Magazine CNC: automne 2024
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Des relations pour<br />
un monde résilient<br />
TKTKTKTKTKTKT<br />
Contrer la double crise du déclin de la biodiversité<br />
et des changements climatiques requiert des partenariats<br />
natureconservancy.ca<br />
WINTER 2021 1
AUTOMNE <strong>2024</strong><br />
SOMMAIRE<br />
Conservation de la nature Canada<br />
4 Cultiver des relations pour<br />
l’avenir de la conservation<br />
Lisa McLaughlin, vice-présidente,<br />
Politiques et planification en conservation<br />
à Conservation de la nature Canada (<strong>CNC</strong>)<br />
aborde les défis et les occasions en matière<br />
de conservation aujourd’hui.<br />
6 Réserve naturelle<br />
Jean-Paul-Riopelle<br />
Découvrez les résultats de près de 20 ans de<br />
travail sur cette réserve située à la rencontre<br />
de la nature, de l’art et de l’histoire.<br />
7 Craquez pour les feuilles<br />
d’<strong>automne</strong> au Québec<br />
Apprenez-en plus sur les couleurs automnales<br />
de la région des Grands Lacs et du fleuve<br />
Saint-Laurent.<br />
7 Un regard neuf sur la nature<br />
Des jumelles permettent à Mathias Brummer,<br />
spécialiste des sciences de l’environnement en<br />
Catalogne (Espagne), d’entrer en contact avec<br />
la nature d’une nouvelle façon.<br />
8 Des relations pour<br />
un monde résilient<br />
Établir des partenariats est la clé pour créer<br />
des solutions concrètes fondées sur la nature<br />
et contrer la double crise de la perte de<br />
biodiversité et des changements climatiques.<br />
12 Plongeon huard<br />
En Nouvelle-Écosse, une communauté et des<br />
organismes s’unissent pour agir en faveur<br />
d’espèces (comme le plongeon huard) et de<br />
leurs habitats en milieu urbain.<br />
14 <strong>CNC</strong> à l’œuvre<br />
Une situation gagnante pour les éleveurs, les<br />
éleveuses et la nature en Alberta; feu vert<br />
pour le mouvement pour la faune au Québec;<br />
la recherche sur les pollinisateurs jette un<br />
éclairage sur l’avenir de l’alimentation.<br />
16 La réciprocité<br />
dans la tradition<br />
La Grande Cheffe de la Nation Crie d’Eeyou<br />
Istchee, Mandy Gull-Masty exerce son<br />
leadership en conservation en s’appuyant<br />
sur l’histoire et les traditions du territoire.<br />
18 Revenir de loin<br />
Comment la conservation à l’échelle du<br />
paysage aide les populations de wallaby des<br />
rochers à queue en brosse en Australie.<br />
*GÉNÉRÉ PAR : CALCULATEUR.ROLLANDINC.COM. COUVERTURE : VLAD GHIEA/ALAMY STOCK PHOTO. CETTE PAGE : SEAN FEAGAN/<strong>CNC</strong>.<br />
C’est extra!<br />
Visitez magazinecnc.ca pour accéder à du<br />
contenu supplémentaire en lien avec ce<br />
numéro de notre magazine.<br />
Conservation de la nature Canada<br />
365, rue Bloor Est, bureau 1501, Toronto, ON M4W 3L4<br />
magazine@conservationdelanature.ca | Tél. : 416 932-3202 | Sans frais : 1 877 231-3552<br />
Conservation de la nature Canada (<strong>CNC</strong>) est la force rassembleuse au pays pour la sauvegarde<br />
de la nature. Par la conservation permanente de vastes territoires, <strong>CNC</strong> apporte des solutions<br />
à la double crise du déclin rapide de la biodiversité et des changements climatiques. <strong>CNC</strong> est<br />
un organisme de bienfaisance enregistré. Avec la nature, nous créons un monde prospère.<br />
Le magazine Conservation de la nature Canada est offert aux personnes qui appuient <strong>CNC</strong>.<br />
MC<br />
Marque de commerce de La Société canadienne pour la conservation de la nature<br />
FSC MD n’est pas responsable des calculs<br />
concernant l’économie des ressources<br />
réalisée en choisissant ce papier.<br />
Imprimé au Canada avec des encres végétales par Warrens Waterless Printing.<br />
La publication de ce magazine a sauvegardé 11 arbres et 11 456 litres d’eau*.<br />
2 AUTOMNE <strong>2024</strong> conservationdelanature.ca
Couleurs<br />
d’<strong>automne</strong>, Alb.<br />
Couverture :<br />
Fous de Bassan,<br />
Île Bonaventure,<br />
Québec.<br />
GENEVIÈVE LESIEUR; BRIAN BANKS; JAMIE LAWSON.<br />
Chères amies,<br />
Chers amis,<br />
Il y a près de deux ans, des représentantes et représentants des quatre coins du<br />
monde se sont réunis à Montréal, au Québec, lors de la Conférence des Nations<br />
Unies sur la biodiversité (COP15) pour convenir d’un objectif mondial visant<br />
à protéger 30 % des terres et des eaux de la planète d’ici 2030. Conservation de la<br />
nature Canada (<strong>CNC</strong>) était présent, notamment pour fournir des conseils sur la façon<br />
de respecter cet engagement ambitieux pour un avenir en faveur de la nature.<br />
Depuis, nous avons accompli tellement de choses! Nous avons pris en compte la<br />
complexité croissante de l’espace de conservation au Canada, trouvé de nouveaux<br />
partenaires et approfondi nos relations avec les Nations et les communautés autochtones.<br />
Nous avons aussi continué à investir dans les technologies et à développer des<br />
outils qui mettent à contribution le potentiel de l’intelligence artificielle pour maximiser<br />
l’impact de notre travail. Mais il reste encore beaucoup à faire, et pour y parvenir,<br />
nous avons besoin de partenaires ambitieux issus de tous les secteurs de la société.<br />
Étant donné sa grande capacité à rassembler des partenaires et l’impact de son travail<br />
à travers le pays, <strong>CNC</strong> a été invité à coorganiser le Congrès mondial <strong>2024</strong> du Réseau<br />
international pour la conservation des terres (ILCN), présenté par RBC. En réunissant<br />
des organisations civiques et privées de premier plan vouées à la conservation<br />
des terres ainsi que des expertes et expertes provenant de six continents, le Congrès<br />
de l’ILCN permettra de renforcer la capacité de la communauté de pratique sans cesse<br />
croissante. Je suis fière que <strong>CNC</strong> collabore au Congrès et qu’il attire l’attention sur<br />
les progrès que nous accomplissons de concert avec d’autres organisations. Je suis<br />
également fière de mes collègues qui prendront part à d’importantes discussions.<br />
Pour souligner cet événement international, le présent numéro du magazine<br />
Conservation de la nature Canada traite de l’état de la conservation au pays, de<br />
ce que nous pouvons apprendre des autres, et des relations qui nous aident à bâtir<br />
un monde naturel résilient. Une plus grande collaboration sur le terrain, un investissement<br />
continu de la part des gouvernements et une hausse des investissements<br />
privés sont en effet nécessaires pour soutenir des actions concrètes en faveur de<br />
la conservation.<br />
Bien qu’il y ait encore beaucoup à faire, il n’y a pas de doute que les valeurs<br />
de <strong>CNC</strong> : vision audacieuse, collaboration, détermination et empouvoirement<br />
(empowerment) mèneront à notre réussite. Le Congrès mondial <strong>2024</strong> de l’ILCN est<br />
l’occasion de nouer des liens, de mettre en commun des connaissances et d’apprendre<br />
des expériences de nos partenaires d’ailleurs dans le monde.<br />
Parce qu’avec la nature, c’est possible.<br />
Catherine Grenier<br />
Catherine Grenier<br />
Présidente et cheffe de la direction<br />
Conservation de la nature Canada<br />
Ont collaboré<br />
à ce numéro<br />
Brian Banks écrit<br />
régulièrement sur le<br />
travail de conservation,<br />
la biodiversité et la<br />
nécessité de créer des<br />
liens toujours plus<br />
étroits avec ceux et<br />
celles que nous croisons<br />
sur la planète. Il a écrit<br />
l’article principal Des<br />
relations pour un monde<br />
résilient, en page 8.<br />
Jamie Lawson est<br />
un artiste, designer<br />
et musicien qui habite<br />
à Hamilton, en<br />
Ontario. Son travail est<br />
très varié : conception<br />
d’identités visuelles,<br />
emballages, couvertures<br />
de livres, lettrage<br />
et illustrations<br />
éditoriales. Il a créé<br />
l’illustration de l’article<br />
principal Des relations<br />
pour un monde résilient,<br />
en page 8.<br />
conservationdelanature.ca<br />
AUTOMNE <strong>2024</strong> 3
D’UN OCÉAN<br />
À L’AUTRE<br />
Les Mi’kmaq d’Epekwitnewaq<br />
et <strong>CNC</strong> font équipe depuis<br />
2009 pour prendre soin d’aires<br />
de conservation à Kwesawe’k<br />
(île Oultons), Î.-P.-É.<br />
Pourquoi les<br />
partenariats<br />
sont-ils l’avenir de<br />
la conservation?<br />
Le Canada, connu pour ses vastes<br />
paysages et la richesse de sa biodiversité,<br />
joue un rôle crucial dans les efforts de<br />
conservation à l’échelle mondiale. Nous<br />
avons discuté avec Lisa McLaughlin,<br />
vice-présidente, Politiques et planification<br />
en conservation à Conservation de la<br />
nature Canada (<strong>CNC</strong>) pour recueillir ses<br />
réflexions sur la position unique du Canada<br />
dans le monde, l’évolution de l’approche<br />
de <strong>CNC</strong> et les défis et possibilités dans le<br />
domaine de la conservation aujourd’hui.<br />
STEPHEN DESROCHES. MÉDAILLON : MIKE FORD.<br />
4 AUTOMNE <strong>2024</strong> conservationdelanature.ca
HAUT EN BAS : MIKE DEMBECK; NEIL EVER OSBORNE; IRWIN BARRETT.<br />
Comment la conservation de la nature au<br />
Canada s’inscrit-elle dans une perspective<br />
mondiale plus large?<br />
LM : Avec ses rivages sans fin et ses vastes<br />
forêts, le Canada a une influence considérable<br />
sur le mouvement mondial de la conservation.<br />
Il possède 20 % de l’eau douce de la planète,<br />
certaines des dernières grandes forêts,<br />
et son littoral est plus long que celui de tous<br />
les autres pays du monde. Ses milieux naturels<br />
abritent des milliers d’espèces et fournissent<br />
plusieurs services écosystémiques à<br />
de nombreuses collectivités, comme la pollinisation<br />
et la purification de l’air et de l’eau.<br />
Cependant, depuis le début de la colonisation<br />
européenne, nous avons radicalement modifié<br />
de nombreux paysages par l’urbanisation<br />
et l’exploitation intensive des ressources naturelles.<br />
Les impacts de la perte et de la fragmentation<br />
de l’habitat, de la perte de biodiversité<br />
et de l’accélération des changements<br />
climatiques, et l’accroissement de la fréquence<br />
et de l’intensité des phénomènes météorologiques,<br />
ont un effet catastrophique sur<br />
la population et la nature. Des actions efficaces<br />
en matière de conservation sont cruciales<br />
pour arrêter et inverser ces pertes.<br />
Selon vous, qu’est-ce qui rend <strong>CNC</strong> unique<br />
au pays?<br />
LM : <strong>CNC</strong> brille quand il s’agit de résoudre<br />
des problèmes liés à la nature. Mes collègues<br />
et moi collaborons avec divers détenteurs<br />
de droits et parties intéressées, dont des<br />
entreprises, des gouvernements, des Nations<br />
et communautés autochtones, des équipes de<br />
recherche et des propriétaires fonciers privés<br />
pour aider à protéger la nature (voir Des<br />
relations pour un monde résilient, p. 8)<br />
Comment l’approche de <strong>CNC</strong> a-t-elle évolué?<br />
LM : <strong>CNC</strong> a toujours insisté sur l’importance<br />
d’utiliser les meilleures données disponibles<br />
pour guider son travail. Aujourd’hui, nous<br />
avons accès à des bases de données volumineuses<br />
et complexes et à des outils d’analyse<br />
très sophistiqués pour appuyer nos prises<br />
de décisions. Nous pouvons combiner une<br />
grande variété de facteurs qui nous aident à<br />
déterminer les meilleurs sites où intervenir<br />
pour que la nature et les humains puissent<br />
prospérer. Cela nous permet de découvrir<br />
suffisamment d’habitats connectés et de qualité<br />
au sein de paysages naturels pour que<br />
toutes les espèces indigènes et les fonctions<br />
écologiques puissent y perdurer aujourd’hui<br />
et prospérer dans l’avenir.<br />
Nous reconnaissons également que la vie<br />
des humains et leurs moyens de subsistance<br />
sont liés à la terre. Pour être efficace dans<br />
son travail, <strong>CNC</strong> tisse des liens solides avec<br />
ceux qui travaillent, vivent et gouvernent les<br />
endroits où il intervient.<br />
Quels sont les plus grands défis qui<br />
attendent <strong>CNC</strong>?<br />
LM : À <strong>CNC</strong>, nous sommes fiers des relations<br />
profondes que nous avons établies et qui<br />
sont essentielles au succès de la conservation.<br />
Nous investissons de notre temps et nous<br />
nous dévouons pour bâtir et bien gérer ces<br />
relations avec divers groupes. Bien qu’elles<br />
soient l’une des forces de notre travail, elles<br />
constituent toutefois un grand défi.<br />
Nous disons souvent que la conservation<br />
est « locale », parce que les enjeux auxquels<br />
les gens sont confrontés, qu’ils soient économiques<br />
ou environnementaux, comme le<br />
manque d’accès à la nature, les inondations<br />
ou la sécheresse les touchent. C’est pourquoi<br />
nous devons nouer des liens avec des personnes<br />
qui subissent les répercussions des<br />
changements d’utilisation des terres et avec<br />
celles qui influencent le changement dans<br />
la même région. Je parle ici des particuliers,<br />
des entreprises, des gouvernements, des<br />
Nations et communautés autochtones. Il faut<br />
travailler ensemble pour atteindre nos objectifs<br />
communs. Ce n’est pas évident lorsque<br />
d’autres intérêts l’emportent sur le bien-être<br />
durable de la nature et des collectivités.<br />
La responsabilisation et le dialogue collectifs<br />
sont donc primordiaux. Nous savons que<br />
la nature fait partie de la solution pour répondre<br />
à la plupart des enjeux les plus pressants<br />
dans le monde, qu’il s’agisse de fournir<br />
de l’eau potable, de favoriser la connectivité,<br />
la santé mentale ou la stabilité économique,<br />
ou encore d’atténuer les risques associés aux<br />
conditions météorologiques extrêmes.<br />
Qu’est-ce que le Canada doit faire différemment<br />
à la lumière de notre passé colonial?<br />
LM : Il faut reconnaître et aborder le passé<br />
colonial de la conservation de la nature et<br />
le fait qu’elle a historiquement contribué à<br />
dépouiller les communautés autochtones de<br />
leurs terres, de leur identité et de leur culture.<br />
Reconnaître ce passé et les conséquences<br />
actuelles de l’approche coloniale signifie<br />
qu’il faut redéfinir ce qu’est la réussite en<br />
conservation. Il faut améliorer nos pratiques<br />
de collaboration avec les communautés<br />
autochtones, en faisant preuve d’humilité<br />
et d’ouverture d’esprit. Certes, <strong>CNC</strong> et le<br />
Canada commencent tout juste leur<br />
cheminement vers la Réconciliation. Nous<br />
devons persévérer dans nos efforts pour<br />
rendre nos pratiques de conservation plus<br />
inclusives et efficaces, apprendre de manière<br />
La perte<br />
d’habitat<br />
depuis la<br />
colonisation<br />
européenne<br />
réciproque avec les Nations et les<br />
communautés autochtones, et travailler<br />
ensemble pour de meilleurs résultats au<br />
bénéfice de la population et de la nature.<br />
Prairies et milieux humides : 70 %<br />
Forêt carolinienne : 80 %<br />
Que pouvons-nous apprendre d’autres spécialistes<br />
de la conservation dans le monde?<br />
LM : Il y a tant à apprendre et à partager<br />
dans le domaine de la conservation! L’Europe<br />
a beaucoup à nous apprendre sur le travail<br />
de restauration et sur la manière d’inciter les<br />
propriétaires fonciers et les gouvernements<br />
à protéger et à restaurer la nature. Des pays<br />
africains font preuve d’innovation dans la<br />
conservation communautaire et mobilisent le<br />
secteur privé grâce à des modèles financièrement<br />
viables comme des prêts liés à la durabilité.<br />
De nombreux pays asiatiques sont des<br />
chefs de file de la coexistence humains-faune.<br />
L’Amérique latine et l’Australie peuvent nous<br />
parler du rôle des aires protégées privées et<br />
de la gestion de la conservation sous l’angle<br />
de la Réconciliation et<br />
des extrêmes climatiques,<br />
et ce ne sont là<br />
que quelques exemples.<br />
Nous avons beaucoup<br />
à apprendre les uns des<br />
autres, et c’est pourquoi<br />
les échanges seront si<br />
précieux au Congrès<br />
mondial <strong>2024</strong> de l’ILCN,<br />
présenté par RBC. Tous<br />
les secteurs de la société<br />
doivent collaborer et travailler<br />
de manière plus<br />
contemporaine et holistique,<br />
en veillant à ce<br />
que les efforts de conservation<br />
s’intègrent à la<br />
Réconciliation et au développement<br />
durable.1<br />
Milieux humides urbains : 80 %<br />
EN SAVOIR<br />
PLUS<br />
Olaf Jensen,<br />
directeur des<br />
aires protégées<br />
à Environnement<br />
et<br />
Changement<br />
climatique<br />
Canada, nous<br />
fait part de son<br />
point de vue sur<br />
l’état de la<br />
conservation.<br />
conservationdelanature.ca<br />
AUTOMNE <strong>2024</strong> 5
SUR LES<br />
SENTIERS<br />
Île<br />
Ronde<br />
Île du Cheval<br />
Peinture de Jean-Paul Riopelle<br />
★<br />
Île aux Grues<br />
Fleuve Saint-Laurent<br />
Réserve naturelle<br />
Jean-Paul-Riopelle<br />
Grand-duc d’Amérique<br />
<br />
N<br />
Réserve naturelle<br />
Jean-Paul-Riopelle<br />
Plongez-vous dans les couleurs vives de l’<strong>automne</strong> et la beauté<br />
insulaire de ce joyau caché du fleuve Saint-Laurent, au Québec.<br />
La réserve naturelle Jean-Paul-Riopelle,<br />
située sur la charmante île aux Grues,<br />
en aval de la ville de Québec, est une<br />
propriété de 48 hectares que Conservation<br />
de la nature Canada (<strong>CNC</strong>) a le privilège<br />
de gérer depuis juin 2007. Explorez plus de<br />
2,5 kilomètres de sentiers pittoresques et<br />
admirez la vue sur le Saint-Laurent à partir<br />
de divers points d’observation. Des panneaux<br />
d’interprétation de ses sentiers témoignent<br />
du profond patrimoine artistique, culturel et<br />
historique de la région. Cet habitat naturel<br />
attire la faune bien entendu, mais aussi les<br />
humains, puisque Jean-Paul Riopelle, artiste<br />
peintre et sculpteur québécois de renom,<br />
y a puisé son inspiration.<br />
Abritant une ancienne cabane à sucre, l’écosystème<br />
forestier unique de la réserve est riche<br />
en biodiversité. On y trouve des érables à sucre<br />
tricentenaires et des espèces en voie de disparition<br />
comme le noyer cendré et la rare floerkée<br />
fausse-proserpinie, une plante herbacée.<br />
Les vastes bancs de sable à la pointe sud de<br />
l’île sont une aire de concentration désignée de<br />
la sauvagine. Ils attirent des oiseaux migrateurs<br />
comme le canard souchet qui parcourent le<br />
couloir migratoire de l’est du continent. L’écosystème<br />
forestier fournit également un habitat<br />
à des oiseaux nicheurs comme le grand-duc<br />
d’Amérique et le hibou moyen-duc.1<br />
En savoir plus : conservationdelanature.ca/riopelle.<br />
LÉGENDE<br />
• Panneau d’interprétation<br />
• Plateforme d’observation<br />
• Escalier<br />
Accueil et stationnement<br />
--- Sentier<br />
ESPÈCES À OBSERVER<br />
• canard souchet • grenouille des bois<br />
• cicutaire de Victorin • grenouille léopard<br />
• cicutaire maculée • grenouille verte<br />
• couleuvre rayée • hêtre à grandes<br />
• érable à sucre<br />
feuilles<br />
• ériocaulon de Parker • hibou moyen-duc<br />
• floerkée<br />
• noyer cendré<br />
fausse-proserpinie • rainette crucifère<br />
• grand-duc d’Amérique • sapin baumier<br />
SENS HORAIRE, D’EN HAUT À DROITE : CLAUDE DUCHAÎNE; LETA PEZDERIC/<strong>CNC</strong>; HEMIS/ALAMY STOCK PHOTO;<br />
NEFTALI/ALAMY STOCK PHOTO; HEMIS/ALAMY STOCK PHOTO; CARTE : JACQUES PERRAULT.<br />
6 AUTOMNE <strong>2024</strong> conservationdelanature.ca
ACTIVITÉ<br />
LES<br />
INDISPENSABLES<br />
PEINTURE : JUDIT PIELLA. FEUILLES : JACQUES PERRAULT.<br />
Craquez pour<br />
les feuilles<br />
d’<strong>automne</strong> au<br />
Québec<br />
Un procédé chimique se cache derrière le cycle<br />
annuel des couleurs qui illuminent la région<br />
forestière des Grands Lacs et du Saint-Laurent.<br />
Connu sous le nom de sénescence automnale, ce<br />
processus est déclenché par la baisse des températures<br />
et le raccourcissement de la durée du jour,<br />
mais il peut aussi être fortement influencé par des<br />
facteurs environnementaux. De nombreux types<br />
de feuilles changent de couleur en raison de la<br />
réabsorption et de la dégradation de la chlorophylle<br />
ou de l’activation des caroténoïdes lorsque<br />
la chlorophylle disparaît. Cette transition crée un<br />
impressionnant spectacle d’ambres profonds, de<br />
cramoisi et d’écarlate au rythme du changement<br />
des saisons. Alors que l’été fait tranquillement place<br />
à l’<strong>automne</strong>, nous vous invitons à passer du temps<br />
dehors pour observer toutes ces belles couleurs<br />
qui vous entourent.<br />
LE HÊTRE À GRANDES<br />
FEUILLES<br />
Cet arbre indigène de grande<br />
stature évoque la grâce. Ses<br />
feuilles se reconnaissent à leur<br />
corps ovale allongé et à leurs bords dentelés.<br />
Elles passent habituellement d’un vert foncé<br />
à un mélange de tons bronze et or à mesure que<br />
l’<strong>automne</strong> avance. Fait curieux, le hêtre à grandes<br />
feuilles conserve parfois ses feuilles mortes en hiver.<br />
LE FRÊNE BLANC<br />
Ses feuilles ont la forme d’une<br />
plume et présentent de cinq à neuf<br />
folioles, mais généralement sept. À<br />
l’<strong>automne</strong>, elles passent du jaune à l’orange pour<br />
culminer en un pourpre rougeâtre, et laissent une<br />
cicatrice sur la branche lorsqu’elles tombent.<br />
L’ÉRABLE À SUCRE<br />
Contrairement à celles d’autres<br />
arbres, les feuilles de l’emblématique<br />
érable à sucre tournent au rouge<br />
pour se protéger des dommages du<br />
soleil lorsqu’elles sont appauvries<br />
en chlorophylle. Ces feuilles présentent cinq lobes<br />
et trois veines principales. En <strong>automne</strong>, la feuille se<br />
pare d’une coloration pastel plus claire sur sa<br />
face inférieure et d’une teinte plus vibrante sur<br />
sa face supérieure.<br />
Un regard neuf<br />
sur la nature<br />
Des jumelles ont donné à Mathias Brummer, spécialiste des<br />
sciences de l’environnement en Catalogne (Espagne), une<br />
nouvelle façon de se connecter à la nature.<br />
Ma relation avec la nature a commencé dès mon jeune âge. Quand j’étais<br />
enfant à Sant Josep de sa Talaia, sur l’île d’Ibiza, je passais mon temps<br />
à explorer et à jouer dehors. Depuis, ma relation avec la nature n’a jamais<br />
cessé d’évoluer. À vrai dire, interagir avec la nature était si normal dans ma jeunesse<br />
et pendant mes études universitaires que j’y pensais peu. Commencer à travailler<br />
dans un bureau après tout ce temps passé en plein air a toutefois marqué un grand<br />
changement dans ma vie quotidienne.<br />
Comme je passais mes journées assis à l’intérieur, je songeais à un moyen de<br />
garder en vie cette flamme qui m’avait toujours poussé à en apprendre plus sur la<br />
nature. La solution s’est présentée sous la forme d’une autre paire d’yeux ou, plus<br />
précisément, de lentilles. En 2021, j’ai acheté mes premières jumelles, et elles ont<br />
changé ma manière de voir la nature — littéralement.<br />
En camping, je ne trouve rien de plus paisible que de regarder les oiseaux voler<br />
autour de moi tôt le matin, à l’heure où le soleil se lève. Bien que je ne sois pas un<br />
expert en ornithologie, mes jumelles m’ont permis d’explorer la nature autrement et<br />
de découvrir ce qui se passe à l’extérieur de mon lieu de travail.<br />
L’un de mes meilleurs souvenirs a été ma randonnée sur El Camino de Santiago<br />
(chemin de Compostelle). J’ai porté le poids supplémentaire de mes jumelles pour<br />
pouvoir admirer la nature sur une partie de ce chemin de pèlerinage. L’oiseau le<br />
plus étonnant que j’ai observé a été un vautour percnoptère qui était sur sa route<br />
migratoire à travers l’Espagne. En gardant des jumelles à portée de main dans mon<br />
sac à dos, j’ai pu non seulement parfaire mes connaissances scientifiques, mais aussi<br />
voir d’un nouvel œil la nature qui m’entoure.1<br />
conservationdelanature.ca<br />
AUTOMNE <strong>2024</strong> 7
Des relations<br />
pour un<br />
monde<br />
résilient<br />
Établir des partenariats est la clé de la création<br />
de solutions concrètes fondées sur la nature<br />
pour faire face à la double crise de la perte de<br />
biodiversité et des changements climatiques.<br />
TEXTE Brian Banks IMAGES Jamie Lawson<br />
Si<br />
tu veux aller vite, dit le proverbe,<br />
marche seul. Mais si tu veux aller loin,<br />
marchons ensemble. Cela semble plus<br />
vrai que jamais pour Conservation de la nature<br />
Canada (<strong>CNC</strong>). Son équipe de direction et son<br />
personnel connaissent en effet très bien le rôle<br />
crucial des partenariats pour atteindre l’objectif<br />
ambitieux de doubler l’impact de l’organisation<br />
d’ici 2030, en contrant la double crise de la perte<br />
de biodiversité et des changements climatiques à<br />
l’aide de solutions concrètes fondées sur la nature.<br />
« Par le passé, nous avons surtout travaillé avec des<br />
propriétaires fonciers privés, des gouvernements<br />
provinciaux et aussi avec le fédéral. Maintenant,<br />
nous sommes beaucoup plus engagés auprès des<br />
peuples autochtones en appuyant leurs efforts<br />
de conservation », explique Lisa McLaughlin,<br />
vice-présidente des politiques et de la planification<br />
en conservation à <strong>CNC</strong>. « Nous collaborons<br />
aussi avec des administrations municipales, et<br />
également avec le secteur des affaires et des<br />
entreprises, qui ont un rôle important à jouer<br />
dans le financement de la conservation ainsi<br />
qu’une forte influence sur d’immenses pans<br />
géographiques de notre pays. »<br />
À mesure que ces relations se multiplient et se<br />
diversifient, <strong>CNC</strong> — le plus important organisme<br />
de protection de la nature au pays — étend la<br />
gamme des outils et capacités qu’il met à contribution<br />
pour trouver, protéger et entretenir des<br />
paysages résilients. Par exemple, <strong>CNC</strong> a recours aux<br />
meilleures données et technologies disponibles,<br />
reconnaît la valeur des savoirs autochtones, met<br />
à profit ses décennies d’expérience et son approche<br />
non partisane pour négocier des transferts de droits<br />
sur des ressources, et fait appel à de nouveaux<br />
domaines de financement en vendant des<br />
crédits carbone et en attirant les investissements<br />
d’entreprises dans la nature.<br />
« Nous sommes avant tout des “trouveurs de<br />
solutions”, poursuit Mme McLaughlin. La nature<br />
peut être la solution à bon nombre des défis<br />
auxquels nous sommes confrontés au Canada et<br />
partout dans le monde. »<br />
Pour faire connaître cette gamme diversifiée de<br />
solutions et de relations, nous avons demandé<br />
à des personnes et à des groupes qui travaillent<br />
avec <strong>CNC</strong> de décrire brièvement leur expérience.<br />
Dans leurs témoignages, présentés ci-dessous, ces<br />
partenaires parlent de l’importance des relations<br />
dans l’édification d’un monde résilient et expliquent<br />
comment et pourquoi ils choisissent de<br />
collaborer avec <strong>CNC</strong>.<br />
8 AUTOMNE <strong>2024</strong> conservationdelanature.ca
Philip Brass<br />
Conseiller autochtone auprès de <strong>CNC</strong><br />
Nation crie Peepeekisis, Saskatchewan<br />
<strong>CNC</strong> m’a contacté pour la première<br />
fois en 2017 ou 2018 pour y travailler<br />
en tant que conseiller autochtone et<br />
l’aider à nouer des relations avec des<br />
communautés des Premières Nations<br />
en Saskatchewan.<br />
Kate Lindsay<br />
Première vice-présidente et responsable<br />
du développement durable<br />
Association des produits forestiers<br />
du Canada (APFC)<br />
« Pour être en santé, nous avons<br />
besoin de milieux naturels sains.<br />
La Terre doit en effet être en bonne<br />
santé pour continuer à fournir<br />
tous les éléments qui sont essentiels<br />
à la société. Pour cela, nous devons<br />
travailler tous ensemble. Lorsque<br />
les gens unissent leurs efforts, nous<br />
constatons des résultats positifs<br />
pour le rétablissement des espèces<br />
en péril et des écosystèmes.<br />
En ce qui a trait à la conservation<br />
de la biodiversité au Canada,<br />
différents outils nous permettent de<br />
travailler collectivement au sein de<br />
la communauté de la conservation<br />
de la nature. La volonté de <strong>CNC</strong> de<br />
comprendre ses multiples outils a été<br />
très utile. Qu’il s’agisse de siéger avec<br />
l’APFC à des comités consultatifs<br />
fédéraux sur la conservation ou de<br />
travailler directement avec nos<br />
entreprises membres, <strong>CNC</strong> s’est<br />
montré disposé à voir quelle pourrait<br />
être la contribution du secteur<br />
forestier du Canada et à travailler avec<br />
toutes sortes de groupes pour obtenir<br />
d’importants résultats pour la<br />
biodiversité et la résilience. »<br />
Quand on m’a demandé ce que devrait<br />
être la contribution d’organisations<br />
comme <strong>CNC</strong> au processus de Réconciliation,<br />
j’ai répondu : « Depuis dix ans,<br />
on parle beaucoup de l’impact des<br />
pensionnats… mais personne ne<br />
mentionne que ces pensionnats ont<br />
été institués dans le cadre d’efforts<br />
délibérés du gouvernement canadien<br />
pour couper les Peuples autochtones<br />
de la terre et de leurs savoirs. » Cette<br />
coupure est ce qui continue de leur<br />
causer tant de souffrances; la lutte<br />
pour retrouver leur identité. Chez les<br />
Autochtones, l’identité repose entièrement<br />
sur le lien à la terre, aux lieux, et<br />
aux écosystèmes d’où nous venons.<br />
À travers le pays, <strong>CNC</strong> et d’autres<br />
organisations possèdent et gèrent des<br />
millions d’hectares d’habitats naturels<br />
magnifiques. Ce sont des terres qui<br />
détiennent la plus grande valeur aux<br />
yeux des peuples autochtones pour ce<br />
qui est de recréer leur lien au territoire.<br />
Ces organisations ont donc la responsabilité<br />
de veiller à ce que les Autochtones<br />
aient un accès sans entrave à ces lieux<br />
et à ce qu’ils soient autorisés à y chasser<br />
et à exercer d’autres pratiques. Nous, les<br />
Peuples autochtones, et nos pratiques<br />
faisons partie de l’évolution de ces<br />
écosystèmes, parce que nous sommes<br />
ici depuis des millénaires. Par conséquent,<br />
aucun écosystème n’est intact<br />
à moins d’y réintégrer les personnes<br />
qui en ont été arrachées de force.<br />
Sur le plan écologique, assurer une<br />
véritable diversité est ce qui crée la<br />
résilience. Au Canada, la Réconciliation<br />
est associée à la santé de la terre et des<br />
eaux. La grande parodie du<br />
AUTOMNE <strong>2024</strong> 9
colonialisme est la destruction<br />
d’écosystèmes et de cultures<br />
autochtones, qui sont par définition<br />
écologiquement résilientes<br />
et durables.<br />
Notre premier projet avec <strong>CNC</strong> s’est<br />
déroulé à l’Aire de conservation des<br />
prairies patrimoniales Old Man on<br />
His Back, dans le sud-ouest de la<br />
Saskatchewan. <strong>CNC</strong> y gère environ<br />
5 300 hectares de prairies indigènes<br />
et un troupeau de bisons. Nous<br />
nous demandions comment gérer<br />
ce troupeau en tenant compte des<br />
savoirs et de l’éthique autochtones<br />
qui entourent la relation à cet animal.<br />
J’ai constitué un groupe consultatif<br />
autochtone composé entre autres<br />
d’Aîné(e)s. Nous avons discuté de ce<br />
que la perte du bison signifie pour les<br />
Autochtones. Ce fut une expérience à<br />
la fois très profonde et très fructueuse,<br />
puisque nous avons trouvé une<br />
meilleure stratégie pour gérer le<br />
troupeau. Maintenant, nous tenons<br />
une cérémonie avant le rassemblement<br />
et la manipulation des bêtes.<br />
Nous installons aussi des huttes de<br />
sudation. Je collabore également<br />
avec différentes communautés des<br />
Premières Nations qui veulent<br />
reconstituer leur propre troupeau;<br />
nous les aidons en leur fournissant<br />
des animaux vivants. D’autres<br />
souhaitent ramener un animal dans<br />
leur communauté pour sa viande,<br />
ce qui est aussi possible. Mais tout se<br />
fait lors de cérémonies, c’est-à-dire<br />
en témoignant notre respect et notre<br />
révérence pour l’animal.<br />
Depuis, nous avons eu beaucoup de<br />
succès à travailler avec les membres<br />
du personnel de <strong>CNC</strong> en Saskatchewan.<br />
J’ai pu travailler très étroitement<br />
avec plusieurs d’entre eux en leur<br />
faisant vivre l’expérience des<br />
cérémonies et de la culture autochtones.<br />
Nous avons pu partager et<br />
avons ensuite vécu plusieurs<br />
expériences positives favorisant<br />
l’amitié et la confiance.<br />
Nathan Phinney<br />
Producteur et président<br />
R. A. Farm Inc.<br />
Nous constatons dans notre région, et ailleurs au<br />
pays, que les milieux de prairies cultivés, indigènes<br />
ou vivaces commencent à disparaître très vite.<br />
Cela entraîne d’énormes pertes [de résilience pour<br />
les paysages]. Voilà quelque chose que l’industrie<br />
bovine veut empêcher.<br />
Notre ferme loue beaucoup de terres dont les<br />
propriétaires sont associés à <strong>CNC</strong> et qui ont établi<br />
un ensemble de lignes directrices pour l’élevage<br />
afin de protéger les espèces en péril. Nous aimons<br />
leur travail ainsi que leur approche, qui est compatible<br />
avec nos propres activités. L’une des espèces<br />
qui vivent dans les prairies autour d’ici est le goglu<br />
des prés. Puisque cet oiseau fait son nid au sol, nous<br />
repoussons le moment de la coupe de ces champs<br />
pour laisser aux oisillons le temps de quitter le nid.<br />
Là où nous faisons du pâturage rotatif, nous<br />
concentrons le bétail dans une zone en particulier<br />
pendant la saison de nidification, et nous ne<br />
déplaçons pas le troupeau tant que les oisillons<br />
n’ont pas pris leur envol.<br />
Les prairies sont un élément essentiel de l’infrastructure<br />
d’élevage des bovins de boucherie. En même<br />
temps, c’est l’un des seuls produits agricoles qui<br />
offre une diversité biologique complète du côté<br />
de la production. Nous avons prouvé ici et partout<br />
au pays qu’avec une bonne gestion, tout peut<br />
fonctionner et perdurer.<br />
Pour ce faire, il faut des<br />
partenaires clés<br />
comme <strong>CNC</strong> qui sont<br />
prêts à travailler avec<br />
le milieu agricole<br />
pour que tout le<br />
monde aille dans la<br />
même direction.<br />
Andrea Barrack<br />
Tara Shea<br />
Vice-présidente,<br />
Affaires réglementaires<br />
et autochtones<br />
Association minière du<br />
Canada (AMC)<br />
L’AMC administre Vers le<br />
développement minier durable, un<br />
programme de durabilité axé sur le rendement qui aide<br />
les sociétés minières à transformer leurs engagements<br />
environnementaux et sociaux en action sur le terrain.<br />
Un élément important du programme est notre norme<br />
relative à la conservation de la biodiversité. L’attention<br />
portée au rôle de notre secteur dans la protection et la<br />
conservation de la nature et la mobilisation des différents<br />
secteurs de la société n’est pas un phénomène nouveau,<br />
mais il connaît une nouvelle intensité depuis quelques<br />
années. Les gestionnaires environnementaux de sites<br />
miniers comprennent depuis longtemps l’importance<br />
d’une gestion efficace de la biodiversité, mais cette prise<br />
de conscience continue de s’étendre au sein de nos<br />
sociétés membres pour inclure l’équipe de gestion élargie,<br />
les relations publiques et les conseils d’administration.<br />
J’ai l’impression que la participation nombreuse à la<br />
COP15 [Conférence des parties à la Convention sur la<br />
diversité biologique] à Montréal, en 2022, et les collaborations<br />
qui en ont découlé ont contribué à faire avancer<br />
les choses. Pour ceux d’entre nous qui y travaillent depuis<br />
un certain temps, c’est très enthousiasmant de voir que<br />
l’attention et l’intérêt grandissent.<br />
Notre travail avec <strong>CNC</strong> est axé sur les orientations<br />
fédérales. Actuellement, nous travaillons ensemble<br />
au Comité consultatif sur la nature, qui a conseillé le<br />
gouvernement dans l’élaboration de la Stratégie pour<br />
la nature de 2030. <strong>CNC</strong> apporte au dialogue la volonté<br />
de trouver des solutions et de collaborer avec d’autres,<br />
et il a une expérience efficace sur le terrain. Si une<br />
société membre de l’AMC songe à un projet et qu’elle<br />
n’a pas déjà établi de relations, je n’hésiterais pas<br />
à recommander <strong>CNC</strong> comme partenaire potentiel.<br />
Première vice-présidente, Développement durable et Responsabilité sociale<br />
RBC<br />
Étant au cœur de l’économie, nous réfléchissons aux questions suivantes : comment<br />
mobiliser notre capital pour aider à soutenir une transition vers une économie<br />
carboneutre? Quels sont les partenaires qui peuvent faciliter cette transition? Quelles<br />
solutions peuvent nous conduire vers un avenir plus vert? Nous accordons beaucoup<br />
d’attention aux solutions fondées sur la nature.<br />
Les changements climatiques ont d’importants impacts sur la biodiversité. Or l’inverse peut être vrai, et c’est ce<br />
qui nous enthousiasme, puisque la biodiversité et les solutions fondées sur la nature peuvent aider à atténuer les<br />
effets des changements climatiques. Qu’il s’agisse d’accroître les espaces naturels pour capter et stocker plus de<br />
dioxyde de carbone ou encore d’améliorer les écosystèmes pour stimuler la résilience et l’adaptation des milieux,<br />
les solutions sont encourageantes.<br />
Pour nous, la résilience signifie protéger les écosystèmes et les milieux dans lesquels nous vivons. C’est là que <strong>CNC</strong><br />
joue un rôle actif. Il apporte une richesse d’expérience et de crédibilité, et ses équipes sont très actives sur le terrain.<br />
Elles sont profondément engagées au sein des communautés et accomplissent de grandes choses.<br />
10 AUTOMNE <strong>2024</strong><br />
conservationdelanature.ca
Cornelia Rindt<br />
Directrice, utilisation des terres domestiques<br />
Ostrom Climate Solutions (Canada) Inc.<br />
Au sein de mon organisation, j’aide à<br />
développer des projets de séquestration<br />
de carbone en milieu forestier. Ces<br />
projets génèrent des crédits carbone en<br />
éliminant le CO2 de l’atmosphère ou en<br />
empêchant son rejet, et ce, pour lutter<br />
contre les changements climatiques.<br />
Notre travail avec <strong>CNC</strong> consiste à fournir<br />
du soutien technique à ses projets<br />
de crédits carbone en Ontario et en<br />
Colombie-Britannique. <strong>CNC</strong> peut<br />
ainsi vendre des crédits carbone et<br />
réinvestir les recettes dans des<br />
projets de conservation.<br />
Annika Keeley<br />
Scientifique principale en conservation<br />
Center for Large Landscape Conservation<br />
Nous travaillons avec <strong>CNC</strong> et Parcs Canada à un grand projet de recherche appliquée<br />
pour répondre à la question : quelles modalités de gestion des terres permettent de<br />
garantir la connectivité des milieux naturels pour les espèces?<br />
Nous avons six aires d’étude au Canada dans cinq écozones. Dans chacune d’elles, nous étudions principalement<br />
quatre ou cinq espèces, ou groupes d’espèces : certaines grandes et d’autres petites, certaines qui peuvent se<br />
déplacer sur de longues distances, et d’autres qui ne le peuvent pas. Cette recherche est financée en partie par<br />
le Programme pour la résilience des paysages, un partenariat lancé l’an dernier par <strong>CNC</strong> et Parcs Canada pour<br />
appuyer la conservation à proximité des parcs nationaux. Le programme investira 30 millions $ — les fonds<br />
provenant à parts égales de Parcs Canada et <strong>CNC</strong> — pour protéger jusqu’à 30 000 hectares à proximité de parcs<br />
nationaux afin d’aider à connecter les habitats et à créer des zones tampons protégées autour des parcs. Notre<br />
recherche est conçue pour que les résultats puissent être appliqués à ces paysages pour guider les pratiques<br />
futures de conservation et de gestion.<br />
Cette recherche est importante parce que la conservation et la restauration de la connectivité et de la perméabilité<br />
à travers les grands paysages sont essentielles pour maintenir leur résilience face aux changements climatiques<br />
et à d’autres pressions anthropiques. Les espèces doivent pouvoir se déplacer. La connectivité le leur permet<br />
— elle est comme un filet de sécurité à long terme qui aide à maintenir les écosystèmes en bonne santé.<br />
Ce qui me réjouit, c’est que les résultats du projet orienteront les solutions qui permettront de protéger plus de<br />
nature, et de le faire mieux et plus vite. Et c’est ce dont nous avons besoin de nos jours. L’objectif de ma carrière<br />
scientifique est d’aider à maintenir ou à ramener la diversité et l’abondance de la vie sur notre planète. Le monde<br />
est tellement plus vivable, plus beau et plus passionnant si nous prenons soin de la nature. Et nous avons là une<br />
magnifique occasion de le faire avec des partenaires incroyables au Canada.<br />
conservationdelanature.ca<br />
En Ontario, nous avons travaillé à la<br />
conception et à la mise en œuvre du<br />
projet initial de crédits carbone. Nous<br />
gérons présentement la validation et la<br />
vérification du projet pour garantir que<br />
les crédits répondent aux exigences<br />
de la norme choisie. Nous travaillons en<br />
étroite collaboration avec l’équipe de<br />
<strong>CNC</strong> en Ontario pour mieux comprendre<br />
les objectifs de gestion des biens et<br />
maintenir l’alignement entre les activités<br />
sur le terrain et les variations du stock de<br />
carbone dues à des changements dans<br />
les pratiques de gestion des terres.<br />
L’urgence des changements climatiques<br />
rend ce marché très dynamique. Nous<br />
avons la responsabilité de faire preuve<br />
d’une grande prudence pour nous<br />
assurer que nos projets soient les<br />
meilleurs et qu’ils aient une incidence<br />
réelle et importante sur la réduction et<br />
l’élimination des émissions CO2 dans<br />
l’atmosphère. C’est ce qui nous guide et<br />
qui constitue le but des crédits carbone.<br />
Ce mécanisme de transition à court<br />
terme donne à la société le temps<br />
d’appuyer des solutions fondées sur la<br />
nature, pendant que nous cherchons à<br />
mettre au point de meilleures technologies<br />
qui mèneront à une décarbonisation<br />
à long terme.<br />
AUTOMNE <strong>2024</strong> 11
PROFIL<br />
D’ESPÈCE<br />
Le plongeon<br />
huard<br />
Espèce d’eau douce emblématique du Canada, le plongeon huard<br />
se reconnaît surtout par son cri émouvant.<br />
ISTOCK.<br />
12 AUTOMNE <strong>2024</strong> conservationdelanature.ca
DESCRIPTION<br />
Le plongeon huard est un grand<br />
oiseau aquatique. Il a la tête noire<br />
et lustrée, un collier rayé noir et blanc<br />
caractéristique, le dos parsemé de taches noires<br />
et blanches disposées en damier et le ventre<br />
et le dessous des ailes blancs.<br />
Grâce à ses pattes palmées, positionnées à l’arrière<br />
de son corps, il est un excellent nageur et<br />
plongeur. Elles font cependant de lui un piètre<br />
marcheur... L’adulte pèse de<br />
2,5 à 6 kg et mesure près de 1 mètre<br />
de l’extrémité de son bec à celle<br />
de ses pattes.<br />
Que fait <strong>CNC</strong> pour protéger<br />
l’habitat de cette espèce?<br />
Partout au pays, Conservation de la nature Canada<br />
(<strong>CNC</strong>) protège de nombreux paysages naturels dotés<br />
de lacs ou de rivières d’eau douce qui offrent au<br />
plongeon huard un habitat de choix pour nicher. L’un<br />
de ces endroits est le Shaw Wilderness Park, au cœur<br />
de Halifax (Nouvelle-Écosse), un véritable refuge pour<br />
la faune et pour la population.<br />
Fondé en 2020 par <strong>CNC</strong>, le Shaw Group et la Municipalité<br />
régionale d’Halifax, le parc et ses milieux naturels<br />
sont protégés contre tout aménagement futur, ce qui<br />
donne aux espèces qui fréquentent le lac Williams,<br />
comme le plongeon huard, la chance de prospérer. Les<br />
embarcations à moteur y sont interdites, ce qui réduit<br />
les perturbations. Ajoutons que le bassin versant et<br />
la longue zone littorale peu développée favorisent la<br />
qualité globale de l’eau dans la région.<br />
HABITAT ET<br />
AIRE DE RÉPARTITION<br />
Cet oiseau se trouve dans la plupart des<br />
régions du Canada, sur ou à proximité des<br />
lacs. En Amérique du Nord, en dehors de la<br />
saison de reproduction, on les trouve le long du<br />
Pacifique (à partir de l’Alaska) et de l’Atlantique<br />
(à partir de l’île de Terre-Neuve), et ce, jusqu’au<br />
Mexique. Des populations se trouvent<br />
également dans certaines régions<br />
d’Europe occidentale, près des îles<br />
Britanniques par exemple.<br />
Shaw Wilderness Park, N.-É.<br />
Des biologistes et des bénévoles de la Williams Lake<br />
conservation Company (WLCC) ont observé au fil des<br />
ans des plongeons huards qui ont produit des poussins<br />
avec un succès variable. Au cours des dernières années,<br />
les fluctuations majeures du niveau d’eau dues à la<br />
présence d’un barrage endommagé ont rendu très<br />
difficile pour les plongeons huards d’élever leurs petits<br />
sur le lac Williams. Mentionnons que des données sur<br />
les individus sont soumises annuellement à l’Inventaire<br />
canadien des plongeons huards, un programme<br />
d’Oiseaux Canada.<br />
ANDREW HERYGERS/<strong>CNC</strong>.<br />
MENACES<br />
Le plongeon huard est sensible<br />
à la qualité de l’eau. Il préfère les lacs<br />
froids et clairs, car il poursuit ses proies<br />
à la vue. La perturbation de<br />
son habitat, surtout par les bateaux<br />
motorisés, peut le chasser hors de son<br />
nid ou séparer les poussins de leurs<br />
parents, ce qui rend les œufs ou<br />
les juvéniles vulnérables<br />
aux prédateurs.<br />
La WLCC surveille aussi la qualité et le niveau de<br />
l’eau du lac et transmet ses données au programme<br />
LakeWatchers de la Municipalité. De plus, <strong>CNC</strong> mène<br />
des activités d’intendance, notamment en aidant à gérer<br />
les sentiers, en éliminant les espèces envahissantes et<br />
en signalant tout problème à la Municipalité. L’apport<br />
conjugué d’organisations et de différents programmes<br />
nous aide à surveiller la santé du Shaw Wilderness Park<br />
et guide la Municipalité dans ses décisions et ses<br />
mesures relativement aux habitats naturels du parc.<br />
Comme les plongeons huards ont besoin d’un<br />
écosystème sain pour se reproduire, le succès de notre<br />
travail se mesure à leur capacité à se reproduire. La<br />
présence même de plongeons huards nicheurs sur<br />
le lac est remarquable vu sa proximité d’une zone<br />
urbaine. Les communautés et les organisations qui<br />
profitent du parc espèrent que la nature y prospérera<br />
à long terme, soutenant le cycle de vie d’espèces<br />
comme le plongeon huard.1<br />
conservationdelanature.ca<br />
AUTOMNE <strong>2024</strong> 13
<strong>CNC</strong><br />
À L’ŒUVRE<br />
1<br />
Un bénéfice mutuel pour les éleveuses<br />
et éleveurs, et pour la nature<br />
CALGARY, ALBERTA<br />
1<br />
MERCI!<br />
Votre appui a permis la réalisation de<br />
ces projets. Pour en savoir plus, visitez<br />
conservationdelanature.ca/nous-trouver<br />
2<br />
Conservation de la nature Canada (<strong>CNC</strong>) a lancé une campagne<br />
publique pour protéger le magnifique ranch Bob Creek dans le sud de<br />
la province. Situé à l’ouest de Claresholm, le ranch Bob Creek s’étend<br />
sur 1027 hectares de paysages à couper le souffle en bordure de la rivière<br />
Oldman. Il comprend des prairies de fétuque, des crêtes montagneuses et<br />
des zones riveraines, et est connecté aux ruisseaux Bob et Coyote.<br />
La région abrite des wapitis, des cerfs, des ours bruns, des grenouilles<br />
maculées de Columbia et des aigles royaux, ainsi que des pins flexibles<br />
et de la fétuque de l’Altaï, une graminée emblématique de la province. Les<br />
prairies de fétuque sont l’une des écorégions les plus menacées et les<br />
moins protégées au Canada. On estime qu’il reste moins de 20 % de leur<br />
superficie dans les contreforts.<br />
Le projet est un partenariat avec la Waldron Grazing Co-operative, avec<br />
laquelle <strong>CNC</strong> collabore depuis 2013. Ensemble, les partenaires ont protégé<br />
les ranchs Waldron et King par des accords de conservation. Grâce au projet,<br />
le ranch Bob Creek préservera son état naturel et les 78 membres de la<br />
coopérative pourront continuer d’utiliser la terre pour le pâturage du bétail.<br />
« Non seulement c’est un avantage pour les actionnaires, qui obtiennent<br />
l’accès à plus de pâturage, mais c’est aussi une victoire pour l’Alberta et<br />
la communauté locale de savoir que cette terre restera telle qu’elle est<br />
aujourd’hui, soit un milieu de vie pour une multitude d’espèces sauvages<br />
tant animales que végétales et pour le bétail, qui entretient les graminées<br />
qu’elle produit », a déclaré Frank Welsch, président du conseil d’administration<br />
de la Waldron Grazing Co-operative.<br />
<strong>CNC</strong> est à recueillir 10 millions $ pour terminer ce projet et ceux d’autres<br />
étendues herbeuses dans le cadre de son Plan d’action pour la conservation<br />
des prairies. Publié en 2023, ce plan audacieux et sans précédent vise à<br />
conserver et prendre soin de l’un des écosystèmes les plus en voie de disparition<br />
et les moins protégés au monde. Le plan permettra de conserver plus<br />
de 500000 hectares d’ici 2030 — soit l’équivalent des prairies qui disparaîtront<br />
si nous n’agissons pas maintenant pour protéger celles qui restent.<br />
Pour en savoir plus : lesprairies.ca.<br />
SEAN FEAGAN/<strong>CNC</strong>.<br />
Bob Creek Ranch, Alb.;<br />
Médaillon : exploitants de ranch<br />
de la coopérative Waldron.<br />
14 AUTOMNE <strong>2024</strong> conservationdelanature.ca
La recherche<br />
sur les<br />
pollinisateurs<br />
met en lumière<br />
l’avenir des<br />
aliments<br />
Partout dans le monde,<br />
des données montrent que<br />
les populations de pollinisateurs<br />
sauvages sont en<br />
déclin en raison de la perte<br />
d’habitat, des changements<br />
climatiques, de l’utilisation<br />
de pesticides et d’autres<br />
facteurs. Cette situation<br />
menace la production<br />
alimentaire et les moyens de<br />
subsistance des agricultrices<br />
et agriculteurs.<br />
RYAN M. BOLTON; <strong>CNC</strong>; ISTOCK.<br />
De haut en bas : tortue géographique;<br />
Bolton-Est, QC; petit blongios.<br />
2<br />
Feu vert pour la faune<br />
en déplacement<br />
GRANBY, QUÉBEC<br />
<strong>CNC</strong> protège maintenant 310 hectares de plus<br />
en Estrie et en Montérégie. L’un des sites, situé<br />
à Bolton-Est près de la rivière Missisquoi, abrite<br />
plusieurs espèces en péril : la salamandre sombre du Nord<br />
et la salamandre pourpre de ruisseau, la tortue des bois, la<br />
petite chauve-souris brune et la pipistrelle de l’Est.<br />
Un projet au mont Peavey, près du lac Memphrémagog, relie<br />
d’autres terres protégées et contribue à une aire non fragmentée<br />
de 10000 hectares, élargissant ainsi le corridor faunique.<br />
La protection par <strong>CNC</strong> d’un milieu humide clé dans la tourbière de l<br />
a rivière aux Brochets est une bonne nouvelle pour des espèces en péril<br />
comme la tortue géographique, la tortue-molle à épines et le petit blongios<br />
— un membre de la famille des hérons. Parmi les autres espèces qui tirent<br />
des bienfaits de ces projets, on compte le lynx du Canada et l’ours noir.<br />
<strong>CNC</strong> remercie les propriétaires fonciers qui se préoccupent de conserver la nature, les donatrices<br />
et donateurs individuel(le)s, ses partenaires financiers au Zoo de Granby, le gouvernement du Québec,<br />
notamment par l’intermédiaire du Projet de partenariat pour les milieux naturels et Accélérer la<br />
conservation dans le sud du Québec, et Environnement et Changement climatique Canada, pour son<br />
Programme de conservation du patrimoine naturel.<br />
Pour en savoir plus : conservationdelanature.ca/zoogranby.<br />
Trois projets<br />
en cours au<br />
Québec ont un<br />
impact positif<br />
sur la faune<br />
sauvage<br />
Malgré ces données, de<br />
nouvelles informations<br />
encourageantes indiquent<br />
que, grâce à des actions de<br />
conservation et à d’autres<br />
incitatifs, le Canada peut<br />
profiter de la promotion de<br />
la protection des pollinisateurs<br />
sauvages.<br />
Selon des recherches<br />
publiées dans Environmental<br />
Research Letters en mars<br />
<strong>2024</strong>, les pollinisateurs<br />
sauvages aident à répondre<br />
aux besoins nutritionnels de<br />
l’équivalent de 24,4 millions<br />
de personnes par an<br />
et génèrent près de<br />
2,8 milliards $ de revenus<br />
pour les agricultrices et<br />
agriculteurs. L’étude fait état<br />
de possibilités intéressantes<br />
en Ontario, au Manitoba et<br />
en Colombie-Britannique.<br />
Gabriela Duarte et Richard<br />
Schuster de <strong>CNC</strong> ont<br />
contribué à ces travaux<br />
de recherche avec leurs<br />
collègues de l’Université de<br />
la Colombie-Britannique.<br />
EN SAVOIR PLUS :<br />
conservationdelanature.ca
UNE FORCE POUR<br />
LA NATURE<br />
La réciprocité<br />
dans la tradition<br />
Grande Cheffe de la Nation Crie d’Eeyou Istchee, Mandy Gull-Masty exerce un<br />
leadership en conservation qui est ancré dans l’histoire et les traditions du territoire.<br />
LINCOLN INSTITUTE OF LAND POLICY.<br />
16 AUTOMNE <strong>2024</strong> conservationdelanature.ca
CHRISTIE MACDONALD/<strong>CNC</strong>.<br />
À<br />
Eeyou Istchee<br />
(Cri : )<br />
est le territoire traditionnel et<br />
la patrie des Cris du nord du<br />
Québec (la terre d’Eeyou/ des<br />
Eenou). Pour en savoir plus :<br />
travers les forêts et tourbières<br />
caractéristiques d’Eeyou Istchee<br />
(prononcé « ii-you is-tchi »), une<br />
ligne de piégeage familiale se faufile.<br />
Elle est indissociable de la terre, de l’histoire, des récits et de l’avenir de la<br />
famille qui l’entretient depuis des générations. Symbole de lien durable, la<br />
ligne de piégeage possède une importance culturelle, écologique et familiale<br />
pour la Grande Cheffe Mandy Gull-Masty et les membres de sa famille.<br />
Représentation littérale de la lignée familiale, de liens nouveaux et des<br />
générations à venir, la ligne de piégeage se faufile sur le territoire et dans<br />
la vie de ses proches.<br />
« Nous sommes connectés à chaque partie de notre ligne de piégeage,<br />
raconte-t-elle. Nous y emmenons nos enfants. Nous y pêchons. Nous y<br />
chassons aussi. C’est probablement mon lieu préféré, puisque j’en conserve<br />
tellement de souvenirs avec mes enfants. Puisque mon mari vient<br />
d’une autre communauté, il est très important pour moi qu’il y passe du<br />
temps et qu’il fasse lui aussi partie de ce système de piégeage. »<br />
Mme Gull-Masty, qui cueillait des bleuets sur la terre avec sa grandmère<br />
quand elle était fillette et qui parcourait la ligne de piégeage avec<br />
son grand-père, maître piégeur, représente maintenant sa communauté<br />
à titre de première femme élue Grande Cheffe de la Nation Crie d’Eeyou<br />
Istchee. Et elle continue aujourd’hui d’écrire l’histoire de ces terres.<br />
« J’ai appris de ma grand-mère les compétences qu’une Crie doit avoir…<br />
plus précisément, son rôle au camp. Voir mon grand-père — un chasseur et<br />
trappeur à temps plein, qui avait élevé beaucoup de ses enfants dans le<br />
bois — et sa relation avec la ligne de piégeage m’a fait comprendre qu’il<br />
existe en fait beaucoup de rôles. Leur lien étroit avec Eeyou Istchee est ce<br />
qui m’influence le plus en tant que dirigeante. Certains des enseignements<br />
d’Eeyou Istchee m’ont vraiment façonnée comme personne. »<br />
Mme Gull-Masty est une figure de proue de la revitalisation de la<br />
langue crie sur le territoire d’Eeyou Istchee. Elle signale que la langue<br />
est essentielle à la communauté en raison de sa réciprocité avec le<br />
territoire cri : les deux vont de pair.<br />
« Je suis très chanceuse d’être devenue Grande Cheffe après avoir<br />
été Grande Cheffe adjointe. J’ai eu l’occasion de renouer avec ma langue<br />
et avec mes souvenirs les plus chers, c’est-à-dire les étés passés avec mes<br />
grands-parents, où ils ne me parlaient qu’en langue crie. Je pense que<br />
c’est vraiment ce qui m’a fait comprendre et réaliser l’importance de<br />
connaître la langue, l’identité et le lien à notre territoire. »<br />
Au nom de sa communauté, Mandy Gull-Masty a fait progresser le<br />
travail de conservation amorcé par les générations qui l’ont précédée à<br />
Eeyou Istchee. Sous le signe de la collaboration avec les représentantes<br />
et représentants des collectivités cries voisines, son leadership au sein<br />
du gouvernement de la Nation Crie (GNC) a permis de concrétiser la<br />
Stratégie régionale de conservation crie. En se portant à la défense de<br />
la terre, elle a permis la protection de plus de 39 000 kilomètres carrés. La<br />
Grande Cheffe continue de militer pour la terre et de piloter le GNC dans<br />
la mise en œuvre d’autres objectifs de conservation et dans le maintien<br />
des dirigeantes et dirigeants cris au premier plan de l’établissement et<br />
de la gestion d’aires protégées. Elle explique que les connaissances<br />
millénaires du territoire — autrefois la responsabilité du maître piégeur<br />
qui utilisait les mêmes lignes de piégeage<br />
qu’elle et sa famille utilisent encore de nos jours<br />
— guident sa communauté pour ce qui est des<br />
mesures à prendre pour protéger les terres.<br />
« Deux raisons expliquent que nous<br />
ayons adopté une approche autant culturelle<br />
qu’écologique en conservation, dit-elle.<br />
Premièrement, nous croyons qu’il faut protéger<br />
le mode de vie et l’identité cris, ainsi que notre<br />
lien au territoire, en intégrant la composante<br />
culturelle qui garantit la pérennité du mode de<br />
vie cri pour nos futurs membres. »<br />
Pour son leadership sur le territoire, la<br />
Grande Cheffe — au nom du GNC et à titre de<br />
représentante des efforts des maîtres piégeurs,<br />
des utilisateurs et utilisatrices des terres et des<br />
communautés d’Eeyou Istchee — a reçu le<br />
Visionary Conservation Award du Réseau<br />
international pour la conservation des terres<br />
(International Land Conservation Network<br />
- ILCN). Le travail du GNC démontre l’impact<br />
et l’importance de la conservation collaborative,<br />
qui conjugue différentes méthodes fondées<br />
sur des données probantes et qui crée des liens<br />
sur la terre et avec la terre.<br />
« Je pense que le partenariat a été une<br />
formule gagnante, explique-t-elle. Nous avons<br />
rassemblé de nombreuses personnes autour<br />
de cette excellente idée, puis avons cherché le<br />
soutien de nos partenaires. Conservation de<br />
la nature Canada a été un partenaire majeur,<br />
tout comme les autres ONG qui ont contribué<br />
à ce processus. Nous avons mis la science à<br />
profit. Nous avons créé des modèles de données<br />
en examinant les sources d’eau, les types<br />
d’eau et les eaux en amont du territoire, en<br />
calculant et en équilibrant les connaissances<br />
scientifiques occidentales et les savoirs<br />
culturels autochtones traditionnels. J’estime<br />
que c’est une formule unique. »<br />
Mandy Gull-Masty a grandi sur ces terres<br />
et y élève maintenant sa propre famille le long<br />
de lignes de piégeage qu’elle connaît bien. Un<br />
autre endroit, qu’elle a affectueusement surnommé<br />
« Serendipity Bay », lui sert de lieu de<br />
répit. C’est un lieu de guérison et de réflexion<br />
pour elle et sa famille. C’est là que s’entrecroisent<br />
les deux chemins de vie de la Grande<br />
Cheffe : celui de dirigeante de la communauté<br />
et celui de mère. Les enseignements intergénérationnels,<br />
la réciprocité avec la terre et<br />
sa communauté d’Eeyou Istchee sont ce qui<br />
la guide dans son rôle de Grande Cheffe et de<br />
conservationniste.<br />
« Ce lien [à la terre] est très personnel,<br />
intime et intense. Je pense que c’est l’un des<br />
facteurs les plus déterminants et mon rôle de<br />
mère qui me pousse à vouloir servir ma Nation.<br />
L’attention et la compassion pour nos familles<br />
sont des éléments que je voulais mettre de<br />
l’avant dans mon rôle de dirigeante. »1<br />
conservationdelanature.ca<br />
AUTOMNE <strong>2024</strong> 17
GRANDEUR<br />
NATURE<br />
Revenir de loin<br />
Par Jim Levitt, directeur, International Land Conservation Network (ILCN), Lincoln Institute of Land Policy,<br />
et Chandni Navalkha, directrice associée, Sustainably Managed Land & Water Resources, Lincoln Institute of Land Policy.<br />
Les premières rencontres ont parfois de<br />
quoi émerveiller, surtout quand il s’agit<br />
d’un adorable wallaby de 6 centimètres<br />
qui vient tout juste de naître, et qui est bien<br />
au chaud dans la poche de sa mère.<br />
Au printemps dernier, mon associée<br />
Chandni et moi sommes allés à Melbourne,<br />
en Australie, pour une réunion du Réseau<br />
international pour la conservation des terres<br />
(ILCN). Après la réunion, Sam Marwood,<br />
PDG de la Fondation Odonata, et Annette<br />
Rypalski, directrice de la biodiversité de<br />
cette même fondation nous ont invités à la<br />
réserve de conservation et de recherche du<br />
mont Rothwell gérée par Odonata, pour en<br />
savoir plus sur le rétablissement du wallaby<br />
des rochers à queue en brosse.<br />
Ce petit marsupial, qui a toujours peuplé<br />
l’est et le sud-est de l’Australie, connaît un<br />
déclin généralisé en raison de la chasse pour<br />
sa fourrure et de la prédation par les renards,<br />
ce qui en fait une espèce en voie de<br />
disparition dans l’État de Victoria. Les feux<br />
de brousse de 2019 et 2020 les ont presque<br />
anéantis, laissant à peine une quarantaine<br />
d’individus survivants dans la région. La<br />
réserve est l’un des rares endroits consacrés<br />
à leur repeuplement. On y trouve un exclos<br />
où les wallabies et d’autres espèces indigènes<br />
peuvent s’épanouir en toute sécurité dans<br />
leur habitat naturel.<br />
Une autre activité de cette journée consistait<br />
à poser quelques pièges (sans danger<br />
pour les wallabies) au sommet du mont<br />
Rothwell afin d’implanter des micropuces sur<br />
les individus qui n’avaient pas encore été<br />
identifiés et suivis (en les libérant ensuite).<br />
Après le souper, nous avons remonté jusqu’au<br />
sommet avec nos lampes frontales pour inspecter<br />
les pièges et y avons trouvé une jeune<br />
femelle non marquée. Après un examen rapide<br />
et l’implantation d’une micropuce, Mme<br />
Rypalski a demandé si nous voulions voir si<br />
elle avait un bébé. Chandni et moi n’avions<br />
jamais vu de petit wallaby, et encore moins de<br />
près! Nous n’oublierons jamais cet instant où<br />
nous avons vu le plus adorable bébé wallaby<br />
encore tout rose blotti dans la poche de sa<br />
mère. Ce moment représentait tellement bien<br />
le travail de la Fondation pour soutenir la diversité<br />
génétique et la survie de cette espèce<br />
en voie de disparition.<br />
Après avoir relâché la femelle et qu’on la<br />
regardait bondir au loin sous le ciel étoilé,<br />
nous avons ressenti beaucoup d’espoir et<br />
d’inspiration pour le plan de 200 ans établi<br />
par nos pairs pour aider cette espèce<br />
à prospérer.<br />
Une partie du programme de rétablissement<br />
du wallaby comprend une approche<br />
novatrice pour réfléchir de manière holistique<br />
au rôle des espèces, de la terre, de<br />
la résilience climatique et du patrimoine<br />
culturel, ainsi que des liens qui les unissent.<br />
La stratégie de la Fondation Odonata<br />
est un excellent exemple de conservation<br />
à l’échelle du paysage — une stratégie<br />
essentielle à la sauvegarde des habitats et<br />
des espèces.1<br />
MATHIAS BALL.<br />
18 AUTOMNE <strong>2024</strong> conservationdelanature.ca
Protéger<br />
l’habitat du<br />
poisson<br />
en C.-B.<br />
VOTRE<br />
IMPACT<br />
En permettant l’acquisition de l’île Carey, votre<br />
soutien favorise la conservation de certains<br />
des habitats aquatiques les plus importants du<br />
fleuve Fraser. Située dans le Lower Mainland de<br />
la Colombie-Britannique, près de Chilliwack, cette<br />
île de 248 hectares présente des rives naturelles,<br />
des canaux et des bancs de gravier qui constituent<br />
un excellent habitat de frai et de grossissement<br />
pour les poissons du Fraser. Les saumons adultes<br />
et les esturgeons blancs y frayent sur les lits<br />
de gravier, tandis que les juvéniles fuient les<br />
flots puissants du bras principal du fleuve en se<br />
réfugiant dans les eaux plus calmes de l’île Carey<br />
qui est inondée une partie de l’année.<br />
Étant la région la plus peuplée de la province,<br />
le Lower Mainland est soumis à une immense<br />
pression pour l’aménagement de ses terres. La<br />
majorité des rives et des canaux latéraux du fleuve<br />
y ont été altérés. Ce développement a laissé peu<br />
d’habitats aquatiques intacts et empêche le fleuve<br />
de s’étendre dans sa plaine inondable naturelle.<br />
La conservation de l’île Carey est une étape vers la<br />
sauvegarde des habitats naturels qui y subsistent.<br />
NATURE PICTURE LIBRARY/ALAMY STOCK PHOTO.<br />
Un bond en<br />
avant en<br />
Saskatchewan<br />
Les efforts de Conservation de la nature Canada<br />
(<strong>CNC</strong>) pour la protection des hautes terres Cypress<br />
font un grand bond en avant. Grâce à votre appui,<br />
2 projets totalisant 389 hectares de prairies en voie<br />
de disparition, de ravins boisés et de ruisseaux<br />
alimentés par des sources, qui sont autant d’habitats<br />
pour des espèces comme l’antilope d’Amérique,<br />
le cerf mulet et le cougar, sont maintenant sous la<br />
protection de <strong>CNC</strong> à long terme. Non seulement<br />
cette aire naturelle abrite la plus grande diversité<br />
d’oiseaux de la province, mais ses collines et vallées<br />
pittoresques sont également une destination touristique<br />
de choix. Ces projets illustrent l’engagement<br />
de <strong>CNC</strong> à protéger 500 000 hectares d’étendues<br />
herbeuses d’ici 2030 dans le cadre du Plan d’action<br />
pour la conservation des prairies.<br />
En savoir plus lesprairies.ca.<br />
conservationdelanature.ca<br />
AUTOMNE <strong>2024</strong> 19
La vie sur Terre a changé. Une crise<br />
climatique et le déclin des espèces menacent<br />
aujourd’hui notre mode de vie, et notre<br />
avenir. Mais il y a de l’espoir, puisqu'une<br />
solution se trouve sous nos yeux. Une<br />
solution d’une puissance et d’une ampleur<br />
telle, qu’elle peut remédier à ces menaces.<br />
La nature a toujours été la solution. C’est<br />
notre atout le plus précieux. Elle est source<br />
de vie… Résilience… Guérison et inspiration.<br />
Les vagues qui déferlent et les montagnes<br />
éternelles qui s’élèvent vers le ciel nous<br />
ramènent à la source même de notre<br />
existence. Mais ça n’a jamais été seulement à<br />
propos d’un arbre, d’un ruisseau ou d’une<br />
personne. Nous savons que c’est en unissant<br />
nos forces que nous pouvons créer un<br />
changement réel et tangible.<br />
Conservation de la nature Canada, nous<br />
agissons. Nous collaborons. Nous sommes<br />
architectes du changement. Ensemble, nous<br />
protégeons la nature et son incroyable<br />
capacité à prendre soin de nous et de nos<br />
communautés. Alors, allons-y, unissons-nous<br />
pour conserver, restaurer et veiller sur la<br />
nature. Relevons ce défi. Soutenons tout le<br />
pouvoir de la nature. Pour que la vie sur<br />
Terre puisse non seulement perdurer,<br />
mais prospérer.<br />
Thank aveclanaturecestpossible.ca<br />
you for all you do for nature in Canada!