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6 La Lettre <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>Fondation</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>Résistance</strong> n° 57 - juin 2009<br />
Mémoire et réflexions<br />
Le séminaire <strong>de</strong> Formation<br />
<strong>de</strong> La déportation et <strong>de</strong> La secon<strong>de</strong> guerre mondi<br />
Ce quatrième séminaire organisé par l’Institut National du Patrimoine en partenariat avec <strong>la</strong><br />
direction <strong>de</strong>s musées <strong>de</strong> France et <strong>la</strong> <strong>Fondation</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>Résistance</strong> (1) a porté cette année sur « La<br />
collecte <strong>de</strong> <strong>la</strong> mémoire : méthodologie et valorisation (2) ». Une cinquantaine <strong>de</strong> participants<br />
y ont assisté, dont les représentants <strong>de</strong> 26 musées. Comme les précé<strong>de</strong>nts, ce séminaire<br />
a combiné <strong>de</strong>s exposés à l’INP et <strong>de</strong>s visites sur <strong>de</strong>s sites, en l’occurrence à Compiègne et<br />
Péronne (3) . On trouvera, ci-après, un résumé <strong>de</strong> ces trois journées. Le texte <strong>de</strong> <strong>la</strong> conférence<br />
<strong>de</strong> Michel R<strong>au</strong>tenberg sera publié dans un prochain numéro <strong>de</strong> La Lettre (4) .<br />
En ouverture, les résultats d’une enquête à<br />
<strong>la</strong>quelle ont répondu 25 musées <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>Résistance</strong><br />
ou <strong>de</strong> <strong>la</strong> Déportation montrent <strong>la</strong> diversité <strong>de</strong>s<br />
supports sonores et <strong>au</strong>diovisuels dans leurs<br />
collections : les témoignages sonores ou filmés<br />
viennent <strong>la</strong>rgement en tête (moins fréquents<br />
cependant que les témoignages écrits), collectés<br />
pour l’essentiel dans les années 1990 ou 2000 ;<br />
mais on trouve <strong>au</strong>ssi <strong>de</strong>s actualités ou films<br />
d’amateur <strong>de</strong>s années 1940, <strong>de</strong>s documentaires<br />
ou reportages postérieurs (parfois à l’occasion <strong>de</strong><br />
commémorations), quelques enregistrements <strong>de</strong><br />
chants ou <strong>de</strong> conférences en <strong>au</strong>dio. Les témoins<br />
sont en majorité les résistants, déportés, anciens<br />
combattants ou leurs familles, be<strong>au</strong>coup plus<br />
rarement d’<strong>au</strong>tres catégories : popu<strong>la</strong>tion civile<br />
en général, témoins d’un massacre ou d’un<br />
transport <strong>de</strong> déportés, incorporés <strong>de</strong> force,<br />
historiens, artistes ou militants <strong>de</strong> <strong>la</strong> mémoire.<br />
Ce sondage montre qu’à côté <strong>de</strong>s documents<br />
sonores et <strong>au</strong>diovisuels générés par les musées<br />
eux-mêmes, <strong>la</strong> collecte et <strong>la</strong> s<strong>au</strong>vegar<strong>de</strong> <strong>de</strong>s<br />
sources déjà existantes (radio, télé, amateurs)<br />
est tout <strong>au</strong>ssi primordiale. Par ailleurs, tout en<br />
se concentrant logiquement sur les témoignages<br />
<strong>de</strong>s acteurs, les musées ont <strong>au</strong>ssi éb<strong>au</strong>ché une<br />
secon<strong>de</strong> piste <strong>de</strong> collecte : <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion environnante<br />
et les porteurs <strong>de</strong> mémoire (<strong>de</strong>scendants,<br />
médiateurs).<br />
La collecte et <strong>la</strong> valorisation<br />
<strong>de</strong>s témoignages or<strong>au</strong>x<br />
Sans prétendre résumer les très riches<br />
communications <strong>de</strong> Florence Descamps, qui a<br />
mené <strong>de</strong>s enquêtes orales dans cinq ministères<br />
et est l’<strong>au</strong>teur d’un ouvrage <strong>de</strong> référence sur<br />
le sujet (5) , on en retiendra quelques principes<br />
génér<strong>au</strong>x.<br />
La collecte <strong>de</strong> témoignages or<strong>au</strong>x nécessite<br />
une phase <strong>de</strong> préparation à ne jamais écourter,<br />
<strong>au</strong> risque d’affecter <strong>la</strong> valeur <strong>de</strong>s témoignages<br />
recueillis. Il f<strong>au</strong>t définir : les objectifs visés (but<br />
scientifique, pédagogique, commémoratif, civique<br />
? pour être utilisés dans quel type <strong>de</strong> produit<br />
culturel ? etc.) et, en fonction <strong>de</strong> ceux-ci, le<br />
corpus. Puis <strong>la</strong> métho<strong>de</strong> : entretien directif, semidirectif,<br />
libre ? Elle dépend souvent <strong>de</strong> l’objet <strong>de</strong><br />
<strong>la</strong> collecte (cf. pour <strong>la</strong> déportation, trois parties :<br />
avant/pendant/après). Enfin, le <strong>de</strong>venir <strong>de</strong>s<br />
données collectées (quelle institution ?). La<br />
lettre sollicitant les témoins doit résumer en<br />
une page les objectifs, <strong>la</strong> métho<strong>de</strong>, les usages<br />
futurs du témoignage car le consentement<br />
éc<strong>la</strong>iré du témoin est nécessaire pour qu’il cè<strong>de</strong><br />
va<strong>la</strong>blement ses droits. Puis c’est l’étape <strong>de</strong> préparation<br />
documentaire <strong>de</strong> l’entretien (sources et<br />
bibliographie concernant le témoin, étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> sa<br />
biographie). La conduite <strong>de</strong> l’entretien découle<br />
en partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> métho<strong>de</strong> choisie (emploi ou non<br />
d’un questionnaire, d’un canevas, préparation ou<br />
non) mais réc<strong>la</strong>me <strong>au</strong>ssi <strong>de</strong> savoir s’adapter à<br />
chaque personnalité. Quelques principes intangibles<br />
: ne pas couper <strong>la</strong> parole (même lorsque<br />
le témoignage paraît répétitif, digressif, etc.),<br />
ai<strong>de</strong>r le témoin à se remémorer en lui présentant<br />
<strong>de</strong>s documents (chronologie, organigramme,<br />
coupures <strong>de</strong> presse, archives, …). La spécificité<br />
<strong>de</strong>s historiens par rapport <strong>au</strong>x spécialistes <strong>de</strong>s<br />
sciences sociales est peut-être le principe <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />
reprise : un <strong>de</strong>uxième entretien qui abor<strong>de</strong> les<br />
mêmes sujets en relevant les contradictions ou<br />
omissions (ce qu’il f<strong>au</strong>t éviter <strong>de</strong> faire lors du<br />
premier entretien, pour ne pas briser l’empathie<br />
nécessaire).<br />
La valorisation <strong>de</strong>s témoignages passe<br />
d’abord par leur in<strong>de</strong>xation, <strong>la</strong> confection d’un<br />
instrument <strong>de</strong> recherche sur support in<strong>format</strong>isé<br />
et <strong>la</strong> conservation d’un dossier documentaire.<br />
Il f<strong>au</strong>t gar<strong>de</strong>r les in<strong>format</strong>ions concernant les<br />
conditions <strong>de</strong> <strong>la</strong> collecte, celles <strong>de</strong> chaque témoignage<br />
(enquêteur, date, contexte), le contrat<br />
définissant son ou ses usages possibles (cf. <strong>de</strong>s<br />
corpus <strong>de</strong> témoignages sont mis en ligne sur<br />
Internet <strong>au</strong>jourd’hui, mais ce nouvel usage pose<br />
<strong>de</strong>s problèmes juridiques et psychologiques à<br />
surmonter). Le choix d’un entretien filmé plutôt<br />
que sonore peut se justifier pour un usage<br />
public (l’écoute longue sans support visuel est<br />
difficile), mais il a <strong>de</strong>s inconvénients : le coût,<br />
le nombre <strong>de</strong> personnes (un cameraman + un<br />
intervieweur), le problème du droit à l’image<br />
qui s’ajoute, l’obligation <strong>de</strong> choisir une façon <strong>de</strong><br />
filmer (qui influe sur <strong>la</strong> perception du témoin<br />
par le public). Celle-ci est en re<strong>la</strong>tion avec l’intérêt<br />
recherché : émotionnel, esthétique, voire<br />
scientifique ? Le filmage peut permettre <strong>de</strong><br />
mieux connaître le témoin (attitu<strong>de</strong>s du corps,<br />
etc.) et son environnement.<br />
De <strong>la</strong> communication <strong>de</strong> Michel Courty<br />
sur l’enregistrement du son, on en retiendra<br />
quelques traits sail<strong>la</strong>nts concernant les témoignages<br />
visant une diffusion publique. Celle-ci<br />
exige une qualité minimale ; d’où <strong>la</strong> difficulté<br />
Vues du site <strong>de</strong> l’ancien camp<br />
<strong>de</strong> Compiègne <strong>de</strong>puis l’entrée du<br />
mémorial. À cet endroit se dresse<br />
le Mur <strong>de</strong>s Noms qui recense, sur<br />
une série <strong>de</strong> stèles <strong>de</strong> verre, plus <strong>de</strong><br />
41 000 noms <strong>de</strong> personnes internées<br />
et déportées du camp <strong>de</strong> Royallieu.<br />
Dans <strong>la</strong> salle consacrée à <strong>la</strong><br />
propagan<strong>de</strong> <strong>de</strong> Vichy du bâtiment 1,<br />
Christian De<strong>la</strong>ge commente ses<br />
choix muséographiques <strong>au</strong>près<br />
d’une carte physique <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />
France. Projetée sur le sol, cette<br />
carte renvoie <strong>au</strong>x différents<br />
écrans présentant les actualités<br />
cinématographiques <strong>de</strong> l’époque<br />
qui re<strong>la</strong>tent les visites officielles <strong>de</strong><br />
Philippe Pétain à travers <strong>la</strong> France.<br />
d’utiliser dans les musées <strong>de</strong>s témoignages sonores<br />
collectés par <strong>de</strong>s historiens dans un but <strong>de</strong><br />
diffusion « papier » (= par transcription dans une<br />
publication). Le coût d’un bon enregistreur <strong>de</strong><br />
poids raisonnable (environ 800 g) est <strong>de</strong> 1 000<br />
à 1 500 euros. Le micro-cravate professionnel<br />
(pour l’enquêteur comme pour le témoin) est<br />
indispensable, ce qui n'empêche pas <strong>de</strong> veiller<br />
à éliminer les bruits parasites (<strong>de</strong> l’extérieur :<br />
circu<strong>la</strong>tion,… ; <strong>de</strong> l’intérieur : appareils ménagers,…).<br />
Le nive<strong>au</strong> d’enregistrement optimal est<br />
à régler pour chaque personne (en fonction <strong>de</strong><br />
<strong>la</strong> force <strong>de</strong> <strong>la</strong> voix) et à surveiller : il f<strong>au</strong>t une<br />
vingtaine <strong>de</strong> minutes pour qu’un témoin atteigne<br />
son nive<strong>au</strong> <strong>de</strong> voix « <strong>de</strong> croisière » (= pour<br />
que le stressé se déten<strong>de</strong> ou le timi<strong>de</strong> s’affirme).<br />
Enfin, le coût moyen d’un témoignage filmé<br />
(pour diffusion publique) est 20 fois supérieur<br />
à celui d’un témoignage sonore.<br />
Le mémorial <strong>de</strong> l’Internement et<br />
<strong>de</strong> <strong>la</strong> Déportation <strong>de</strong> Compiègne<br />
In<strong>au</strong>guré en 2008, ce mémorial est situé dans<br />
les trois bâtiments subsistants <strong>de</strong> l’ancien camp<br />
où furent rassemblés avant leur déportation,<br />
entre <strong>au</strong>tres, un grand nombre <strong>de</strong> résistants<br />
arrêtés en France. C’est un exemple saisissant<br />
<strong>de</strong> l’intégration <strong>de</strong>s supports sonores et