Dictionnaire argot-français - Vidocq - Éditions du Boucher
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ARGANEAU<br />
atten<strong>du</strong> qu’il est observé ou en danger<br />
d’être saisi.<br />
ARGANEAU ou ORGANEAU s. m.<br />
Anneau de fer placé au milieu de la<br />
chaîne qui joint entre eux les forçats suspects.<br />
ARGOTIER s. m. Celui qui parle <strong>argot</strong>,<br />
sujet <strong>du</strong> grand Coësré. (Voir ce mot,<br />
p. 28.)<br />
ARGUEMINES s. f. Mains. Terme des<br />
voleurs flamands.<br />
ARGUCHE s. m. Argot.<br />
Jargon des voleurs et des filous, qui<br />
n’est compris que par eux seuls; telle est<br />
<strong>du</strong> moins la définition <strong>du</strong> <strong>Dictionnaire</strong><br />
de l’Académie. Cette définition ne me<br />
paraît pas exacte; <strong>argot</strong>, maintenant, est<br />
plutôt un terme générique destiné à<br />
exprimer tout jargon enté sur la langue<br />
nationale, qui est propre à une corporation,<br />
à une profession quelconque, à<br />
une certaine classe d’indivi<strong>du</strong>s; quel<br />
autre mot, en effet, employer pour<br />
exprimer sa pensée, si l’on veut désigner<br />
le langage exceptionnel de tels ou tels<br />
hommes : on dira bien, il est vrai, le<br />
jargon des petits-maîtres, des coquettes,<br />
etc., etc., parce que leur manière de<br />
parler n’a rien de fixe, d’arrêté, parce<br />
qu’elle est soumise aux caprices de la<br />
mode; mais on dira l’<strong>argot</strong> des soldats,<br />
des marins, des voleurs, parce que, dans<br />
le langage de ces derniers, les choses<br />
sont exprimées par des mots et non par<br />
une inflexion de voix, par une manière<br />
différente de les dire; parce qu’il faut<br />
des mots nouveaux pour exprimer des<br />
choses nouvelles.<br />
Toutes les corporations, toutes les professions<br />
ont un jargon (je me sers de ce<br />
mot pour me conformer à l’usage<br />
général), qui sert aux hommes qui composent<br />
chacune d’elles à s’entendre<br />
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entre eux; langage animé, pittoresque,<br />
énergique comme tout ce qui est<br />
l’œuvre des masses, auquel très souvent<br />
la langue nationale a fait des emprunts<br />
importants. Que sont les mots propres à<br />
chaque science, à chaque métier, à<br />
chaque profession, qui n’ont point de<br />
racines grecques ou latines, si ce ne sont<br />
des mots d’<strong>argot</strong>? Ce qu’on est convenu<br />
d’appeler la langue <strong>du</strong> palais, n’est vraiment<br />
pas autre chose qu’un langage<br />
<strong>argot</strong>ique.<br />
Plus que tous les autres, les voleurs, les<br />
escrocs, les filous, continuellement en<br />
guerre avec la société, devaient<br />
éprouver le besoin d’un langage qui leur<br />
donnât la faculté de converser librement<br />
sans être compris; aussi, dès qu’il y eut<br />
des corporations de voleurs, elles eurent<br />
un langage à elles, langage per<strong>du</strong><br />
comme tant d’autres choses.<br />
Il n’existe peut-être pas une langue qui<br />
ait un point de départ connu; le propre<br />
des langues est d’être imparfaites<br />
d’abord, de se modifier, de s’améliorer<br />
avec le temps et la civilisation; on peut<br />
bien dire telle langue est composée,<br />
dérive de telles ou telles autres; telle<br />
langue est plus ancienne que telle autre,<br />
mais je crois qu’il serait difficile de<br />
remonter à la langue primitive, à la mère<br />
de toutes; il serait difficile aussi de faire<br />
pour un jargon ce qu’on ne peut faire<br />
pour une langue; je ne puis donc assigner<br />
une date précise à la naissance <strong>du</strong><br />
langage <strong>argot</strong>ique, mais je puis <strong>du</strong> moins<br />
constater ces diverses époques, c’est<br />
l’objet des quelques lignes qui suivent.<br />
Le langage <strong>argot</strong>ique n’est pas de création<br />
nouvelle; il était aux quatorzième,<br />
quinzième et seizième siècles celui des<br />
mendiants et gens de mauvaise vie, qui,<br />
à ces diverses époques, infestaient la<br />
bonne ville de Paris, et trouvaient dans