Boxoffice Pro n°455 – 1er novembre 2023

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RENCONTRES La Déclaration des Cinéastes Pendant le Festival de Cannes, 500 cinéastes français et étrangers avaient signé la Déclaration des Cinéastes, demandant le droit à la pleine paternité des œuvres, la redistribution équitable des recettes et la réglementation immédiate de l’intelligence artificielle. Cette action a ensuite été prolongée autour de plusieurs tables rondes et débats à la Mostra de Venise (Déclaration des Cinéastes – Acte II), ainsi qu’au Festival international du film de San Sebastián. Les engagements de programmation et de diffusion, préconisés entre autres par le rapport Lasserre, ont été beaucoup discutés, notamment au Congrès des exploitants. Êtes-vous favorables à cette régulation ? N.M : Nous sommes conscients de la difficulté des exploitants, qui doivent, dans un contexte difficile, programmer des films pour remplir leurs salles. Mais aujourd'hui, il y a des films qui disparaissent trop rapidement des écrans, sans avoir le temps de s’installer. Or justement, les films les plus inattendus naissent parfois lorsqu’ils sont récompensés en festival, mais surtout avec le bouche-à-oreille. Les engagements de programmation nous semblent essentiels pour la survie du cinéma français dans toute sa diversité. On ne peut pas dire qu'il y a trop de films produits s’ils n'ont pas la moindre chance d'exister. Un film représente des années de travail pour un cinéaste et une somme énorme d'énergies individuelles et collectives. Quand un mercredi de démarrage sonne le glas de la carrière d’un film, cela peut être très traumatisant. Quelle est selon vous, l’influence de L’Arp sur les orientations et décisions prises concernant le secteur cinéma et ses enjeux que nous venons d’évoquer ? N.B : Notre objectif est de fonctionner le plus harmonieusement possible. Grâce à nos différentes casquettes, nous avons une vision panoramique des enjeux qui pourraient parfois être contradictoires. Les sujets sont complexes et il nous faut toujours trouver cet équilibre entre art et industrie. L’Arp est vraiment à cet endroit de trait d'union, avec une équipe de cinéastes aux styles artistiques et typologies de budget très différents. N.M : La grande force de L'Arp est d'être dans la proposition. Elle a imaginé l'exception culturelle, a été à la pointe des questions sur le financement de la création des plateformes et de la directive SMA... Aujourd'hui, nous nous intéressons au sujet de l'intelligence artificielle, mais surtout, de l'affirmation de la liberté d'expression, du droit moral de l'auteur. Nous essayons de préserver le modèle vertueux que nous avons créé, que les cinéastes du monde entier nous envient, tout en prenant en compte l'industrie et ses mutations. J'invite tous les cinéastes qui s'interrogent sur ces sujets à nous rejoindre. C'est ce qui se passe avec la Déclaration des cinéastes, qui prend une ampleur internationale ! Plus on est nombreux, plus on est forts. C'est très enthousiasmant. Propos recueillis par Marion Delique LE PROGRAMME des Rencontres Cinématographiques de L'Arp La manifestation est coprésidée cette année par les cinéastes Caroline Vignal et Dominik Moll. Quatre grands débats sont au programme : Mercredi 8 novembre, 14h30 Déclaration des Cinéastes, grève à Hollywood, IA : comment réaffirmer la place centrale de l’auteur dans la création ? Avec Benoît Carré, auteur-compositeur producteur, Laurence Farreng, députée européenne, Marine Francen, cinéaste et co-présidente de la SRF, Dr. Mathilde Pavis, experte juridique, Howard A. Rodman, scénariste et ancien président de la Writers Guild of America West. Débat co-animé par Nathalie Marchak, cinéaste et viceprésidente de L’Arp, et Radu Mihaileanu, cinéaste et vice-président de L’Arp. Jeudi 9 novembre, 9h30 Création et diffusion du cinéma français : quelles pistes d’amélioration ? Débat introduit par Olivier Henrard, directeur général délégué du CNC, avec Alain Attal, producteur Trésor Films, Jérémy Bacchi, vice-président de la commission de la Culture, de l'Éducation et de la Communication au Sénat, Christine Beauchemin-Flot, directriceprogrammatrice du cinéma Le Sélect (Antony), co-présidente du Scare, Caroline Bonmarchand, productrice chez Avenue B Productions, Eric Lagesse, distributeur Pyramide Films, co-président du Dire, Dominik Moll, cinéaste et co-président des Rencontres cinématographiques de L'Arp. Co-animé par Jeanne Herry, cinéaste et co-présidente de L’Arp et Michel Leclerc, cinéaste et membre du bureau de L’Arp. Jeudi 9 novembre, 14h30 2030 : quels usages, quel paysage audiovisuel, pour quelle création ? Avec Quentin Bataillon, membre de la Commission des affaires culturelles et de l’éducation à l’Assemblée nationale, Isabelle Madelein, productrice chez Dharamsala, Roch-Olivier Maistre, président de l’Arcom, Edouard Mauriat, président du SPI et producteur chez Mille et Une Productions, Maxime Saada, président du directoir du groupe Canal+, et Stéphane Sitbon-Gomez, directeur des antennes et des programmes du groupe France Télévisions. Débat co-animé par Lucie Girre, déléguée générale de l’Arp, et Nicolas Bary, cinéaste de l’Arp. Vendredi 10 novembre, 9h30 Comment l’Europe doit-elle (ré)concilier souveraineté et attractivité culturelles et économiques ? Avec Fabienne Colboc, vice-présidente de la Commission des affaires culturelles et de l’éducation à l’Assemblée nationale, Marc du Pontavice, PDG de Xilam, et Emmanuel Maurel, député européen. Débat co-animé par Pierre Jolivet, vice-président de l’Arp, et Marc Missonnier, président de l’UPC et producteur chez Moana. Les débats seront retransmis en direct et en replay sur le site des Rencontres. Huit films seront par ailleurs projetés en avant-première au cinéma Les 3 As, ainsi qu’un programme de courts métrages soutenus par Pictanovo et la Région Hauts-de-France. ©Susy Lagrage Rencontres de L'Arp 2022 12 N°455 / 1 er novembre 2023
L'ÉMISSION LE PRÉSIDENT DE L’AFCAE RÉAFFIRME LES VALEURS DE L’ART ET ESSAI ©Boxoffice Pro Dans l’Émission Boxoffice Pro, Guillaume Bachy défend un classement art et essai basé sur le travail des salles, des conditions d’exploitation qui tiennent compte du territoire… et les valeurs modernes de proximité, de diversité et de débat collectif, que les cinémas art et essai doivent partager, pour faire société. Guillaume Bachy, président de l’Afcae Choisir la salle où on va voir un film, c’est un geste citoyen GUILLAUME BACHY L'Association française des cinémas art et essai fêtera ses 70 ans en 2025 : une structure « très vivante », fédérant 1 250 salles, qui ont mieux redémarré après la Covid que l’ensemble du parc, pour retrouver aujourd’hui, en moyenne, un niveau de fréquentation proche de celui de la période 2017-19. Grâce à de grands films bien sûr, mais aussi parce que les salles art et essai « ont un public fidèle, qui vient en sûreté, dans des lieux d’accueil animés ». Une réforme art et essai plus juste, qui récompense le travail des salles Et c’est ce travail d’animation qui, pour l’Afcae, doit être au centre du classement. Si la réforme, voulue par le CNC dans un calendrier très serré, après les préconisations du rapport Lasserre, « n’était pas une demande de l’Afcae », elle se dit « tout à fait d’accord pour mieux récompenser la programmation des films les plus fragiles. Mais la minoration pour les films sortant sur 400 copies nous pose problème », explique Guillaume Bachy. « De façon éthique, pourquoi un film serait-il “minoré” en fonction de sa combinaison de sortie, choisie par le distributeur ? » Par ailleurs, l’accès à ces films dits porteurs sera plus difficile pour les salles art et essai : « s’ils comptent moins dans leur classement, les distributeurs risquent de les proposer à d’autres salles »… ce qui se produit déjà depuis l’explosion des plans de sorties. Ce que souhaite l’Afcae, « c’est que les salles qui fournissent le plus d’efforts soient mieux récompensées. Il faut se baser sur le travail des exploitants, non pas sur le plan de sortie des films ». La part de soutien sélectif – actuellement de 20 %, contre 80 % d’aide automatique liée à la programmation –, doit ainsi augmenter, selon l’Afcae, qui « demande 50/50 : la plus value qu'ajoute une salle art et essai, c’est la rencontre, les ateliers, l’éducation aux images… et ça, ça coûte cher ». Bien sûr, on doit encourager les salles à montrer davantage de diversité, mais dans une meilleure reconnaissance des territoires, car « on ne peut pas faire le même travail dans une grande ville et dans la ruralité » . Pour cela, l’Afcae voudrait augmenter le nombre de commissions régionales, les cinq actuelles couvrant de trop grands territoires pour les examiner finement. Enfin, elle préconise la création d’un label 15-25 ans, pour accompagner les salles qui ont beaucoup investi dans ce travail, qu’elles mettront d’ailleurs en avant dans leur dossier de classement. La recommandation des films fonctionne très bien Sur la recommandation art et essai des films, que certains distributeurs souhaiteraient pouvoir refuser, Guillaume Bachy rappelle la réponse du CNC : « c'est une notion d’intérêt général », d’où découlent des aides… « y compris pour les distributeurs ». Le système du collège – coordonné par l’Afcae – « fonctionne très bien et n’est pas remis en cause. Nous avons mis en place, il y a un an, des réunions régulières pour réfléchir à la notion d’art et essai avec les 50 membres du collège, qui n’ont jamais autant voté, à 79 % ». Quant aux engagements de programmation, qui ne concernent que très peu de salles art et essai, l’Afcae y voit l’intérêt de la filière indépendante. Cela ne doit pas toutefois « exacerber la concurrence, dans des villes où une salle art et essai historique serait desservie si un circuit demande un film pour honorer ses engagements ». Les potentiels engagements de diffusion, eux, ne doivent pas seulement régler l’accès aux films, « qui n’est plus notre plus gros problème aujourd’hui », mais prendre en compte les conditions d’exploitation. Car « pour montrer de la diversité, il faut de l’espace disponible sur nos écrans, ce que ne nous permet pas toujours le nombre de séances exigé ». Rendre l’art et essai désirable Des questions qui ne sont pas nouvelles… pour une association qui, elle, se renouvelle. Une « très belle équipe de permanents » et d'administrateurs rajeunis, qui initient des actions : le comité 15-25, « qui a beaucoup aidé certains films », ou encore la formation des étudiants et des exploitants adhérents, qui reste primordiale. Plus récemment, la rubrique “Les Indés” sur AlloCiné, née « d’un partenariat avec un site où tous les publics s’informent sur le cinéma, offre la possibilité aux salles art et essai d’inventer un nouveau marketing. En renvoyant leurs spectateurs sur cet onglet, les salles les orientent vers des films qu’elles soutiennent, ce qui a déjà généré 2 millions de connexions ». L’outil permettra aussi de mettre en avant les salles ellesmêmes et les événements qu’elles proposent. Une façon, aussi, de porter collectivement « des valeurs modernes, d'engagement, proches de celles de beaucoup de jeunes. Il faut rendre l’art et essai désirable, et dire, comme l’ont fait les libraires indépendants ou les magasins bio, que choisir la salle où on va voir un film est un geste citoyen. » Et plus largement, de partager avec le public l’ADN de l’art et essai : « la proximité, la diversité, l’échange collectif : des piliers pour voir ensemble et vivre ensemble, pour qu’on fasse société ». Emission à voir ou revoir sur notre chaîne YouTube Cécile Vargoz N°455 / 1 er novembre 2023 13
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