PME qui<br />

fabriquait des chauffages destinés aux<br />

laboratoires de recherche et aux hôpitaux.<br />

C’était les années 1960, l’époque<br />

où de nombreuses femmes ont cessé<br />

de travailler car le mari gagnait suffisamment<br />

d’argent pour nourrir la famille.<br />

Puisqu’elles n’avaient plus besoin<br />

d’aller travailler (et n’y étaient<br />

souvent pas autorisées), le travail à domicile,<br />

avec lequel celles qui sont revenues<br />

« au foyer » pouvaient gagner de<br />

l’argent de manière détournée, a prospéré.<br />

Mon père disposait ainsi d’un solide<br />

réseau d’ouvrières à domicile. Je<br />

l’ai observé lors de ces tournées et très<br />

tôt, j’ai appris la valeur de la relation<br />

de personne à personne et non pas<br />

d’employeur à employée.<br />

A l’âge de 40 ans, j’ai commencé à<br />

travailler comme secrétaire régionale<br />

pour la branche presse et médias électroniques<br />

au sein de l’ancien syndicat<br />

comedia. J’y amenais mes années<br />

d’expérience acquise au sein de différentes<br />

rédactions, tout comme celle<br />

d’un licenciement collectif. Mes collègues<br />

et moi avions refusé la fusion de<br />

plusieurs rédactions.<br />

Si les moments de victoire me<br />

transportaient et me donnaient la<br />

force de continuer à lutter contre les<br />

abus et les traitements innommables<br />

qui m’étaient rapportés, j’ai vécu de<br />

graves conflits qui se sont soldés par<br />

des échecs : des licenciements individuels<br />

injustifiés et d’innombrables<br />

licenciements collectifs, liés à la maximisation<br />

des profits et à la concentration<br />

des médias. Nous avons lutté de<br />

toutes nos forces pour obtenir des<br />

plans sociaux. Ceux-ci peuvent alléger<br />

et atténuer la détresse engendrée immédiatement<br />

après un licenciement,<br />

mais en fin de compte, il y a toujours<br />

des perdant-e-s.<br />

Ayant moi-même des jumelles, je<br />

connais les problèmes que rencontrent<br />

les mères sur leur lieu de<br />

travail. Deux cas me touchent encore<br />

aujourd’hui : il s’agit de nouvelles<br />

mères qui ont été privées de leur qualification<br />

professionnelle à leur retour<br />

de congé maternité. Une rédactrice à<br />

la radio a perdu les responsabilités<br />

quotidiennes qu’elle avait assumées<br />

en rotation avec ses collègues pendant<br />

de nombreuses années. Son supérieur<br />

hiérarchique l’accusait de ne penser<br />

qu’à son enfant à longueur de journée.<br />

L’autre rédactrice travaillait pour un<br />

grand quotidien et prévoyait de reprendre<br />

le travail à 80 %, comme<br />

convenu. Son enfant est né avec un<br />

handicap et lorsqu’elle a demandé à<br />

travailler à 50 % pour faire face aux<br />

nouvelles circonstances, elle a tout<br />

simplement perdu son emploi. Si<br />

j’avais pu continuer à travailler, je l’aurais<br />

fait pour que les obligations liées<br />

à la maternité et la paternité soient<br />

aussi évidentes qu’un rendez-vous<br />

professionnel. C’est ce que j’ai vécu au<br />

sein de <strong>syndicom</strong> et c’est ce que je<br />

défendrai dans la rue le 14 juin.<br />

Beatrice Müller<br />

Du journalisme au syndicat<br />

Beatrice Müller, née en 1959, a étudié<br />

à l’Université de Berne. Après avoir<br />

travaillé pour la radio, des journaux,<br />

une agence de marketing médiatique<br />

et un organe d’information national,<br />

elle a été embauchée par le syndicat<br />

comedia en 1999. En tant que secrétaire<br />

régionale, elle a travaillé pendant<br />

une dizaine d’années pour la<br />

branche presse & médias électroniques<br />

avant de rejoindre le département<br />

communication, où elle a occupé<br />

le poste de rédactrice web chez<br />

<strong>syndicom</strong> jusqu’à sa retraite.<br />

Congrès de <strong>syndicom</strong> en 2017.<br />

(© Arts Vivants Produktionen / Fee Peper)


« Nous avons repris et adapté la charte ‹ AwarMess › pour réfléchir<br />

ensemble et ne pas tolérer les actes et paroles discriminantes. » Marie Goy<br />

15<br />

Des coursières et coursiers<br />

à toute épreuve !<br />

150 cyclistes ont participé aux tout premiers championnats du<br />

monde d’hiver de coursières et coursiers à vélo, organisés à La<br />

Chaux-de-Fonds les 10, 11 et 12 février dernier. <strong>syndicom</strong> y était.<br />

Des épreuves givrées pour un championnat du monde inédit ! (© Mario Riggenbach, Styloncycle)<br />

C’est pour faire connaître les conditions<br />

de travail des coursières et coursiers<br />

à 1000 mètres d’altitude que l’association<br />

WCMWC (pour Winter Cycle<br />

Messenger World Championships) a<br />

lancé l’organisation d’un événement<br />

encore inédit : un championnat du<br />

monde d’hiver des coursières et coursiers<br />

à vélo. Elles et ils font partie également<br />

de la coopérative neuchâteloise<br />

Cyclone. « Nous sommes l’entre -<br />

prise de cyclo-livraison la plus haute<br />

d’Europe ! Nous avions envie de<br />

partager une facette de notre métier<br />

que la plupart de nos collègues ne<br />

connaissent pas : rouler sur la glace<br />

et la neige ! », commence Marie Goy,<br />

coursière au sein de Cyclone et<br />

membre du comité d’organisation des<br />

championnats. Un savoir-faire qui se<br />

révèle en effet rare : qui a déjà roulé<br />

avec des pneus cloutés ? Les quelque<br />

150 participant-e-s venu-e-s de toute la<br />

Suisse, de France, d’Italie, d’Allemagne,<br />

d’Autriche, de Hongrie et<br />

d’Angleterre se sont affronté-e-s lors<br />

d’un slalom sur pente enneigée, de<br />

courses de vélo-cargos ou d’épreuves<br />

de luge.<br />

<strong>syndicom</strong> a été invité à soutenir cet<br />

événement. La profession est en effet<br />

des plus précaires, les revenus qu’elle<br />

procure restent modestes et la concurrence<br />

se fait rude avec des entreprises<br />

qui cassent les prix du marché. En tant<br />

que syndicat de la logistique, <strong>syndicom</strong><br />

s’est engagé intensément pour<br />

une convention collective de travail<br />

avec les entreprises de livraison à vélo.<br />

Velokurier, vélocité ou Saetta verde,<br />

par exemple, ont signé une CCT, tandis<br />

que certaines coopératrices et certains<br />

coopérateurs au sein de Cyclone<br />

en sont membres à titre individuel.<br />

Marie Goy souligne encore un aspect<br />

important de son engagement<br />

qui la porte au sein de Cyclone : la coveillance<br />

envers toutes les personnes<br />

présentes. « Nous avons à cœur de proposer<br />

un modèle de compétition et de<br />

fête inclusif. Tout était à prix libre,<br />

accessible à toutes les bourses, et nous<br />

avons repris et adapté la charte ‹ Awar-<br />

Mess › utilisée lors des précédents<br />

championnats à Bruxelles et Lucerne<br />

pour réfléchir ensemble et ne pas<br />

tolérer les actes et paroles discriminantes.<br />

»<br />

Le comité des WCMWC avec<br />

Muriel Raemy<br />

Instagram : au-delà de<br />

la grève féministe !<br />

Melina Schröter, secrétaire syndicale secteur<br />

Médias, avec la collaboration de Camille Golay et<br />

Virginie Zürcher<br />

Que l’on soit factrice, employée de guichet<br />

ou de call center, journaliste, graphiste<br />

ou libraire, une majorité de nos<br />

préoccupations de travailleuses sont<br />

les mêmes. Conciliation vie privée/vie<br />

professionnelle, harcèlement, inégalités<br />

salariales, sexisme, prévoyance<br />

vieillesse, toutes ces thématiques liées<br />

au genre concernent tous les métiers.<br />

L’idée d’un groupe romand intersecteurs<br />

des femmes membres de <strong>syndicom</strong><br />

est donc né. En cette année de<br />

nouvelle grande grève féministe, nous<br />

souhaitons mobiliser les travailleuses<br />

jusqu’au 14 juin 2023 pour qu’une<br />

nouvelle vague violette déferle dans<br />

les rues helvétiques. Plusieurs actions<br />

seront menées dans les différentes<br />

branches d’ici là. Le 8 mars, Journée<br />

internationale des luttes pour les<br />

droits des femmes, a déjà été l’occasion<br />

d’une présence dans plusieurs<br />

entreprises. La mobilisation va se<br />

poursuivre sur le terrain, lors de rencontres<br />

mais aussi sur les réseaux sociaux.<br />

Le Groupe femmes Romandie<br />

dispose désormais d’un compte Instagram<br />

qui présentera l’actualité féministe<br />

de <strong>syndicom</strong> mais aussi diverses<br />

thématiques liées aux<br />

inégalités. N’hésitez pas à nous y rejoindre:<br />

@femmes<strong>syndicom</strong>romandie.<br />

Pour être tenues au courant de<br />

l’actualité de notre groupe, vous pouvez<br />

également envoyer un mail à<br />

groupefemmesromandie@<strong>syndicom</strong>.<br />

ch. Et parce que toutes ensemble nous<br />

sommes plus fortes, toutes dans la rue<br />

le 14 juin prochain !


16<br />

Le monde<br />

du travail<br />

« We walk out for those who can’t walk back in. » 15 mars, Zurich<br />

Google: non aux licenciements !<br />

le 15 mars, 400 à 500 employé-e-s de Google débrayaient devant le siège à Zurich. (© <strong>syndicom</strong>)<br />

En janvier 2023, la maison mère de<br />

Google, Alphabet, annonçait le licenciement<br />

de 12 000 employé-e-s dans le<br />

monde entier. A Zurich aussi, des<br />

postes devraient être biffés. En 2018<br />

déjà, lors d’un débrayage mondial, le<br />

personnel protestait contre des projets<br />

contraires à l’éthique et s’impliquait<br />

pour la transparence et l’égalité.<br />

D’où le besoin d’élire en 2019 à Zurich<br />

une représentation du personnel (RP).<br />

En peu de temps, les signatures ont été<br />

réunies, et une large majorité de zooglers<br />

(contraction de Zurich et Google)<br />

ont accepté et élu leur RP. Conjointement<br />

avec nos membres, nous avons<br />

ensuite mis sur pied un réseau, dont la<br />

base devrait bientôt être élargie.<br />

L’annonce du licenciement collectif<br />

a consterné un grand nombre de<br />

personnes et conduit en février à une<br />

action de protestation : 250 employé-e-s<br />

quittaient leur poste de travail pour<br />

témoigner leur solidarité et exprimer<br />

leurs préoccupations à l’occasion<br />

d’un débrayage. En parallèle, la direction<br />

de Google entamait des discussions<br />

avec la RP qui a demandé à <strong>syndicom</strong><br />

de la soutenir.<br />

Une formidable solidarité<br />

En tant que personne de contact<br />

des zooglers, j’ai vécu de près ce que la<br />

longue tension et un avenir incertain<br />

provoquent, en particulier chez les<br />

collaborateurs et collaboratrices originaires<br />

de pays qui n’appartiennent<br />

pas à l’UE/AELE comme l’Ukraine ou<br />

la Russie. J’ai vécu la grande solidarité<br />

ambiante. Pas moins de 2500 zooglers<br />

ont proposé entre autres de réduire volontairement<br />

leur taux d’occupation.<br />

Bien des personnes auraient même<br />

été disposées à sacrifier leur emploi<br />

pour éviter les cas de rigueur. Google<br />

s’est toutefois montré inflexible. L’entreprise<br />

a rejeté toutes les propositions<br />

et prononcé les licenciements.<br />

En réaction à cela, nos membres ont<br />

organisé un second débrayage. Le<br />

15 mars, 400 à 500 zooglers délaissaient<br />

à nouveau leur poste de travail<br />

sous le slogan « We walk out for those<br />

who can’t walk back in ». Depuis que le<br />

licenciement collectif a été annoncé le<br />

20 janvier, je suis quotidiennement en<br />

contact avec les zooglers – par mail,<br />

par téléphone et sur place. Nous donnons<br />

des conseils, organisons des réunions<br />

d’information et nous occupons<br />

des cas isolés. Nous exigeons maintenant<br />

un bon plan social et demandons<br />

à Google de se rappeler son propre slogan,<br />

« don’t be evil ! », et de s’y tenir.<br />

Tammy Balzer<br />

Grève des femmes à la<br />

grève féministe<br />

Stephanie Vonarburg, responsable du secteur<br />

Médias et vice-présidente<br />

La question de la justice est fondamentale.<br />

En tant que syndicat, nous<br />

nous impliquons pour que les groupes<br />

désavantagés ou discriminés soient<br />

mieux traités. Nous prônons l’égalité:<br />

nous visons évidemment l’égalité vers<br />

le haut – en aucun cas le nivellement<br />

par le bas. En particulier dans le<br />

monde du travail, il est nécessaire<br />

d’agir : en ce qui concerne les salaires,<br />

les rentes, la répartition du travail rémunéré<br />

et non rémunéré, le respect de<br />

l’intégrité physique et psychique.<br />

Si ce n’est plus en premier lieu sur<br />

le plan juridique, mais dans les faits,<br />

le principal groupe de personnes discriminées<br />

de manière flagrante en<br />

raison d’une caractéristique – le genre<br />

féminin – est toujours celui des<br />

femmes. Mais les injustices dans le<br />

monde du travail dérangent de plus en<br />

plus aussi les personnes qui se reconnaisancent<br />

en tant qu’hommes : les<br />

époux, les proches ou les amis des salariées<br />

défavorisées. Les hommes qui<br />

veulent échapper aux normes dominantes<br />

du passé, les collègues syndicalistes<br />

masculins qui luttent pour un<br />

monde du travail juste dans la bonne<br />

tradition syndicale.<br />

C’est pourquoi l’année 2023 est<br />

placée non seulement sous le signe de<br />

la grève des femmes – mais aussi sous<br />

celui de la grève féministe. Toutes<br />

celles et ceux qui s’engagent pour la<br />

justice et l’égalité peuvent et doivent y<br />

participer. Car l’égalité des genres fait<br />

partie de notre ADN syndical. Par nos<br />

actes et nos actions, nous pouvons<br />

montrer de manière crédible aux nombreuses<br />

jeunes personnes engagées<br />

qu’elles se trouvent au sein d’un syndicat<br />

qui lutte pour qu’ensemble nous<br />

atteignons l’égalité et un monde (du<br />

travail) meilleur.


« La LEg révisée est inoffensive. » Teresa Dos Santos Lima-Matteo<br />

17<br />

Egalité des salaires : l’heure d’un<br />

bilan intermédiaire<br />

La révision de la loi sur l’égalité visait l’égalité de salaire entre<br />

les femmes et les hommes. Vraiment ?<br />

Pancarte brandie le 8 mars à Lausanne. (© Brigitte Besson)<br />

Aujourd’hui encore, près de la moitié<br />

des différences salariales entre les<br />

femmes et les hommes reste « inexpliquée<br />

» (voir infographie p. 8) : ce « trou »<br />

de 717 francs brut par mois dans le<br />

porte-monnaie des femmes ne s’explique<br />

pas par l’âge, l’éducation, la position<br />

ou la branche économique. Au<br />

Parlement, la pression exercée par les<br />

syndicats et les organisations féminines<br />

a abouti à l’entrée en vigueur<br />

de la loi révisée sur l’égalité (LEg) le<br />

1 er juillet 2020. Les entreprises qui employaient<br />

plus de 100 salarié-e-s entre<br />

le 1 er juillet 2020 et le 30 juin 2021<br />

étaient tenues de réaliser des analyses<br />

sur l’égalité salariale. Pour ce faire,<br />

deux façons de procéder : le partenariat<br />

social (c’est-à-dire en collaboration<br />

avec les syndicats et les représentant-e-s<br />

du personnel) ou la vérification<br />

des résultats de l’analyse par un organisme<br />

externe. Les entreprises cotées<br />

en Bourse doivent communiquer les<br />

résultats aux salarié-e-s et aux actionnaires<br />

avant le 30 juin 2023. Si l’analyse<br />

montre que l’égalité des salaires<br />

est respectée, aucune analyse complémentaire<br />

ne doit être effectuée. Les<br />

entreprises fautives ne sont pas sanctionnées.<br />

En 2019, l’Office fédéral de<br />

la statistique a enregistré 601 392 entreprises<br />

qui comptaient 4 570 670 employé-e-s.<br />

5083 d’entre elles emploient<br />

plus de 100 personnes, soit 2 millions<br />

de salarié-e-s, ce qui signifie que<br />

moins de 1 % des entreprises ont dû effectuer<br />

des analyses sur l’égalité salariale<br />

et que moins de la moitié des employé-e-s<br />

ont été concerné-e-s. Très<br />

peu d’entreprises ont choisi de réaliser<br />

ces analyses par le biais d’un partenariat<br />

social, ce qui aurait été vraiment<br />

nécessaire pour procéder à un<br />

examen de fond et établir ainsi une<br />

transparence salariale. Les résultats<br />

dévoilés ne sont ainsi pas vraiment significatifs<br />

et les expert-e-s qui traitent<br />

du sujet depuis des années affirment<br />

que la LEg révisée reste in offensive.<br />

Nous attendons avec impatience une<br />

prochaine évaluation de la LEg.<br />

Teresa Dos Santos Lima-Matteo<br />

Le job idéal commence<br />

à l’apprentissage<br />

Jane Bossard, secrétaire de la jeunesse<br />

Près d’un tiers (33 %) des jeunes en<br />

Suisse ont subi du harcèlement sexuel<br />

sur leur lieu de travail pendant leur apprentissage.<br />

Ces chiffres ne sont pas<br />

nouveaux, ils sont tirés d’un sondage<br />

réalisé par Unia en 2019. La même année,<br />

dans le cadre d’une enquête représentative,<br />

l’institut gfs.berne a lui<br />

aussi calculé les proportions dans lesquelles<br />

les Suisses sont harcelé-e-s<br />

sexuellement. Constat : 95 % des victimes<br />

sont des femmes. En moyenne,<br />

33 % des personnes en apprentissage<br />

sont concernées.<br />

Les apprenti-e-s entrent donc dans<br />

la moyenne. S’ils ne sont pas étonnants,<br />

ces chiffres révèlent une réalité<br />

tragique. Les jeunes en formation ne<br />

sont pas de la main-d’œuvre ordinaire<br />

: ces jeunes personnes se<br />

trouvent dans une relation de dépendance<br />

vis-à-vis de l’entreprise formatrice<br />

ainsi que du personnel formateur<br />

et enseignant dans les écoles professionnelles.<br />

Des rapports de force sont<br />

en jeux et les apprenti-e-s en sont les<br />

victimes. Est-ce ce à quoi l’entrée dans<br />

la vie active doit ressembler ?<br />

Nous aimerions croire que la situation<br />

s’est améliorée ces dernières années.<br />

De nouveaux chiffres manquent<br />

malheureusement pour le prouver.<br />

Nous ne savons pas non plus si la<br />

condition des stagiaires est différente,<br />

aucune enquête de ce type n’ayant été<br />

menée à ce jour.<br />

Peu importe qu’il y ait beaucoup ou<br />

peu de victimes : chacune est de trop !<br />

Les personnes en formation doivent<br />

être protégées. Nous exigeons la tolérance<br />

zéro face au harcèlement sexuel<br />

sur le lieu de travail ! Il est temps d’agir<br />

et de nous défendre. Descendons ensemble<br />

dans la rue le 14 juin pour<br />

exiger lors de la grève féministe une<br />

meilleure protection contre le harcèlement,<br />

les agressions et les violences<br />

sexuelles.


18 Politique<br />

Les femmes marchent<br />

pour le climat<br />

Du 1 er au 22 avril, des femmes de toute la Suisse marcheront de<br />

Genève à Berne pour revendiquer des mesures contre les changements<br />

climatiques. Veronica Fernandez Mendez, chargée de<br />

l’égalité des chances à UNI Global Union, nous en dit plus sur<br />

La Marche Bleue.<br />

Texte : UNI Global<br />

Photos : La Marche Bleue<br />

En tant que syndicalistes, nous<br />

connaissons le pouvoir de l’action<br />

collective. En tant que femmes,<br />

nous sommes habituées à lutter<br />

pour protéger nos droits. Aujourd’hui,<br />

nous sommes confrontées<br />

au plus grand défi de tous les<br />

temps – les changements climatiques<br />

– qui menacent non pas uniquement<br />

les travailleurs, ni uniquement<br />

les femmes, mais l’humanité<br />

tout entière.<br />

Il n’y a pas de planète B<br />

La crise climatique n’est pas un scénario<br />

futuriste. Elle est à l’œuvre, en<br />

ce moment même. Elle est tout autour<br />

de nous. En Suisse, nous avons<br />

enregistré des températures record<br />

en été et une sècheresse sans précédent<br />

en hiver. Des événements climatiques<br />

extrêmes surviennent<br />

dans le monde entier, semaine<br />

après semaine. Notre dépendance<br />

aux énergies fossiles et l’inaction<br />

des hommes au pouvoir nous ont<br />

précipitées vers l’effondrement climatique.<br />

L’heure du changement<br />

radical a sonné. L’heure est venue<br />

pour les femmes de s’insurger.<br />

Lorsque les femmes manifestent<br />

ensemble, elles envoient un<br />

message puissant, un message de<br />

solidarité, de force et de détermination.<br />

La Marche Bleue, bleue comme<br />

notre planète, rassemblera des<br />

femmes venues des quatre coins du<br />

pays qui s’exprimeront pour exiger<br />

du gouvernement des mesures<br />

concrètes pour réduire les émissions<br />

de carbone et protéger notre<br />

environnement naturel.<br />

S’il est vrai que la Suisse émet moins<br />

de 0,1 % des émissions mondiales<br />

de CO 2<br />

, un rapport publié l’année<br />

dernière par le cabinet de conseil<br />

McKinsey a révélé que les marchandises<br />

importées, sans parler des<br />

multinationales basées en Suisse<br />

dont les activités sont menées principalement<br />

à l’étranger, exercent<br />

une influence indirecte estimée de<br />

2 à 3 % des émissions mondiales de<br />

CO 2<br />

, plaçant la Suisse sur le même<br />

échelon que des pays tels que l’Indonésie,<br />

le Japon et le Brésil.<br />

Les conséquences de ces émissions<br />

ont une incidence sur la<br />

Suisse, bien sûr, mais également sur<br />

les habitant·e·s du monde entier, et<br />

en particulier les femmes. Les changements<br />

climatiques viennent<br />

s’ajouter aux inégalités entre les<br />

sexes et affectent la sécurité et les<br />

moyens de subsistance des femmes.<br />

Les Nations Unies estiment que 80 %<br />

Soirée de lancement de la Marche Bleue, le 18 janvier dernier au Palais de Rumine, à Lausanne. (© Gabrielle Besenval et Brigitte Besson / La Marche Bleue)


« Lorsque les femmes manifestent ensemble,<br />

elles envoient un message puissant de solidarité,<br />

de force et de détermination. »<br />

19<br />

Veronica Fernandez Mendez,<br />

chargée de l’égalité des chances à UNI Global Union<br />

des personnes déplacées par les<br />

changements climatiques sont des<br />

femmes. Lorsque les femmes et les<br />

filles sont déplacées, elles sont plus<br />

à risque d’être victimes de violence<br />

sexuelle, de traite d’êtres humains<br />

et de mariage forcé.<br />

La crise climatique grève les<br />

fonds publics et alourdit la charge<br />

de travail des femmes qui occupent<br />

des emplois essentiels et pourtant<br />

peu rémunérés, notamment dans<br />

les soins. La pression est alors accrue<br />

sur les travailleuses qui dominent<br />

le secteur des soins rémunérés,<br />

et le fardeau porté par les<br />

femmes qui ne sont pas sur le marché<br />

du travail et assument le gros<br />

des responsabilités liées aux soins<br />

s’en trouve également surchargé.<br />

Agentes du changement<br />

Dans le monde entier, les femmes<br />

sont à l’avant-garde de la lutte<br />

contre les changements climatiques,<br />

à l’instar de Greta Thunberg,<br />

de meneuses internationales telles<br />

que Christiana Figueres et des défenseuses<br />

autochtones de l’Amazone<br />

telles que Marina Silva.<br />

A l’image de ces personnalités<br />

publiques, des milliers de femmes<br />

se mobilisent sur le terrain. Lorsque<br />

les femmes mènent, elles le font en<br />

plaçant la communauté au cœur et<br />

veillent à la protéger sur le long<br />

terme.<br />

Les politiques à court terme associées<br />

à la cupidité débridée des<br />

entreprises et au déséquilibre entre<br />

le pouvoir économique, politique et<br />

des travailleuses sont autant de moteurs<br />

des changements climatiques.<br />

Des syndicats forts permettent<br />

d’exercer un contrôle sur les entreprises<br />

et de rééquilibrer le pouvoir<br />

pour créer une société plus égalitaire.<br />

Il ne peut y avoir de justice climatique<br />

sans justice sociale.<br />

Chez UNI Global Union, nous<br />

appelons à une transition juste pour<br />

un avenir durable qui garantit<br />

qu’aucun travailleur et aucune travailleuse<br />

ne sera laissé-e pour<br />

compte. Nombre de nos syndicats<br />

affiliés présents dans 150 pays à travers<br />

le monde prennent des mesures<br />

face aux effets des changements<br />

climatiques sur leurs<br />

membres, que ce soit des températures<br />

trop élevées sur le lieu de travail,<br />

la flambée des prix ou des événements<br />

climatiques dévastateurs.<br />

Chez UNI, nous œuvrons aux<br />

côtés de nos affilié-e-s dans le secteur<br />

Poste et logistique pour un service<br />

postal plus écologique et plus<br />

durable. Dans le secteur Médias et<br />

divertissement, nous rédigeons des<br />

lignes directrices sur la meilleure<br />

manière d’améliorer la durabilité<br />

environnementale des productions<br />

cinématographiques et télévisées,<br />

tout en ouvrant un dialogue social<br />

pour faire des changements exigés<br />

par cette transition une réalité dans<br />

les conditions et sur les lieux de travail.<br />

En Europe, nous publierons<br />

des recommandations destinées aux<br />

syndicats sur la manière de façonner<br />

la transition écologique et numérique<br />

dans le secteur Commerce.<br />

Nous pouvons, et devons, tous et<br />

toutes jouer un rôle pour protéger<br />

notre planète.<br />

Les températures augmentent,<br />

certes, à une allure alarmante, mais<br />

il n’est pas trop tard pour agir. Une<br />

économiste écologique, Julia Steinberger,<br />

l’une des quatre fondatrices<br />

de La Marche Bleue, déclare : « Nous<br />

avons tout le savoir scientifique et<br />

toutes les solutions technologiques<br />

dont nous avons besoin pour relever<br />

les défis du climat, de la biodiversité<br />

et des autres limites planétaires. » Il<br />

ne reste plus qu’à passer à l’action.<br />

Loin d’être une simple marche<br />

de protestation, La Marche Bleue est<br />

aussi une marche de l’espoir.<br />

Des luttes<br />

convergentes<br />

« Détruisons le patriarcat, pas le climat.<br />

» C’est derrière cette banderole<br />

violette qu’ont défilé de nombreuses<br />

militantes le 8 mars dernier.<br />

Pour les jeunes femmes qui<br />

scandent ce slogan, leur présence<br />

dans cette marche pour la journée<br />

internationale des droits des<br />

femmes coule de source. Une complémentarité<br />

des combats qui n’est<br />

pas toujours bien comprise. « Nous<br />

ne portons pas uniquement les sujets<br />

de décarbonation ou de lutte<br />

contre le réchauffement climatique,<br />

mais un projet plus global d’une<br />

autre société », disent-elles.<br />

Leur angoisse face à la catastrophe<br />

climatique en cours montre<br />

à quel point notre économie qui<br />

considère les ressources naturelles<br />

et le travail de « care » comme gratuits<br />

et illimités fait fausse route. Ce<br />

qui se joue dans cette lutte, ce ne<br />

sont pas seulement des rentes<br />

justes, une répartition du travail et<br />

du salaire équitable ou le respect<br />

des identités et des corps, mais une<br />

vision du monde et de l’avenir : soit<br />

nous intégrons réellement les enjeux<br />

écologiques dans nos vies et<br />

nos métiers, soit nous continuons<br />

sur la voie brutale de ce capitalisme<br />

destructeur.<br />

Alors marcher ensemble de manière<br />

« bleue » ou lors de la prochaine<br />

grève féministe peut transformer<br />

nos peurs et nos frustrations<br />

en actions positives, si nécessaires<br />

pour voir advenir les changements<br />

que nous appelons de nos vœux.<br />

Mettons-nous en route, les pieds<br />

bien campés sur cette Terre que<br />

nous voulons belle, saine, joyeuse et<br />

juste.<br />

Muriel Raemy<br />

lamarchebleue.ch


20 Politique<br />

Scinder UBS<br />

maintenant !<br />

L’Etat prend un risque<br />

énorme dans l’opération de<br />

rachat de Crédit Suisse par<br />

UBS. Qui en profitera à la<br />

fin ? L’UBS ; une banque qui a<br />

été sauvée par les collectivités<br />

publiques il y a 15 ans.<br />

Texte : Oliver Fahrni<br />

Dessin : Chappatte dans NZZ am<br />

Sonntag, Zürich<br />

Notre ministre des finances libérale-radicale,<br />

qui fait des coupes à la<br />

fois dans notre AVS et nos rentes, se<br />

porte garante du paquet de 206 milliards<br />

pour la méga-fusion UBS-CS.<br />

Nous sommes peut-être gentil-le-s,<br />

mais pas stupides. Tous ceux qui<br />

gardent un œil sur la place financière<br />

savaient à quel point était<br />

gangrenée la grande banque riche<br />

de traditions. Pas seulement parce<br />

qu’elle est impliquée dans de<br />

multiples scandales pour lesquels<br />

elle a dû débourser à ce jour<br />

15,7 milliards d’amendes et de frais<br />

judiciaires, et pour lesquels la<br />

Confédération accorde une rallonge<br />

de 9 milliards supplémentaires à<br />

UBS. Et pas seulement parce qu’elle<br />

a versé davantage de bonus et de<br />

dividendes qu’elle n’en a engrangés.<br />

La Bourse suisse enregistrait,<br />

déjà à l’automne dernier, les ventes<br />

de leurs paquets d’actions par les<br />

managers de CS. Leur confiance<br />

dans la stratégie « New Credit<br />

Suisse » se montrait déjà sous son<br />

meilleur jour ! En mars, quelque<br />

40 milliards étaient retirés en<br />

quelques heures. Ce n’est pas parce<br />

que la petite clientèle a fermé ses<br />

livrets d’épargne (« panique bancaire<br />

»), mais parce que de grands<br />

investisseurs étaient à pied d’œuvre,<br />

ainsi que des fonds financiers, des<br />

assurances, des banques. Ils<br />

connaissaient les risques liés à CS et<br />

ont anticipé le crash. La banque<br />

aurait été solide financièrement,<br />

selon la Finma. Elle ne l’était pas.<br />

Dans les livres de la banque sont<br />

inscrits des paris financiers pour<br />

plus de 22 fois le total du bilan<br />

officiel. Un risque stratosphérique<br />

non couvert.<br />

Des erreurs en cascade<br />

Pour prévenir ce gros risque,<br />

nombreux étaient les économistes<br />

et politiciens à demander de<br />

renforcer la réglementation too big<br />

too fail, en séparant les différentes<br />

activités bancaires, comme de<br />

scinder l’UBS en une banque<br />

commerciale, une banque d’investissement<br />

(qui peut faire faillite) et<br />

une gestion de fortune et, surtout,<br />

interdire les dérivés (produits<br />

financiers, comme des paris<br />

spéculatifs, qui ont précipité la crise<br />

économique de 2008). Mais la<br />

majorité de droite s’y est toujours<br />

opposée.<br />

Les mêmes recettes imaginées<br />

par les mêmes cliques d’hommes et<br />

de femmes tout puissant-e-s sont<br />

appliquées. Résultat ? Aujourd’hui,<br />

les banques centrales augmentent<br />

leurs taux d’intérêt afin d’endiguer<br />

l’inflation (une autre hérésie).<br />

L’inflation demeure, mais le capital<br />

restructure ses placements. C’est ce<br />

qui a été à l’origine de la faillite de<br />

la Silicon Valley Bank et ce qui a<br />

accéléré la chute de CS. Après<br />

quatre faillites de banques, cela a<br />

déclenché dans le monde des<br />

activités de crise frénétiques, dont<br />

fait partie la fusion zurichoise.<br />

Imaginons un instant que le<br />

Conseil fédéral ait placé les 206 milliards<br />

dans la transition écologique,<br />

la formation et la création de<br />

150 000 emplois. Quand il s’agit de<br />

soutenir les plus précaires, il n’y a<br />

jamais d’argent mais là, la Confédération<br />

vole au secours d’une banque<br />

qui va à elle seule peser plus du<br />

double du PIB de la Suisse, avec un<br />

bilan cumulé de 1600 milliards de<br />

francs. Une enquête quant aux<br />

pertes des caisses de pensions qui<br />

avaient des actions chez CS reste à<br />

mener.<br />

10 000 banquières et banquiers<br />

risquent de se retrouver au chômage.<br />

Qui sait : peut-être que le<br />

personnel bancaire menacé se<br />

souvient à présent de sa propre<br />

histoire. La grève du personnel des<br />

banques de Zurich en septembre<br />

1918 a constitué une étape importante<br />

vers la grande grève générale.<br />

Où en est-on en 2023?


Droit au but !<br />

21<br />

Cher service juridique,<br />

Je travaille comme secrétaire<br />

dans une entreprise. La Poste<br />

vient chercher le courrier à<br />

16h00. Les courriers déposés<br />

après cette limite doivent être<br />

amenés par les secrétaires à la<br />

poste le jour même. Lorsque<br />

c’est à moi de le faire, mon<br />

team leader me fait systématiquement<br />

attendre son courrier.<br />

Mes collègues parti-es, il m’invite<br />

dans son bureau pour<br />

soi-disant m’apprendre à travailler<br />

et là, il s’assoit près de<br />

moi de manière à provoquer un<br />

contact physique. Parfois, il<br />

pose sa main sur ma jambe, me<br />

dit des paroles, telles que « les<br />

jupes te vont mieux », « si tu<br />

veux réussir il faut être sage<br />

avec moi ». Mon chef a-t-il le<br />

droit de se comporter ainsi ?<br />

Puis-je le dénoncer ? Je crains<br />

que personne ne me croit, car<br />

ça se passe quand il n’y a personne<br />

à côté. Je redoute un licenciement.<br />

Comment réagir ?<br />

Si je suis licenciée,<br />

quels sont mes droits ?<br />

La réponse du service juridique :<br />

Le fait que ton chef te demande de rester au bureau pour un<br />

dernier courrier qui doit partir le jour même n’est pas en soi<br />

interdit, en raison de son droit de donner des instructions particulières<br />

(art. 321d CO). Mais en faisant usage de ce droit, il doit<br />

respecter ta personnalité. Selon l’art. 328 CO, l’employeur protège<br />

et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du<br />

travailleur. En particulier, il veille à ce que les travailleurs/ses ne<br />

soient pas harcelés sexuellement et qu’ils ne soient pas, le cas<br />

échéant, désavantagés en raison de tels actes. Les agissements<br />

de ton chef constituent du harcèlement sexuel, mais aussi de<br />

la discrimination (art. 4 LEg). Ils portent atteinte à tes droits de<br />

la personnalité et sont interdits.<br />

Tu devras clairement indiquer à ton chef verbalement et par écrit<br />

que tu n’acceptes pas ses agissements et lui demander de cesser<br />

; sinon tu le dénonceras. Puis, informer rapidement la personne<br />

de confiance selon les directives de l’entreprise, si elles<br />

n’existent pas, le supérieur hiérarchique. En outre, il est très important<br />

de noter par écrit et en détail tout ce que tu vis avec ton<br />

chef direct (dates, gestes, paroles, lieu, etc.) ; informer <strong>syndicom</strong><br />

ou un/une collègue de confiance, à des fins de preuves, et bien<br />

conserver tous ces éléments même si ces agissements cessent.<br />

Un tel licenciement serait abusif au sens de l’art. 336 CO – et tu<br />

pourrais le contester et prétendre à une indemnité d’un montant<br />

correspondant à six mois de salaire (art. 336a CO) –, mais aussi<br />

discriminatoire selon l’art. 4 LEg ; dans ce dernier cas, l’autorité<br />

peut annuler la résiliation et ordonner la reprise des rapports de<br />

travail (art. 10 LEg). Durant toute la procédure, tu serais protégée<br />

contre le licenciement jusqu’à six mois après la fin de la procédure<br />

qui peut durer deux ans ou plus. Mais si tu ne veux pas retravailler<br />

là, tu pourrais renoncer à l’annulation de la résiliation,<br />

et réclamer les indemnités selon l’art. 336a CO.<br />

Toutes les rubriques<br />

Droit au but !


22 Loisirs<br />

Suggestions<br />

© FILMCOOPI<br />

Cours pour les femmes<br />

Movendo propose deux cours destinés<br />

uniquement aux femmes. Le<br />

Wen-Do, une méthode d’autodéfense<br />

pour femme, sera enseigné à<br />

Chexbres les 8 et 9 juin prochains.<br />

Les formatrices, Jeanne Allemann et<br />

Livia Boscardin, expliqueront les<br />

techniques d’autodéfense adaptées<br />

à la morphologie des femmes, les<br />

techniques verbales ainsi que la<br />

confiance et l’affirmation de soi en<br />

toute situation. Elles aborderont<br />

également les aspects juridiques et<br />

les démarches à entreprendre en cas<br />

d’agression.<br />

« Affirmer sa présence en tant<br />

que femme » aura lieu les 21 et<br />

22 septembre à Yverdon-les-Bains.<br />

L’intervenante, Virginie Pilault, également<br />

porte-parole du syndicat<br />

Unia, constate que les femmes ont<br />

tendance à rester plus discrètes. Les<br />

objectifs de ces deux journées de<br />

formation : connaître la situation<br />

des femmes dans la société et le<br />

monde du travail, analyser leur position<br />

sociale et professionnelle et utiliser<br />

des outils pour s’affirmer et se<br />

faire reconnaître.<br />

La troisième proposition,<br />

« Construction du mouvement syndical<br />

et perspectives », revisitera les<br />

faits marquants de l’histoire du<br />

mouvement ouvrier en Suisse et<br />

dans le monde, le 3 novembre à Lausanne.<br />

Les questions écologiques,<br />

de migration et de « genre » seront<br />

abordées afin de comprendre pourquoi<br />

et comment certaines avancées<br />

sont remises en cause aujourd’hui.<br />

Pour Valérie Boillat, formatrice chez<br />

Movendo, défendre et poursuivre<br />

l’amélioration des conditions de vie<br />

des travailleuses et des travailleurs<br />

demande de savoir d’où nous venons<br />

et de définir où nous voulons<br />

aller ensemble.<br />

Muriel Raemy<br />

Seule contre tous<br />

Le dernier long-métrage de Jean-<br />

Paul Salomé, La Syndicaliste, raconte<br />

l’agression subie par Maureen<br />

Kearney, l’ex-déléguée CFDT (le plus<br />

grand syndicat français) chez Areva.<br />

Celle-ci dénonce en 2012 un accord<br />

secret avec la Chine qui menace<br />

50 000 emplois dans le nucléaire et<br />

la souveraineté énergétique française.<br />

La syndicaliste subit diverses<br />

pressions et intimidations, puis une<br />

violente agression à son domicile.<br />

Et son cauchemar ne fait que commencer<br />

: prise pour une affabulatrice,<br />

elle sera accusée et reconnue<br />

coupable, avant d’être disculpée en<br />

appel.<br />

S’il s’appuie sur l’enquête de la<br />

journaliste Caroline Michel-Aguirre,<br />

Jean-Paul Salomé (La Daronne)<br />

s’avère toutefois plus intéressé par<br />

la « dimension intime » et le portrait<br />

du personnage, confié à Isabelle<br />

Huppert. La Syndicaliste se focalise<br />

dès lors sur le calvaire de la lanceuse<br />

d’alerte, pour en souligner le caractère<br />

sexiste. En témoignent déjà les<br />

détails sordides de l’agression (un<br />

couteau enfoncé par le manche<br />

dans son vagin), auxquels s’ajouteront<br />

ensuite des violences gynécologiques<br />

(trois examens en une semaine).<br />

Et puis, comme la plupart<br />

des victimes de viols, Maureen Kearney<br />

ne sera pas crue.<br />

Le film délaisse malheureusement<br />

un peu trop les enjeux industriels<br />

et politiques. Il éveille néanmoins<br />

la curiosité pour cette affaire<br />

française dont on n’a trop peu entendu<br />

parler.<br />

Mathieu Loewer<br />

Une revue qui percute<br />

© La Déferlante<br />

Créée et dirigée par des femmes, La<br />

Déferlante est une revue engagée et<br />

indépendante, publiée en France depuis<br />

2021. Tous les trois mois, elle<br />

donne la parole aux femmes et aux<br />

minorités sexuelles et de genre pour<br />

visibiliser leurs vécus et leurs combats.<br />

Elle fait entendre les voix des<br />

femmes du Chili à la Pologne, en passant<br />

par l’Iran, la Chine ou les Etats-<br />

Unis, celles aussi des personnes<br />

trans, stigmatisées, violentées. Le féminisme<br />

est loin de se décliner d’une<br />

seule voix, c’est ainsi que La Déferlante<br />

se veut « la revue des révolutions<br />

féministes », pour raconter et<br />

documenter cette multiplicité des<br />

luttes.<br />

La Déferlante publie une multiplicité<br />

de formats journalistiques –récits,<br />

enquêtes, portraits, reportages,<br />

bande dessinée, portfolio – et s’attache<br />

à déconstruire les mécanismes<br />

de genre qui se logent partout et<br />

principalement dans nos vies quotidiennes.<br />

Aussi, elle consacre dans<br />

chaque numéro un dossier central à<br />

des thèmes tels que manger, se<br />

battre, aimer, voter, parler, etc. Elle<br />

présente les grandes figures féministes,<br />

organise des rencontres entre<br />

des femmes engagées et publiques.<br />

L’écriture est percutante et surtout,<br />

elle prend parti. Elle déferle : c’est réjouissant<br />

et c’est bouleversant !<br />

Muriel Raemy<br />

L’offre complète de cours Movendo<br />

Film dans les salles romandes<br />

revueladeferlante.fr


1000 mots<br />

Ruedi Widmer<br />

23


24 Evènements 8 mars en photos<br />

Les femmes et les syndicats revendiquent l’égalité, ici et maintenant.<br />

Nos actions dans les différentes régions et dans tous les secteurs permettent<br />

de préparer l’événement d’envergure que sera la grève féministe du 14 juin.<br />

2<br />

1<br />

3<br />

4<br />

5<br />

6


1. Patrizia Mordini (m.), Stefanie Fürst et Mike Bolettieri en route pour visiter différentes librairies à Berne (© <strong>syndicom</strong>)<br />

2. L’assemblée des déléguées du secteur logistique était également placée sous le signe de la Journée internationale des droits des femmes. (© <strong>syndicom</strong>)<br />

3. Les secrétaires régionaux Virginie Zürcher (d.) et Nicolas Irus (g.) avec les membres <strong>syndicom</strong> de La Poste à Lausanne (© <strong>syndicom</strong>)<br />

4. Assemblée de la région Tessin-Moesano (6 mars 2023) pour préparer la Grève féministe (© <strong>syndicom</strong>)<br />

5. Patrizia Mordini, Ingrid Kaufmann et Vania Alleva (de g. à d.) aux Assises nationales de la Grève féministe organisées le 4 mars dernier à Fribourg (© <strong>syndicom</strong>)<br />

6. Sema Ogan, secrétaire régionale, devant Swisscom à Berne (© <strong>syndicom</strong>)<br />

7. Manifestation à Lausanne (© Brigitte Besson)<br />

8. Manifestation à Lausanne (© Brigitte Besson)<br />

9. Séminaire de formation pour le personnel de confiance au Tessin le 14 mars (© <strong>syndicom</strong>)<br />

10. Assemblée de la section Berne Presse et médias électroniques le 17 mars (© <strong>syndicom</strong>)<br />

11. Discussion chez Swisscom à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes (© <strong>syndicom</strong>)<br />

12. Le groupe d’intérêt des jeunes chez skyguide, le 20 février à Dübendorf (© <strong>syndicom</strong>)<br />

ERRATUM Dans le dernier numéro, la deuxième photo à la page 24 représente Fatima Lee et non pas Zahra Rahzav. Avec nos sincères excuses.<br />

25<br />

7<br />

8<br />

9<br />

10<br />

11<br />

12


26 Tous à la grève<br />

Je ferai grève le 14 juin car...<br />

« Lors des restructurations vécues au sein de mon<br />

entreprise ces derniers mois, ce sont principalement<br />

des femmes qui ont perdu leur emploi. » Jacques<br />

« On nous prend pour des quiches !<br />

La réforme de la l’AVS m’ulcère. »<br />

Miro<br />

« C’est inacceptable de constater la réduction<br />

systématique du taux de travail des femmes à<br />

l’arrivée d’un enfant. Alors qu’avant, la majorité<br />

des partenaires travaillaient à plein temps ou de<br />

manière choisie à temps partiel. » Daniel<br />

« Les femmes ont besoin de notre soutien moral<br />

pour obtenir l’égalité dans tous les domaines. »<br />

Arrigo<br />

« Pour toutes les violences qui lui ont été faites, pour<br />

toutes les humiliations qu’elle a subies, pour son corps<br />

et son travail exploités, pour son intelligence piétinée,<br />

pour l’ignorance dans laquelle on l’a laissée, pour la<br />

liberté refusée, pour sa bouche baillonée, pour son âme<br />

enchaînée et à laquelle on a coupé les ailes, pour tout<br />

cela : levez-vous, hommes, aux côtés d’une femme ! »<br />

Rocco<br />

« C’est contre un système que nous luttons. Tout<br />

le monde y gagne. Nous ne faisons pas seulement<br />

progresser les droits de certaines personnes,<br />

mais nous faisons évoluer l’humanité/la société<br />

dans son ensemble. » Martin<br />

« Ce n’est que par la solidarité,<br />

l’indignation et la mobilisation<br />

que nous pourrons vaincre les<br />

injustices et les inégalités de<br />

notre société. » Nicola<br />

« Je veux soutenir ma femme.<br />

Moi-même je serai de garde et<br />

ne pourrai pas me libérer, mais<br />

si je le pouvais, j’irais manifester<br />

avec elle. » Pierre<br />

« C’est pour moi une question de<br />

principe. L’égalité des sexes n’a<br />

que trop tardé dans l’histoire.<br />

Surtout en Suisse, nous devons<br />

aller de l’avant. Nous pouvons<br />

nous le permettre et donner<br />

l’exemple. » Taddeus<br />

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Impressum<br />

Rédaction : Muriel Raemy et Giovanni Valerio<br />

(coresponsables), Rieke Krüger et Catalina Gajardo<br />

Courriel : redaction@<strong>syndicom</strong>.ch<br />

Traductions : Alexandrine Bieri et Gabriele Alleva<br />

Dessins de portrait : Katja Leudolph<br />

Layout, correction, impression : Stämpfli Communication<br />

Changements d’adresse : <strong>syndicom</strong>, gestion<br />

des adresses, Monbijoustrasse 33, case postale,<br />

3001 Berne. Tél. 058 817 18 18, fax 058 817 18 17<br />

Annonces : priska.zuercher@<strong>syndicom</strong>.ch<br />

Commande d’abonnements : info@<strong>syndicom</strong>.ch<br />

Le prix de l’abonnement est inclus dans la cotisation<br />

de membre. Non-membres : Fr. 35.– (Suisse),<br />

Fr. 50.– (étranger)<br />

Editeur : <strong>syndicom</strong> – syndicat des médias<br />

et de la communication, Monbijoustr. 33,<br />

case postale, 3001 Berne<br />

Le <strong>magazine</strong> <strong>syndicom</strong> paraît six fois par année.<br />

Le prochain numéro paraîtra le 15 juin 2023.<br />

27<br />

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15<br />

I<br />

II<br />

4 14<br />

3<br />

III<br />

IV<br />

6 1 10<br />

7<br />

V<br />

VI<br />

8<br />

VII<br />

VIII<br />

IX<br />

11 12<br />

5 9<br />

13<br />

X<br />

Mot mystère :<br />

DÉFINITIONS<br />

15 2<br />

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15<br />

Horizontalement : I. Métissage. II. Entremetteuse.<br />

Parfois au fusil. III. Vieilles lumières. Chœur grec.<br />

Valeur européenne. IV. Clôt le soir. Marais. V.<br />

Salutaire chez Bourvil. Dégage ! Asperger. Rajout.<br />

VI. Ripeur. Chapeau-claque. VII. Entre les rangs.<br />

Fleur de printemps. VIII. Gerbe. Souffrît. Étain. IX.<br />

Positions. Gloussé. Touillé renversé. X. Lettre de<br />

boucher. Réciproque.<br />

Verticalement : 1. Type de farine. 2. Endetté.<br />

Règles. 3. Ferré. Corrigées. 4. Se mettent dans de<br />

beaux draps. Pique des graines. 5. Eux. Pauvreté,<br />

chasteté et obéissance. 6. Hollandais en camping.<br />

Silence musical. 7. Victoire de Napoléon.<br />

Ventilation. 8. Recueil de son ou d'image. Lui. 9.<br />

Te mettras à table. 10. De Versailles à San<br />

Francisco. Surveillance. 11. Arbre toxique.<br />

Indique. 12. Dans l'arène. Se marrer autrefois. 13.<br />

À peine créé. Sur le parking d'Augusta Raurica.<br />

Rapport à l'égo. 14. Tell al-Muqayyar. Par la suite.<br />

15. Poussée.<br />

Mots croisés<br />

Le-la gagnant-e, dont le nom paraîtra<br />

dans le prochain <strong>magazine</strong>, recevra une<br />

pièce en argent de notre partenaire la<br />

Banque Cler. Prière d’envoyer votre<br />

solution (le mot mystère seulement)<br />

jusqu’au 30 avril par e-mail à admin@<br />

<strong>syndicom</strong>.ch ou par courrier à Rédaction<br />

<strong>syndicom</strong>, Monbijoustrasse 33,<br />

case postale, 3001 Berne.<br />

Une seule participation possible par<br />

membre.<br />

Le gagnant du dernier mots croisés<br />

La solution du mots croisés du<br />

dernier numéro était « INTEGRATION ».<br />

Le gagnant est Monsieur Clément.<br />

Il recevra une HotelCard. Chaleureuses<br />

félicitations !<br />

Annonce<br />

14 JUIN 2023<br />

GRÈVE FÉMINISTE<br />

grevefeministe.ch<br />

Nous exigeons de l’argent,<br />

du temps et du respect!<br />

L’égalité maintenant!


28<br />

Tranches<br />

de vie<br />

« Rien n’est acquis<br />

pour les femmes iraniennes»<br />

Shiva Khosravi est née en Iran en 1987.<br />

Elle y fait des études en biologie et,<br />

une fois arrivée en Suisse, s’inscrit en<br />

relations internationales. Elle y découvre<br />

une autre réalité et, fatiguée de<br />

suivre les désirs des autres, Shiva<br />

commence à suivre les siens : elle<br />

abandonne ses études pour se dédier<br />

aux arts visuels à Genève. Elle termine<br />

son master en 2020, en jonglant de<br />

manière permanente entre études et<br />

travail. Aujourd’hui artiste, elle milite<br />

pour le droit des femmes. Elle ajoute<br />

sa voix à un féminisme parfois un peu<br />

trop bourgeois et loin des réalités<br />

concrètes des femmes d’ailleurs. Shiva<br />

est membre de <strong>syndicom</strong>.<br />

Texte : Elena Rusca<br />

Photo : Jean-Patrick Di Silvestro<br />

« Ne laisse jamais tes<br />

cheveux souffler dans<br />

le vent. »<br />

« Petite, je ne voulais pas être une<br />

fille. Mon père désirait un fils qui<br />

puisse perpétuer son nom dans<br />

l’arbre généalogique, mais il n’a eu<br />

que mes sœurs et moi. Je me suis<br />

sentie rejetée et j’ai longtemps refusé<br />

d’être moi-même, d’ailleurs, devenir<br />

une femme a été un véritable cauchemar.<br />

J’ai très vite été attirée par l’art, le<br />

théâtre et l’égalité entre homme et<br />

femme. Malheureusement, en Iran,<br />

l’art est très mal vu. Ce sont les<br />

jeunes qui n’ont pas bien réussi<br />

leurs études qui se consacrent à ces<br />

domaines. Dans ma famille, il y a<br />

des ingénieures et des médecins<br />

mais aucune artiste ; mon père<br />

n’aime pas dire que j’en suis une.<br />

Je ne suis pas arrivée en Suisse<br />

par hasard. Mon père y avait fait ses<br />

études, et dans un pays patriarcal<br />

comme l’Iran, sa décision est toute<br />

puissante. Je suis donc venue ici,<br />

comme lui l’avait fait auparavant. J’ai<br />

démarré des études en relations internationales,<br />

que j’ai laissées en<br />

suspens pour me consacrer à l’art.<br />

J’ai fait cela à l’insu de mon père.<br />

Lorsqu’il l’a découvert, il a arrêté de<br />

me parler. Deux ans de silence, que<br />

j’ai brisés en retournant en Iran.<br />

Les droits des femmes en Iran<br />

sont presque inexistants sur un plan<br />

légal. Nous n’avons pas le droit de<br />

nous vêtir comme nous l’entendons,<br />

pas le droit de divorcer, pas voix au<br />

chapitre lorsqu’il s’agit de choisir<br />

nos études. Une évolution sociale se<br />

fait tout même sentir : les gens me racontent<br />

être les deux à travailler au<br />

sein de leur couple, même si les<br />

femmes n’ont pas vraiment le même<br />

salaire ou les mêmes responsabilités<br />

au travail. L’idée que la femme doive<br />

rester à la maison se perd dans les<br />

générations actuelles, mais son état<br />

de bien-être dépend plus de sa famille<br />

et de la société que de la loi.<br />

Rien n’est pourtant acquis : la<br />

femme reste encore bien souvent invisible<br />

au quotidien. Cela me frustrait<br />

énormément. Mes sœurs et mes<br />

parents m’ont donc poussée à revenir<br />

en Suisse.<br />

Ici, j’ai développé mon art, la vidéo,<br />

qui me permet de raconter l’histoire<br />

des femmes de mon pays. Mon<br />

dernier travail ‹ Ne laisse jamais tes<br />

cheveux souffler dans le vent › a été<br />

réalisé avec trois amies iraniennes,<br />

dont on ne voit que les cheveux qui<br />

s’envolent. Nous sommes obligées de<br />

nous protéger du regard des<br />

hommes, ne pas le faire signifierait<br />

que nous voulons les séduire. Laisser<br />

nos cheveux libres reste donc un rêve<br />

en Iran, au risque de finir en prison<br />

ou même de mourir. »<br />

Pour visionner le travail de Shiva<br />

« Don’t let you hair blow with the<br />

wind »

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