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00 maq CA 228_CA 27/02/13 18:32 Page30<br />
30<br />
Ecole<br />
courant alternatif - n°228 - mars 2012<br />
TERRITORIALISATION ET RENFORCE-<br />
MENT DES INÉGALITÉS<br />
Avec le décret Peillon, l’organisation de la<br />
semaine, dans les faits, place les enfants<br />
environ une heure de plus par journée<br />
d’école complète sous la responsabilité<br />
des collectivités locales. Donc, le nouveau<br />
rythme scolaire s’organise localement. Le<br />
décret se voulant moderne libéralise le<br />
cadre de l’organisation scolaire. C’est là le<br />
sens même de cette réforme : « Le décret<br />
relatif à l’aménagement du temps scolaire<br />
permet de mettre en place une organisation<br />
de la semaine scolaire concertée et<br />
adaptée aux besoins et aux ressources des<br />
territoires (articles 4 et 5 du décret) ».<br />
Avec la réforme du rythme scolaire, les<br />
prérogatives et le pouvoir décisionnaire<br />
des acteurs externes à l’école sont renforcés.<br />
C'est en effet aux maires ou aux présidents<br />
d'EPCI (Etablissements publics de<br />
coopération intercommunale) qu'est dévolu<br />
le rôle de proposer aux DASEN (Directeurs<br />
académiques des services de<br />
l'éducation nationale des départements)<br />
des projets de réaménagement du temps<br />
scolaire, dans le cadre du décret ministériel<br />
; ils peuvent le faire indépendamment<br />
du conseil d'école (composé des enseignant-es,<br />
des représentants des parents,<br />
de l'inspecteur de circonscription et du<br />
maire), donc sans et même contre l'avis<br />
des enseignant-es et des personnels.<br />
Dans ces projets, les maires présentent<br />
l'organisation des activités périscolaires<br />
qui pourront se faire dans le cadre des PET<br />
(délicat acronyme pour Projets éducatifs<br />
territoriaux), à l'élaboration desquels seront<br />
associés les administrations de l'Etat<br />
concernées (dont la police et l'armée) et<br />
« les autres partenaires intéressés » … ces<br />
partenaires pouvant être des associations<br />
sportives et culturelles, mais, finances<br />
obligent, pourquoi pas des entreprises,<br />
sponsors ou « mécènes », intéressées à développer<br />
un marché périscolaire.<br />
Il s'agit d'un transfert de pouvoir en matière<br />
de politique éducative, engageant la<br />
mise sous tutelle des écoles par les collectivités<br />
locales, l'ingérence de ces dernières<br />
dans l'organisation pédagogique et pratique.<br />
Ceci entre bien dans la logique des<br />
lois de décentralisation-territorialisation<br />
amorcées depuis plusieurs décennies (régionalisation<br />
du service d'orientation des<br />
collèges et lycées, formation professionnelle<br />
sous la coupe des Régions...), en cohérence<br />
avec la recherche d'une<br />
« compétitivité des territoires »: «La réforme<br />
des rythmes doit agir comme un levier<br />
pour faire évoluer le fonctionnement<br />
de l'école autour d'un projet éducatif territorial<br />
», plus en phase avec les besoins<br />
des décideurs économiques locaux. Derrière<br />
les rythmes scolaires, c'est cette<br />
contractualisation locale qui est l'enjeu<br />
fondamental de ce projet.<br />
D'ailleurs, les communes sont seules habilitées<br />
à décider, d'ici le 31 mars, si elles<br />
appliquent la réforme dès septembre 2013<br />
ou bien en 2014... , année des élections<br />
municipales.<br />
Dans le premier cas, elles toucheront une<br />
aide « d'amorçage » de 50 euros par enfant<br />
(90 dans les zones d'éducation prioritaire),<br />
ce qui représente un fonds de 250 millions<br />
d'euros, somme qui est loin d'être suffisante<br />
pour gérer correctement ce temps<br />
en dehors de la classe, puisque les mairies<br />
en estiment le coût, elles, à 150 euros par<br />
enfant. Cette obole est surtout, de la part<br />
du ministère, une incitation politique à<br />
Ecole<br />
aller très vite et à se lancer dès la rentrée<br />
2013. Il serait en effet contre-productif<br />
pour Peillon, et plus globalement<br />
pour le gouvernement, d'afficher lors<br />
de la prochaine rentrée un pourcentage<br />
trop faible d' « écoliers à quatre jours et<br />
demi ». Par ailleurs, ce financement ne<br />
sera pas pérenne puisqu'il est présenté<br />
comme un fonds spécifique et « exceptionnel<br />
» pour la seule année 2013.<br />
Par ces temps de vaches maigres et<br />
d'endettement étatique et communal,<br />
on se demande vraiment comment seront<br />
financées ces heures périscolaires.<br />
Il y a de quoi s'interroger aussi bien sur<br />
les aménagements et les conditions<br />
matérielles (garderie, transports, locaux<br />
adaptés ...) que sur la qualité des<br />
activités et de l'encadrement. Personne<br />
ne peut obliger les communes à mettre<br />
en place des activités sportives, culturelles<br />
et artistiques telles qu'annoncées<br />
par le décret, et qui nécessiteront des<br />
dépenses supplémentaires de personnel<br />
et de charges. Personne ne peut les<br />
contraindre non plus à ce que ce nouveau<br />
temps éducatif soit gratuit pour les familles.<br />
De plus, les mairies n'ont pas<br />
toutes les mêmes moyens. A l'heure actuelle,<br />
les disparités territoriales, en<br />
termes de ressources mais aussi de priorités<br />
politiques, sont bien connues . Dans les<br />
écoles primaires, elles révèlent des écarts<br />
de financement de 1 à 10, créant des<br />
contextes d'apprentissage très inégaux. La<br />
réforme des rythmes scolaires renforcera<br />
encore davantage ces inégalités territoriales<br />
au profit des communes les plus favorisées.<br />
TOUJOURS PLUS DE PRÉCARITÉ<br />
On peut s'attendre aussi à ce que les recrutements<br />
soient toujours plus précaires<br />
pour les animateurs-trices dévolus à l'encadrement<br />
des activités scolaires et périscolaires,<br />
et que leurs horaires soient des<br />
plus morcelés et leurs rémunérations des<br />
plus réduites.<br />
Le gouvernement compte sans doute sur<br />
deux types de nouveaux contrats précaires<br />
qu'il a instaurés récemment.<br />
D'une part, comme vivier possible où les<br />
collectivités territoriales et les associations<br />
pourront puiser quelques animateurstrices,<br />
les « emplois d'avenir » lancés début<br />
janvier. Ils s'adressent à des jeunes peu<br />
(CAP) ou pas qualifiés, « jeunes résidant en<br />
ZUS (zones urbaines sensibles) ou dans<br />
des zones d’emploi où le taux de chômage<br />
des jeunes est supérieur à la moyenne nationale.<br />
» Ces contrats de un à trois ans, à<br />
temps plein, rémunérés au Smic , bénéficient<br />
d'une aide de l'État à hauteur de 75 %<br />
du montant brut pour les employeurs du<br />
secteur non-marchand (1 070 euros) - et<br />
de 35 % pour le secteur marchand (499