Energique et créative - ardevac

Vagabondage
malicieux. Il connaît tous les secrets de la
propulsion du cheval pour se transformer
en homme volant. Son CV est en béton. Cet
élève de la première promotion du Centre
National du Cirque a tout appris de Patrick
Gruss et de Franscico Caroli. Ce dernier lui a
donné le goût des techniques traditionnelles
si prisées au XIX e siècle et dont la transmission
orale au sein des grandes familles de
cirque était en train de se perdre : il est difficile
d’établir des règles figées, car l’ensei-
Manu face à Pantin. Les deux acolytes sont en
train de préparer leur prochaine création «Ouais»,
où ils seront accompagnés par Benjamin
Cannelle, Lutin, Thomas Chaussebourg et Rox.
EN SPECTACLE
« OuAis » le 2 et 3 mai prochain
au Cirque Jules Vernes, à Amiens.
Avec Benjamin Cannelle, Thomas
Chaussebourg, Manu Bigarnet.
www.cirquejulesverne.fr
www.facebook.com/cirquejulesverne
gnement se base beaucoup sur le ressenti.
Il sortira de l’école avec un duo audacieux
combinant sauts périlleux, pirouettes,
portés acrobatiques… Après avoir traîné
ses guêtres dans un petit cirque belge ou
sur les pistes du jumping comme celui de
Paris Bercy, il intégrera un des premiers
spectacles de la troupe Zingaro, « Cabaret
Equestre ». La solidité de son bagage traditionnel
servira la création contemporaine de
ce nouveau type de théâtre équestre pendant
plus de vingt ans. Il reprendra
sa route à la fin de « Darshan »,
après de belles tournées dans
le monde entier et des tonnes
de souvenirs impérissables.
Jovial, Manu évoque notamment
« Loungta » en plissant
les yeux : « je réalisais mes
acrobaties à l’aveugle. J’avais
un très beau masque, mais
les trous pour les yeux étaient
trop petits et pas vraiment en
face… »
L’acrobatie
Plutôt que voltige circassienne,
Manu préfère parler
d’acrobaties équestres. Cela
regroupe le « lâcher » et le «
sauter » pour exécuter une
dizaine de sauts différents, en
avant ou en arrière, réceptionnés
sur ses pieds, sur ses mains, ou sur un
autre acrobate porteur (de mains à mains),
etc. On peut les exécuter sur un, deux chevaux
ou plus. On crée des enchaînements
avec des acrobaties au sol. Tout se combine
à l’envie en suivant son talent créatif.
« C’est le summum de ce que l’on peut faire
sur le dos d’un cheval. Comme en équitation
classique, on doit d’abord s’intéresser à sa
gymnastique, sa locomotion, sa musculature,
ses allures, son mental. » On apprend à
Photo Serge Picard
Photo Christophe Bricot
Photo Mélodie DeGaulle
L’école nomade de Manu stationne
à la belle saison sur l’île de Ré.
Marine Poulard de la troupe Jehol
en a profité pour perfectionner
le saut de la cravache sous le
contrôle attentif de l’acrobate.
connaître son comportement au sol et
monté : il doit devenir le miroir de sa propre
décontraction. « Ensuite, on part dans la
démonstration de ce que l’on sait faire. Il n’y
a pas d’effacement de l’homme. Ce sera la
trame du spectacle que je prépare pour le
Cirque Jules Vernes d’Amiens. »
Le galop
Une chose est sûre, on ne peut pas voltiger
au trot. « Les acrobaties viennent des saltimbanques
qui animaient les places publiques
en sautant de bancs en bancs (ndlr « salta
in banco » qui a donné saltimbanque) puis
sur les chevaux qui se trouvaient au centre. »
La piste était née. Les pionniers du cirque
comme Franconi en fixèrent les dimensions
à 13 mètres pour obtenir un galop idéal et
une bonne force centrifuge, propices à l’exécution
des figures. La régularité de l’allure
est capitale. « On se sert de l’impulsion du
galop du cheval pour réaliser ses exercices.
Je me réceptionne d’un saut au moment où le
cheval descend, je saute lorsqu’il pousse. »
La base de l’entraînement se découpe à
part égale entre le sol et sur le cheval.
Aujourd’hui, l’acrobate commence l’échauffement
avec un footing au niveau l’épaule de
Pantin qui trotte librement, puis il se décale
au niveau des hanches du cheval. Il recommencera
aux deux mains, avec les mains sur
les poignées du surfaix. Cela l’aide à sentir
le rythme et l’humeur du jour du cheval.
Ensuite, il le monte quelques minutes à cru
avec des rênes, avant de lui recouvrir le dos
et la croupe avec un tapis moelleux qui lui
assurera une meilleure prise. Les deux partenaires
sont prêts.
Manu réalise d’abord une « voltige », les
mains sur le surfaix, les jambes lancées en
l’air et parallèles. Et le voilà à califourchon
avec l’élégance d’un chat. Il enchaîne des
« Petits tours », debout sur la croupe. Cette
phase « debout » détermine toutes les acro-
La longe de sécurité était déjà employée lorsque
les acrobates répétaient leur numéro, comme ici
au Cirque Molier au début du XX e siècle.
baties à suivre. On doit ressentir le moelleux
de l’allure, l’harmonie avec son cheval.
Et c’est parti ! Manu se projette à plus de 4
mètres du sol et réalise de superbes sauts
« écart ». Très performant, Il pouvait enchaîner
des sauts périlleux arrière ou avant, (le
plus compliqué) sans problème. Très exigent,
ils ne se pratiquent pas longtemps dans une
carrière. Sans regret, il ajoute : « Maintenant,
je suis content de pouvoir transmettre
ce que j’ai appris. C’est même un devoir, je
suis un maillon de la chaîne et c’est à mon
tour de donner ». Les premiers élèves n’ont
pas tardé à venir le chercher, comme Benjamin
Cannelle et Marine Polard de la troupe
Jehol. Et Manu mesure déjà les progrès :
« Benjamin n’est pas loin du saut périlleux
arrière ! »
Comment démarrer ?
Manu garantit : « Tout le monde peut se lancer.
A partir du moment où on est capable
de se porter avec les bras, on pourra se tenir
aux poignées du surfaix. » On obtient très
vite de très bonnes sensations. Les élèves
arrivent facilement à galoper debout sur la
croupe en trois jours. Manu détaille : « Le
cheval est calé par le bord de piste, je n’ai
pas besoin de le tenir en longe. La seule
dont je me sers est la longe de sécurité pour
Manu se projette à plus de 4 mètres du sol lorsqu’il réalise de superbes sauts « écart ».
retenir la personne. Pantin est très attentif à
ma voix. J’ai une grande finesse de contact
avec lui. Je peux me concentrer sur la sécurité
de l’élève. » L’apprenti-acrobate n’a plus
à se soucier des allures du cheval, il peut se
concentrer sur ses sensations. « Dans cette
discipline, on voyage de l’avant-main vers
l’arrière du cheval. On découvre vraiment
autre chose assis ou debout sur la croupe
d’un cheval ! » Chica, la femme de Manu
confirme. Elle a essayé pour la première
fois cet été alors qu’elle n’était pas vraiment
cavalière. Verdict, elle a adoré… n
circassienne* : relatif au monde du cirque.
OU APPRENDRE ?
A l’école ARDEVAC
C’est l’école nomade créée il y a
un an par Manu Bigarnet.
L’Association de Recherche du
Développement de l’Enseignement de la
Voltige et l’acrobatie à Cheval se balade
entre Tremblay-en-France, l’île de Ré
à la belle saison, ou le CNAC (Centre
national des arts du cirque). Manu
propose des initiations découvertes,
mais accueille aussi des pros.
www.ardevac.net
www.facebook.com/ardevac
90 - - Avril 2013 91