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Libertés et violences<br />
en Inde<br />
Rahul Gandhi, Vice-Président du Congrès<br />
national indien, aux côtés d’étudiants<br />
lors d’une manifestation à l’Université de<br />
Hyderabad pour protester contre la mort de<br />
Rohith Vemula à Hyderabad en janvier 2016.<br />
Nous publions ci-après une déclaration du Comité Exécutif de<br />
l’Association internationale de Sociologie et une lettre ouverte<br />
du 6 mars 2016 signée par plus de 200 sociologues indiens à<br />
l’attention du Président indien, en réaction aux violences et aux<br />
atteintes aux libertés qui se sont produites en début d’année dans<br />
les universités indiennes. Quelle que tournure que prennent les<br />
évènements, ces écrits revêtent une importance historique dans la<br />
mesure où les sociologues y expriment leur profond attachement<br />
à la liberté d’expression dans le milieu universitaire et au-delà.<br />
> Déclaration de l’Association internationale de Sociologie<br />
N<br />
ous, membres du Comité<br />
Exécutif de l’Association<br />
internationale de Sociologie,<br />
souhaitons exprimer notre solidarité<br />
avec les étudiants, enseignants,<br />
écrivains, artistes et activistes qui<br />
en Inde se battent pour le droit à la<br />
liberté d’expression, à la vie et à la<br />
liberté dans un contexte d’attaques<br />
et de brimades collectives de plus en<br />
plus virulentes perpétrées par la droite<br />
fondamentaliste contre toute forme<br />
d’opposition aux violences et à la discrimination.<br />
Nous jugeons particulièrement<br />
préoccupantes les attaques collectives<br />
à l’encontre des minorités et<br />
la restriction des libertés alimentaires<br />
(déguisée en « interdiction du bœuf »)<br />
en Inde. La conversion d’une grande<br />
partie des médias électroniques en<br />
relais de propagande au service de la<br />
droite nationaliste majoritariste, et le<br />
fait que des intellectuels, étudiants et<br />
activistes sont systématiquement et<br />
violemment pris pour cibles à la faveur<br />
de rapports douteux, sont des phénomènes<br />
sans précédent et particulièrement<br />
inquiétants. La situation des<br />
étudiants issus des groupes sociaux<br />
les plus vulnérables – en particulier<br />
les étudiants dalits et ceux issus des<br />
minorités – est l’aspect le plus immédiatement<br />
préoccupant.<br />
Nous considérons que la Constitution<br />
indienne institue un système pluriel qui<br />
ne laisse aucune place à une définition<br />
du pays sur la base de critères religieux.<br />
Dans un contexte d’anti-intellectualisme<br />
et d’attaques au nom du majoritarisme<br />
à l’encontre de tentatives<br />
DG VOL. 6 / # 2 / JUIN 2016<br />
individuelles et collectives pour instaurer<br />
des débats bien informés et une<br />
critique sociale à la fois au sein des<br />
universités et en dehors, nous avons,<br />
en tant que membres d’une association<br />
professionnelle, une lourde responsabilité.<br />
En tant que sociologues,<br />
nous estimons qu’autoriser l’usage illimité<br />
de l’accusation de sédition pour<br />
étouffer toute opposition et la liberté<br />
d’expression, revient, pour reprendre<br />
les termes de Amartya Sen, à faire<br />
preuve de trop de tolérance à l’égard<br />
de l’intolérance.<br />
Nous adhérons à la pétition [qui suit]<br />
adressée au Président indien par plus<br />
de 200 sociologues de l’ensemble<br />
du pays pour protester contre les attaques<br />
perpétrées par des étudiants<br />
appartenant à la section étudiante du<br />
Bharatiya Janata Party [Parti du Peuple<br />
indien, BJP] au pouvoir à l’encontre<br />
de deux sociologues, les professeurs<br />
Vivek Kumar et Rajesh Misra.<br />
Les universités sont censées apporter<br />
un espace propice au débat libre<br />
et éclairé et à l’apprentissage mutuel.<br />
L’agitation grandissante sur les campus<br />
universitaires et l’espace toujours<br />
plus réduit laissé au libre débat, en<br />
particulier l’intolérance manifestée<br />
à l’encontre de toute opposition aux<br />
objectifs de l’Hindutva [l’hindouité],<br />
suscitent de vives inquiétudes parmi<br />
la communauté internationale des sociologues<br />
attachés aux libertés fondamentales<br />
et à la liberté d’expression.<br />
Le suicide en janvier 2016 de Rohith<br />
Vemula, doctorant à la Faculté des<br />
Sciences sociales de l’Université de<br />
>><br />
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