Zic Boom n°47 Hiver 2010/2011 - Polca

P A R G R É G O R Y B L A N C H O N
MIEUX COMPRENDRE
le rôle de l’édition
musicale
Entre les différents dossiers sur les
professionnels de la filière musicale
en région et les formations régionales
proposées dans les relais Polca sur
l’organigramme du monde de la
musique, entre autres, il n’y a plus d’excuses
pour ne pas connaître (un peu) le rôle de chacun
des différents acteurs. S’il est assez facile de se
représenter, pour le grand public comme pour
les musiciens, le travail d’un manager, d’un
producteur ou encore d’une maison de disque,
c’est une autre paire de manches lorsque l’on
aborde le domaine de l’édition. Rien que le nom
est déjà une énigme qui ne révèle pas grandchose,
pour ne pas dire rien, sur le domaine
abordé, c'est-à-dire la gestion et la diffusion des
œuvres musicales. Et pourtant, avec la mutation
du marché de la musique enregistrée, l’édition
musicale prend une place de plus en plus
importante dans le financement du revenu des
artistes. Parmi les artistes régionaux, plusieurs
d’entre eux ont un contrat avec un éditeur.
C’est souvent cet interlocuteur qui a été le
premier à jouer le jeu du développement,
permettant ainsi de débuter une carrière.
Ce nouveau dossier du Zic Boom fait office de
présentation du rôle des éditeurs et du rôle
qu’ils jouent dans le parcours des artistes.
© Grégory Blanchon
Un peu d’histoire…
Le rôle d’un éditeur musical est d’assurer la
diffusion la plus large possible aux œuvres dont on
lui a confié l’exploitation et, de ce fait, de générer
le maximum de droits d’auteurs. Pour comprendre
pourquoi on utilise le terme « édition » pour parler
de ce métier, il faut revenir au XVI ème siècle. C’est en
effet à cette date que l’on identifie le premier
éditeur connu de musique française qui publia un
recueil de chansons. Jusqu'à la popularisation du
phonographe, au début du XX ème siècle, l’impression
papier des partitions et des paroles était le seul
moyen de diffuser la musique à une grande échelle.
D’où le rôle crucial des éditeurs… Et même si
aujourd’hui l’édition de partitions ne pèse
quasiment plus aucun poids dans la diffusion
musicale, le terme original à été conservé.
Après avoir été dominé pendant plusieurs décennies
par l’ère de l’industrie du disque, le secteur a
désormais les yeux rivés (parfois avec inquiétude)
sur les nouveaux supports de diffusion que sont les
multiples plateformes numériques utilisant internet.
Les médias traditionnels que sont la radio et la
télévision restent encore des alliés puissants (sur le
plan financier) des éditeurs.
Au quotidien !
En quoi consiste donc concrètement le travail d’un
éditeur ? « C’est avant tout une affaire
d’adaptation : à des artistes, à des partenaires, à
un contexte » (1) . Il existe bien souvent une relation
forte entre un auteur-compositeur et son éditeur qui
se manifeste par un respect mutuel permettant un
travail sur la durée. Le parcours d’un auteurcompositeur
avant de rencontrer son public et son
identité est souvent long. Même si ce lien a été
malmené pendant les deux dernières décennies
pour cause de turn-over très élevé dans le monde
de la musique (surtout chez les majors qui ont aussi
leur société d’édition), les choses semblent revenir
peu à peu à la normale.
L’auteur qui signe un contrat d’édition cède alors, la
plupart du temps, 50% des droits de ses œuvres à
son éditeur pour une durée moyenne de 70 ans,
autant dire quasiment à vie ! Il ne s’agit donc pas
d’une décision légère…
En amont
Le premier rôle d’un éditeur, une fois la relation avec
l’auteur contractualisée, va être de fournir des
moyens financiers et humains à l’auteurcompositeur
pour écrire, composer et produire des
œuvres. Cela se manifeste sous la forme
d’investissements pour l’exploitation des œuvres
(tour support, cofinancement de clip…), d’aide à la
création (enregistrement de maquette, achat de
matériel, cours de chant…) et d’avances financières
aux montants variables versées directement à
l’auteur. Pour ces dernières, il ne s’agit pas de
donner de l’argent mais bien d’avancer une partie
des droits à venir. Par la suite, les revenus de
l’exploitation des œuvres serviront à rembourser
l’éditeur de cette avance.
Un éditeur n’est heureusement pas un banquier,
même si c’est le raccourci que font complaisamment
certains artistes. Il doit aussi accompagner l’auteur
dans sa démarche artistique. C’est en général la
première personne à qui l’ont fait écouter les
œuvres. Son regard critique peut permettre d’aider
un auteur à développer et accentuer son style,
l’aider à se différencier. Ce n’est pas faire de
l’ingérence dans le processus de création que de
conseiller et d’orienter un artiste dans son travail. Il
n’est pas rare de voir un éditeur prendre la direction
artistique d’un projet. C’est de son plein gré qu’un
auteur-compositeur choisit de signer un contrat
d’édition, ce qui sous-entend une relation de
confiance. Enfin, l’éditeur peut aussi proposer
plusieurs démarches pour développer la création :
perfectionnement technique, résidence d’artiste,
rencontre avec d’autres créateurs.
En aval
L’idée que les artistes sont bien souvent les pires
« vendeurs » de leur musique est assez répandue,
souvent à juste titre. Et ce n’est pas ce qu’on leur
demande… C’est aussi le rôle de l’éditeur que de
développer et consolider les partenaires
professionnels qui vont travailler au succès (avant
tout financier, ne soyons pas dupes) du projet. Il
n’est pas rare qu’il s’active pour décrocher et
négocier un contrat avec une maison de disques, un
tourneur, un manager… Il est aussi consulté sur les
questions stratégiques de la carrière de l’artiste.
© Grégory Blanchon
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