53 â INÃGALITÃS ET JUSTICE SOCIALE
53 â INÃGALITÃS ET JUSTICE SOCIALE
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L’égalitarisme économique, décidé à réduire les écarts de ressources, l’attribuerait à Bob. L’utilitarisme,<br />
voyant qu’elle pourrait en faire le meilleur usage et en tirerait le maximum de plaisir, la donnerait à Anne.<br />
Mais si on défend le «droit aux fruits de son travail», dans une perspective méritocratique, la flûte<br />
reviendrait à Carla. Aucune de ces revendications n’est infondée, et chaque principe général qui la soustend<br />
vaut les deux autres. Ainsi il n'est pas simple de dire ce qui est juste économiquement et<br />
socialement. Comment partager un héritage Qui doit bénéficier prioritairement du don d'organe (un rein,<br />
par exemple) : les plus jeunes ou les plus âgés Ceux qui ont le plus de chances d'en profiter ou les<br />
plus gravement atteints Les réponses varient selon les pays, selon les hôpitaux et parfois selon les<br />
services. Aussi le chemin vers le «parfaitement juste» est-il impraticable. En revanche, il est possible de<br />
lutter contre des situations qui sont considérées par tous comme injustes : de la faim dans le monde à la<br />
précarisation, de la non-scolarisation des enfants au non-accès à la santé...<br />
Une distribution équitable de biens au départ ne suffit pas, comme le pense Rawls, car tous les individus<br />
n'ont pas la même « capabilité ». La capabilité désigne l’ensemble des capacités d'un individu pour<br />
améliorer concrètement son sort dans la direction souhaitée. Avoir le permis ne suffit pas à une personne<br />
pour se déplacer plus vite qu’à pied. Avoir une voiture n'est peut être pas non plus suffisant si les routes<br />
ne sont pas construites ou si elles sont encombrées... La capabilité ne désigne pas une liberté au<br />
conditionnel, mais la liberté qui est effectivement disponible à l’instant considéré. Elle ne dépend pas<br />
seulement de la réalisation de l'égalité des chances ou d'une meilleure répartition des richesses. Avoir<br />
davantage de capabilité signifie voir sa situation s’améliorer : pouvoir vivre plus longtemps, pour avoir<br />
davantage d’amis, voyager plus loin, manger davantage de plats agréables, être moins malade etc.<br />
En conséquence, une société est juste si elle offre à chacun la capacité de se réaliser pleinement en<br />
toute indépendance. Les buts de chacun n'étant pas les mêmes, cette quête du bien-être suppose un<br />
débat public, canalisé par des moyens d’information ou de communication libres et responsables et des<br />
compromis sociaux et politiques.<br />
2 – L’égalité des chances suffit-elle pour réaliser la justice sociale <br />
a) – Comment obtenir l’égalité des chances <br />
1. Une société juste n’est pas une société égalitaire mais une société qui réalise « l’égalité juste », c’est-àdire<br />
« l’équité ». La participation équitable à la vie économique et sociale présuppose au premier chef<br />
une égalité des chances. Celle-ci s’attache à réduire les inégalités de départ qui résultent de handicaps<br />
individuels, du contexte familial, mais aussi de l’héritage et des relations. Cette recherche de l’égalité des<br />
chances peut être obtenue de trois façons.<br />
2. En luttant contre les discriminations par la loi. Une discrimination est une inégalité de traitement fondée<br />
sur un critère prohibé par la loi, comme l’origine, le sexe, le handicap etc., dans un domaine visé par la<br />
loi, comme l’emploi (préférer un homme à une femme au moment de l’embauche, promouvoir davantage<br />
les employés blancs que les employés noirs…) le logement (refuser un logement au prétexte de la<br />
couleur de la peau,…), l’éducation (regrouper les élèves en fonction de leur origine,…). Certains groupes<br />
sociaux ne bénéficient pas objectivement des mêmes chances que les autres, malgré l'égalité de droit<br />
dont ils jouissent en principe. C'est le cas des minorités visibles, des femmes, des handicapés, etc. Pour<br />
rétablir un équilibre des chances, les États engagent des politiques de lutte contre les discriminations.<br />
Cette lutte passe par la loi qui va mettre en place des dispositifs pour prévenir les discriminations (CV<br />
anonyme, obligation de publier un bilan social, création en France d’une haute autorité luttant contre les<br />
discriminations : la Halde…) et prévoir des sanctions lorsque la discrimination est avérée car elle<br />
contrevient à l’égalité des droits.<br />
3. En offrant le même type de prestations ou de services publics gratuits à tous. L’Ecole gratuite offre aux<br />
élèves les mêmes chances de réussir leurs études. La gratuité d’une partie des dépenses de santé<br />
permettent aux plus pauvres de soigner au même titre que les plus fortunés ce qui leur offre une égalité<br />
des chances d’être en bonne santé. Les allocations familiales compensent une partie des coûts<br />
d’éducation des enfants quelque soit les revenus des parents. En France, en 2008, Avec une contribution<br />
de 36,5 % à la réduction des inégalités, l’éducation est le transfert en nature des administrations<br />
publiques vers les ménages le plus redistributif. Il est en effet très progressif en raison de la<br />
surreprésentation des familles dans le bas de l’échelle des niveaux de vie. D’un poids comparable, mais<br />
d’une progressivité moindre, la santé contribue à hauteur de 29,6 % à la réduction des inégalités globales<br />
de niveau de vie. Ainsi, d’après l’OCDE, les services publics diminuent de 7,5 points les inégalités de<br />
revenus de départ aux Etats-Unis, de 10 points en France et de 8 points en Suède