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6 Emploi<br />

l Métier<br />

Chapeaux!<br />

hFabienneDelvigneestmodiste.<br />

hUnmétiercréatifpassionnantmais<br />

exigeant.<br />

Chaque chapeau que je crée, c’est un peu comme un bébé.<br />

Il y a vraiment quelque chose de moi dedans. Je ne <strong>le</strong> laisse<br />

d’ail<strong>le</strong>urs pas partir avec n’importe qui !”. Cela fait 25<br />

ans que Fabienne Delvigne crée des chapeaux. “J’ai<br />

toujours aimé en porté. Déjà à l’éco<strong>le</strong>, j’allais au cours<br />

avec un chapeau alors que plus personne n’en portait à<br />

l’époque. J’aimais bien faire <strong>le</strong>s choses un peu différemment.<br />

Un accessoire, tel un chapeau, permet vraiment de<br />

se différencier.”Etpourtantc’estuneautrevoiequ’el<strong>le</strong><br />

avait choisie pour ses études. “Je crois qu’inconsciem­<br />

ment je n’aurais pas voulu faire <strong>le</strong> métier de tout <strong>le</strong><br />

monde…” C’est ainsi qu’el<strong>le</strong> s’oriente vers… <strong>le</strong> marketing.“C’était<br />

original car à l’époque, aucune de mes copines<br />

ne se lançait dans ce type d’études”. Son diplôme e<br />

poche,el<strong>le</strong>estengagéedansunemultinationa<strong>le</strong>.Mais<br />

était­cevraimentcequ’el<strong>le</strong>avaitenviedefaire?C’est<br />

en feuil<strong>le</strong>tant une revue de mode qu’el<strong>le</strong> a <strong>le</strong> déclic :<br />

el<strong>le</strong>feradeschapeaux.“Et pourtant, chez moi, personne<br />

n’était dans la mode”.<br />

L’obstac<strong>le</strong>principal:àl’époque,onnefaisaitplusde<br />

chapeaux.Oùseformeralors?“J’ai contacté un atelier<br />

qui travaillait pour des maisons de couture. J’ai dû vraiment<br />

insister pour qu’ils me permettent ne fût­ce que de<br />

venir voir comment se faisait <strong>le</strong> travail”. Décidée à apprendre<br />

plus, el<strong>le</strong> demande de pouvoir rester. “Ils ont<br />

été d’accord, si je travaillais gratuitement. J’ai accepté.<br />

J’étais tel<strong>le</strong>ment contente d’apprendre !”.<br />

Lesdébutsfurentdiffici<strong>le</strong>s.“Une personne s’est occupée<br />

de moi et a tout fait pour me dégoûter. Sans doute<br />

avait­el<strong>le</strong> peur que je prenne sa place… Rien de ce que je<br />

faisais n’était bien. J’ai dû apprendre à faire et à défaire.<br />

Sans cesse”.Cequinel’empêchepasdepersisterdans<br />

cette voie et de commencer à réaliser quelques créationspersonnel<strong>le</strong>spourel<strong>le</strong>s­mêmes.“Je<br />

<strong>le</strong>s ai portées<br />

à des mariages. Et de nombreuses personnes m’ont demandé<br />

qui avait dessiné ces chapeaux”. Plusieurs personnesluidemandentd’encréerpoureux.“Les<br />

clients<br />

sont arrivés beaucoup plus vite que je l’avais imaginé”.<br />

Fabienne Delvigne travail<strong>le</strong> alors sur des créations<br />

puresmaisaussisurdemandedeclients,pourdusurmesure.<br />

El<strong>le</strong> choisit de travail<strong>le</strong>r chez el<strong>le</strong>. “Je ne sou­<br />

SUPPLÉMENTDUMARDI27MARS2012<br />

FABIENNEDELVIGNE<br />

FabienneDelvigne(ci-dessus)etquelques-unesdesescréations(enbasdepage).<br />

haitais pas ouvrir une boutique et prendre ainsi <strong>le</strong> risque<br />

d’avoir trois clients à la fois. J’adore avoir un contact personnel<br />

avec <strong>le</strong>s gens. Prendre <strong>le</strong> temps de comprendre ce<br />

qu’ils veu<strong>le</strong>nt, même si eux ne <strong>le</strong> savent pas vraiment….<br />

J’aime bien trouver un équilibre avec <strong>le</strong> visage de la personne,<br />

sa personnalité, son caractère. Ce qui m’intéresse<br />

c’est de faire ressortir ce que la personne a en el<strong>le</strong>. J’aime<br />

quand cela pétil<strong>le</strong>. Un chapeau doit être aussi léger, doux,<br />

comme une envolée. Si un chapeau est mal choisi, l’effet<br />

voulu est complètement raté. Il n’y pas pire que de mettre<br />

<strong>le</strong> mauvais chapeau. Il faut trouver celui qui convient à la<br />

personne car tout <strong>le</strong> monde a une tête à chapeaux, même<br />

si certains peuvent se permettre plus de choix”,explique<br />

lamodistequisesitue“entre <strong>le</strong> sculpteur et l’architecte.<br />

Le premier pour la matière qui inspire mes créations, <strong>le</strong><br />

second pour l’équilibre. Car dans un chapeau, tout est<br />

question d’équilibre. Je <strong>le</strong> sens quand il est atteint, mais je<br />

ne sais pas expliquer comment”.<br />

Ses premières créations, Fabienne Delvigne <strong>le</strong>s réaliseessentiel<strong>le</strong>mentpourdesfemmesquidoiventporterunchapeaupourunmariage.“Avec<br />

<strong>le</strong> temps, je constate<br />

que <strong>le</strong>s gens veu<strong>le</strong>nt un chapeau pour d’autres occasions.<br />

C’est un accessoire qui est redevenu tendance. Pour<br />

<strong>le</strong>s hommes aussi. C’est d’ail<strong>le</strong>urs eux qui poussent cette<br />

tendance”. De quoi inciter Fabienne Delvigne à créer<br />

une col<strong>le</strong>ction pour tous <strong>le</strong>s jours – la Col<strong>le</strong>ction<br />

Trendy. Pour <strong>le</strong>s femmes et pour <strong>le</strong>s hommes. “Ce ne<br />

fut pas si faci<strong>le</strong>. Il fallait allier <strong>le</strong> côté élégant du chapeau,<br />

avec une bel<strong>le</strong> matière mais un prix doux. Une tel<strong>le</strong> col<strong>le</strong>ction<br />

permet de changer de chapeau suivant son humeur,<br />

son sty<strong>le</strong> du jour,…”<br />

Dans<strong>le</strong>métierdepuis25ans,FabienneDelvignel’a<br />

vuévoluer.“Le savoir­faire disparaît malheureusement,<br />

même s’il y a encore des jeunes qui veu<strong>le</strong>nt créer des chapeaux.<br />

Mais différemment. En choisissant des filières qui<br />

rapportent plus. Et puis, ils pensent souvent qu’ils savent<br />

tout en sortant de <strong>le</strong>ur formation, alors que moi j’apprends<br />

encore tous <strong>le</strong>s jours !”<br />

Lesmatièresontaussiévolué.“<strong>La</strong> qualité n’est plus la<br />

même. Et puis <strong>le</strong>s prix ont flambé”, regrette Fabienne<br />

Delvigne, qui travail<strong>le</strong> à l’ancienne – “avec des formes<br />

personnel<strong>le</strong>s que personnes d’autre n’a”–,aime<strong>le</strong>sbel<strong>le</strong>s<br />

matièresetaencoreeuxlachanced’avoirdesconseils<br />

d’anciennes modistes. “J’étais dans <strong>le</strong>s premières à refaire<br />

des chapeaux. Les jeunes aujourd’hui n’ont plus l’opportunité<br />

de rencontrer des modistes qui ont plus de 80<br />

ans et avec <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s j’ai encore des contacts, ce qui me<br />

permet des échanges entre générations”.<br />

Le métier est passionnant mais exigeant. “Il faut<br />

beaucoup de patience, du doigté, mais aussi être à l’écoute<br />

des clients. Il faut comprendre ce que la cliente veut et<br />

qu’el<strong>le</strong> n’a pas encore imaginé el<strong>le</strong>­même.”.<br />

Fabienne Delvigne est confrontée aussi aux exigences<br />

de la mode. “Je fais du travail sur­mesure mais sort<br />

aussi des col<strong>le</strong>ctions. Tous <strong>le</strong>s quatre mois, il faut réinventer<br />

<strong>le</strong> monde. Les gens nous demandent de créer mais ce<br />

n’est pas faci<strong>le</strong> de créer pour créer. Certains couturiers ont<br />

d’ail<strong>le</strong>urs dit “stop : laissez nous créer quand nous avons<br />

envie de créer !”. C’est diffici<strong>le</strong> d’imaginer la col<strong>le</strong>ction<br />

prochaine alors qu’on est encore occupé avec la précédente”.<br />

Et puis, <strong>le</strong> métier va bien au­delà de la création : il<br />

fautrecevoir<strong>le</strong>client,al<strong>le</strong>rchez<strong>le</strong>sfournisseurs,faire<br />

<strong>le</strong>scou<strong>le</strong>urssoi­même–“sur un même chapeau, il peut y<br />

avoir quatre matières qui vont demander quatre façons<br />

de teindre différentes” –, il faut aussi se démener pour<br />

trouver “la” solution (une teinte, une matière e rupturedestock,…),fairefaceàlaconcurrenceétrangère,…<br />

“Il faut expliquer aux clients <strong>le</strong> côté exceptionnel du produit<br />

car on trouve aujourd’hui des chapeaux faits en<br />

Chine à 15 euros. <strong>La</strong> matière première que je vais utiliser<br />

est déjà beaucoup plus chère. Mais ce n’est pas la même<br />

chose : la qualité et <strong>le</strong> travail sont autres”.Etpuis,ilya<br />

l’aspect “création”. “Selon moi, <strong>le</strong> luxe du luxe pour un<br />

client, c’est d’avoir un créateur qui s’occupe exclusivement<br />

de lui”.

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