Etude qualitative sur le mariage precoce des adolescentes: Leur ...

«Chez nous, les filles se marient généralement à partir de 12 ans. Certaines d’entre elles qui n’arrivent pas à
supporter les charges des travaux domestiques et champêtres fuient le foyer, mais elles sont rattrapées par les
parents et ramenées chez leur mari ». (Entretien individuel, Leader d’opinion, Tibilindi).
Contrairement à cette perception dépréciative du mariage précoce, certains enquêtés le
valorisent pour des raisons liées à leurs conceptions « religieuses ». Selon eux, la fille doit
garder sa virginité jusqu’au mariage, situation qui valorise et fait l’honneur de la famille. Ce
qui signifie que l’adolescente ne doit pas tomber enceinte dans la maison paternelle mais
plutôt dans son domicile conjugal.
Pour faire face aux problèmes d’ordre socioculturel et économique, une minorité d’enquêtés
pensent qu’il faut encourager le mariage précoce car :
« Si tu te maries avant 15 ans, c’est bien pour toi-même la fille et c’est bien également pour ton père. Parce que
vous êtes tous les deux déchargés d’un fardeau. En laissant la fille atteindre l’âge de 20 ans, cela peut amener
d’autres problèmes. (Rires). Si elle prend une grossesse, ce sont des problèmes non seulement pour son père,
mais également pour elle-même », (Focus group adolescentes célibataires, Nessemtenga).
Nous notons que cette adhésion au mariage précoce est plus forte en milieu rural qu’en milieu
urbain.
Les adolescentes en majorité déprécient le mariage précoce au regard des enjeux liés à la
santé maternelle mais aussi à l’immaturité de l’adolescente à conduire convenablement le
foyer. Si toutefois le mariage précoce est encouragé, cela renvoie plus à une question de
survie de l’unité familiale et la charge que l’adolescente constituerait en cas de grossesse.
Toute chose qui déshonore la famille. On peut alors se demander si l’âge constitue un
indicateur pertinent dans la mise en couple des adolescentes dans ces différentes localités.
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5.2.1.3. Les stratégies matrimoniales pratiquées dans les localités
Les stratégies matrimoniales sont définies dans le cadre de cette recherche comme l’ensemble
des modalités et motivations qui sous-tendent la mise en couple. Dans la société burkinabè, on
distingue deux grandes catégories de stratégies matrimoniales : celle familiale qui privilégie le
don de femme et celle individuelle qui privilégie le libre choix du conjoint par la fille.
La majorité des adolescentes mariées enquêtées en milieu rural affirment qu’elles ont été
données en mariage par les parents sans leur avis. Dans la plupart des cas, elles ont accepté ce
choix pour faire honneur à la famille et éviter les conflits au sein de la famille. Certains
hommes enquêtés (hommes de plus de 40 ans) approuvent cette stratégie de mise en couple
car ils reconnaissent leur implication dans les orientations et le choix du conjoint de leurs
filles. Ils justifient leur intervention par le souci de choisir un bon mari pour leur progéniture.
Certaines stratégies de mise en couple qui relèvent des pratiques culturelles ont été évoquées.
Le mariage par don de fille est courant dans presque toutes les localités enquêtées. Il consiste
à donner une fille en mariage sans son consentement. Plus observée en milieu rural qu’urbain,
cette forme de mariage permet le renforcement des liens d’amitié et la redistribution entre
familles de biens matériels et économiques. Ces liens se nouent à partir de l’implication des
personnes d’un rang social hiérarchique. C’est une marque de confiance qui se développe
entre familles dans le but de renforcer des liens amicaux. En général, la famille du garçon ne
peut être bénéficiaire légitime de la fille que si elle réalise en retour diverses prestations
socioéconomiques (travaux champêtres, dons de cadeaux, dot, etc.) pour la famille de la fille.