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centimètres.<br />
Mais que fait la police ? Est-il encore trop tôt pour qu'ils fassent leur tour<br />
d'inspection ? Pourtant je les avais déjà surpris au petit jour devant la<br />
boulangerie, les mains pleines de sachets rendus graisseux par les viennoiseries<br />
qu'ils contenaient.<br />
Ma montre indiquait 6h30, cela faisait plus de sept heures que j'étais perché sur<br />
ma branche, comme une vieille chouette armée. Allais-je oser descendre pour<br />
regagner rapidement le confort rassurant de mon logis ? Allais-je devoir attendre<br />
encore quelques heures avant que les forces de l'ordre ne viennent rétablir ce<br />
dernier ? Et s'ils ne venaient pas ? Si les gendarmes du canton avaient aussi été<br />
victimes du curieux fléau que je n'aurais su nommer ? Et si ce fléau ne se<br />
cantonnait pas aux limites du village, s'il s'étendait à tout le département, à la<br />
région, au pays... au monde ? Et si j'étais le dernier homme, le dernier représentant<br />
d'une race en voie de (très proche) disparition ? Quel honneur cela serait, tout<br />
bien considéré, même si mon pyjama ne seyait guère à ce nouveau statut<br />
honorifique. Il faudrait que je passe à la maison pour préparer une petite valise<br />
avec quelques habits plus corrects.<br />
Les projets s'assemblaient dans mon esprit en fusion, des rêves de grandeur,<br />
d'épopée. Un monde nouveau s'offrait à moi, un monde où je serais libre d'aller où<br />
bon me semblerait, un monde silencieux et calme. Mais c'était vite oublier les<br />
bandes de macaques qui devaient infester les métropoles... Pourquoi ne pas<br />
explorer les campagnes... peut-être rencontrerais-je quelques survivants qui se<br />
rangeraient à ma cause, derrière mon étendard, fiers soldats trop heureux d'avoir<br />
à leurs côtés un chef de ma stature, un nouveau Paton.<br />
Plein de dynamisme et de fougue, je descendis rapidement de mon arbre,<br />
branche par branche, ignorant la douleur qui se réveillait dans mes pieds... Armezvous<br />
de courage, superbes arpions, nous allons conquérir le nouveau monde (il me<br />
faudrait trouver un véhicule, pensai-je avec justesse), lui rendre toute sa gloire,<br />
rétablir l'ordre naturel et réparer les erreurs innombrables causées par la course à<br />
la modernisation, en dépit du plus élémentaire bon sens... Monde, me voilà !<br />
Retour<br />
Je sautai au bas de l’arbre, quand une voix m’interpella.<br />
– Arthur ? que diable fabriquais-tu dans cet arbre, ça fait des heures que je te<br />
cherche !... Tu as refait une de tes crises mon gars ?...<br />
C’était la voix de papa.<br />
FIN