09.09.2025 Vues

Livre Insieme 60 ans

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Ensemble

main dans la main

INSIEME VALAIS ROMAND 2022



ENSEMBLE, MAIN DANS LA MAIN

60 ans d’engagement en faveur des enfants avec une déficience intellectuelle

Insieme Valais romand

Delphine Debons

avec la collaboration de Cristina Philippoz


Direction et suivi éditorial : D’mots d’histoire – Delphine Debons

Recherches historiques, rédaction principale : Delphine Debons

Entretiens, rédaction chapitre 1990-2020 : Cristina Philippoz

ISBN 978-2-8399-3648-4

© Insieme Valais romand, 2022


005

PRÉFACE

≥ Cette année 2022 marque le 60 e anniversaire de notre association

puisque c’est en 1962, sous l’impulsion de personnes

pionnières, qu’est née l’Association de parents d’handicapés

mentaux, autrefois APHM, devenue en 1995 Insieme Valais

romand – ensemble, en italien. Pour se souvenir de ce long

voyage, le comité d’Insieme a décidé d’éditer un livre anniversaire.

Des recherches historiques ont été faites, des interviews

réalisées et nos archives consultées avec assiduité.

≥ Cet ouvrage évoque les méandres par lesquels notre association

a dû passer pour tracer son chemin. Il permet d’honorer

le travail de nos anciens, de se remémorer les étapes importantes

et les épisodes notables qui ont marqué la vie d’Insieme et, grâce

à la lecture du passé, de porter un regard neuf sur le présent.

≥ En parcourant ces lignes, un seul mot me vient à l’esprit :

Reconnaissance.

≥ Reconnaissance à nos enfants différents qui, à travers leurs

sourires innocents, nous donnent chaque jour la force de continuer

notre mission, celle de leur offrir des moments de

loisirs.

≥ Reconnaissance à nos fondatrices et fondateurs qui ont senti

le besoin de créer cette association afin de soulager les familles

et de donner un autre regard sur le handicap.

≥ Reconnaissance à nos anciens présidents et membres du

comité qui ont su garder le cap du navire Insieme. Les décisions

qu’ils ont dû prendre n’ont pas toujours été aisées.

≥ Reconnaissance aux parents pour leur fidélité, leur soutien et

surtout pour la confiance témoignée en nous laissant leurs

enfants.

≥ Reconnaissance à toutes les personnes qui accompagnent et

veillent sur nos enfants lors de camps de vacances, minicamps

et week-ends.

≥ Reconnaissance à nos autorités cantonales et communales.

Leur soutien est indispensable pour trouver des solutions aux

besoins de nos enfants différents ou construire de nouvelles

infrastructures qui leur sont dédiées.

≥ Reconnaissance à toutes les personnes, fondations, institutions

qui soutiennent nos projets et actions depuis tant d’années,

en particulier à notre faîtière, Insieme Suisse, à la

FOVAHM et à La Castalie.

≥ Reconnaissance à vous tous, qui vous intéressez au parcours

de notre association, à celui de nos jeunes différents et qui

avez choisi de vous plonger dans cet ouvrage. Reportages,

témoignages, interviews, archives, photos, j’en suis sûre, vous

offriront un bon moment de lecture et de découverte de notre

association, de sa naissance à aujourd’hui.

≥ À tous et toutes bonne lecture

Nathalie Célestine Rey-Cordonier

Présidente Insieme Valais romand



Si toutes les minorités se mettent

ensemble, elles deviendront majoritaires.

Lutter pour les droits des personnes

handicapées, c’est lutter

pour le bien de l’humanité.

Alexandre Jollien, philosophe



009

INTRODUCTION

Insieme Valais romand

a sans conteste été

une actrice essentielle

dans le domaine

de l’information.

≥ C’est en 1962 qu’est créée l’Association valaisanne de

parents d’enfants mentalement déficients, sous l’impulsion de

Nicole Lachat, Jurassienne venue s’installer en Valais, maman

d’un enfant handicapé. Constatant qu’aucune institution n’existe

dans le canton pour l’éducation de son fils, elle décide de s’engager

pour cette cause. Le récit de cette fondation, tel qu’on peut

le lire dans quelques documents produits par l’association ellemême,

laisse penser que le canton est en retard par rapport au

reste de la Suisse. Certes, le Valais n’est pas pionnier en matière

d’aide aux enfants en situation de handicap mental. Toutefois,

dans le cadre du mouvement associatif de parents, il n’est

pas en retard, loin de là. La première association a été

créée à Zurich en 1957, suivie par Genève (1958) et Aarau-

Lenzburg (1959). En 1960 est créée une fédération nationale,

la future Insieme Suisse. Sans doute décide-t-elle

alors de prospecter dans les autres cantons et d’inciter à la

création d’associations régionales. Ainsi, entre l’automne

1961 et l’année 1962, cinq nouvelles sections apparaissent

dont Fribourg, Vaud et le Valais romand. Selon les données

que nous avons pu trouver, les quelque quarante autres

sections aujourd’hui membres d’Insieme Suisse semblent avoir

une date de fondation ultérieure.

≥ L’Association valaisanne de parents d’enfants mentalement

déficients, aujourd’hui Insieme Valais romand, a sans conteste

été une actrice essentielle dans le domaine de l’information, de

la sensibilisation, de la reconnaissance et de la prise en charge

des personnes handicapées mentales en Valais.

≥ À l’occasion d’une publication réalisée pour les 40 ans de la

Fondation valaisanne en faveur des handicapés mentaux

(FOVAHM) – créée en 1970 par l’Association de parents –, nous

avions déjà retracé les actions menées en faveur des adultes 1 . Le

présent ouvrage vient compléter cette étude en retraçant l’engagement

des parents pour les enfants en situation de handicap,

afin qu’ils puissent participer, de manière toujours plus poussée,

à la vie de la société à laquelle ils appartiennent. Nous verrons

que les notions d’insertion ou d’intégration ont été présentes

dans les objectifs de l’association dès ses débuts bien que la

définition du concept et les méthodes pour le mettre en œuvre

aient évolué.

≥ Si, aujourd’hui, Insieme Valais romand est avant tout active

dans le domaine du conseil et des loisirs, depuis son origine et

jusqu’au début des années 1990, l’Association de parents investit

une grande partie de son énergie pour créer des structures, puis

des conditions-cadre, afin que les enfants handicapés mentaux

puissent, comme les autres, jouir de leur droit à l’éducation. Les

actions menées dans ce domaine sont au centre de cet ouvrage.

≥ DES TERMES DANS LEUR CONTEXTE

HISTORIQUE

Association valaisanne de parents d’enfants mentalement déficients,

Association valaisanne de parents d’enfants mentalement

handicapés, Association de parents d’handicapés mentaux,

Insieme Valais romand. L’évolution du nom de l’Association

de parents suit celle du vocabulaire utilisé pour désigner le

handicap mental. Dans cet ouvrage, d’autres termes apparaissent

: retardés, anormaux, oligophrènes, etc. Ils sont utilisés

dans leur contexte historique.

1

Delphine Debons, sous la direction du Bureau Clio Sàrl, Une place pour chacun ? Histoire de la FOVAHM, Saxon : FOVAHM, 2010, consultable en ligne : www.fovahm.ch. Pour rappeler les liens forts

entre la FOVAHM et Insieme Valais romand, et la complémentarité des deux ouvrages, un graphisme similaire a été adopté.



011

≥ De l’école itinérante de 1962 à l’intégration scolaire des

enfants en situation de handicap aujourd’hui, en passant par

l’organisation de camps et de week-ends de loisirs et par les

combats politiques menés par l’Association de parents, c’est un

pan de l’histoire de l’enfance en situation de handicap, de l’école

valaisanne – considérée comme pionnière en matière d’intégration

scolaire –, de l’action sociale en Valais romand que nous vous

invitons à découvrir dans les pages qui suivent.

≥ Pour ses soixante ans, l’Association de parents a souhaité

valoriser son histoire et sauvegarder son patrimoine. Ainsi, dans

la lancée de cet ouvrage, elle a choisi de faire trier et inventorier

ses archives et de les déposer pour une conservation à long

terme auprès des Archives de l’État du Valais. Elle a également

fait numériser des documents d’archives audiovisuels et photographiques,

conservés jusqu’alors sur des supports anciens,

difficiles à exploiter. Enfin, grâce à un projet de la Médiathèque

Valais – Sion, son bulletin, Main dans la main, est désormais

consultable en ligne (www.rero.doc.ch) pour les années 1962 à

1990.

≥ Pour mener à bien cette étude historique, les archives d’Insieme

Valais romand nous ont été indispensables. Elles constituent,

avec le fonds d’archives de l’école La Bruyère, également

déposé aux Archives de l’État du Valais, les sources principales

utilisées pour cette recherche. Des éléments d’autres fonds d’archives

– principalement du Département de l’instruction publique

–, les archives de la presse, les ouvrages existants sur la question

sont venus compléter ce corpus et nous ont permis d’intégrer

l’histoire de l’Association de parents dans un contexte plus large.

≥ DES REGARDS « DE CŒUR » EN VIDÉO

Faire l’histoire d’Insieme Valais romand, c’est également donner la parole à des personnes qui ont participé

à l’écrire. Des entretiens ont ainsi été menés avec une dizaine d’entre elles. Ils permettent d’enrichir

ce livre et de compléter les témoignages disponibles dans les archives.

Certains ont été filmés pour donner naissance à des capsules-vidéos, réalisées par Cristina Philippoz,

Florian Bloesch et David Gaudin. Elles offrent un regard « de cœur » sur le parcours de personnes en

situation de handicap et sur celui des femmes et des hommes qui ont participé à la vie de l’association.

Des codes QR permettent d’accéder à certains témoignages au fil des pages.

Retrouvez également l’intégralité des vidéos sur le site web d’Insieme Valais romand



La situation

des enfants

handicapés

mentaux

avant 1960

C’est dans le dernier quart

du XIX e siècle qu’en Suisse

la question des enfants dits

anormaux ou arriérés commence

à se poser. Jusque-là,

ces catégories mal définies

se trouvent noyées dans la masse

des enfants déshérités et sous

la responsabilité de la famille ou

d’institutions d’assistance privée,

le plus souvent religieuses.

La Constitution fédérale de 1874

leur donne un nouveau statut

en instaurant l’école primaire

obligatoire. L’institution scolaire

doit alors prendre en compte tous

les enfants, y compris ceux qui

se distinguent de la norme établie.

Si le principe de l’école pour tous

est accepté, la réalité est autre.

Elle met en lumière les enfants

qui ne parviennent pas à suivre

les classes primaires et pousse

à s’interroger sur la qualification

des anormalités, sur l’identification

et les mesures à mettre en œuvre

pour ceux qui ne parviennent pas

à assimiler le programme scolaire

standard.


Carte postale, avant mars 1911.


015

Un constat

s’impose :

l’illettrisme

est encore

très répandu.

≥ Améliorer le niveau d’instruction de la population – indice de

l’état de civilisation et de progrès d’un pays – est un objectif

prioritaire des autorités fédérales et cantonales à la fin du

XIX e siècle 1 .

≥ Les examens pédagogiques de recrues, réorganisés en

1875, sont le principal indicateur utilisé ; il permet de juger du

niveau d’instruction de la population masculine du pays sur la

base de données unifiées au niveau fédéral. Un constat s’impose

: l’illettrisme est encore très répandu et les enseignements

scolaires sont mal assimilés.

≥ Le Valais figure systématiquement dans les trois dernières

places du classement par canton durant les années 1880. En

1886, le Bureau fédéral de la statistique s’indigne : « Si le Valais

occupe constamment l’une des dernières places, il n’y a

rien là d’imprévu ou de particulièrement honteux ou

condamnable [au vu de son développement économique

et de sa situation géographique]. Mais ce qui est impardonnable,

même en Valais, c’est que presque un tiers de

ses recrues ne sait pour ainsi dire plus lire, que près des

deux cinquièmes ne savent plus écrire. » 2

≥ Les résultats des examens des recrues incitent

Confédération et Canton à augmenter leurs efforts dans le

domaine de l’instruction publique. Ils contribuent également à

mettre en lumière les différences de niveau des élèves. Les plus

faibles – illettrés et arriérés, nommés ainsi car ils ont du retard

dans les acquisitions scolaires – sont considérés d’abord comme

ceux ne suivant pas assez l’école. Des solutions sont ainsi cherchées

pour limiter l’absentéisme. Le manque d’intelligence, la

déficience est également une explication avancée.

≥ Ainsi, dans une étude publiée dans le Journal de statistique

suisse en 1907, le chanoine Xavier de Cocatrix, membre du

Conseil de l’instruction publique du Canton du Valais, relève

parmi les difficultés et obstacles au développement de l’instruction

primaire en Valais, la présence dans les classes d’« enfants

anormaux et peu doués » : « Il est facile de comprendre combien

la présence de ces enfants à l’école est un obstacle au progrès

général. Si l’instituteur néglige de s’occuper de ces pauvres déshérités

de la nature, ils croupissent dans une ignorance sordide

[…] Si, au contraire, l’instituteur avec un dévouement qui l’honore,

s’occupe sérieusement de ces enfants, c’est au détriment

de l’enseignement général des autres écoliers » 3 . Il regrette

qu’aucune école spéciale « où ils sont l’objet de soins particuliers

» n’existe alors en Valais comme c’est le cas dans d’autres

cantons. Une des raisons avancées pour justifier que la question

de l’éducation de ces catégories d’élèves n’ait pas encore préoccupé

les autorités publiques est justement le travail qu’elles

doivent réaliser de manière générale pour améliorer l’instruction

publique des élèves aux capacités intellectuelles ordinaires. Des

efforts considérables dans ce sens sont en effet réalisés au tournant

du XX e siècle. Notons toutefois que les autorités valaisannes

ne sont pas les seules à se préoccuper tardivement de cette

question. Les cantons de Vaud et de Genève restent également

à l’écart du mouvement suisse en faveur des enfants anormaux

qui connaît un important développement de l’autre côté de la

Sarine.

LES PREMIÈRES ACTIONS

POUR L’ÉDUCATION DES ENFANTS

ANORMAUX EN VALAIS

≥ Au moment où le chanoine de Cocatrix rédige son étude,

aucune mesure de soutien n’existe dans le canton pour les

enfants que l’on qualifie d’anormaux.

≥ De premières dispositions législatives sont prises dans le

cadre de la Loi sur l’assistance du 3 décembre 1898 qui vise à

« pourvoir plus efficacement à l’assistance et à l’éducation de


016

l’enfance malheureuse et abandonnée » 4 . Des catégories

d’enfants sont citées dans son article 13 : « les

infirmes, les sourds-muets, les aveugles, les épileptiques,

etc. ». Si la liste était exhaustive, elle inclurait

sans doute les anormaux. La loi établit que la prise en

charge de ces enfants reste avant tout de la responsabilité

des parents – jusqu’au huitième degré de parenté

– et, à défaut, des communes d’origine. L’État veille toutefois à

leur placement et peut fonder ou soutenir par subsides des institutions

de bienfaisance et d’éducation. Le texte stipule que les

enfants assistés doivent « recevoir une solide éducation religieuse,

une instruction primaire suffisante et un enseignement

professionnel répondant à leurs aptitudes ». En outre, toute personne

responsable qui négligerait son devoir est amendable ou

emprisonnable 5 .

≥ Le texte de 1898 donne une base légale à une première

intervention de l’État dans l’assistance des enfants anormaux.

Quatre ans plus tôt, il avait déjà entrepris de soutenir l’ouverture

d’un institut pour enfants sourds-muets dans le couvent de

Géronde, à Sierre 6 . Des conventions sont signées avec le Diocèse

de Sion, propriétaire du bâtiment, et avec la Congrégation des

sœurs de la charité de la Sainte-Croix d’Ingenbohl qui administreront

et dirigeront l’institut. L’État assume les frais de réparation

du couvent et d’amenée d’eau. Il pourra placer des élèves et

subventionner leur prise en charge à valeur égale à la subvention

apportée par la commune 7 .

≥ Rien n’est encore prévu pour les enfants dits faibles d’esprit,

arriérés, retardés. Dès 1903, le Département de l’instruction

publique (DIP) s’intéresse de plus près à cette question. Les

résultats des élèves des classes primaires se sont désormais

nettement améliorés ; ceux des recrues valaisannes également.

Pour progresser encore dans ce sens, il faudrait donner « aux

enfants dont les facultés intellectuelles sont sensiblement en

dessous de la moyenne, une instruction spéciale dans des

La loi établit que la

prise en charge

de ces enfants

reste avant tout

de la responsabilité

des parents.

classes ou des établissements spéciaux ». C’est du

moins l’avis de l’inspecteur scolaire de Courten. De

retour de Zurich, où il a assisté au IV e Congrès sur l’idiotisme

en Suisse, il l’écrit au chef du Département de

l’instruction publique. Après avoir écouté les exposés

d’éminents spécialistes et de praticiens déjà actifs dans

d’autres cantons, il est profondément convaincu que le

Valais doit « suivre ce mouvement humanitaire au premier chef,

dont le but est d’augmenter le nombre des citoyens capables de

se suffire à eux-mêmes et d’affronter la lutte pour la vie dans les

conditions les moins désavantageuses possibles ».

≥ Seuls les Rhodes-Intérieures, le Tessin et le Valais n’ont pas

encore mis en projet ou réalisé d’établissement pour enfants

faibles d’esprit. Les moyens financiers de l’État lui semblant toutefois

trop faibles en ce début du XX e siècle, l’inspecteur propose

de commencer par la création de classes spéciales, rattachées

au DIP 8 .

L’instruction des enfants anormaux

dans les écoles valaisannes

≥ En 1905, le Grand Conseil débat de la nouvelle Loi sur l’école

primaire qui comprend une section « Visites sanitaires. Enfants

anormaux ». Les enfants « ne possédant pas un état de santé

suffisant pour suivre l’école » et auxquels les communes doivent

assurer « une éducation et une instruction compatibles avec leur

état et appropriées à leurs besoins » doivent être signalés 9 .

Comme dans la Loi sur l’assistance de 1898, l’État intervient de

manière subsidiaire et peut subventionner les établissements

spéciaux créés pour l’éducation des « enfants anormaux (sourdsmuets,

aveugles, dégénérés, etc.) » 10 . Ces dispositions n’appellent

pas de commentaires particuliers de la part des députés et la loi

est définitivement adoptée le 1 er juin 1907 11 .

≥ Neuf mois plus tard, le DIP lance une enquête afin de disposer

de données lui permettant d’établir les besoins en matière


017

d’établissements pour anormaux. Nous n’avons malheureusement

retrouvé ni le questionnaire transmis aux commissions scolaires,

ni de synthèse des résultats. Nous savons toutefois, grâce

à la presse écrite de l’époque, qu’il s’agissait d’indiquer « tous les

enfants anormaux en âge de fréquenter l’école primaire, mais qui

ne reçoivent aucune instruction soit qu’ils aient été reconnus

comme tels et dispensés par ordre médical, soit que pour toute

autre raison ils n’aient pas paru en classe jusqu’ici » 12 . L’infirmité

dont ils sont atteints devait être mentionnée afin de pouvoir les

catégoriser. Selon un article du Journal et Feuille d’avis du Valais,

l’enquête aurait révélé que plus de 200 enfants étaient « plus ou

moins abandonnés à leur triste sort, mais dont la plupart serait

susceptibles d’un certain développement ». L’auteur de l’article

note encore que bon nombre d’entre eux suit l’école publique et

« sont un vrai sabot au progrès général » 13 .

La création de classes spéciales

≥ Le Département de l’instruction publique étudie alors les

solutions à sa disposition pour remédier à cette situation. Le

23 août 1910, la création de classes spéciales pour enfants

anormaux est annoncée par arrêté du Conseil d’État 14 .

L’obligation est faite aux communes dénombrant au moins dix

enfants ayant fréquenté sans succès l’école primaire durant deux

ans et dont l’état intellectuel réclame des moyens spéciaux d’enseignement

de créer des écoles spéciales avec un programme

approprié aux besoins et aux aptitudes des élèves. De son côté,

l’État s’engage à subventionner le personnel enseignant qui suivra

des cours pour maîtres de classes spéciales et, surtout, à

ouvrir dès le 1 er octobre, dans le cadre de l’institut pour sourdsmuets

de Géronde, une « école-asile pour les enfants des deux

sexes [âgés d’au moins 8 ans] d’une intelligence insuffisante

pour suivre les cours ordinaires de l’école primaire ». Il signe

pour cela une convention avec la congrégation qui gère l’établissement,

établit le programme d’entente avec la direction et veille

Affiche de l’arrêté sur les classes spéciales, 1910.


018

à un enseignement donné dans les deux langues nationales. Les

frais de pension sont en revanche à charge des parents et, à

défaut, à charge des communes de domicile de l’enfant selon le

principe établi pour l’assistance publique.

≥ Une classe de langue allemande est organisée cette annéelà.

Les débuts sont toutefois difficiles comme le mentionne sœur

Bernarde, directrice de l’institut dans son rapport annuel : l’écoleasile

créée par le Conseil d’État « n’a pas rencontré la sympathie

auprès des autorités et des parents. Tous les efforts, soit de la

part du DIP, soit de la part de la direction de Géronde n’ont eu

pour résultat que trois élèves. La pierre d’achoppement est

l’argent qui fait toujours défaut pour payer la pension de ces

pauvres déshérités de la nature » 15 . Malgré l’aide apportée par

l’État aux parents nécessiteux, ce souci reste important dans les

années qui suivent. Pour l’année 1912-1913, l’école-asile ne réunit

que sept élèves de langue allemande et le nombre de candidats

de langue française ne suffit pas à ouvrir une classe 16 . Il

faudra attendre 1924 pour que cela soit le cas 17 .

≥ L’année précédente, le DIP rappelait aux commissions scolaires

la nécessité de s’occuper de l’éducation des enfants anormaux,

soit en les plaçant à l’école-asile de Géronde, soit en

ouvrant des classes spéciales. L’institut de Géronde est alors

sous-occupé : en 1922, il ne recevait que 34 élèves alors qu’il

disposait d’au moins 60 places 18 . Les efforts du Département et

de la direction de l’école semblent alors porter leurs fruits

puisque, pour l’année scolaire 1926-1927, l’institut accueille 53

enfants sourds-muets et 40 enfants anormaux 19 . À partir de

cette date, l’institut ne parvient plus à répondre à la demande

quant à l’accueil de ces derniers. Plus de 30 élèves doivent être

refusés pour l’année scolaire suivante 20 . Un projet d’agrandissement

est imaginé à Géronde, mais le Conseil d’État décide plutôt

de déplacer l’institut. C’est bien loin de Sierre, au Bouveret, que

les pensionnaires déménageront. L’État y a acquis l’hôtel des

Aiglons qui peut accueillir jusqu’à 150 élèves. Le transfert est

effectif en 1929 et l’institut devient alors un établissement d’État

même si la direction est toujours confiée aux sœurs de la

congrégation. En 1935, l’institut tient 6 classes pour sourdsmuets

et 6 pour « arriérés » 21 . En 1945-1946, sur 151 élèves,

118 font partie de cette dernière catégorie. Sur l’ensemble des

élèves, seuls 44 paient la totalité de leur pension ; la grande

majorité bénéficie d’un subside cantonal partiel et 12 sont subsidiés

totalement 22 .

Les classes communales :

une fausse bonne idée ?

≥ L’appel du Département de l’instruction publique

pour la création de classes spéciales dans les communes

ne remporte pas le même succès. Il semble que

seule la Ville de Sion ouvre une telle classe, au début des

années 1920 et qu’elle reste un cas isolé jusqu’au début

des années 1930 au moins 23 , voire durant plusieurs

décennies encore.

≥ Plusieurs explications pourraient être avancées : le

nombre de dix élèves, établi par l’arrêté de 1910 pour

justifier l’ouverture des classes, est rarement atteint dans

une commune ; les communes négligent leur devoir vis-à-vis des

élèves en difficulté soit par négligence, soit par manque de

moyens ; la solution des classes spéciales n’est pas bien acceptée

dans l’esprit des autorités et des parents qui privilégient le

placement au sein de l’Institut du Bouveret plutôt que de laisser

leur enfant « anormal » à la vue des autres. On peut imaginer qu’il

s’agit d’une combinaison de ces trois explications.

≥ Au début des années 1930, la commune de Saxon tente

l’expérience. Elle sera toutefois de courte durée, une partie des

parents des élèves de la classe spéciale la remettant en cause

en 1934. Cet échec poussera le Département de l’instruction

publique à faire marche arrière et à faire preuve de beaucoup de

retenue sur cette solution, surtout pour les petites communes.

La solution des classes

spéciales n’est

pas bien acceptée

dans l’esprit des autorités

et des parents.


Cahiers d’élèves des classes spéciales de l’Institut des sourds-muets et arriérés du Bouveret, années 1930.


020

Un essai non transformé à Saxon

≥ Le 6 novembre 1934, des parents de Saxon

signent une pétition adressée au chef du DIP pour

demander la suppression de la classe spéciale pour

arriérés créée dans leur commune quelques années

plus tôt. Ils demandent une enquête afin de déterminer

si la procédure de « recrutement », gérée par la commission

scolaire, est bien arbitraire, comme ils le supposent.

Rien ne permet, selon eux, de déclarer que

leurs enfants sont anormaux. Ces enfants qui suivent ce que l’on

a coutume d’appeler la « classe des ânes » sont l’objet de

moqueries et, « pour la vie, ils sont qualifiés de tel, ce qui leur

portera un réel préjudice ». Pour ces parents, l’Institut cantonal

des sourds-muets et retardés et tout à fait indiqué pour recevoir

les arriérés qui doivent y être placés sur ordre d’un médecin.

Dès lors, une classe spéciale n’a aucune raison d’exister dans

leur village 24 .

≥ Une enquête est ouverte et le DIP se tourne en premier lieu

vers le Service médico-pédagogique valaisan (SMPV), entité

créée trois ans plus tôt par le Dr André Repond, directeur de

l’hôpital psychiatrique de Malévoz, et spécialisée dans le dépistage

et le traitement des troubles de l’enfance 25 . Pour celui-ci,

un triple examen – médical, pédagogique et psychologique – est

nécessaire pour assurer un « recrutement » aussi objectif que

possible et déterminer si un enfant souffre d’arriération mentale.

Le maître fera état de ses constats qui devront être corroborés

soit par la direction de l’école, soit par l’inspecteur ; le SMPV

procédera également à un test qui permet d’évaluer l’âge mental

de l’enfant (le test de Binet & Simon, premier test de quotient

intellectuel) ainsi qu’à un examen psychologique pouvant mettre

en avant d’éventuelles causes psychiques à son retard (un

conflit affectif par exemple) ; enfin, un examen médical complétera

le diagnostic en mettant au jour d’éventuelles « tares physiques

d’arriération » qui peuvent nécessiter un traitement 26 .

Les autorités cantonales

ne voient pas comment

maintenir une institution

remise en doute

par les parents.

≥ La commission scolaire et l’institutrice de la classe

spéciale reconnaissent ne pas avoir effectué ce diagnostic

complet. Peut-être par manque de moyens,

lâche la maîtresse lors de l’audition organisée par l’inspecteur

scolaire. Elle dit avoir accueilli les élèves qu’on

lui envoyait, sans s’interroger sur la démarche.

≥ L’échange avec les parents montre que ces derniers

comprennent mal le travail réalisé en classe et les principes

d’un enseignement plus individualisé, sans programme-type.

Ils pensent en outre que leur enfant peut – ou

doit – suivre la classe normale. Le président de la commission

scolaire ainsi que son secrétaire, le curé du village, regrettent que

« les parents comprennent si mal leurs véritables intérêts » et que

le DIP ne les soutienne pas plus. Mais les autorités cantonales

ne voient pas comment maintenir une institution remise en doute

par les parents qui peuvent retirer leurs enfants à tout moment.

≥ De plus, lors de son enquête, l’inspecteur scolaire conclut

que certains enfants un peu retardés dans certaines branches

sont admis en classe spéciale afin que le nombre d’élèves soit

suffisant. Il se base pour cela sur une analyse comparée des

résultats des enfants de cette classe et de ceux des plus faibles

élèves de la classe ordinaire de même niveau qui établit que les

premiers l’emportent sur les seconds. Pour lui, cela signifie que

le recrutement n’a pas été fait de manière méthodique et qu’il

prête à discussion. Sur cette base, le DIP décide de maintenir la

classe avec un effectif réduit jusqu’à la fin de l’année scolaire,

puis de la supprimer « sans dommage pour l’instruction et l’éducation

des enfants qui lui étaient confiés » 27 .

≥ Tout au long de la procédure, commission scolaire et

Département se renvoient la faute : la première trouve qu’elle a

été mal encadrée et informée et que, comme l’arrêté de 1910

l’indique, la liste nominative des élèves aurait dû être fournie par

le Département ; celui-ci s’en remet à la formation de la maîtresse

et au fait que le mode de recrutement devait être connu.


021

Note retrouvée dans un dossier d’archives

de l’Office de l’enseignement spécialisé,

griffonnée pour établir une réponse

à une interpellation au Grand Conseil, 1943.

à exécution. Peut paraître heureux. Petites communes impossibles.

Essai à Saxon ! ! En cas de création, participation de l’État

peut être examinée. Reste pas moins nécessité de tout faire pour

améliorer le sort. Dépenses ne tarderont pas à devenir productives

si ceux à la charge de l’assistance [sont] éduqués assez tôt

convenablement [Des] économies [seront faites]. » 29 Selon un

article de presse de 1958, le Conseil d’État n’a pas changé d’opinion

vingt ans plus tard et émet toujours les mêmes réserves sur

la création de classes spéciales hors des villes 30 tout en soutenant

leur développement dans les villes. Dans les faits, l’État met

toutefois son énergie et son argent avant tout dans l’Institut cantonal

des sourds-muets et retardés du Bouveret qu’il agrandit

cette année-là.

≥ Après quelques échanges musclés entre la commission scolaire

et le DIP, ce dernier conclut : « Vu ce qui s’est passé, la

mentalité en cours au sujet des classes spéciales et les situations

délicates qu’elles ne manquent pas de créer dans les petites

agglomérations, il est indiqué de faire abstraction, pour quelque

temps du moins, de tout projet de l’école supprimée [sic] » 28 .

Dans le même dossier d’archives, une note manuscrite écrite en

style télégraphique, intitulée « Écoles des ânes », tend à démontrer

que cette prise de position concerne un contexte plus large

que cette seule affaire de Saxon : « Base légale existe. Il semble

[que les] communes [n’aient] pas senti [le] besoin de les mettre

Une classe hétérogène qui en dit long….

≥ Qui sont les élèves de la classe spéciale de Saxon ? Ont-ils

un degré d’arriération qui justifie leur présence en classe spéciale

? Afin de déterminer qui restera dans la classe spéciale pour

l’année en cours et qui sera transféré, un examen complet des

élèves est réalisé. L’examen psychologique réalisé par le SMPV

– dont le résultat estime l’écart entre l’âge réel et l’âge mental

constaté – nous donne quelques informations intéressantes 31 .

≥ Trois des seize enfants examinés ont une intelligence normale.

Leur placement en classe spéciale a été justifié de la

manière suivante : pour le premier, par sa nervosité et son émotivité

ainsi que par des absences sans doute dues à des crises

proches de l’épilepsie ; le second a connu une fréquentation irrégulière

de l’école pour cause de maladie, ce qui a engendré un

retard pédagogique, alors que le troisième, germanophone, a été

mis en difficulté par l’arrivée dans une classe française.

≥ Les treize élèves restants sont classés dans la catégorie des

« arriérés par défauts psychiques ». Six d’entre eux sont jugés

« débiles », soit dans le « type supérieur de cette catégorie ». Ils

ont une capacité limitée d’attention et d’effort soutenu. Ce sont


022

les enfants qui bénéficieraient le plus d’une classe spéciale. Un

autre est considéré comme « instable », ayant surtout un caractère

difficile plus qu’une débilité mentale et produisant un travail

irrégulier. Les sept enfants restants ont des facultés d’apprentissage

très limitées : deux sont considérés comme « anormaux ».

Ils ne pourront « assimiler qu’un très petit bagage scolaire » et

pratiquer plus tard qu’un métier machinal, sans aucune initiative.

Les cinq autres sont des « arriérés, proprement dit ». Ils ne pourront

entreprendre un métier que grâce à une instruction spécialisée

et auront toujours besoin d’un tuteur.

≥ Ce rapide survol fait ressortir de manière évidente l’hétérogénéité

de la classe et les besoins très différents des enfants qui

s’y trouvent. Notons toutefois que, selon le Service médico-pédagogique,

seuls les trois premiers élèves cités ci-dessus n’ont rien

à faire en classe spéciale. Le SMPV relève que « ceux dont le

quotient intellectuel atteint ou dépasse 90 32 sont naturellement

les seuls susceptibles de pouvoir s’adapter au rythme d’une

classe normale. Mais il reste évident qu’aucun enseignement ne

permettra à leurs facultés de se développer comme celui qui est

spécialement adapté aux enfants dont l’intelligence fonctionne

d’une façon plus lente et moins régulière que la norme » 33 .

≥ Les résultats de cette analyse montrent le décalage entre la

perception de certains parents et la situation réelle de leur

enfant. Parmi les pères prenant la parole lors de la séance de

novembre 1934, trois ont des enfants qualifiés comme arriérés

ou anormaux par le SMPV. L’examen psychologique vient dès lors

plutôt soutenir l’impression de la commission scolaire de Saxon

qui pense que certains parents ne sont pas forcément conscients

du handicap de leur enfant ou se refusent à le voir.

≥ Malgré les réserves émises par les psychologues, le DIP

décide du passage de neuf enfants en classe normale, dont trois

au moins avec un QI inférieur à 90. Quatre sont des enfants des

pétitionnaires. Ils sont reconnus comme « normaux et sains » sur

la base de la synthèse des trois examens. L’examen médical

conclut notamment à un bon état général de tous les élèves 34 .

Un enfant au QI de 68 fait partie de ceux-ci. Sa famille a expressément

demandé qu’il retourne dans une « classe avec régent ».

L’exemple inverse existe également : l’enfant souffrant de maladie,

mais à l’intelligence dans la norme, restera en classe spéciale

selon le souhait de ses parents. Une enfant est placée à

l’Institut du Bouveret. Les autres resteront en classe spéciale

jusqu’à la fin de l’année scolaire.

LE TOURNANT DES ANNÉES 1960 :

UN AUTRE REGARD

SUR LE HANDICAP

≥ Le regard porté sur le handicap mental évolue à la fin des

années 1950. L’Europe entre dans une période de croissance

économique qui durera jusqu’au milieu des années 1970 (Les

Trente Glorieuses). Cette haute conjoncture participe au développement

des assurances sociales en Suisse. Le plébiscite par

le peuple de la Loi fédérale sur l’assurance vieillesse et survivants

(AVS) en 1947 est un symbole fort de cette extension de

l’État social. L’assurance invalidité (AI), à l’origine associée

à l’AVS, est en revanche mise en suspens et sera finalement

introduite le 1 er janvier 1960 – la Suisse est alors un des

derniers pays d’Europe à se doter d’une telle assurance 35 .

≥ Les débats autour de l’AI contribuent à donner une

visibilité au handicap et à faire reconnaître les personnes

qui sont touchées par cette infortune comme des membres

à part entière de la société. L’assurance est destinée aussi

bien aux actifs qu’aux personnes ne pouvant travailler. Elle offre

bien sûr des rentes, mais a pour objectif premier la réinsertion

professionnelle, même partielle. Des dispositions sont prises

dans ce sens : remise de moyens auxiliaires, prise en charge de

Les débats autour

de l’AI contribuent

à donner une visibilité

au handicap.


023

Les associations

de parents existantes

se réunissent en

fédération en 1960.

mesures médicales et professionnelles, participation aux frais

d’un enseignement spécialisé, etc.

≥ Une autre évolution a un impact considérable sur le champ

du handicap : les nouvelles connaissances acquises en biologie

génétique. En 1956, des chercheurs identifient la composition

chromosomique de la cellule humaine. Trois ans plus tard,

il est établi que le mongolisme (la trisomie 21) est dû à la

présence d’un chromosome supplémentaire. D’autres

maladies provoquant une déficience mentale trouvent une

explication du même type dans les années qui suivent. La

réponse donnée par la médecine sur l’origine de certaines

des maladies avec déficience mentale permet de réviser

certaines croyances autour du handicap mental et de faire

un pas vers une meilleure compréhension de celui-ci.

≥ Le mouvement associatif se développe également à cette

période en Suisse romande. En 1959 est créée une section valaisanne

de l’Association suisse en faveur des arriérés (ASA), association

très active au niveau suisse et qui, depuis la fin du XIX e

siècle 36 , s’attelle notamment à informer le public et les autorités

sur les aspects médicaux, pédagogiques, professionnels, sociaux

de l’arriération mentale. Les premières actions prévues par l’ASA

Valais sont des visites, de la propagande, des conférences avec

film, ainsi que des enquêtes notamment dans le domaine des

classes spéciales 37 . Elle est alors présidée par Paul Mudry, directeur

des écoles de Sion, et a pour secrétaire Simone Reichenbach,

enseignante spécialisée, future directrice de l’école La Bruyère,

puis du centre médico-éducatif La Castalie.

≥ C’est aussi dans cette période que l’idée de créer dans le

canton un établissement en internat pour les enfants handicapés

mentaux profonds – appelé alors centre pour oligophrènes profonds

38 – devient plus concrète. Si le Dr André Repond, directeur

de l’hôpital psychiatrique de Malévoz, en parlait déjà dans la

décennie précédente, ses successeurs, le Dr Norbert Benoziglio,

puis le Dr Jean Rey-Bellet s’emparent vraiment du sujet.

Les associations de parents

d’enfants mentalement déficients

≥ Cette nouvelle conjoncture entraîne également un changement

dans la manière dont les parents conçoivent leur position

et celle de leur enfant handicapé. La reconnaissance du handicap

par l’AI, la notion de réinsertion, les nouvelles connaissances

médicales contribuent à alléger un peu le tabou autour de la

déficience mentale et les sentiments de honte et de culpabilité

des parents 39 .

≥ En 1957, à Zurich, est créée la première association de

parents. L’année suivante, sous l’impulsion de la doctoresse

Yvonne Posternak, le mouvement se poursuit à Genève, puis en

1959 dans la région d’Aarau. Les parents sortent de leur isolement,

se rendent compte que d’autres rencontrent les mêmes

difficultés qu’eux et que le partage peut faire du bien.

≥ Les associations de parents existantes se réunissent en fédération

en 1960. L’impulsion est donnée. Cinq nouvelles sections

voient le jour entre 1961 et 1962, dont celle du Valais romand.

≥ Le milieu associatif, tous domaines confondus, connaît

alors un véritable boom en Suisse. On prend conscience qu’en

fédérant les personnes ayant un même objectif, il est possible

de développer des projets pour répondre à une problématique

donnée et de devenir une voix attendue des autorités publiques

qui apprécient d’avoir un interlocuteur unique plutôt que de

recevoir des revendications de manière dispersée 40 . L’Office

fédéral des assurances sociales accueille dès lors favorablement

la création des associations de parents, puis de la fédération

suisse de ces associations, à partir de 1960.



L’Association

valaisanne de

parents d’enfants

mentalement

déficients

La création de l’Association

valaisanne de parents d’enfants

mentalement déficients naît

d’une rencontre de femmes.

Nicole Lachat, Jurassienne venue

s’installer en Valais avec sa famille

en 1960, souhaite trouver une école

pour son fils atteint d’un handicap

mental profond. Rien n’existe

dans le canton. Elle contacte alors

Yvonne Posternak, co-fondatrice

de l’association de parents

genevoise. Très active, l’association

vient de créer un lieu de vie

et de travail adapté aux besoins

des personnes mentalement

déficientes, le village

Aigues-Vertes 41 .

Nicole Lachat fait également

la connaissance de Simone

Reichenbach, enseignante

spécialisée qui, depuis 1957,

suit quelques enfants à domicile

en Valais. Par ce biais,

elle peut la mettre en contact

avec d’autres parents se trouvant

dans une situation proche

de la sienne.

Soutenue par ces deux femmes

engagées, elle a désormais

un objectif : créer une association

en réunissant un petit noyau

de membres-parents et convaincre

quelques personnes influentes

intéressées par la cause

qu’elle défend de s’engager.


La première classe de l’école itinérante à Sion, 1963.

Penchées, face à l’objectif : Nicole Lachat (gauche) et Simone Reichenbach (droite)


027

Toutes leurs faiblesses

réunies peuvent

contribuer à émouvoir

les pouvoirs publics.

17 DÉCEMBRE 1962 :

ASSEMBLÉE CONSTITUTIVE

≥ Un comité provisoire est rapidement constitué, sous la présidence

d’Honoré Pralong, secrétaire du fonds d’aide agricole 42 .

Afin de faire connaître sa cause, le comité décide d’organiser à

Sion, le 1 er juin 1962, une conférence d’Yvonne Posternak sur le

thème « Quel est le but d’une association de parents d’enfants

mentalement déficients ? ».

≥ Dans La Patrie valaisanne, Honoré Pralong lance un appel

« du cœur » :

« Que tous les parents d’un de ces petits malheureux viennent à

cette Assemblée constitutive de l’Association valaisanne de

parents d’enfants mentalement déficients. L’union fait la force.

Toutes leurs faiblesses réunies peuvent contribuer à émouvoir les

pouvoirs publics, les Autorités, les âmes bien nées et les cœurs

généreux. Il faut que ces déshérités du sort aient aussi leur petit

lit blanc et pas seulement un berceau voilé de gris. Il faut surtout

que des drames comme ceux que connaît l’auteur de ces lignes

ne viennent plus troubler la quiétude de certains foyers. Le message

de Noël contient ces mots : « Ne craignez point. Je vous

annonce une bonne nouvelle ». Cette bonne nouvelle, les parents

d’enfants mentalement déficients l’entendront le 1 er juin 1962 43 . »

Lors de la conférence, l’objectif premier de l’Association de

parents est annoncé : « mettre sur pied une institution destinée à

l’éducation et à la formation professionnelle » des enfants déficients

mentaux 44 .

≥ Nous ne savons pas combien de personnes ont assisté à

cette assemblée constitutive. Les journaux valaisans ne s’en font

pas l’écho et aucun protocole ne se trouve dans les archives que

nous avons pu consulter. Nicole Lachat parle toutefois d’un « petit

nombre », concentré à Sion. L’objectif est cependant de couvrir

le Valais romand. Si le comité provisoire espérait que cette soirée

fasse office d’assemblée constitutive, il ne peut que constater

que la participation n’est pas suffisante pour ce faire.

≥ L’assemblée constitutive aura finalement lieu le 17 décembre.

Les parents sont invités par voie de presse 45 . Le comité provisoire

peut alors se présenter non plus avec de « belles paroles », mais

par des projets et des actes. L’ouverture prochaine d’un jardin

d’enfants pour les petits, à Sion, et d’un atelier de travaux

manuels pour les plus grands sont annoncées. En outre, la possibilité

de créer une structure éducative en Valais est à l’étude.

Nicole Lachat et Simone Reichenbach s’y attellent. Elles ont

notamment visité Les Matines, école pour enfants handicapés

mentaux, sise à Lausanne 46 .

Mes premiers contacts avec l’Association

genevoise de parents d’enfants mentalement

déficients me firent tant de bien. J’admirais ces

hommes et ces femmes qui, dominant leur

propre douleur, devenaient agissants. C’est ainsi

que je fus moi-même conduite à créer une

Association dans le Valais.

Témoignage de Nicole Lachat, 9 décembre 1970 47


028

Un réseau d’entraide et un canal d’information

≥ Les statuts, signés lors de la rencontre du 17 décembre,

mentionnent bien sûr dans les buts de l’association la création

de telles institutions d’éducation ainsi que de formation professionnelle,

mais il ne s’agit pas de la première mission mentionnée.

L’association souhaite avant tout être, d’une part, un réseau

d’entraide et de partage d’expérience pour les parents ainsi que

pour les personnes et institutions intéressées, d’autre part, un

canal d’information sur les problèmes posés par l’éducation des

enfants déficients mentaux 48 .

La première chose qu’un membre puisse

faire, c’est de parler avec foi et enthousiasme de

notre Association, non seulement à des parents,

mais à des connaissances, à des voisins, à des

amis. Créons ensemble un mouvement d’opinion

en faveur de nos enfants. Le don de la parole,

le don de communiquer avec les autres, servezvous-en

pour orienter autorités locales, civiles et

religieuses, députés et personnes influentes et

vos connaissances sur nos problèmes. Il faut que

l’on nous connaisse et que le public sache que

ces enfants déficients existent nombreux et

qu’ils ont un urgent besoin d’aide.

Extrait du bulletin Main dans la main, n o 1, novembre 1963

Une des premières actions décidées par l’association

pour créer du lien et informer est la publication du bulletin Main

dans la main dont le premier numéro paraît en novembre 1963.

≥ LE SUCCÈS EST AU RENDEZ-VOUS

L’association compte déjà 103 membres en 1964 49 . Neuf ans

plus tard, elle atteint les 300 membres actifs, effectif qui se

stabilise à ce niveau aujourd'hui (variation entre 280 et 300

membres depuis le début du XX e siècle, avec un pic à 326 en

2015). De nombreux membres soutiens s’ajoutent à ce nombre.


029

DES PERSONNALITÉS QUI S’ENGAGENT

≥ Dès ses débuts, l’Association de parents comprend l’importance de s’entourer des bonnes personnes pour faire avancer sa

cause. Elle parvient à réunir dans son comité de patronage des hommes politiques, des autorités religieuses et des personnalités

du monde médical qui lui donnent de la crédibilité, assurent du bien-fondé de la cause qu’elle défend et, surtout, lui offrent des

soutiens de poids.

Comité de patronage 50

Monseigneur Nestor Adam, évêque de Sion

Charles Bolay, pasteur de l’Église protestante de Sion

Marcel Gross, président du Conseil d’État

Marcel Gard, vice-président du Conseil d’État

René Jacquod, conseiller national

et premier vice-président du Grand Conseil valaisan

Paul Eugène Burgener, juge cantonal

René Spahr, juge cantonal

Emil Imesch, président de la Ville de Sion

Oskar Schnyder,

chef du Département de l’Hygiène du Canton du Valais

Dr Henri Galetti, président de l’association médicale du Valais

Dr Norbert Benoziglio,

directeur de l’hôpital psychiatrique de Malévoz

Dr Pierre Calpini, chef du Service de l’hygiène

du Canton du Valais

Marcelin Frachebourg, membre du comité de l’Association

valaisanne pour l’enfance infirme

Paul Mudry, directeur des écoles de Sion,

président de la section valaisanne de l’ASA

Le comité, à sa fondation en décembre 1962 51 :

Nicole Lachat, présidente

Honoré Pralong, vice-président

Cécile de Cocatrix

Jules Délèze

Gérard Emery

Rejoints rapidement par (présents en novembre 1963 52 ) :

Alfred Vouilloz (décès en 1964), remplacé par sa femme,

Simone Vouilloz

Angelin Carron, secrétaire

Conseillères du comité :

Suzanne Girod, assistance sociale, Pro Infirmis

Simone Reichenbach, éducatrice spécialisée


030

PAROLES D’ARCHIVES

NICOLE LACHAT TÉMOIGNE

≥ En décembre 1970, Nicole Lachat rédige son témoignage de

« mère d’un enfant mentalement handicapé » 53 . Elle accepte de

le faire, convaincue que « tous les parents qui ont vécu ce drame

[avoir un enfant pas comme les autres] ont la mission d’informer

». Elle commence par ces mots forts :

« Apprendre un beau jour que mon enfant ne sera jamais

comme les autres, ne pourra jamais se débrouiller seul.

Apprendre qu’il y a là échec irrémédiable, c’est un choc

effroyable. J’avais beau le pressentir, essayer de m’y préparer,

je ne pouvais l’accepter. »

≥ Puis, elle expose son rejet de la situation, le mutisme de son

entourage, le bien que lui aurait sans doute fait la rencontre avec

quelqu’un d’expérimenté qui lui aurait dit « ce n’est pas facile,

mais je t’aiderai », la sensation – en personne croyante – que Dieu

l’avait choisie pour cette épreuve « comme Job sur la cendre et

la poussière ». Comme peu de monde peut-être, elle ose les mots

qui choquent, qui font peur :

« Comme Job, j’ai passé des hauts et des bas, parfois le

découragement est tel, la solution si difficile à trouver que

je souhaitais la mort de mon enfant. J’ai noté cette phrase

du Dr Bach […] : ‹ Il serait surhumain qu’un père ou une

mère n’ait pas eu une fois cette idée › ».

≥ Elle évoque ensuite l’amour et la patience qui permettent de

surmonter « une multitude de petits problèmes à résoudre, de

petits désagréments à surmonter, de petites contrariétés à

mépriser ».

« Aussi faut-il imaginer ce que signifie donner à manger

durant des années à un enfant gardant espoir qu’un jour

il saura tenir seul sa fourchette. Habiller certains enfants

peut prendre deux ou trois heures si on s’efforce à leur

apprendre à lacer leurs souliers ou à boutonner leurs vêtements

» explique-t-elle simplement. Et de poursuivre avec

ce quotiden « où il ne peut y avoir de moments de repos »,

sans passer sous silence la complexité des contacts avec

l’entourage, la douleur de laisser son fils dans un internat

lorsqu’elle vivait en Espagne, le manque de structures

d’accueil à son retour en Suisse en 1959, la peine à « garder

une vie familiale harmonieuse ».

≥ Parmi les témoignages retrouvés lors de nos recherches,

seul celui de Nicole Lachat aborde la question du père et de son

rôle, des difficultés qu’il peut rencontrer face à cette situation, du

manque de soutien vécu par certaines mères :

« Souvent encore davantage que la mère, le père est

atteint dans sa fierté, son enfant ne réussira jamais, c’est

un échec qu’il a bien de la peine à surmonter. Pour lui

aussi, il y a toutes ces difficultés journalières. C’est dur

pour un homme en rentrant de son travail de trouver sa

femme souvent harassée et nerveuse. De ne pouvoir

presque jamais sortir seul avec elle, car il faut emmener

le petit handicapé, ce qui veut dire être constamment

exposé à des ennuis dans la société provenant de la

conduite incongrue de l’enfant.

Il y a aussi l’énorme souci de la charge pécuniaire que

représente un individu qui ne pourra jamais subvenir luimême

à ses besoins.

Il est compréhensible que certains pères adoptent une

attitude de fuite ; ils cherchent à se montrer capables, à

briller dans la société pour compenser cette défaite ;

d’autre part, ils n’aiment pas rentrer à la maison où l’atmosphère

est tendue, aussi préfèrent-ils sortir tous les

soirs… Cette attitude est très néfaste, car les autres

enfants auraient d’autant plus besoin de leur père, leur

mère étant si absorbée par l’enfant malade. Vous pouvez

aussi imaginer le découragement d’une femme se sentant

abandonnée à une tâche qui la dépasse… »

≥ Comment trouver les forces face à tout cela ? C’est sur cette

note plus positive que Nicole Lachat termine, insistant sur l’assistance

spirituelle et sur l’importance des associations de parents

et du soutien qu’elles apportent, des moments de partage avec

d’autres personnes vivant des expériences proches et avec des

éducateurs spécialisés qu’elle voit comme des « rayons de soleil »

pour les parents.


031

Dès janvier 1963,

Simone Reichenbach

peut accueillir quatre

enfants les mercredis

et samedis après-midi.

Atelier de tissage de la Grenette, rue du Grand-Pont, Sion.

Date inconnue.

UNE PREMIÈRE ANNÉE

RICHE EN PROJETS

L’atelier de tissage

≥ Dès les premières heures, les initiatrices de l’Association de

parents mentionnent la nécessité d’offrir une occupation professionnelle

aux jeunes handicapés n’étant plus en âge scolaire.

Objectif : les occuper intelligemment et les « intégrer dans

une vie normale » 54 . Un « timide essai d’atelier » est réalisé

en 1962 déjà. Toutefois, c’est en octobre de l’année suivante

que le premier atelier qui s’inscrira dans la durée est

ouvert. Sous la responsabilité de M me Charvet, les jeunes se

forment au tissage. Cette réalisation marque les débuts de

l’engagement des parents pour la prise en charge et l’insertion

professionnelle des adultes en situation de handicap.

Il est le point de départ d’une longue aventure relatée dans

l’ouvrage Une place pour chacun ? Histoire de la FOVAHM

paru à l’occasion des 40 ans de cette institution, née de la

volonté des parents 55 .

Une colonie de vacances à Sapinhaut

≥ Un des autres soucis de l’Association de parents, qui n’est

pas mentionné dans ses buts à sa création, est celui des loisirs

des enfants. Le souhait, aujourd’hui central, de leur faire découvrir

le plaisir de moments de détente et de convivialité en groupe

et d’offrir, dans le même temps, un peu de repos aux parents

était présent dans l’esprit des pionniers puisque, en 1963 déjà,

une première colonie de vacances est organisée à Sapinhaut,

dans un chalet mis à disposition par la paroisse protestante de

Sion. L’expérience sera reconduite jusqu’en 1974 et prendra le

nom de classe d’altitude pour souligner l’intérêt éducatif de cette

semaine qui permet d’introduire des apprentissages liés à la vie

en société.

Une première classe pour quatre enfants

≥ Enfin, le comité et Simone Reichenbach s’engagent pour

développer une première structure éducative. Les démarches

démarrent avant même que l’association soit officiellement

constituée. Grâce à l’engagement d’Honoré Pralong et de Paul

Mudry, directeur des écoles de Sion et président de la section

valaisanne de l’ASA, un local est mis à disposition par la Ville de

Sion dans l’école du Sacré-Cœur. Ainsi, dès janvier 1963, Simone

Reichenbach peut accueillir quatre enfants les mercredis et

samedis après-midi.

≥ Le choix de cet horaire n’est pas anodin puisqu’il s’agit des

jours de congé scolaires : le comité souhaite ainsi éviter que [les]

enfants handicapés attirent l’attention des écoliers 56 . Le chemin

à parcourir vers l’intégration est encore long…

≥ Le regard porté sur les enfants des classes ordinaires n’est

pas perçu comme le seul inconvénient de cette implantation : le

local doit être vidé chaque soir et le lieu est exigu, empêchant

tout développement. Si, en mars 1963 déjà, la question d’un

agrandissement se pose, les moyens financiers manquent

encore. L’association ne pourrait ni payer un local, ni engager du

personnel 57 . Pourtant, l’idée d’ouvrir des classes du même type

dans différents centres régionaux en Valais fait son chemin. Elle

deviendra, bientôt, le cœur de l’activité de l’association.


032

ÉCLAIRAGE

PROPOSER DES TEMPS DE VACANCES

≥ « Que nos enfants jouissent de belles heures de détente dans un coin bien sympathique du Valais. Que les parents, eux aussi,

aient un peu de vacances. » 58 C’est ainsi que le comité explique ce qui le motive en créant une colonie de vacances, dès la première

année d’existence de l’Association de parents. Mais la colonie, qui devient en 1964 « classe d’altitude », est également l’occasion

de nombreux apprentissages.

≥ C’est à Sapinhaut qu’a lieu la première colonie en 1963 ;

l’année suivante, 17 enfants entre 5 et 17 ans se retrouvent à

Grimentz entourés de six monitrices, d’une infirmière, d’une cuisinière

et d’une aide, sous l’œil avisé de la directrice, Simone

Reichenbach.

≥ Désormais, la colonie devient « classe d’altitude » pour souligner

son aspect éducatif : « Madame Reichenbach désire pouvoir

suivre une fois ses écoliers tous les jours, les observer dans

leurs jeux, leur faire faire un peu de gymnastique, etc. » peut-on

lire dans le Main dans la main 59 . De ce fait, le séjour peut être

mis au bénéfice de subventions AI.

≥ Pour répondre aux exigences éducatives, qui restent centrales

au fil des années, l’association décide de s’entourer de

monitrices et moniteurs formés ou en cours de formation.

Rapidement, Simone Reichenbach se retire de la direction de la

colonie, ayant assez à faire avec l’école. Plusieurs personnes se

succèdent alors à cette charge, toutes ayant une formation dans

le domaine de l’enseignement, de l’éducation ou des soins

infirmiers.

≥ La classe d’altitude, que la plupart continuent d’appeler colonie,

a lieu sur un mois et accueille une vingtaine d’enfants au

milieu des années 1960, puis 30 et jusqu’à 39 en 1972. Un camp

plus court est prévu cette année-là pour les enfants avec des

handicaps plus graves 60 . L’âge des enfants admis peut varier

d’une année à l’autre (4 à 14 ou 15 ans, en règle générale). Seuls

les « cas trop difficiles » en sont exclus. La colonie investit différents

lieux : l’école de Praz-de-Fort, une ancienne école ménagère

à Vissoie, la colonie d’enfants du domaine d’Ecône, la

Maison Général-Guisan à Montana-Village.

≥ En 1973, pour la première fois, la colonie est organisée en collaboration

avec La Castalie. Les enfants qui sont sous la responsabilité

de cette dernière sont accompagnés de leurs éducateurs habituels.

Peut-être pour satisfaire La Castalie, le camp est en outre réduit à trois

semaines. L’organisation se complexifie toutefois comme le montre la

liste des participants : des parents inscrivent leur enfant pour toute la

durée du camp, d’autres choisissent l’une ou l’autre semaine 61 . Si la

colonie connaît un franc succès, avec plus de quelque 70 inscrits,

seuls 11 enfants y sont via l’Association de parents 62 .

Toutes ces personnes [le personnel d’encadrement, de cuisine, etc.] prenaient leurs vacances

en se consacrant à nos enfants. Pour une rémunération bien modeste, ils n’ont économisé

ni leurs forces, ni leur dévouement, à notre époque de matérialisme, ces gestes nous font réfléchir

et prennent une valeur d’éternité.

Nos enfants se sont fait le plus grand bien […]. Marie-Andrée en est revenue transformée.

On est ému en regardant sa tenue à table, sa façon de ranger ses habits sur la chaise

avant de se coucher et tant d’autres bonnes habitudes acquises en si peu de temps. […] .

Extrait d’un témoignage d’une maman, Main dans la main, Noël 1966


033

≥ Face à une si faible affluence, le comité décide de ne pas

organiser le camp d’été l’année suivante et d’aviser les parents

de La Bruyère qu’ils peuvent opter pour « un placement temporaire

en été, à La Castalie » 63 . C’en est fini des classes d’altitude

de l’Association de parents…

≥ Pourtant, en 1981, l’intérêt pour l’organisation de colonies

de vacances pour les enfants et les adultes refait surface. Le

comité sonde les parents à ce sujet pour connaître leur intérêt,

la durée souhaitée de la colonie, les dates les plus adaptées 64 .

Les parents sont également sollicités pour apporter leur aide en

participant à une commission loisirs et colonie.

≥ L’écho est positif et, à l’été 1981, 10 enfants de 8 à 18 ans

et 12 jeunes et adultes de plus de 20 ans participent à une

semaine organisée pour chacun des deux groupes 65 . Durant deux

ans, elles ont lieu à La Fouly, puis à la pension La Forêt à Vercorin,

acquise par l’ASA pour offrir un lieu de loisirs aux personnes en

situation de handicap.

≥ Avec l’existence d’un tel lieu, l’offre peut également être élargie.

En 1984, pour répondre au souhait de parents qui aimeraient

« pouvoir respirer de temps en temps le dimanche », des weekends

sont organisés 66 . Ils le sont encore l’année suivante, puis

s’arrêtent, faute sans doute de demande suffisante. Ce n’est

qu’en 1995 qu’ils reprendront, sous l’impulsion de Lucienne

Darbellay Fumeaux.

≥ Depuis, camps de vacances et week-ends sont devenus « la

marque de fabrique » de l’association, comme l’explique Cristina

Philippoz, plus loin dans cet ouvrage 67 .

Activités de loisirs et vacances organisées par l’Association de parents.



De l’école

itinérante

à l’école

La Bruyère

Dans le canton de Vaud,

afin d’assurer un suivi éducatif

des enfants handicapés mentaux,

un éducateur se rend à domicile,

conseille les parents, réalise

des exercices éducatifs

avec les enfants, puis laisse

à la disposition de la famille

du matériel pour que le travail

puisse se poursuivre entre deux

visites. Simone Reichenbach et

Nicole Lachat s’intéressent de près

à ce système, appelé « Service

éducatif itinérant », créé par Renée

Delafontaine. Les expériences

menées par cette pionnière

semblent avoir une grande influence

sur les deux femmes puisqu’elles

visitent également l’école

Les Matines, première école

en externat pour enfants

handicapés mentaux en Suisse.

Sur la base de ces exemples –

et d’autres sans doute –,

l’Association de parents imagine

son propre projet pour le Valais,

à la croisée entre un service

itinérant et une école. Son objectif :

créer des classes à effectifs

réduits dans différents lieux

du Valais, suffisamment centraux

pour que les enfants d’une même

région puissent les fréquenter.


Moment de pause à l’école La Bruyère de Martigny.

Sans doute lorsque l’école se tenait dans un appartement à la rue de la Moya, avant 1971.

1963

Association valaisanne

de parents d’enfants

mentalement déficients

1968

Association valaisanne

de parents d’enfants

mentalement handicapés

1972

Association de parents

de handicapés mentaux

1995

Insieme Valais romand.

Association valaisanne de parents

de personnes handicapées mentales

Le nom « Insieme », qui signifie « Ensemble »

en italien, a été choisi par la fédération

nationale l’année précédente.


037

Les enfants apprennent

la vie en groupe

et peuvent pratiquer

des exercices collectifs.

≥ Pourquoi privilégier une « école itinérante » 68 , avec la création

de petites classes, plutôt qu’un Service éducatif itinérant à

domicile ? L’argument avancé par l’Association de parents est

éducatif : les enfants apprennent la vie en groupe et peuvent

pratiquer des exercices collectifs. Il est probable que la topographie

du Valais joue également un rôle dans ce choix. Se

rendre au domicile de chaque enfant entraînerait des déplacements

considérables. Pour passer du projet à la réalisation,

l’association doit toutefois impérativement trouver des soutiens

financiers. Elle se trouve dans une conjoncture favorable

pour cela puisque le peuple valaisan vient d’accepter une

nouvelle loi scolaire qui ouvre la voie à un soutien étatique à

des initiatives privées en faveur de l’éducation des enfants

déficients mentaux. Jules Délèze, futur membre du comité de

l’Association de parents, s’est engagé pour cela au Grand Conseil.

≥ DES SOLUTIONS POUR LES FAIBLES

D’ESPRIT ET LES DÉFICIENTS MENTAUX

La nouvelle Loi sur l’instruction publique qui voit le jour en

1962 consacre le principe de « classes de développement »

pour les enfants « qui ne peuvent suivre avec profit l’école primaire

ordinaire ». Le placement revient à la commission scolaire

ou à l’inspecteur ; les parents seront entendus 71 . Nous verrons

que, plus tard, en 1978, le respect de l’autorité parentale

dans le choix des mesures à appliquer sera au cœur de la Loi

sur les mesures en faveur des handicapés. Les enfants qui

entrent dans ces classes sont considérés comme retardés –

entendre « ayant du retard » –, mais scolarisables à condition

de bénéficier d’une adaptation. Quant à l’« enfant éducable »,

qui n’a pas le potentiel pour intégrer l’école ordinaire, même en

classe de développement, la loi mentionne « qu’il est placé,

autant que possible, dans un établissement approprié » 72 .

UNE BASE LÉGALE :

LA LOI SCOLAIRE DE 1962

≥ La nouvelle loi scolaire, acceptée par le peuple en novembre

1962, mentionne dans son article 120 que l’État subventionne

les institutions assurant « l’éducation d’enfants handicapés qui

ne peuvent suivre l’école publique régulière » 69 . En juin de l’année

suivante, un règlement donne quelques précisions sur cet article

législatif : peuvent être reconnus d’utilité publique, des établissements

recevant des élèves en âge de scolarité enfantine et primaire,

atteints d’infirmités physiques, psychiques ou caractérielles.

Pour accorder un tel statut, l’État base son analyse sur

l’effectif des élèves confiés à l’institution candidate, sur l’efficacité

de ses méthodes, sur les qualifications du personnel engagé, sur

les garanties fournies quant au logement des élèves et aux soins

qui leur sont appliqués. Une fois la reconnaissance acquise, et

de manière générale, des subventions sont accordées pour la

construction et l’aménagement de locaux, l’acquisition de matériel

et la création de bibliothèques scolaires. En outre, lorsque les

charges financières dépassent les possibilités de l’établissement,

l’État peut prendre à sa charge les salaires des maîtres et du

personnel de surveillance 70 .

RECONNAISSANCE PROVISOIRE

PAR L’ÉTAT

≥ S’adresser au Département de l’instruction publique apparaît

alors comme une évidence pour l’Association de parents, d’autant

plus que son chef, le Conseiller d’État Marcel Gross, est une

personnalité très ouverte à la cause qu’elle défend et fait partie

de son comité de patronage.


038

Sans vous, notre école itinérante n’aurait

été qu’un rêve et combien d’enfants seraient

restés pour leurs parents le plus terrible

des cauchemars, sans espoir de recevoir

la moindre éducation et de pouvoir un jour

s’intégrer même à un embryon de vie sociale.

Lettre de Jules Délèze, président, au Conseiller d’État Marcel

Gross, chef du DIP, 9 juillet 1964

≥ Nous n’avons malheureusement pas de trace des discussions

qui aboutirent à la décision du Conseil d’État de reconnaître

l’école itinérante pour la durée de l’année scolaire 1963-1964 73 .

Il paraît normal que les autorités avancent avec prudence, en

établissant une période probatoire. Elles se montrent d’ailleurs

plutôt généreuses dans le soutien apporté. Le Conseil d’État

octroie en effet une subvention de 3000 francs pour l’acquisition

de matériel éducatif, de 8000 francs pour l’achat des installations

de l’atelier de tissage destiné aux élèves d’âge plus avancé, prend

à sa charge le salaire de Simone Reichenbach et contribue aux

frais de perfectionnement de cette dernière 74 .

L’ÉCOLE ITINÉRANTE :

UNE ANNÉE TEST

≥ L’école itinérante s’organise donc durant cette année scolaire

1963-1964. D’emblée, l’Association de parents peut ouvrir des

classes dans cinq centres régionaux : Sierre, Sion, Martigny,

Orsières et Monthey. Dans chaque lieu, Simone Reichenbach

accueille entre deux et six élèves. Elle est alors seule à se charger

des classes et répartit son emploi du temps hebdomadaire en

deux demi-journées par centre.

≥ Trente enfants sont inscrits pour cette première année. Ils

ont été signalés à l’association soit par les parents soit par des

institutions – services sociaux, AI ou SMPV. Afin d’établir l’admissibilité

de l’enfant, le SMPV procède à un examen psychologique.

Il s’agit, d’une part, d’une démarche nécessaire pour toute

demande de subside auprès de l’AI, d’autre part, d’un examen

qui permet à l’éducatrice de déterminer l’action pédagogique à

mettre en place pour chaque enfant.

≥ L’objectif premier de l’école itinérante est de transmettre aux

enfants une éducation pratique, gestuelle et sensorielle, afin de

« les préparer à une intégration dans le circuit économique par

les ateliers protégés ». Lorsque cela est possible, quelques

notions scolaires sont également transmises (écriture, lecture,

Il m’est agréable de vous dire que tous les membres de notre association éprouvent vis-à-vis

de M me Reichenbach un profond sentiment à la fois de reconnaissance et d’admiration.

Son dévouement à notre cause est au-dessus de tout éloge et tient d’une véritable vocation.

Lettre de Jules Délèze, président, au Conseiller d’État Marcel Gross, chef du DIP, 9 juillet 1964


039

calcul). À la fin des demi-journées de cours, les parents

emportent avec eux du matériel éducatif pour faire travailler leur

enfant au moins une heure par jour.

≥ Le bilan de cette première année de l’école itinérante est

positif. Tous les parents désirent que l’expérience se poursuive.

Toutefois, ils trouvent le travail réalisé insuffisant et souhaiteraient

que les cours aient lieu plus souvent durant la semaine.

L’association est du même avis.

≥ Durant les années qui suivent, elle cherche des solutions

pour augmenter le nombre de jours d’école et réfléchit également

à l’ouverture d’un semi-internat. Outre les aspects financiers et

la nécessité de trouver des locaux, ces projets sont empêchés

par une autre réalité : le manque de personnel formé susceptible

de venir épauler Simone Reichenbach.

≥ Des solutions doivent toutefois être trouvées rapidement,

puisque le nombre d’élèves va sans aucun doute augmenter et

que l’enseignante spécialisée ne peut assumer plus de vingt-cinq

élèves, surtout avec les nombreux déplacements entre les différents

centres. Sa charge de travail a d’ores et déjà atteint la limite

acceptable. Au début de l’année 1965, elle parcourt environ

2000 km par mois avec sa voiture privée 78 .

≥ DE NOMBREUSES ABSENCES

Sur les trente enfants inscrits, seuls vingt-deux ont effectivement

participé à cette année scolaire. Les huit absences s’expliquent

par une difficulté dans le déplacement vers le centre

de cours : soit l’enfant est trop agité pour que des déplacements

puissent être envisagés de manière régulière, soit « la

maman, déjà surchargée, ne peut sacrifier deux demi-journées

par semaine pour conduire l’enfant handicapé au cours ».

Les absences sont également nombreuses parmi les enfants

qui suivent l’école. Simone Reichenbach s’en plaint au comité.

Le système choisi implique un partage des trajets entre l’éducatrice

et les parents qui doivent amener leur enfant jusqu’au

centre. Alors que les déplacements prennent du temps à

Simone Reichenbach et coûtent à l’association, il arrive que

l’éducatrice se retrouve face à une salle vide, les parents

n’ayant pas trouvé de solution pour véhiculer leur enfant.

Simone Reichenbach propose d’établir un règlement et de délivrer

une amende de 2 francs pour toute absence non justifiée à

l’avance 75 . Une autre solution, plus arrangeante, serait d’organiser

un système de transport géré par des bénévoles pour suppléer

les parents. Au cours de l’année 1964, une dame à Sion

et deux dames à Sierre donnent de leur temps pour cela 76 .

UN SOUTIEN CONFIRMÉ

DU CONSEIL D’ÉTAT

≥ En décembre 1964, sur la base du rapport établi par Simone

Reichenbach, et sur demande du comité de l’association, le

Conseil d’État décide d’accorder une reconnaissance officielle à

l’école itinérante pour les quatre prochaines années, comme

solution provisoire en attendant l’ouverture d’un établissement

spécialisé pour enfants mentalement déficients à Monthey,

la future Castalie 79 . Outre des subventions pour le matériel

≥ L’AI : 4 FRANCS PAR SEMAINE,

PAR ENFANT

Outre les subventions cantonales, l’école itinérante peut

compter sur les subsides attribués par l’AI pour les jours de

scolarité. En 1963, cela représente un montant de 4 francs

par semaine par enfant. Le comité de l’Association de parents

choisit d’utiliser ce montant pour couvrir les frais de déplacement

de Simone Reichenbach entre les différents centres de

l’école itinérante 77 .


Lieux de domicile des 83 élèves que comptent les différents centres de l’école itinérante en octobre 1967.

Dessin publié dans Les enfants du secret.

Évolution du nombre d’élèves de l’école itinérante

Juin 1965

Juillet 1966

Mars 1967

Fin octobre 1967

Fin 1968

Juin 1969

31 enfants

40 enfants

60 enfants

83 enfants

92 enfants

105 enfants


041

En 1969, l’école

accueille environ

100 élèves… mais 23

doivent être refusés.

éducatif, il continuera à assumer le salaire de Simone

Reichenbach 80 . Marcel Gross, qui s’est engagé en faveur

de l’école, montre ainsi toute la confiance qu’il place dans

l’Association de parents et son soutien à sa cause.

≥ Il le confirme au début de l’année 1965 en proposant

au Conseil d’État d’accorder à l’association d’ouvrir une

classe supplémentaire à mi-temps à Orsières, tenue par un

enseignant à la retraite, Paul Darbellay 81 . L’homme ne dispose

pas de la formation complémentaire normalement

requise, mais serait supervisé par Simone Reichenbach qui

viendrait une fois par semaine à Orsières. En entérinant cette

décision, le Conseil d’État utilise son droit à déroger aux règles

établies par l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS) en

matière d’engagement. En règle générale, le personnel doit être

composé de diplômés en pédagogie curative, d’enseignants sans

formation de ce type, mais pouvant justifier d’une expérience

pratique dans l’enseignement spécialisé ou de personnel en

cours de formation spécialisée. Dans des circonstances spéciales

et dûment justifiées, les autorités cantonales peuvent toutefois

faire des exceptions. Elles doivent alors s’assurer que le personnel

enseignant spécialisé est suffisamment nombreux au sein de

l’institution et que des mesures sont prises pour assurer la formation

du personnel non spécialisé 82 .

LA HAUSSE DES EFFECTIFS :

UN DÉFI À RELEVER

≥ Pour la rentrée scolaire 1965, l’association peut compter sur

31 enfants inscrits à l’école itinérante. En juillet 1966, elle

accueille déjà 9 enfants de plus et huit mois plus tard ce ne sont

pas moins de 60 élèves qui suivent les classes de l’association.

Encore six mois, et ce sont 83 enfants qui sont accueillis ! Jusqu’à

la fin de la décennie, les effectifs sont en constante augmentation.

En 1969, l’école accueille environ 100 élèves… mais

23 doivent être refusés par manque de classes et placés soit à

l’Institut du Bouveret, soit à l’Institut Sainte-Agnès.

S’adapter sans moyens

≥ Il n’est pas trop osé d’affirmer que l’Association de parents

est victime du succès de son école durant ces années puisque

les comptes-rendus de séances de cette période montrent bien

les obstacles avec lesquels le comité doit composer. S’il se réjouit

du succès rencontré, il entraîne également un certain nombre de

défis à relever et les solutions ne sont pas faciles à trouver au vu

des faibles moyens à disposition. Les problématiques des débuts

restent les mêmes : difficulté à recruter du personnel formé, inadéquation

des locaux occupés pour répondre à une forte

≥ UN SECRÉTARIAT PERMANENT

La création par une association d’un secrétariat permanent est toujours le signe d’une intensification

de ses activités. L’Association de parents n’échappe pas à la règle. En 1966, elle décide

de créer un poste de secrétaire. La titulaire nommée prendra d’abord en charge l’administration

de l’école itinérante (gestion des factures AI, établissement des rapports médicaux pour l’AI,

contacts avec les familles, puis secrétariat de direction), puis également le secrétariat de la

colonie : organisation, recherche du personnel, etc. 83


042

augmentation de la demande, complexité de la question du transport

des élèves de leur lieu de domicile à l’école. Dans ce

domaine, plusieurs solutions sont testées, et adoptées selon les

lieux : transports par des « dames bénévoles », notamment dans

la région de Sion ; utilisation des transports publics avec surveillance

d’une personne bénévole comme pour la région Leytron-

Chamoson-Vétroz ; mise en place d’un service de taxi avec prise

en charge des frais par l’AI.

Madame Lachat et Madame Reichenbach

nous disent qu’elles se sont réunies avec des

dames de Sion, en vue de créer une école

permanente dans cette ville. Mais il est très

difficile de trouver une solution. Il y a 11 enfants,

tous de villages différents et souvent de vallées

différentes. C’est toujours le problème du

transport qui paraît insoluble. La meilleure

solution sera sûrement la création d’un semiinternat

(du lundi au vendredi).

PV de la séance du comité du 19 février 1966

École à plein temps, semi-internat, externat…

≥ La priorité est de parvenir à augmenter le nombre d’heures

de classe des enfants en passant d’abord à des journées complètes

avant de pouvoir proposer des semaines pleines, comme

dans les écoles ordinaires. Les rapides progrès réalisés par les

élèves de la classe d’Orsières qui bénéficient déjà d’un horaire à

la journée renforcent la conviction de Simone Reichenbach et du

comité de l’association à ce sujet 84 . Ainsi, dès qu’elle le peut, elle

adopte ce principe. En 1967, deux classes supplémentaires –

l’une à Sion, l’autre à Monthey – sont données à la journée et les

enfants prennent leur repas en commun 85 .

≥ En 1965, ce projet est assorti d’un autre changement : si les

enfants viennent à l’école à plein temps, un système de semiinternat

– soit un internat de semaine – devrait être adopté. Cela

permettrait notamment de résoudre la question des déplacements.

L’association imagine créer cette structure à Martigny,

d’abord, puis de l’étendre aux autres centres. Il serait ensuite utile

d’engager des logopédistes et des psychomotriciens, qui fonctionneraient

pour l’ensemble des centres, afin d’assurer des

séances de rééducation durant la semaine pour les enfants restant

sur place 86 .

≥ Le projet est ambitieux. Trop semble-t-il pour les moyens

dont dispose l’Association de parents. Elle s’en rend compte en

allant plus dans le détail du dossier. Les frais de location des

locaux nécessaires sont trop élevés, les problèmes de déplacement

ne sont pas totalement résolus avec cette solution et, à

cette période, il reste difficile de trouver du personnel formé alors

≥ SIMONE REICHENBACH, PREMIÈRE DIRECTRICE DE L’ÉCOLE

En 1967, l’Association de parents décide de créer un poste de direction pour l’école. Il devient en effet indispensable de disposer

d’une personne de référence pour le personnel ainsi que pour les parents. Simone Reichenbach paraît bien sûr toute désignée

pour ce poste puisqu’elle est à l’origine de l’école, suit les projets de développement de près, a un contact privilégié avec les

parents et dispose de la formation pédagogique requise. On peut même considérer que, de facto, son engagement correspond

déjà à la fonction.

Notons que pour la première fois, en 1966, l’école fait un bénéfice. Cette nouvelle donne permet d’envisager l’avenir avec un peu

plus de sérénité et contribue sans doute à cette décision.


043

qu’un projet de semi-internat nécessite évidemment

une équipe plus grande qu’un externat 87 . Malgré ce

constat, l’association n’abandonne pas complètement

ce projet. S’il paraît trop compliqué de le réaliser pour

Martigny, peut-être pourrait-il l’être à Sion. En 1967,

toutes les options sont encore ouvertes : tant que le

Les institutions

dédiées à l’enfance

se multiplient,

issues la plupart

du temps

d’initiatives privées.

centre pour oligophrènes profonds prévu à Monthey n’est pas

réalisé, une structure en internat ou en semi-internat manque

dans le paysage valaisan. Le comité de l’association sollicite d’ailleurs

en 1965 déjà Marcel Gross afin qu’il incite le Conseil d’État

à activer ce projet 88 . L’Association de parents envisage dès lors

encore la réalisation d’un tel établissement lié à son école,

comme « solution provisoire et rapide » en attendant l’ouverture

du centre de Monthey 89 . Cette option sera toutefois abandonnée

l’année suivante et celle d’écoles régionales à plein temps en

externat privilégiée.

≥ Deux études menées entre 1966 et 1969, l’une officielle, par

une commission cantonale, l’autre commandée par l’Association

de parents, viennent confirmer qu’il s’agit de la solution à

privilégier.

LA COMMISSION CANTONALE

SUR L’ENFANCE DÉFICIENTE

≥ À partir du milieu des années 1960, l’État prend conscience

de la nécessité de mieux coordonner les efforts fournis dans le

domaine de l’enfance déficiente. Il est toujours plus sollicité afin de

s’engager dans ce domaine et les besoins ne cessent d’augmenter.

L’Office fédéral des assurances sociales recommande en outre aux

cantons de se pencher sur la question : les institutions dédiées à

l’enfance se multiplient, issues la plupart du temps d’initiatives privées,

mais qui, inévitablement, sollicitent non seulement une aide

de la Confédération – en priorité l’AI –, mais également des contributions

du canton. Or, ces institutions ne savent pas toujours

identifier les urgences dans les besoins à couvrir et

peuvent parfois faire double emploi. Une coordination des

efforts, une planification, voire une surveillance exercée

par l’État seraient souhaitables.

≥ De fait, en 1966, l’État du Valais décide de créer une

commission 90 d’étude sur l’enfance déficiente, chargée de faire

l’inventaire des besoins, des réalisations acquises et d’établir un

programme pour le futur en tenant compte d’une coordination des

efforts des différentes associations déjà actives dans le domaine,

de réfléchir également à la répartition des compétences et aux

collaborations possibles entre les départements concernés –

Instruction publique ; Justice, police et santé publique ; Finances.

≥ Au début de l’année 1968, les travaux sont bien avancés et

les grandes lignes établies. La commission peut dès lors consulter

les organisations intéressées à la question de l’enfance déficiente

91 . Selon ses dires, son rapport final, rendu le 25 octobre

1968, a rencontré leur entière approbation et est établi à l’unanimité

des membres de la commission 92 .

≥ Il est évidemment intéressant de s’arrêter sur ce document

qui vient soutenir les projets de l’Association de parents pour son

école.

Un document-cadre qui soutient l’école

itinérante

≥ Le rapport traite des différentes catégories de l’enfance déficiente

et fait des recommandations pour chacune d’elles : enfants

physiquement handicapés, enfants caractériels, adolescents

caractériels ou caractériels très difficiles, débiles caractériels, cas

sociaux, enfants débiles – soit un QI entre 50 et 90, dits « scolarisables

» en classe de développement –, les oligophrènes profonds

ou handicapés mentaux profonds, soit des personnes avec un QI

inférieur à 50 93 . Parmi ceux-ci, on trouve, d’une part, les « idiots »,

appelés également par les pédagogues les « inéducables » et,


044

La famille

est le premier

cadre éducatif et

le maintien dans la

cellule familiale

est un atout.

≥ LES ÉLÈVES ADMIS :

DU PRINCIPE À LA RÉALITÉ

Définir de manière stricte la population accueillie par l’école itinérante

est extrêmement difficile. Alors que depuis les débuts,

l’école a été conçue pour les « enfants débiles moyens et profonds

», soit n’atteignant pas un QI de plus de 60 94 , le Service

médico-pédagogique la sollicite régulièrement durant cette première

décennie pour qu’elle prenne en charge des enfants avec

un retard important dans leur scolarité, mais avec un QI plus

élevé pouvant aller jusqu’à 75. L’école déroge alors à ses règles

d’admission bien que cela complique son action pédagogique en

augmentant encore l’hétérogénéité des classes.

Une solution à ce problème est difficile à trouver. Le futur

centre de Monthey est destiné aux enfants ayant un QI inférieur

à 50. Quant aux classes de développement, elles accueillent

les élèves avec un QI supérieur à 70. Si l’école itinérante ne

prenait réellement que les enfants au QI inférieur à 60 qui se

chargerait de ceux n’entrant dans aucune de ces catégories 95 ?

d’autre part, les « imbéciles » ou les « pratiquement éducables

». La commission souligne le manque criant d’établissements

pouvant accueillir ces enfants en Valais. Le

projet de construction d’un centre dédié en lien avec

l’hôpital psychiatrique de Malévoz offrira quelque 150

places en internat, mais ne permettra pas de couvrir les

besoins, puisque le nombre d’enfants dans cette catégorie

est établi à 300 pour l’ensemble du territoire cantonal. En

outre, une telle structure en internat n’est recommandée que pour

« ceux qui, pour une raison ou une autre, ne peuvent être maintenus

dans leur famille ». Pour tous les autres, la commission préconise

des solutions en externat, car la famille est le premier

cadre éducatif et le maintien dans la cellule familiale est

un atout pour le développement de l’enfant.

≥ Le centre de Monthey et l’École de pédagogie curative

de Viège devraient répondre aux besoins du Haut-

Valais. Par contre, une structure manque pour que ceux

du Valais romand soient satisfaits. La commission ne voit

qu’une seule solution pour régler ce déficit : « le développement

de l’école itinérante et, si possible, par la création de classes fixes

pouvant prendre en charge les enfants pour un plus grand

nombre d’heures que ne peut le faire actuellement l’école ». Elle

reconnaît ainsi la structure développée par l’Association de

parents et soutient la nécessité de la développer encore. Si l’on

compte sept élèves par classe, « ce qui est un maximum pour

des enfants aussi arriérés », il faudrait que l’école itinérante

compte vingt-huit classes ! La commission va jusqu’à évaluer

l’investissement nécessaire pour la construction de bâtiments

adaptés à 2,8 millions de francs répartis à 50 % entre l’AI et l’État

ou les communes. Elle ajoute à ce montant, une subvention de

l’État de 120 000 francs pour le fonctionnement quotidien.

Un principe que l’on doit toujours avoir à

l’esprit est que la place naturelle d’un enfant est

dans sa famille. Un placement ne doit intervenir

que s’il est absolument nécessaire et que si l’on

ne peut remédier à la situation de l’enfant dans

son milieu naturel.

Rapport de la commission cantonale sur l’enfance déficiente,

25 octobre 1968


045

RÉPARTITION

DES ENFANTS SELON

LA SITUATION FAMILALE :

72 %

viennent d’une famille

de deux à cinq enfants

20 %

viennent d’une famille

de six enfants et plus.

Ce chiffre peut aller jusqu’à seize !

7 %

sont enfant unique

1 %

nombre d’enfants inconnu

Dessin et données publiés

dans Les enfants du secret.


046

« LES ENFANTS DU SECRET » :

ENQUÊTE SUR LES ENFANTS

ÉDUCABLES SUR LE PLAN

PRATIQUE

≥ À la fin de l’année 1967, le comité de l’association imagine

lancer un recensement des enfants en âge scolaire en situation de

suivre l’école itinérante 96 . Un tel travail lui permettrait de mieux

cerner les besoins et de développer son projet en adéquation avec

ceux-ci. Disposer de données fiables serait en outre un atout pour

convaincre les autorités de soutenir le développement de l’école.

En 1968, une étudiante de l’École d’études sociales et pédagogiques

(EESP), future assistante sociale, Christiane Besson-Gloor,

se propose d’en faire son travail de diplôme. Avec l’aide de l’Association

de parents, elle mène l’enquête auprès des familles du Valais

romand. Cent nonante-huit enfants et adolescents mentalement

handicapés, au QI situé entre 20 à 60, participent à l’enquête, soit,

selon l’auteure, le 97 % environ des enfants concernés 97 .

≥ Le choix de cette fourchette de QI se base sur la classification

du Dr Rey-Bellet qui établit que les « pratiquement éducables

» ont un QI entre 20 et 50. L’auteure élargit ensuite son

étude en prenant en compte également les enfants avec un QI

compris entre 50 et 60 afin de couvrir la population accueillie par

l’école itinérante 98 .

≥ Le travail réalisé par Christiane Besson-Gloor, intitulé « Les

enfants du secret », est soutenu en mars 1969. Il offre des données

chiffrées intéressantes qui permettent de dresser le portrait

de cette enfance pratiquement éducable valaisanne à un moment

donné.

Les chiffres

≥ Sur les 198 enfants concernés, 79 se trouvent à l’école itinérante,

61 sont placés en institution, 13 dans une classe de

l’école ordinaire (au village, dans une école ménagère publique

ou privée, dans une classe spéciale), 16 ont des « activités

diverses » (à la campagne, dans un magasin, sur un chantier, au

ménage familial, etc.), 11 travaillent dans un atelier, 18 sont sans

activité. Cette catégorie compte surtout des jeunes de plus de 16

ans qui n’ont sans doute pas été en institution éducative et qui

n’ont désormais pas de place en atelier vu que seuls ceux ouverts

par l’Association de parents existent 99 .

Un témoignage sur le vécu des parents

≥ Au-delà d’une étude statistique et de données qualitatives

permettant d’imaginer l’avenir de l’école, le texte de Christiane

Besson-Gloor offre un témoignage saisissant sur le vécu des

familles avec un enfant handicapé mental, à la fin des années

1960. Le regard sensible, et le style de l’auteure, permettent

de mieux comprendre les situations vécues et éveillent

l’émotion du lecteur. Son titre, Les enfants du secret, parle de

lui-même.

« Deux remarques m’ont beaucoup aidée à comprendre les

mères que j’ai rencontrées, celle de l’une d’elles : ‹ On s’attache

plus à ces enfants qu’aux autres › et celle du Dr Schmid dans

son cours : ‹ avoir un enfant pas comme les autres, c’est pour

les parents une atteinte profonde à leur confiance en soi ›.

Il est intéressant aussi de noter l’attitude de quelques-unes

de ces mères :

La maman fatiguée et amère : ‹ Je m’en suis tellement occupée,

et je vous assure, je n’ai pas eu beaucoup de joies en

retour ›.

La maman hyperprotectrice, qui sacrifie toute son existence

à l’enfant handicapé, qui s’en occupe presque exclusivement,

qui pense – ou veut se persuader – qu’elle ne peut rien faire

d’autre, qu’il n’existe pas de solution adéquate. […]

La maman qui, malgré les difficultés, répartira judicieusement

ses efforts gardant toujours pour préoccupation de

conduire autant qu’il est possible son enfant à l’indépen-


047

dance, but final de l’éducation : ‹ Vous savez, il serait

plus facile de le porter que de lui faire monter les escaliers

tout seul ! › - ou bien : ‹ Je suis contente qu’elle aille

à l’école itinérante ; je devenais affreusement craintive ;

j’avais toujours pour qu’elle tombe. › - et cette question

: ‹ Comment le sortir le plus possible de la famille,

où il risque de devenir un tyran ? ›

La maman chargée d’une nombreuse famille, avec en plus la

campagne ou d’autres activités, et qui réfléchit, pèse ses

forces, se résout enfin – mais avec combien de peine – à

placer son enfant : ‹ Une vie familiale harmonieuse devenait

impossible ; je devais aussi me consacrer aux autres enfants ›.

La mère qui accepte mal le handicap de son enfant et essaie

de le faire « vivre comme si », en particulier sur le plan scolaire

: ‹ Ne croyez-vous pas qu’il pourrait encore apprendre

autre chose ? Nous le désirons tellement ›.

Ces notes ne font qu’esquisser certaines attitudes des parents

que j’ai rencontrés. Leur comportement est en général beaucoup

plus complexe. Souvent ils oscillent d’une attitude à

l’autre. Les sentiments qui les animent vont de la honte à

l’amour, du rejet à l’hyperprotection. En va-t-il autrement, du

reste, pour les parents d’enfants qu’on dit ‹ normaux › ? » 100

≥ Comme dans beaucoup de documents de cette période

dans les archives de l’Association de parents, ce sont ici les

mamans qui répondent. Dans la plupart des cas, les pères sont

absents des documents. Il est évident qu’à cette période c’est

la mère qui se charge prioritairement de l’enfant et qui vit au

quotidien cette situation. Connaître le point de vue du père

serait pourtant également intéressant : comment perçoit-il le

handicap de son enfant ? Son état d’esprit est-il le même que

celui de la mère ? Ont-ils les mêmes attentes vis-à-vis de l’école

par exemple, la même vision de l’intégration de leur enfant dans

la société ? Il est difficile de le savoir.

Dans la plupart des

cas, les pères sont

absents des

documents.

≥ Plus loin dans son travail, Christiane Besson-Gloor

associe toutefois le père dans son analyse en parlant des

parents et non plus de la mère. On peut donc imaginer

qu’elle a également pu s’entretenir avec l’homme de la

maison :

« Quel est votre plus grand souci pour votre enfant actuellement

? […] La plupart des parents ressentent si fortement le

handicap de leur enfant, ils ont tellement de soucis que cette

question leur paraît souvent puérile, ou qu’ils parviennent mal

à débrouiller l’écheveau de leurs préoccupations trop nombreuses.

[…]

Autant de parents rencontrés, autant de formulations différentes

de mêmes soucis. On peut dire cependant que leurs

préoccupations s’énoncent en général moins à travers le handicap

qu’à travers les conséquences de ce handicap, et principalement

l’impossibilité pour l’enfant de suivre une scolarité

normale et même spéciale ou de s’y réintégrer. 101 »

≥ La peur qui apparaît encore plus criante chez les parents est

celle de l’après… après l’école itinérante… après eux… À cette

même période, la question notamment du devenir des enfants à

la fin de la scolarité préoccupe également l’Association de

parents qui se mobilise pour créer des ateliers et des lieux de vie

pour les adultes.

L'école à plein temps plébiscitée

≥ Concernant leur souhait en lien avec l’école itinérante, la

grande majorité des parents confirment les intuitions de

Simone Reichenbach et du comité de l’association : une école à

plein temps « comme pour tous les enfants » avec la possibilité

de manger sur place à midi. La solution de l’externat est également

plébiscitée. Seule une très petite minorité des mères

d’élèves de l’école itinérante préférerait placer leur enfant, soit

par surcharge de travail, soit à cause des déplacements trop

importants pour amener l’enfant à l’école 102 .


048

ÉCLAIRAGE

INFORMER, RAPPROCHER

≥ Durant la même période, afin de soutenir ses projets et de

défendre la cause des enfants déficients, le comité de l’Association

de parents réfléchit à de nouvelles actions : lobby auprès de

parlementaires, rencontre du Conseil d’État, contacts avec des

journalistes, participation à des actions au niveau romand ou

suisse – journée de l’arriération mentale par exemple. D’autres

actions sont également menées à l’attention du grand public.

Sensibiliser au handicap mental sur grand écran

≥ L’Association de parents décide, en 1967, de produire le film

envisagé par le Montheysan Fernand Premand dans le cadre de

sa thèse de doctorat en ethnologie. « L’est où Jacky ? » est présenté

pour la première fois à Paris en juin 1968 et en Valais en

décembre de la même année. Le réalisateur a vécu durant une

semaine avec les participants de la colonie de Praz-de-Fort.

« N’attendez pas une histoire agréablement faite et qui finit bien »

annonce en substance le comité de l’association dans le Main

dans la main de mai 1968. « Ce film veut vous saisir et inoculer

en vous un virus contre la léthargie. […] De la situation de nos

enfants, ce film apportera un aperçu presque brutal, mais l’examen

de conscience qui doit suivre en donnera une véritable intelligence,

soit un approfondissement et discernement tellement

nécessaires pour la recherche urgente d’un statut social digne

pour les arriérés mentaux. » 103 À noter que la musique, insolite

selon les dires du réalisateur, a été composée par les enfants de

la colonie eux-mêmes 104 .

≥ L’association organise des projections en Valais et en profite

pour présenter ses activités et sensibiliser les spectateurs à la

cause des enfants handicapés mentaux.

≥ Au moment de visionner le film avant sa sortie, les membres

du comité sont partagés entre ceux qui regrettent que l’aspect

éducatif ne soit pas mieux valorisé et ceux qui pensent que le film

peut choquer et qu’il s’agit d’un processus nécessaire à une large

prise de conscience 105 .

L’association met sur pied d’autres actions pour sensibiliser

le public et pour lui faire voir que les enfants en

situation de handicap peuvent s’adonner aux mêmes

activités que les autres enfants et qu’ils disposent de leur

propre mode d’expression. Du 8 au 16 novembre 1969,

huitante toiles présentant les travaux des élèves sont

exposées au Musée cantonal des beaux-arts. « Le public

est venu nombreux au vernissage, il a manifesté son

intérêt tout au long de la semaine ; il a ouvert ses yeux sur

ce monde inconnu des jeunes handicapés mentaux » 106 .


049

L’ÉCOLE LA BRUYÈRE

≥ En 1968, afin de marquer cette volonté de changement, l’Association

de parents décide de changer le nom de l’école, Avec le

choix d’ouvrir des classes à temps plein, à terme, dans chacun de

ses centres, le qualificatif « itinérante » ne fait plus sens. L’école

s’appellera désormais La Bruyère. « Comme cette plante qui fleurit

et s’épanouit dans les landes arides, nos enfants pourront désormais

s’épanouir à la vie de l’esprit et du cœur… » s’enthousiasme

le comité dans le bulletin d’information de l’association 107 .

≥ Durant l’année scolaire 1967-1968, les enfants ne viennent

encore à l’école que deux à trois jours par semaine et les parents

doivent dès lors s’impliquer les autres jours pour mettre en place

des exercices à domicile à l’aide du matériel éducatif fourni. De

premières expériences d’école à la journée, avec repas de midi

pris en commun, sont organisées et donnent satisfaction. Elles

sont un argument de plus, de terrain cette fois, qui vient soutenir

la volonté de l’Association de parents d’ouvrir des classes à plein

temps, en externat.

À Martigny et Monthey,

les premières classes à plein temps

≥ L’année scolaire 1968-1969 est une année de transition vers

ce nouveau départ, une année de préparation. À Sion, Sierre et

Orsières, les enfants viennent à l’école à mi-temps alors qu’une

classe se tient à Vollèges, un jour par semaine, dans un local mis

à disposition par la commune. Pour la première fois, des classes

sont organisées à plein temps : deux groupes se retrouvent dans

des appartements loués à la rue de la Moya, à Martigny, sous la

responsabilité de Cilette Cretton, enseignante spécialisée, et de

Marie-Thérèse Carron, jardinière d’enfants « avec formation complémentaire

pour enfants arriérés » ; deux autres à Monthey où

un appartement a également été trouvé, rue de l’Industrie 58.

Marie-Françoise Tomasi, enseignante spécialisée, et Andrée

Voeffray, jardinière d’enfants, sont en charge des élèves chablaisiens.

Dans les deux cas, une liste d’attente existe 108 .

≥ Pour ouvrir ces classes à plein temps, le comité a dû redoubler

d’efforts, d’une part pour trouver des locaux adéquats et

dont le coût soit acceptable, d’autre part, et peut-être surtout,

pour recruter du personnel qualifié, répondant aux exigences du

Département de l’instruction publique 109 .

Des difficultés de recrutement

≥ Dans la discussion avec l’État sur le renouvellement de la

convention qui le lie à l’école La Bruyère, la question de l’encadrement

des élèves est centrale. Le DIP arrête qu’un nombre

maximum de dix élèves peut être pris en charge par une même

personne. L’école comptant désormais une centaine d’élèves à la

fin de l’année scolaire 1968-1969, pour respecter cette disposition,

du personnel doit être engagé. Le problème se situe alors

dans l’écart qui existe entre les exigences de formation établies

par le Département et la réalité du marché de l’emploi. Pour toute

nouvelle classe ouverte, l’État souhaite que soit recrutée une personne

qui dispose au moins d’un brevet d’enseignement primaire

et d’une formation spécialisée.

≥ Respecter ces conditions est extrêmement laborieux. Peu de

personnes répondent aux critères et, en ce début 1968, aucune

formation n’existe en Valais. En outre, le recrutement hors canton

est également difficile. L’association va jusqu’à imaginer recruter

du personnel en France ou en Belgique 110 .

≥ À la suite des annonces passées dans la presse au cours du

premier semestre 1968, l’association ne reçoit que trois candidatures

; aucune ne répond aux critères. Il s’agit d’une enseignante

Montessori et de deux jardinières d’enfants 111 . En juin

1968, et pour ne pas mettre en péril la rentrée scolaire à venir,

le comité propose de les engager et de les salarier directement,

en attendant que le DIP se prononce sur la question 112 .

≥ QUID DU PERSONNEL DÉJÀ ENGAGÉ ?

Pour le personnel déjà en place, et dont la formation n’est pas

reconnue par le DIP dans le cadre de l’enseignement spécialisé

– comme les jardinières d’enfants –, des cours de perfectionnement

sont exigés 113 . Les personnes concernées ne pourront pas

obtenir d’augmentation salariale tant que leur formation n’est

pas complétée 114 .


050

Créer une formation en Valais ?

≥ Le constat du manque de personnel qualifié n’est pas nouveau

; il remonte à l’ouverture de l’école itinérante. En 1967 déjà,

Simone Reichenbach obtient que des cours de pédagogie curative

soient proposés dans le cadre des formations cantonales de

perfectionnement. L’ensemble du personnel enseignant de

l’école le suit 115 . D’autres formations sont mises sur pied durant

ces premières années de l’école, pour acquérir divers outils

méthodologiques, des voyages d’études sont organisés. Pour

Simone Reichenbach, assurer de bonnes bases pédagogiques

pour l’école est indispensable 116 .

≥ Les exigences posées par l’État et la nécessité de professionnalisation

pour répondre à l’augmentation des effectifs poussent

toutefois Simone Reichenbach à redoubler d’efforts pour faire

évoluer cette situation. Des contacts sont notamment pris avec

l’Université de Fribourg qui serait disposée à donner des cours de

pédagogie curative en Valais, sous forme de formation en

emploi 117 . Une solution pourrait également être trouvée en collaboration

avec l’École d’études sociales et pédagogiques (EESP),

gérée par Claude Pahud à Lausanne 118 . Le Dr Rey-Bellet donne

son appui au projet. Locaux et professeurs pourraient être payés

par l’AI. Toutefois, l’Association de parents n’a pas pour mission

de développer une telle offre. Contact sera donc pris avec l’ASA 119 .

≥ Le projet semble se concrétiser moins vite que prévu, le chef

du Service de l’enseignement émettant quelques réserves. Nous

n’avons malheureusement pas plus de précisions à ce sujet.

Peut-être émet-il des doutes sur la formation dispensée alors par

l’EESP qui, selon une note de Simone Reichenbach, forme des

jardinières d’enfants avec spécialisation, formation qu’elle juge

excellente, mais qu’elle doit défendre auprès du DIP pour obtenir

une reconnaissance 120 .

≥ Des cours extraordinaires de formation de base pour maîtres

et maîtresses des classes de développement et écoles spéciales

sont finalement mis en place pour l’année scolaire 1969-1970 sur

Dès novembre 1969, l’Association de parents loue la Maison Turini

pour y installer les classes de son école de Sierre jusqu’au déplacement

des élèves de cette région à Sion, dans le nouveau bâtiment

construit pour l’école La Bruyère dans le quartier de Champsec,

et inauguré en 1976.

la base d’une convention signée entre le Département de l’instruction

publique et l’Institut de pédagogie curative de l’Université

de Fribourg. Le cursus complet est réparti sur cinq semestres et

comptabilise 900 heures. La formation est destinée aux enseignants

primaires avec brevet, aux maîtresses de classes enfantines

et aux titulaires d’une formation jugée équivalente. Elle est

conçue avant tout pour les personnes qui s’occupent de « retardés

scolarisables avec un QI minimum de 0,60 », soit pour les

enseignants des classes de développement. Sur le principe, les

jardinières d’enfants, les éducateurs, les élèves d’écoles normales

en cours de formation, les éducatrices des classes pour

débiles profonds – soit les éducatrices de La Bruyère – ne sont

pas admis. La commission constituée pour mettre en place cette

nouvelle formation estime en effet que ces dernières seraient

mieux formées par l’EESP. Seule possibilité pour elles : suivre les

cours en auditrices si des places sont disponibles 121 .

≥ Le combat mené par Simone Reichenbach n’a que peu servi

pour l’école La Bruyère. Il a toutefois peut-être aidé le DIP à

prendre conscience des obstacles rencontrés dans le recrutement

et de la nécessité de procéder, pour un temps, à des adaptations

des critères.


051

Ce passage au temps

plein est présenté

comme une évidence.

≥ Finalement, à l’ouverture de l’année scolaire 1969-1970,

l’école La Bruyère peut annoncer au DIP quatorze membres du

personnel éducatif : cinq diplômées en pédagogie curative, deux

diplômées de l’EESP, quatre jardinières d’enfants avec stage dans

une école spécialisée, deux institutrices diplômées en train de

réaliser leur stage de formation spécialisée, une institutrice diplômée

de l’École normale italienne et jardinière d’enfants

Montessori. On constate que l’Association de parents a fait tout

son possible pour se rapprocher des critères de professionnalisme

établis par le DIP 123 .

1969-1970 : l’école à plein temps

≥ Le 3 septembre 1969, le DIP accepte la demande de l’Association

de parents pour l’ouverture de cinq nouvelles classes à la

journée entière à Sierre, Sion et Martigny. Dans ce dernier centre,

une classe accueillera les élèves de Vollèges et celle établie dans

cette commune ferme ses portes. Dans le texte de la décision

prise ce jour-là, ce passage au temps plein est présenté

comme une évidence, tant l’ancien système à la demijournée,

appliqué « faute de maîtres, de locaux et de

classes », ne pouvait donner satisfaction, « l’état mental et

physique de tous ces enfants exigeant un effort maximum

au point de vue éducatif et scolaire ». Autre argument : ce

système est celui qui permet à l’association de bénéficier

du maximum des prestations AI 124 .

≥ Notons que cette décision, une fois de plus, est prise

« à titre provisoire » en attendant l’ouverture du centre pour

oligophrènes profonds de Monthey. Il ne s’agit toutefois sans

doute pas de remettre ici en question l’existence même d’une

école à plein temps en externat gérée par l’Association de

parents, solution préconisée par la commission cantonale sur

l’enfance déficiente en complément au centre de Monthey, mais

l’aspect transitoire de la décision porte sans doute plutôt sur le

nombre de classes ouvertes.

≥ NAISSANCE DU CENTRE

DE FORMATION PÉDAGOGIQUE ET SOCIALE

Il faut attendre 1975 pour qu’une formation en cours d’emploi

en faveur des éducateurs et maîtres socio-professionnels soit

organisée à Sion, conjointement par le Département de l’instruction

publique et l’Association valaisanne en faveur des

enfants et adolescents en difficulté (AVIEA). Il est géré par un

comité de direction comprenant des représentants des pouvoirs

publics, des institutions et des éducateurs (Association

romande des travailleurs de l’éducation spécialisée - ARTES).

Le Centre de formation pédagogique et sociale est né 122 .

≥ RÉACTIVATION DE LA FONDATION

En 1963, l’Association de parents avait créé la Fondation valaisanne

en faveur des enfants mentalement déficients, organe

qui devait se charger des aspects juridiques et financiers de

certains projets, notamment celui d’acheter l’atelier de tissage

de Sion. La fondation, qui n’est finalement pas inscrite au

registre du commerce, n’a alors pas vraiment d’existence

légale, ni d’activité 125 . Ce n’est qu’en 1968 qu’elle devient vraiment

utile. L’Association de parents développe alors son projet

d’école à plein temps et prévoit la construction d’un bâtiment à

Sion pour celle-ci. Elle développe également son secteur pour

adultes avec l’ouverture d’un deuxième atelier à Sierre et des

projets de homes-ateliers (ouverture à Sion en 1974, construction

du home Pierre-à-Voir à Saxon inauguré en 1975). Aussi,

entre 1968 et 1973, on observe « une consolidation de la fondation

dans son rôle de gestionnaire des institutions créées par

l’Association de parents » 126 .


052

Une prise en charge par classe d’âge

≥ Au vu des effectifs et du temps passé en classe, il est également

possible de répartir les enfants selon leur âge : des classes

enfantines (« classes des petits »), avec des effectifs réduits, car,

en plus des acquisitions sensori-motrices, l’apprentissage de la

vie pratique (habillement, propreté, etc.) demande un suivi individualisé

et du temps pour chacun ; des classes d’élèves en âge

scolaire (« classe des moyens ») avec une accentuation sur les

notions de la vie pratique, avec des activités manuelles, et, pour

ceux qui le peuvent, l’apprentissage de notions de lecture et de

calcul ; des classes préprofessionnelles (« classes des grands »)

dans lesquelles un accent particulier est mis sur la transition vers

une activité en atelier comprenant des exercices d’attention, de

maîtrise spatio-temporelle et des acquisitions gestuelles 127 .

≥ Au-delà de l’appellation, l’école itinérante devient alors réellement

l’école La Bruyère cette année-là, c’est-à-dire une école

répartie en centres régionaux, accueillant des enfants en âge

scolaire à la semaine et en externat.

On recevait les enfants dans un sous-sol

à Platta. Il y avait juste deux salles et une salle

de bain. On devait les recevoir vers 9h.

C’étaient les mamans qui les emmenaient alors

on ne savait pas… Il y avait certains qui arrivaient

à 8h, d’autres à 9h, de ceux qui venaient plus tard,

etc. On avait fait deux groupes de six.

Un qui venait lundi, mercredi, vendredi. Et l’autre

groupe qui venait mardi, jeudi, samedi.

On travaillait le mercredi toute la journée,

le samedi toute la journée. Les enfants venaient

avec leur pique-nique, mais certains enfants

n’avaient rien du tout. Alors on essayait

de distribuer un peu, pour que tout le monde

puisse manger. Le soir, souvent, les parents

n’étaient pas prêts à 16 h… parfois on finissait

à 18 h. C’était dur. Mais j’étais contente ! Je faisais

une nouvelle expérience. J’avais enseigné

avec des élèves de l’école normale (la scuola

magistrale) et ça me changeait. Avec ces enfants,

on devait enseigner les choses pratiques :

comment enlever le manteau, comment délacer

les souliers, comment se laver les mains,

comment manger.

Anne-Marie Mayor, enseignante

à l’école La Bruyère de Sion dès 1968.

Entretien mené en 2021.

École La Bruyère, 1971.


En 1971, l’école La Bruyère de Martigny est transférée des appartements

de la rue de la Moya à la villa Coquoz, propriété de la Commune

sise rue du Nord 1. La Fondation loue la bâtisse dans sa totalité.


054

PAROLES D’ARCHIVES

LE TRAVAIL DES ÉDUCATRICES

≥ L’école itinérante n’existerait pas sans des personnes prêtes à s’engager pour prendre en charge des groupes d’enfants avec handicap

mental. Nous avons déjà souligné l’engagement sans faille de Simone Reichenbach. À partir de 1965, face à l’augmentation du nombre

de demandes, d’autres personnes s’investissent pour assurer l’éducation des enfants et pour faire vivre les différents centres régionaux.

Marie-Françoise Tomasi est de celles-là. Alors qu’elle est étudiante en psychologie à l’Université de Genève, avec notamment pour professeurs

André Rey et Jean Piaget, Simone Reichenbach la contacte pour lui proposer de travailler avec elle. À l’automne 1965, elle

l’accompagne le mercredi après-midi auprès d’un groupe de Monthey. Puis, à partir de janvier 1966, elle se charge seule, d’abord, de

cinq élèves, pour une journée, puis dix et enfin dix-neuf en novembre 1967 en augmentant son temps de travail. En septembre 1968,

une seconde personne est engagée pour l’aider. À l’ouverture de La Castalie, en 1972, l’école La Bruyère de Monthey est intégrée au

centre médico-pédagogique et ses élèves sont répartis dans différentes classes selon leur niveau et leur handicap. C’est là que Marie-

Françoise Tomasi poursuivra sa carrière.

≥ En 2012, l’ancienne responsable du centre de Monthey confie quelques-uns de ces souvenirs. En voici un extrait à lire comme

un « instantané de vie » de l’école durant l’année scolaire 1967-1968 128 .

Je travaille désormais à plein temps. Les élèves viennent à temps partiel, car, entre septembre et novembre, leur nombre

passe de quinze à dix-neuf. Le temps de classe varie de deux jours et demi à une demi-journée selon les problématiques

et les possibilités. Deux élèves sont pris individuellement pour une à deux heures. Niveau : première préhension de

l’objet jusqu’à l’apprentissage de la lecture.

C’est un mélange d’élèves étonnant : des handicapés sans diagnostic précis, des trisomiques, des IMC mais qui peuvent

marcher à peine (la salle est au 3 e étage), des autistes, des psychotiques, un enfant plutôt surdoué mais avec une

psychose symbiotique et un enfant de Monthey qui est à temps partiel dans une classe enfantine (il ne disait rien), mais

qui parlait dans ma classe.

La composition des groupes est basée sur les aspects pratiques [ndlr : notons toutefois que lorsque le regroupement par

niveau était possible, cette option était privilégiée 129 ]. Mercredi : élèves de la Vallée, car les parents viennent au marché.

Mardi : ceux de Morgins, du home La Forêt. Jeudi : ceux de la plaine du Rhône amenés par une dame. Les autres selon

entente avec les parents et possibilités de la classe.


055

PAROLES D’ARCHIVES

PLACER SON ENFANT, UNE SOURCE DE SOUFFRANCE

≥ Au milieu des années 1960, malgré les efforts réalisés par l’Association de parents, la situation des familles avec des enfants déficients

mentaux reste en Valais très souvent précaire. Un échange de correspondance, datant de 1967, retrouvé dans les archives de

l’Association de parents, l’illustre bien. Une maman qui n’arrive plus à s’occuper de sa fille handicapée avait trouvé une solution de

proximité auprès d’une femme de la région qui prenait en charge des enfants. Au vu de son âge avancé, celle-ci a décidé d’arrêter cette

activité. D’autres solutions doivent dès lors être trouvées. L’Association de parents, via son président, puis sa secrétaire assistante sociale,

sont en contact avec une maman, veuve, empêchée de s’occuper de sa fille pour cause de santé 130 .

Vous vous souvenez sans doute d’une visite que je vous ai

faite, l’an passé, quand je travaillais au service de Pro

Infirmis. Nous avions parlé de [votre fille]. Depuis, je l’ai vue

à plusieurs reprises chez M me Mischler et j’ai bien compris

qu’il ne vous était plus possible de vous occuper [d’elle].

[…] Monsieur Lovey m’a dit combien vous étiez soucieuse,

car M me Mischler ne veut plus garder les enfants, à partir de

juin.

Je voudrais vous assurer que M lle Brunner qui m’a remplacée

à Monthey prend sa tâche très au sérieux. […] Elle fera tout

son possible et même l’impossible pour trouver une place

pour votre enfant […] C’est souvent à la dernière minute

que l’on trouve quelque chose, car les instituts alors voient

que l’on est acculé et trouvent tout de même une petite

place. […]

En Suisse allemande, on a parfois la chance de trouver une

place, car les instituts y sont plus nombreux qu’en Suisse

française. Cela vous paraît terriblement loin et pourtant, on

s’habitue assez vite à faire des voyages un peu plus longs,

on y prend même plaisir, petit à petit. Le plus important est

que [votre fille] soit entourée d’un gentil personnel et

reçoive tous les soins nécessaires. Savez-vous qu’il y a

beaucoup de Valaisans handicapés mentaux qui sont expatriés

dans d’autres cantons ? Je suis sûre qu’[elle] réussira

aussi à s’acclimater dans un milieu allemand.

Je vous remercie de votre lettre qui me fait beaucoup de

bien, car je suis si désemparée et bien gros souci pour [ma

fille]. Qu’elle va loin n’est pas tellement un problème si cela

est dans de bonnes conditions sous surveillance, maintenant

je peux me déplacer facilement. J’ai un tout gros chagrin

de ne pas avoir l’enfant avec moi, mais ce n’est pas

possible, ma santé ne me permet pas. […] Après tant de

grandes épreuves, je ne puis avoir à satisfaction de l’enfant

que de m’en priver encore par l’éloignement. Mon plus

grand désir et qu’[elle] soit pour le mieux, c’est l’essentiel.

Ce sera alors pour moi un soulagement.

Réponse reçue par l’Association de parents, 18 [mars] 1967

Extrait d’une copie de lettre de l’assistante sociale, secrétaire

de l’Association de parents, 17 mars 1967


056

PAROLES D’ARCHIVES

LE CADRE PÉDAGOGIQUE DE L’ÉCOLE

≥ Dans une lettre adressée en novembre 1967 au Conseiller d’État Marcel Gross, chef du DIP, Simone Reichenbach expose notamment

sa vision de la déficience mentale et de l’éducation 131 . La missive nous permet de connaître ses influences, le courant dans lequel l’école

itinérante s’inscrit ainsi que la pédagogie qui y est développée au quotidien. La directrice de l’école itinérante cite évidemment Jean Piaget,

mais également sa principale collaboratrice, Bärbel Inhelder, et Robert Lafon, psychiatre, professeur à la faculté de médecine de

Montpellier, président de l’Association française de sauvegarde de l’enfance et de l’adolescence.

Tout débile est un combiné : comme tout être humain, il

est à la foi totalité et complexité. C’est une mosaïque

d’insuffisances actuelles et de potentiels méconnus. Il ne

faut pas le considérer comme un être en dessous de la

normale et penser qu’il ne sera jamais achevé ou complet,

mais comme un être différent qui peut arriver à sa maturité.

Il est dangereux de dire que son âge mental ne dépassera

jamais 6 ou 9 ans par exemple. […] Ce qu’il faut

essayer de mettre en évidence, ce n’est pas une insuffisance

quantitative et globale, mais une somme analytique

qualitative avec des capacités actuelles, et si possible

futures, en sachant bien que la débilité mentale n’est pas

un état statique, mais un moment dans une situation.

L’éducation est un voyage au radar, et non pas une expédition

dont le trajet est déjà déterminé par l’étiquette mise

au départ.

« … Quand on est handicapé, pour ne pas manquer le

train, on part plus tôt que les autres. Ici nous devons faire

de même, n’attendons pas l’âge où les autres sont en

classe pour bénéficier de l’action éducative et pédagogique

du maître, pour avoir recours aux spécialistes de

l’éducation spéciale. » (Professeur Lafon de la faculté de

médecine de Montpellier, in Sauvegarde de l’enfance,

mars 1965, n o 1/2/3.)

C’est donc très tôt et d’une façon régulière que nous

allons suivre l’enfant en l’aidant à développer ses possibilités

au maximum avec l’aide de jeux éducatifs appropriés.

Il faut aider l’enfant dans son évolution plus lente, mais

réelle, et avec le même stade que chez l’enfant normal ;

mais l’enfant déficient mental n’atteint jamais un certain

palier (cf. Inhelder et Piaget).

Ces quelques idées émises par d’éminents spécialistes

sont des idées de base pour un travail comme le nôtre.

Nous y ajouterons ce qui nous semble primordial : l’enfant

déficient mental, comme tout autre enfant, a le droit de

vivre heureux et de s’épanouir, épanouissement à sa

mesure, avec ses possibilités, ses moyens qui sont

valables.

L’éducation sera donc aussi complète que possible : nous

essayerons, par des exercices bien conduits, de permettre

à l’enfant une intégration toujours meilleure dans sa

famille, dans son entourage (les amis, le curé, les gens du

quartier, les commerçants chez qui il se rendra avec sa

mère). Pour cela, il faut que l’enfant acquière de bonnes

habitudes de propreté, de manger seul ; rééducation des

troubles psychomoteurs qui l’empêchent de s’asseoir, de

marcher, de prendre conscience de son schéma corporel,

d’agir avec plus d’adresse dans des situations pratiques,

de s’exprimer verbalement.

Nous ajouterons à cela, bien sûr, les notions scolaires

lorsqu’elles peuvent être acquises, et surtout une éducation

manuelle qui permette à nos enfants une intégration

professionnelle dès leur sortie de l’école.


057

PAROLES D’ARCHIVES

LA FAMILLE, GAGE D'ÉPANOUISSEMENT

≥ En 1967, dans le bulletin Main dans la main, une maman, Cécile Hiroz, confie son expérience et dit « son espoir » pour son fils,

Stéphane, atteint de trisomie 21.

Ayant un petit garçon mongolien, je me trouve au cœur

même des problèmes et des réalités touchant l’éducation

et l’épanouissement des enfants mentalement déficients.

Ces enfants-là ont autant et même plus que les autres,

besoin d’une vie de famille réelle et vivante. Ils ne pourront

probablement pas créer un foyer, avoir leur famille à

eux. Leur seule famille sera celle de leur enfance, de leur

jeunesse, celle qu’ils vivront avec leurs parents, leurs

frères et sœurs. Ils ont droit à ce bien unique, qui est

nécessaire à leur épanouissement et à leur développement

harmonieux, et qui leur permettra d’être plus tard des

gens sociables.

L’enfant retardé est un enfant lent, lent aussi à s’intégrer

dans un milieu, à en faire partie. Si on le met les

¾ de l’année dans un internat, il ne pourra jamais se

réintégrer dans la vie de famille pendant les vacances

[…].

Et ses frères et sœurs ? Comment s’attacheront-ils à un

enfant déjà moins attirant qu’un autre par son retard […]?

Ma fillette de douze ans, me disait tout à coup en serrant

notre petit mongolien dans ses bras : « Ah ! Maman, tu ne

trouves pas, plus ou va, plus on l’aime ! » Et le frère de

quatre ans et demi : « Jésus est trop gentil, parce qu’il

nous a donné Stéphane. » Et le grand frère de quatorze

ans : « Maintenant, c’est un vrai petit frère, un compagnon

! » Et encore la sœur de neuf ans, au départ d’une

promenade en famille : « Réservé pour moi aujourd’hui de

garder Stéphane. » Et elle en a effectivement pris soin tout

le jour.

Combien d’autres réflexions, de gestes, d’élans d’amour

pourrais-je citer. Ce sont des impondérables, mais ces

mille impondérables qui forment l’affection, qui lient

entre eux les êtres d’une même famille n’existeront jamais

dans une vie d’internat. […]

L’internat est une solution technique de l’éducation, parfois

nécessaire dans certains cas, mais il y manque l’essentiel

à un enfant retardé : la chaleur du nid familial. […]

Sa personnalité se développera beaucoup plus nettement

dans l’atmosphère familiale qui est la sienne que dans la

vie forcément standardisée de l’internat. Comme une instruction

spéciale est nécessaire à la plupart de ces

enfants, il me paraît indispensable de créer le plus grand

nombre possible d’écoles régionales, non seulement dans

les cités, mais dans les villages bien situés de nos diverses

contrées, où les enfants viendront le matin et repartiront

dans l’après-midi ou vers le soir pour regagner leur foyer.

Les enfants retardés auront ainsi, d’après leurs capacités,

une vie aussi semblable que possible à celle de leurs compagnons

de vie : frères et sœurs, voisins, amis. Ils grandiront

en harmonie avec eux, s’habituant peu à peu à une

vie sociale, qui les préparera dans leur milieu à affronter

malgré leur handicap une vie d’adulte, plus ou moins indépendante

ou dirigée, mais toujours personnelle et liée à

celle des autres.

L’expérience des écoles itinérantes en Valais me paraît être

un gage de réussite des écoles régionales quotidiennes.

[…] Les progrès sont réels et très encourageants. Si quinze

jours font déjà tant de bien, combien plus grands pourront

être les progrès de nos petits s’ils peuvent, en âge de scolarité,

« aller à l’école » chaque jour. […]

≥ « JE VEUX LE SOLEIL DEBOUT »

En 1985, Stéphane est le personnage principal

d’un documentaire réalisé par son frère,

Pierre-Antoine. Le film reçoit quatre prix

dans des festivals internationaux.


058

ÉCLAIRAGE

L’ÉDUCATION RELIGIEUSE :

UN POINT D’INQUIÉTUDE

≥ L’école valaisanne a la mission de seconder la famille dans

l’éducation et l’instruction de la jeunesse. À cet effet, elle

recherche la collaboration de l’Église. Elle s’efforce de développer

le sens moral, les facultés intellectuelles et physiques de l’élève,

de le préparer à sa tâche d’homme et de chrétien.

Art. 3 loi de 1962 sur l'instruction publique

≥ Dès les débuts de l’école itinérante, l’éducation religieuse est

une préoccupation centrale pour les parents d’élèves, comme

pour le comité et le personnel enseignant 132 . Ainsi, en 1964, à

l’approche de Pâques et du sacrement de la communion, peut-on

lire dans le Main dans la main : « Je connais des parents qui

auront le cœur serré car la croix se fait tout d’un coup pesante,

lourde, insupportable… ah ! pourquoi notre enfant se voit-il privé

de cette félicité de recevoir Jésus, de recevoir Celui qui disait

‹ Laissez venir à moi les petits enfants ›? Pourquoi ? ». Après avoir

expliqué que grâce à « l’acte expiatoire du Christ l’arriération mentale

n’est pas définitive », que « ce que Dieu répare est plus vierge

et plus profond que dans son intégrité primitive », l’auteur de ces

lignes rappelle que l’éducation familiale est primordiale et que

c’est avant tout par l’exemple que les parents peuvent former de

jeunes chrétiens. Les parents peuvent prendre conseil auprès de

leur paroisse et de l’éducatrice de leur enfant s’ils souhaitent

savoir comment transmettre des bases de catéchisme, mais

l’Association de parents souhaite aller plus loin en proposant des

cours de catéchèse adaptés 133 . Pour l’association, selon les

termes de Simone Reichenbach, l’enseignement religieux est tout

aussi importante que l’éducation 134 .

Visite en Valais de l’abbé Bissonnier, apôtre des

handicapés mentaux

≥ Le 17 février 1965, à l’invitation de l’Association de parents,

l’abbé Henri Bissonnier 135 , prêtre français, pionnier de l’éducation

religieuse à destination des enfants et adolescents handicapés,

donne une conférence à Sion. Elle est pour les parents une lueur

d’espoir. L’homme d’Église corrige en effet l’idée reçue que

Comment expliquer la profonde émotion

qui nous a saisis lorsque nos enfants sont entrés

dans la chapelle en aube blanche, le visage

heureux ! […] Puis, la messe. Une messe pas

comme les autres, belle, authentique. M. l’abbé

Bruchez, avec une merveilleuse simplicité, a su

trouver les mots vrais et imagés pour captiver

les enfants, pour leur parler de leur ami Jésus.

Chacun de nous fut émerveillé par leur sagesse

et leur sérénité tout au long de la cérémonie.

Il est certain que nos enfants – même s’ils sont

limités – ont ressenti très profondément

la présence du Seigneur ; ils ont chanté de tout

leur cœur, ils ont été heureux !

Extrait d’un témoignage manuscrit de Marylouise Dayer, sans

date 139

l’« insuffisant mental, surtout le débile profond, soit incapable

d’une authentique vie spirituelle et religieuse ». Une quinzaine

d’années d’expérience avec des jeunes souffrant de handicap

mental lui ont montré qu’ils disposaient d’un « sens religieux »,

même si celui-ci s’exprimait par des modes d’expression rudimentaires.

Aucun doute pour lui que l’enfant handicapé mental

peut recevoir une éducation religieuse et la vivre pleinement.

≥ Quelques jours avant sa conférence, l’abbé Bissonnier se

trouvait à Rome pour une réunion d’experts consacrée à l’« intégration

professionnelle, sociale et ecclésiale de l’insuffisant mental

». Le pape a en outre reçu en audience spéciale les membres

de la conférence. Le numéro de Main dans la main se poursuit

ainsi en proposant un résumé des discussions romaines et,

notamment, en reproduisant le discours du pape à cette

occasion.


059

Des premiers cours de catéchèse

≥ En 1965, un premier cours d’éducation religieuse est donné

aux élèves de Sion par une sœur de la région. Simone

Reichenbach le suit afin de pouvoir elle-même donner le catéchisme

136 . L’expérience est reproduite ensuite à Monthey 137 .

≥ À partir de l’automne 1966, la section fribourgeoise de l’ASA

organise une formation pour catéchistes spécialisés. Elle sera

suivie par le chanoine Ducrey qui appliquera ensuite la méthode

à Martigny et à Vollèges. Le 11 mai 1969, grâce aux bons résultats

obtenus, une cérémonie de première communion peut être

organisée à la chapelle du séminaire à Martigny 138 . Il s’agit là

d’une première !

≥ En 1972, des cours de catéchèse sont donnés dans tous les

centres par un prêtre.

1977 : un aumônier pour l’éducation spécialisée

≥ Plusieurs mentions dans les procès-verbaux du comité

montrent que l’Association de parents fait des démarches dès

1965 auprès de l’évêché de Sion afin de développer une catéchèse

spécialisée et de disposer officiellement d’un aumônier. Il

semble toutefois que ce vœu fut relativement long à réaliser.

Il aboutit en 1977 avec la désignation de l’abbé Firmin Rudaz

comme aumônier pour l’éducation spécialisée. Une démarche

conjointe des institutions et des parents, par le biais de l’Association

valaisanne des institutions pour enfants adolescents et

adultes en difficulté (AVIEA), permet cette réalisation. Son rôle est

plutôt celui de coordinateur pour la formation des catéchistes, des

éducateurs, pour animer des rencontres de réseau entre aumôniers

et catéchistes, faire le lien avec les paroisses.



Entre

renforcement

institutionnel

et remise

en question

Au cours des années 1970,

l’État s’investit toujours plus dans

le domaine de l’accompagnement

des personnes avec un handicap

mental. Avec son soutien ou sous

son impulsion, les structures

de prise en charge se diversifient :

le centre pour oligophrènes

profonds, La Castalie, en projet

depuis le milieu des années 1960,

est sur le point d’ouvrir ses portes ;

l’ORIPH, organisation romande

dont le but est de favoriser

la formation et à l’orientation

professionnelles des personnes

handicapées ou en difficulté,

s’implante à Sion en 1969 ;

le home-atelier Pierre-à-Voir

pour adultes est en projet

sous l’égide de la Fondation

en faveur des handicapés mentaux ;

l’école La Bruyère réfléchit

à la construction de bâtiments

à Sion et à Martigny. Face

à la multiplication des institutions,

la nécessité de structurer,

de coordonner, de professionnaliser

est toujours plus forte.


Êcole La Bruyère. Photo provenant des archives d’Insieme Valais romand. Date inconnue.


063

UN CONTEXTE EN MUTATION

≥ En 1971 est créé un poste de préposé aux handicapés, rattaché

au DIP. Le Conseil d’État nomme André Berclaz, alors

sous-directeur de l’Institut Saint-Raphaël. L’année suivante, le

Grand Conseil accepte une motion demandant l’élaboration d’une

loi sur la formation scolaire et professionnelle et l’occupation des

personnes handicapées mentales et physiques 140 . Elle sera adoptée

par le peuple en 1978. Elle consacre le principe d’intégration :

professionnelle, sociale et scolaire. La loi prévoit l’ouverture de

« classes primaires à effectif réduit permettant l’intégration d’un

ou plusieurs handicapés » 141 . Une telle classe est déjà ouverte à

Sierre à titre d’essai 142 . Des classes dites AI pour les élèves avec

déficience intellectuelle et « scolarisables » existent depuis 1975

au centre scolaire de Martigny pour le niveau primaire. Un premier

pas vers plus d’intégration était ainsi déjà réalisé par la

Ville 143 .

L’inexorable diminution des effectifs

≥ À partir de 1975, le nombre d’élèves de l’école La Bruyère

ne cesse de baisser. En 1979, pour la première fois de son histoire,

elle n’enregistre aucune nouvelle admission 144 . Entre 1976

et 1985, les effectifs accusent une chute de 30 %. Plusieurs

explications sont données : la dénatalité, l’apparition de nouvelles

institutions à destination de l’enfance, l’ouverture de classes

d’adaptation 145 – deux classes de ce type sont par exemple

ouvertes à Martigny en 1975 et accueillent une population très

proche de celle de La Bruyère 146 . Le progrès de la médecine et

de la prévention sont également pris pour argument 147 . Dès lors,

l’école doit faire face à une « sous-occupation » du personnel à

Martigny, mais pas uniquement 148 . Cet état de fait n’est sans

doute pas pour rassurer les éducatrices qui sont déjà confrontées

aux discussions sur le changement de leur statut et doivent s’habituer

à une nouvelle structure. Des négociations sont engagées

La chose qui m’a le plus frappée et qui me

frappe encore aujourd’hui, c’est que ces enfants

n’étaient pas dans l’école publique. L’école

publique était ouverte à tous sauf à eux. Ce sont

les parents qui avaient dû mettre en place tout

un circuit de formation. Je crois que je suis

entrée en politique à cause de ça. C’est vrai que

c’est la première chose dont je me suis occupée

[à mon entrée au Grand Conseil] : de réclamer

l’ouverture de classes officielles, publiques, pour

ces enfants-là. C’est venu. Ce n’est pas venu

forcément parce que je le réclamais. Les parents

avaient fait un travail époustouflant. C’est eux

qui se sont battus pour obtenir des droits

élémentaires.

Cilette Cretton, enseignante spécialisée,

députée au Grand Conseil de 1973 à 1985.

Entretien mené en 2021

Sur vingt enfants qui nous ont quittés, treize

ont accédé à des classes ou ont été admis

dans des institutions plus proches du circuit

des classes normales. Pour la première fois, nous

avons pu laisser partir des grands qui ont été

admis dans les ateliers de l’APHM [l’Association

de parents] à Saxon et à Sierre.

Rapport annuel 1975 149


064

avec le Département de l’instruction publique afin d’éviter de

mettre au chômage une partie du personnel. L’organisation des

classes est modifiée pour que chaque membre du personnel

éducatif soit occupé. Cette solution assure un statu quo pour

l’année scolaire à venir, mais, en cas de démission, le poste ne

sera pas repourvu 150 .

≥ Les organes de direction de l’école ne peuvent qu’en prendre

note, accepter qu’il s’agit d’un mouvement qu’ils ne peuvent freiner

et s’y adapter.

≥ Dans ce contexte en forte mutation, l’école La Bruyère va

devoir faire face à de nombreux défis. Alors qu’elle semblait avoir

atteint son objectif et obtenu la reconnaissance souhaitée par

l’État, on aurait pu penser que la décennie 1970 serait celle de

la stabilité ; elle finit toutefois plutôt sur une crise identitaire qui

mène à repenser en profondeur la structure de l’école. L’évolution

dans la philosophie de la prise en charge des handicapés mentaux,

avec le passage de la « séparation » à « l’intégration », aboutit

à la fin des années 1980 au transfert de l’école La Bruyère aux

communes.

Effectifs des élèves

de La Bruyère, Sion et Martigny.

Source: Rapport annuel 1986

Nombre

d'élèves

100

95

90

85

80

75

70

60

55

50

45

40

Années

1975

1976

1977

1978

1979

1980

1981

1982

1983

1984

1985

1986

1987

1988

Relevons ici que le problème des handicapés est l’un des plus complexes

qui soit dans notre canton, tant les efforts sont disparates. Une centralisation et

une coordination s’imposent.

Extrait du Journal de Sierre du 3 décembre 1971 à l’annonce de la création du poste de préposé

aux handicapés


École La Bruyère, Sion. Sans date [Années 1970].

065


066

PAROLES D’ARCHIVES

HOMMAGES À SIMONE REICHENBACH

≥ En 1972, une soirée d’adieu est organisée au centre de Sion au moment du départ de Simone Reichenbach. À cette occasion,

plusieurs personnes lui rendent hommage dans le Main dans la main 151 . Extraits.

Un départ est toujours teinté de tristesse pour ceux qui

restent, un peu comme des orphelins et des abandonnés.

Madame Reichenbach avait pris une telle place, au sein

de notre association, que son départ nous laisse désemparés

et surpris, devant l’ampleur des tâches qui nous

attendent.

Que de chemin parcouru sous la houlette de Madame

Reichenbach […]. Il fallait avoir le courage, le dévouement

et les capacités intellectuelles et morales de

Madame Reichenbach, pour mener à chef une telle œuvre.

Première classe de l’école itinérante, Sion, 1963.

Debout, à droite: Simone Reichenbach.

Et pourtant, les écueils n’ont pas manqué sur son chemin.

Grâce à elle, les difficultés rencontrées à l’AI, à l’État du

Valais, et j’en passe, ont toujours été aplanies. Par son

entregent, par son humeur toujours égale, par son objectivité

jamais prise en défaut, elle a sans cesse atteint les

objectifs fixés au plus près des intérêts de notre association

et de nos chers handicapés, qui étaient sa seconde

famille.

Bien plus, Madame Reichenbach a su s’entourer de collaboratrices

et collaborateurs compétents, […]. Si elle

était exigeante et ne se contentait pas de l’à peu près,

c’est qu’elle ne perdait pas de vue le bien de nos enfants

et le personnel devait répondre à son attente. Dans ce

domaine, elle ne fut peut-être pas toujours très bien comprise

et secondée comme elle l’aurait mérité ; mais en

toute occasion elle a su trouver les accents du cœur et la

voix de la raison pour faire respecter l’ordre, la discipline

et l’harmonie.

L’activité de M me Reichenbach ne s’est pas seulement limitée

aux tâches scolaires, mais encore elle trouvait le

temps nécessaire pour se pencher sur le cercle des

parents ! Que de colloques fructueux, organisés par ses

soins, où tous les problèmes pouvaient être débattus et

étudiés en commun !

Ne s’est-elle pas penchée également, sur le dépistage de

la première enfance, organisant à cet effet, un service

spécial ?

Je ne veux pas m’étendre davantage sur les mérites que

s’est acquis Madame Reichenbach au sein de notre association,

dont elle fut, à la fois, l’esprit qui vivifie et l’âme

qui la faisait vivre. […]

Jules Délèze, président


067

C’est avec une vive émotion que nous avons appris votre

prochain départ. Immédiatement, nous avons réalisé tout

ce que nos enfants allaient perdre. Je ne parlerai pas ici

de vos compétences pédagogiques que chacun a pu

apprécier ; nous savons tous ce que l’école La Bruyère est

devenue en quelques années grâce à vos inlassables

efforts ; c’est votre œuvre, vous pouvez en être fière !

Je voudrais insister davantage sur ce que vous avez été

pour nos enfants : quelqu’un qui les entoure d’affection,

de bonté et de compréhension. Votre souci était de les

rendre indépendants et d’éveiller leurs intelligences bien

sûr, mais surtout de les épanouir et de les rendre heureux.

Que de patience et de temps vous avez donné pour que

nos handicapés aient une vie comme les autres enfants !

Votre ténacité est venue à bout des problèmes que nous

croyions insurmontables, nous parents. Et ce qui nous

touche le plus, c’est que chaque enfant, quel que soit la

gravité de son handicap, est pour vous une personne

importante, un être à part entière qui a tous les droits et

même davantage.

Votre départ est une perte d’équilibre. […] Avec vous,

chaque jour, nous retrouvions la logique de notre

ensemble. Nous vivions en paix. Il y a quelque temps

pourtant, notre construction a tremblé ; les chefs du

Centre d’oligophrènes profonds de Monthey vous demandaient

d’accepter la direction de l’institut. Pour nous,

cette nouvelle avait un peu le son du glas, pourtant, je

tairai notre inquiétude pour ne laisser paraître que la

fierté et la joie de voir notre directrice devenir responsable

d’une mission aussi importante. […] Ce que vous avez

commencé, vos rejetons vont essayer de le continuer. Le

travail ne sera pas trop ingrat, vous laissez une terre fertile,

nous gardons pourtant l’espoir de continuer à bénéficier

de vos conseils.

Germaine Carron, pour le personnel éducatif

« Mot d’un parent », Marylouise Dayer


068

RESTRUCTURER

≥ S’il nous fallait trouver un marqueur symbolique du changement

d’époque pour l’école La Bruyère, ce serait sans aucun

doute la démission, en 1971, de sa première directrice et sa

cheville ouvrière, Simone Reichenbach, sollicitée pour prendre la

direction du nouveau centre médico-éducatif de Monthey, La

Castalie. Le temps des pionnières prend fin. L’année précédente,

Nicole Lachat avait déjà quitté l’association puisqu’elle choisissait

de déménager hors du Valais.

≥ Le comité de l’Association de parents le sait, ces départs

vont marquer le début d’une nouvelle ère, d’autant que le succès

rencontré par les classes à plein temps oblige à revoir l’organigramme

de l’école et sa structure. Une première séance est

organisée avec les éducatrices afin d’y réfléchir. Une responsable

est désignée pour chaque centre, avec un cahier des charges

spécifique 152 . En février 1972, un nouveau directeur, André

Dupertuis, est engagé. Il peut compter sur le soutien d’un adjoint.

La Fondation en faveur des handicapés

mentaux, nouvelle gestionnaire de l’école

≥ Dans le courant de cette même année, une autre mutation

de taille intervient : l’école La Bruyère est rattachée à la Fondation

en faveur des handicapés mentaux et non plus directement à

l’Association de parents. Pour sa gestion, le Conseil de Fondation

nomme toutefois un comité de direction, dans lequel figurent des

représentants de l’association 153 .

≥ Cette modification n’est pas sans conséquence pour les

parents 154 . Des membres du comité se plaignent d’ailleurs d’un

manque de communication et d’avoir été mis devant le fait

accompli. Il leur est expliqué que cette solution ne vient pas de

l’association, mais qu’elle a été « voulue par l’AI et par l’État » 155 .

≥ Un rapport daté de mai 1972, conservé dans les archives de

l’école La Bruyère et signé par André Berclaz, confirme qu’il est

l’initiateur de ce changement. Le préposé cantonal aux handicapés

y expose les difficultés rencontrées par l’école sur divers

plans : d’abord, au niveau éducatif, il estime que les parents,

« marqués par le problème de leur enfant » peuvent manquer de

recul, que les décisions prises le sont parfois sur la base d’un cas

plutôt que de l’ensemble, que, comme ils considèrent La Bruyère

comme « leur école », ils interviennent facilement auprès des

éducatrices rendant parfois la tâche de ces dernières difficile.

Ensuite, il constate un manque de clarté dans la répartition des

tâches et des responsabilités, d’une part, entre l’école et l’Association

de parents, d’autre part, entre l’association et la

fondation. Enfin, il note qu’il est difficile pour l’État de

savoir qui est son interlocuteur entre la direction de

l’école, l’association, la fondation. Fort de ces arguments,

il propose que l’école soit rattachée à cette dernière. Cela

lui donnerait « une certaine indépendance vis-à-vis des

parents, vu que les membres de la fondation ne sont pas

tous des parents d’enfants handicapés » 156 . L’OFAS appuie

cette prise de position. Notons que, dans le même temps,

l’Assemblée des délégués de la Fédération suisses des

Associations de parents invitait les différentes sections à confier

la gestion des institutions à des fondations afin de se libérer d’un

travail administratif lourd et de pouvoir se consacrer à d’autres

projets 157 .

Un rattachement au DIP

≥ Une nouvelle convention est signée le 6 avril 1976 avec

l’État du Valais, qui entre en vigueur de manière rétroactive au

1 er janvier de cette année-là 158 . Par ce document, l’État confie à

la Fondation « l’éducation spécialisée en semi-internat (repas de

midi) des enfants déficients intellectuels éducables sur le plan

pratique du Valais romand, à l’exclusion des tâches réservées à

La Castalie ». On peut y voir une reconnaissance du travail réalisé,

mais également une volonté de « faire entrer l’école dans

On peut y voir une

volonté de « faire entrer

l’école dans le cadre »

posé par l’État pour

l’éducation spécialisée.


069

Nouvel organigramme de l’école La Bruyère.

Le premier comité de direction, désigné le 22 août 1972, est composé de André Berlcaz, préposé

aux handicapés de l’État du Valais, président; Fernand Deslarzes, inspecteur scolaire ; Raymond Héritier,

secrétaire permanent de l’Association de parents; Marylouise Dayer, membre du comité de l’Association

de parents, Emmanuel Chevrier, représentation de la Fondation en faveur des handicapés mentaux.


070

Photo d’archives d’Insieme Valais romand. Date inconnue. École La Bruyère, 1971.


071

le cadre » posé par l’État pour l’éducation spécialisée. Si le

Département de l’instruction publique avait déjà son mot à dire

dans l’organisation de l’école La Bruyère puisqu’elle était subventionnée

par l’État, avec cette convention, elle est encore plus

étroitement dépendante du DIP, et plus particulièrement du

Service de l’enseignement primaire et des écoles normales. Elle

doit suivre ses directives non seulement en matière de calendrier

scolaire et d’engagement du personnel, mais également en ce qui

concerne la ligne pédagogique à suivre 162 . Dès 1977, un poste de

conseillère pédagogique aux classes spéciales du Valais romand

est créé. La personne engagée, Marion Salamin, apportera son

soutien dans les années qui suivent afin de préciser et d’adapter

la pédagogie et la méthodologie en vigueur dans l’école.

≥ D’un point de vue financier, l’État participe aux frais de fonctionnement

par une contribution journalière aux coûts d’école

telle que prévue par l’OFAS. Pour les cas non AI admis à l’école,

il offre un supplément pour les frais d’école et de pension, égal

au montant prévu par l’AI. Il s’engage également à couvrir le solde

des dépenses d’exploitation après déduction des subventions

fédérales, jusqu’à concurrence de 12 francs par jour, à prendre

à sa charge jusqu’à 80 % d’un éventuel déficit.

≥ Cette nouvelle structure entraîne d’importants changements

pour l’Association de parents, les parents d’élèves 163 ainsi que

pour les éducatrices qui perdent en autonomie et se voient désormais

soumises à une hiérarchie relativement lourde et à un cadre

plus strict 164 . Les archives de l’école montrent bien les tensions

qui existent durant cette décennie entre le personnel éducatif et

le comité de direction, voir le Conseil de Fondation 165 . Dans certains

centres de l’école La Bruyère, les relations au sein même

de l’équipe éducative sont difficiles et la manière de les améliorer

est fortement discutée dans les colloques 166 .

≥ L’ASSOCIATION DE PARENTS,

TOUJOURS EN SOUTIEN

L’Association de parents reste très impliquée pour l’école et les

ateliers. En 1979, elle accepte notamment de couvrir à titre

exceptionnel leur déficit d’exploitation 159 . Les finances sont

alors préoccupantes, comme le signale André Dupertuis dans

une lettre envoyée aux parents d’élèves pour la rentrée scolaire

1979-1980. Le déficit à couvrir par les fonds propres de l’école

doit impérativement diminuer dans les années à venir 160 . Pour

le directeur, une manière pour les parents de soutenir les

finances de La Bruyère est d’envoyer régulièrement leur enfant

en classe. Cela est bien sûr impératif pour des raisons pédagogiques,

mais cela assure également à l’école plus de rentrées

financières puisque l’aide de l’AI est calculée selon le nombre

de journées de présence des élèves 161 .


072

ÉCLAIRAGE

UN GRAND PROJET : LA CONSTRUCTION DE L’ÉCOLE DE CHAMPSEC

≥ Avec l’augmentation des effectifs et l’instauration des classes

à plein temps au tournant des années 1970, le comité de l’Association

de parents est sans cesse préoccupé par la recherche de

locaux pour accueillir les classes. Après analyse, il estime que la

construction d’un bâtiment à Martigny, pour cette région, et d’un

autre à Sion, regroupant les enfants des districts de Conthey,

Sion, Hérens et de Sierre, serait opportune 167 . Les classes de

Sierre ont alors des effectifs plus faibles. L’OFAS se déclare favorable

à cette solution ; le comité l’adopte à l’unanimité 168 .Les

enfants de Saint-Maurice et de Monthey seront, quant à eux,

accueillis à La Castalie, en externat.

≥ La situation la moins satisfaisante est alors celle de Sion 169 . En

1973, les classes y sont réparties dans différents quartiers : les

« tout petits » suivent la classe dans une villa ancienne à l’avenue

Ritz 31 alors que les « moyens » et les « grands » se partagent deux

autres locaux dans un immeuble et deux pavillons en bois construits

au sein du nouveau complexe scolaire du quartier de Platta.

≥ Cette solution des pavillons avait d’abord été pensée comme

une solution à long terme, mais n’avait pas été retenue notamment

sur la base de doutes émis par Simone Reichenbach sur la

pertinence « d’être avec les autres » 170 . Ce sont finalement des

pavillons provisoires, à moindre coûts, qui sont bâtis… en attendant

la concrétisation d’un projet de construction d’un bâtiment

scolaire, à part, pour l’école La Bruyère. Dès 1970, des discussions

sont en cours avec la Ville de Sion qui propose plusieurs

terrains municipaux à Pont-de-la Morge – trop décentré selon

l’association – ou dans le quartier de Champsec 171 .

≥ La décision d’ouvrir ce nouveau chantier est prise en 1972.

Il s’agira de construire un bâtiment adapté aux besoins des

enfants handicapés mentaux accueillis, disposant non seulement

des équipements scolaires de base, mais également de salles

pour les thérapies individuelles ou collectives, d’un bassin d’hydrothérapie,

d’une cuisine et d’un réfectoire pour assurer l’accueil

en semi-internat, soit le repas de midi.

≥ Le projet est annoncé lors de l’assemblée générale de printemps.

Bien qu’il s’agisse là d’un développement souhaité et

important pour l’école La Bruyère, des parents s’inquiètent :

Le 30 août, la vie était vraiment donnée à la maison

par l’arrivée d’une soixantaine d’enfants. Si l’on considère

l’importance des changements qu’un tel bâtiment

représente pour nos élèves : dimension et nombre de

locaux, augmentation sensible du nombre de personnes

côtoyées, nouveautés de toutes sortes, nous pouvons

être satisfaits de leur rapide et bonne adaptation.

Projet de texte pour le rapport annuel 1976 par André Dupertuis 174

Bâtiment de l’école La Bruyère, quartier de Champsec, Sion, 1991.


073

La Castalie va ouvrir ses portes en septembre 1972, n’y a-t-il pas

un risque de dépeuplement de La Bruyère ? Simone Reichenbach

ne le croit pas : « il n’y a pas de double emploi. La Castalie vient

compléter l’équipement existant ». André Dupertuis se veut un

peu plus prudent, mais assure que tout sera mis en œuvre pour

éviter que cela ne soit le cas. Il rassure en outre les parents en

leur précisant que le choix d’un placement en internat ou d’une

inscription à l’école La Bruyère en externat se fera après une

analyse « au cas par cas » et surtout que la décision finale reviendra

aux parents.

≥ Le terrain, à l’actuelle rue des Casernes, est acheté en 1973.

Le 23 octobre 1974, le Conseil d’État donne son feu vert pour la

réalisation du complexe devisé à quelque 6,1 millions de francs

– hors achat du terrain 172 . Le projet devrait être subventionné à

hauteur de 40 % par le Canton et 33 % par l’AI. Il reste donc au

moins 1,5 million de francs à assumer pour la Fondation qui vient

déjà de contracter une dette importante pour la construction du

home-atelier Pierre-à-Voir à Saxon. L’État s’engage à assumer un

éventuel déficit.

≥ Le chantier débute fin avril 1975 et le nouveau bâtiment peut

accueillir les élèves pour la rentrée scolaire, le 30 août 1976 173 .

École La Bruyère - Sion. Date inconnue.

≥ CENTRALISER : LE CAS D’ORSIÈRES

Le projet de construction de Sion incite la Fondation en faveur des handicapés mentaux à revoir également sa

structure régionale et à regrouper certains effectifs afin de rentabiliser les nouvelles installations et rationaliser

les coûts.

Ce n’est pas la seule raison. Parfois, le nombre d’élèves devient trop faible pour créer une classe. C’est le cas à

Orsières en 1973 avec trois élèves restants. La question du transfert à Martigny se pose alors. Les parents sont

d’accord pour les grands, plus réticents pour les petits. La direction de l’école La Bruyère opte toutefois pour le

transfert de tous les enfants, ce qui permettrait également de réorganiser les classes de Martigny pour qu’elles

soient plus homogènes en tenant compte du handicap et de l’âge des enfants 175 . Si le transfert semble bien se

passer, René Lovey mentionne toutefois en séance de comité que cela péjore l’intégration des enfants au village

puisqu’ils ne vont plus dans les bâtiments de l’école 176 .


074

PROFESSIONNALISER

Dans les années 1970,

cette question

de la qualification

du personnel en charge

des élèves est toujours

plus présente.

≥ Nous l’avons vu, à la fin des années 1960, au

moment de discuter de l’ouverture de nouvelles classes

au sein de l’école La Bruyère, l’État avait établi des

critères de professionnalisme pour l’engagement du

personnel. Dans les années 1970, cette question de la

qualification du personnel en charge des élèves est

toujours plus présente.

≥ L’ouverture de classes destinées aux enfants « scolarisables »

au sein de l’école publique permet à l’école La Bruyère de recentrer

son attention sur les enfants auxquels elle se destinait dès

son origine : les « éducables sur le plan pratique ».

≥ Avec cette orientation, le statut du personnel pourrait évoluer

: s’il a été jusqu’ici considéré par le DIP comme du personnel

enseignant spécialisé, le comité de direction pense qu’il serait

plus juste de lui accorder désormais un statut d’éducateur spécialisé.

Cette modification n’est pas anodine, puisqu’elle impliquerait

des attentes différentes. Proposition est finalement faite

de trouver un compromis entre ces deux statuts et d’adapter la

convention-type existante entre l’Association romande des travailleurs

de l’éducation spécialisée (ARTES) et l’Association valaisanne

en faveur des enfants et adolescents en difficulté (AVIEA).

Le personnel occupant un poste d’enseignement dans le cadre

d’une classe pour enfants handicapés mentaux garderait les

mêmes droits que le personnel enseignant de l’État. Toutefois,

des adaptations du statut sont prévues notamment quant aux

horaires de travail, les vacances, etc.

≥ Cette question posera bien des difficultés au sein de

l’école 177 . En 1976, la convention signée avec l’État y apporte une

réponse différente de celle préconisée par le comité de direction

: les éducateurs ont une formation pour prendre en charge

les enfants hors du temps scolaire ; les personnes ayant ce titre

devraient donc se perfectionner pour continuer de fonctionner

au sein de l’école La Bruyère à titre de personnel enseignant.

Cette prise de position est en accord avec celle

du personnel de La Bruyère qui est, de manière générale,

contre l’assimilation à des éducateurs

spécialisés 178 .

≥ Le statut des personnes « non formées ou non spécialisées

» est également au cœur des discussions entre

l’école et le DIP. Des rumeurs courent et entretiennent

le climat de tension causé par le doute sur les critères

de nomination qui seront adoptés par le DIP 179 . Le flou qui règne

depuis quelque temps sur leur avenir inquiète certaines éducatrices

et crée des dissensions. Finalement, le DIP prend position :

il estime que de nombreuses occasions ont été offertes pour se

mettre à niveau et répondre aux exigences par des perfectionnements.

Dans une lettre à la direction de l’école, le DIP précise :

« Si elles ne les ont pas saisies, nous ne pouvons que le regretter.

La situation acquise n’enlève pas l’obligation de posséder les

titres requis pour une fonction » 180 . Le DIP a déjà accepté durant

plusieurs années que le personnel de La Bruyère ne réponde pas

exactement aux critères. On peut imaginer qu’il se fatigue de

cette situation d’autant que des efforts ont été faits pour offrir des

opportunités de formation en Valais.

≥ En avril 1978, le Comité de direction établit l’ordre de priorité

pour l’engagement du personnel : enseignant spécialisé, éducateur

spécialisé ou enseignant non spécialisé, personne sans formation

pédagogique spécialisée. Pour les deux dernières catégories,

une formation complémentaire en cours d’emploi est

envisagée 181 .

Renforcer le cadre éducatif

≥ Au sein du DIP, des questions se posent en lien avec les

méthodes éducatives mises en œuvre. La conseillère pédagogique

aux classes spéciales, Marion Salamin, constate notamment

les progrès réalisés par d'anciens élèves de La Bruyère qui


075

Je ne voudrais pas terminer ce rapport sans relever l’aspect positif

de ces échanges qui m’ont permis de mieux connaître les collaborateurs de La Bruyère

et de mieux les apprécier. Je ne voudrais pas sous-estimer leur action éducative.

Je mesure la résistance nerveuse et l’effort quotidien qui leur sont demandés pour agir

efficacement. Je pense que tous se donnent beaucoup de peine pour des résultats

malheureusement pas toujours visibles. Notre tâche est de les aider en leur offrant

le ressourcement nécessaire.

Rapport de Marion Salamin, 19 juillet 1984

École La Bruyère, 1971.

ont été intégrés en classe AI et s’interroge : ne devrait-on pas

exiger plus des élèves de La Bruyère, les pousser plus, tout en

évitant des exagérations négatives ? Elle relève toutefois les efforts

réalisés par les éducatrices du groupe des petits pour aborder la

lecture d’après la nouvelle méthodologie 182 .

≥ Dans un rapport établi le 19 juillet 1984, Marion Salamin

met également en lumière un manque de qualifications professionnelles

de la part de certains enseignants de La Bruyère ainsi

qu’un esprit peu collaboratif : « chacun dans son monde, chacun

dans son groupe. L’ambiance est à la méfiance, à l’indifférence,

au stress » 183 . Elle signale également que la majorité des enseignants

se trouve en situation de faiblesse face aux exigences

pédagogiques des parents comme il n’y a pas de ligne établie et

qu’ils sont libres de choisir leur méthodologie et leurs objectifs.

Elle recommande dès lors qu’une conception pédagogique

générale soit établie et approuvée par les autorités pour qu’elle

soit mieux acceptée par les parents 184 . Cette situation n’est en

effet bonne pour personne : elle provoque l’insécurité des enseignants,

l’angoisse des parents et ne peut qu’engendrer du

mécontentement.

≥ Au tournant des années 1980, une coordination se met également

en place entre institutions, aux niveaux valaisan et

romand, avec pour objectif de réaliser un document donnant un

cadre pédagogique qui offre une base de travail pour tous.

Plusieurs documents de ce type seront établis avant de trouver

celui qui convienne. Entre 1979 et 1980, un groupe de travail

romand élabore le « Cadre de référence pour le travail avec les

enfants éducables sur le plan pratique » 185 . Ce document est toutefois

remis en question par l’équipe éducative de La Bruyère


076

après expérimentation. Une nouvelle réflexion menée à l’interne

aboutit à un outil plus pratique, le « Bilan des Savoir-Faire »

(BSF), qui définit les différentes compétences à développer dans

les catégories suivantes : autonomie pratique, psychomotricité,

développement sensoriel, langage et communication, approche

des chiffres et des nombres. Des groupes de recherche comprenant

l’ensemble des praticiens des deux centres de Sion et de

Martigny sont ensuite constitués afin d’identifier des moyens

pédagogiques susceptibles de soutenir les apprentissages pour

chaque item du BSF 186 . Enfin, une grille d’observation et d’évaluation

des acquisitions vient faciliter l’établissement d’un itinéraire

pédagogique individualisé pour l’élève 187 . Il s’agit avant tout

de clarifier la ligne pédagogique de l’institution et de l’unifier dans

les divers centres.

Je pense tout d’abord que l’enseignement

au niveau des handicapés mentaux ne se sépare

pas de la vie pratique. Il s’agit essentiellement

d’une prise de conscience de soi, du monde

environnant. Les notions enseignées à travers

des exercices sensoriels, psychomoteurs doivent

passer dans la vie réelle de l’enfant.

Simone Reichenbach, dans une lettre

adressée à André Berclaz, 20 décembre 1972

Travailler en réseau

≥ Depuis plusieurs années déjà, l’école a développé un secteur

de soutien avec des logopédistes et des psychomotriciens qui travaillent

avec les enfants qui en ont besoin. Des rencontres entre les

psychologues du Service médico-pédagogique et les éducateurs et

éducatrices ont également lieu périodiquement afin de discuter de

certains cas et obtenir des conseils de spécialistes. L’école peut

encore compter sur le soutien de trois pédiatres et d’un pédagopsychiatre

188 . C’est donc un travail en réseau qui est réalisé, toujours

dans le même objectif de développer l’ensemble de la personnalité

de l’enfant, toutes ses possibilités individuelles aussi bien

pratiques qu’intellectuelles, ainsi que sa capacité d’adaptation

dans la société, et notamment le préparer à la vie du travail en

ateliers protégés ou d’occupation 189 .

GARDER LE CONTACT

≥ Face à cette évolution, l’Association de parents doit faire

preuve de beaucoup de flexibilité. Certains documents montrent

que le comité regrette le rôle qu’il pouvait remplir auparavant 190 .

L’association tenait alors les rênes et pouvait décider de ce qu’elle

souhaitait pour les enfants de ses membres. Durant longtemps,

les parents eux-mêmes avaient un accès direct aux salles de

classe, ce qui, il faut bien le dire, pouvait créer quelques tensions

et perturber le déroulement des activités. Une certaine nostalgie

de cette période s’installe, mais surtout une crainte de « perdre

le contact ».

≥ Ainsi un des objectifs établis par le comité pour l’année

1975-1976 est justement l’intensification des relations parentsinstitutions.

Le 11 novembre 1975, l’Association de parents invite

ses membres à une journée de visite : Villa Turini, à Sierre, puis

trajet vers Sion pour visiter les classes de l’école, les ateliers et le

Durant longtemps,

les parents eux-mêmes

avaient un accès direct

aux salles de classe.


077

Quelle est la formule pour une collaboration

saine et sereine entre parents et professionnels ?

Cette formule est certainement à créer de cas

en cas ; elle a ainsi l’avantage d’être sans cesse

renouvelée et renouvelable. Pourtant,

l’intervention des uns et des autres

dans le « programme quotidien » de l’enfant

doit clairement être définie. Quand bien même

l’essentiel concernant l’enfant : ses joies et ses

peines, son évolution et son avenir, les craintes,

la souffrance et les espoirs qu’il induit chez

ses parents, tout ce qui fait son être se joue

le plus souvent en dehors du « programme ».

Daniel Moulin, Rapport annuel école La Bruyère, 1985

chantier de Champsec. La journée se poursuit à Saxon et à

Martigny. L’opération est une réussite. Aussi bien les parents que

les personnes handicapées visitées ont été heureux de cet événement.

Il est décidé de le reconduire, mais en prenant toutefois

plus de temps dans les lieux afin d’avoir des contacts plus denses

avec les éducateurs et les personnes handicapées 191 .

≥ Des réunions sont organisées en 1976 entre des parents et

le personnel afin de trouver un modus vivendi. L’idée du comité

est de créer des commissions de parents en lien avec chaque

centre de l’école La Bruyère et de procéder de la même manière

pour les homes-ateliers. Elles auraient pour rôle d’inviter les

parents à des réunions périodiques et d’être un intermédiaire

entre eux, le comité de direction et les éducateurs afin de transmettre

les informations sur les besoins des uns et des autres,

d’organiser des échanges d’expériences éducatives, de discuter

de l’organisation pratique des établissements 192 . Les commissions

de parents sont instituées dans les différents centres à

partir d’octobre 1977 193 .

≥ L’importance de la relation entre les institutions et les parents

est également soulignée par le comité de direction de l’école. Le

maintien d’un contact étroit entre le personnel éducatif et les

parents des élèves est pour lui primordial. L’organisation de rencontres

lui paraît dès lors indispensable « pour briser la glace »

et établir une relation forte 194 .

≥ Au début des années 1980, sans doute face aux importantes

mutations rencontrées, le climat entre les parents et l’institution

est orageux. C’est du moins ce que laisse percevoir le compterendu

d’une séance organisée en mai 1980 avec des parents

d’élèves qui mentionne un « côté agressif et déplaisant » de

l’échange et un « esprit actuel » qui relève du « travail de sape ».

Cadrer la place des parents dans les classes

≥ En juillet 1984, Marion Salamin est chargée d’établir un rapport

sur l’école La Bruyère de Sion. Elle s’immerge dans l’institution,

rencontre le personnel, etc. Parmi ses constats, celui d’une

collaboration relativement complexe avec les parents qui peuvent

alors circuler de manière anarchique dans la maison, visiter les

classes à tout moment et capter l’attention des éducateurs.

≥ RECRUTER DES MEMBRES PARENTS, UN TRAVAIL PLUS DIFFICILE

Si, lorsque les institutions étaient gérées directement par l’Association de parents, les parents d’enfants handicapés mentaux

devenaient de facto membres de l’association, un travail plus important doit désormais être réalisé pour que les parents s’inscrivent

comme membres de l’association. Lors de l’Assemblée générale de l’association, en 1985, son président lance un appel à

la solidarité :

« Nous constatons quand même que les parents doivent rester unis dans l’effort et spécialement les parents de jeunes enfants qui

n’ont pas encore rejoint nos rangs. Nous devons tous leur demander d’unir leurs forces aux nôtres. Efforcez-vous de convaincre les

hésitants et de renseigner ceux qui ne nous connaissent pas encore. Nous devons nous unir pour toujours lutter et pour gagner. » 195


078

≥ UNE POPULATION SUIVIE

TOUJOURS PLUS VASTE

Avec le temps, les enfants suivis par le SEI ne sont plus uniquement

des enfants avec un handicap mental, mais le handicap

sensoriel est également pris en charge ainsi que des

enfants perçus considérés comme « à risques » (difficultés relationnelles

notamment) 202 . Avec les années, les interventions

deviennent de plus en plus précoces et les visites hebdomadaires

ne suffisent parfois pas 203 .

Il constate également un manque de prudence du personnel

dans les informations transmises aux parents : « faux espoirs,

poudre aux yeux, etc. ».

≥ Suite à ce rapport, le comité de direction de l’école décide

d’édicter de nouvelles règles. Désormais, les parents pourront

visiter les classes deux fois par année, dans un laps de temps

déterminé. Les visites doivent être annoncées et les parents

doivent attendre des rendez-vous en dehors des heures de classe

pour s’exprimer. Le directeur sera convié à ces rencontres 196 .

DÉVELOPPER DES STRUCTURES

POUR CHAQUE ÂGE

≥ À partir de 1968, avec son rattachement au DIP, l’école La

Bruyère recentre naturellement ses activités sur les enfants en

âge de scolarité. Il n’est toutefois pas question de laisser des

groupes d’âge de côté : l’Association de parents développe des

structures pour les enfants en âge préscolaire et pour les jeunes

en âge post-scolaire.

Le Service éducatif itinérant

≥ À la fin des années 1960, la nouvelle pédagogie spécialisée

prônant une éducation aussi précoce que possible des enfants,

Simone Reichenbach propose à l’Association de parents de réintroduire

un service à domicile, comme elle le faisait aux débuts

de l’école itinérante, mais cette fois à destination des enfants en

âge préscolaire.

≥ Basé sur le modèle vaudois 197 , le Service éducatif itinérant

(SEI) valaisan voit le jour durant l’année scolaire 1968-1969 avec

sept enfants suivis. Une éducatrice spécialisée effectue des

visites à domicile lors desquelles elle travaille directement avec

l’enfant pour stimuler ses acquisitions et améliorer son développement.

Elle échange également avec les parents et peut leur

donner des conseils et du soutien. Du matériel pédagogique

approprié leur est prêté afin qu’ils puissent réaliser des exercices

entre deux visites 198 . Objectif final : montrer aux parents comment

aider les enfants à se développer le plus harmonieusement possible

et les préparer à la scolarité 199 .

≥ Dès 1969, le SEI est reconnu par l’AI et obtient des subsides

pour mesures pédago-thérapeutiques, ce qui permet aux familles

de bénéficier gratuitement de ce service 200 . Une convention est

signée avec l’OFAS trois ans plus tard. En 1976, l’utilité du SEI

est confirmée par l’État du Valais qui, dans la convention qu’il

signe avec la Fondation en faveur des handicapés mentaux, lui

renouvelle sa confiance dans le domaine et lui confie sa

gestion.

≥ Alors que, à partir de 1975, les effectifs de l’école La Bruyère

sont en baisse, ceux du SEI ne cessent d’augmenter, jusqu’à

atteindre un plafond d’une soixantaine d’enfants dans les années

1980. Les deux courbes peuvent ne pas être similaires, puisque

les enfants suivis par le SEI ne sont pas forcément intégrés aux

classes de La Bruyère au moment de débuter leur scolarité.

Toutes les possibilités sont ouvertes et gérées au cas par cas.

Entre 1979 et 1983, par exemple, 51 % des enfants qui ont bénéficié

du SEI sont intégrés aux classes d’adaptation ou aux classes

ordinaires, 21 % sont placés en institution et 28 % sont admis à

La Bruyère 201 .


079

≥ Dès 1978, l’organisation du Service doit être revue afin de

répondre convenablement à la demande. Trois secteurs sont définis,

chacun avec une éducatrice responsable 204 . En 1980, suite

à l’augmentation régulière des demandes, le secteur Sion-Sierre-

Conthey-Hérens est divisé en deux 205 . Alors au nombre de

quatre, les éducatrices du SEI suivent annuellement une cinquantaine

d’enfants, ce qui représente une charge de travail

conséquente et un travail réalisé sous stress.

Atelier professionnel du secteur

« Formation générale des 18-23 ans »,

école La Bruyère - Sion, 1988.

Le secteur 18-23 ans,

futur Centre de formation des jeunes adultes

≥ Le passage de l’école à la vie professionnelle est une autre

préoccupation récurrente de l’Association de parents et des responsables

de l’école La Bruyère, depuis les premières années

d’existence de celle-ci. Dans les années 1970, les possibilités de

travail pour les personnes handicapées mentales se multiplient,

notamment grâce aux ateliers développés par la Fondation en

faveur des handicapés mentaux. Dans la décennie suivante,

l’importance d’offrir aux jeunes handicapés un temps de transition

entre la vie scolaire et la vie professionnelle et la possibilité

d’acquérir des compétences spécifiques pour intégrer le marché

du travail sont toujours plus présentes.

≥ Selon les dispositions de l’AI, à partir de 18 ans, les jeunes

handicapés mentaux sont au bénéfice d’une rente et quittent

dès lors la scolarité pour entrer dans le monde du travail.

Toutefois, selon la Loi cantonale sur les mesures en faveur des

≥ DES HOMMES INTÉGRÉS À L’ÉQUIPE ÉDUCATIVE

Pour la première fois depuis le départ de Paul Darbellay, l’équipe éducative intègre des hommes : « Étant donné, d’une part, que

les travaux manuels et les exercices pratiques occupent une grande partie des activités, et d’autre part, l’importance pour les

adolescents d’avoir à faire à une équipe mixte, nous avons fait appel à quatre éducateurs. […] Le résultat est positif et l’équilibre

des équipes encore meilleur .» 206


080

handicapés 1978), dans des cas spécifiques, la scolarité peut

être prolongée de deux ans. Pour obtenir une telle mesure, l’évaluation

de l’enfant doit montrer que cette prolongation peut offrir

un réel gain d’autonomie. L’autorisation est alors accordée par le

Département de l’instruction publique 208 .

≥ La pratique existait déjà avant qu’elle soit inscrite dans la loi.

En 1973, des classes de formation initiale sont d’ailleurs créées

à l’école La Bruyère, pour les jeunes en âge post-scolaire avec

un focus spécifique sur l’éducation gestuelle, l’autonomie sociale

et l’attention au travail ainsi qu’une aide à l’orientation 209 .

≥ Avec le temps, cette possibilité de prolongation semble ne

plus suffire. En outre, arrivés à 18 ans, les jeunes handicapés

souhaitent comme les jeunes de leur âge vivre une nouvelle étape

dans leur vie. Aussi, le préposé cantonal aux handicapés, André

Berclaz, et la Fondation imaginent la création d’une nouvelle

structure pour les 18-23 ans 210 .

≥ Le secteur « Formation générale des 18-23 ans », l’actuel

Centre de formation pour jeunes adultes (CFJA), est créé en 1987

et s’installe au sous-sol des bâtiments de l’école La Bruyère à

Sion où il reste jusqu’en 1996 211 . S’il a été imaginé durant un

temps de le rattacher à l’école La Bruyère, il dépend finalement

du secteur adulte et est relié aux ateliers de la Fondation 212 .

≥ L’objectif du centre de formation est de poursuivre la préparation

des jeunes handicapés mentaux pour leur entrée dans la vie

professionnelle et la vie adulte en général. Il s’agit de « troquer le

statut d’élève contre celui d’apprenti, d’adopter autant que faire se

peut un rythme de vie, des horaires, des responsabilités propres

à tout jeune adulte. Il s’agit de maintenir les acquisitions réalisées

jusqu’alors et d’acquérir de nouvelles compétences ». 213

Le CFJA est une structure extraordinaire

qui fait le lien entre la scolarité et la vie

professionnelle pour les jeunes qui ‹ se tâtent ›.

Cela fonctionne un peu comme un Semestre

de motivation. Ils peuvent faire des stages,

préciser leur orientation, puis acquérir des

compétences spécifiques. Le Centre les aide

également à trouver une place de travail et

accompagne leur intégration professionnelle.

Avant 2000, le CFJA était bien sûr plus lié

aux ateliers de la FOVAHM : 90 % environ

des jeunes les ont intégrés. Désormais,

il est ouvert sur le monde de l’entreprise.

Jean-Marc Dupont,

directeur de la FOVAHM de 2000 à 2020

≥ « JE SUIS UN ÊTRE

HUMAIN COMME LES AUTRES »

En 2006, sur une idée de Jean-Marc Dupont,

Carole Roussopoulos réalise le documentaire

« Je suis un être humain comme les autres »

qui présente le parcours de personnes

en situation de handicap accompagnées par

la FOVAHM et notamment des jeunes du CFJA.


081

PAROLES D’ARCHIVES

TÉMOIGNAGE D’UNE MAMAN

≥ En mai 1974, Marylouise Dayer témoigne dans le Main dans la main des richesses inestimables amenées par un enfant différent,

sans cacher les difficultés rencontrées, le difficile équilibre familial à trouver, le poids du regard des autres, la persévérance nécessaire.

Extraits.

Il y a un autre point qui pourrait remplir des pages de

faits, c’est l’attitude des autres qui parfois nous peine :

regards de pitié des passants, ignorance délibérée ou simplement

indifférence de la part des mamans avec qui l’on

parle. Je sais bien qu’on me dira que c’est par peur de

faire de la peine. Mais qu’il me soit permis de dire ceci :

personnellement, rien ne me réchauffe plus le cœur

qu’une maman qui salue mon petit garçon, qui lui sourit,

qui demande de ses nouvelles comme de n’importe quel

autre gosse malade, et qui le regarde avec des yeux de

maman.

Il y a les tours de force à faire pour aller au coiffeur ou au

dentiste, ou pour faire un achat important ; on ne peut pas

le prendre avec soi par la main, il faut donc toujours avoir

quelqu’un pour le garder. Une vraie semaine de vacances

devient chimère, car à qui confier un enfant qui demande

tant de soins ?

Il y a l’enfant à porter sans cesse à la maison, dans les

escaliers, et on le sent avec angoisse devenir chaque jour

plus lourd. On n’ose pas penser au jour où on ne pourra

plus le soulever.

Il y a l’épreuve qui dure des années. On passe par tous les

espoirs, les découragements, toutes les révoltes. On se

sent parfois totalement écrasé par ce combat qu’il faut

reprendre inlassablement chaque matin. […]

Il y a l’équilibre conjugal à maintenir dans l’harmonie et

le sourire malgré la détresse qui reste au fond de nous. Il

faut apprendre à être heureux quand même. C’est une

épreuve qui ne va pas sans marquer profondément le

couple ; et il n’y a pas de demi-mesure : ou elle le sépare

irrémédiablement, ou elle l’unit plus que jamais.

Il y a l’angoisse de l’avenir, et c’est là je crois un des

points les plus douloureux pour des parents d’enfants

handicapés. Pour notre enfant, arriva bientôt l’âge de

l’école. Il avait besoin de petits camarades pour s’épanouir,

il lui fallait une école spécialisée dans un centre où

l’on continuerait son traitement. Alors ont commencé des

problèmes nouveaux : séparation pénible, peur que l’enfant

souffre loin de son milieu familial, adaptation difficile,

etc. Et plus tard, que fera-t-il ? Arrivera-t-il à se véhiculer,

à lire, à employer ses mains à quelque chose, à

épanouir son esprit ? Saura-t-il accepter son état et trouver

la joie de vivre, quelle que soit la gravité de son

handicap ?

Le tableau que je viens de brosser peut vous paraître noir.

Si j’ai accepté d’écrire cela en toute simplicité, ça n’est

point par amertume ou pour me plaindre ; mais c’est parce

que je pense que ce témoignage va peut-être aider des

milliers de parents touchés comme nous, à être mieux

compris, mieux entourés, mieux aimés. Je les ai tous portés

dans mon cœur en écrivant ces lignes et j’espère avoir

été un peu leur porte-parole aujourd’hui.

≥ Et je m’empresse d’ajouter le plus important : ne croyez

pas que dans une si rude épreuve, il n’y ait que du négatif.

Par-dessus ces peines profondes de chaque jour et cette

angoisse devant l’avenir de notre enfant, il y a cette merveilleuse

certitude : c’est que nous l’aimons infiniment. Et

lorsque le soir je le regarde, abandonné dans son sommeil,

il est comme tous les enfants du monde que leur

mère regarde dormir. Et je songe que cet enfant nous a

apporté, en définitive, des richesses inestimables.


082

ÉCLAIRAGE

SENSIBILISER LES ÉLÈVES DES CLASSES TRADITIONNELLES

≥ Au début des années 1970, avec le transfert de la gestion de l’école à la Fondation en faveur des handicapés mentaux, l’Association

de parents dispose de temps pour de nouveaux projets. Elle décide alors de concentrer une partie de ses forces sur la sensibilisation.

Des parents, d’abord, en leur proposant des soirées d’information et de partage autour de thématiques qui les touchent

(appelées « formation des parents ») Du public, ensuite, avec un accent particulier sur les écoles 214 .

≥ En 1973, les journées nationales ont pour thème « Enfants

normaux, enfants déficients mentaux ». L’association de parents

fribourgeoise entreprend alors une action auprès des écoles et

propose une leçon-type 215 . Deux ans plus tard, l’Association de

parents reprend l’idée et entreprend une campagne à l’attention

des écoles primaires en passant par la revue L’École

valaisanne :

« Aujourd’hui, l’Association de parents, souhaite, par l’intermédiaire

de L’École valaisanne, créer un lien entre les enfants

handicapés et les enfants bien portants. Nous voudrions, avec

l’aide de chaque enseignant, faire connaître et aimer ces

enfants « pas comme les autres » que nous rencontrons souvent

dans notre entourage.

Au-delà d’une éducation spécialisée, nous souhaitons créer un

courant de sympathie, d’amitié dont chacun d’entre nous, handicapé

ou non, a tellement besoin. Car, au-delà du handicap,

d’un corps parfois déformé par la maladie, au-delà d’un visage

qui choque par son expression, il y a un enfant, pas tellement

différent des autres. Il y a un enfant, qui comme les autres a

soif d’amour, de relations humaines, de compréhension. Il y a

un être humain, qui sans pouvoir l’exprimer, a besoin que nous

lui tendions la main, que nous partagions avec lui notre joie de

vivre.

Il est également important de découvrir que ce même enfant

handicapé, si nous le voulons bien, peut nous apporter beaucoup

: nous trouverons en lui la richesse d’une relation spontanée,

d’une amitié qui ne se marchande pas, d’une joie sans

mélange pour toute découverte partagée.

Les enfants handicapés mentaux, sans pouvoir l’exprimer, ont

besoin de rencontrer des amis sur leur chemin. Si vous acceptez,

dans votre classe, d’en parler avec vos élèves, de créer un courant

de compréhension, d’amitié, pourquoi pas de loisirs partagés,

alors l’intégration sociale de nos handicapés deviendra,

grâce à vous une réalité dans notre canton. » 216

≥ La leçon-type répond à plusieurs questions que les enfants

peuvent se poser : qui sont-ils ? Pourquoi sont-ils handicapés ?

Sur quoi est basée la classification du handicap mental et quelle

est-elle ? Les enfants handicapés mentaux vont-ils à l’école ?

Travaillent-ils une fois leur scolarité terminée ? L’association fait

ensuite des propositions d’activités autour de la thématique aux

enseignants : visite de l’école La Bruyère, des ateliers ou de La

Castalie, rencontre soit des éducatrices et éducateurs spécialisés

soit des parents d’enfants handicapés mentaux, participation à

une action de solidarité 217 .

Extrait de la leçon-type

parue dans L’École valaisanne en 1975.


083

L’année

de la personne

handicapée

constitue sans

aucun doute

un moment

charnière.

Un besoin de compréhension mutuelle

≥ Le développement des classes spéciales qui accueillent les

enfants déficients mentaux légers dans les centres scolaires –

classes d’adaptation, dites aussi classes AI – depuis le début des

années 1970 est une des raisons qui incite l’Association de

parents à mener des actions auprès des écoles. Un exposé rédigé

par Jean-Claude Berthod, à l’attention d’une commission d’étude

sur les déficients mentaux légers et les déficients auditifs, bien

qu’il présente l’avis personnel du président de l’association (dont

l’enfant est en classe d’adaptation), nous permet de mieux comprendre

la position qui est sans doute également celle de l’Association

de parents :

«Pourquoi les enfants fréquentant les classes spéciales (développement,

AI) sont souvent mal compris des autres ou même

maltraités par les autres ? L’éducation sur ce sujet est aussi à

faire dans les classes dites normales, et j’ai l’impression

qu’à ce niveau, les leçons font défaut. Nous

devons exiger l’introduction de telles leçons dans

les programmes et condamner la démission de

certains milieux éducatifs (instituteurs, directions et

parents aussi) dans le domaine de la discipline en

particulier.

Une meilleure éducation de tous les enfants doit amener à

l’intégration de chacun dans la société et cette intégration

constitue le but essentiel recherché. Si la séparation de certaines

classes est utile et aboutira finalement, par une éducation

plus spécialisée, à une intégration, c’est heureux. Mais il

faut éviter les embûches et de laisser creuser un fossé dont les

mieux doués seraient les premiers responsables, et nous

devons nous rendre conscients de ce risque. Enseignons-nous

cela suffisamment ?

[…] Évidemment, des classes spéciales sont indispensables et

nous devons les organiser au mieux. […] A-t-on songé, en

créant ces séparations, de donner des leçons aux enfants des

classes dites normales pour les rendre conscients, non pas de

leur supériorité, mais de la chance qu’ils ont d’avoir reçu des

capacités intactes ? Les handicapés doivent être acceptés

comme tels par la société et cette dernière doit être

instruite. » 218

1981 : Année internationale du handicap

L’année 1981 est consacrée « année internationale du handicap

» avec pour thème « Pleine participation et égalité ». Dans

toute la Suisse, des actions sont menées afin de sensibiliser la

population, de promouvoir une meilleure intégration sociale et

une meilleure prévention des handicaps, de diminuer les barrières

architecturales. L’Association de parents se concentre sur

l’information, notamment dans les classes des cycles d’orientation.

Des séances d’information avec les enseignants sont prévues

dans vingt établissements des districts du Valais romand.

Les objectifs visés par ces rencontres avec les jeunes sont,

d’abord, de mieux faire connaître les personnes handicapées

mentales aux jeunes et leur façon de vivre ; lutter contre les

fausses croyances et expliquer ce qu’est une personne handicapée

; apprendre aux jeunes l’attitude à avoir envers eux, comment

les accueillir ; combler le fossé qui semble exister entre personnes

dites normales et handicapés mentaux ; proposer des

actions à réaliser ensemble pour une meilleure compréhension

mutuelle. Les classes pourraient par exemple visiter une classe

ou un atelier destiné aux personnes handicapées, partager une

journée ou une activité de loisirs avec des personnes handicapées,

réaliser des actions auprès des familles 219 .

≥ L’action remporte un certain succès, même si l’accueil d’un

établissement à l’autre peut être très différent. L’année de la personne

handicapée constitue sans aucun doute un moment charnière

dans la reconnaissance du handicap mental par la société

en augmentant considérablement la visibilité et la compréhension

de cette problématique. « Après chacune de ces rencontres,

nous nous apercevions que quelque chose avait positivement

évolué. En quelques heures, des attitudes s’étaient modifiées,

des regards étaient différents, un début d’amitié était né. Chez

nos élèves aussi, nous avions le sentiment que l’expérience avait

laissé des traces inoubliables, qu’elle avait favorisé une meilleure

ouverture aux autres et que la vie était plus belle » peut-on lire

dans le rapport annuel de l’école pour cette année-là 220 .

≥ Le comité COP81 souhaite évidemment poursuivre avec certaines

actions et notamment avec l’« action école », ainsi que le

nomme André Berclaz dans un article qui paraît en novembre

1982 dans L’École valaisanne 221 .



L’intégration

à tout prix ?

« Intégration », le mot est

désormais sur toutes les lèvres

dans les milieux concernés

par le handicap. L’Italie a voté

en 1971 une loi sur l’intégration

des personnes en situation

de handicap qui établit que

l’instruction doit se faire, pour tous

et sans distinction, dans les classes

de l’école publique 222 . L’« expérience

italienne » est scrutée partout,

prise pour exemple. En 1974,

un congrès organisé par Pro Infirmis

et l’association de parents

zurichoise a pour thème

« Intégration : une possibilité réelle

ou une illusion ? ». En Valais,

le thème est également au centre

des discussions. En 1978, environ

90 % des votants acceptent la Loi

cantonale sur les mesures en faveur

des handicapés, dont l’objectif

est avant tout l’intégration

professionnelle et sociale

des personnes concernées.

L’école est également touchée

par ce changement de paradigme.

Le temps de la « ségrégation »

est révolu. L’école publique se doit

désormais d’intégrer le plus grand

nombre. L’école La Bruyère

et l’Association de parents doivent

en tenir compte, choisir leur ligne,

défendre leurs positions, s’adapter.


Photo d’archives d’Insieme Valais romand. Lieu et date inconnus.


087

≥ Les années 1980 s’ouvrent avec la conscience qu’un changement

de paradigme est en train de se mettre en place et que

l’école La Bruyère va devoir défendre sa mission pour perdurer,

mais également tenir compte du nouveau contexte. Deux constats

peuvent être faits au niveau de l’évolution de la population

accueillie par l’école en une décennie. Le premier, nous l’avons

vu, est celui de la diminution des effectifs. Le second porte sur

le niveau des élèves admis : à La Bruyère, dès le début, « seule

la limite supérieure des possibilités des élèves accueillis a été

clairement posée comme critère d’admission ; les limites inférieures

étant l’impossibilité pour les parents de garder leur enfant

à la maison et la demande de soins infirmiers importants pour les

élèves ». Toutefois, les élèves de la limite supérieure sont toujours

moins nombreux, puisque de plus en plus intégrés aux classes

d’adaptation 223 . Ainsi, André Dupertuis conclut-il le rapport

annuel 1980 avec ces mots :

« Nous vivons une période clé dans le domaine de la prise en

charge des enfants handicapés. Nous vivons une réelle contestation

de la fonction, de l’utilité et de la nécessité des institutions

telles que La Bruyère : les services placeurs estiment souvent

que le placement en institution est une solution de dernier

recours ; les pouvoirs publics souhaiteraient que les institutions

coûtent moins cher à la collectivité et des courants d’opinion, se

basant sur des expériences étrangères, poussent à une intégration

à tout prix dès l’âge scolaire ; des parents enfin voudraient

pour leur enfant handicapé une scolarisation beaucoup plus

poussée. Les problèmes sont posés, parfois d’une manière

abrupte et parfois ils sont contradictoires les uns vis-à-vis des

autres. Des solutions doivent être trouvées.

Sans prétendre répondre en quelques lignes à ces idées, nous

affirmons que, pour le moment et certainement pour de nombreuses

années encore, La Bruyère a sa place, remplit son rôle,

répond à de réels besoins dans le cadre de l’éducation et de

l’enseignement dans notre canton. En effet, si l’on veut prétendre

à une intégration réelle, dès l’âge scolaire, efficace en

premier lieu pour chaque personne handicapée, les structures

à mettre en place sont extrêmement complexes et vraisemblablement

beaucoup plus onéreuses que celles qui existent

actuellement. Si nous souhaitons que ces structures nouvelles

puissent être créées, nous ne souhaitons pas que, parce que

trop brusquement installées, elles le soient au détriment d’enfants

tels que ceux que nous recevons actuellement. » 224

≥ LE MULTIHANDICAP. UNE PRISE EN CHARGE DIFFICILE

Les élèves avec multihandicap, nécessitant une prise en charge spécifique, sont en augmentation. Relevant une prise en charge

toujours plus complexe et des adaptations à faire, André Dupertuis prend pour exemple le groupe des tout-petits de Sion dans le

rapport annuel 1984 : « sur 6 élèves : 2 doivent être déplacés en chaise roulante, 3 tenus par la main même à l’intérieur ; 5 n’ont

aucun langage et 2 d’entre eux sont atteints de surdité importante ; 5 ne mangent pas seuls et 4 ont un régime alimentaire spécial

ou la nourriture doit être mixée (une bénévole pour aider les éducatrices à midi), 3 nécessitent une surveillance constante et

rapprochée. Si nous ajoutons à cela trois élèves qui doivent être langés et qu’un élève souffre de graves troubles visuels, nous

avons un tableau sombre mais réaliste de la situation de ce groupe. »


088

≥ Certes, les institutions telles que l’école La Bruyère

ne sont pas appelées à disparaître de si tôt. Pas partout

du moins, nous le verrons dans la deuxième partie de

cet ouvrage. Cependant, l’accélération va être bien plus

importante que ce qu’imaginait André Dupertuis.

≥ Après l’année internationale de la personne handicapée,

les choses s’accélèrent. En 1982, plusieurs indices

montrent que les temps sont aux réformes et que l’État compte

bien s’y engager : une commission cantonale est créée pour

repenser l’organisation des classes d’adaptation. Des questions

de fond y sont posées : quels critères définissent les « scolarisables

» et les « éducables sur le plan pratique », quels sont les

effets de cet étiquetage, quid de l’intégration des éducables sur

le plan pratique dans les classes d’adaptation en milieu ouvert ?

Faut-il le faire ? Si oui, comment ? Et si la tendance est de les

intégrer, pourquoi ne pas intégrer les enfants des classes d’adaptation

dans les classes d’observation et ceux-là dans les classes

ordinaires, voire des élèves des autres classes spéciales selon les

cas ? Pourrait-on imaginer des spécificités d’organisation pour

chaque centre scolaire ? 225 On voit ici la complexité du

système…

POUR UNE INTÉGRATION NUANCÉE

Quid de l’intégration

des éducables

sur le plan pratique

dans les classes

d’adaptation en

milieu ouvert ?

≥ Le directeur de l’école La Bruyère décide alors d’empoigner

le sujet. En décembre 1982, il aborde la question lors d’un colloque

du personnel éducatif et enseignant du centre de Sion et

propose aux éducateurs d’y réfléchir. Pour lui, lorsque l’on décide

de parler de réorganisation des classes d’adaptation, la question

de l’intégration est forcément abordée. Mieux vaut donc avoir une

position sur le sujet. Lors des colloques suivants, les discussions

montrent que le personnel n’est pas pour le « tout intégration »,

voire qu’il doute de sa pertinence. Pour les petits, entre

4 et 6 ans, cela ne lui semble pas adéquat. De manière

générale, l’intégration totale lui apparaît comme un

« idéal inatteignable », d’autant que les structures scolaires

existantes ne sont, selon lui, pas adaptées. Tout

au plus, il lui paraît possible d’aller du moins plus loin

que ce qui se fait et de s’en approcher quelque peu 226 .

≥ L’intégration géographique – soit le fait de réunir dans le

même centre scolaire les classes ordinaires et spéciales – fait

également débat. Les avis sont mitigés ; pour certains, cette

forme d’intégration est un leurre. Une série de questions est

posée : Est-ce que les handicapés mentaux seraient plus heureux

de vivre 100 % au milieu des normaux ? Est-ce que la cohabitation

handicapés-normaux ne risque pas de marquer plus les

différences ?

≥ Du côté de l’Association de parents, bien qu’elle souhaite

s’engager pour que l’intégration des personnes handicapées soit

valorisée dans les nouveaux textes législatifs 227 , des doutes se

font également jour et des voix s’élèvent contre « l’intégration à

tout prix » et pour que le concept ne « se borne pas à son aspect

idéologique ». À cette expression est préférée celle d’« intégration

scolaire nuancée, selon chaque handicap » 228 .

≥ C’est bien cette intégration nuancée que défend l’Association

de parents comme la Fondation et le comité de direction de l’école

La Bruyère. Après une intervention de Philippe Theytaz dans une

réunion à Vercorin, l’Association de parents demande d’ailleurs à

ce dernier un entretien afin de défendre cette vision et d’influer

autant que possible sur la position du chef de l’Office de l’enseignement

spécialisé. Dans une note rédigée le 14 novembre 1986,

Simone Reichenbach revient également sur cette réunion. Si, selon

elle, le décret sur l’enseignement spécialisé est à saluer, il faut

notamment souhaiter que le choix d’une école ou d’une institution

prenne en compte l’enfant lui-même, « sa dynamique propre, ses

capacités et ses difficultés » et n’oublie pas que l’enfant handicapé


Extrait de la brochure

« La nouvelle mesure »

publiée par le Comité suisse

pour l’année de la personne

handicapée en 1981.

089


090

doit bénéficier non seulement d’un enseignement approprié, mais

également d’appuis thérapeutiques et médicaux. Simone

Reichenbach milite pour que l’internat ne soit pas totalement

écarté des mesures prises pour l’enfant, mais qu’il soit considéré

comme l’une des options possibles, utile dans certains cas :

« L’institution n’est pas la dernière mesure que l’on ne choisit qu’en

tout dernier ressort. Elle offre des possibilités parmi d’autres. Il faut

chercher la structure qui convient le mieux à chaque enfant,

compte tenu du handicap et des mesures nécessaires pour un

épanouissement de la personne. » L’institution, pour perdurer, doit

également, selon elle, s’ouvrir « sur le monde extérieur en tenant

compte de l’intégration » : « Elle doit favoriser les échanges avec les

écoles. Il faut que les enfants handicapés ou non puissent se rencontrer,

vivre ensemble certaines expériences dans les domaines

possibles : sport, expression, manifestations culturelles, etc. » 229 .

Une concurrence entre structures

≥ La question de la concurrence entre les classes d’adaptation

et l’école La Bruyère se fait toujours plus présente dans les

années 1980. De plus en plus, la direction de cette dernière

constate que des enfants qui devraient être scolarisés chez elle

sont en fait dans les classes d’adaptation. Plusieurs cas sont

signalés à Martigny où le directeur des écoles, Jean-Pierre

Cretton, est fermement engagé pour l’intégration et « accepte

tous les enfants ou presque dans les écoles de la ville », selon le

compte-rendu d’une séance de la commission de réorganisation

des classes d’adaptation 230 . Pour le directeur de La Bruyère, il y

a à Martigny une double structure de prise en charge qui provoque

une diminution des effectifs de son école, ce qui pose

problème 231 . Des questions se posent ; des éclaircissements sont

demandés à l’Office de l’enseignement spécialisé. Son chef,

Philippe Theytaz, soulève notamment un possible problème de

communication et d’information des parents sur les différentes

possibilités offertes par l’enseignement spécialisé, selon les

Si on estime que l’intégration doit être

favorisée et que les classes du circuit ordinaire

devraient être plus souples dans leur capacité

d’accueil, on reconnaît que les institutions telles

que La Bruyère ont toujours un rôle à jouer.

De plus, on peut noter que les éducateurs et

éducatrices de La Bruyère qui sont favorables

à une certaine intégration restent prudents

et réservés quant aux modalités d’application

et au niveau des élèves qu’il serait possible

d’intégrer au circuit ordinaire.

Rapport annuel de l’école La Bruyère, 1983

≥ NE PAS OUBLIER LES ENFANTS

AVEC HANDICAP PROFOND

En 1987, la commission cantonale pour l’enseignement spécialisé

préconise de changer la terminologie en passant de l’expression

« éducable sur le plan pratique » à « éducable et scolarisable

». Il s’agit là, selon toute vraisemblance, de faire un

rapprochement entre les déficients légers et les déficients

moyens pour les intégrer à l’institution scolaire.

Dans ces débats sur l’intégration, l’Association de parents s’attache

à rappeler l’importance de tenir compte également des

enfants avec handicap mental profond pour qui une intégration

scolaire peut être vraiment difficile 232 . Relayant les inquiétudes

des parents d’élèves quant aux changements à venir, elle préconise

de maintenir les prestations existantes à l’école La Bruyère

pour cette catégorie d’élèves 233 .


091

En 1975, l’intégration s’est faite dans les

bâtiments scolaires de la Ville de Martigny,

c’est-à-dire que ces enfants étaient scolarisés

au milieu des enfants de leur âge. […]

Les premières années, ces élèves étaient

scolarisés dans l’école publique, mais dans

des classes particulières [classes d’adaptation].

C’est bien plus tard que, petit à petit, à dose

homéopathique, on a commencé à scolariser

les enfants en disant « le plus important est qu’ils

soient avec les enfants de leur âge ». Petit à petit,

les enseignants qui étaient d’accord prenaient

dans leur classe un ou deux élèves en grosse

difficulté. C’est nous qui avons dû changer :

au lieu d’avoir des classes avec tous les élèves

en difficulté, nous allions dans des classes

en appui à l’enseignant.

Cilette Cretton, enseignante spécialisée.

Entretien mené en 2021.

besoins de l’enfant. Il sous-entend en outre, dans une lettre

adressée à l’Association de parents que, si les classes de développement

permettent, grâce à des conditions de fonctionnement

adaptées, l’admission d’élèves éducables sur le plan pratique, il

faut le faire 234 . C’est ce qu’on peut lire également, en y mettant

de la nuance, dans une présentation qu’il fait de l’enseignement

spécialisé en Valais :

≥ « Les thèses ségrégationnistes comme les thèses intégrationnistes

sont basées sur des hypothèses. Même s’il est souvent

vérifié qu’au point de vue des résultats scolaires, il n’y a pas

d’amélioration significative résultant de la mise en éducation spéciale

des élèves débiles légers, il ne faut pas occulter le fait qu’un

certain nombre d’enfants ont besoin d’un encadrement institutionnel

spécialisé afin de pallier les carences du milieu familial,

par exemple, ou pour dispenser un enseignement spécifique

exigeant des moyens que la classe ordinaire ne possède pas. Il

est impensable aujourd’hui, dans notre canton, d’imaginer une

intégration scolaire totale. Mais, par contre, nous pouvons soutenir

la thèse suivante : ‹ Autant d’intégrations qu’il soit possible,

autant de ségrégations qu’il soit nécessaire › » 235 .

LE DÉCRET

SUR L’ENSEIGNEMENT SPÉCIALISÉ

≥ Le 25 juin 1986, le Grand Conseil adopte le Décret sur l’enseignement

spécialisé 236 qui entérine le principe de l’intégration scolaire

et post-scolaire et présente les moyens d’y parvenir.

L’enseignement spécialisé est ainsi une prestation de services à

l’intention des jeunes qui en ont besoin, qu’ils aient une déficience

diagnostiquée ou non. L’objectif final est d’intégrer, partiellement

ou totalement, les élèves « dans les circuits ordinaires de formation,

tout en répondant aux besoins de tous les élèves de la

classe » 237 . Pour ce faire, les organes spécialisés (service éducatif

itinérant, service médico-pédagogique, médecins scolaires, office

régional AI, office cantonal des mineurs, etc.) proposent les

mesures qui leur paraissent adéquates parmi celles proposées par

le décret, soit :

• les appuis pédagogiques intégrés (aide individualisée pour les

élèves avec des difficultés qui fréquentent une classe

ordinaire) ;

• les classes à effectif réduit (maintien dans les structures ordinaires

d’élèves en difficulté, sans déficience intellectuelle. Ces

classes comptent entre dix à douze élèves dont un tiers environ

avec des besoins spécifiques 238 ) ;

• les classes d’observation à l’école primaire et au cycle d’orientation

(élèves sans déficience intellectuelle qui ont des difficultés,

susceptibles d’être réintégrés en classes ordinaires 239 .

Elles réunissent entre huit et dix élèves en primaire, six à

douze au cycle selon qu’elles comportent un ou deux niveaux) ;

• les classes d’adaptation, également disponibles en primaire et

au cycle d’orientation (destinées à des élèves avec déficience

intellectuelle légère. Elles sont régies par les directives de

l’OFAS et les élèves sont reconnus par l’AI. Elles comptent

quatre à huit élèves et privilégient, dans la mesure du possible,

une intégration partielle en classe ordinaire) ;


092

• les classes de préapprentissage (destinées à des élèves –

huit à dix – rencontrant des difficultés et qui veulent acquérir

un complément de connaissances avant d’entrer dans le

monde du travail) ;

• les institutions scolaires spécialisées (pour les élèves avec

déficience intellectuelle moyenne ou grave, ne pouvant suivre

l’école publique) 240 .

≥ L’institution scolaire et les parents participent également à la

réflexion. Le décret se doit de déterminer à qui revient le choix

final. Dans un premier texte soumis aux députés, en cas de

désaccord entre les parents et la commission scolaire sur le choix

des mesures à prendre à l’intention d’un jeune en difficulté, l’inspecteur

était appelé à trancher, sur préavis de l’Office de l’enseignement

spécialisé. Plusieurs députés prennent la parole contre

ce qui est vu comme un non-respect de l’autorité parentale. Le

décret est modifié afin qu’en dernier ressort, la décision leur

revienne 241 .

QUEL AVENIR POUR LA BRUYÈRE ?

≥ Lors des débats du Grand Conseil, le député Willy Broccard

souligne le travail réalisé par les institutions spécialisées

jusqu’alors et soulève la question de leur avenir : « Le décret est

louable, car il favorise l’intégration. Cependant, nos institutions

sont pratiquement déjà vides, et se vident de plus en plus, alors

que des millions y ont été investis et que des travaux de

qualité y sont réalisés. Aujourd’hui, il se pose le dilemme

suivant : nous souhaitons une intégration totale ; qu’allonsnous

faire des institutions ? » 243 . Le Conseiller d’État

Bernard Comby, répond à la question avec pragmatisme,

sans prendre de gants :

« Cela ne veut pas dire qu’à l’avenir, étant donné la politique

d’intégration, ces institutions disparaîtront. Au

contraire, malheureusement – je puis utiliser ce terme

–, dans certaines situations, il faut placer des enfants en

dehors de leur milieu familial, en dehors de leur milieu

Cela ne veut pas dire

qu’à l’avenir, étant donné

la politique d’intégration,

ces institutions

disparaîtront.

≥ UN HOMMAGE AUX MAMANS ÉDUCATRICES

Avant d’ouvrir les deuxièmes débats sur le décret, Monique Paccolat, présidente du Grand Conseil, choisit de présenter aux députés

le film « Je veux le soleil debout » dans lequel Pierre-Antoine Hiroz retrace le parcours de son frère, Stéphane, atteint de trisomie

21. À la fin de la projection, les applaudissements sont soutenus. Cécile, leur maman, est dans la salle. « Par son exemple,

elle rend hommage à toutes les mamans éducatrices, pour leur amour, leur vigilance, leur confiance, leur patience », s’exclame

Monique Paccolat, avant de la remercier chaleureusement pour ce témoignage 242 .


093

Photo d’archives d’Insieme Valais romand. Date inconnue.

scolaire dans des institutions spéciales, qui viennent à la rescousse

et peuvent apporter une aide indispensable à ces

jeunes, afin qu’ils puissent surmonter leur handicap.

Nous sommes ainsi favorables au maintien des institutions spécialisées.

Je n’estime pas, cependant, qu’il faille renverser la

vapeur. S’il intervient une sous-utilisation des institutions spécialisées

par le fait que les enfants sont pris en charge d’une

autre manière – et mieux – dans leur milieu, c’est tant mieux !

J’estime qu’il s’agit d’une excellente solution. Il faut en tirer les

conséquences.

C’est dans cet esprit que nous devons examiner le problème

des institutions spécialisées, sans quoi ce serait quand même

‹ fort de tabac › – si vous me passez l’expression ! – de maintenir

en place des institutions tout simplement parce qu’elles

existent ! Si ces dernières ne répondent plus à des besoins, il

faudra les supprimer. Aucun député ne pourrait prétendre le

contraire… Cependant, en conclusion, je constate que nous

aurons sans doute encore besoin d’un bon nombre de ces institutions

qui existent, soit dans le Haut-Valais, soit dans le Valais

romand et qui rendent de très précieux services. » 244

Aujourd’hui, l’idéologie de l’intégration

ébranle les structures existantes, interpelle

associations et comités, agite même certains

politiciens. Ne serait-elle pas en train aussi

de se transformer en mode au risque de nier

un droit certain à la différence pour le handicapé

et un savoir-faire développé dans les institutions

spécialisées, des agents d’intégration qui ont fait

leurs preuves […]. Le mandat confié par l’État

à La Bruyère n’est à l’évidence plus réalisable

simplement parce que de nouvelles lois,

une nouvelle mode, une autre mentalité peut-être,

font que les handicapés mentaux poursuivent

leur « scolarité » à tort ou à raison, à tort et

à raison probablement, en dehors des premiers

services spécialisés dont nous faisons partie.

Rapport annuel de l’école La Bruyère, 1986


094

≥ Il ne fait aucun doute que dans les circonstances du

moment, toute l’organisation de l’enseignement spécialisé

doit être repensé. L’école La Bruyère fera-t-elle partie

des institutions dont l’utilité perdure même avec l’intégration,

ou de celles destinées à disparaître, car considérée

comme obsolète ?

≥ La question doit en tous les cas être posée. Rien d’étonnant

à cela, au vu de la diminution de ses effectifs et des remises en

question qu’elle a connues. Des voix s’élèvent pour questionner

des moyens surdimensionnés au vu de nombre d’élèves accueillis.

En outre, les comptes sont de plus en plus difficiles à maintenir

: pour la première fois, en 1982, l’État doit éponger son

déficit. La question des pertes de La Bruyère est ensuite récurrente

et, en 1987, elle reste en suspens entre l’école et l’État. Il

faut attendre le début des années 1990 pour que le dossier soit

réglé 245 .

Un groupe

de travail est créé

pour négocier

la nouvelle

convention.

l’État à pallier les difficultés liées au subventionnement

et notamment à la répartition Canton-Confédération et

Canton-Institutions. Le groupe, présidé par le chef du

service administratif du DIP, est composé de treize personnes

représentant soit les services concernés de l’État

du Valais, soit des associations faitières concernées par

la question dont un membre de l’Association de parents 247 .

Une collaboration plus étroite

avec La Castalie ?

≥ Dès les premières discussions du groupe de travail « La

Bruyère », la question se pose d’un éventuel double emploi entre

l’école et La Castalie. Y a-t-il un sens à conserver les deux

services ?

≥ Le sujet est discuté en mars 1987 lors d’une séance à

laquelle est invitée également Simone Reichenbach. Si les deux

établissements accueillent des jeunes multihandicapés, les

Repenser les rapports État-École

Aussi, après discussion avec l’État du Valais et d’un commun

accord, la Fondation dénonce-t-elle la convention qui la lie à l’État

à échéance du 1 er janvier 1988. Selon les mots du rapport annuel

1986, elle le fait « par souci d’honnêteté et de clarification ». Il

s’agit de repenser les structures pour qu’elles s’insèrent mieux

dans le contexte de l’époque et la nouvelle vision de la prise en

charge des enfants handicapés mentaux. Un groupe de travail

est créé pour négocier la nouvelle convention et notamment redéfinir

La Bruyère comme service de l’éducation et de l’enseignement

spécialisé, établir des garanties financières et régler la

question des déficits en suspens 246 .

≥ En parallèle, à un niveau plus global, un autre groupe de

travail chargé d’étudier les mesures de coordination et de planification

des structures de prises en charge pour les élèves aux

besoins spécifiques est créé. Son rapport devra également aider

≥ UN MANQUE DE COMMUNICATION,

SOURCE DE TENSIONS

Le personnel de l’école, apparemment peu informé des démarches en cours,

fait part de son inquiétude dès le mois d’avril. Il demande d’être entendu et

de participer à l’élaboration de la prochaine orientation donnée à l’école, ou

tout du moins d’être informé régulièrement. Plusieurs propositions pour la

future organisation sont faites 248 . Le manque de communication dans cette

première phase d’étude soulève également l’ire de certains membres du

comité de direction de l’école, surtout parmi les représentants des parents 249 .


095

différences sont relativement évidentes : un externat géré par une

institution privée et ouvert durant l’année scolaire uniquement,

sis dans la région de Sion, pour le premier, un internat cantonal

pouvant accueillir des enfants toute l’année et sis dans le

Chablais, pour le second. Celui-ci peut d’ailleurs recevoir des

enfants pour des séjours temporaires afin d’alléger les parents

des élèves de l’école, notamment durant les vacances scolaires.

Cette option est de plus en plus utilisée 250 . Disposer d’un service

pouvant accueillir la population cible et lui offrir les services éducatifs

et thérapeutiques adéquats est sans aucun doute nécessaire

à Sion et Martigny. Une centralisation sur La Castalie n’est

pas envisageable.

≥ Dans un premier temps, le groupe de travail penche pour un

maintien de La Bruyère en mettant en place une meilleure collaboration

avec La Castalie afin d’être plus rationnel et de s’adapter

à la situation qui prévaut désormais 251 .

≥ Toutefois, durant l’été, l’optique change quelque peu. Nous

ne disposons pas de tout le déroulé des discussions, mais savons

que, le 26 juin 1987, le personnel de La Bruyère adresse une

lettre à son directeur afin de lui transmettre ses propositions et

souhaits quant à l’avenir de l’école. Pour les signataires, La

Bruyère devrait s’apparenter aux écoles régionales AI et devenir

une école d’État, rattachée au DIP sous la forme d’un service de

l’Office de l’enseignement spécialisé 252 . En septembre, le groupe

de travail insère cette option dans l’inventaire des propositions

qu’il pense soumettre à l’État et à la Fondation. Elle vient s’ajouter

à celle d’un centre médico-éducatif proche de La Castalie 253 .

Sept variantes – une plébiscitée

≥ Le groupe de travail rend finalement son rapport en

décembre 1987. Le diagnostic est le suivant : inadéquation entre

les besoins à couvrir et l’importance des services en place, lien

entre les différents handicaps et les prestations mal défini. Le

rapport constate également que pour répondre à la sous-occupation

des instituts, l’admission est ouverte de manière élargie et

les prestations sont diversifiées, plus de publicité est réalisée

avec un risque de concurrence accru. Cet état de fait crée des

tensions croissantes.

Afin de régler ce problème, sept propositions sont établies :

1. La Bruyère, centre médico-éducatif : dans cette option, les

cas simples rejoindraient les classes d’adaptation publiques.

L’école La Bruyère continuerait à offrir une solution en externat

pour les enfants multihandicapés. Des craintes sont émises sur

la fragilité de telles « petites unités » et sur le coût élevé de ce

« double service » avec La Castalie.

2. La Bruyère dans les centres scolaires : l’école reste gérée

par la Fondation tout en étant intégrée « géographiquement,

physiquement et fonctionnellement » dans les écoles publiques

communales. Les déplacements – combinés avec ceux des

enfants des classes d’adaptation – gagneraient en efficience.

La commission signale toutefois un risque de marginalisation,

d’absence d’équipement spécialisé. Elle relève en outre

une incertitude sur l’intérêt des communes pour une telle

solution et sur les difficultés qui pourraient surgir dans cette

collaboration.

3. La Bruyère, service confié aux communes de Sion et

Martigny, tout en restant dans les locaux existants avec des

équipements spécialisés déjà en place, du moins à Sion. La

gestion et la direction seraient confiées aux communes, une

économie en personnel pourrait être faite. Toutefois, l’intégration

géographique ne serait pas réalisée et les parents auraient

un choix plus restreint de placement.

4. La Bruyère, service confié aux communes dans le cadre des

classes d’adaptation à Sierre, Sion, Martigny et Monthey : on

atteindrait alors une « intégration maximale » ; les déplacements

seraient optimisés et combinés avec les classes d’adaptation ;

des économies en personnel réalisées et la gestion comme la

direction seraient confiées aux communes. La question du droit


096

à la différence et de la manière de le gérer dans ce contexte est

toutefois posée par la commission, ainsi que celle d’un choix

restreint pour les parents.

5. Statu quo, soit maintien de la structure existante en tenant

compte des conditions posées par la Fondation pour cela. Les

inconvénients relevés sont d’importance : l’incapacité de définir

et de respecter les critères de placement et de garantir

l’effectif.

6. La Bruyère, décentralisée, englobant les classes d’adaptation

de Sierre, Sion, Martigny et Monthey : parmi les inconvénients,

la « dévalorisation des classes d’adaptation » est mentionnée,

ainsi qu’un risque de marginalisation, sans compter les

difficultés posées par une « gestion mixte ». Une question reste

ouverte : les communes accepteraient-elles de confier les

classes à La Bruyère ?

7. La Bruyère, service confié à La Castalie : solution centralisée,

avec un externat, un internat et un Service éducatif itinérant

spécifique. Aucun inconvénient n’est relevé ici ; des avantages

par contre : unité de prise en charge garantie ;

rationalisation du personnel ; garantie financière (gestion de

l’État), solution pour chaque cas d’enfant multihandicapé.

Une proposition faite par le personnel de La Bruyère est ajoutée

à la liste, qui se rapproche de la quatrième ci-dessus avec

une assimilation aux classes d’adaptation des villes de Martigny

(dans les nouveaux locaux intégrés à l’école communale) et de

Sion (locaux actuels de Champsec) 254 .

≥ Après analyse de l’ensemble, d’entente avec la Fondation,

l’option 4 est retenue et mise en consultation auprès des personnes

et organismes concernés par l’avenir de l’école :

« Les classes de l’école La Bruyère seraient confiées aux communes

ayant des classes d’adaptation, soit : Sierre, Sion,

Martigny, Monthey.

Vous savez déjà que nous nous dirigeons

vers un transfert de l’école La Bruyère

aux pouvoirs publics. Sur le fond du problème,

nous pouvons approuver cette option.

En effet, l’enseignement obligatoire étant confié

aux communes, nous pensons que nos enfants

y ont aussi droit et que nos communes seront

à même d’assurer cette tâche. Sur la forme

cependant, nous croyons qu’il est de notre devoir

de transmettre nos soucis et nos expériences

aux autorités compétentes. […] La Fondation

en faveur des handicapés mentaux a déjà

transmis au Département de l’instruction

publique ses soucis pour un bon transfert

de l’école en donnant aussi l’assurance

de son appui. L’Association de parents peut

se rallier entièrement aux thèses de la Fondation

et doit la remercier du bon travail qu’elle

effectue pour nos enfants, comme pour

nos adultes handicapés.

Rapport du président, Assemblée générale

de l’Association de parents, 27 mai 1988 258

Les enfants ayant des handicaps multiples seraient accueillis

dans des unités intégrées aux écoles de Sion et Martigny qui

devraient disposer de services spécifiques complétés par les

prestations du Service médico-pédagogique et du centre

médico-éducatif de La Castalie. » 255


097

≥ Le Conseil de Fondation, le Comité de direction de l’école, le

comité de l’Association de parents, le personnel enseignant et de

soutien ainsi que celui du Service éducatif itinérant et les parents

d’élèves peuvent se prononcer. Sur 100 personnes, 62 répondent

à la consultation et sur ce nombre 58 votent en faveur d'un transfert

aux communes. Les personnes consultées peuvent également

donner leur avis sur les communes auxquelles transférer La

Bruyère. Sur les 26 personnes qui répondent à cette question,

18 se concentrent sur Sion et Martigny 256 .

≥ La Fondation donne tout de même une réponse tout en retenue

et émet des réserves en stipulant qu’elle ne voit pas vraiment

l’avantage d’une telle solution. Elle décide de ne pas s’opposer à

un transfert de son mandat aux pouvoirs publics si des garanties

sont données par les communes afin d’assurer la qualité de la

nouvelle offre établie 257 .

Photo d’archives d’Insieme Valais romand. Date inconnue.

≥ LA FONDATION DENIS ET LOUISE-ANNA TORNAY

ET LA CONSTRUCTION D’UNE ÉCOLE LA BRUYÈRE À MARTIGNY

À son décès, en 1974, Louise-Anna Tornay lègue une partie de ses terrains et de sa fortune afin que soit créé un établissement pour

enfants mentalement handicapés. Selon son souhait, la Fondation Denis et Louise-Anna Tornay est créée, présidée par Edouard

Morand, président de la Ville de Martigny, et dont Marcel Gross, alors président du Conseil de la Fondation en faveur des handicapés

mentaux, est membre 259 . En 1975, la fondation écrit au directeur de l’école La Bruyère pour lui annoncer qu’elle a pensé à investir

dans le développement de son centre de Martigny ainsi, peut-être, que dans une structure pour les adultes. La Ville de Martigny se

dit ouverte à « la construction d’un groupe de classes pour handicapés mentaux dans un complexe scolaire prévu par la commune ».

Aussi, une évaluation des besoins est-elle demandée à André Dupertuis 260 .

Malheureusement, les projets de la fondation sont retardés par des difficultés juridiques et les discussions ne reprennent qu’en

1983, la fondation pouvant enfin disposer de ses fonds. Entre 1985 et 1986, la meilleure solution pour la construction d’un bâtiment

pour les élèves de La Bruyère est recherchée avec la Commune de Martigny 261 . Il est finalement décidé de lier ce projet à celui

du nouveau centre scolaire, à la rue des Petits-Epineys. À la rentrée 1989-1990, c’est bien au dernier étage du centre scolaire des

Petits-Epineys que les élèves de l’école La Bruyère – désormais en mains communales – prennent leurs quartiers 262 .


098

Le transfert de La Bruyère – Martigny

à la commune

≥ Le 8 juin 1988, le Conseil d’État confirme ce choix, du moins

pour l’école La Bruyère de Martigny. Cette solution s’est dessinée

plus clairement dans cette ville, car la construction du bâtiment

envisagé par la Fondation pour l’accueillir ne peut se faire qu’avec

le secteur public 263 . L’OFAS refuse en effet un financement d’une

construction « La Bruyère » 264 .

≥ L’Office de l’enseignement spécialisé est chargé d’étudier

une convention entre l’État et la Commune de Martigny concernant

la prise en charge des enfants déficients intellectuels dits

« éducables sur le plan pratique » 265 . Selon la décision du Conseil

d’État, elle doit contenir les principes suivants :

• les enfants avec handicaps multiples sont accueillis dans

des unités intégrées aux écoles de Martigny qui recourent

aux services spécifiques communaux et cantonaux ;

• l’ensemble des prestations de services actuelles, la qualification

du personnel, les repas de midi et les transports sont

garantis ;

• la Commune accorde la priorité au personnel actuel de La

Bruyère-Martigny

• Elle tient compte du fait que la responsabilité pédagogique

des classes doit relever de personnes ayant une formation

spécialisée ;

• la composition de l’équipe pluridisciplinaire, la situation et la

composition des classes participent à l’intégration fonctionnelle

et géographique ;

• les parents des élèves sont consultés quant aux décisions

relatives à l’organisation et au fonctionnement des classes.

≥ La décision précise encore que la Fondation en faveur des

handicapés mentaux, l’Association de parents, la direction de

l’école La Bruyère et son personnel enseignant ainsi que les services

spécialisés doivent être parties prenantes dans l’élaboration

de cette convention 266 . Il s’agit là d’un souhait émis à maintes

La Bruyère ne doit, ni ne peut, être assimilée

à des classes AI. Elle doit rester elle-même,

indépendante, libre dans ses activités, avec

ses caractéristiques, son esprit,

qui sont essentiels pour le développement

harmonieux des jeunes handicapés mentaux.

À La Bruyère, on fait, outre le travail purement

scolaire, toutes sortes d’activités manuelles,

comme le travail sur bois, sur carton,

de la céramique, de la cuisine… et j’en passe.

On mange au restaurant, on fait des voyages,

des camps, du sport, on y vit avec intensité

et chaleur. Oui, il y a un esprit Bruyère.

Mais, cet esprit subsisterait-il si le personnel

éducatif était assimilé aux enseignants

des classes AI, perdant ainsi sa propre

spécificité, sa propre identité ?

Extrait d'une tribune libre de Cécile Theytaz-Hiroz,

parue dans Le Nouvelliste valaisan, 10 juin 1988.

reprises par ces divers acteurs ainsi que par certains membres

de la commission pour les classes d’adaptation comme Simone

Reichenbach 267 .

≥ Parmi les points dont se soucient particulièrement la

Fondation et l’Association de parents figure le respect du régionalisme

de l’école La Bruyère. Les enfants non domiciliés à

Martigny ne doivent subir aucun préjudice suite au transfert de

l’école. Un projet de convention, annoté, conservé dans les

archives de l’Association de parents montre bien ce souci. Des

précisions sont apportées afin de détailler au mieux le territoire

concerné : le district de Martigny, celui d’Entremont, les


099

communes de Dorénaz, Collonges, Évionnaz, Vernayaz,

Finhaut et Salvan.

≥ D’autres éléments sont essentiels, notamment pour l’Association

de parents : maintien des services existants à l’école (thérapies,

physiothérapie, ergothérapie, logopédie, etc.), engagement

d’un personnel qualifié pour s’occuper des enfants

handicapés y compris des cas les plus lourds, repas et transports

organisés par l’école, respect du libre choix de l’institution fait par

les parents et acceptation de tous les cas de handicapés sévères

que les parents souhaitent et peuvent « garder dans leur foyer » 268 .

L’association s’inquiète également du sort du personnel de La

Bruyère n’ayant pas de formation spécialisée et demande qu’à la

priorité de l’emploi pour le personnel de l’école soit ajoutée la

reconnaissance des droits acquis 269 .

Entre la décision du Conseil d’État et la transmission à l’Association

de parents d’un projet de convention, il se passera six

mois ; puis six mois encore jusqu’à la signature définitive de la

convention, le 11 mai 1989 270 .

Plusieurs lettres de

parents conservées

dans les archives

d’Insieme font entendre

leurs inquiétudes pour

le futur de leur enfant.

≥ La Fondation demandait pourtant en juillet 1988

déjà à l’État que des décisions soient prises rapidement

pour que les personnes concernées par les changements

puissent être avisées au plus vite sur leur avenir. Le ton de la

lettre était déjà ferme à ce moment-là, laissant transparaître un

certain agacement, peut-être une décision prise « à reculons »

par la Fondation. « La décence voudrait que nous puissions

rapidement informer chacun sur son avenir et nous comptons

sur vous pour pouvoir le faire dès la rentrée scolaire de cet

automne » peut-on lire. Puis, plus loin, concernant le transfert

de La Bruyère Sion : « Je vous demande que ce dossier avance

rapidement au niveau des décisions, afin qu’au niveau des réalisations

le temps puisse nous être accordé d’agir en dehors de

toute précipitation » 271 .

≥ Le président de la Fondation sait sans doute quelles difficultés

rencontrent les parents à accepter l’incertitude de la situation.

Certes, la décision du Conseil d’État ne date alors que d’un mois,

mais les discussions sur l’avenir de La Bruyère sont en marche

depuis plus d’une année déjà. Plusieurs lettres de parents

conservées dans les archives d’Insieme font entendre leurs

inquiétudes pour le futur de leur enfant et leur mécontentement

par rapport au manque d’information reçue sur les tractations en

cours 272 .

La commission scolaire et la commune de Sion

sont favorables à l’intégration des handicapés mentaux

dans le secteur public scolaire : pour autant que cette

intégration soit mesurée, individualisée, qu’elle ne réponde

pas seulement aux besoins d’une idéologie,

et que les moyens concrets existent.

Extrait du compte-rendu d’une séance entre la Fondation

et la Commune de Sion, 14 février 1989 276

Dans la foulée, le transfert de l’école de Sion

≥ En tenant compte des mêmes « essentiels », une convention

est négociée ensuite avec la Ville de Sion. Le transfert de l’école

sera effectif à la rentrée 1990-1991. Entre-temps, une commission

scolaire est nommée pour gérer l’école. Le comité de direction

de l’école La Bruyère a en effet été dissous par la Fondation

qui souhaite rationaliser ses activités et se recentrer sur son

engagement pour les adultes handicapés mentaux, secteur dans

lequel le travail est toujours plus important 273 .


100

≥ La question des locaux est au centre des préoccupations. La

Fondation souhaite rester propriétaire de ceux-ci et disposer de

certains espaces pour son Centre de formation des jeunes

adultes.

≥ Si, dans un premier temps, il a été imaginé de déplacer les

classes de l’école dans un établissement scolaire à construire par

la Ville, c’est finalement dans les locaux de Champsec que les

classes se tiendront, ce qui fait craindre au personnel que « les

élèves multihandicapés se retrouvent entre eux, dans une espèce

de ghetto, privés de la stimulation d’autres élèves moins handicapés

et hors toute intégration possible » 274 .

≥ Le transfert est toutefois effectif au 20 mai 1990. 275

≥ L’ASSOCIATION DE PARENTS

INTÉGRÉE AUX COMMISSIONS

Les conventions de transfert stipulent qu’un membre de l’Association

de parents doit être intégré dans les commissions créées

en lien avec les populations concernées. À leurs côtés : le président

de la commission scolaire, un représentant de la Fondation

Tornay et deux du DIP dont un de l’Office de l’enseignement

spécialisé.

Photo d’archives d’Insieme Valais romand. Date inconnue.


101

PAROLES D’ARCHIVES

UN REGARD SUR L'INTÉGRATION

≥ Le rapport annuel 1987 de l’école La Bruyère se penche sur la question du passage de celle-ci du secteur privé au secteur

public 277 . Le « propos du directeur » permet de mieux cerner la position prise par rapport à l’intégration, les espoirs et les craintes

qu’elle suscite et ce pourquoi les personnes engagées dans l’école La Bruyère vont se mobiliser lors des discussions sur les conventions

de transfert aux communes.

Plus qu’un simple transfert du support juridique, le passage

du privé au public serait une vague de fond susceptible

de modifier profondément l’organisation de la prise

en charge des enfants mentalement handicapés. Pour le

meilleur si l’on se donne réellement les moyens de concrétiser

de généreux principes, pour le pire si l’on ne reste

pas attentif à certains besoins.

Le meilleur serait de considérer l’enfant, l’adolescent,

voire l’adulte handicapé mental capable d’évoluer, de participer

au quotidien des non-handicapés sans ségrégation

ou protection par trop étouffante ou paternaliste.

Le meilleur serait une ouverture plus grande vers la société

qui peut offrir à chacun sa place, une place qui implique

pour tout individu des droits et des devoirs. N’avons-nous

pas trop tendance à réclamer des droits pour le handicapé

sans lui permettre d’assumer lui-même ses responsabilités

avec ses propres moyens ?

[…]

Le meilleur serait que se réalise enfin, pour l’enfant handicapé

mental qui suit une scolarité adaptée, le vœu de

ce père de la pédagogie curative qu’a été Heinrich

Hanselmann :

‹ Puisque le handicapé mental doit apprendre à vivre, la

salle de classe doit en quelque sorte abattre ses quatre

murs, elle doit s’ouvrir entièrement au grand air de la vie.

L’école doit se faire atelier, atelier de vie, un lieu où les

enfants apprennent à œuvrer, à réfléchir, à ressentir et à

vouloir dans le même cadre que la vraie vie leur opposera

dans son immédiateté… ›

Le pire serait que le jeune handicapé se retrouve dans une

organisation typiquement scolaire qui très tôt engendrerait

une quadruple illusion :

a) l’illusion pour le jeune handicapé mental de vivre l’école

comme tout un chacun : avec le risque d’apprendre ce

dont il n’a pas l’utilité ni immédiate, ni future

b) l’illusion pour certains parents de croire que leur enfant

est « comme les autres » puisqu’il va à la même école

que son frère, sa sœur ou son petit camarade ; illusion

qui favoriserait la dangereuse tendance à banaliser le

handicap. De grâce n’oublions pas l’unicité de l’individu

et son droit à la différence ;

c) l’illusion pour l’enseignant spécialisé de croire qu’il doit

revendiquer les mêmes droits et les mêmes devoirs que

l’enseignant d’élèves non-handicapés : au risque de

perdre son identité professionnelle, sa spécificité ;

d) l’illusion pour les autorités scolaires de croire que le

‹ programme › officiel est la référence de tout apprentissage

: même l’apprentissage de la vie pour le handicapé

mental.

Cette projection dans un avenir peut-être pas si lointain

– si La Bruyère n’endosse pas une nouvelle légitimité –

m’incite à faire un vœu et suscite une espérance :

Un vœu : que ce que La Bruyère accomplit aujourd’hui

pour les jeunes handicapés mentaux, voire les multihandicapés,

soit considéré comme le minimum et que ce

minimum soit dépassé : sous d’autres formes peut-être,

car il faut admettre que notre façon de faire institutionnelle

est peut-être ici et là teintée de conservatisme.

Une espérance : que tout changement tende vers une

situation meilleure et que ce qui est l’esprit de La Bruyère

puisse engendrer un respect toujours plus fort de l’individu

handicapé.


102

UNE REMISE EN QUESTION

EN PROFONDEUR DU SEI

≥ Si le bien-fondé d’un service pédago-thérapeutique à domicile

pour les enfants d’âge préscolaire n’est pas remis en question,

en 1985, l’arrivée d’un nouveau directeur à l’école La

Bruyère est l’occasion de questionner l’organisation du Service

éducatif itinérant (SEI). Une réflexion en profondeur est menée :

rôle et statut des pédagogues du SEI, durée et fréquence des

visites, durée du suivi, remise en question de la période d’intervention

du SEI calée sur le calendrier scolaire, etc. 278 Des solutions

sont également recherchées afin de réduire le coût des

visites qui ne peut être viable à long terme 279 . Il s’agirait de recentrer

le plus possible l’activité des éducatrices sur les visites à

domicile et de diminuer le temps d’organisation, de colloques,

etc. La Fondation considère en outre que les pédagogues du SEI

devraient réaliser au minimum trois visites par jour, soit quinze

visites par semaine, alors qu’elles estiment que dix à douze visites

hebdomadaires sont un maximum pour une prise en charge de

qualité. Le temps d’arrêt des visites durant les vacances scolaires

estivales pourrait également être diminué de quelques semaines.

En augmentant le temps de présence auprès des enfants, le SEI

pourrait toucher plus de subventions de l’OFAS et le déficit pourrait

ainsi être réduit 280 .

≥ Des tensions apparaissent entre l’équipe éducative et le

comité de direction de l’école. En 1986, l’équipe espère notamment

une augmentation du personnel équivalant à un demi-poste

pour Sion où les demandes augmentent, mais la Fondation

n’entre pas en matière, sans doute pour des raisons financières,

peut-être également à cause des discussions en cours en lien

avec la réorganisation du service et le statut du personnel

éducatif 281 .

≥ En mars 1987, ce ne sont pas moins de 62 enfants que les

quatre éducatrices du SEI suivent 282 . Dans ces conditions, la

Une nouvelle répartition des heures

de travail permettrait de travailler

dans des conditions moins ‹ stressantes ›,

d’approfondir certains domaines et de vivre

une vie familiale et sociale normale. De plus,

la prise en charge de dix enfants handicapés

et de leurs familles est absorbante, lourde

de soucis, de tension nerveuse et d’implication

de soi, que l’on ne peut chiffrer comme

des heures de travail dans un bureau.

Extrait d’un rapport des éducatrices du SEI demandant

notamment que la prise en charge de 10-12 enfants

soit reconnue comme l’équivalent d’un travail d’enseignant

à temps plein. 284

prise en charge est péjorée : certains enfants doivent être visités

tous les quinze jours plutôt qu’une fois par semaine et certaines

éducatrices doivent suivre des enfants hors de leur région. La

situation se tend toujours plus alors que les discussions en cours

avec l’État quant à l’avenir de l’école entraînent un statu quo. La

Fondation demande pourtant à plusieurs reprises à l’État que des

décisions soient prises rapidement pour clarifier la situation, apaiser

les tensions et pour adapter le personnel aux besoins de prise

en charge 283 .


103

Exercices éducatifs pratiques à l’usage des parents, juin 1981.

La solution : un rattachement

à l’Office de l’enseignement spécialisé

≥ Au cours des discussions sur la réorganisation du SEI, la

question du rattachement de celui-ci à l’école La Bruyère est

posée. Ne faudrait-il pas plutôt le rattacher directement à la

Fondation ? En effet, il semble que pour les parents des enfants

suivis, le rattachement à La Bruyère pose problème puisqu’ils

n’auraient, dans les faits, jamais contact avec l’école. Pour

les éducatrices du SEI, la situation actuelle crée la confusion

dans les esprits, laissant penser qu’il est une « pré-école La

Bruyère » 285 .

≥ Dès lors, en 1988, lorsque le transfert de l’école au secteur

public est décidé, la Fondation y voit une opportunité de régulariser

cette situation et de clarifier la fonction du SEI. Elle demande

ainsi à l’État de réfléchir également à son rattachement à un

organisme cantonal, soit au Service médico-pédagogique valaisan,

soit à l’Office de l’enseignement spécialisé 286 . La première

option a la préférence de la Fondation et surtout de la direction

de l’école, la seconde semble être celle que choisirait le personnel

qui se considère avant tout comme pédagogue et dont la

formation de base relève du domaine de l’enseignement spécialisé

287 . Leur avis est suivi par la commission, puis par l’État. Le

Service éducatif itinérant est rattaché à l'Office de l'enseignement

spécialisé dès le 1 er septembre 1989. Pour une courte

durée toutefois, puisque quatre ans plus tard, il est décidé de

l’intégrer au nouveau Service cantonal d’aide à la jeunesse. Il

rejoint alors le Service médico-pédagogique valaisan au sein de

l’Office médico-pédagogique.



Toujours engagée

pour le

vivre-ensemble

L’Association de 1990 à nos jours

Créée pour soutenir les parents

et défendre les intérêts des enfants

handicapés mentaux, l’Association

de parents traverse au début

des années 1990 une période

de questionnement. Comment

poursuivre alors que les grands

projets des débuts, pour les enfants

et les adultes, volent désormais

de leurs propres ailes ?

L’association a-t-elle encore

une légitimité ? Comment

se réinventer ? Une enquête auprès

des parents est menée en 1994.

Les réponses reçues

révèlent leur attachement

à l’association et les nombreux

domaines dans lesquels elle peut

encore les soutenir. Le comité

se remobilise pour répondre

aux besoins exprimés

par les membres : rester présents

sur le terrain de l’intégration

scolaire, trouver des solutions

pour alléger un peu leur quotidien,

continuer à sensibiliser

la population et les milieux

politiques, défendre les conditionscadres,

proposer des activités

de loisirs. Un programme qui est,

aujourd’hui encore, celui

de l’association, devenue Insieme

Valais romand en 1995. Un nom

adopté par la Fédération nationale

pour signifier l’engagement

des parents en faveur

du « vivre-ensemble ».

par Cristina Philippoz, journaliste


Sensibilisation d’une classe de primaire à la thématique du handicap

avec la valise pédagogique « Insieme fait la classe », Grégoire Jirillo, Vétroz, 2011.


107

VERS L’INTÉGRATION

≥ Au tournant des années 1990, l’école La Bruyère s’est

encore éloignée un peu plus de l’Association de parents. Si sa

gestion était confiée jusqu’alors à la FOVAHM, elle passe désormais

en mains publiques. Mais une clause des conventions

signées avec les villes de Martigny et de Sion permet à l’association

de garder le lien : les commissions scolaires de ces deux

villes doivent compter un représentant des parents parmi leurs

membres. « La participation aux commissions nous a permis de

faire entendre les besoins des parents, d’avoir des contacts privilégiés

avec les autorités scolaires et de continuer à faire avancer

la cause de nos familles dans ce domaine », explique Nathalie

Rey, l’actuelle présidente d’Insieme Valais romand. Les débuts de

l’intégration scolaire dans les villages en sont sans doute la meilleure

illustration.

Accepter l’inacceptable ?

≥ Au début des années 1990, scolariser un enfant en situation

de handicap équivaut à suivre le modèle de l’assurance-invalidité.

Un cheminement qui ne souffre pas la contestation. Avec une

voie toute tracée : si l’enfant répond aux critères définis par l’AI,

il est scolarisé dans une structure spécialisée reconnue par l’assurance.

Celle-ci prend alors à sa charge 50 % de la facture de

scolarisation, le reste étant assumé par les cantons. En Valais,

l’État assure le 80 % de ce montant, hors cas de rigueur. Sans la

volonté et la ténacité de certains parents désireux de voir leur

enfant intégrer le système scolaire traditionnel malgré leur déficience

intellectuelle, ce modèle de prise en charge aurait perduré

en Valais.

« Raphaël était un enfant particulier dans tous les domaines.

Ceux qui voulaient lui mettre une étiquette disaient de lui qu’il

était trisomique. Mais il était bien plus que cela. Il était Raphaël.

C’était notre enfant. On l’a aimé plus que tout. » 1

≥ L’arrivée de Raphaël et de sa différence dans la vie de la

famille Abbet en 1985 a été vécue comme un coup de tonnerre.

Pour Michel, son père, le choc est terrible. Au déni de la différence

succède l’acceptation.

« C’est beaucoup plus facile quand on accepte le handicap de

son enfant parce qu’on n’est plus marqué par lui. Au fond, on

a l’amour de l’enfant, on sait qu’il est handicapé, mais cela ne

nous pose plus de difficultés. Personnellement, je ne voyais

pas tellement ce qu’il avait de différent, mais je voyais plutôt ce

qu’il avait de semblable avec nous. »

≥ Et c’est cette volonté de voir le semblable, de percevoir les

similitudes et les envies communes qui ont certainement été à

l’origine de la croisade menée pour l’intégration par Michel Abbet,

en tant que père bien sûr, mais également de membre du comité,

puis de président de l’Association de parents

≥ « Moi, je voulais que mon gamin aille à l’école comme les

autres ! » Après le choc de la naissance et la découverte du handicap,

l’entrée à l’école marque souvent une étape cruciale pour

les parents et l’entourage. La question de la scolarisation agit à

nouveau comme un révélateur de la différence. Difficile pour un

parent d’imaginer que son enfant se retrouve en marge du quotidien

de n’importe quel autre enfant de son âge.

≥ Enseignant, Michel Abbet a vécu l’âge d’entrée à l’école de

Raphaël avec douleur. La solution proposée par le système en

vigueur, une scolarisation à l’école La Bruyère, n’est pas du tout

de son goût. Habiter Orsières et être scolarisé à Martigny à l’âge

de l’école enfantine, de surcroît en classe spéciale, ne sonne pas

juste à ses oreilles.

≥ Découvrez la vidéo

de l’entretien

avec Michel Abbet


108

« On venait chercher mon enfant à la maison pour aller

ensuite à l’école La Bruyère à Martigny. Le soir, on le ramenait.

Le but n’était pas l’autonomie de l’enfant, c’était que

l’enfant ne prenne aucun risque. Je comprenais bien leur

souci, mais je ne voulais pas que ce système se fasse au détriment

de la Vie ! Je me suis dit ‹ Il y a quelque chose qui cloche ›.

Le système de ramassage scolaire pour les enfants handicapés

allait de village en village. Le Châble, le Levron, Orsières,

Ravoire et finalement Martigny. Des heures dans un bus à faire

des trajets. Je me demandais s’il n’y avait pas des solutions plus

potables ! Parce que, franchement, quel est l’adulte qui accepterait

de faire cela ? Cela a été mon premier questionnement

face à la scolarisation de mon fils.

Le deuxième est venu lorsque l’on s’est présenté à moi en me

disant ‹ Ton enfant va être dans une classe spécialisée. Il faut

que tu signes là ›. On m’aurait planté un coup dans le ventre,

un coup de couteau, ça n’aurait pas été pire. Ça m’a fait une

douleur… quelque chose d’absolument insupportable. Je me

rappelle encore ce moment de la signature : à l’intérieur j’étais

détruit, même si extérieurement j’ai signé sans rien laisser

paraître. Ça me faisait tellement drôle d’imaginer que mon

enfant allait suivre une classe spécialisée à l’écart des autres.

Pour moi, c’était un crève-cœur terrible. »

Une vision novatrice à Martigny

≥ Heureux hasard ou concours de circonstances, à la même

période, Cécile Hiroz, maman de Stéphane, jeune enfant trisomique,

propose à Michel Abbet de rejoindre le comité de l’Association

de parents. À peine installé dans ses fonctions au comité,

l’Orserain se voit proposer le poste de délégué de l’association au

sein de la commission scolaire de Martigny. L’occasion pour lui

de faire connaissance avec le directeur des écoles de la ville,

Jean-Pierre Cretton, et ses méthodes peu conventionnelles pour

l’époque en matière d’intégration.

La rencontre

avec Jean-Pierre

Cretton redonne

de l’espoir

à Michel Abbet.

« J’ai pu voir qu’il existait une autre approche. Il m’a dit :

‹ Votre enfant a des besoins particuliers. Nous allons

répondre à ces besoins particuliers dans un espace

sécurisé, mais nous allons d’abord lui permettre d’avoir

une vie sociale ›. Pour moi, cette approche était complètement

différente. Profession-nellement, en tant qu’enseignant, je

voyais comment les enfants se construisaient : on ne se

construit pas tout seul, on se construit par rapport aux connaissances,

par rapport aux autres enfants qui sont là. Ce n’est pas

toujours positif, il faut parfois lutter, mais on se construit en

groupe. Et le fait que l’on dise à mon enfant : ‹Toi, on va te

donner un univers tout seul ou presque ›… Je le voyais finir sa

vie tout seul. Impossible pour moi ! Je me posais énormément

de questions et j’étais malheureux pour lui qu’il ne puisse pas

vivre cette cohabitation avec les autres enfants de son âge. »

≥ La rencontre avec Jean-Pierre Cretton redonne pourtant de

l’espoir à Michel Abbet. En avril 1989, avec la commission scolaire,

le papa de Raphaël est invité à visiter l’école La Bruyère –

installée dans la villa Coquoz. À cette date, la décision de transférer

la gestion de l’école à la Commune avait déjà été prise par

le Conseil d’État ; la convention sera signée quelques semaines

plus tard 2 . Lors de la prochaine rentrée scolaire, les élèves rejoindront

leurs camarades scolarisés en classe ordinaire, dans le

nouveau centre des Petits-Epineys. Ils se trouveront dans le

même bâtiment, mais dans des classes spécifiques. « C’était déjà

une très bonne nouvelle », se souvient Michel Abbet.

Des classes pour tous

≥ Le directeur des écoles souhaite toutefois franchir un pas

supplémentaire et intégrer les enfants dans les classes. Une

volonté qui est loin de remporter l’unanimité, mais Jean-Pierre

Cretton ne lâche pas cette idée : « Intégrer est, selon moi, une

philosophie de vie. C’est une vision de société, pas une option


109

pédagogique. Ma politique a toujours été de mélanger les enfants

le plus possible. J’ai dû me battre contre la mentalité ambiante.

À l’époque, on appelait les enfants de La Bruyère les débiles

mentaux éducables sur le plan pratique et ceux qui venaient chez

nous, en classe d’adaptation, les débiles mentaux scolarisables,

triés entre eux selon leur QI. Les scolarisables devaient afficher

un QI de 60 à 75. » 3

≥ Très rapidement, l’étage dédié fait place à des classes

mélangées où tous les enfants se côtoient. Exit donc les classes

dédiées. Symbole de ce changement, les murs qui séparent les

salles sont abattus jusqu’à ne représenter qu’un petit socle.

Insignifiante barrière architecturale qui permet de tenir compte

des demandes de l’AI. Dans les faits, il existe bien deux classes

avec un enseignant pour chacune. Dans la réalité spatiale, il y a

un lieu ouvert où tous les écoliers se voient. Le représentant de

l’OFAS, en visite sur place pour vérifier que les dispositions de

l’AI sont bien respectées, ne peut qu’admettre qu’il existe bien

deux espaces, l’équivalent de deux classes, même si dans les

faits tous les élèves sont réunis. Une petite subtilité qui, malgré

la révolution en cours, sauvera le financement de la scolarisation

des enfants en situation de handicap par l’OFAS.

Des résistances internes

≥ Si les idées novatrices de Jean-Pierre Cretton réjouissent les

parents et les politiques, elles sont loin de plaire à tous les enseignants,

à commencer par ceux qui sont engagés dans l’enseignement

spécialisé. « La commission scolaire et le conseil communal

étaient plutôt motivés. Les résistances venaient des

enseignants spécialisés qui craignaient de perdre leur statut.

C’était compréhensible, pendant des années, on leur avait dit que

ces enfants n’étaient pas scolarisables avec les autres et, avec

leur intégration dans le système dit normal, ils se sentaient

≥ LA POLITIQUE INTÉGRATIVE DE MARTIGNY CITÉE EN EXEMPLE

Les différents acteurs de l’intégration reconnaissent que ce sont avant tout les initiatives privées ou d’une

direction d’école particulièrement engagée qui sont à l’origine des avancées dans ce domaine. Au fil des

témoignages recueillis, tant auprès des parents que des enseignants ou encore de l’Office de l’enseignement

spécialisé, Martigny est immédiatement cité en exemple.

Jean-Pierre Cretton, qui a dirigé les écoles de Martigny durant quarante ans, avait conscience qu’il fallait

avant tout convaincre ses collègues pour que l’intégration soit une réalité. Un partenariat avec l’Université

de Genève est mis sur pied pour former les enseignants à cette nouvelle réalité. Des collaborations qui

aboutissent en 1997 à la création d’une charte réalisée par et pour les élèves. Une charte prônant une

école inclusive, affichée aujourd’hui encore sur un mur du Centre scolaire des Petits-Epineys.


110

désavoués dans le travail qu’ils avaient fourni au sein des classes

dédiées. Ce n’était pas évident pour eux de faire le pas. » 4 Quel

est leur rôle au sein d’une classe où tous les enfants sont désormais

mélangés ? Leur emploi est-il menacé ? Des questions légitimes

auxquelles l’expérience du quotidien trouve une réponse :

les enseignants vont se relayer auprès des élèves intégrés, tout

en partageant le même espace.

≥ Les inquiétudes des enseignants spécialisés calmées, le

directeur martignerain doit également faire face à celles d’une

partie de ses enseignants qui craignent la lourdeur de la tâche et

de se laisser déborder par la gestion d’enfants aux besoins

importants.

≥ S’il y a eu des réticences, il faut aussi souligner les enthousiasmes

parmi les enseignants, comme celui de Sonja Pillet qui

aura finalement raison de la plupart des réserves de ses collègues.

Très engagée pour l’intégration dans sa classe, elle a continué

son cursus en tant que conseillère pédagogique à l’État du

Valais. Une façon pour elle de proposer ailleurs dans le canton

l’exemple d’intégration de Martigny.

Orsières : pionnière de l’intégration

sur le lieu de domicile

≥ « ‹ Mais alors, pour Raphaël, comment ça va se passer ? ›

ai-je demandé. Jean-Pierre m’a répondu qu’il irait à l’école

enfantine à Martigny. Je lui ai répondu : ‹ C’est fantastique s’il

peut aller à l’école enfantine, mais je veux qu’il aille à Orsières.

Il faut qu’il connaisse les enfants de son village ›. Jean-Pierre

Cretton m’a simplement dit : ‹ Fais les démarches, tu verras

bien. › » 5

≥ Michel Abbet tente alors le tout pour le tout.

« Je me suis organisé. J’ai rédigé des courriers pour obtenir ce

que je voulais dès la rentrée scolaire suivante [1989-1990]. Je

suis allé voir la présidente de la commission scolaire et je lui ai

dit ce que je souhaitais. Elle m’a dit de lui écrire. Au mois de


111

ÉCLAIRAGE

D’AUTRES EXPÉRIENCES

D’INTÉGRATION

≥ En 1994, un dossier spécial « Intégration » paraît dans le

mensuel de l’École valaisanne, Résonances 6 . On y parle bien sûr

du modèle de Martigny, mais une autre expérience réalisée à

Sierre pour favoriser l’intégration entre enfants est également

présentée : deux classes enfantines de l’école publique sont délocalisées

au sein de l’Institut Notre-Dame de Lourdes. Un renversement

de situation qui a permis aux pensionnaires de l’institution

sierroise de côtoyer, malgré la lourdeur de leur handicap, des

enfants de leur âge et de partager des activités communes. Cette

forme d’intégration est dite géographique. Si elle est moins poussée,

elle permet tout de même aux enfants de créer des contacts,

de se rencontrer dans la cour de récréation, lors d’activités communes

ou de certains cours. L’Association de parents a été précurseur

dans ce domaine puisqu’au cours des années 1960 déjà

la classe de l’école itinérante d’Orsières se tenait dans les locaux

de l’école primaire de la commune 7 .

≥ Le témoignage d’Anne-Marie Mayor, enseignante à l’école La

Bruyère de Sion jusqu’en 1997, nous a permis de découvrir que

cette ville avait également intégré des élèves en situation de handicap

dans des classes ordinaires, principalement en enfantine,

dans les années 1990.

Trois classes de degré primaire et

une classe enfantine occupaient des locaux

à disposition dans nos bâtiments

à Champsec. L’enseignante de cette

dernière classe m’a d’abord demandé

si je pouvais envoyer de temps en temps

trois ou quatre enfants dans sa classe.

J’ai accepté, mais elle a rapidement trouvé

que cela lui donnait trop de travail.

Nous avons alors décidé que, chaque jour,

deux élèves en situation de handicap,

rejoindraient sa classe et que la stagiaire

qui était normalement dans ma classe

d’adaptation les accompagnerait.

Anne-Marie Mayor, enseignante

à l’école La Bruyère de Sion dès 1968.

Entretien mené en 2021.

≥ Les échanges avec les élèves de primaire étaient plus

rares. Classes ordinaires et classes de La Bruyère n’utilisaient

pas la même cour de récréation. Mais, au cas par

cas, des intégrations partielles avaient lieu. Anne-Marie

Mayor se rappelle notamment d’une petite fille aveugle qui

avait de la facilité en musique et qui rejoignait la classe de

5 e primaire pour ce cours-là. Des activités communes

étaient également prévues à des occasions particulières

comme Noël.


112

juin, j’ai appris qu’une classe de première enfantine

s’ouvrait – ailleurs en Valais, il y avait deux années

d’enfantine, mais à Orsières, jusqu’alors, on commençait

en deuxième enfantine – et que mon enfant faisait

partie de cette classe ! Ça a été pour moi une joie

indescriptible. »

≥ Sans le savoir, Michel Abbet vient de créer une sorte de

jurisprudence dans la prise en charge du handicap en milieu

scolaire. La brèche est ouverte. Plusieurs enfants de la région de

Martigny seront ainsi scolarisés dans les classes de leur village

dans la foulée comme à Fully où deux enfants sont intégrés à

l’école villageoise de Saxé 8 . Une grande première qui avait pourtant

été souhaitée par le Conseiller d’État Bernard Comby en

1986 déjà à travers le décret sur l’enseignement spécialisé 9 .

En 1998-1999,

l’AI accepte de faire

une exception et crée

« les classes d’adaptation

décentralisées.

Faire reconnaître le modèle décentralisé

≥ L’intégration d’élèves en situation de handicap dans leur

commune de domicile remet en cause le modèle AI qui prévalait

jusqu’alors. Ces intégrations, fruit de volontés locales, remontent

forcément à l’Office de l’enseignement spécialisé, alors dirigé par

Philippe Nendaz. Une question se pose : comment maintenir la

reconnaissance de ces élèves par l’AI alors qu’ils sont scolarisés

hors d’une institution reconnue ? 10

≥ Le Canton du Valais s’engage dans une bataille âpre avec

l’OFAS pour justifier ces mesures présentées comme moins onéreuses

que la variante en classe spécialisée ou en institution.

Mais l’AI ne se laisse pas facilement convaincre de la méthode

mise en place, même si, selon l’Office de l’enseignement spécialisé,

elle donne de bons résultats pour les élèves concernés 11 .

≥ Finalement, le modèle développé par Martigny l’emporte. En

1998-1999, l’AI accepte de faire une exception et crée « les

classes d’adaptation décentralisées » pour pouvoir verser une

aide aux enfants scolarisés sur leur lieu de domicile 12 . Le règlement

édicté permet de reconnaître le système d’intégration

mis en place à Orsières.

≥ En 2004, le système est officialisé et un cadre pédagogique,

administratif et financier établi. Des conventions

sont signées avec les communes de Sion, Sierre, Martigny

et Monthey, qui deviennent ainsi des « centres AI ». Les communes

ont dès lors « la responsabilité de la scolarisation des

enfants de la région relevant des mesures de formation scolaire

spéciale au sens de l’AI » 13 . Elles signent ensuite des accords avec

les autres communes de leur région qui leur confient la scolarisation

des élèves relevant de l’AI. Ces conventions ouvrent des

possibles, mais ne sont pas contraignantes. Les élèves peuvent

être scolarisés en classes spéciales, en intégration dans les

écoles du centre AI ou dans celles de leur lieu de domicile.

Plusieurs élèves de communes voisines peuvent également être

regroupés dans une même classe ordinaire 14 . Si la région de

Martigny développe largement ce modèle, jusqu’à ne plus disposer

de classes d’adaptation aux niveaux enfantine et primaire

pour privilégier l’intégration en classe ordinaire, d’autres régions

sont bien moins actives dans ce sens et les résistances sont plus

fortes, pour diverses raisons.

Encore des résistances…

≥ La Berne fédérale convaincue, les conventions régionales

signées, l’Office de l’enseignement spécialisé doit affronter les

résistances des enseignants et des institutions valaisannes.

Certains, comme Dominique Savioz, président de l’Association

des enseignants de Sion, va jusqu’à proposer un moratoire sur

l’intégration : « J’étais le porte-parole d’une inquiétude. Ce n’était

pas en mon nom propre que je le faisais, mais pour tous mes

collègues. Ce n’était pas un non à l’intégration, mais à l’intégration

à tout prix. On avait le sentiment que le Canton faisait de

‹ belles promesses › de soutien aux enseignants pour les accompagner

dans cette forme d’intégration. J’ai défendu l’idée que


cette intégration allait mettre les enseignants dans une situation

difficile. L’idée de ce moratoire était de permettre que les promesses

se transforment en réalité, avec des aides concrètes. » 15

≥ « Sion était considéré à l’époque comme un bastion avec

beaucoup de classes spécialisées où tous les enfants en difficulté

étaient regroupés, précise Michel Délitroz. On a dû faire face à une

opposition assez forte. Il a fallu expliquer que l’idée n’était pas de

faire de l’intégration à tout prix, mais de cas en cas. Ensuite, les

choses se sont apaisées. Le reste des oppositions venaient des

institutions, notamment de Notre-Dame de Lourdes. Il y avait des

enseignants qui ne comprenaient pas. Il fallait convaincre les institutions

que les enfants étaient mieux proches de chez eux. Une

fois certaines réticences levées du côté de Sierre, le processus

s’est bien mis en place. J’aurais tendance à dire qu’il y avait des

villages où l’intégration était plus facile à faire qu’ailleurs ; l’Office

de l’enseignement spécialisé arrivait plus facilement à faire passer

un message dans certaines régions que dans d’autres. » 16

≥ Grâce à l’ouverture d’esprit et au dynamisme de personnalités

du monde scolaire martignerain – avec Jean-Pierre Cretton

pour moteur –, à l’engagement de Michel Abbet et, à travers lui

de l’Association de parents, l’intégration en classe ordinaire dans

la commune de domicile devient une option proposée et encouragée

par les autorités scolaires cantonales, faisant du Valais un

pionnier en la matière.


114

ÉCLAIRAGE

L'OCTROI DE MESURES RENFORCÉES AUJOURD'HUI :

D'UNE LOGIQUE DE DROIT À UNE LOGIQUE DE BESOINS

≥ L’intégration scolaire prend un virage important en Valais à

partir de 2014, avec l’entrée en vigueur de la procédure d’évaluation

standardisée (PES). Désormais, pour octroyer des mesures

renforcées de pédagogie spécialisée, le Canton utilise cet outil

qui permet d’avoir une vision pluridimensionnelle des besoins de

l’enfant 17 . « Il s’agit désormais d’une réflexion globale sur la situation

de l’enfant en tenant compte du contexte. L’analyse est faite

en s’appuyant sur la classification internationale des maladies et

sur la classification internationale des fonctions », explique Guy

Dayer, actuel chef de l’Office de l’enseignement spécialisé. Cette

grille d’évaluation standardisée, mise en place au niveau suisse,

contient plus de 200 entrées et touche tous les secteurs de vie

de l’enfant. Libre à chaque canton, toutefois, de définir le niveau

de détail des informations qu’il souhaite utiliser.

≥ Cette manière d’évaluer l’élève change fondamentalement

les critères AI qui prévalaient jusqu’alors. L’octroi des mesures ne

dépend plus de seuils limites (test de QI), mais de l’évaluation

des besoins. Ensuite, en fonction des résultats obtenus avec la

PES, il convient de trouver la meilleure solution pour répondre

aux besoins de l’enfant, qu’il s’agisse d’une prise en charge mixte,

en classe d’adaptation ou encore en institution.

≥ « Dans certains cas, il est important de ne pas aller trop vite

dans la mise en place de mesures renforcées, car elles peuvent

être ressenties comme stigmatisantes et enfermantes, nuance

Guy Dayer. Par leur nature, elles sont amenées à durer puisqu’un

des critères est de voir s’il y a des conséquences marquantes

sur la vie du jeune une fois qu’il est adulte. Lorsque l’on présente

les mesures renforcées aux parents, on leur parle d’une orientation

de leur enfant avec l’aide de l’AI. Une situation pas toujours

simple pour eux : certains découvrent par le biais de la

scolarité la problématique de leur enfant. À quel moment ces

parents sont-ils prêts à entendre et à entrer en matière sur un

projet différent pour leur enfant de ce qu’ils avaient imaginé ou

rêvé ? » 18

Pour que l’intégration scolaire fonctionne, le projet doit convaincre

tous les partenaires : la direction de l’école, les enseignants et les parents.

Le contexte est différent pour chaque famille. Par exemple, lorsqu’un

enfant ne parle pas ou que sa compréhension est limitée, les échanges

sont plus difficiles. À cela, peuvent s’ajouter des troubles

du comportement, de l’épilepsie et bien d’autres problématiques liées

à son handicap.

La plupart des enfants n’ont pas la notion du danger, ce qui demande

un accompagnement jusque devant l’école et donc une grande disponibilité

des familles. On oublie souvent les frères et sœurs qui se retrouvent

parfois dans la même cour de récréation. La famille doit prendre

en compte tous les éléments pour que tous les membres de la famille

vivent le mieux possible.

Nathalie Rey, présidente d’Insieme Valais romand


115

Une augmentation des élèves bénéficiant

de mesures spécifiques

≥ Les critères étant différents, le public cible évolue lui

aussi. « Pour les ‹ situations claires ›, cela n’amène pas grand-chose

de plus, mais en ce qui concerne les situations ‹ zone grise ›, la PES

est très intéressante. Il peut y avoir dans la grille d’évaluation une

seule case cochée ‹ grave › pour que l’enfant obtienne des mesures

renforcées. Si on prend l’exemple de trouble du spectre autistique,

le TSA, Il peut s’agir par exemple de difficultés comportementales,

de complexité dans l’interaction avec autrui ou de sécurité. Les critères

AI, liés au QI, ne prenaient pas en compte ces éléments.

Désormais, des mesures renforcées peuvent être décidées. » 19

≥ De plus en plus d’enfants qui auparavant passaient entre les

mailles du filet sont reconnus comme ayant des besoins particuliers.

Ainsi, le nombre d’enfants nécessitant des mesures depuis

le changement des critères ne cesse de croître. Disposant d’un

budget de 85 millions de francs toutes mesures confondues,

l’Office de l’enseignement spécialisé demande chaque année que

son budget soit étendu au vu de la croissance des besoins.

L’année scolaire 2016-2017 comptait 3800 périodes pour 713 au

bénéfice de mesures renforcées ; en 2021-2022, ce chiffre

s’élève à 4500 périodes pour 821 élèves. Des chiffres que le chef

de l’Office de l’enseignement spécialisé nuance toutefois, car il

faudrait les comparer à l’effectif total des élèves du canton pour

voir s’il y a une évolution proportionnelle. Plus peut-être que celui

du nombre, le défi actuel est celui de l’hétérogénéité des problématiques

et donc des mesures mises en place. Pour les enseignants,

la tâche peut être complexe. Une réalité que l’on ne doit

pas négliger pour Guy Dayer.

Il convient de trouver

la meilleure solution

pour répondre aux

besoins de l’enfant.

différent de s’adapter et de s’intégrer, mais à la société de

le considérer comme partie prenante d’un tout. Une modification

de taille qui va au-delà de la scolarité, qui concerne

la société dans son ensemble.

≥ Peut-on alors dire que le Valais est un canton inclusif ? Si

l’intégration est une réalité depuis plusieurs années en Valais en

matière de scolarisation, il est délicat pour l’heure de parler d’inclusion.

« On doit tendre vers l’inclusion, conclut Guy Dayer, mais

ce n’est pas possible de donner une date ou un délai pour dire

‹ à partir de ce moment-là, on sera dans l’inclusion ›. En étant

réaliste, je pense que même mes successeurs à l’horizon de

cinquante ou cent ans seront toujours en train de se poser ces

questions. » 20

En route vers l’inclusion ?

≥ La volonté est claire aujourd’hui de passer d’un modèle intégratif

à celui que l’on qualifie d’inclusif. La Loi cantonale sur l’intégration

des personnes handicapées a d’ailleurs été renommée en

2021 Loi sur les droits et l’inclusion des personnes handicapées.

Une étape majeure qui voudrait que ce ne soit plus à l’enfant

≥ Durant l’année scolaire 2021-2022,

821 élèves ont bénéficié de mesures

renforcées: 374 en intégration en classes

ordinaires, 323 en écoles spécialisées

et 124 en classes d’adaptation.


116

TÉMOIGNAGES

UN ENFANT, UN PARCOURS

≥ Dans les pages qui précèdent, toutes les personnes interrogées s’attachent à préciser que chaque parcours d’enfant est unique,

que les moyens mis en œuvre pour permettre son développement, au niveau de sa scolarité notamment, sont spécifiques, dépendent

du contexte. Le vécu des familles le confirme. Certaines d’entre elles ont accepté de le partager à l’occasion des 60 ans d’Insieme

Valais romand, dans ce livre ou dans les vidéos produites. Des témoignages forts que l’on vous partage avec émotion.

ISABELLE ET DIMITRI TACCHINI,

PARENTS DE JULIE, 17 ANS – COLLONGES

« Ça été direct et terrible. Je me rappelle à la seconde près

là où j’étais, nous confie Dimitri. La veille, j’avais appelé le

CHUV pour avoir les résultats de Julie et j’étais tombé sur

une assistante. Elle semblait paniquée, elle m’a dit que la

doctoresse n’était pas là, mais qu’elle me rappellerait le

lendemain. J’ai senti tout de suite que quelque chose

n’allait pas. J’avais beau poser des questions, elle refusait

de me répondre. Cette nuit-là, Isabelle et moi n’avons pas

dormi ; on a échafaudé tous les scenarii possibles. On avait

peur qu’elle soit sourde, aveugle ou pire encore…

Le lendemain, après une nuit blanche, tu pars au CHUV

et c’est ‹ panique à bord ›. Coup de tonnerre : le diagnostic

tombe. On nous annonce que Julie a une maladie très

rare. C’est une maladie que l’on connaît très très peu. Il y

a un cas à Genève et un cas à Zurich. Un peu sonnés, on

l’écoute nous dire le peu qu’elle sait… Normalement, elle

marchera. Normalement, elle parlera. Normalement … On

n’en sait pas tellement plus.

Et aussi étonnant que cela puisse paraître, Isabelle et moi,

nous étions presque soulagés par ce diagnostic. Avec tous

les films que l’on s’était faits durant la nuit… on était

presque contents du verdict que l’on nous donnait. Un

peu sonnés, on est donc partis sans vraiment d’infos, car

la généticienne n’en avait pas plus à nous donner. Julie

avait neuf mois quand on a appris de quoi elle souffrait.

Une fois le diagnostic tombé, on s’est vite rendu compte

de la pression qu’on s’était mise avant de savoir.

Durant les neuf premiers mois de vie de Julie, tout le

monde voulait nous rassurer. Notre entourage faisait mine

que tout allait bien alors que l’on voyait bien que quelque

chose clochait. Je sais aujourd’hui que c’était une manière

de nous protéger. Mais c’est difficile quand personne ne

veut voir le problème en face. Quand on a su pour Julie,

c’est clair que c’était un coup de massue, mais on était

soulagés de savoir à quoi faire face. Et c’est là que tu te

rends compte de la difficulté que cela doit être pour ceux

qui n’ont pas de diagnostic ; ça doit être terrible. Une fois

qu’il est posé, tu sais et tu fais avec la maladie. Depuis ce

jour-là, tout s’est mis en place de manière fabuleuse et

encore aujourd’hui c’est le cas ! »

«L’entrée à l’école a été un moment perturbant pour moi,

explique Isabelle Tacchini, car du jour au lendemain, alors

que tu es tout le temps avec elle, tout à coup tu as trois

ou quatre heures de libre, explique Isabelle. Parce que

dans les faits tu vis que pour elle, que pour la famille.

Alors, là, tu es perdue.

Julie a fait la primaire au village, à Collonges. Jusqu’en

3 e primaire, cette intégration dépendait des Écoles de

Martigny, ensuite on est passé à Monthey. On a vu la

différence ! Durant la primaire, le suivi a été super, il y

avait une éducatrice spécialisée avec elle.

Pour le cycle d’orientation, normalement, lorsque l’on

habite Collonges, on va à Saint-Maurice, mais elle a été

dirigée vers Monthey. On a suivi ce qu’on nous a dit. Elle

a fait sa première année complètement intégrée à

Monthey. Là, c’était chaud pour elle ! C’est un grand cycle

d’orientation de 500 élèves et elle n’avait plus ses copines


qui étaient à Saint-Maurice. Je ne sais pas comment elle

a tenu, mais elle a tenu. Elle a été vraiment courageuse.

Il y avait les changements de classe, les changements de

prof… Elle a dû suivre les autres. Dans la classe, elle ne

faisait rien parce qu’elle ne lit pas et n’écrit pas. Elle faisait

des dessins pendant que les autres étudiaient. Sur le

moment, elle ne disait rien, mais en rentrant à la maison,

elle était très agressive. C’était très compliqué à gérer.

Pour la deuxième année, on nous a conseillé de faire un

mi-temps à La Castalie et l’autre au cycle d’orientation.

Maintenant, elle est à temps plein à La Castalie. Elle fait

les choses à son rythme et je dois avouer qu’elle progresse

mieux.»


118

LAURENCE ET OLIVIER BUCHARD,

PARENTS DE CORENTIN, 25 ANS – SAILLON

« Comme c’était le premier enfant, des deux côtés de la

famille, on a avancé avec ce petit. À six mois, il ne tenait

pas encore assis, il y avait plein de choses qui n’étaient

pas normales, mais le pédiatre nous a toujours dit ‹ il a un

petit retard, mais il va rattraper. Il va rattraper ›.

Un soir, on a vu une émission à la télé avec le professeur

Rufo. Corentin avait deux ans. Ce pédopsychiatre s’exprimait

sur les différentes formes de handicap et les retards

qui étaient liés. À la fin de l’émission, on s’est regardés

avec Olivier et on s’est dit ‹ C’est Corentin ›. L’autre signe

qui nous a alertés était le regard de notre deuxième fils,

Damien, à sa naissance, qui était totalement différent. On

a pris conscience de ce qui n’était pas normal. La difficulté

que nous avons eue est l’absence de diagnostic. Si

tu es trisomique, tu es trisomique ; si tu es autiste, tu es

autiste. Je trouve que pour Corentin, IMC, cela ne correspond

pas du tout. On ne sait pas dans quelle catégorie le

mettre, on ne sait pas, d’ailleurs, s’il y a des catégories,

mais nous n’avons jamais eu d’explications. Est-ce qu’il y

a eu un problème à la naissance ? …

À partir de ce moment-là, on a tout mis en œuvre pour que

ça se passe au mieux. Corentin a commencé la logopédie

et la psychomotricité, bien avant le début de l’école. Ce

que l’on a constaté par la suite, c’est que beaucoup de

parents attendent le début de l’école pour être alarmés

par le milieu scolaire. Nous, nous avons vraiment pris les

devants parce qu’il y avait un problème. À l’âge d’entrer à

l’école, il a été intégré en classe normale au village et

toutes les thérapies qu’il faisait ont été prises en charge

et effectuées durant les heures d’école. La logopédiste et

le psychomotricien venaient en classe, après, il a eu de

l’hippothérapie et de la musicothérapie. En tant que

maman, ça m’a énormément déchargé qu’il commence

l’école, car, avant cela, c’est moi qui l’amenais à toutes

ces thérapies. On a toujours eu un très bon contact avec

les enseignants et les enseignants spécialisés. Il y avait

vraiment un échange et une construction autour de

Corentin. Ils ont tous été là pour le faire évoluer.

Si tout se passait bien, il y avait tout de même des

moments difficiles, notamment à l’occasion des réunions

de parents où certains parents formulaient leurs craintes

que Corentin, par son handicap, retarde leurs enfants.

Tout ce relationnel avec les autres parents n’était pas toujours

évident. Finalement, cela s’est bien passé, car socialement

Corentin n’a pas de problème ; on dira même le

contraire : il est doué socialement. Les autres parents se

sont finalement rendu compte que plutôt que de retarder

leurs enfants, il amenait plein de compléments que l’école

n’aurait pas pu leur apporter, à commencer par la musicothérapie

où les autres enfants étaient aussi intégrés.

Chaque fois qu’il y avait des réunions de parents, j’y allais

la boule au ventre. Déjà rien que parce que je voyais le

programme scolaire des autres, l’avancée des autres et

que je me rendais compte que Corentin faisait du surplace.

Là, on te lance la différence au visage. »


Retrouvez

d’autres témoignages

en vidéo


120

« Insieme fait la classe » est un concept extraordinaire.

Nous sommes partis sur un projet fou et cela a été

une super expérience, car nous nous sommes rendu

compte de la détresse des enseignants dits « normaux ».

Ils ne savaient pas comment faire, ils n’osaient pas parler

du handicap. Avec ce type de projet, il y avait une réalité,

l’enseignant pouvait se préparer à recevoir des enfants

différents dans sa classe et ainsi mieux dialoguer

avec les parents et les autres élèves.

SENSIBILISER AU HANDICAP

≥ Sensibiliser, informer, créer du lien entre les personnes handicapées

et la société dans son ensemble a toujours été une des

missions de l’Association de parents. C’est à travers de petites

actions, de prises de position, d’échanges formels ou informels

que ce travail se réalise, petit à petit, jour après jour. Des projets

de plus grande envergure sont également mis en œuvre et permettent

de marquer les esprits, d’entraîner un changement plus

durable de regard. Deux actions d’Insieme Valais romand permettent

notamment de l’illustrer : la création de la valise pédagogique

« Insieme fait la classe » et sa participation à la Foire du

Valais.

INSIEME fait la classe

≥ Intégrer certes, mais aussi expliquer. Une obligation pour

que l’intégration se fasse dans les meilleures conditions, tant

pour l’élève concerné que pour les camarades qui l’accueillent.

Mais comment parler du handicap aux élèves amenés à côtoyer

dans leur salle de classe un enfant différent, qu’il s’agisse du

handicap mental ou physique ? Les membres du comité d’Insieme

Valais romand, qui vivent le handicap au quotidien, sont

régulièrement sollicités par des membres du corps enseignant

qui se préparent à accueillir un enfant différent dans leur

classe.

≥ À l’occasion des championnats du monde de ski handicap,

organisés entre Anzère et Crans-Montana durant l’hiver 2000

(Handi-Ski 2000), une action socio-éducative est mise sur pied

dans les classes pour parler du handicap physique 21 . La présidente

d’Insieme Valais a découvert ce projet à travers le regard

de son fils aîné qui faisait partie de l’une des 130 classes suisses

qui ont participé à ces championnats. Séduite par l’initiative, elle

propose au comité de reprendre le concept et d’y intégrer le

handicap mental.

Grégoire Jirillo, 2022

≥ Contact est alors pris avec l’enseignant qui a conçu l’action

Handi-Ski 2000, Grégoire Jirillo. Ce dernier accepte de se lancer

dans l’aventure. Trois ans ont été nécessaires pour créer la valise

pédagogique « Insieme fait la classe ». Au printemps 2011, les

valises sont distribuées dans tous les centres scolaires valaisans

et sont disponibles également dans les médiathèques du

canton.

≥ Pour garder une cohérence avec les valeurs mises en avant

par « Insieme fait la classe », les valises sont réalisées par des

travailleurs handicapés intégrés dans des ateliers protégés.

À l’intérieur, les enseignants découvrent des leçons, des jeux, un

appareil pour écrire en braille, des vidéos, des parcours à installer

facilement dans une salle de gym. Pour les concepteurs, la valise

se doit d’être un outil pédagogique, sorte de bagage simple et

utile pour aller à la rencontre des personnes en situation de handicap.

Le contenu de la valise est varié et permet d’aborder plusieurs

thématiques autour de jeux, de discussions et d’activités

spécifiques.

≥ Les objectifs sont nombreux : « Tordre le cou aux préjugés

envers les personnes souffrant d’un handicap physique ou mental.

Favoriser à travers diverses activités l’intégration des personnes

en situation de handicap. Comprendre leurs difficultés et

se comporter de manière naturelle avec elles. » 22 Avant tout, il

s’agit de favoriser l’intégration en donnant des clés aux élèves

pour qu’ils puissent accueillir plus facilement un « copain » en

situation de handicap dans leur classe.

≥ Durant une année, les porteurs de projet vont présenter le

concept aux enseignants et dialoguer avec eux ; de nombreuses


121

Foire du Valais, 2012.

Le Conseiller d’État Maurice Tornay

visite le stand d’Insieme.

main-forte, durant plusieurs semaines, pour fabriquer ces jeux.

Une initiative rendue possible par Cyrille Philippoz, professeur

d’activités créatrices manuelles, qui avait déjà initié un partenariat

pour les cours entre les élèves de 4 e année et le centre de

réfugiés du Botza. Une façon de vivre l’intégration qui a tout de

suite séduit Nathalie Rey, laquelle a insisté pour collaborer avec

lui.

≥ Le public présent sur le stand pouvait s’essayer aux jeux

d’adresse et comprendre la difficulté dans laquelle un enfant en

situation de handicap peut se trouver.

classes du canton ont participé au projet. « L’idée de base était

que cette valise vive de manière autonome, qu’elle soit un outil

très facile d’accès pour les enseignants et également pour les

élèves », précise Grégoire Jirillo 23 .

Tester son adresse à la Foire du Valais

≥ Faire vivre l’association va de pair avec la financer. Ainsi

faut-il rivaliser d’imagination pour se faire connaître et pouvoir

lever des fonds. Des idées ambitieuses et originales, Nathalie

Rey n’en manque pas. Infatigable présidente de l’association

depuis 2004, elle n’hésite pas à se lancer dans de sacrés défis.

L’un d’eux sera la participation à la Foire du Valais en tant qu’invité

d’honneur du 28 septembre au 7 octobre 2012.

≥ Pendant dix jours, des milliers de visiteurs vont s’essayer à

déjouer les pièges de jeux d’adresse élaborés et réalisés en partenariat

avec un enseignant et des élèves de cycle d’orientation

de Conthey. Des classes de 4 e année du CO ont ainsi prêté

≥ LE COMITÉ D’ORGANISATION

DU 50 E ANNIVERSAIRE

• Maurice Chevrier, Evolène, président, ancien Conseiller

national, frère de Jean-Luc, travailleur à St-Hubert

• Marie-Madeleine Dayer,Sion, vice-présidente,

sœur d’Isabelle, travailleuse à la FOVAHM

• Grégoire Jirillo, Vétroz, caissier, beau-frère de Vincent

• Julien Délèze, Sion, membre, neveu de Jean-Paul,

travailleur à la FOVAHM

Le comité d’Insieme Valais romand a souhaité que chaque

membre du comité d’organisation soit un parent de personne

en situation de handicap.


122

AMÉLIORER L’OFFRE

DANS LE VALAIS CENTRAL

≥ Depuis toujours, l’Association de parents a eu à cœur de

tenir compte de la géographie du Valais romand et de répondre

aux besoins des personnes avec une déficience intellectuelle et

de leurs familles à un niveau régional. Cela a été le cas dans les

questions de scolarisation, du développement de l’école itinérante

à partir de 1963 à celui des classes d’adaptation décentralisées

au tournant des années 2000. La problématique perdure,

aujourd’hui encore. L’engagement d’Insieme Valais romand pour

le développement de structures régionales également.

Une unité d’accueil temporaire

pour la région de Sion

≥ Si la scolarisation d’enfants en situation de handicap au sein

du système traditionnel représente une avancée majeure, les difficultés

rencontrées au quotidien par les familles concernées

demeurent. À la différence d’une prise en charge en internat dans

une institution, l’intégration scolaire ou la scolarisation en classe

spécialisée, en externat, implique pour les parents un engagement

considérable et un rythme de vie qui peut être soutenu.

Résultat : des parents épuisés qui souhaitent pouvoir être soulagés

pour les nuits. Si c’est réalisable lorsque l’on habite la région

de Monthey grâce à La Castalie, qui accueille les enfants pour

des séjours de courte durée ou pour soulager les parents un soir

ou l’autre durant la semaine, la situation est plus compliquée dès

que l’on s’éloigne du centre médico-éducatif.

≥ En 1997, quand Nathalie Rey entre au comité d’Insieme

Valais romand, elle intègre la commission scolaire de Sion. « Mon

fils, Simon, fréquentait alors Notre-Dame de Lourdes et Pauline,

ma fille, l’école La Bruyère à Sion. Simon pouvait passer une nuit

par semaine à l’institution ; Pauline rentrait tous les soirs. Elle

n’avait pas l’air de comprendre pourquoi elle ne pouvait pas, elle

Le fait qu’Insieme Valais romand dispose

d’un représentant à la commission scolaire

permettait de faire connaître les besoins des

parents. Lors des visites que nous faisions dans

les classes, nous pouvions présenter les enfants

aux autres membres, leur expliquer les situations

des familles. Nous avions aussi des contacts

directs avec les responsables scolaires.

Actuellement, et depuis des années, nous ne

sommes plus dans les commissions et nous

sentons bien que faire passer nos idées est

désormais plus difficile.

Nathalie Rey, présidente d’Insieme Valais romand

La structure initiée en 2002 est restée

pérenne et aujourd’hui les parents qui le

souhaitent peuvent toujours bénéficier de cette

option. C’est un soutien aux familles et aux

parents et donc, à mes yeux, une manière de

soutenir l’intégration au sens large.

Michel Délitroz, ancien chef de l’Office de l’enseignement

spécialisé, 2022


123

aussi, passer une soirée avec ses copains, hors maison. Pour les

parents, cela signifie aussi qu’il n’y a aucune décharge, et donc

une absence de vie en dehors du domicile », explique-t-elle 24 .

Avec le comité d’Insieme Valais romand, elle propose alors à

l’Office de l’enseignement spécialisé de créer une structure d’accueil

temporaire dans le Valais central. Un lieu où les enfants

pourraient être accueillis un ou deux soirs par semaine, avec un

accompagnement adapté à leurs besoins.

≥ Un groupe de travail est mis sur pied en automne 2001. Il

réunit le directeur des écoles de la Ville de Sion, l’Office de l’enseignement

spécialisé, le Service de l’action sociale, un neuropédiatre,

une représentante d’Insieme Valais romand et une de

l’association IMC. Très rapidement, le concept et les coûts sont

jugés cohérents. Une séance est agendée à la mi-mars 2002.

Chacune et chacun se voit chargé d’une mission pour faire valider

au plus vite le concept arrêté auprès des différentes instances.

Les recherches de locaux commencent. Un appartement sera

mis à disposition par l’Institut Notre-Dame de Lourdes qui possède

l’infrastructure nécessaire à la prise en charge des enfants.

Mais la structure qui dépend de l’école La Bruyère de Sion reste

indépendante de l’institution sierroise.

≥ L’Unité d'accueil temporaire ouvre ses portes le mardi

27 août 2002. Elle accueille alors six jeunes de 5 à 18 ans scolarisés

à l’école La Bruyère et en classe AI de la région de Sion

pour une nuit par semaine. « Ainsi, du mardi matin au mercredi

midi, les parents confient leurs enfants à l’école La Bruyère. Cela

leur offre une pause bienvenue dans la semaine. » 25

Une antenne de La Castalie à Sierre

≥ La question géographique est également prépondérante lors

du choix de placement en institution d’une personne adulte

polyhandicapée. « La réflexion n’est sans doute pas la même si

l’on habite à quelques kilomètres de La Castalie, dans la région

de Monthey, ou dans le Valais central. Le fait d’avoir une seule


124

institution cantonale dans le Chablais pose certaines difficultés.

Imaginez-vous faire les trajets tous les jours jusqu’à Monthey si

vous souhaitez que votre enfant – quel que soit son âge – soit en

externat ou même toutes les semaines s’il rentre seulement les

week-ends ! » On choisira alors peut-être l’internat, car les déplacements

ne sont pas compatibles avec les obligations quotidiennes

et peuvent être très fatigants également pour les personnes

en situation de handicap. Ainsi, la centralisation sur La

Castalie peut être perçue par certains comme un frein à l’intégration,

la cellule familiale était le premier cercle de celle-ci, juste

avant celui du lieu de domicile.

≥ « En 2002, lorsque ma fille avait 12 ans, j’ai été convoquée

par l’AI pour une orientation professionnelle. C’est lors de ce

rendez-vous que j’ai réalisé qu’il n’y avait qu’une seule possibilité

de formation et de travail pour les enfants polyhandicapés : à La

Castalie à Monthey. Nous habitons dans la région de Sierre…

Bien loin du Chablais. Cela a été la douche froide de savoir que,

dès 18 ans, Pauline devait rejoindre une institution à plein temps

simplement parce qu’elle n’habitait pas au bon endroit », explique

Nathalie Rey. La présidente d’Insieme Valais romand se dit alors

qu’il faudrait une structure régionale. Sa préoccupation rejoint

celle du directeur de la FOVAHM. « La Castalie était arrivée à

saturation, se souvient Jean-Marc Dupont. Il fallait trouver une

solution pour les personnes adultes avec un handicap mental

sévère. Les structures de la FOVAHM ne pouvaient pas les

accueillir, car elles ne sont pas médicalisées. » 26 Des discussions

sont engagées avec le chef du Service de l’action sociale de l’État

du Valais, Simon Darioli, et le directeur de La Castalie, Michel

Giroud.

≥ En 2010, huit ans après que l’idée a été émise par Insieme

Valais romand, une antenne de La Castalie voit le jour dans les

locaux de l’Institut Notre-Dame de Lourdes à Sierre. Ce choix

permet de mieux utiliser les locaux de l’institution, jugés un peu

surdimensionnés, et de profiter de synergies pour les services

généraux et certains soins 27 . Un soulagement pour les familles

concernées, qui peuvent disposer de douze places d’hébergement

et de deux ateliers d’occupation pour leurs enfants. Les

personnes en situation de handicap peuvent y séjourner en internat

ou en externat.

Une préoccupation

encore présente aujourd’hui

≥ En 2020, le Grand Conseil a voté un crédit pour l’agrandissement

de La Castalie à Monthey, montrant ainsi une

volonté de maintenir une forme de centralisation dans la

prise en charge des personnes avec un handicap mental

lourd. Le rapport de la commission de la santé, des affaires

sociales et de l’intégration pointait pourtant du doigt le manque

de places pour les centres de jour dans le Valais central. L’antenne

L’association

fait valoir le droit

au libre choix

du lieu de vie.


125

L’objectif visé [par la nouvelle loi]

est de parvenir à une société qui ne considère

pas les personnes en situation de handicap

comme quelqu’un à intégrer, mais comme

un individu qui dispose exactement des mêmes

droits que n’importe quel citoyen ou n’importe

quelle citoyenne de notre canton.

Mathias Reynard, Conseiller d’État, lors de l’entrée en matière

sur la modification de la loi de 1991, 4 mai 2021 30

de La Castalie à Sierre existe toujours ; elle accueille actuellement

28 adultes, mais les besoins sont plus importants et un agrandissement

est nécessaire. La planification 2021-2024 de l’État

du Valais ne prend toutefois pas directement en compte le critère

géographique. Insieme Valais romand s’engage pour que cela

change. L’association a notamment interpellé le Conseil d’État à

ce sujet. « Nous avons toujours l’énergie pour nous battre, car

nous passons notre temps dans notre voiture, à faire des transports.

Et sincèrement, vous avez déjà vu un home pour personnes

âgées construit à 1h30 de route des familles ? En général

ces structures sont construites à côté des lieux de vie familiaux

pour faciliter les visites », relève la présidente d’Insieme Valais

romand 28 .

≥ Dans le combat qu’elle mène dans ce domaine, l’association

fait valoir le droit au libre choix du lieu de vie contenu dans la

Convention de l’ONU relative aux droits des personnes en situation

de handicap, ratifiée par la Suisse en 2014. En mai 2021, le

Grand Conseil valaisan a choisi de mettre en œuvre ce texte

international en révisant la Loi sur l’intégration des personnes

handicapées du 31 janvier 1991 29 . Il est alors le deuxième canton

à le faire. La loi doit entrer en vigueur en 2022. Elle mentionne

notamment que l’État favorise le maintien à domicile des personnes

en situation de handicap.

≥ INSIEME, FINANCIÈREMENT INDÉPENDANTE DU CANTON

Les domaines des loisirs et du conseil sont régis par l’article 74 de la Loi sur l’assurance-invalidité qui n’est pas concerné par la

péréquation financière 33 . Ils restent des prérogatives fédérales, subventionnés par l’OFAS. Les recettes d’Insieme Valais romand

viennent pour 45 % de l’OFAS, pour environ 15 % de la participation demandée aux parents pour les activités. Le 40 % restant

provient des actions de soutien organisées, de fondations privées, etc. L’association ne touche donc aucune aide financière du

Canton. « Cela nous donne une liberté de parole auprès du Canton », précise Nathalie Rey.


126

S’ENGAGER SUR LA SCÈNE

POLITIQUE: LA RPT

≥ Défendre les conditions-cadres, être présente sur la

scène politique pour faire valoir les droits des personnes

en situation de handicap est un souci récurrent de l’Association

de parents. On le voit dans les démarches qu’elle effectue pour

le libre choix du lieu de vie et le développement de structures

d’accueil régionales. Mais s’il est bien un combat à citer un

exemple de son engagement politique, c’est celui mené au

moment de réforme de la péréquation financière (RPT) et de la

répartition des tâches entre Confédération et cantons. Cette révision,

acceptée par le peuple en novembre 2004, touche bien sûr

plusieurs secteurs, dont celui du handicap. Elle marque un réel

tournant dans la prise en charge puisqu’elle transfère aux cantons

la responsabilité de l’organisation et du financement des

institutions pour adultes comme pour enfants 31 . Ce changement

remet en question un système qui était jusqu’alors régi de

manière homogène au niveau fédéral, avec des lois, des règles

et des procédures claires.

Décision est prise

de créer

une communauté

d’intérêts.

≥ Insieme Valais romand s’était prononcée contre cette

réforme la jugeant « antisociale, injuste et inutile » alors que

le système en place avait fait ses preuves 32 . En 2007, au

moment où le Parlement valaisan traite de la mise en

œuvre au niveau cantonal des nouveaux articles constitutionnels,

l’association poursuit son combat, notamment pour que

certaines prestations ne diminuent ou ne disparaissent pas, que

le droit de recours reste applicable pour les parents et pour changer

la règle existant depuis longtemps dans le canton, dite « système

du 20 % de déficit à charge de l’institution ».

Création d’une communauté d’intérêts

≥ Avec l’arrivée des problématiques liées à la péréquation

financière, les associations et institutions concernées cherchent

un moyen de pouvoir être associées aux décisions ou tout du

moins à être entendues sur les problématiques auxquelles elles

sont confrontées. Une de leur crainte est notamment que la RPT

augmente les inégalités et que les financements de l’AI se

perdent dans un grand pot commun et ne soient pas forcément

utilisés pour le domaine du handicap.

Avec la communauté d’intérêts, nous avons essayé de créer des partenariats avec

le Canton, mais ça n’a pas été un grand succès. On a pris la parole, mis en garde,

mais la RPT était un dossier si important, avec tellement de secteurs touchés, tellement

de tâches à gérer, que cela a été très compliqué de se faire entendre.

Nathalie Rey, présidente d’Insieme Valais romand 35


127

≥ Décision est prise de créer une communauté d’intérêts. Vital

Darbellay, ancien Conseiller national, membre du comité central

de la Société suisse de la sclérose en plaques, qui fut également

président du Conseil de fondation de la FOVAHM, en devient le

chef de file. Le 22 février 2006, la « Communauté mise en œuvre

RPT Valais » voit le jour. Quatorze organismes reconnus dans le

domaine du handicap en font partie. 34 Insieme Valais romand en

assume la coordination et le secrétariat.

Les « moins » de la cantonalisation

≥ L’engagement de la communauté d’intérêts ne parvient pas

à éviter certains changements qui péjorent la prise en charge des

personnes en situation de handicap.

≥ La cantonalisation et la redistribution des tâches impactent

le processus de demande d’aide et de soutien, notamment en

matière de scolarisation, que ce soit en classe « normale » ou en

institution. « Avant la RPT, regrette Nathalie Rey, les parents pouvaient

faire recours contre la décision qui leur était notifiée par

l’AI quant aux mesures à mettre en œuvre pour leur enfant. Les

lois étaient claires, les procédures également. Et elles étaient les

mêmes pour toute la Suisse. La possibilité d’avoir gain de cause

lors d’un recours était donc réaliste. C’était d’ailleurs souvent le

cas. Avec la péréquation et la cantonalisation dans ce domaine,

le droit de recours a perdu de sa pertinence ! Il existe, certes,

mais le cadre est désormais moins clair et, dès lors, les arguments

lors d’un recours sont plus faciles à écarter. » 36

≥ Autre élément relevé par la présidente d’Insieme comme une

perte de qualité dans la prise en charge : les transports. « La règle

de l’AI était de soutenir un transport réalisé par des professionnels

depuis et vers le domicile de la personne en situation de

handicap. Depuis que le Canton est responsable du domaine, il

n’y a plus d’obligation de les prendre et les déposer au domicile.

Il peut arriver que les enfants soient pris en charge à un lieu de

La qualité de leurs prestations éducatives

dépendra désormais des gains de la Loterie

romande, des bénéfices des bricolages de Noël

ou des recettes du loto annuel. Aujourd’hui déjà,

les bus qui transportent les enfants handicapés

sont entièrement recouverts de publicité...

Faudra-t-il compter sur ces mêmes sponsors

pour financer une heure de mathématiques

ou de français ?

Communiqué de presse d’Insieme Valais romand,

2 novembre 2007

regroupement dans le village. Dans certains cas, c’est très problématique,

notamment pour les enfants qui ne peuvent pas se

déplacer seuls. »

Une victoire : la scolarisation financée à 100 %

≥ Il est important de relever que la passation en mains cantonales

a également eu des avantages. Le décret de mise en œuvre

de la RPT qui doit être adopté par le Grand Conseil lors de la

session de septembre 2007 modifie plusieurs lois pour s’adapter

à la nouvelle donne. L’occasion de faire modifier une règle remise

en question à plusieurs reprises déjà 37 : le 20 % du déficit des

institutions spécialisées non pris en charge par l’État. Avant la

péréquation, Berne prend à sa charge le 50 % des coûts alors

que le reste doit être assumé par le canton. Mais celui-ci n’assure

que le 80 % du déficit. Les institutions doivent donc trouver ellesmêmes

un financement pour le 20 % restant. Aucune loi au

niveau fédéral ne justifie que le Canton n’assure pas un financement

intégral et le Valais est le seul à procéder ainsi.

≥ Les parents sont alors souvent mis à contribution, lors d’actions

de recherche de fonds comme des lotos, pour que les institutions

parviennent à boucler leurs comptes. Une situation

jugée inacceptable par beaucoup qui ont le sentiment de devoir

faire la manche pour scolariser leur enfant. Une méthode de


128

financement qui fait également remonter à la surface certaines

inégalités de traitement, selon l’intégration ou non des enfants

dans le système scolaire traditionnel. « La famille d’un enfant qui

était en intégration scolaire ou dans une classe d’adaptation

n’avait pas besoin de faire des recherches de fonds. Nous,

parents d’enfants scolarisés dans les institutions spécialisées, le

faisions, par peur que les prestations soient supprimées par

manque de moyens financiers », précise Nathalie Rey 38 .

≥ En 2007, les discussions sur le décret d’introduction de la

péréquation financière permettent de relever cette problématique.

Dans le cas où cette règle du 80 % du déficit subsiste 39 , le

montant à trouver par les institutions deviendrait bien plus conséquent.

Si l’État promet des solutions au cas par cas et l’établissement

de mandats de prestations, les institutions qui se

chargent de la scolarisation des enfants en situation de handicap

souhaitent que le principe soit adopté dans la loi pour assurer sa

pérennité et une égalité de traitement.

≥ Afin d’influer sur les débats et de sensibiliser les politiciens

qui vont voter le décret de mise en œuvre de la RPT en septembre

2007, Insieme Valais romand publie un communiqué de

presse « coup de poing » et lance l’opération « Cartes postales ».

Chaque parlementaire valaisan recevra une ou plusieurs cartes

postales avec des mots personnalisés, de la main des parents

concernés, membres d’Insieme Valais romand, ou de leurs

enfants en situation de handicap.

≥ En septembre 2007, au moment de l’entrée en matière, plusieurs

groupes parlementaires soulèvent la question et font des

propositions de modification du décret et des lois liées 40 . Le

Grand Conseil accède finalement aux demandes de l’Association

de parents et le décret est modifié. Exit le 20 % du déficit restant

à la charge des institutions 41 . Le Canton couvrira désormais le

100 % des frais liés à la scolarisation des enfants en situation

de handicap, qu’ils soient intégrés dans les classes ou en

institution.

Sur la carte postale envoyée

par les familles, trois enfants,

chacun avec une situation

différente. Objectif : montrer

qu’il y a inégalité de traitement

quant au financement puisque,

par exemple, un enfant

qui se trouve à La Castalie,

dans une institution cantonale,

se voit financé à 100 %

alors qu’un enfant scolarisé

à Notre-Dame de Lourdes,

dans le domaine privé,

ne l’est que à 80 %.


129

LES LOISIRS, NOUVELLE MARQUE

DE FABRIQUE

≥ L’Association de parents a toujours eu ce souci d’organiser

une colonie durant l’été pour permettre aux jeunes, puis plus tard

également aux adultes, de vivre ces moments de vacances collectives

et de développer certaines compétences, pratiques et

sociales 42 . Mais, au cours des années 1990, les week-ends et les

camps d’Insieme deviennent la nouvelle marque de fabrique de

l’association.

Une secrétaire-animatrice à l’esprit scout

≥ L’engagement de Lucienne Darbellay Fumeaux comme

secrétaire-animatrice en 1994 marque un tournant. « L’association

recherchait un double profil, explique l’intéressée : ‹ animatrice ›

pour les camps d’été, pour les rencontres avec les parents et

‹ secrétaire › pour tout ce qui concernait l’aide aux démarches

administratives par rapport au droit aux subventions. Le poste

comportait également un aspect de représentation de l’Association

de parents devant les autorités politiques et les institutions.

Comme j’avais été employée de banque et que j’étais infirmière

en psychiatrie, j’avais les deux casquettes. Mais surtout j’avais

beaucoup mis en avant mon côté scout. Animer un groupe, faire

un petit journal, faire des lotos – car il y avait également la

recherche de fonds –, je savais faire et j’avais beaucoup axé làdessus

lors de mon entretien ».

S’amuser les week-ends

≥ Son côté scout chevillé au corps, Lucienne Darbellay

Fumeaux se lance le défi de mettre sur pied des week-ends de

loisirs pour les enfants d’Insieme. Il y avait un réel besoin : « Dans

l’association, à l’époque, il n’y avait pas de parents de très jeunes

enfants, il s’agissait d’enfants qui avaient entre 10-12 ans et qui

avaient connu les débuts de l’intégration scolaire. Mais pour leur

parent, gérer le week-end était compliqué. Imaginez : les frères

et sœurs allaient au foot, partaient en week-end avec les scouts,

avec le ski… et cet enfant qui restait toujours avec eux parce qu’il

était intégré dans les loisirs avant, mais qu’en grandissant, il était

mis de côté de ce point de vue-là. » 44

≥ Pour concrétiser son idée, il lui faut d’abord convaincre les

parents de confier leurs enfants à l’association le temps d’un

week-end et trouver des accompagnants pour les prendre en

charge. Que cela ne tienne ! « Je suis allée voir les gens chez eux,

j’ai discuté avec les parents. Pour trouver une équipe d’encadrement,

comme j’étais membre de l’équipe cantonale scoute, j’ai

demandé du renfort. Les membres de l’équipe étaient inquiets à

l’idée de ne pas savoir comment faire, mais j’avais besoin de leurs

compétences logistiques et organisationnelles. Mon idée était de

partir petit, avec trois ou quatre enfants, et de montrer aux

parents que c’était possible. »

Aujourd’hui, lorsque je sollicite mon

entourage, c’est pour que mes enfants

puissent profiter des loisirs. Ainsi, je suis

presque comme une autre maman qui vend

des abonnements de loto pour le club de foot

de son fils ou pour la fanfare du village.

Nathalie Rey, présidente d’Insieme Valais romand


130

ÉCLAIRAGE

LE CONTACT AVEC LES FAMILLES : UN « INDISPENSABLE »

≥ Disposer d’une association rassembleuse et pouvant leur

venir en aide est important pour les membres d’Insieme Valais

romand. Ils l’ont rappelé lors de l’enquête de 1994. Le rôle des

secrétaires de l’association a toujours été de maintenir et de développer

le lien avec et entre les familles. « L’association est là pour

les membres, explique Nathalie Rey. Par son secrétariat bien sûr,

mais également via les membres du comité, tous parents de personnes

en situation de handicap. Par ce statut, ils connaissent le

quotidien des familles, sont confrontés aux démarches administratives,

etc. Ils peuvent donc aider les parents et également renseigner

la secrétaire de l’Association qui n’a pas forcément les

mêmes connaissances. Toutes les personnes du comité sont là

pour les membres et sont sollicités régulièrement ». Répondre

aux questions individuelles, informer, offrir aux parents une oreille

attentive, sont des « indispensables ».

Un soutien récompensé

pendant la crise du Covid-19

≥ Il a marqué la scolarité et la vie de toutes et tous à partir de

mars 2020 : la pandémie de Covid-19. Qu’en est-il du monde du

handicap ? Les enfants intégrés dans le cursus scolaire traditionnel

ont été logés à la même enseigne que le reste de leurs camarades,

à cette différence près que la majeure partie des thérapies

ont été suspendues avec pour conséquence des régressions

dans l’apprentissage. Pour les enfants et adultes en externat dans

une institution, celle-ci n’étant pas considérée comme leur lieu

de domicile, ils n’ont plus été accueillis durant cette période.

Quant aux internes, deux possibilités se présentaient aux parents :

soit les enfants restaient dans le cadre de l’institution et, à ce

moment-là, ils ne pouvaient recevoir de visite ni rentrer chez eux,

soit les parents les reprenaient à la maison, le temps de laisser

passer la crise sanitaire. Une situation particulièrement difficile

à gérer sur le plan émotionnel et logistique. Durant près de sept

mois, certains parents ont dû réorganiser leur quotidien pour faire

face à cette situation. Insieme Valais romand s’est engagée

auprès d’eux durant cette période, notamment par un suivi téléphonique

personnalisé et en proposant des activités pour rythmer

les journées. « Les jeunes appréciaient d’entendre notre

secrétaire-animatrice, qu’ils connaissent bien. Elle les rassurait,

leur disait que les camps allaient reprendre bientôt, etc. » 43

Insieme Valais romand a reçu un Prix de la Fondation du 100 e de

la Banque cantonale du Valais pour ce travail. Notons qu’elle avait

déjà été récompensée en 1993 par un Prix de la Fondation du

75 e anniversaire de la banque.


≥ Moins d’un an après son engagement, en mars 1995,

Lucienne Darbellay Fumeaux organise le premier week-end, à la

Maison des Pères, à Massongex. Il accueille dix enfants et dix

accompagnants. « En ce qui concerne les accompagnants, on

demandait des gens de bonne volonté, on leur disait ‹ vous faites

un week-end, vous venez et vous voyez ›. Et on avait toujours

dans nos week-ends deux ou trois anciens qui revenaient. » 45

Le succès est au rendez-vous

≥ Les week-ends se multiplient et le succès est au rendezvous.

Les parents sont heureux de pouvoir confier leurs enfants

en toute sécurité tout en leur offrant une parenthèse de vie « normale

», sans les codes de l’institution ou de l’intégration scolaire.

Le temps d’un week-end, leur enfant redevient un enfant comme

les autres.

« Pour moi, ces week-ends devaient être un concept provisoire,

le temps d’une transition, car à terme, j’imaginais que cela

devait se passer comme pour l’école, à savoir une intégration

des enfants dans les structures de loisirs existantes. Je voulais

démontrer qu’il y avait un réel besoin. On a fait des camps sous

tente, on a fait un camp à Marseille pour dire à tout le monde :

‹ On peut ! ›. L’Association de parents voyait cela ainsi : un premier

pas pour ensuite proposer aux structures existantes que

l’enfant en situation de handicap vienne participer à leurs activités

accompagné d’une personne de référence – nos accompagnants

–qui sera là pour que tout se passe bien. Mais les

parents étaient tellement satisfaits et enthousiastes des weekends

que, quand je revenais à la charge avec mes idées, il n’y

avait plus du tout d’écho.

Très rapidement, on a mis sur pied deux camps enfants et deux

camps ados durant l’été. En ce qui concerne les week-ends, le

rythme était d’un par mois. À un moment donné, nous louions

des locaux à l’Institut Sainte-Agnès pour les week-ends que

l’on appelait les week-ends « casbah ». C’était important d’offrir


132

des lieux rassurants, notamment à tous ceux qui avaient des

traits autistiques. Mais on pouvait également leur offrir des

expériences hors des sentiers battus pour élargir leurs compétences.

J’ai toujours adoré participer à ces camps, c’étaient des

moments merveilleux. »

≥ Lorsque Lucienne Darbellay Fumeaux passe le relais, progressivement

entre 1998 et 2000, la cartothèque contient 200

noms d’accompagnants désireux de s’investir pour les weekends.

Avec la généralisation des week-ends et des camps d’été,

un subventionnement de l’OFAS permet de défrayer les accompagnants.

Quant aux parents, c’est une somme symbolique qui

leur est demandée. Une quarantaine de francs par week-end, le

montant qu’aurait payé un enfant qui allait en week-end chez les

scouts ou à un camp de foot. « Et pour ceux pour qui ce n’était

pas possible de payer, on passait le message que l’Association

de parents pouvait prendre en charge la finance d’inscription

grâce à un fonds dévolu à cet effet. Il fallait souvent convaincre

ceux qui n’avaient pas d’argent de se laisser aider. » 46 Annonce pour les activités de loisirs, 1995-1996.

≥ Insieme Valais romand organise entre 110 et 120 journées entre week-ends et camps de vacances, réparties tout

au long de l’année. Elle est au bénéfice de subventions de l’OFAS pour ces activités. Le contrat est négocié tous les quatre

ans. Les subventions sont calculées par journée et par participant, quel que soit le coût effectif.


Le Mont-Blanc – chalet Insieme, aux Marécottes.

Un chalet de vacances « comme à la maison »

≥ Au début des années 2010, l’Association de parents a un

nouveau projet : acquérir un chalet de vacances à la montagne

où organiser ses camps. Elle développe alors un partenariat avec

le Rotary Club de Sierre pour le réaliser. Des commissions mixtes

sont créées entre le Club Service et Insieme Valais romand afin

de mêler les compétences métiers des membres du premier et

les connaissances des besoins de l’Association de parents et des

personnes en situation de handicap. « Nous avons passé une

annonce pour trouver un bâtiment à acheter et nous avons reçu

des offres pour septante objets. L’évaluation de chacun d’eux a

été menée à bien grâce à la complémentarité des connaissances

et points de vue de la commission mixte », explique la présidente

d’Insieme Valais romand. Le choix est arrêté : ce sera le chalet

Mont-Blanc aux Marécottes qui dispose de la taille nécessaire,

d’une bonne desserte en transports publics et se trouve au cœur

d’une station touristique dynamique, gage d’intégration pour les

personnes en situation de handicap.

≥ « Le Rotary de Sierre a impliqué tous ses membres dans la

recherche de fonds également et a participé au financement à

hauteur de 20 % du coût total ! » s’enthousiasme Nathalie Rey

avec un regard plein de gratitude. Le rêve devient réalité en 2014.

Désormais, enfants, jeunes, adultes ont « leur chalet », aux

Marécottes. Cet achat a joué un rôle important dans la pérennisation

des activités de loisirs de l’association, car les logements

pour groupe en montagne devenaient difficiles à trouver.


134

Des séjours pour les jeunes par les jeunes

≥ Aujourd’hui encore, l’esprit festif et joyeux de ces week-ends

hors du temps persiste. C’est une volonté de la part d’Insieme

Valais romand de maintenir ces activités où les jeunes peuvent

avoir leur espace et leurs loisirs. « Nous souhaitons vraiment

qu’ils puissent vivre des temps de loisirs comme les autres jeunes

de leur âge, entre eux. Pour l’encadrement, nous engageons une

responsable formée, mais jeune diplômée, et des jeunes dès

17 ans comme moniteurs », commente Nathalie Rey. « Il y a des

règles : les enfants partent en bus, les parents ne les amènent

pas. Et pas question qu’ils débarquent au milieu de la semaine !

précise-t-elle en souriant. C’est justement cela qui fait la spécificité

de nos camps et pour cela qu’ils plaisent autant. Ces offres

de week-end et de camps aident les mamans à décrocher ; elles

apprennent à le faire même si ce n’est pas toujours facile. Je leur

dis souvent : ‹ Vous, quand vous aviez 18 ans, vous auriez aimé

que papa et maman vous gardent avec eux tous les week-ends,

à regarder la télé sur le canapé ? Ne faisons pas cela avec nos

enfants qui rencontrent déjà des difficultés ›. » 47

≥ Autre bénéfice de ces temps de partage : s’intégrer au monde

du handicap. La présidente d’Insieme Valais romand le relève :

« J’entends souvent des familles qui se réjouissent que leur enfant

soit intégré, mais qui souhaitent également qu’il connaisse son

monde, celui du handicap. Une fois la scolarité terminée, à l’entrée

dans l’âge adulte, il va retrouver le monde des personnes en

situation de handicap, que ce soit dans un cadre professionnel

ou, s’il est intégré en entreprise, dans le cadre des loisirs. Alors il

faut qu’il s’y fasse aussi des amis. L’expérience montre que la

situation la plus favorable à l’épanouissement à long terme de la

personne en situation de handicap est celle où, enfant déjà, il

côtoie les deux mondes. Une solution qu’on pourrait considérer

comme mixte. » 48


135

≥ DES LOISIRS À L’ARRÊT

En mars 2020, l’Association suspend week-ends et camps en raison de la crise sanitaire du Covid-19. « Une collaboration étroite

s’est mise en place entre le médecin cantonal et les institutions liées au handicap. Les personnes qui participent aux activités

d’Insieme venant de tout le Valais romand, et étant intégrées soit dans des classes ordinaires, des institutions, des ateliers, des

entreprises, il était évident que nous devions les suspendre. Le risque de propagation était bien trop élevé. Et il s’agit de loisirs… »

précise Nathalie Rey.


136

CONCLUSION

≥ Dès 1962, et les premières discussions sur les projets à

mener par la future Association de parents d’enfants mentalement

déficients, le comité se donne pour mission, d’une part, de

rassembler les parents et de libérer leur parole, d’autre part, de

développer des offres dans le domaine de l’école, du travail, des

loisirs. L’année suivante déjà, une première classe de l’école itinérante

voit le jour, un atelier de tissage est ouvert à la rue de

Savièse à Sion, les enfants peuvent passer un mois à la montagne

lors d’une colonie de vacances. Une motivation au cœur

de toutes ces actions : permettre aux enfants handicapés mentaux

de grandir dans les meilleures conditions possibles et de

vivre en participant eux aussi aux différents aspects qui composent

la vie d’un individu dans nos sociétés.

≥ Par l’exemple, en retroussant ses manches, sans jamais

baisser les bras, en sensibilisant les autorités publiques et en

partageant sans cesse ses convictions, l’Association de parents

a été un moteur dans le domaine de la prise en charge des personnes

avec une déficience intellectuelle. Plus même, elle a fait

office de pionnière en mettant sur pied rapidement des actions

convaincantes.

≥ Donner l’impulsion est une chose ; savoir la transformer en

orientation durable en est une autre. Une décennie après sa

création, l’Association de parents pose un constat courageux :

elle ne dispose plus des ressources nécessaires pour gérer les

structures qu’elle a créées et qu’elle souhaite encore voir grandir.

La Fondation en faveur des handicapés mentaux (actuelle

FOVAHM), créée d’abord pour des raisons juridiques et financières,

se voit confier alors la gestion des homes et ateliers pour

adultes et de l’école. Tout en restant présente dans les organes

de direction, l’Association de parents choisit toutefois de laisser

ses structures prendre leur envol pour qu’elles puissent grandir

en confiance. Ce choix a été judicieux puisqu’il a permis à chacun

des secteurs de se structurer, de se professionnaliser et

d’ainsi suivre une évolution nécessaire à sa pérennisation.

≥ Toujours mettre au centre des décisions prises le bien-être

des personnes en situation de handicap et la volonté de leur offrir

des choix variés et des niveaux d’intégration adaptés, ne se fait

pas toujours sans heurt ou sans pincement au cœur. Ainsi, en

est-il notamment du transfert de l’école La Bruyère aux communes

de Sion et de Martigny. Accepter le changement, pour

plus d’intégration, mais rester présents pour rappeler sans cesse

les besoins de leurs enfants, être un « garde-fou », sensibiliser les

politiques et les gestionnaires d’institutions : nouveau credo de

l’association dans les domaines de l’éducation, mais également

de l’occupation et de l’hébergement des adultes. Depuis 1962 et

jusqu’à nos jours, l’Association de parents, Insieme Valais

romand, s’engage pour le bien des familles et contribue, sans

cesse, à la politique valaisanne d’intégration et à sa mise en

œuvre sur le terrain. Une politique et un système considérés par

beaucoup comme exceptionnels au niveau suisse, et souvent

cités en exemple.

≥ Après avoir dépensé sans compter son énergie pour le droit

à l’éducation et le droit au travail des personnes en situation de

handicap, Insieme Valais romand se consacre désormais prioritairement

au troisième axe qu’elle avait choisi dès ses débuts : les

loisirs. Avec toujours une motivation : voir, au travers des sourires

des enfants et des adultes concernés, qu’elle contribue à

leur épanouissement et à leur offrir des moments de vie

enrichissants.


Le fait qu’il y ait eu tout ce travail dès

les années 1970 au niveau scolaire, pour l’intégration,

crée une particularité dans notre canton. Cela veut dire

que nous avons déjà deux générations, que j’allais dire

« inclusives », et cela se ressent dans la population,

dans les milieux de l’entreprise. Ce n’est pas tout rose,

il y a encore des gens qui aimeraient que les personnes

en situation de handicap soient exclues,

mais on bénéficie d’un climat très favorable en Valais,

la grande majorité des gens estiment

que l’intégration est une bonne chose.

Jean-Marc Dupont, directeur de la FOVAHM, de 2000 à 2020



139

PRÉSIDENCE DE L’ASSOCIATION DE PARENTS

1962-1966 Nicole Lachat

1966-1969 René Lovey

1969-1974 Jules Délèze

1974-1988 Jean-Claude Berthod

1988-1994 Laurent Torrent

1994 Marie-Madeleine Dayer (intérim)

1994-2001 Michel Abbet

2001-2004 Jacques Dessimoz

Dès 2004 Nathalie Rey-Cordonier


140

NOTES

1 Sur l’instruction publique et la notion d’arriération à la fin du XIX e siècle, voir notamment :

Martine Ruchat, Inventer les arriérés pour créer l’intelligence. L’arriéré scolaire et la classe

spéciale. Histoire d’un concept et d’une innovation psychopédagogique. 1974-1914, Peter

Lang, 2003, pp. 13-29 ; sur les concepts et les termes utilisés pour désigner les personnes

handicapées au fil des décennies, voir notamment le résumé de Lara Bolzman dans son

mémoire de licence : La prise en charge institutionnelle des enfants « anormaux » à Genève.

1874-1932, Université de Genève, 2004.

2 Xavier de Cocatrix, Examens pédagogiques des recrues en Valais de 1886 à 1906, Berne,

1907, p. 7.

3 Id., p. 15.

4 Loi du 3 décembre 1898 sur l’assistance, dans Recueil des lois, décrets et arrêtés du Canton

du Valais (Recueil des lois), t. XVII, 1899, pp. 273-288, citation du préambule.

5 Ibid.

6 Il le pouvait en vertu du Décret du 27 mai 1891 concernant l’application du dixième de la

part du Canton au produit de la régie fédérale des alcools. Le Conseil d’État attribue ce

dixième à la création ou à l’entretien d’institutions publiques ou privées de bienfaisance et

d’éducation.

7 Recueil des lois, t. XVI, 1895, pp. 231-234.

8 AEV, 4150-8/692, lettre signée de Courten à Laurent Rey, chef du DIP, 30 mai 1903.

9 Bulletin des séances du Grand Conseil (BSGC), novembre 1905 ; Loi sur l’enseignement

primaire et sur les écoles normales du 1 er juin 1907, dans Recueil des lois, t. XXI, 1910, pp.

119-158, articles 40 et 46.

10 Id., article 47.

11 BSGC, novembre 1905, pp.127-128.

12 L’École primaire, n o 5, 15 mars 1908, pp. 2-3.

13 « Éducation des enfants anormaux », dans Journal et Feuille d’Avis du Valais (JFAV), 19 mai

1908, p.2.

14 Arrêté du 23 août 1910 concernant la création d’écoles spéciales pour enfants anormaux,

dans Recueil des lois, t. XXIII, 1912, pp. 137-139.

15 Archives de l’État du Valais (AEV), 4150-8/679, Rapport annuel de l’Institut des sourdsmuets

de Géronde 1910-1911.

16 Id., Rapport annuel de l’Institut de Géronde pour l’année 1912/1913. Le Conseil d’État

décide de payer le 50 % de la pension.

17 AEV, 4150-8/680, lettre de l’Institut de Géronde au DIP, 12 septembre 1924.

18 Id., circulaire à Messieurs les Présidents des Commissions scolaires », DIP, 14 septembre

1923.

19 Id., rapport annuel de l’Institut des sourds-muets de Géronde, 1926/27.

20 Id., lettre de l’Institut de Géronde au chef du DIP, Walpen, 18 avril 1927, version non signée.

21 L’École primaire, décembre 1935, p. 429.

22 AEV, 4150-8/683, document intitulé « Total des élèves ayant fréquenté l’institut durant le

cours scolaire 1945-46 ».

23 Plusieurs sources laissent penser que Sion dispose de la seule classe spéciale du canton :

L’École primaire, octobre 1932, p.323 ; L’École primaire, n o 3, 31 janvier 1933, p. 62 (retranscription

des débats du Grand Conseil, réponse à une motion déposée le 17 février 1929 par

le chef du DIP) ; Id., n. 5, 30 novembre 1939, p. 103 (article rédigé par M. Thomas du Service

médico-pédagogique valaisan). Un article de la même revue datant d’octobre 1926 affirme

toutefois que « seules quelques communes » ont créé des cours spéciaux. Il est possible que

les classes ouvertes à Sierre à l’institut de Géronde soient prises en compte.

24 AEV, 4150-8/692, lettre au chef du DIP signée par neufs hommes de Saxon, pères d’un

enfant placé en classe spéciale, 6 novembre 1934.

25 À sa création, le SMPV est unique en Suisse, et même en Europe comme l’écrit l’historienne

Anne-Françoise Praz. Le Dr André Repond a joué un rôle de pionnier dans le domaine de

l’aliénation, mais également de la prise en charge et du dépistage du handicap mental. Sur

le SMPV, voir en particulier : A.-F. Praz, Discours et pratiques face à la maladie mentale en

Valais de la fin du XIX e à 1940 : un terrain d’action pour la Maison de santé de Malévoz,

mémoire de licence, Université de Fribourg, 1985, pp. 169-183 ; Romaine Schnyder,

« Enfants aux besoins particuliers », dans Jean-Henry Papilloud et al., L’enfant en Valais

1815-2015, Annales valaisannes, SHVR, 2016, pp. 161-175. En 2000, le SMPV devient le

Centre pour le développement et la thérapie de l’enfant et de l’adolescent (CDTEA). Il est un

office du Service cantonal de la jeunesse.

26 AEV, 4150-8/692, lettre au Conseiller d’État Loretan, chef du DIP, signée par Louise-Marie

Dupraz [assistante auprès du SMPV], 20 novembre 1934.

27 Id., PV de la séance du 29 novembre 1934.

28 Id., copie non signée d’une lettre du DIP à la commission scolaire de Saxon, 3 juillet 1935.

29 Id., note manuscrite « Écoles des ânes », non signée, sans date. Le soulignement est de

l’auteur de la note. Les mots entre crochets sont de nous.

30 JFAV, 13 novembre 1958, p. 5.

31 AEV, 4150-8/692, Rapport sur l’enquête faite au sujet des élèves de la classe spéciale de

Saxon, 5 p., non signé, non daté ; Id., lettre d’accompagnement, SMPV au chef du DIP, 8

janvier 1935.

32 Dans les rapports de test de QI du SMPV, les QI sont établis par rapport à une valeur de 1

qui représente le niveau médian de la performance dans un échantillon de scores de personnes

testées ayant environ le même âge. Aujourd’hui, cette valeur médiane est de 100.

Nous avons adapté les chiffres de nos sources pour faciliter la lecture.

33 AEV, 4150-8/692, lettre du Service médico-pédagogique valaisan, signée L. Dupraz, à l’inspecteur

scolaire Thomas, 8 janvier 1935.

34 Id., lettre de l’inspecteur scolaire Thomas au chef du DIP, 19 janvier 1934 [sic. Date correcte :

1935]

35 Sur l’histoire de l’AI, voir : Virginie Fracheboud, L’introduction de l’assurance invalidité en

Suisse (1944-1960). Tensions au cœur de l’État social, Antipodes, 2015.

36 L’ASA, nommée depuis 1976 Association suisse d’aide aux handicapés mentaux, a été créée

en 1889 sous le nom Conférence suisse en faveur des idiots. Elle devient, en 1916, l’Association

suisse en faveur des arriérés, et une faitière, avec sections cantonales, en 1931.

37 AEV, 4150-8/689, lettre de l’ASA Section valaisanne, signée [Paul] Mudry, président, et S.

Reichenbach, secrétaire, à Marcel Gard, chef du Département cantonal des finances, 8

janvier 1960.

38 Le terme «oligophrène profond » est utilisé à cette période pour désigner les personnes

souffrant d’un handicap mental profond. Il vient du grec « oligo », peu, et « phrène », esprit.

39 Jean-Louis Korpès, Handicap mental. Notes d’histoire, Cahiers de l’EESP, 3, 1988, pp. 57-59.

40 Sur ces éléments, dans le contexte de la création des associations de parents d’enfants

déficients mentaux, voir notamment : https ://www.insieme.ch/fr_old/wp-content/

uploads/2010/12/50ans_f_4_10.pdf (consulté le 12 juillet 2022).

41 https ://www.aigues-vertes.ch/historique (consulté le 12 juillet 2022).

42 Chef de l’Office cantonal du crédit agricole, dès 1963

43 La Patrie valaisanne, 1 er juin 1962, p. 2.

44 « L’enfance la plus malheureuse », dans Nouvelliste du Rhône, 4 juin 1962, p. 14.

45 Nicole Lachat, « Association valaisanne de parents d’enfants mentalement déficients », dans

JFAV, 14 décembre 1962, p. 15. L’article parait également dans d’autres journaux

valaisans.

46 AEV, fonds Insieme, 3.1, PV de la séance du comité du 19 novembre 1962.

47 AEV, Insieme, document dactylographié avec note manuscrite « Exposé de M me Nicole

Lachat », Sion, 9 décembre 1970.

48 AEV, Insieme, 1.1, Statuts du 17 décembre 1962, version signée uniquement par Nicole

Lachat, manque la signature du secrétaire.

49 Main dans la main, n° 4, nov. 1964.

50 Main dans la main, n° 1, nov. 1963, p. 9. Nous avons gardé l’ordre d’apparition dans cette

publication.

51 Delphine Debons, Une place pour chacun ? Histoire de la FOVAHM, FOVAHM, 2010, p. 29.

52 Main dans la main, n° 1, novembre 1963, p. 9.

53 AEV, Insieme, 5.4, document dactylographié avec note manuscrite « Exposé de M me Nicole

Lachat », Sion, 9 décembre 1970. Nous ne savons pas à quelle occasion a été lu le texte.

54 Main dans la main, n° 1, nov. 1963, p. 5.

55 L’ouvrage présente les activités développées dans le domaine de l’emploi jusqu’en 2010 : de

l’atelier de tissage de la rue de Loèche au projet d’hôtel (aujourd’hui réalisé) en passant par


141

l’atelier de Sierre ouvert en 1967, l’ouverture du premier home-atelier à Saxon en 1975 puis

les développements successifs menés par la Fondation valaisanne en faveur des handicapés

mentaux (FOVAHM), née à l’initiative de l’Association de parents et indissociable de son

histoire. D. Debons, op.cit.

56 AEV, Insieme, 3.1, PV du comité provisoire du 9 novembre 1962.

57 Id., PV de la séance du comité du 22 mars 1963.

58 Main dans la main, n° 3, avril-mai 1964, p. 4.

59 Ibid.

60 AEV, Insieme, 10/7, Commission de la colonie, séance du 7 février 1973.

61 AEV, Insieme, 10/,7, document « Colonie de Montana », avec mention des dates des trois

semaines et des noms des participants, non daté.

62 Id., document « Camp d’été 1973 Montana-Village du 12 au 31 août. Liste des enfants inscrits

au secrétariat APHM Sion ».

63 AEV, Insieme, 3.1, PV de la séance du comité du 8 février 1974.

64 AEV, Insieme, 10/9, Secrétariat APHM, circulaire aux parents, 21 janvier 1981.

65 Id., document « Colonie de la Fouly, 1981, Maison Les Girolles. Liste des participants,

13.07.1981 ».

66 AEV, Insieme, 10/12, circulaire aux parents du secrétariat APHM sur l’organisation de weekends,

23 mars 1984.

67 Voir ci-après pp. 129-135.

68 L’Association de parents parle soit d’école itinérante, soit d’école ambulante. Pour la suite de

cet ouvrage, le premier terme, plus souvent utilisé dans les documents et qui est resté dans

les mémoires des témoins, est privilégié malgré le fait qu’il puisse entraîner une confusion

avec le Service éducatif itinérant – aujourd’hui Office éducatif itinérant – qui sera créé en

1968 par l’Association de parents.

69 Loi du 4 juillet 1962 sur l’instruction publique, dans Recueil des lois, t. LVI, 1963, pp.

196-225.

70 Règlement du 20 juin 1963 concernant l’octroi de subventions en vertu de l’article 120 de

la loi du 4 juillet 1962 sur l’instruction publique, dans Recueil des lois, t. LVII, 1964, pp.

182-189, articles 26 à 29.

71 Loi du 4 juillet 1962 sur l’instruction publique, dans Recueil des lois, tome LVI, 1963, pp.

196 ss, citation de l’art. 42 et43. Elles sont réparties entre classes d’observation et

d’adaptation.

72 Id., art. 31

73 AEV, La Bruyère, 55, décision du 30.10.1963 mentionnée dans : Extrait des protocoles des

séances du Conseil d’État, décision du 29 décembre 1964.

74 Participation aux Journées internationales organisées à Bruxelles par des psychologues

spécialisés dans l’éducation d’enfants mentalement déficients.

75 AEV, Insieme, 3.1, PV de la séance du comité du 21 janvier et du 4 février 1964. Disposition

confirmée par une note sans date sur l’école itinérante dans dossier : AEV, Fonds école La

Bruyère (désormais La Bruyère), 42.

76 AEV, Insieme, 3.1, PV de la séance du comité du 21 janvier 1964.

77 AEV, Insieme, 3.1, PV de la séance du comité du 17 décembre 1963.

78 Id., PV de la séance du comité du 6 avril 1965.

79 AEV, La Bruyère, 55, Extrait du protocole des séances du Conseil d’État, 29 décembre 1964.

80 AEV, 4150-8/693, note de Marcel Gross à A. Chastonay, chef du Service de l’enseignement,

10 juillet 1964 ; AEV, Insieme, 3.1, PV de la séance du comité du 19 janvier 1965 mentionnant

les décisions du Conseil d’État reçues.

81 AEV, Insieme, 3.1, PV de la séance du comité du 1 er décembre 1964.

82 AEV, 4150-8/693, OFAS, « Les conditions à observer par les écoles spéciales reconnues par

l’assurance-invalidité », note dactylographiée avec visa au 18.03.1964 ; « Convention portant

sur la participation des cantons à la reconnaissance et à la surveillance des écoles spéciales

dans l’assurance-invalidité », document dactylographié avec visa au 28.04.1964.

83 AEV, Insieme, 3.1, PV de la séance du comité du 14 janvier 1967.

84 Id., PV de la séance du comité du 9 février 1965.

85 AEV, La Bruyère, 47, lettre du 2 novembre 1967 au Chef du DIP signée par Simone

Reichenbach ; voir aussi dans le même dossier une lettre à la clinique dentaire scolaire de

Sion, du 1 er décembre 1967 donnant la répartition des classes à Sion : Une classe le lundi

après-midi, une le mardi de 9h à 15h, une le mercredi après-midi, une le mercredi matin et

une le mercredi après-midi.

86 Insieme, 3.1, PV de la séance du comité du 6 avril 1965.

87 Id., PV de la séance du comité du 19 avril 1966.

88 AEV, 4150-8/693, lettre de Marcel Gross à René Lovey en réponse à sa lettre, 29 novembre

1965 ; lettre de Marcel Gross à Wolfgang Loretan, du même jour ; réponse de W. Loretan à

M. Gross, 3 décembre 1965 lui assurant que cette question a toute son attention. Il précise

qu’une commission d’études, présidée par Marcel Gard, ancien Conseiller d’État et membre

du comité de patronage de l’Association de parents, est au travail avec intention de commencer

la construction en 1966. Il faudra toutefois attendre plus longtemps.

89 AEV, Insieme, 3.1, PV des séances du comité des 24 avril 1967 et 7 septembre 1967.

90 Composition de la commission : R. Perraudin, Chef du Service juridique au DJP, Dr P. Calpini,

Chef du Service de la santé publique, A. Chastonay, chef du Service de l’enseignement

primaire et ménager, Dr. J. Rey-Bellet, directeur de l’hôpital psychiatrique de Malévoz.

91 Voir notamment AEV, La Bruyère, 64, lettre du Dr Rey-Bellet à M me Reichenbach, 1 er octobre

1968.

92 AEV, 4150-8/693, rapport intitulé « Les problèmes de l’enfance déficiente », 25 octobre

1968, 51 p.

93 Id., p, 17-20.

94 AEV, La Bruyère, 43, PV de la séance de la commission de l’école du 26 juin 1970 ; AEV, La

Bruyère, 44, Présentation de l’école La Bruyère, Sion, juin 1973.

95 AEV, La Bruyère, 64, document « Projet pour une école à plein-temps et atelier pour handicapés

», AVPHM Région Sierre, mai 1968.

96 AEV, Insieme, 3.1, PV de la séance du comité du 7 septembre 1967.

97 Christiane Besson-Gloor, Les enfants du secret. Recherche sur la situation de 198 enfants et

adolescents mentalement handicapés du Valais romand, École d’études sociales et pédagogiques,

Lausanne, 1969.

98 Vingt-et-un élèves ont alors un QI compris entre 50 et 60 à l’école La Bruyère.

99 Christiane Besson-Gloor, op. cit., p. 19.

100 Id., pp. 26-27.

101 Id., pp. 56-58.

102 Id., pp. 66-68.

103 Main dans la main, n° 11, mai 1968, p. 8.

104 G. Favre, « Fernand Premand, applaudi à Paris », dans Le Nouvelliste, 20 juin 1968, p. 10.

105 AEV, Insieme, 3.1, PV de la séance du comité du 12 janvier 1968.

106 Main dans la main, n° 15, avril 1970.

107 Main dans la main, n° 12, nov. 1968, p. 7.

108 AEV, La Bruyère, 42, document manuscrit « Rapport annuel. école La Bruyère. Année

1968/69 ».

109 Une décision du Conseil d’État du 25 octobre 1968 donne toute compétence au Département

de l’instruction publique pour autoriser l’ouverture de nouvelles classes pour enfants handicapés

mentaux et pour fixer le traitement du personnel.

110 AEV, Insieme, 3.1, PV de la séance du comité du 26 juin 1968.

111 AEV, La Bruyère, 64, copie d’une lettre de Simone Reichenbach et René Lovey au chef du

DIP, 23 septembre 1968.

112 AEV, Insieme, 3.1, comité 20 mai 1968, du 26 juin 1968 et du 16 août 1968.

113 AEV, Insieme, 3.1, PV de la séance du comité du 1 er mars 1968.

114 AEV, La Bruyère, 42, PV de la commission de l’école du 8 février 1968, rapport sur une

rencontre organisée avec le Conseiller d’État Marcel Gross.

115 AEV, La Bruyère, 42, copie d’une lettre de Simone Reichenbach à Marcel Gross, chef du DIP,

18 juin 1968.

116 Voir notamment : AEV, La Bruyère, 42, Rapport annuel Année scolaire 1968/69, version

manuscrite de la main de Simone Reichenbach.

117 AEV, Insieme, 3.1, PV de la séance du comité du 27 mars 1968.

118 Claude Pahud (1924-2017) dirige entre 1953 et 1964 le Centre de formation d’éducateurs

pour l’enfance et l’adolescence inadaptées. Cette année-là, le Centre fusionne avec le Centre


142

d’assistantes sociales et d’éducatrices Fondation Curchod. L’École d’études sociales et pédagogiques

(EESP) – future Haute école de travail social et de la santé – est née.

119 AEV, Insieme, 3.1, PV de la séance du comité du 27 mars 1968.

120 PV commission école, 23 avril 1968 ; 3.1, comité, 16 août 1968.

121 Voir le dossier 4150-8/494, Didactique à l’école spéciale, 1967-1969

122 Main dans la main, mars 1978. Sur le Centre de formation pédagogique et sociale : CFPS,

20 ans, Centre de formation pédagogique et sociale, Cahiers du CFPS, 5, 1995.

123 AEV, La Bruyère, 43, document « État du personnel, novembre 1969 », copie d’une lettre de

Simone Reichenbach à l’OFAS, 27 novembre 1969.

124 AEV, La Bruyère, 64, Décision du DIP signée A. Zufferey, 3 septembre 1969.

125 D. Debons, op. cit., p. 30.

126 Id., p. 36.

127 AEV, La Bruyère, 42, Rapport annuel Année scolaire 1968/69, version manuscrite de la main

de Simone Reichenbach.

128 Témoignage de Marie-Françoise Tomasi, responsable de l’école de Monthey, transmis par

mail à Nathalie Rey, présidente d’Insieme, le 25 juin 2012.

129 AEV, La Bruyère, 42, copie d’une lettre de S. Reichenbach au chef du DIP, Marcel Gross, 18

juin 1968.

130 Documents conservés dans : AEV, La Bruyère, 42.

131 AEV, La Bruyère, 42, lettre de Simone Reichenbach à Marcel Gross, chef du DIP, 2 novembre

1967.

132 Main dans la main, 3, avril-mai 1964, p. 4.

133 Id., pp. 2-3.

134 AEV, Insieme, 3.1, PV de la séance du comité du 9 mars 1965.

135 Ordonné prêtre en 1935, l’abbé Henri Bissonnier (1911-2004) fut successivement aumônier

de branches handicapés dans des mouvements de jeunes, professeur d’orthopédagogie et

professeur à l’Institut catholique de Paris avec une chaire de catéchèse et pastorale des états

pathologiques et à l’Université catholique de Louvain de 1963 à 1981.

136 AEV, Insieme, 3.1, PV de la séance du comité du 9 mars 1965.

137 Main dans la main, n° 6, Juillet 1966, p. 2.

138 AEV, La Bruyère, 42, Rapport annuel Année scolaire 1968/69, version manuscrite de la main

de Simone Reichenbach.

139 AEV, Insieme, 5.4, document manuscrit signé M. Dayer, sans date, probablement 1974.

140 Motion de François Joseph Bagnoud déposée en 1971, développée le 15 novembre 1972 et

acceptée par le Grand Conseil et le Conseil d’État. En 1973, Cilette Cretton dépose une

question écrite concernant cette future législation. Afin d’élaborer une loi, le préposé aux

handicapés est chargé de faire un rapport. Une commission est ensuite réunie et un premier

avant-projet étudié en décembre 1975, puis une consultation des institutions intéressées

organisée en juin 1976. Notons aussi qu’une motion est déposée en 1977 pour l’élaboration

d’une loi sur l’enseignement spécialisé. Voir : Message accompagnant le projet de loi sur les

mesures en faveur des handicapés, BSGC, session prorogée de nov. 1977, p. 321.

141 Loi du 12 mai 1978 sur les mesures en faveur des handicapés, dans Recueil des lois, t. LXXII,

1979, pp. 147-152, art. 4.

142 Message accompagnant le projet de loi…, op. cit., p. 373

143 Voir notamment : AEV Bruyère, 110, Rapport annuel de l’école La Bruyère, 1975 ; interview

réalisée par Cristina Philippoz avec Cilette Cretton, 2022.

144 AEV, La Bruyère, 110, Rapport annuel 1979.

145 Dites aussi classes AI. En 1978, de telles classes existent à Viège, Sierre, Sion, Martigny et

Monthey (voir Message accompagnant le projet de loi sur les mesures en faveur des handicapés,

n o 12, dans BSGC, session prorogée de nov. 1977, p. 312.

146 Cilette Cretton quitte alors l’école La Bruyère pour prendre en charge une de ces classes.

147 AEV, Insieme, 2, PV de l’AG de 3 mai 1979

148 AEV, La Bruyère, 1, PV de séance du comité de direction du 29 octobre 1974 et du 26 mai

1975.

149 AEV, La Bruyère, 110, Rapport annuel 1975.

150 Id., PV de séance du comité de direction du 30 avril 1976 ; AEV, La Bruyère, 7, lettre de Anselme

Pannatier, chef du Service de l’enseignement primaire, à André Dupertuis, 13 avril 1976.

151 Main dans la main, n° 16, janvier 1972.

152 Les responsables nommées sont : Marie-Françoise Tomasi pour Monthey ; Cilette Cretton

pour Martigny ; Germaine Carron pour Sion ; Monique Frossard pour Sierre.

153 AEV, La Bruyère, 4, « Organisation des écoles et ateliers en faveur des handicapés mentaux »,

note manuscrite indique « décision du C.E. svp. 19.06.1972 » ; Id., « Organisation des écoles

et ateliers en faveur des handicapés mentaux », document à l’en-tête de la Fondation en

faveur des handicapés mentaux, copie non signée, adopté par le Conseil de Fondation dans

sa séance du 24 mai 1972 ; Id., compte-rendu de la séance constitutive du comité de direction,

22 août 1972, signé par Simone Reichenbach ; AEV, La Bruyère, 1, séance du comité

de direction du 12 octobre 1972.

154 Dans le Main dans la main de septembre 1973, Jules Délèze rassure les membres en expliquant

que le comité a veillé à être bien représenté au comité de direction avec trois membres

de l’Association et de la Fondation sur cinq.

155 AEV, Insieme, 3.1, PV de la séance du comité du 11 juillet 1972.

156 AEV, La Bruyère, 4, « Rapport concernant ‹ école La Bruyère › », document dactylographié,

signature manuscrite d’André Berclaz, mai 1972.

157 Main dans la main, n° 20, février 1973, p. 7.

158 AEV, La Bruyère, 57, « Convention entre l’État du Valais, d’une part, et la Fondation valaisanne

en faveur des handicapés mentaux, d’autre part », copie du document signé, 8 avril 1976.

159 AEV, Insieme, 3.1, PV de la séance du comité du 29 août 1979.

160 AEV, La Bruyère, 11, lettre aux parents des élèves, 6 août 1979.

161 Ibid.

162 Sous réserve, bien sûr, du respect des directives de l’AI.

163 Voir notamment AEV, Insieme, 3.1, PV de la séance du comité du 13 mai 1980 : les parents

ont posé un certain nombre de questions en lien avec le comité de direction de l’école lors

de l’Assemblée générale. Le comité de direction de l’école envisage de créer une commission

de parents avec un rôle consultatif. Durant toute cette période, on constate une certaine

difficulté de l’Association de parents à trouver sa place dans l’organisation école-comité de

direction. Élément clairement mentionné après la démission d’André Dupertuis, au moment

de repenser l’organisation (Id., PV de la séance du comité du 17 avril 1985)

164 Id., PV de la séance du comité du 24 novembre 1971. Les responsables de centre demandent

une révision du cahier des charges, car les tâches à réaliser sont trop importantes pour être

accomplies dans le temps d’école. Elles demandent des heures supplémentaires pour les

charges administratives. Le « système pyramidal » est remis en cause, mais pour le comité il

est indispensable, voire obligatoire. Les éducatrices doivent désormais tenir un plan de travail

individuel pour chaque élève (évaluation de départ, objectifs, cheminement) qui peut être

contrôlé par le comité (AEV, La Bruyère, 1, PV de séance du comité de direction du

5 décembre 1972).

165 Voir notamment : Id., PV de séance du 22 juin 1978, du 15 décembre 1978 et du 7 mai 1980.

AEV, La Bruyère, 4, note manuscrite « La Bruyère. Statut des éducatrices » ; AEV, La Bruyère,

8 et AEV, La Bruyère, 10, divers échanges concernant des difficultés entre certaines éducatrices

et la hiérarchie, entre 1976 et 1979. AEV, La Bruyère, 47, lettre d’André Dupertuis à

Anselme Pannatier, chef du Service de l’enseignement, 17 décembre 1979.

166 AEV, La Bruyère, 72, colloques centre de Sion, PV des séances du 17 et du 24 octobre ainsi

que du 14 novembre 1977.

167 AEV, Insieme, 8.1/1, Rapport « Construction du centre ‹ La Bruyère › – Sion (Champsec),

A. Dupertuis, 15 janvier 1973.

168 AEV, Insieme, 3.1, PV de séance du comité du 29 février 1972.

169 AEV, Insieme, 8.1/2.1, compte-rendu « Visite des classes de La Bruyère par MM Villet, OFAS

à Berne, et Berclaz, préposé aux handicapés, Département de l’instruction publique »,

A. Dupertuis, 27 novembre 1973.

170 AEV, La Bruyère, 42, PV de séance de la commission de l’école, 23 avril 1968.

171 AEV, La Bruyère, 43, PV de séance du comité de direction du 17 avril 1970.

172 AEV, Insieme, 8.1/2.2, Extrait du procès-verbal des décisions du Conseil d’État, 23 octobre

1974.

173 Id., PV de séance du comité du 14 septembre 1976.

174 AEV, La Bruyère, 110, Projet de rapport 1967 par M. Dupertuis, 11 mai 1977.


143

175 Voir notamment AEV, La Bruyère, 1, Rapport activité 1973 ; AEV, La Bruyère, 44, lettre au

Service de l’enseignement, 28 juin 1973.

176 AEV, La Bruyère, 1, PV de séance du comité de direction du 1 er octobre 1973.

177 Voir notamment AEV, La Bruyère, 4, lettre aux préposés aux handicapés mentaux des centres

La Castalie, La Bruyère, le centre de Glis, signatures manuscrites de 32 membres du personnel

éducatif de ces institutions, Monthey, 19 mai 1973 ; AEV, La Bruyère, 1, PV, Résumé

des discussions dans les centres sur la convention des éducatrices, 9 mai 1973 ; Id., PV de

séance du comité de direction du 18 mai 1973.

178 Les éducatrices ne sont notamment pas en accord avec ce statut. Voir AEV, La Bruyère, 44,

lettre d’André Dupertuis à Claude Pahud, directeur de l’EESP, pour lui demander des précisions

sur la formation d’éducatrice spécialisée et savoir si, la remarque des éducatrices, soit

que ces professionnels ne sont pas formés pour l’organisation et l’élaboration d’activités

structurées dans le cadre de classes, est justifiée, 24 avril 1973.

179 AEV, La Bruyère, 47, lettre d’André Dupertuis au Service de l’enseignement, 21 janvier 1977.

Dans le même dossier se trouve la même lettre mais manuscrite, signée par André Dupertuis,

son directeur adjoint et 17 membres du personnel éducatif.

180 Id., lettre d’Anselme Pannatier, chef du Service de l’enseignement, à la direction de l’école

La Bruyère,7 février 1977.

181 AEV, La Bruyère, 1, PV de séance du comité de direction du 21 février 1978.

182 AEV, La Bruyère, 4, lettre de l’inspecteur scolaire, M. Praplan, au DIP, 3 juillet 1972 ; AEV,

La Bruyère, 1, PV de séance du comité du 10 novembre 1980.

183 AEV, Insieme, 8.2, Rapport concernant l’Institut La Bruyère à Sion, signé par Marion

Salamin,19 juillet 1984, p. 3.

184 Id., p. 2.

185 Voir notamment AEV, La Bruyère, 1, PV de séance du comité de direction du 10 novembre

1980 ; AEV, La Bruyère, 110, Rapport annuel 1979, divers documents dans AEV, La Bruyère,

47.

186 AEV, La Bruyère, 1, PV de séance du comité de direction du 10 novembre 1980. Sur le « Bilan

des savoir-faire », voir entre autres AEV, La Bruyère, 110, Rapport annuel 1981 et document

« Projet de rapport annuel et de rapport de direction », 1984, p. 7.

187 AEV, La Bruyère, 110, Rapport annuel 1986, p. 9.

188 AEV, La Bruyère, 1, correspondance, comité de direction, 18 juin 1973.

189 Id., Correspondances, Allocution prononcée à l’AG de l’AVPHM, 23 mars 1973, non signée

[sans doute A. Dupertuis].

190 AEV, Insieme, 3.1., PV de la séance du comité du 11 juillet 1972.

191 Id., PV de la séance du comité du 21 novembre 1975.

192 Id., PV de la séance du comité du 17 février 1977.

193 Id., PV du comité des 3 juin et 14 septembre 1976, 17 octobre 1977.

194 AEV, La Bruyère, 1, PV de séance du comité de direction du 5 décembre 1972.

195 AEV, Insieme, 2, PV de l’AG du 9 mai 1985.

196 AEV, Insieme, 5.4, PV de séance du comité de direction du 28 août 1984.

197 Le SEI vaudois a été créé en 1960 (voir le site web de la Fondation Verdeil, qui s’en charge

(https ://www.verdeil.ch/presentation/historique/, consulté le 22 juillet 2022). À la fin des

années 1970, tous les cantons romands disposent d’un tel service.

198 AEV, La Bruyère, 42, Rapport annuel Année scolaire 1968/69, version manuscrite de la main

de Simone Reichenbach ; AEV, La Bruyère, 67, « Les pré-scolaires », note avec visa d’André

Dupertuis, 14 octobre 1976.

199 Main dans la main, n° 16, janvier 1972.

200 AEV, La Bruyère, 57, « SEI du Valais romand », document établi par les pédagogues du SEI,

septembre 1982.

201 AEV, La Bruyère, 110, Rapport annuel de l’école La Bruyère 1984.

202 Voir notammentAEV, La Bruyère, 57, « SEI du Valais romand », document établi par les cent

douze pédagogues du SEI, septembre 1982.

203 AEV, La Bruyère, 110, Rapport annuel de l’école La Bruyère, 1985.

204 AEV, La Bruyère, 110, Rapport annuel de l’école La Bruyère, 1978.

205 AEV, La Bruyère, 110, Rapport annuel de l’école La Bruyère, 1979.

206 Main dans la main, n° 23, décembre 1973, p. 2.

207 Le décret sur l’enseignement spécialisé de 1986 (voir ci-après pp. 91-92) confirme également

cette prolongation de l’âge de scolarité pour les personnes en situation de handicap à

son art.30 (jusqu’à 20 ans révolus).

208 AEV, La Bruyère, 14, « Critères pour le maintien des élèves La Bruyère entre 18 et 20 ans »,

21 septembre 1982.

209 Id., correspondances, Rapport d’activité 1973.

210 D. Debons, op. cit., pp. 113-117.

211 AEV, La Bruyère, 2, PV de séance du comité de direction du 14 octobre 1987. Une seconde

structure est prévue à Martigny, mais c’est finalement au home-atelier Pierre-à-Voir à Saxon

qu’elle ouvre ses portes en 1995 où il reste jusqu’en 2002. Quant au centre de Sion, après

une période à la rue Pré-Fleuri, il est désormais installé dans des locaux au sud de la gare.

Voir : D. Debons, op. cit., p. 116.

212 AEV, La Bruyère, 2, PV de séance du comité de direction du 18 septembre 1986.

213 AEV, La Bruyère, 110, Rapport annuel de l’école La Bruyère, 1986.

214 AEV, Insieme, 3.1, PV des séances du comité des 15 mai 1979 et 19 juin 1979.

215 voir L’Éducateur, novembre 1973.

216 Éditorial de Simone Reichenbach, L’École valaisanne, octobre 1975.

217 L’École valaisanne, octobre 1975, pp. 13-16.

218 AEV, Insieme, 8, « Exposé aux membres de la commission d’étude : Déficients mentaux

légers-déficients auditifs », Jean-Claude Berthod, 21 janvier 1976, p. 1-2.

219 AEV, Insieme, 3.1, PV de la séance du comité du, 16 juin 1980 ; Id., 7.2/4, « Présentation

dans les cycles d’orientation 1980-81 », document dactylographié non signé non daté.

220 AEV, La Bruyère, 110, Rapport annuel de l’école La Bruyère, 1981.

221 « Handicapés… Action école… », dans L’École valaisanne, n° 4 (nov. 1984), p. 15.

222 Pour un rapide résumé historique de cette intégration italienne, voir notamment Olivia Cattan,

Roberto Strizzi, « L’inclusion scolaire à l’italienne », dans Le magazine de la différence, en

ligne : https ://lemagazinedeladifference.com/linclusion-scolaire-a-litalienne/ (consulté le 27

juin 2022) ; pour aller plus loin, voir aussi : Anna de Lucia, Barbara Walter, Yves Jeanne, « Les

processus d’intégration scolaire en Italie et la formation des enseignants » dans Reliance,

2088/1, pp. 111-120, en ligne : https ://www.cairn.info/revue-reliance-2008-1-page-111.htm

(consulté le 27 juin 2022).

223 AEV, La Bruyère, 2, PV de séance du comité de direction du 26 janvier 1988.

224 AEV, La Bruyère, 110, Rapport annuel 1980.

225 AEV, La Bruyère, 14, Commission « Réorganisation des classes d’adaptation », séance du 21

octobre 1982.

226 AEV, La Bruyère, 72, PV des colloques du 11 janvier et du 18 janvier 1983.

227 AEV, Insieme, 3.1, PV de séance du comité du 13 juillet 1982. Discussion sur l’avant-projet

de loi scolaire.

228 Voir notamment Id., PV de séance du comité du 12 novembre 1986.

229 AEV, Insieme, 5.4, « Thème de l’intégration », note dactylographiée signée Simone

Reichenbach, 14 novembre 1986.

230 AEV, La Bruyère, 14, PV de séance de commission du 21 octobre 1984.

231 AEV, La Bruyère, 100, Rapport annuel école La Bruyère, 1984.

232 AEV, Insieme, 3.1, PV des séances du comité du 25 février 1987 et du 3 juin 1987. La crainte

de voir les enfants « éducables » et non « scolarisables » mis à l’écart de la législation et des

mesures de soutien étatiques n’est pas nouvelle. En 1970, par exemple, des modifications

sont apportées au texte de la Loi sur l’assurance-invalidité afin que cette catégorie puisse

continuer à bénéfitcier des mesures d’éducation liées. Jusqu’alors la pratique administrative

les prenait en compte, mais des décisions du tribunal fédéral des assurances les excluant

pouvaient faire jurisprudence. Voir : Message du Conseil fédéral à l’attention de l’Assemblée

fédérale à l’appui d’un projet de loi modifiant la Loi sur l’assurance-invalidité, du 4 février

1970, dans : Feuille fédérale, vol. 1, 1970, pp. 173-177.

234 AEV, Insieme, 5.4, lettre de Philippe Theytaz à l’AVPHM, 17 décembre 1984.

235 Philippe Theytaz, « L’enseignement spécialisé dans le canton du Valais », dans L’enseignement

spécialisé en Suisse romande. Une vue d’ensemble rédigée par les responsables cantonaux

de l’enseignement spécialisé, coll. Aspekte – Aspects, 22, 1986, pp. 43-48, citation en p.

48.


144

235 AEV, Insieme, 3.1., PV des séances du comité du 25 novembre et du 18 décembre 1987.

236 Décret du 25 juin 1986 sur l’enseignement spécialisé, dans : Recueil des lois, t. LXXX, 1987,

pp. 76-82. Ce paragraphe se base également sur le règlement d’exécution de ce décret

adopté le 25 février 1987.

237 Décret sur l’enseignement spécialisé, 25 juin 1986, art. 2.

238 Ibid. ; Règlement d’exécution du 25 février 1987, dans : Recueil des lois, t. LXXXI, 1988,

p. 231-236.

239 À noter toutefois que les élèves de ces classes peuvent être également intégrés après cette

période « d’observation » à une classe d’adaptation ou même à un institut spécialisé. Voir

notamment l’étude menée par l’Office de l’enseignement spécialisé : Les classes d’observation

dans le Bas-Valais, juin 1991.

240 Id., art. 11 et 18 et suivants. L’Office de l’enseignement spécialisé a produit divers documents

faisant la synthèse de ces mesures : Ph. Theytaz, « L’enseignement spécialisé dans le canton du

Valais », op.cit. ; Office de l’enseignement spécialisé, Typologie des services à disposition des

enfants ayant des besoins spéciaux, sans date [1989] ; Office de l’enseignement spécialisé,

L’enseignement spécialisé en Valais. Cadre général, 1991. Celui qui apporte peut-être le plus de

clarté, avec notamment des schémas explicatifs, est le dossier « Enseignement spécial » paru

dans Résonances, n° 2, octobre 1989. Le dossier présente également l’école La Bruyère, La

Castalie, l’Institut Notre-Dame de Lourdes. Cette même année, dans d’autres numéros,

paraissent des dossiers sur l’Institut Sainte-Agnès (déc. 1989) et sur l’Institut Saint-Raphaël (nov.

1989). Ces dossiers offrent une bonne vue d’ensemble de l’enseignement spécialisé à cette

période charnière. Tous les numéros sont consultables en ligne sur www.resonances-vs.ch.

241 BSGC, session prorogée de mai 1986 (1 re partie juin 1986), en part. pp. 211, 223, 235.

242 BSGC, session prorogée de mai 1986, op. cit., p. 208.

243 Id., p. 249.

244 Id., p. 250

245 AEV, La Bruyère, 2, PV de séance du comité de direction du 22 janvier 1987, retour sur une

séance qui a eu lieu à ce sujet avec le chef du DIP, Bernard Comby ; AEV, La Bruyère, 107,

notamment Rapport sur la situation financière suite à la fermeture de l’école La Bruyère,

1984-1991 ; AEV, La Bruyère, 107, Extrait des procès-verbaux des séances du Conseil d’État,

séance du 18 janvier 1989. Selon toute vraisemblance, le Conseil d’État a finalement « effacé

l’ardoise » de la Fondation en lien avec l’école La Bruyère.

246 Ibid.

247 AEV, Insieme, 8.2, Décision du Département de l’instruction publique du 6 janvier 1987 ; Id.,

lettre du DIP à l’Association valaisanne de parents d’enfants mentalement handicapés,

13 janvier 1987.

248 AEV, La Bruyère, 111, PV de séance du groupe de travail « La Bruyère » du 23 mars 1987.

249 Ibid. ; AEV, La Bruyère, 111, PV de séance du groupe de travail « La Bruyère » du 27 avril

1987.

250 Id., Lettre du personnel de La Bruyère à son directeur, 26 juin 1987.

251 Id., PV de séance du groupe de travail « La Bruyère » du 10 août 1987 ; AEV, La Bruyère, 57,

Convention État du Valais/Bruyère, séance du lundi 28 septembre 1987, « Inventaire des

propositions à soumettre à l’État du Valais et à la Fondation », document interne au groupe

de travail, signé Daniel Moulin, 22 septembre 1987.

252 AEV, La Bruyère, 2, lettre du personnel pédago-thérapeutique de l’école au comité de direction,

13 avril 1987. Voir aussi AEV, La Bruyère, 112, lettre du personnel de La Bruyère Sion,

à Philippe Theytaz, 23 novembre 1987.

253 AEV, La Bruyère, 2, lettre du personnel pédago-thérapeutique de l’école au comité de direction,

13 avril 1987 ; Id., lettre d’Arlette Darbellay, représentante des parents au comité de

direction, à Daniel Moulin, 18 octobre 1987 ; Id., lettre de Laurent Torrent, membre du comité

de direction, 21 octobre 1987 ; Id., lettre de Lisette Bétrisey, 25 octobre 1987,

254 AEV, Insieme, 8.2, « école La Bruyère – Propositions », tableau avec les sept propositions,

daté d’octobre 1987 ; Id., document « Proposition du personnel », 19 octobre 1987.

255 AEV, Insieme, 8.2, lettre du DIP « aux personnes et organismes concernés par l’avenir de

l’école La Bruyère, 9 décembre 1987.

256 Id., lettre du DIP « aux personnes et organismes concernés par l’avenir de l’école La

Bruyère», 9 décembre 1987.

257 AEV, La Bruyère, 2, PV des séances du comité de direction des 26 janvier 1988 et 12 avril

1988.

258 AEV, Insieme, 2, PV de l’AG du 27 mai 1988.

259 AEV, La Bruyère, 79, Étude d’une marche à suivre pour réaliser les dernières volontés de

feue Mlle Louise-Anna Tornay à Martigny, signé Edouard Morand, 7 février 1984.

260 AEV, La Bruyère, 1, PV, copie de lettre de la Fondation L.-A. Tornay, par Simone Reichenbach,

à André Dupertuis, 25 juin 1975.

261 Pour suivre l’évolution des démarches en lien avec cette construction depuis 1983, voir :

AEV, La Bruyère, dossiers 78 à 81.

262 AEV, La Bruyère, 2, PV de séance du comité de direction du 27 mars 1987 ; Id., 14 octobre

1987. « L’école La Bruyère passe du privé au public. Un virage à négocier », Le Nouvelliste,

13 juillet 1989, p. 26.

263 AEV, La Bruyère, 70, PV du colloque du 21 octobre 1987. Le décret pour l’octroi de subventions

pour la construction de locaux scolaires à Martigny, du 17 mai 1988, mentionne qu’elle

doit accueillir les classes primaires, les classes AI et les classes de l’école La Bruyère.

264 AEV, La Bruyère, 78, Notes relatives à la séance du 16.06.1987 à l’OFAS/Berne, signées

Daniel Moulin.

265 Voir notamment Id., Décision du Département de l’instruction publique, 8 juin 1988 ; Id.,

lettre de Simone Reichenbach à Philippe Theytaz, 25 novembre 1987.

266 AEV, Insieme, 8.2, Décision du Conseil d’État du 8 juin 1988.

267 Voir notamment AEV, La Bruyère, 3, lettre signée « Le centre de Martigny », 10 octobre 1987 ;

AEV, La Bruyère, 112, lettre du personnel de La Bruyère Sion à Philippe Theytaz, 23

novembre 1987.

268 AE, Insieme, 8.2, lettre de l’Association de parents à Philippe Theytaz, 30 septembre 1988.

269 AEV, Insieme, 8.2, Projet de convention entre l’État du Valais et la Commune de Martigny,

version annotée, 12 décembre 1988.

270 Les desiderata de la Fondation et de l’Association de parents sont pris en compte dans la

version finale de la convention, à l’exception d’une demande d’y inscrire l’admission des

jeunes handicapés jusqu’à l’âge de 2 ans pour tenir compte de leur retard par rapport aux

élèves sans déficience mentale un rehaussement de l’âge à 20 ans pour les enfants handicapés.

L’Office de l’enseignement spécialisé ne remet pas en question cette demande. AEV,

La Bruyère, 57, copie signée de la Convention entre l’État du Valais et la Commune de

Martigny, 11 mai 1989.

271 AEV, Insieme, 8.2, Lettre de la Fondation à Philippe Theytaz, 13 juillet 1988.

272 Voir entre autres : AEV, Insieme, 4.10/2, correspondance avec les membres ; AEV, La

Bruyère, 70, colloque du 25 novembre 1987.

273 AEV, La Bruyère, 2, Lettre de l’école La Bruyère à Jean-Pierre Cretton, 8 septembre 1989.

274 AEV, La Bruyère, 111, « Projet de convention État du Valais/Commune de Sion. Remarques

du personnel (enseignants, éducateurs, spécialistes) », 23 janvier 1990.

275 AEV, La Bruyère, 57, Copie signée de la convention État du Valais-Commune de Sion, 20 mai

1990.

276 AEV, La Bruyère, 57, document « Notes à l’attention des représentants de la Fondation à la

séance du 14 février 1989 », émis par l’école La Bruyère, 20 février 1989.

277 AEV, La Bruyère, 110, Rapport annuel 1987.

278 AEV, La Bruyère, 2, PV de séance du comité de direction du 23 janvier 1986.

279 Le coût des visites est problématique depuis plusieurs années. Voir : AEV, La Bruyère, 110,

Rapport annuel de l’école La Bruyère, 1981. En 1980, il s’élève à 143,35 francs par visite.

280 Id., PV de séance du comité de direction du 9 octobre 1986 ; AEV, La Bruyère, 57, « Objet

de la rencontre avec M. Bernard Comby, chef du DIP », signé par le directeur de l’école La

Bruyère, Daniel Moulin, 18 novembre 1986. Le document explique les modifications que

l’école souhaite faire dans l’organisation du SEI et demande au DIP si, sous réserve de la

Convention État/Fondation, il soutient cette démarche.

281 Voir notamment AEV, La Bruyère, 57, « Considérations complémentaires relatives aux

attentes de la Fondation concernant le SEI », signé Moulin, 27 mai 1987 ; Id., « Séance du

25 octobre 1988 concernant l’avenir de l’école « La Bruyère » et du Service éducatif itinérant

(SEI) », PV établi par la Fondation en complément du résumé envoyé par Philippe Theytaz

en date du 27 octobre 1988, 11 novembre 1988, p. 3. La Fondation souhaiterait que le


145

personnel accède à un statut proche de celui d’éducateur en externat alors que le personnel

du SEI se considère avant tout comme des enseignants spécialisés préparant les enfants à

la scolarité. Voir aussi : AEV, La Bruyère, 67, « Rapport concernant le travail en service itinérant

», signé par les éducatrices, 28 novembre 1980 ; Id., PV du colloque SEI du 21 novembre

1986 ; Id., PV du colloque SEI du 15 mai 1987 ; AEV, La Bruyère, 111, PV de la rencontre du

4 septembre 1987 entre le groupe de travail « école La Bruyère » et les pédagogues du SEI.

282 AEV, La Bruyère, 67, « SEI valaisan. Situation au 31 mars 1987 », p. 2.

283 AEV, La Bruyère, 57, Séance du 25 octobre 1988 concernant l’avenir de l’école « La Bruyère »

et du Service éducatif itinérant (SEI), PV établi par la Fondation en complément du résumé

envoyé par Philippe Theytaz en date du 27 octobre 1988, 11 novembre 1988, p. 3.

284 AEV, La Bruyère, 67, « Rapport concernant le travail en service itinérant », signé par les

éducatrices, 28 novembre 1980.

285 Id., lettre des éducatrices du SEI au comité de direction de l’école La Bruyère, 11 février

1985. Id., PV du colloque du SEI du 21 novembre 1986. AEV, La Bruyère, 2, « Avantages et

désavantages du rattachement du SEI à l’école La Bruyère », signé Sylvia Schouwey,

29 octobre 1986. AEV, La Bruyère, 57, « Notes tirées de documents internes à La Bruyère »,

confidentiel, signé Daniel Moulin, 12 février 1987.

286 AEV, La Bruyère, 110, Rapport annuel de l’école La Bruyère, 1988 ; AEV, La Bruyère, 2, PV

de la séance du 10 novembre 1988.

287 Voir notamment l’argumentaire des pédagogues du SEI dans le « dossier d’information

concernant le SEI du Valais romand » transmis au comité de direction, juin 1986 (AEV, La

Bruyère, 57).

288 AEV, La Bruyère, 67, lettre de l’école La Bruyère au chef du DIP, Bernard Comby, 17 avril

1989.

289 Id., « Service éducatif itinérant. Principes d’organisation 1989 », document émis par l’école

La Bruyère, signé par le président du comité de direction et par le directeur de l’école,

11 avril 1989.

1 Entretien mené avec Michel Abbet, 2021. Les citations suivantes sont tirées du même

entretien.

2 Voir ci-devant, pp. 98-99.

3 Entretien mené avec Jean-Pierre Cretton, directeur des écoles de Martigny de 1970 à 2004,

2022.

4 Ibid.

5 Entretien mené avec Michel Abbet, op. cit.

6 Dossier «Handicap et intégration», dans Résonances, n° 2, octobre 1994, pp. 3-19.

7 Voir ci-devant p. 73.

8 Dossier «Handicap et intégration», dans Résonances, n° 2, octobre 1994, pp. 3-19.

9 Voir ci-devant pp. 91-92.

10 Entretien mené avec Michel Délitroz, 2022.

11 Ibid.

12 Ibid.

13 Ibid.; «Convention pour la scolarisation des élèves relevant des mesures scolaires spéciales

au sens de l’Assurance-Invalidité», Région de Sierre, signée le 23 août 2004 entre l’État du

Valais et la Commune. Le 6 septembre, une convention similaire est signée avec la Commune

de Sion, puis le 9 septembre avec Monthey et le 22 septembre avec Martigny; Accord

régional pour la scolarisation des élèves relevant des mesures scolaires spéciales de l’assurance

invalidité, signé par la Commune de Sierre et les quatorze communes desservies, entre

le 23 et le 24 août 2004. Documents communiqués par Guy Dayer, chef de l’Office de l’enseignement

spécialisé.

14 Ibid.

15 Témoignage de Dominique Savioz, 2022.

16 Entretien avec Michel Délitroz, 2022.

17 https://www.csps.ch/themes/pes (consulté le 22 juillet 2022).

18 Entretien avec Guy Dayer, 2022.

19 Ibid.

20 Ibid.

21 Sur ce projet, voir notamment: Yves Terrani, «Handi-Ski 2000 lance une action socioéducative

destinée aux enfants», Le Temps, 30 septembre 1999.

22 http://www.insieme-faitlaclasse.ch/description-du-projet (consulté le 22 juillet 2022).

23 Entretien mené avec Grégoire Jirillo, 2022.

24 Entretien mené avec Nathalie Rey, 2022.

25 Ibid.

26 Entretien mené avec Jean-Marc Dupont, 2021.

27 «La Castalie s’installe à Sierre», Le Nouvelliste, 26 mars 2010.

28 Entretien mené avec Nathalie Rey, 2021.

29 Modification de la Loi sur les droits et l’inclusion des personnes en situation de handicap,

session de mai 2021, en ligne sur le site du Parlement valaisan: www.parlement.vs.ch

(consulté le 15 août 2022).

30 https://vs.recapp.ch/viewer/detail/_?uid=60916abc51583e09080558b1

(consulté le 15 août 2022).

31 Révision de l’article 73 de la Loi sur l’assurance-invalidité.

32 Éditorial de Nathalie Rey-Cordonier, dans Main dans la main, octobre 2004.

33 Ibid.

34 Document «Les représentants des organisations à la séance du 22 février 2006», disponible

en ligne: http://www.insieme-vs.ch/rpt/doc/assocaitionCi.pdf (consulté le 22 juillet 2022).

35 Entretien mené avec Nathalie Rey, 2022.

36 Ibid.

37 Les archives d’Insieme montrent que l’Association de parents ou la Fondation en faveur des

handicapés mentaux ont à plusieurs reprises mentionné ce problème. La commission RISC

(Rôles des institutions scolaires), active au tournant des années 2000, l’a relevé

également.

38 Entretien mené avec Nathalie Rey, 2022.

39 L’avant-projet de décret mis en consultation mentionne à son article 32 que «la subvention

n’excède pas en principe 80% du déficit». La Communauté d’intérêts mise en œuvre RPT

prend position en mars 2007 et se prononce contre cette règle. «Communication très importante»,

circulaire aux parents, frères et sœurs d’Insieme Valais romand, août 2007, disponible

en ligne: www.insieme-vs.ch (consulté le 22 juillet 2022).

40 Bulletin des séances du Grand Conseil, septembre 2007, disponible en ligne sur le site

www.parlement.vs.ch, onglet Documents (consulté le 22 juillet 2022).

41 À partir de cette date, les institutions signent avec l’Etat des mandats de prestations. Dès

lors, la limite du 80% de déficit n’est plus applicable. Cette règle est encore plus clairement

formulée depuis la révision de la Loi cantonale de 1991: Loi sur les droits et l’inclusion des

personnes en situation de handicap, 6 mai 2021, art. 32 al. 3 et 4, disponible en ligne sur

www.lex.vs.ch (consulté le 15 août 2022).

42 Voir ci-devant p. 31.

43 Entretien mené avec Nathalie Rey, 2022.

44 Entretien mené avec Lucienne Darbellay Fumeaux, 2022.

45 Ibid.

46 Ibid.

47 Entretien mené avec Nathalie Rey, 2022.

48 Ibid.


146

LISTE DES ABRÉVIATIONS ET ACRONYMES

AI

ASA

ARTES

AVIEA

AVS

CFJA

DIP

EESP

FOVAHM

ORIPH

OFAS

SEI

SMPV

Assurance-invalidité

À sa fondation, Association suisse en faveur des arriérés.

Devient en 1976 l’Association suisse d’aide aux handicapés mentaux

Association romande des travailleurs de l’éducation spécialisée

À sa fondation, Association valaisanne en faveur des enfants et adolescents en difficulté,

puis Association valaisanne des institutions en faveur des enfants, adolescents et adultes en difficulté.

Aujourd’hui, Association valaisanne des institutions en faveur des personnes en difficulté (AVIP)

Assurance vieillesse et survivants

Centre de formation pour jeunes adultes

Département de l’instruction publique

École d’études sociales et pédagogiques

Fondation valaisanne en faveur des personnes handicapées mentales.

Aujourd’hui, Fondation valaisanne en faveur des personnes avec une déficience intellectuelle

Organisation romande pour l’intégration des personnes handicapées, aujourd’hui Orif

Office fédéral des assurances sociales

Service éducatif itinérant

Service médico-pédagogique valaisan


147

ILLUSTRATIONS ET CODES QR

Références, crédits photographiques

Page 14 – Jullien frères, Phot. Editeurs, Genève. Coll. P. M. Epiney

Page 17 – Cote: AEV, 4150-8/679 – Photo: AEV

Page 19 – Cote: AEV, 4150-8/687 – Photo: Michel Martinez

Page 21 – Cote: AEV 4150-8/692 – Photo: AEV

Pages 26, 66 – © Philippe Schmid, Médiathèque Valais - Martigny

Page 28 – Cote: AVE, Fonds Insieme, 1.2/1.1 – Photo: AEV

Pages 40, 45 – Cote: Médiathèque Valais – Sion, PB 2584 – Photo: MV – Sion

Page 48 – Cote: Médiathèque Valais – Sion, Ba84 – Photo: MV – Sion

Page 50 – Photo Robert Hofer, 2020, État du Valais, Archives SIP-Patrimoine

Pages 52, 53, 70 (dr.), 75 – © Treize Etoiles, Médiathèque Valais – Martigny

Page 69 – Cote: AEV, La Bruyère, 1 – Photo: AEV

Page 72 – Archives de la Ville de Sion

Page 79 – Archives photographiques de la FOVAHM

Page 82 – Archives du mensuel L’École valaisanne, en ligne: www.resonances-vs.ch

Page 89 – Cote: AEV, La Bruyère, 14 – Photo: AEV

Page 103 – Cote: AEV, Insieme 8.2/1 – Photo: Michel Martinez

Pages 106, 110, 113, 119, 123, 124, 130, 131, 135 (g.) – © Raphaël Fiorina

Page 117 – Olivier Maire/Studio54 Sion

Page 132 – Cote: AEV, Insieme, 10.21 – Photo: AEV

Pages 31, 33, 36, 59, 62, 65, 70 (g.),

73, 86, 93, 97, 100, 121, 128, 133, 134, 135 (dr.) – Archives photographiques Insieme Valais romand

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Liens consultés le 1 er septembre 2022

Page 11 – www.insieme-vs.ch/livre

Pages 52, 111 – www.insieme-vs.ch/livre/portrait1

Page 57 – www.youtube.com/watch?v=XHr8GwNyukE

Pages 63, 91 – www.insieme-vs.ch/livre/portrait3

Page 80, haut – www.insieme-vs.ch/livre/portrait5

Page 80, bas – www.youtube.com/watch?v=X7eCuPEFjY0

Page 107 – www.insieme-vs.ch/livre/portrait4

Page 126 – www.insieme-vs.ch/livre/portrait6


148

REMERCIEMENTS

≥ Nous remercions chaleureusement toutes les personnes sans qui ce livre n’aurait pas

pu exister. Chacune a apporté sa pierre à l’édifice et nous leur en sommes sincèrement

reconnaissantes :

• En premier lieu, Nathalie Rey, présidente d’Insieme Valais romand, et Jean-Marc

Dupont, ancien directeur de la FOVAHM, qui ont imaginé ce projet et s’en sont fait les

promoteurs. Merci pour leur confiance, pour l’agréable collaboration que nous avons

eue, pour leurs relectures attentives et leur souci de la qualité ;

• Le comité d’Insieme Valais romand qui a approuvé et suivi le projet ;

• Les personnes qui se sont prêtées au jeu de l’entretien, devant caméra ou non :

Michel Abbet, Laurence et Olivier Buchard, Rachel et Myriam Carraux, Emmanuel

Chevrier, Cilette Cretton, Jean-Pierre Cretton, Lucienne Darbellay Fumeaux, Guy Dayer,

Michel Délitroz, Juliane Dolt, Jean-Marc Dupont, Anne-Marie Mayor, Nathalie Rey,

Isabelle et Dimitri Tacchini ;

• Les Archives de l’État du Valais, les Archives de la Ville de Sion, la Médiathèque Valais

– Sion, la Médiathèque Valais – Martigny et leurs collaboratrices et collaborateurs pour

leur accueil, leurs conseils et leur disponibilité ;

• Anne Bourban et Olivier Dami pour leurs relectures ;

• Cilette Cretton pour avoir réalisé un pré-tri des archives d’Insieme Valais romand et

établi une chronologie historique sur cette base ;

• Toutes les institutions qui ont soutenu ce projet et les personnes et institutions qui y

ont participé de près ou de loin.


149

TABLE DES MATIÈRES

Préface . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 005

Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 009

La situation des enfants

handicapés mentaux avant 1960 . . . . . . . . . 013

Les premières actions pour l’éducation

des enfants anormaux en Valais . . . . . . . . . . . . . . 015

Le tournant des années 1960 :

un autre regard sur le handicap . . . . . . . . . . . . . . 022

L’Association valaisanne de parents

d’enfants mentalement déficients . . . . . . . . 025

17 décembre 1962 : Assemblée constitutive . . . . . . . 027

Une première année riche en projets . . . . . . . . . . . 031

ÉCLAIRAGE

Proposer des temps de vacances . . . . . . . . . . . . . . . 032

PAROLES D’ARCHIVES

Nicole Lachat témoigne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 030

PAROLES D’ARCHIVES

Le travail des éducatrices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 054

Placer son enfant, une source de souffrance . . . . . . . . 055

Le cadre pédagogique de l’école . . . . . . . . . . . . . . . 056

La famille, gage d’épanouissement . . . . . . . . . . . . . . 057

Entre renforcement institutionnel

et remise en question . . . . . . . . . . . . . . . . . 061

Un contexte en mutation . . . . . . . . . . . . . . . . . . 063

Restructurer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 068

Professionnaliser . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 074

Garder le contact . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 076

Développer des structures pour chaque âge . . . . . . . . 078

ÉCLAIRAGE

Un grand projet : la construction de l’école de Champsec 072

Sensibiliser les élèves des classes traditionnelles . . . . . . 082

PAROLES D’ARCHIVES

Hommages à Simone Reichenbach . . . . . . . . . . . . . 066

Témoignage d’une maman . . . . . . . . . . . . . . . . . . 081

De l’école itinérante à l’école La Bruyère . . . 035

Une base légale : la loi scolaire de 1962 . . . . . . . . . 037

Reconnaissance provisoire par l’État . . . . . . . . . . . . 037

L’école itinérante : une année test . . . . . . . . . . . . . 038

Un soutien confirmé du Conseil d’État . . . . . . . . . . 039

La hausse des effectifs : un défi à relever . . . . . . . . . 041

La commission cantonale sur l’enfance déficiente . . . . 043

« Les enfants du secret » : enquête

sur les enfants éducables sur le plan pratique . . . . . . 046

L’école La Bruyère . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 049

L’intégration à tout prix . . . . . . . . . . . . . . . . 085

Pour une intégration nuancée . . . . . . . . . . . . . . . 088

Le décret sur l’enseignement spécialisé . . . . . . . . . . 091

Quel avenir pour La Bruyère ? . . . . . . . . . . . . . . . 092

Une remise en question en profondeur du SEI . . . . . . 102

PAROLES D’ARCHIVES

Un regard sur l’intégration . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101

ÉCLAIRAGE

Informer, rapprocher . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 048

L’éducation religieuse : un point d’inquiétude . . . . . . . . 058


150

Toujours engagée pour le vivre-ensemble.

L’Association de 1990 à nos jours . . . . . . . . 105

par Cristina Philippoz

Vers l’intégration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107

Sensibiliser au handicap . . . . . . . . . . . . . . . . . . 120

Améliorer l’offre dans le Valais central . . . . . . . . . . . 122

S’engager sur la scène politique : la RPT . . . . . . . . . 126

Les loisirs, nouvelle marque de fabrique . . . . . . . . . 129

Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 136

Présidence de l'Association de parents . . . . 139

Notes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 140

Abréviations et acronymes . . . . . . . . . . . . . 146

Illustrations et QRcodes :

Références et crédits . . . . . . . . . . . . . . . . . 147

Remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 148

ÉCLAIRAGE

D’autres expériences d’intégration . . . . . . . . . . . . . . 111

L’octroi des mesures renforcées aujourd’hui.

D’une logique de droit à une logique de besoins . . . . . . 114

Le contact avec les familles : un « indispensable » . . . . . 130

TÉMOIGNAGES

Un enfant, un parcours . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 116


SOUTIENS

FONDATION

LÉONARD GIANADDA

MÉCÉNAT

Logotype Bourgeoisie de Sion 2/2 (sponsoring)

Fondation

Paul & Marcelle Blondin

CMYK: 0/100/100/0 PANTONE 032 U PANTONE 1797 C

CMYK: 0/0/0/50

CMYK: 0/0/0/70

Le logotype est indissociable.

Fondation

Pierre-à-Voir

Fondation Denis et

Louise-Anna Tornay

Fondation

Gabriel Tschopp


Graphisme et mise en page : www.laligne.ch

Impression : Imprimerie Ronquoz Graphix, Sion

Papier : Couché demi-mat, 150 gm 2 , issu d’une gestion exemplaire des forêts

Dépôt légal : Octobre 2022


≥ Cet ouvrage, publié à l’occasion des 60 ans d’Insieme Valais romand,

met en lumière l’engagement des parents pour offrir aux personnes avec

une déficience intellectuelle une meilleure qualité de vie et un accès à l’éducation,

au travail et aux loisirs. Ce livre vient compléter celui publié en 2010

à l’occasion des 40 ans de la FOVAHM et qui, à travers l’histoire de cette

dernière, retraçait les actions menées pour les adultes. Il s’attache dès lors

principalement aux actions menées en faveur des enfants, et en particulier

de leur accès à l’éducation. De la création de l’école itinérante en 1963

à l’intégration scolaire aujourd’hui, il éclaire les origines d’une démarche qui

a fait du Valais un exemple pour toute la Suisse.

Faire l’histoire d’Insieme Valais romand, c’est également donner la parole à des personnes qui

ont participé à l’écrire. Pour enrichir et compléter le livre, des vidéos ont été produites. Elles

offrent un regard « de cœur » sur le parcours de personnes en situation de handicap et sur

celui de femmes et d’hommes qui ont participé à la vie de l’association.

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