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2023_06_16_PR_Géopolitique_CR

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Résumés<br />

Sophie Bava<br />

« Dieu va ouvrir la mer »1. Migrations africaines, encadrement chrétien et constructions<br />

théologiques au Maroc.<br />

Le blocage des frontières européennes et africaines depuis plus d’une vingtaine d’années incite<br />

les migrants à s'installer de plus en plus durablement en Afrique méditerranéenne. Certains<br />

deviennent dans le contexte marocain les acteurs du déploiement d’une offre religieuse<br />

chrétienne multiple et dynamique autour d’institutions religieuses, de lieux de cultes,<br />

d’associations, d’ONG confessionnelle ou d'origine confessionnelle et d'espaces de formation<br />

religieuse. Ainsi le Maroc, qui a mis en œuvre deux campagnes de régularisation depuis 2013,<br />

voit de nombreuses instances religieuses ou d'origine confessionnelle s'organiser afin de<br />

faciliter l’accueil, la formation et l'accompagnement social et spirituel des migrants venus<br />

d’Afrique subsaharienne. En migration, la reconnaissance passe souvent par les communautés<br />

religieuses qui deviennent ainsi des communautés de destin ou de sens. La création en 2012<br />

d'un lieu de formation universitaire chrétien à Rabat au Maroc, l'institut œcuménique de<br />

théologie Al Mowafaqa, destiné aux futurs responsables religieux originaires d'Afrique<br />

subsaharienne, est le point de départ de cette communication. Cette expérience portée par les<br />

Églises catholique et protestante, s’est construite dans un paysage religieux marocain<br />

transformé par les migrations intra-africaines chrétiennes. Selon certains, l'institut est une<br />

« bénédiction » qui a permis de rendre visible l’Église au Maroc et d’assoir sa position<br />

d'intermédiaire entre leurs préoccupations, celles de leurs institutions, celles des migrants et<br />

celles des autorités religieuses marocaines. J’aborderai la création de cet institut comme le<br />

reflet d'un lieu-moment où les acteurs religieux des églises historiques au Maroc se sont saisis<br />

des défis qui se présentaient à eux grâce à la diversité religieuse des populations migrantes<br />

installées ou de passage au Maroc. Si les migrations africaines ont indéniablement revitalisé la<br />

pratique chrétienne, notamment par le biais des églises de maison et de la naissance d’une<br />

théologie de la migration, elles l’ont aussi enrichie de débats qui s’inscrivent désormais au-delà<br />

de l'histoire chrétienne et dans un contexte où le Maroc interroge également la diversité<br />

religieuse de son territoire dans une optique résolument plus africaine. Ce christianisme qui se<br />

reconstruit par les Sud n'est pas celui des colons, ni des croisades, ni celui des églises africaines<br />

transnationales, même si le lien n'est pas coupé il est le produit de tout cela. Cette religion d'en<br />

bas rappelle à une marge de la société marocaine l'urgence d'accueillir la religion de l'autre<br />

comme un effet miroir de la situation des marocains musulmans vivant en Europe.<br />

Patrick Haenni<br />

La reterritorialisation du jihad global : le cas de HTS à Idlib (Syrie)<br />

Nous nous intéressons ici à la création d’un territoire politique (la poche de Idlib au Nord-Ouest<br />

de la Syrie). Ce territoire de 4 millions de personnes est dirigé par une administration mise en<br />

place par le mouvement Hayat Tahrir al Sham, ancienne franchise syrienne de al Qaeda.<br />

Confrontés aux défis stratégiques du moment (confrontation avec l’armée syrienne ; protection<br />

turque) et aux impératifs de gestion locale dans un contexte de faiblesse (faiblesse en termes de<br />

ressources financières, mais aussi en ressources humaines), le mouvement entre dans un<br />

processus d’interaction avec la société et se fera profondément transformer par « l’inertie du<br />

social » (F Furet). La transformation tient de la conspiration du silence : elle avance sans<br />

discours, sans aggiornamento théologique, sans « murajaat » comme l’ont fait d’autres<br />

1<br />

En référence à notre ouvrage: Bava Sophie, Bernard Coyault & Malik Nejmi, ‘Dieu va ouvrir la mer.<br />

Christianismes africains au Maroc’, ed.Kulte, 2022.<br />

Collège des Bernardins<br />

20 rue de Poissy - 75005 Paris<br />

www.collegedesbernardins.fr

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