Le Festival au quotidien - Verbier Festival
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samedi 28 juillet 2012<br />
<strong>au</strong> programme <strong>au</strong>jourd’hui<br />
tchaïkovski le mozartien<br />
La musique russe occidentale est une invention<br />
relativement récente. Son essor <strong>au</strong> cours<br />
du 19 e siècle apparaît d’<strong>au</strong>tant plus remarquable<br />
que les institutions manquaient cruellement<br />
dans les deux grandes métropoles du<br />
pays. Malgré la création en 1802 de la Société<br />
Philharmonique de Saint-Pétersbourg, ce ne<br />
fut qu’avec la création du Conservatoire de<br />
Saint-Pétersbourg en 1862, que la musique<br />
s’engagea sur une vraie reconnaissance du<br />
statut de musicien <strong>au</strong> sein de la société russe.<br />
Cette évolution suit en réalité les bouleversements<br />
profonds que la Russie connut à la<br />
suite du règne de Catherine II. D’une société<br />
rurale et féodale, le pays s’urbanisa très<br />
rapidement et s’ouvrit en quelques années à<br />
l’Europe et à ses arts. Comme pour une bonne<br />
partie de l’Europe, l’influence des grands classiques<br />
viennois s’avérait écrasant, avec toutefois<br />
une vision de leur œuvre partiellement<br />
idéalisée. Parallèlement, un fort sentiment<br />
russe naissait consécutivement à l’invasion<br />
napoléonienne, se concrétisant en musique<br />
par l’emploi du folklore pour toute une génération<br />
de compositeurs.<br />
Eternel isolé, Tchaïkovski (1840-1893) se<br />
trouvait naturellement à l’orée de ces deux<br />
chemins. Russe, il l’était indéniablement, en<br />
se liant notamment avec les compositeurs<br />
du Groupe des Cinq (son poste à Moscou<br />
l’empêchait cependant de suivre activement<br />
la scène saint-pétersbourgeoise) mais sa<br />
musique regorgeait, presque à son corps<br />
défendant, d’influences largement étran-<br />
justin kim,<br />
contre-ténor<br />
A 23 ans, Justin Kim a fait le choix de quitter<br />
le Chicago de son adolescence pour tenter<br />
l’aventure en Europe: «J’étudie actuellement<br />
à Londres car la voix de contre-ténor est encore<br />
très méconnue <strong>au</strong>x Etats-Unis. Il y a une telle<br />
tradition en Europe !» La raison majeure pour<br />
lui de participer à la <strong>Verbier</strong> <strong>Festival</strong> Academy<br />
tient ainsi dans son désir de rester sur le<br />
Vieux Continent: «Je me prépare pour des<br />
<strong>au</strong>ditions en Allemagne et en France, et <strong>Verbier</strong><br />
est exactement <strong>au</strong> centre de ces deux mondes».<br />
Au programme de Justin, chanter <strong>au</strong>tant qu’il<br />
peut dans les master class avec des professeurs<br />
qu’il admire depuis sa plus tendre<br />
enfance: «C’est formidable de pouvoir travailler<br />
avec des artistes de classe mondiale comme<br />
Thomas Quasthoff ou Malcolm Martine<strong>au</strong>, ce<br />
sont des artistes que j’ai écouté à la radio, ou sur<br />
2 | le festival <strong>au</strong> <strong>quotidien</strong><br />
gères. Mozart occupait une place essentielle<br />
dans son panthéon, depuis un Don Giovanni<br />
<strong>au</strong>quel il avait assisté enfant.<br />
On ne retrouve nulle part mieux cet amour de<br />
Mozart (qu’il considérait comme le «Christ en<br />
musique»), que dans sa Sérénade pour cordes,<br />
composée en 1880-1881. Parallèlement à la<br />
composition de la tonitruante Ouverture<br />
solennelle 1812 écrite pour commémorer en<br />
1882 la défaite des armées napoléoniennes,<br />
Tchaïkovski éprouva le besoin d’écrire une<br />
œuvre qui lui serait venue «du cœur». En<br />
réalité, s’il songea <strong>au</strong>x sérénades mozartiennes,<br />
notamment à la célèbre Eine kleine<br />
Nachtmusik, son œuvre est fort différente de<br />
son modèle.<br />
Dans une lettre à sa mécène Nadedja von<br />
Meck, le compositeur déclare: «Cette Sérénade<br />
cherche à imiter le style de Mozart et je<br />
serai enchanté si je pense m’être approché de<br />
mon modèle». Dotée d’un large effectif pour<br />
cordes, l’œuvre cherche à reproduire l’équilibre<br />
formel classique et l’hommage à Mozart<br />
s’exprime de fait dans l’attention minutieuse<br />
portée à la qualité d’écriture et <strong>au</strong>x proportions<br />
musicales. L’omniprésence de la danse<br />
s’inscrit, elle <strong>au</strong>ssi, dans une filiation historicisante<br />
indiscutable ; la célèbre Valse relève<br />
plutôt du 19 e siècle mais les commentateurs<br />
y ont vu une réplique <strong>au</strong>x menuets du siècle<br />
précédent. Toutefois, dans les quatre mouvements<br />
contrastés, Tchaïkovski écrit une<br />
œuvre à l’expression profondément romantique,<br />
oscillant entre gestes pathétiques et<br />
piotr ilitch Tchaïkovski<br />
sur internet et dont j’achetais les disques quand<br />
academy j’étais enfant».<br />
annonce<br />
Souhaitons à Justin de pouvoir rester en<br />
Europe et d’y poursuivre sa passion.<br />
insouciance douloureuse. En outre, l’effectif<br />
pléthorique qu’il appelle de ses vœux tourne<br />
le dos à la transparence lumineuse des sérénades<br />
mozartiennes.<br />
Peu importe: nonobstant ses contradictions<br />
historiques, cette Sérénade appartient <strong>au</strong>x<br />
chefs-d’œuvre définitifs du romantisme<br />
tardif, offrant par ailleurs un visage de son<br />
<strong>au</strong>teur moins tourmenté que de coutume. La<br />
place qu’elle occupe dans les programmes de<br />
concert est éminemment légitime.<br />
changements<br />
de programme<br />
Khatia buniatishvili remplace martha<br />
argerich pour le concert de ce jour à<br />
19h, à la salle des combins, avec Yuri<br />
Bashmet et les Solistes de Moscou.<br />
C’est avec regret mais motivée par des<br />
raisons familiales que Martha Argerich<br />
a décidé d’annuler sa participation à ce<br />
concert.<br />
nikolaï lugansky remplace Yuja wang,<br />
absente pour raisons de santé pour le<br />
concert ce samedi à 20h à l’eglise. <strong>Le</strong><br />
programme de la soirée reste inchangé:<br />
Nikolaï Lugansky se joindra à <strong>Le</strong>onidas<br />
Kavakos et G<strong>au</strong>tier Capuçon dans le<br />
Trio pour piano, violon et violoncelle de<br />
Tchaïkovski.