Silvermobilités_Une enquête sur la mobilité urbaine des aînés

Silvermobilités
Une enquête sur la mobilité
urbaine des aînés
1

Ouvrage créé par la RATP avec la contribution de Handirect
et du cabinet VAA Conseil.
Remerciements
La RATP remercie tout particulièrement les personnes qui se
sont prêtées au jeu des interviews à partir desquelles ont été
composé les dix portraits figurant dans cet ouvrage.
©2016 RATP Tous droits réservés

Silvermobilités
Une enquête sur la mobilité
urbaine des aînés

Silvermobilités _
6

_ Préface
Préface
La RATP se mobilise pour la mobilité de tous : son
engagement dans le domaine de l’accessibilité s’est
manifesté il y a vingt ans avec la mise en service des
premiers autobus à plancher surbaissé destinés à
faciliter l'accès des personnes à mobilité réduite. La
politique de mise en accessibilité des réseaux et des
services s’est ensuite structurée à partir du cadre de
la loi du 11 février 2005 pour l’Égalité des Droits et
des Chances, la Participation et la Citoyenneté des
Personnes Handicapées qui fait de l’amélioration de
la chaine de déplacement un défi pour aujourd’hui et
demain à relever au quotidien. Depuis juin 2009, les
associations intégrées au sein de notre Comité consultatif
de l’accessibilité sont parties prenantes de cette
dynamique volontariste de l’échange et de l’écoute
pour sans cesse challenger notre offre de service.
Notre credo est que l’accessibilité n’est pas uniquement
synonyme de progrès technique. C’est une
attention portée aux aspirations de chacun. Dans
7

Silvermobilités _
cette perspective, un faisceau de projets et d’études
concerne plus spécifiquement la mobilité des aînés.
Ce livre centré sur le thème des « silvermobilités » a
été conçu pour manifester notre vocation à l’écoute, à
l’information, à l’innovation et au débat afin de mieux
poursuivre les travaux entrepris et consolider les dynamiques
enclenchées.
La lecture de ce petit ouvrage vous permettra d’en
comprendre la philosophie générale : le voyageur,
l’ensemble de nos voyageurs sont au centre de nos
préoccupations. Notre action consiste à tout mettre
en œuvre pour améliorer le service que nous rendons
chaque jour à des millions de franciliens, notamment
celles et ceux qui ont des besoins spécifiques. Cet ajustement
permanent entre les attentes des usagers et
la qualité des services délivrés fait partie des missions
essentielles de la RATP.
En particulier, et au vu de l’essor démographique
touchant la population des seniors, notre conviction
est que les transports publics urbains doivent participer
à l’accroissement de l’espérance de mobilité. Face
à cet enjeu sociétal de premier plan, notre insertion
dans la ville et la vie quotidienne nous impose d’apporter
une contribution qualifiée. Vous pouvez compter
sur notre engagement et notre vigilance pour relever
les défis évoqués dans ces pages.
Marie-Christine RAOULT, RATP,
responsable de la Mission accessibilité
8

9
_ Préface

Silvermobilités _
10

_ Avant-propos
Jean-Marc Maillet-Contoz, fondateur du magazine
Handirect, et Xavier Gallin, journaliste, ont
réalisé le portrait de personnages touchants d’authenticité
, libres penseurs, lucides, mais toujours
empathiques et drôles. Leur regard sur les transports
en communs nous interpellent et nous
rappellent que la mobilité est un carburant social
et un droit fondamental de notre société.
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Silvermobilités _
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_ Avant-propos
Alors que le vieillissement a été souvent traité
de façon caricaturale par le passé, des initiatives
internationales sous l’égide notamment de
l’OMS, d’institutions nationales et de grandes
entreprises contribuent progressivement à faire
évoluer notre regard sur cette période importante
aux yeux de chacun.
Ce nouveau paradigme implique de nouvelles
façons de travailler, d’apprivoiser, d’étudier ou
tout simplement de parler du vieillissement.
C’est ce nouveau regard porté sur la participation
active des séniors que qui est proposé
dans cet ouvrage. Le temps est à la prise de
parole, à la restitution de l’expérience, au partage
du vécu de chacun car les usagers sont les experts
de leur quotidien.
VAA Conseil est un cabinet spécialisé dans
l’analyse qualitative. Il s’appuie sur l’expertise
13

Silvermobilités _
du programme « villes amies des ainés » qui
compte près de 1 000 villes dans le monde et
dont Pierre-Marie CHAPON a été le référent pour
la France auprès de l’Organisation mondiale de la
santé. Il a pu ainsi recueillir en dix ans, la parole
de près de 7 000 séniors. L’expertise VAA Conseil
s’appuie également sur l’approche de Kévin
Phalippon, Docteur en pharmacie, spécialiste des
questions de santé et du lien entre ces questions
et le vieillissement.
À partir des portraits réalisés, nous avons
étudié les éléments récurrents, relevé les insatisfactions
et les points positifs exprimés par les
usagers. Ce travail minutieux nous a permis de
faire émerger des pistes de solutions innovantes.
Les séniors continuent d’utiliser les transports
en commun mais ont un rapport au temps et au
confort différent des actifs dont la rapidité et la
rationalisation des temps de transports prime. Les
séniors vont ainsi privilégier le bus comme moyen
de transport en le combinant généralement à la
marche d’où l’importance d’avoir une approche
globale dans la mise en œuvre de « parcours
de mobilité » avec une cohérence en termes de
mobilier urbain et de signalétique notamment.
Les analyses esquissées à partir des 10
portraits présentés dans la suite de l’ouvrage
sont utiles pour la RATP qui ambitionne d’appor-
14

_ Avant-propos
ter des solutions concrètes au plus proche des
attentes d’aujourd’hui et demain.
Toutefois, même si l’accessibilité physique
est largement évoquée par les séniors rencontrés
dans le cadre de cet ouvrage, il ne faut pas
confondre vieillissement et handicap. Même à
80 ans, on ne compte que 20 % de personnes en
forte perte d’autonomie. L’enjeu ne doit pas être
centré uniquement sur l’accessibilité physique
mais doit intégrer des aspects beaucoup plus
larges liés à la psychologie et aux modes de vie
en évolution permanente des ainés.
Outre, la poursuite de l’amélioration de l’accessibilité,
l’enjeu pour la RATP est d’agir en prévention
de fragilités par un meilleur accueil, confort
et écoute pour rassurer les usagers et contribuer
à lutter contre l’âgisme - discrimination liée à
l’âge - par des communications plus appropriées
et non stigmatisantes tant vis-à-vis des ainés que
de l’ensemble des usagers.
À travers ses engagements, ses réseaux de
transports, ses services et ses méthodes de
concertation, la RATP permet à chacun de continuer
à voyager à son rythme et selon ses besoins,
quel que soit son âge.
L’équipe du cabinet VAA Conseil
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Silvermobilités _
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Anik
Anik est née en Picardie, l’année
de la ratification de la Déclaration
universelle des droits de l’homme.
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Silvermobilités _
Anik a été assistante française
dans un collège pendant
ses études d’anglais, elle a
vécu un an à Londres dans
les « sixties ». Elle se souvient
avec nostalgie des fameux
bus à impériale de couleur
rouge et des « cabs », ces taxis
londoniens également caractéristiques.
Anik est devenue
ce qu’elle rêvait d’être : professeur
d’anglais. Elle a enseigné
dans un collège-lycée tout en
se consacrant à la recherche
et à la conception de didacticiels
dans une université
parisienne. Passionnée, elle a
ensuite arrêté d’enseigner pour
se consacrer au développement
des nouvelles technologies
appliquées à l’enseignement
des langues, d’abord dans un
rectorat puis au ministère de
l’Éducation Nationale jusqu’en
2012, l’année de ses 65 ans.
« J’ai tenu à aller le plus loin
possible, j’aimais beaucoup
mon travail. C’est en fin de
carrière que j’ai été confrontée
à des problèmes d’accessibilité
». Anik nous confie qu’elle est
atteinte de sclérose en plaques
depuis 1 990. Jusqu’en 2 004,
elle n’avait pas de problème
moteur, cela ne transparaissait
pas du tout. « J’ai commencé
avec la canne, puis la béquille,
le déambulateur, le fauteuil et
maintenant je circule à l’extérieur
en scooter électrique ».
Le chauffeur a beau être très
aimable, on ne sait pas s’il
a entendu, compris, s’il va
déployer la rampe. Il faudrait
vérifier toutes ces choses avant
que le bus ne sorte du dépôt.
« Avant cette maladie invalidante,
j’adorais la voiture. J’ai
eu de belles voitures que je
conduisais avec plaisir, même
dans Paris. Je travaillais dans
l’académie de Créteil et pour
m’y rendre en voiture, c’était
très facile et rapide à l’époque.
Puis quand j’ai commencé
à travailler au ministère, j’ai
troqué la voiture pour les transports
en commun. Je prenais
18

_ Anik
le bus, le voyage était très plaisant,
le bus longeait les quais
et j’aimais voir la Seine, les
péniches sans me préoccuper
de conduire. C’était un grand
plaisir de voyager au quotidien
dans Paris. Quand je sortais le
soir, je prenais aussi bien ma
voiture que le métro ».
Pour Anik, l’utilisation
des transports en commun
s’est accrue à cause de ses
problèmes de santé, elle a dû
abandonner la voiture en 2 009.
« Ce que j’ai alors déploré, c’est
que le métro était devenu inaccessible
pour moi. Je me suis
renseignée sur les possibilités
de voyager en bus. Je n’ai pas
eu d’appréhensions, comme
peuvent l’avoir certaines de
mes amies qui redoutent de
prendre le bus avec un fauteuil
ou un scooter électrique. Je suis
assez aventurière et je me suis
lancée. J’ai pris le bus avec mon
scooter pour aller au travail et
puis voilà ! À l’époque, les bus
de la ligne 63 étaient déjà équipés
d’une rampe d’accès, mais
parfois celle-ci ne fonctionnait
pas. Quand cela arrivait, il fallait
attendre le bus suivant. Un jour,
je me souviens, sur la place des
Invalides, j’ai dû laissé passer
quatre bus avant de pouvoir
monter. Il faisait froid et je suis
tombée malade ».
Au fil de l’entretien, Anik
évoque les scènes qui l’ont
marquée. Dans le bus, il faut
souvent négocier avec les autres
voyageurs, demander aux gens
d’avancer dans le couloir, car
le chauffeur a parfois du mal
à se faire entendre. Avec mon
scooter, je rentre toujours de
face, car s’il y a une poussette
ce n’est pas facile de se positionner
en effectuant créneau
et marche arrière. Cette position
laisse une place pour une
poussette de chaque côté de
mon scooter et la compagnie
de bébés ou jeunes enfants
souvent fascinés par mon scooter
est très agréable. La rampe
pourrait être également dépliée
pour les poussettes, je trouverais
cela tout à fait normal
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Silvermobilités _
qu’une jeune maman ait le
droit d’utiliser cette commodité.
Pour les personnes âgées,
je ne sais pas. Elles risqueraient
d’être déstabilisées, de glisser.
Il faudrait pouvoir évaluer si la
descente du bus avec la rampe
déployée serait plus facile pour
elles. Parfois, les chauffeurs
n’inclinent pas assez le bus. La
pente de la rampe est alors trop
prononcée. Dans ce cas, avec
un scooter ou un fauteuil, cela
peut être dangereux.
Une fois, le chauffeur n’a
pas réussi à faire fonctionner la
rampe, aussi bien à la montée
qu’à la descente. Je me suis fait
traiter de tous les noms d’oiseaux
car cela créait du retard.
C’était une agression verbale
violente, j’en ai pleuré !
Il y a un bouton spécifique
de demande d’arrêt situé à
hauteur de fauteuil. Lorsqu’il est
inactif, je ne trouve pas normal
de devoir crier au chauffeur
que je descends à tel arrêt. Tout
le monde n’a pas à savoir où je
descends : je tiens beaucoup
à mon autonomie. Le chauffeur
a beau être très aimable,
on ne sait pas s’il a entendu,
compris, s’il va déployer la
rampe. Il faudrait vérifier toutes
ces choses avant que le bus ne
sorte du dépôt. Les informations
sonores à l’intérieur du
bus sont très pratiques pour
tous les passagers et rassurent
20

_ Anik
les seniors, les touristes et les
personnes déficientes visuelles.
Tous ces éléments : rampe,
bouton d’appel, annonces
visuelles et sonores devraient
être vérifiés systématiquement
au départ du bus.
On peut déplorer le manque
de coordination avec la Ville de
Paris. En effet, depuis la mise
en place des nouveaux abribus
insérés dans des zones hétéroclites
(arbres, pavés déjointés et
dangereux, poubelles, poteaux,
réverbères…), le chauffeur n’a
pas toujours de repère pour
savoir où déployer la rampe et
s’il doit « agenouiller » son bus
car les hauteurs de trottoirs
sont inégales. Ces nouveaux
abribus sont esthétiques, mais
c’est leur seule qualité car ils
sont trop petits, ne protègent
pas des intempéries surtout
lorsqu’ils sont ouverts vers
l’arrière. Certes, dans ce cas on
peut y entrer, mais seulement
s’il y a peu de gens debout, pas
de poussette et pour y être en
plein courant d’air. Que dire
des voitures et camions qui
stationnent sur la zone d’arrêt
du bus, ignorant qu’un bus en
arrêt en double file ne peut pas
déployer la rampe sur la rue !
Ces situations génèrent des
aléas qui rendent difficile l’accès
au bus lorsqu’on doit utiliser la
rampe. À certains arrêts, l’emplacement
pour la personne en
fauteuil est marquée au sol sur
le trottoir. C’est très bien et cela
devrait être généralisé. En règle
générale : « ne rien faire pour
nous sans nous ».
Je prenais le bus, le voyage
était très plaisant, le bus
longeait les quais et j’aimais
voir la Seine, les péniches sans
me préoccuper de conduire.
Ce qui est compliqué lorsqu’on
est contraint de n’utiliser
que des bus, ce sont les correspondances
qui induisent de
longs temps d’attente. Et là, je
regrette qu’on n’ait pas accès
au métro, hormis la ligne 14,
alors qu’à Londres, New-York
21

Silvermobilités _
et dans de nombreuses capitales,
le métro est maintenant
accessible. Le tramway est très
accessible, idéal, de plain pied,
pas de problème de place, il fait
le tour de Paris mais ne dessert
pas l’intérieur. Le RER me paraît
une aventure et je ne me rends
pas en banlieue facilement.
Je trouve d’ailleurs anormal
de n’avoir aucune réduction
sur la carte Navigo alors qu’en
fauteuil ou scooter nous ne
pouvons prendre facilement
que le bus, si toutefois il n’y a
pas de problème technique et
pas d’autre fauteuil. La carte
Emeraude n’est accordée aux
seniors et aux personnes en
situation de handicap que sous
certaines conditions de revenus.
Je me suis fait traiter de tous
les noms d’oiseaux car cela
créait du retard. C’était une
agression verbale violente, j’en
ai pleuré !
Côté information, avec l’application
RATP, je vois le numéro
de bus que je dois prendre et le
nom de l’arrêt, mais je n’ai pas
l’adresse exacte de l’arrêt. C’est
très important de connaître
l’adresse exacte des arrêts,
la géolocalisation n’est pas
toujours simple.
Comme je l’ai indiqué, dans
les transports en commun on
peut rencontrer de l’indifférence
et de l’agressivité. Mais
ce que je retiens en fin de
compte, ce sont les sourires,
les gens qui me parlent et qui
me disent : « Ah, c’est bien ça,
c’est pratique », en parlant de
mon scooter. J’occulte le négatif.
Je suis en général heureuse
de prendre le bus, j’aime l’idée
et l’expérience de voyager dans
Paris. Je regrette simplement
de ne pas pouvoir sortir avec
une autre personne en fauteuil.
Mais j’ai participé l’an passé
à une présentation organisée
par la RATP de futurs bus avec
des espaces plus grands pour
les fauteuils et poussettes. Let’s
wait and see !
22

_ Anik
1. Un senior en mouvement
Anik, de par l’évolution de son autonomie, est
désormais une adepte du bus : depuis quelques
temps, elle utilise pour ses déplacements urbains
un petit scooter électrique. Elle apprécie que les
bus de la RATP sont équipés de rampes, même
si elle doit parfois affronter des incivilités qui se
manifestent à l’égard de son scooter jugé trop
encombrant par certains usagers « insensibilisés ».
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Silvermobilités _
2. La RATP s’engage
Dans les bus, des zones prioritaires sont à disposition
de personnes ayant des besoins spécifiques
(mamans ou papas avec poussettes, femmes
enceintes, personnes avec des jeunes enfants…).
Dans ces zones, des boutons pour signaler la
demande d’arrêt sont toujours à portée de main.
24

_ Anik
3. Innovons !
En matière d’accessibilité, les curseurs s’ajustent
en permanence. Ainsi, dorénavant, des personnes
utilisant un déambulateur « frappent à la porte
du bus », ce qui donne la mesure de l’évolution
des mentalités et des pratiques. Face à cela, la
RATP a produit une note de service indiquant aux
chauffeurs qu’ils doivent étendre à ces usagers la
procédure d’accueil des personnes utilisatrices de
fauteuil roulant.
25

Silvermobilités _
26

Claude M.
Claude est né l’année où le boxeur
Jack LaMotta a battu Ray Suggar
Robinson par décision arbitrale.
27

Silvermobilités _
Claude est ingénieur, a
toujours vécu en région parisienne
et a travaillé au sein d’une
grande entreprise, principalement
dans le domaine du BTP.
Ayant exercé principalement
son activité professionnelle à
Roissy et se déplaçant régulièrement
vers différents sites dont
le siège parisien de sa société,
il prenait le RER et le métro
au quotidien. Depuis qu’il est
retraité, Claude n’a pas foncièrement
modifié ses habitudes
de mobilité. Si, un peu quand
même, car il lui arrive assez
souvent de prendre l’autobus. Il
faut ici préciser qu’il est engagé
dans la vie associative, participe
notamment aux travaux de la
Coordination Régionale des
Retraités et Personnes Âgées de
l’Île de France (CORERPA) ainsi
qu’à ceux du Comité Consultatif
de l’Accessibilité de la RATP. Il est
passionné par ce qui touche aux
mobilités et connaît très bien
la cartographie des réseaux de
transport en commun d’Île-de-
France.
Je sais que les machinistes
reçoivent des formations ; il est
très utile de les sensibiliser,
de leur montrer les difficultés
vécues par les voyageurs,
mais il est nécessaire de faire
régulièrement des « piqûres
de rappel ».
Selon Claude, les personnes
âgées actives privilégient principalement
le métro et le bus.
« Lorsqu’on a le temps, déclaret-il,
le bus est plus agréable.
Les femmes préfèreront le bus
pour des questions de sécurité,
surtout en fin de journée et en
soirée. Aujourd’hui, les grandes
stations (gares avec connexions
RER) sont toutes équipées
d’escaliers mécaniques et d’ascenseurs.
Mais pour le métro
c’est différent, il y a beaucoup
d’escaliers et on arbitre souvent
son déplacement en fonction
de la pénibilité. Le fait qu’on
observe un usage massif des
transports en commun suggère
qu’il y a une relation d’utilité et
28

_ Claude M.
de confiance pérennes. Pour les
seniors, ce qui compte ce sont
les temps de parcours, même si
on sort du schéma classique du
trajet domicile-travail. Dans leur
cas, le confort se mesure à l’aune
de la fatigue induite. C’est pourquoi
il est également important
de connaître le temps que prendra
un déplacement, en tenant
compte des éventuels aléas
qui sont de diverses natures :
alertes, incidents techniques,
incidents voyageurs, grèves... ».
Aujourd’hui, des bornes
d’appel sont disposées sur les
quais mais rien ne remplace le
contact humain direct.
Ainsi, pour Claude, la qualité
du transport c’est tout autant la
régularité du service que la validité
de l’information concernant
les risques de perturbations
ou de saturation. Pour lui, la loi
de 2005 - loi pour l’égalité des
droits et des chances, la participation
et la citoyenneté des
personnes handicapées - a tout
changé. En premier lieu, pour les
personnes handicapées, puis, de
manière élargie, pour les seniors
et, plus généralement encore,
pour les personnes « fragiles ».
Dans les transports publics, il y
a eu de nombreuses évolutions
positives en matière d’accessibilité,
il faut le dire car ce n’est pas
toujours mis en lumière. Des
progrès significatifs ont été réalisés
et tout le monde sait qu’on
ne pouvait pas partir de zéro et
arriver à 100 % d’accessibilité
dix ans plus tard, même si la
RATP avait anticipé bon nombre
d’évolutions.
« Regardez, aujourd’hui,
sur l’ensemble des gares RER
exploitées par la RATP, il n’y en
a plus que deux qui ne sont pas
accessibles. Plus précisément, ce
sont les gares de Luxembourg
et de La Croix de Berny. Quant
aux lignes de bus, à Paris elles
sont toutes accessibles et leur
nombre augmente chaque
année sur la banlieue, sachant
qu’il reste du chemin à faire
au regard du retard de mise en
29

Silvermobilités _
accessibilité de certains points
d’arrêts qui relève de la responsabilité
des communes ».
Notre interlocuteur renchérit
: « En ce qui concerne le
métro, hormis la ligne 14 et
les futurs prolongements de
lignes, nous ne bénéficions
malheureusement pas d’un
réseau accessible. Aussi, l’un des
problèmes majeurs auxquels
se confrontent les personnes
âgées, ce sont les escaliers. Des
travaux auraient dû être engagés
pour mettre en place davantage
d’escaliers mécaniques, surtout
pour la descente. En effet, ce qui
est dangereux, ce n’est pas la
montée, mais bien la descente.
Si on « loupe » une marche et
que l’on chute, ce peut être très
grave. Il est vraiment souhaitable
que la RATP prenne en
compte cela dans ses projets
de modernisation. Rappelons
qu’en Île-de- France le nombre
de personnes de plus de 65
ans dépasse aujourd’hui les
2 millions et qu’en 2030 il représentera
25 % de la population.
Des progrès significatifs ont
été réalisés et tout le monde
sait qu’on ne pouvait pas
partir de zéro et arriver à
100 % d’accessibilité dix ans
plus tard, même si la RATP
avait anticipé bon nombre
d’évolutions.
Dans le réseau bus, l’une
des difficultés que rencontrent
les seniors, c’est le moment
critique du démarrage et de
l’accélération. Les bus peuvent
démarrer assez vite alors que les
personnes ne sont pas nécessairement
assises ; et le phénomène
est encore plus sensible
quand le bus est peu occupé.
Je sais que les machinistes
reçoivent des formations ; il
est très utile de les sensibiliser,
de leur montrer les difficultés
vécues par les voyageurs, mais il
est nécessaire de faire régulièrement
des « piqûres de rappel ».
Concernant l’exploitation, il
faudrait sur certaines lignes
augmenter les fréquences : j’invite
la RATP à rechercher l’adé-
30

_ Claude M.
quation de son offre de service
et des attentes des voyageurs,
notamment en banlieue et dans
certains secteurs de la capitale.
La mise en accessibilité
du réseau bus a fait naître de
nouveaux besoins, pour les
poussettes par exemple. Pas
encore pour les vélos, mais
qui sait ? Cela crée quelquefois
des conflits entre voyageurs.
L’accès à l’espace réservé aux
personnes en fauteuil roulant
n’est pas toujours chose simple.
Il est indispensable pour l’ensemble
des usagers que le bus
puisse accoster systématiquement
le long du trottoir. Pour
obtenir cela, il faut interdire
et sanctionner réellement le
stationnement aux abords des
arrêts d’autobus. Le bus doit
pouvoir en toutes circonstances
« s’aligner » correctement, sans
lacune par rapport au trottoir.
Dans une circonstance inverse,
j’ai vu récemment une dame qui
ne pouvait pas monter dans le
bus ; c’est le machiniste qui est
descendu pour l’aider ; il s’est
montré prévenant, mais ce n’est
pas la solution la plus probante !
Le tramway est très bien, c’est
un mode de transport accessible
31

Silvermobilités _
et confortable ; son extension en
banlieue est très appréciée. Le
tram est sécurisant, il est à taille
humaine. Il est aussi pratique
pour des sorties en famille,
grands-parents avec leurs
petits-enfants, par exemple. Les
annonces visuelles et sonores
sont bien conçues. C’est très
rassurant pour les seniors, cela
contribue à les rendre sereins
car à tout moment « je sais où
je suis et je sais où je vais ! ».
Ainsi, pour Claude, la qualité
du transport c’est tout autant
la régularité du service que
la validité de l’information
concernant les risques de
perturbations ou de saturation.
Concernant l’information à
destination des voyageurs, il ne
faut pas se raconter d’histoires
avec les applications sur smartphone.
Les personnes âgées
utilisent encore peu ce genre
de technologies et sont naturellement
prudentes lorsqu’il
s’agit d’ « exhiber » un téléphone
portable à l’extérieur. Internet à
domicile, oui, c’est plus courant ;
on peut aisément préparer son
voyage, sachant que le site Web
de la RATP est très bien construit.
Autres remarques formulées
par Claude : « Il ne faut pas perdre
de vue la nécessité d’améliorer la
sécurité. Dans le métro on peut
attendre des agents un service
attentionné, mais il est souhaitable
de renforcer leur capacité
de prise en charge des clients,
notamment ceux qui sont les
plus fragiles. Une présence sur
les quais ? Pourquoi pas ? On
doit pouvoir s’adresser à un
agent facilement. Aujourd’hui,
des bornes d’appel sont disposées
sur les quais mais rien ne
remplace le contact humain
direct. Côté tarifs, ce n’est pas
évident pour les seniors. Le prix
du billet à l’unité est trop élevé.
De plus, pour acheter un carnet,
il faut impérativement descendre
dans le métro et ce n’est pas
si aisé. Il y a là, dans tous ces
domaines, matière à innover et
faire évoluer les choses.
32

_ Claude M.
Je souhaite que la RATP
continue à se mobiliser pour
offrir aux seniors les moyens de
se déplacer « plus et mieux »,
en toute sécurité. Je souhaite
un engagement fort de tous
les acteurs concernés pour
lutter contre un isolement
possible, toujours dommageable
: la mobilité, n’est-ce pas
le marqueur et l’essence de la
vie en société ? ».
1. Un senior en mouvement
Le témoignage de Claude illustre un désir
intact de poursuite de mobilité des séniors,
l’entrain de la jeunesse laisse place à la sagesse
de prendre son temps. Claude nous démontre à
travers son portrait que le bus est un moyen de
transports plébiscité : à la fois sécurisant et
agréable, il se démarque du métro et du RER.
Toutefois, la fréquence des bus et la conduite
parfois brusque du chauffeur peuvent entrainer
un certain nombre d’obstacles à la mobilité.
33

Silvermobilités _
2. La RATP s’engage
Claude a raison de privilégier le bus. En effet,
100 % du réseau parisien est accessible. Les
bus sont équipés de planchers bas et les trottoirs
sont à bonne hauteur ce qui permet de limiter les
ruptures de mobilité.
Un guide des bonnes pratiques à l’usage des
agents est diffusé au personnel et on constate une
amélioration permanente du service.
De plus, la RATP forme ses chauffeurs de bus à
la conduite écoresponsable : plus douce et plus
agréable, elle renforce le confort du voyage pour
l’ensemble des usagers.
Claude, comme d’autres représentants d’associations
de personnes handicapées ou à mobilité
réduite, est associé aux travaux du Comité Consultatif
de l’Accessibilité RATP, ce qui lui permet de collaborer
à la conception et à l’évaluation des projets.
34

_ Claude M.
3. Innovons !
Changeons le regard des usagers sur le bus, nous
ne sommes plus en 1 906 ! Aujourd’hui, les bus sont
confortables et fiables pour prendre le temps de
redécouvrir jours après jours la capitale.
35

Silvermobilités _
36

Josette
Josette est née la même année
que l’écrivaine australienne
Colleen McCullough.
37

Silvermobilités _
Josette a travaillé au sein du
service juridique d’une grande
entreprise et a été, pendant sa
vie professionnelle, une inconditionnelle
des transports en
commun. Elle a toujours aimé
lors de ses déplacements dans le
métro s’asseoir avec un livre, c’est
pour elle un moment privilégié,
un loisir qu’elle apprécie. Elle
reconnait que pour les seniors
le métro est assez « compliqué
», surtout pour celles et
ceux qui ont des problèmes de
santé ou des difficultés pour
se déplacer. Josette se réfère
à des exemples précis, relatifs
à la ligne 8 qu’elle emprunte
régulièrement. Elle déplore qu’il
n’y ait pas d’ascenseur, que l’accessibilité
ne soit pas traitée
comme un sujet fondamental,
essentiel, comme il l’est à ses
yeux. Elle s’interroge : « On voit
des mères de famille porter des
poussettes dans les escaliers.
Pourquoi, dans le métro parisien,
une politique plus volontariste
n’a-t-elle pas été mise en
œuvre ? Prenez, par exemple, la
station Ledru-Rollin. Certes, il y
a un escalier mécanique, mais
la station n’est pas pour autant
accessible aux personnes se
déplaçant en fauteuil roulant.
38

_ Josette
Comment améliorer cela ?
Installer des ascenseurs ?
Quelles sont les autres possibilités
? Il faut se mettre à la place
de toutes ces personnes. Je ne
crois pas qu’il existe un plan à
disposition du public indiquant
les stations et les correspondances
accessibles. La RATP
devrait y penser car pour toutes
les personnes à mobilité réduite
c’est important de pouvoir
anticiper chaque trajet ».
À partir de là, elle enchaine :
« La ligne 14 est parfaitement
accessible, mais comment une
personne en fauteuil saura-telle
si elle peut emprunter ou
non une correspondance ? Elle
va attendre que le personnel
de la RATP vienne l’informer.
Et ce n’est pas évident, car de
nos jours, il n’y a plus d’agents
sur les quais. Aujourd’hui, vous
n’avez plus que des bornes
d’appel pour joindre quelqu’un
sans avoir l’assurance d’une
réponse. C’est la même chose
quand vous souhaitez acheter
des billets, on vous envoie vers
des machines, des automates.
On a perdu, je pense, le contact
avec les clients. C’est vraiment
dommage! Prenez l’exemple des
banques ou de La Poste, c’est le
phénomène inverse : les professionnels
vont vers les clients, ils
sont à leur écoute. J’espère que
la RATP retrouvera ce goût du
contact nécessaire et indispensable
avec sa clientèle ».
J’espère que la RATP retrouvera
ce goût du contact nécessaire
et indispensable avec sa
clientèle ».
En matière de déplacements
urbains, Josette considère que
le métro est rapide et pratique.
Pour les seniors, pour les
personnes fragiles ou handicapées,
le réseau des bus lui semble
être la bonne alternative. Josette
ajoute qu’elle prend souvent le
RER A. Confrontée à la foule des
voyageurs, elle ressent un sentiment
de peur : « Tout ce monde,
c’est dangereux ; peut-être n’y
a-t-il pas assez de rames ? Quand
j’étais plus jeune, il y avait des
39

Silvermobilités _
portes d’accès aux quais, avec
une présence humaine et c’était
rassurant. Pensez aussi aux
non-voyants. Comment font-ils ?
Aujourd’hui, comment voulezvous
qu’une personne âgée
puisse se mouvoir sereinement
à travers une foule aussi dense ?
Nous sommes entassés sur le
quai, entassés dans les wagons,
on appréhende la descente, il
faut se faire un passage, faire
attention de ne pas être bousculé.
Pourquoi ne pas prévoir
une aide à la descente ? ».
Notre interlocutrice ajoute : « À
l’époque de ma jeunesse, les
gens étaient bien habillés, on
pouvait voir des femmes tricoter
dans le métro. Aujourd’hui, il
vaut mieux porter un jean pour
ne pas se salir en s’asseyant :
les gens mangent, boivent,
écoutent de la musique, parlent
constamment dans leur téléphone
- ce qui fait beaucoup
de bruit et prédispose à l’indiscrétion.
Le téléphone dans les
transports c’est devenu insupportable,
c’est gênant quand
vous êtes tranquillement plongé
dans votre livre. De même,
on voit des gens se coiffer, se
maquiller… c’est la poursuite
de la vie à domicile. Certes,
avant, les gens fumaient dans le
métro puis cela a été interdit. Il
pourrait en être de même pour
la nourriture, la boisson et le
téléphone ! ».
Aujourd’hui, comment voulezvous
qu’une personne âgée
puisse se mouvoir sereinement
à travers une foule aussi
dense ?
En ce qui concerne l’autobus,
Josette attire notre attention sur
l’obligation de vigilance : « Ce
n’est pas toujours évident pour
les personnes âgées, il faut faire
très attention au moment du
démarrage du bus, aux coups
de freins, en particulier lorsqu’on
n’est pas assis, c’est un
vrai problème de sécurité. Et
puis, il y a les poussettes : une,
deux, trois, voire plus. Et ce
ne sont pas des petites poussettes,
elles sont volumineuses
40

_ Josette
et s’il n’y a pas d’enfant dedans
alors on y trouve les courses ! ».
Josette apprécie toutefois, à leur
juste mesure, les progrès importants
réalisés depuis la mise en
service des bus à plancher bas
qui permettent de transporter
des personnes en fauteuil
roulant, ainsi que la meilleure
distribution spatiale des places
prioritaires, même si ces places,
précise-telle, sont régulièrement
occupées de façon indue. Elle
ajoute : « Sinon, la fréquence
des bus c’est quand même le
grand problème : parfois, il faut
attendre 20 à 25 minutes. Ce
n’est pas acceptable pour une
capitale comme Paris, on peut
mieux faire ! ».
Josette a conscience que « les
temps ont changé ». Cependant,
elle nous déclare rester fidèle à
son rite favori : « Lors de mes
déplacements dans les transports,
je prends mon livre. Le fait
de pouvoir lire, c’est l’assurance
d’un vrai moment de détente ».
Elle nous livre qu’elle apprécie
également le Tvm, le Trans-Valde-Marne,
bus qui relie Saint-
Maur-Créteil à la gare de La
Croix de Berny. « Le Tvm est une
ligne que j’aime prendre, elle est
très pratique pour me rendre de
mon domicile au quartier du
centre ancien de Créteil. De plus,
c’est un bus spacieux, propre et
plus accessible que les autres -
il y a de nombreuses portes -,
les temps d’attentes ne sont
pas longs, il faut compter 3 à 4
minutes ». Elle conclut l’entretien
en précisant : « Je reconnais
que les transports en commun
sont pratiques, voire indispensables
pour se déplacer à Paris
et en banlieue, mais je regrette
d’être confrontée à trop d’affluence,
au manque croissant de
civilité et au fait qu’il n’y ait plus
de personnel sur les quais du
métro. Auparavant, quelqu’un
pouvait vous renseigner, vous
orienter, vous aider, de nos jours
les gens sont davantage livrés à
eux-mêmes. Il faudrait penser à
retrouver un peu d’humanité ! ».
41

Silvermobilités _
1. Un senior en mouvement
Lire dans les transports en commun c’est à
la fois s’évader tout en voyageant. C’est ce que
Josette apprécie avec le Trans-Val-de-Marne qu’elle
utilise régulièrement. Ce bus à haute qualité de
service reflète toutes les attentes d’un usager d’un
réseau moderne : fréquence, confort optimal et
sécurité. Il n’en demeure pas moins que Josette
l’opte quand elle le peut pour les heures où l’affluence
est moindre, ce qui induit une ambiance
plus propice à la lecture.
42

_ Josette
2. La RATP s’engage
Le Tvm est exploité par la RATP. Les bus relient
Saint-Maur-Créteil RER à La Croix de Berny RER
en 45/55 minutes grâce à une vitesse commerciale
de 23 km/h et à l’instauration de la priorité
aux feux tricolores sur la totalité de la ligne. Grâce
à la circulation de bus articulés et à une fréquence
de passage élevée aux heures de pointe, la ligne
peut transporter jusqu’à 1 400 voyageurs par
heure et par sens.
3. Innovons !
La RATP pourrait communiquer lignes par lignes
sur les heures « zen » durant lesquelles il y a peu de
monde dans les transports afin d’inciter à la mobilité
de personnes inquiètes d’être bousculées ou de
ne pas trouver de places assises.
43

Silvermobilités _
44

Alain
L’année de naissance d’Alain coïncide
avec celle où deux alpinistes français,
Maurice Herzog et Louis Lachenal,
sont les premiers à atteindre la cime
de l’Annapurna.
45

Silvermobilités _
Alain est spécialiste en
recherche graphique, il a dirigé
des entreprises d’imprimerie et
a travaillé à la mise en place des
nouvelles techniques d’impression.
Il a principalement exercé
à Paris, puis est devenu cadre
itinérant dans toute l’Europe.
En 2 004, suite à un accident, il
a perdu l’audition et a été mis
d’office à la retraite.
Lorsqu’il était en activité,
Alain, domicilié dans le Val
d’Oise, utilisait quotidiennement
les transports en commun,
principalement le RER et métro.
Quand il devait prendre l’avion,
il utilisait la voiture qu’il jugeait
plus commode pour rejoindre
l’aéroport. Pour lui, les transports
en commun c’était tout
simplement la facilité, la rapidité
et la fiabilité. Il se rappelle
néanmoins de petits incidents :
« Dans les anciens métros, on se
coinçait parfois les doigts dans
les strapontins ».
Aujourd’hui retraité, Alain
est président d’une association
régionale de personnes
implantées cochléaires. Il a
également des responsabilités
importantes au sein de la fédération
nationale SurdiFrance.
Pour parler des personnes
sourdes ou malentendantes, il
préfère employer le terme « dur
d’oreille » et précise : « Comme
le mot malentendant n’existe
46

_ Alain
pas dans le dictionnaire, ce n’est
pas la peine de l’utiliser ! ».
Pour les personnes âgées et
les personnes handicapées,
il est important de conserver
un contact social, même sans
parler aux gens.
Selon son point de vue, le
développement des transports
en commun est une nécessité,
une priorité, en particulier
à l’heure où l’usage de la
voiture individuelle pose tant
de problèmes (pollution, circulation,
stationnement…). Il
observe que, d’une certaine
façon, la Région redonne vie à ce
qu’il a connu dans sa jeunesse,
la Grande et la Petite ceinture.
« Les transports en commun,
c’est aussi du plaisir, les matériels
roulants sont devenus
nettement plus confortables.
On a une accélération progressive,
un freinage en douceur. Il
observe cependant que dans
le métro persiste un problème
de communication : « Lorsque
le conducteur prend la parole -
et le micro - pour faire une
annonce, c’est souvent inaudible.
Il en est de même pour les
messages diffusés par les agents
de station. Il est indispensable
que les messages audio soient
doublés par des messages
visuels, afin d’assurer une bonne
compréhension des situations
pour tous les usagers. Pour qu’il
n’y ait pas de problèmes, les
messages énoncés doivent être
courts, réduits à l’essentiel ».
À ce titre, il nous fait savoir qu’il
apprécie l’affichage du temps
d’attente des prochains métros.
« C’est une bonne chose. Mais il
faut aller plus loin et généraliser
les messages visuels et sonores
sur les quais et dans les rames.
Il est nécessaire de pouvoir
communiquer convenablement
avec les passagers à tout
instant ».
Alain précise que pour l’accueil
des personnes souffrant
de troubles de l’audition, les
guichets du réseau de la RATP
sont tous équipés de boucles
47

Silvermobilités _
magnétiques. « Malheureusement,
et c’est un fait, ce
dispositif est très peu utilisé
car les personnes concernées
n’en sont pas informées. Il n’y
a aucune publicité à ce sujet
et c’est regrettable ». Il ajoute :
« Il faudrait une campagne
d’information bien ciblée,
préparée en étroite collaboration
avec les associations. Ce
qui est paradoxal, c’est que les
systèmes fonctionnent mais
que personne n’en sollicite
l’usage. À ma connaissance, il y
a des formations du personnel
mais cela ne suffit pas. Car, on
le sait bien, lorsqu’on apprend
quelques chose et qu’on ne le
met pas en pratique, on l’oublie.
Ainsi, les agents d’accueil
n’acquièrent pas l’automatisme
d’utiliser la boucle magnétique
pour s’adresser à une personne
malentendante. Spontanément,
ils ont tendance à augmenter
le volume de leur voix, alors que
c’est l’inverse qu’il faut faire,
nos appareils sont réglés pour
cela ».
Il est indispensable que les
messages audio soient doublés
par des messages visuels,
afin d’assurer une bonne
compréhension des situations
pour tous les usagers.
Notre interlocuteur invite
donc la RATP à poursuivre
ses efforts pour faire encore
progresser la qualité de service.
« Nous payons, c’est aussi pour
avoir accès à une information
complète et compréhensible par
tous. Pourquoi ne pas utiliser
les panneaux publicitaires des
couloirs du métro pour informer
les voyageurs sur l’accessibilité ?
Comment les personnes handicapées
ou à mobilité réduite
peuvent-elles connaître les
dispositifs et les services qui leur
sont plus spécifiquement destinés
? Ces informations ne sont
indiquées nulle part. En arrivant
de l’extérieur, vous ne savez pas
ce qui vous attend. Rien n’est
annoncé : accessible ou non aux
fauteuils roulants, accessible ou
non aux personnes déficientes
48

_ Alain
auditives... Cela n’est pas
normal, on est obligé de demander
ou de prendre le risque de
se retrouver dans une impasse. Il
faut informer, faire une communication
précise, dire que telle
station est accessible et pour
quels types de handicaps. La
signalétique relative à l’accessibilité
doit être visible en voirie, à
l’extérieur et dans la station. On
a 20 ans de retard par rapport à
d’autres villes !
En arrivant de l’extérieur, vous
ne savez pas ce qui vous attend.
Alain développe son point
de vue : « En France, les gens
n’osent pas demander, ils ont
peur d’afficher leur handicap. Il
faut donc les devancer, les informer.
Pour les personnes âgées
et les personnes handicapées,
il est important de conserver
un contact social, même sans
parler aux gens. Les transports
en commun permettent d’établir
ce lien dans l’espace public.
Parfois des personnes discutent
entre elles, sans se connaître,
il y a un échange, un dialogue
qui prend fin quand on arrive à
destination. C’est très précieux
tous ces échanges spontanés
même si, par nature, ils sont
fugaces et éphémères ».
Pour conclure cet entretien,
Alain revient sur sa propre
posture : « J’aime regarder les
voyageurs. Le regard des gens,
leurs attitudes me passionnent :
certains sont un peu perdus,
un peu gauches, d’autres se
comportent comme de vraies
brutes n’hésitant pas à pousser
tout le monde pour entrer coûte
que coûte dans la rame. C’est un
peu le reflet de la société. Des
fois, on sourit, on rigole, alors
qu’à d’autres moments on est
témoin d’actes d’incivilités ou
bien encore de comportements
un peu bizarres. Pour ma part,
dans les transports en commun,
je redécouvre des sons que
j’avais oubliés, je suis en veille
permanente ».
49

Silvermobilités _
1. Un senior en mouvement
Pour Alain, les transports en commun représentent
la facilité, la rapidité et la fiabilité … Comme
il est « dur d’oreille », il souhaite que des nouvelles
améliorations soient apportées au niveau des informations
visuelles et auditives, qui selon lui ne sont
pas toujours optimales. Il souhaiterait que la RATP
communique davantage sur les actions engagées
au titre de sa politique d’information voyageur et
d’accessibilité.
50

_ Alain
2. La RATP s’engage
Dans le Métro les annonces visuelles et sonores
ont été largement développées : 51% des rames du
Métro sont d’ores et déjà équipées. L’ensemble des
quais disposent quant à eux d’un système d’information
du temps d’attente des prochains métros.
Tous les guichets et comptoirs d’accueil de
la RATP sont équipés d’une boucle magnétique
permettant aux malentendant de recevoir le meilleur
accueil possible.
3. Innovons !
Renforçons la communication et valorisons les
actions mises en place par la RATP pour rendre
les transports plus accessibles. Certains panneaux
publicitaires pourraient être utilisés pour des
campagnes de sensibilisation sur ce thème.
51

Silvermobilités _
52

Yolande
Yolande voit le jour dans une France
gouvernée par le Front populaire.
53

Silvermobilités _
Yolande a été institutrice en
école maternelle dans l’est parisien,
puis directrice d’école à
Nanterre. À la fin de sa carrière,
elle fut conseillère pédagogique
dans des zones d’éducation
prioritaires. Sa fonction :
aider les jeunes enseignants
du premier degré - on dirait
aujourd’hui les professeurs
des écoles - à s’installer dans
le métier. Yolande fut d’abord
parisienne, elle a ensuite habité
Epinay-sur-Seine puis Nanterre,
en banlieue parisienne. Elle
est mère de deux enfants, dont
l’un est handicapé suite à un
accident survenu quelques
mois après sa naissance. Pour
se rendre au travail, pour sortir
avec son mari (concerts, conférences,
expositions…) Yolande
utilisait les transports en
commun. « Nous avons toujours
eu une vie sociale et culturelle
bien remplie ». Yolande s’est
également impliquée dans le
syndicalisme, participant à de
nombreuses réunions à Paris.
Elle prenait le RER, le métro et,
quand il faisait beau, l’autobus.
Au moment de son départ en
retraite, la santé de Yolande s’est
dégradée, touchant à sa motricité.
Depuis, elle se déplace exclusivement
en bus et en tramway.
Les bousculades dans le métro
lui ont laissé un bien mauvais
souvenir : « Il y a une dizaine
d’années, je suis tombée, j’ai
été projetée sur le quai par un
voyageur. Maintenant, je prends
l’autobus qui selon moi est plus
sûr ».
Il faut que les personnes que
nous croisons comprennent
que nous ne faisons pas exprès
d’être handicapés.
Question réseau de transports,
Yolande avoue préférer
celui de la ville de Nantes. « Bus,
tramway, toute l’information
est claire et accessible ; je sais
que je vais devoir attendre 5
minutes, par exemple. En Île-de-
France, même si des progrès
ont été faits, cela ne m’apparait
pas aussi opérationnel ». Elle
54

_ Yolande
confirme néanmoins aimer
prendre le bus pour se déplacer
dans Paris. C’est réellement
une belle ville, c’est agréable, à
condition, précise-t-elle, que les
vitres soient propres, sinon on
ne voit pas le paysage. En général,
elle s’arrange pour ne pas
emprunter le bus aux heures de
pointe. Elle regrette que dans de
nombreux cas, les conducteurs
ne s’approchent pas suffisamment
du trottoir. Cela lui impose
de faire de grandes enjambées,
très éprouvantes, mais, pour
autant, elle reste aimable avec
les conducteurs : je leur dis
« bonjour » ou bien « vous êtes
loin du trottoir aujourd’hui, vous
me faites faire de la gymnastique
! ». Certains chauffeurs
n’apprécient pas, mais, note-telle,
la plupart sont aimables et
courtois.
Il y a une dizaine d’années, je
suis tombée, j’ai été projetée
sur le quai par un voyageur.
Maintenant, je prends l’autobus
qui selon moi est plus sûr.
Elle précise aussi : « Le
tramway, c’est très confortable.
Je le prends de La Défense à
Issy-les-Moulineaux, quelquefois
j’utilise celui qui va à Saint-Denis.
J’aime la douceur de ce
mode de transport, il est fluide
et silencieux. Le tram est prioritaire
sur les automobiles et
cela réduit le temps de déplacement.
C’est un gain précieux,
notamment du côté du pont de
Bezons, qui est proche de mon
domicile et qui est un foyer de
perpétuels embouteillages. Le
tramway étant prioritaire, du
coup on passe facilement. En
plus, il est beau, c’est agréable
de voyager dans un véhicule
esthétique et confortable. Une
fois sur deux, je reste debout, car
il y a beaucoup de monde. Vous
savez, lorsque j’étais institutrice,
on a remarqué avec mes collègues
que les gens qui passent
leurs journées assis se précipitent
vers les places assises,
alors que les gens qui travaillent
en station debout, restent
debout. Cela nous faisait rire !
Aujourd’hui, les gens cèdent
55

Silvermobilités _
difficilement les places assises,
ce n’est pas très fair-play ».
Notre interlocutrice rembobine
le film : « Auparavant, dans
le bus, il y avait deux agents – le
machiniste et le receveur. J’étais
plus rassurée. Aujourd’hui,
le conducteur est seul, il me
semble fragilisé notamment
dans certaines banlieues, car
il y a beaucoup d’arrogance de
la part de certains voyageurs
qui, par exemple, montent sans
payer. Le conducteur doit être
attentif à la circulation, il ne faut
pas lui demander de tout faire.
Une de mes amies, au début de
cette année, a été projetée par
terre dans l’autobus suite à un
brusque coup de frein. Elle était
debout et se maintenait à la
barre d’appui. Le bus s’est arrêté
brutalement, elle est tombée
ainsi que deux autres personnes.
Bilan : une côte cassée et deux
mois de convalescence. Des
voyageurs l’ont aidée à se relever,
mais le conducteur n’a pas
bougé de sa place et il n’y a pas
eu de déclaration d’accident. On
ne sait pas comment signaler ce
genre de dysfonctionnement ! ».
Yolande enchérit : « Pour les
personnes handicapées, ce n’est
pas encore le top. On hésite à
faire de la place aux personnes
handicapées car, nous dit-on, ça
retarde le bus. Les personnes
handicapées ou âgées sont
perçues comme des « ralentisseurs
».
Aujourd’hui, les gens cèdent
difficilement les places assises,
ce n’est pas très fair-play.
Pour ma part, un jour, un
voyageur - un homme d’une
quarantaine d’années - m’a
lancé : quand on est dans cet
état-là, on reste chez soi ! ». Elle
conclut ainsi l’entretien : « Il
faudrait faire des campagnes de
sensibilisation pour communiquer
sur l’accessibilité et sur le
respect des personnes fragiles.
Le handicap, ça peut arriver
à tout le monde. Il faut que
les personnes que nous croi-
56

_ Yolande
sons comprennent que nous
ne faisons pas exprès d’être
handicapés. Il faut que tout le
monde puisse sortir, avoir une
vie sociale, utiliser, comme tout
un chacun, les transports en
commun ».
57

Silvermobilités _
1. Un senior en mouvement
Yolande ne tarie pas d’éloges sur ce nouveau
mode de transport parisien qu’est le tramway. Il
est à la fois confortable, fluide, silencieux et prioritaire
sur les automobiles. Il permet de voyager
dans un véhicule esthétique tout permettant de
(re)découvrir la ville. Yolande nous sensibilise aussi
sur la fragilité de certains usagers qui doit être
prise en compte afin d’éviter toute stigmatisation
et exclusion.
58

_ Yolande
2. La RATP s’engage
Réintroduit en Île-de-France il y a 25 ans par la
RATP, le déploiement du tramway constitue un axe
majeur du développement du groupe. De nombreux
projets de création ou de prolongements ont été
réalisés ces dernières années, portant de 10 km à
plus de 100 km la longueur des lignes affectées à ce
mode de transport offrant des performances remarquables
en termes de vitesse et de régularité.
3. Innovons !
La lutte contre l’âgisme - discrimination liée à
l’âge - doit se poursuivre à travers des campagnes
d’affichage mais aussi par l’organisation d’animations
permettant à différentes générations de se
rencontrer et d’échanger pour apprendre à mieux
voyager ensemble.
59

Silvermobilités _
60

Paul
Paul appartient à la cohorte des
personnes susceptibles de lire les
albums de Tintin.
61

Silvermobilités _
Paul est aujourd’hui bénévole
dans de nombreuses associations,
il a été médecin du
travail, notamment au sein
de la MDPH (Maison Départemental
des Personnes Handicapées).
Il n’a pris sa retraite
qu’à l’âge de 72 ans, en raison
d’une déficience auditive devenue
sévère. Au cours de sa vie
professionnelle, il a régulièrement
utilisé les transports en
commun, principalement le
bus et le métro. Depuis qu’il est
retraité, il privilégie l’usage du
bus et se déplace également en
métro dont il apprécie la rapidité.
Domicilié à Paris, sa carte
Navigo lui permet de « se déplacer
quand il veut, sans avoir
à réfléchir ». Il aime la facilité
avec laquelle on peut prendre
les transports en commun,
ainsi que leur régularité. Paul
nous fait part de sa sensibilité
au phénomène de congestion
des transports publics. Il n’aime
guère la promiscuité et met en
avant le problème des places
assises : « Le nombre de places
réservées dans le bus a diminué.
De même, dans les abribus, la
quantité de places assises est
très insuffisante. Il fait le constat
que « s’il y a un peu plus de
place dans les nouveaux autobus
pour mettre un fauteuil
roulant, c’est au détriment des
places assises. Il est dommage,
qu’à cet emplacement, il n’y
ait plus de strapontin, comme
auparavant ».
Mon sentiment est que le
tramway est assez agréable :
il y a davantage de places que
dans les anciennes lignes du
PC qui effectuaient un trajet
similaire.
Paul est enclin à comparer
avec ce qu’il a vu et vécu dans
d’autres pays. « Dans les bus
parisiens, le chauffeur n’est pas
censé s’occuper du problème du
respect des places prioritaires.
Ce problème existe partout, bien
entendu : certains ne veulent
pas céder leur place à ceux qui
la réclament de bon droit. Au
62

_ Paul
Canada, le conducteur, sans
quitter son poste de conduite,
ne repart pas tant que le conflit
n’est pas réglé. À Paris, le senior
reste souvent debout, après
avoir fait part de sa demande
à un autre voyageur, sans obtenir
gain de cause. Il faut que les
chauffeurs de la RATP soient
formés pour faire respecter l’accès
aux places prioritaires. Par
ailleurs, il arrive assez souvent
que les portes se referment sur
un voyageur. Je ne sais pas si
cela relève d’un automatisme
mal réglé ou d’une manœuvre
inadéquate du chauffeur,
toujours est-il que c’est désagréable,
voire dangereux ».
« À plusieurs reprises, j’ai
constaté que malgré l’appui sur
le bouton de demande d’arrêt,
le chauffeur « zappe » l’arrêt.
Cela m’est personnellement
arrivé et c’est très gênant. Il
faut aussi que le chauffeur soit
plus précis à l’accostage. Parfois,
le bus se gare à 1 mètre du
trottoir, alors qu’il n’y a pas de
voiture en stationnement. Pour
les seniors, cela oblige à faire
des efforts importants, lors de
la monté et de la descente. C’est
malheureusement fréquent,
aussi je n’hésite pas à féliciter
63

Silvermobilités _
un chauffeur quand il accoste
correctement. Je regrette également
ce qui se passe quand les
lignes de bus sont détournées,
pour une raison ou une autre.
Le plus souvent, les chauffeurs
ne sont pas en capacité de nous
informer sur les autres moyens
de transport pour parvenir à
destination. Dernièrement, suite
à une interruption de trafic sur
la ligne 12 du métro, j’ai expliqué
à un voyageur comment
rejoindre la station Madeleine.
Les agents présents n’ont pas su
renseigner cette personne, c’est
moi qui lui ai indiqué l’itinéraire
à suivre. Il faudrait assurer aux
agents de la RATP une meilleure
formation sur la connaissance
des réseaux ».
Au Canada, le conducteur, sans
quitter son poste de conduite,
ne repart pas tant que le conflit
n’est pas réglé.
« L’information sonore à bord
des bus a été améliorée. Par
contre, sur les quais du métro,
c’est peu audible. Pour ma part,
souvent je ne comprends pas ce
qui est dit. Il y a deux jours, je
me trouvai à la station Gare du
Nord sur le quai de la ligne 5. La
circulation des trains était ralentie,
les annonces n’étaient pas
très compréhensibles. Pour bien
communiquer, il faut aller à l’essentiel
! À quoi bon ajouter des
mots qui n’apportent rien ? L’information
principale est perdue
au milieu d’autres informations.
Autre chose : les modifications
de la signalétique me semblent
parfois faites en dépit du bon
sens. Un exemple : prenez le
pôle d’échange de Châtelet -
Les Halles, moi je suis un vieux
parisien qui connait bien cette
station. Avec la nouvelle signalétique
mise en place, je suis
perdu, elle ne me permet pas
de me retrouver, il y a des flèches
qui vont dans toutes les directions,
ça me perturbe et beaucoup
de gens aussi sont perdus.
Alors comment une personne
qui « débarque » à Paris peutelle
se repérer ? Là, il y a un
réel effort à fournir. Regardez
64

_ Paul
la station République, il y a 5
lignes avec les correspondances,
et là c’est bien indiqué. Il faut
prendre modèle sur ce qui est
pertinent ».
Les agents présents n’ont pas
su renseigner cette personne,
c’est moi qui lui ai indiqué
l’itinéraire à suivre.
Autres appréciations
mentionnées par notre interlocuteur
: « Mon sentiment est que
le tramway est assez agréable :
il y a davantage de places que
dans les anciennes lignes du
PC qui effectuaient un trajet
similaire. Le point que je trouve
perfectible, c’est l’intermodalité
des différents moyens de transport
; prenons un exemple : à la
Porte d’Orléans, les arrêts de bus
sont relativement éloignés de la
station du tramway. Ainsi, pour
un senior, changer de mode
de transport, c’est un peu le
parcours du combattant. Cela
devrait pouvoir être amélioré ».
Un autre point critique : « Pour
prendre le tramway, il faut traverser
la chaussée, là aussi ce n’est
pas très rassurant ». Quant à l’accessibilité
du métro, Paul la juge
catastrophique, du fait « que la
loi de 2005 a prévu d’exclure
du délai de 10 ans le réseau du
métro parisien. Il faudrait quand
même faire des efforts, mettre
des escalators à la place des
escaliers. Il y a beaucoup trop de
marches dans le métro parisien.
Pour les personnes qui ont des
problèmes de motricité, il est
aussi difficile de descendre que
de monter, et la descente peut
être dangereuse ».
Paul conclut en « encourageant
le STIF (Syndicat des
Transports en Ile-de-France)
à engager une réflexion sur la
tarification des transports pour
les seniors. Les seniors pourraient
bénéficier d’un prix réduit
même pour l’achat d’un ticket à
l’unité. Je ne le verrai peut-être
pas, mais j’attends avec impatience
les grandes évolutions à
venir concernant les nouveaux
transports, les voitures auto-
65

Silvermobilités _
nomes, qui vous véhiculeront
à partir de votre domicile
jusqu’à la destination choisie.
Ces voitures s’attèleront peutêtre
les unes aux autres et cela
deviendra une autre forme de
transport en commun ! ».
1. Un senior en mouvement
Paul est un utilisateur régulier et « averti ». Ses
remarques sont précises et précieuses et illustrent
son souci de détecter les champs et les leviers
d’amélioration.
66

_ Paul
2. La RATP s’engage
Le métro parisien a été construit au début du
20ème siècle, évidemment sans cahier des charges
d’accessibilité. Le temps ont changé. Après la ligne
14 instaurant la prise en compte de l’accessibilité
pour tous, les prolongements de lignes du réseau
Métro sont désormais appréhendés selon le principe
de « conception universelle ». Première illustration
à venir : le prolongement de la ligne 11 entièrement
accessible à tous. Les travaux fourniront
également l’opportunité de réduire la pénibilité des
cheminements de certaines stations existantes par
l’installation d’escaliers mécaniques (Hôtel de Ville,
Belleville, Pyrénées, Place des Fêtes).
67

Silvermobilités _
3. Innovons !
Au-delà du perfectionnement des équipements,
valorisons l’humain ! En particulier, l’action des
PAM et de l’association « les Compagnons du
Voyage », créée conjointement par la RATP et la
SNCF, à travers une campagne de communication
sur différents supports notamment numériques.
68

69
_ Paul

Silvermobilités _
70

Marie-José
Marie-José naît en région parisienne
alors qu’au cours de la même année,
Elvis Presley voit le jour dans l’état
du Mississipi.
71

Silvermobilités _
Marie-José est une artiste
reliée à Terpsichore, la muse de
la danse. Elle a principalement
accompli sa carrière à l’étranger,
notamment en Amérique
du Sud où elle a vécu de
nombreuses années. Elle et sa
famille sont rentrées en France
dans les années 70. « Le retour
en métropole n’a pas été facile
car, hormis mes propres parents,
je n’avais pas vraiment de
connaissances. Pour me rendre
au travail, je prenais quotidiennement
le métro. J’ai pris ma
retraite en 1995 et deux ans plus
tard, je me suis retrouvée en face
de lourds problèmes de santé
en raison d’une arthrose invalidante.
J’ai donc été contrainte
de modifier mes habitudes de
transport ».
Malgré le fait que tout ne soit
pas parfait dans le monde des
transports en commun, je pense
que la mobilité c’est comme la
danse : essentielle et précieuse,
la mobilité est au cœur de la vie !
Aujourd’hui, Marie-José utilise
occasionnellement les services
du réseau PAM, service de
transport à la demande pour
personnes à mobilité réduite
organisé par le STIF (Syndicat
des Transports d’Île-de-France).
Il lui arrive aussi de faire appel
aux Compagnons du Voyage qui
proposent un service d’assistance
et d’accompagnement pour
les déplacements en transport
en commun. Le plus souvent,
elle prend le bus seule, en utilisant
son fauteuil électrique.
« Les sorties doivent être organisées
avec minutie ; pour mon
jour de sortie en bus, je prévois
en général plusieurs déplacements
: rendez-vous médicaux,
courses, promenade… ».
Marie-José note que des
progrès significatifs ont été
accomplis dans les transports
pour les personnes handicapées.
« Les chauffeurs ont été
formés pour aider et accueillir
les personnes en situation de
handicap. Un jour, le chauffeur a
fait déplacer 3 poussettes pour
72

_ Marie-José
que je puisse monter dans le bus
avec mon fauteuil ». Il n’y a pas
si longtemps, elle se souvient
avoir adressé des lettres de
réclamations à la RATP. Alors que
le bus n’était pas correctement
garé le long du trottoir, un chauffeur
lui avait dit : « Si vous n’êtes
pas contente, vous n’avez qu’à
prendre un taxi ». Cela arrive
encore quelquefois, les chauffeurs
ne respectent pas toujours
les règles, certains sont plus
attentionnés que d’autres. Une
autre fois, un chauffeur a pris le
temps de l’aider. Là aussi, elle a
écrit un courrier, mais cette fois
c’était une lettre de félicitations.
« Je remarque maintenant qu’il
y davantage de respect pour
les personnes handicapées. La
semaine dernière, j’ai fait signe
au chauffeur et il s’est bien garé.
À l’intérieur du bus, il y avait
une autre personne en fauteuil,
bien positionnée, donc il n’y a
pas eu de souci. C’est une belle
amélioration, surtout après avoir
connu de nombreuses petites
galères ! ».
Les sorties doivent être
organisées avec minutie ; pour
mon jour de sortie en bus,
je prévois en général
plusieurs déplacements :
rendez-vous médicaux,
courses, promenade…
Marie-José apprécie les
nouveaux bus dans lesquels la
barre centrale a été repositionnée.
Maintenant c’est impeccable,
apprécie-t-elle. Cependant,
elle constate que sur le
réseau bus les correspondances
demeurent compliquées et cite
l’exemple du 85 qui dessert, au
niveau de son terminus, la mairie
de Saint-Ouen : le trottoir étant
en courbe, il est impossible de
déployer la rampe. Il faut que je
descende à l’arrêt situé avant la
mairie, c’est absurde et contraignant.
Concernant le tramway,
elle manifeste son souhait de
voir allouer un emplacement
précis, réservé aux fauteuils
roulants « car on ne sait jamais
où se mettre pour ne pas gêner
les autres voyageurs ».
73

Silvermobilités _
Autre mésaventure
citée par Marie-José :
« Dernièrement, j’ai pris la ligne
14 à Châtelet pour me rendre à
la station Bibliothèque François
Mitterrand. J’ai eu des difficultés
à cause de mauvaises informations
qui m’ont été données au
guichet. Je n’arrivais pas à accéder
au quai par l’ascenseur indiqué.
J’ai dû attendre 20 minutes
près de la borne d’appel. Les gens
passaient à côté de moi sans se
soucier de savoir si j’avais un
problème. Il faut instaurer plus
de civisme ! De plus, il est impératif
que le matériel destiné à
aider les personnes en situation
de handicap soit opérationnel et
vérifié régulièrement ».
Une autre fois, un chauffeur
a pris le temps de l’aider. Là
aussi, elle a écrit un courrier,
mais cette fois c’était une lettre
de félicitations.
Pour conclure, Marie-José
indique que dans son quartier
se trouve le Montmartrobus qui
relie la Mairie du 18 e à la place
Pigalle en passant par Montmartre.
« Des touristes, mais
aussi de nombreuses personnes
âgées empruntent ce minibus
74

_ Marie-José
qui n’est malheureusement
pas accessible. D’après moi, il
faut rendre ce bus accessible.
Malgré le fait que tout ne soit
pas parfait dans le monde des
transports en commun, je pense
que la mobilité c’est comme la
danse : essentielle et précieuse,
la mobilité est au cœur de la
vie ! ».
1. Un senior en mouvement
Seule ou accompagnée, Marie-José utilise
fréquemment le bus ou le PAM (service de transport
à la demande) pour se déplacer. Elle apprécie que les
chauffeurs soient attentifs au bon positionnement
du bus vis-à-vis du trottoir pour que la rampe soit
dépliée convenablement. Elle déplore parfois le non
fonctionnement du matériel destiné aux personnes
à mobilité réduite.
75

Silvermobilités _
2. La RATP s’engage
Un guide des bonnes pratiques est distribué lors
des formations des agents de la RATP afin de les
sensibiliser aux différentes formes de handicap. Ce
guide, élaboré avec les associations de personnes
handicapées, dresse l’inventaire des attitudes
adaptées et leur permet de mieux accueillir les
personnes à mobilité réduite.
La RATP opère pour le compte du STIF (Syndicat
des Transports d’Île-de-France un service de transport
à la demande pour les personnes à mobilité
réduite: le PAM (Pour aider à la Mobilité) permet
d’effectuer un transport porte à porte régulier ou
occasionnel.
76

_ Marie-José
3. Innovons !
Les dispositifs qui visent à favoriser l’accès aux
transports pour les personnes à mobilité réduite
sont indispensables et leur fiabilité se doit d’être
éprouvée. Il est important de veiller à ce que tous
ces équipements fonctionnent lors du départ du
bus. Une check-list co-conçue avec des usagers
pourrait être un outil intéressant à expérimenter
afin de vérifier, avant le départ des bus du dépôt, si
tout est conforme pour un accueil optimal.
77

Silvermobilités _
78

Claude D.
Alors que Batman et Robin
apparaissent pour la première fois
dans les journaux américains,
Claude vient au monde.
79

Silvermobilités _
Claude grandit, poursuit ses
études et devient chercheur
dans un grand organisme
public. Il accomplit sa carrière
dans un laboratoire en électrochimie.
Il gravit tous les
échelons et en devient le directeur,
il a aujourd’hui un statut
de directeur de recherches
émérite. Claude a toujours vécu
et travaillé à Paris. Pour ses
déplacements professionnels, il
utilisait sa voiture, un parking
sur son lieu de travail et une
distance domicile-travail raisonnable
l’ayant conduit à cet arbitrage
: « Pour effectuer ce trajet
en métro ou en bus, il y avait
trop de changements, il fallait
prendre des correspondances ».
Depuis qu’il est retraité,
Claude a laissé sa voiture en
province et ne se déplace plus
dans la capitale qu’en transports
en commun. Il s’estime en
bonne santé : « Moi, je suis en
état de marche, si on peut dire ».
Selon lui, il convient de distinguer
les seniors du 3 e et ceux du
4 e âge. « Les personnes de cette
deuxième catégorie renoncent
au métro car il y a trop d’escaliers.
De plus, aux heures de
pointe, elles ne sont pas rassurées.
Les seniors les plus âgés se
tournent donc majoritairement
vers l’autobus ».
Claude nous indique qu’il
prend de temps à autre le
80

_ Claude D.
tramway, mode qu’il apprécie
sur bien des plans. « Ce qui est
particulièrement intéressant,
c’est la continuité bus-tramway
au niveau tarification. Je regrette
que ce principe ne soit pas appliqué
lorsqu’on prend le bus et le
métro, alors que dans d’autres
pays européens, on peut utiliser
les transports en commun avec
le même ticket, pendant 1h30 à
2h00, tous modes confondus ».
ils se connectent à leur univers,
mais vous n’existez pas à leurs
yeux, ils sont dans leur monde
Claude nous alerte sur la
conduite sportive de certains
conducteurs d’autobus. Dans
le cadre du Conseil de quartier
des seniors auquel il participe,
il se souvient avoir vu le
film intitulé Albertine prend
le bus. « Ce petit film d’animation
montre les problèmes que
peuvent rencontrer les seniors.
En quelque sorte, un guide de
voyage pour personne âgées,
avec des astuces pour apprendre
à monter et descendre du bus
en toute sécurité. Il reconnaît
que, du fait d’une circulation
routière trop souvent chaotique,
les chauffeurs sont parfois
conduits à freiner brutalement,
c’est un problème critique
pour les personnes âgées qui
sont en position debout et
pour lesquelles une chute peut
évidemment avoir de lourdes
conséquences. « Il est crucial
que la RATP assure une formation
continue à son personnel
au sujet de la vulnérabilité que
confère l’avancée en âge ».
Pour le bus, dans certaines
tranches horaires, le temps d’attente
va au-delà de ce qui est
acceptable. Plus de 15 minutes,
c’est fastidieux et fatiguant pour
les usagers. Sur son Smartphone,
Claude utilise l’application RATP
qui indique notamment l’horaire
des prochains passages
des bus. Mais beaucoup de
seniors ne sont pas équipés de
portables, observe-t-il. Alors,
ajoute-t-il, ils découvrent le
problème au dernier moment,
81

Silvermobilités _
lorsqu’ils se trouvent au pied du
mur !
S’agissant des autres modes
de transports, notre directeur de
recherche émérite pointe également
le déficit d’informations
et l’impute en particulier au
système Siel qui est installé dans
le métro et qui a été conçu avec
un nombre trop limité de caractères
par message. « Comme
c’est le support qui est en cause,
il faut en attendre un nouveau
qui offrira une information plus
détaillée. Quand il y a une interruption
de trafic sur une ligne,
l’information communiquée est
trop succincte. Elle ne permet
pas, dans le cas d’un trajet occasionnel,
de prendre connaissance
des alternatives possibles
pour aller à destination ».
Claude assigne à la mobilité
un rôle important : « Les
transports en commun ont
un rôle clé, ils évitent que les
gens restent isolés. À Paris, on
a choisi une politique qui vise à
réduire la place de l’automobile.
Cela implique le renforcement
de l’offre en matière de transports
publics. Heureusement,
on a facilité la circulation des
bus avec les couloirs aménagés.
Puisque le nombre de seniors
augmente, il faut que l’offre de
transport de surface augmente
corrélativement ».
Il est crucial que la RATP
assure une formation continue
à son personnel au sujet de
la vulnérabilité que confère
l’avancée en âge
Claude constate avec amertume
que l’attitude des gens a
changé, surtout dans le métro.
Il précise : « Les gens sont indifférents,
s’installent dans la
rame, naviguent sur leur Smartphone
ou leur tablette ; ils se
connectent à leur univers, mais
vous n’existez pas à leurs yeux,
ils sont dans leur monde ».
Enfin notre interlocuteur
revient plus généralement sur
la conflictualité entre voyageurs.
82

_ Claude D.
« Dans le bus, les poussettes
sont un réel problème, cela crée
des conflits. Prenez la ligne 46
qui va à Vincennes. Avec les
beaux jours, on se retrouve
régulièrement face à des
conflits entre passagers à cause
du nombre de poussettes qui
dépasse celui autorisé. J’ai vu à
plusieurs reprises des personnes
en fauteuil roulant rester sur le
trottoir car elles ne pouvaient
pas monter à cause des poussettes.
C’est de l’incivilité et c’est
insupportable ! Avec une politique
d’accessibilité volontariste,
on pourrait éviter des conflits
entre usagers. Il faut savoir sortir
des situations ubuesques ! ».
1. Un senior en mouvement
Claude est un sénior très investi dans le Conseil
de quartier. Pour lui, la mobilité est source d’autonomie.
Il reconnait les efforts réalisés par la RATP
mais déplore la conduite sportive de certains chauffeurs
de bus et le manque de civisme qui se manifeste
trop souvent dans les transports. Il souhaiterait
également que soit établie une réforme dans
la tarification des titres de transport plus favorable
aux seniors.
83

Silvermobilités _
2. La RATP s’engage
Pour contrer les incivilités dans les transports, la
RATP a lancé plusieurs campagnes de sensibilisation
des usagers : «Restons civils sur toute la ligne».
Par ailleurs, les petits films d’animation de la
série « Accessible ensemble » réalisés par la RATP
donnent des informations sur les aménagements,
les ressources, et les services conçus pour les
personnes à mobilité réduite. Car l’attractivité et l’appropriation
des transports en commun impliquent
la connaissance de leur « mode d’emploi » notamment
par les publics les plus fragiles. Plus précisément,
Partez à la rencontre d’Albertine, de Théo, de
Yacine, de Lili et de leurs amis qui, mieux que tout
autre, vous en convaincront !
84

_ Claude D.
3. Innovons !
Il est important de renforcer la sensibilisation
des passagers aux difficultés rencontrées par les
personnes âgées et les personnes à mobilité réduite
dans les transports en commun. Pourquoi ne pas
développer une campagne de sensibilisation avec
des affiches dans le même ton que celles développées
lors de la précédente campagne contre les incivilités
dans les transports ?
Faciliter l’accès aux transports c’est aussi une
question de prix et de lisibilité de l’offre. Une simplification
de la grille tarifaire notamment pour les
liaisons bus-métro est une évolution dont la pertinence
pourrait être appréciée par le STIF. L’accessibilité
implique des politiques institutionnelles qu’il
faut parfois savoir réinterroger.
85

Silvermobilités _
86

Marie
Françoise
Marie-Françoise vient au monde l’année
où l’aviatrice américaine Amelia Earhart
réussit l’exploit de traverser en solitaire
l’océan Atlantique.
87

Silvermobilités _
Pour commencer l’entretien,
Marie-Françoise se réfère
à une anecdote dont elle a été
témoin : c’est une dame très
handicapée, tout le monde la
regarde dans l’autobus en se
disant comment va-t-elle s’y
prendre pour descendre ? Le bus
arrive à proximité de son arrêt,
alors elle se lève, actionne le
bouton de demande d’arrêt et
s’accroche aux barres. Pendant
que les passagers retiennent
leur souffle et continuent à la
fixer du regard, elle se retourne,
leur sourit et dit : « Vous voyez,
je suis comme Tarzan, je vais
de liane en liane ». Tout le
monde s’est mis à rire. J’aime
cet humour qui relativise et qui
focalise sur ce qui est déculpabilisant.
Je trouve cette histoire
merveilleuse : cette dame,
adorable, peu valide, a su créer
un lien entre les voyageurs ; une
fois descendue, les passagers se
sont mis à dialoguer, alors que
10 minutes auparavant ils ne
s’adressaient pas la parole.
Marie-Françoise est mariée,
elle a été médecin et s’est
singulièrement intéressée aux
problèmes sociaux et psychologiques.
Elle s’est beaucoup
investie dans la vie associative
et a fondé l’École des Grands-parents
Européens. Elle est également
l’un des membres fondateurs
de l’association Old’Up
qui s’est fixé pour but, depuis sa
création en 2008, de « DONNER
DU SENS ET DE L’UTILITÉ À
L’ALLONGEMENT DE LA VIE ».
Il y a aussi un changement
des comportements : on se
fait régulièrement bousculer,
notamment par les personnes
qui portent un sac à dos.
Marie-Françoise est et se veut
parisienne : « Je suis une fleur de
l’asphalte, je ne connais pas la
campagne, je suis née à Paris, j’y
ai vécu toute ma vie ». L’avancée
en âge, précise-t-elle, peut être
un moment intéressant à vivre.
Mis à part les aléas qui touchent
la santé, les multiples mini-han-
88

_ Marie-Françoise
dicaps auxquels elle avoue ne
pas échapper. « Mais le reste
est un éblouissement : avoir la
chance de bien vieillir, prendre
le temps de s’investir, de rester
curieux, de se confronter tous
les jours à des surprises - pas
que des bonnes – et voilà le
sens de la vie qui se développe,
c’est formidable. Le XX e siècle
nous a apporté des capacités, de
la liberté et de l’autonomie. Il y
a un véritable éveil à vivre lorsqu’on
est senior dans la société
d’aujourd’hui ».
Question transports, notre
médecin renchérit : « J’ai
toujours beaucoup apprécié
l’autobus, beaucoup moins le
métro, ce qui n’est pas le cas
de tout le monde. J’ai une amie
qui n’aime pas l’autobus, car
elle a peur de tomber, elle a 86
ans et continue à faire tous ses
déplacements en métro. Moi,
je suis un peu claustrophobe,
mais je prends quand même
le métro de temps en temps.
J’ai aussi une petite voiture
que j’utilise quand je sais que
je peux me garer facilement. Je
suis très contente de l’autobus,
mais quand on a un rendezvous,
il faut faire attention aux
fréquences, certaines lignes sont
très irrégulières, vous pouvez
avoir 3 bus à la suite et ensuite
devoir attendre 25 minutes.
Bien sûr, il y a les nouveaux
téléphones qui permettent de
consulter les horaires du bus,
mais je suis habituée comme ça,
donc je m’en sers peu souvent.
Je sais qu’il y a des navettes
fluviales, des Batobus sur
la Seine. C’est un transport
à développer, c’est plaisant
d’imaginer la conjugaison
du transport urbain et de la
croisière !
Le grand pas en avant, c’est
la rénovation des abribus avec
l’affichage du temps d’attente.
C’est très pratique, car on sait
à tout moment où on en est,
et si ça vaut le coup d’attendre.
J’ai reçu un excellent conseil :
c’est bien connu, il faut marcher
89

Silvermobilités _
quand on est vieux - c’est le
sport idéal. Donc quand vous
arrivez à l’arrêt de bus et qu’il y a
une attente relativement importante,
il faut marcher jusqu’au
prochain arrêt.
Dans le métro, quand je me
rends par exemple à Châtelet
ou à Montparnasse, je suis
réticente à prendre le tapis
roulant, c’est interminable, de
plus, il y a beaucoup d’escaliers
et peu d’escalators. C’est
pénible pour les personnes
âgées, mais aussi pour les
mères de famille contraintes de
prendre leur poussette à bras
le corps pour monter les escaliers.
Aujourd’hui, ce n’est plus
normal. II y a une dizaine d’années,
j’ai participé à des travaux
sur l’accessibilité organisés par
la RATP. On voyait que se mettait
en place un projet bien défini
pour le réseau bus, avec les
rampes et les places réservées
pour les personnes en fauteuil
roulant. Mais pour le métro,
c’était une autre affaire : la
RATP était face à une montagne
qu’elle ne pouvait pas gravir.
L’une des qualités du métro
parisien, c’est la régularité. Par
contre, la descente, pour les
90

_ Marie-Françoise
genoux, ce n’est pas top ! Vous
savez, avec l’avancée en âge,
on a tous des petits bobos aux
genoux, donc la descente des
escaliers est un problème. Il
y a aussi un changement des
comportements : on se fait régulièrement
bousculer, notamment
par les personnes qui
portent un sac à dos. Il y aurait
peut-être une campagne d’éducation
à faire sur ce sujet, sans
parler de ceux qui ne se lèvent
pas pour laisser leur place assise
à une personne âgée. Récemment,
je suis allée voir une pièce
de théâtre avec une amie qui a
90 ans. En sortant, il était 23h30,
elle a pris toute seule le métro
pour rentrer à son domicile. Je
suis stupéfaite de la capacité de
certains de mes aînés de ne pas
se ménager et d’entreprendre
encore tant de choses ! Moi, je
fais très attention, car j’essaie
d’éviter les chutes. Par exemple,
quand je sors du bus, je prends
la précaution de me tenir à la
barre, ce que je ne faisais pas
auparavant. C’est très important
les barres d’appui. L’appui
humain est également une
affaire sensible : il y a des chauffeurs
aimables et d’autres non.
Il y a du reste quelques fangios,
ils ont une conduite sportive,
un coup de frein brutal qui
peut entraîner des chutes, tant
chez les enfants que chez les
personnes âgées. Mais dans l’ensemble,
ça marche assez bien, je
suis admirative.
Malgré le fait que tout ne soit
pas parfait dans le monde des
transports en commun, je pense
que la mobilité c’est comme la
danse : essentielle et précieuse,
la mobilité est au cœur de la vie !
Marie-Françoise nous fait
savoir qu’elle apprécierait
que les annonces sonores qui
signalent l’arrêt ou la station,
dans le réseau de surface ou le
réseau ferroviaire, soient généralisées.
« Dans le métro, il y a un
changement que j’apprécie : sur
la ligne 1, par exemple, on est
protégé des risques de chute sur
le quai par des portes palières,
91

Silvermobilités _
c’est une amélioration considérable.
Avant, j’avais toujours
la crainte que quelqu’un me
pousse sur les voies. Il faut continuer
à mettre en place ce dispositif
sur toutes les lignes ».
J’ai reçu un excellent conseil :
c’est bien connu, il faut marcher
quand on est vieux - c’est le
sport idéal.
Au niveau tarif, elle estime
que les titres de transport sont
chers pour les seniors. « Un
ticket devrait permettre de voyager
sur tous les transports - bus,
métro, tramway, RER - pendant
une durée donnée, 1h30 par
exemple. Je regrette la suppression
de la vente de carnets
de tickets dans les bureaux
de tabac, plus personne ne
vend des tickets en surface
et les personnes âgées sont
contraintes d’entrer dans une
station peu accessible pour s’approvisionner.
La carte des bus
parisiens est assez compliquée
à lire et pas très claire en ce qui
concerne les correspondances.
Là encore, il faudrait améliorer
vis-à-vis des seniors la présentation
et la diffusion des informations
».
Prendre le bus, c’est redécouvrir
Paris, on voit les différents
quartiers, la vie, c’est formidable
! Quant aux tramways, ils
sont beaux, ils sont agréables
mais trop lents à mon goût :
dernièrement, j’ai mis plus de
2 heures pour le trajet Pont de
Garigliano - Porte d’Aubervilliers.
Une autre chose épouvantable
pour moi, c’est la signalétique
sur les quais des RER. Je suis
complètement perdue, on ne
sait jamais si on doit monter
ou pas. Certains RER ont des
marches très hautes, et là ce
n’est plus du tout accessible,
aujourd’hui ce n’est pas admissible.
De plus, il y a rarement du
personnel présent sur le quai, et
au guichet on a souvent l’impression
de déranger, on nous
envoie vers les automates. C’est
vraiment dommage, il y a là des
marges de progrès.
92

_ Marie-Françoise
Je sais qu’il y a des navettes
fluviales, des Batobus sur la
Seine. C’est un transport à
développer, c’est plaisant d’imaginer
la conjugaison du transport
urbain et de la croisière !
Compte tenu de la pollution
et du bruit que l’on veut éviter
à Paris, il serait intéressant de
remettre des tramways dans
le centre-ville et de développer
les Traverses, ces minibus accessibles
qui assurent la desserte
d’un quartier. Pour Marie-Françoise,
un autre point important,
c’est de densifier l’information :
« Il n’y a pas de points d’information
sur le réseau de surface
de la RATP, aussi bien dans les
lieux touristiques que dans les
terminus de bus. C’est un vrai
besoin. Par ailleurs, je pense
que les seniors aimeraient
davantage d’informations sur
les projets mis en œuvre par
la RATP. Les actions entreprises
pour développer l’accessibilité
méritent d’être valorisées pour
être connues de tous ».
93

Silvermobilités _
1. Un senior en mouvement
Marie-Françoise est une personne très impliquée
dans la vie associative. Elle déplore que les
carnets de tickets soient uniquement vendus dans
les stations de métro difficilement accessibles aux
personnes âgées. Elle souhaiterait que des agences
RATP de surface puissent voir le jour pour éviter cet
écueil.
L’idée de circuler à bord des Batobus séduit
Marie-Françoise qui entrevoit un moyen original
et ludique pour découvrir de nouvelles facettes du
territoire parisien.
94

_ Marie-Françoise
2. La RATP s’engage
De nombreux commerces de proximité (librairies,
points presse, débitants de tabac...) agréés par
la RATP sont à votre disposition pour l’achat de vos
carnets de tickets et les rechargements Navigo Mois
et Semaine. La recherche de ces points de ventes est
activable sur le site internet de la RATP, à l’adresse
suivante : http://www.ratp.fr/informer/achat_titres/
depositaires/les_commerces_agrees_ratp.php
3. Innovons !
Initialement créée pour les touristes et les
balades, les navettes fluviales peuvent être un
moyen de transport ludique et efficace pour
rejoindre les différents quartiers de Paris à proximité
de la Seine. Une offre et un usage plus denses
conduiraient à une réduction de la circulation
routière dans la ville, tout en permettant de découvrir
autrement la capitale.
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Silvermobilités _
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Jacques
Jacques nait l’année où se déroule
la première partie de baseball au
Yankee Stadium de New York.
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Silvermobilités _
Jeune homme, Jacques suit
des cours aux Arts et Métiers
et débute son activité professionnelle
en tant qu’assistant
d’un professeur. Ne se voyant
pas « destiné à la paillasse »,
il intègre ensuite une grande
entreprise spécialisée dans l’organisation
du travail. Après avoir
été en charge du contrôle qualité
de plusieurs sociétés, il a mis
fin à sa carrière de salarié à l’âge
de 68 ans en qualité de directeur
de fabrication. Sa « vie active »
ne s’est pas pour autant arrêtée
à cette escale. En effet, Jacques
est un inventeur et a déposé de
nombreux brevets. Il a notamment
développé un dispositif de
conception pour des cabinets
d’architectes qui a bien fonctionné
jusqu’à l’arrivée de l’ordinateur.
En 2006, Jacques a été
victime d’une crise d’arthrose
et, à cette occasion, s’est rendu
chez un revendeur de matériel
médical. Il s’est alors rendu
compte que la palette d’équipements
pour personnes à mobilité
réduite ne répondait pas à
ses attentes. Ne désirant ni d’un
déambulateur ni d’un fauteuil
roulant, l’idée lui est alors venue
d’un nouveau « deux-roues »
dont il a réalisé un prototype.
« Ma draisienne pour seniors,
c’est une déclinaison de la
draisienne pour enfant, elle se
présente sous la forme d’une
trottinette avec une selle. L’utilisateur
se déplace de façon autonome
en se propulsant avec ses
pieds », précise-t-il. Pour cette
ingénieuse invention, excusez
du peu, il a été médaillé d’or du
concours Lépine en 2010 et en
2012 !
Quand je prends les transports
en commun avec ma draisienne,
les gens me regardent. Ils
doivent se dire tient encore un
farfelu qui marche assis.
Jacques a toujours vécu en
banlieue parisienne. S’il utilise
principalement la voiture, il lui
arrive régulièrement de prendre
les transports en commun,
principalement l’autobus, mais
98

_ Jacques
l’idée d’attendre un bus lui est
pénible. Il approuve l’initiative
de rendre les bus accessibles
avec le système de rampes
permettant aux personnes
handicapées de monter à bord.
Lui ne l’utilise pas, mais l’a vu
fonctionner. Il apprécie énormément
le tramway ; il l’a pris
récemment pour se promener
avec ses arrières petits-enfants
au parc floral du bois de
Vincennes. Notre inventeur a
pu constater qu’il lui était facile
de monter dans la rame avec
sa draisienne, la barre centrale
étant bien positionnée. « Il y a
de l’espace et l’affichage est clair.
Le tramway, c’est pour moi un
très bon moyen de transport ».
Notre nonagénaire enfourche
le cadre de la prospective et
renchérit : « Le problème dans
le métro, c’est la densité des
voyageurs. Il m’est arrivé de ne
pas pouvoir descendre tellement
il y avait de monde. Ce
n’est pas très rassurant. Aux
heures de pointe, c’est terrible
comme les gens sont compressés.
Avec les moyens électroniques
actuels, on doit développer
massivement le télétravail
dans les grandes métropoles,
notamment avec la création
de bureaux relais. Cela éviterait
une partie des trajets domicile
- travail et permettrait aux
usagers de la route et des transports
en commun de subir des
temps de déplacements moins
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Silvermobilités _
longs ». Autre proposition :
« Pour les seniors, les visiteurs
étrangers et les personnes en
situation de handicap, il serait
intéressant de connaître, sur la
voirie, à proximité des stations
de métro, des arrêts de tramway
et de bus, le niveau d’accessibilité
à partir d’une signalétique
claire et précise. Il y a encore
beaucoup de choses à faire dans
ce registre. Regardez la station
Concorde qui est un haut lieu
touristique. Il y a beaucoup d’escaliers,
pas d’ascenseur, ce n’est
pas normal. Un nombre trop
important de stations de métro
n’ont pas d’escaliers mécaniques
et pour les personnes
âgées, c’est réellement compliqué
! ».
Et de conclure : « Quand
je prends les transports en
commun avec ma draisienne, les
gens me regardent. Ils doivent se
dire tient encore un farfelu qui
marche assis. Je ressens parfois
une certaine bienveillance,
des petits sourires et lorsque
la conversation s’engage, j’explique
ce qu’est mon invention.
Alors le ton change : ah oui, c’est
bien votre truc ! Petit à petit, je
fais la promotion de ma draisienne
car je suis certain qu’elle
peut rendre de grands services.
Mais pour cela, il faudrait la
fabriquer en grand nombre et là
c’est une autre histoire ! ».
Avec les moyens électroniques
actuels, on doit développer
massivement le télétravail
dans les grandes métropoles,
notamment avec la création de
bureaux relais.
100

_ Jacques
1. Un senior en mouvement
Jacques est un inventeur : il a remporté à deux
reprises le prestigieux concours Lépine grâce à
sa draisienne, qui lui permet de se déplacer dans
l’espace urbain en tout équilibre. Pour ses grands
trajets, il utilise le bus et apprécie particulièrement
le tramway car il peut y accéder avec sa draisienne
en toute simplicité.
101

Silvermobilités _
2. La RATP s’engage
L’ensemble du réseau Tramway est accessible :
le plancher bas facilite la montée et la descente
des personnes à mobilité réduite, l’information
voyageur est relayée à la fois en station mais également
dans les rames avec des annonces sonores et
visuelles adaptées. Une application mobile ou une
télécommande universelle sont également opérationnelles
pour les personnes malvoyantes afin de
leur indiquer les temps d’attente.
102

_ Jacques
3. Innovons !
Inscrire dans la politique de communication,
la mise en valeur des inventions comme celle de
Jacques : sa draisienne pourrait permettre ainsi à
d’autres séniors de se déplacer plus facilement et
plus librement. Plus largement, la RATP pourrait
organiser un concours « innovation mobilité » et
primer les inventions les plus pertinentes à l’usage
des personnes à mobilité réduite.
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Silvermobilités _
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En guise de
conclusion
Un itinéraire d’Emmanuel Kant
à Jean Cocteau en passant
par Didier Deschamps
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Silvermobilités _
Dans les Fondements de la métaphysique des
mœurs, Emmanuel Kant écrit « L’homme, et en
général tout être raisonnable, existe comme fin
en soi, et non pas simplement comme moyen
dont telle ou telle volonté puisse user à son gré;
dans toutes ses actions, aussi bien dans celles
qui le concernent lui-même que dans celles qui
concernent d’autres êtres raisonnables, il doit
toujours être considéré en même temps comme
fin ». Il nous semble que les pages qui précèdent
doivent être lues à partir de ce principe de précaution.
En effet, nous avons fait appel à Anik, Claude,
Marie-José et les autres, non pas pour légitimer à
propos de la mobilité des aînés telle ou telle thèse
mais pour accorder de la place à chacun.
Au passage, cela permet de faire l’économie
du consensus omnium et de la détermination
normative des échelles de l’autonomie à partir de
l’âge de capitaine ! Du même coup, se dégage un
point commun à l’ensemble des propos recueillis
: le désir de mobilité n’est pas nécessairement
émoussé quand les capacités motrices sont altérées.
Pour goûter cette bonne surprise, il suffira au
lecteur de revenir sur les portraits de la benjamine
et du doyen présentés dans ces pages : alors qu’un
quart de siècle sépare leur date de naissance, l’un
et l’autre apparaissent maîtres et possesseurs de
ce décret intérieur qui les fait préférer le « maintien
en mobilité » au « maintien à domicile ».
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Une autre remarque nous semble importante.
Le titre donné à ce volume – Silvermobilités -
s’ancre dans la modestie du pluriel. Si nous avions
voulu entreprendre quelque chose d’ambitieux,
il eût fallu circonscrire LA SILVERMOBILITE au
risque d’être condamné à privilégier le concept
au détriment de l’empirique, à substituer la carte
au territoire. Evidemment, il y a dans ce renoncement
une affinité avec notre cœur de métier qui
consiste à transporter des personnes d’un territoire
à un autre (et non d’une carte à une autre).
Nous rappelant que lecture et transport en
commun vont souvent de pair, il se trouvera
certaines voyageuses et certains voyageurs lisant
ces lignes sur nos lignes. Elles et ils pourront entrevoir
que nous n’avons rien retranché aux propos
recueillis. Nous avons laissé s’exprimer la satisfaction
aussi bien que la critique. Car, pour une entreprise
comme la RATP, la ligne de force est liée à un
phénomène essentiel : l’expérience des transports
en commun impose une vision pragmatique du
vivre ensemble. C’est donc aussi, et peut-être en
premier lieu, le « corps social » qui est aujourd’hui
engagé dans la question de la mobilité urbaine.
Cette discussion apparemment abstraite
débouche sur des transformations fondamentales
du point de vue de la pratique elle-même. Un
exemple : nous accueillons, à bord des bus et des
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Silvermobilités _
tramways, des seniors utilisant des déambulateurs
ou des rollators. Il y a encore quelques années, ces
dispositifs d’aide à l’autonomie n’étaient visibles
que dans les couloirs des hôpitaux ou au domicile
des intéressés. Cette simple observation montre
que la RATP n’est pas simplement un producteur
de mobilité mais un acteur d’évolutions sociétales.
C’est l’un des sens que l’on peut donner au
slogan « Demandez-nous la ville ! » dans lequel la
ville désigne l’espace urbain qui se déploie dans
l’au-delà des séparations spatiales, sociétales et
générationnelles.
Il faut souligner que dans la sphère économique,
publique ou citoyenne, rares sont les
champs investis par un déploiement projectif de
cette nature. Une chose est sûre : il n’est jamais
présomptueux de donner son avis à propos de
ce qui est perçu comme bien commun. Il y a là,
d’une certaine façon, la trace d’un discernement
républicain. À l’instar de celui qui se manifeste à
l’égard du football où nombre de supporters sont
enclins à refaire la sélection ou à refaire le match.
Didier Deschamps et ses confrères présents et à
venir n’ont qu’à bien se tenir ! Tout comme nous
qui nous mobilisons au quotidien pour satisfaire
les attentes de l’ensemble des voyageurs.
Sans se confronter au mirage de la Cité idéale,
nous nous devons de porter une attention particulière
aux aspirations exprimées par les dix témoins
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ici interrogés auxquels il convient d’adjoindre
Albertine, notre « VIP » lumineuse et irradiante
qui figure à juste titre et en bonne place dans ce
volume. En guise de conclusion, nous aimerions
clore ce livre sur un clin d’œil. Plus exactement
sur celui que nous adresse Albertine dès la page
de couverture. Si vous regardez de près, de très
près, vous pourrez découvrir qu’au cœur de ce clin
d’œil est déposée cette citation de Jean Cocteau :
« L’avenir n’appartient à personne. Il n’y a pas de
précurseurs, il n’existe que des retardataires.»
Jean-Pierre Texier
RATP - mission Accessibilité
15 mai 2016
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Maquette et création graphique :
Illustrations : agence Starloo Graphic
Supervision : Laurence Calteau, Jean-Pierre Texier,
RATP - Mission accessibilité
Impression : RATP, Paris, juin 2016

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Silvermobilités
Cet ouvrage présente, sous la forme de recueil de témoignages
et d’analyses, une exploration des mobilités urbaines
des aînés. Il questionne le « long désir de bouger » et ses
répercussions sur les politiques d’accessibilité.
« Mobilité » signifie facilité à se mouvoir, à être mis en mouvement,
à changer, à se déplacer, mais aussi caractère de ce qui change,
est fluctuant, instable. « Silvermobilité » traduit l’idée que, dans le
monde contemporain, la vie active ne délimite plus la vie mobile.
La dynamique associée à la mobilité des seniors montre que c’est
la ville elle-même qui se met en mouvement et s’extrait de réalités
figées. Quelles sont les transformations induites par le vieillissement
de la population ? Comment une grande entreprise de transport
telle que la RATP prend en charge les multiples dimensions des défis
d’aujourd’hui et de demain ? Ces questions sont examinées ici et
conduiront à interroger les stratégies, les projets, les méthodes pour
bâtir une « mobilité amie des ainées ».
Ce document est gratuit et ne peut être vendu.