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BOUTIQUES

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tenait derrière son comptoir, la boutiquière, et derrière l’autre vitrine<br />

où des pâtisseries étaient exposées, le chinois se tenait devant tout un<br />

mur rempli d’étagères sur lesquelles s’alignaient les bouteilles d’alcool, de<br />

liqueurs, d’eau, de sirop aux étiquettes colorées. Les étagères inférieures<br />

contenaient des boîtes de conserves, allumettes, bougies, lampe à pétrole,<br />

eau de Cologne, Tout ces articles placés côte à côte, avaient leur place sur<br />

cette étagère. Des outils, des sabres, de la corde, des sacs de clous, des vis,<br />

formaient un coin bricolage. Une autre vitrine abritait les saucisses, le<br />

boucané et autres.<br />

BOUTIK<br />

Dans certaines boutiques,des denrées de base étaient stockées<br />

Sur un côté, se tenait un réfrigérateur vitré (quand on eut l’électricité<br />

!) dont le contenu faisait envie à tous les enfants et aussi aux grands. Ce<br />

qui intéressait encore plus les enfants, c’était bien sûr dans la chambre<br />

froide, les sorbets avec leurs bois empilés, aromatisés à la vanille, au<br />

chocolat, à la grenadine, au coco que ces petits dégustaient.<br />

Une place spéciale était faite pour la balance Roberval et ses poids.<br />

C’est aussi à cette boutique que les enfants achetaient les plus gros pétards,<br />

et les plus beaux feux d’artifice pour les fêtes de Noël. Ces objets à allumer<br />

sont indissociables aux fêtes de fin d’année.<br />

Ce qui faisait marcher ce commerce auprès de la population pauvre<br />

de l’île, c’est bien cette pratique des crédits (basée uniquement sur la<br />

confiance), sans intérêt appelé « carnets ». Le commerçant notait sur<br />

ces carnets tous les achats non payés de chaque personne vivant avec<br />

un crédit. Celui-ci était tenu en double exemplaires, et en fin de mois,<br />

quand le salaire tombait, le client venait régler le chinois, et c’était<br />

reparti pour un autre mois Ainsi allait la vie.<br />

dans des bacs en bois (casier) dans lesquels les chinois plongeaient<br />

d’une main preste, une mesure en fer-blanc ou une sorte de petite<br />

pelle arrondie fabriquée localement. Ces caissons étaient surtout<br />

réservés aux grains, au café au maïs, au sucre. Dans ces denrées, le<br />

maïs était largement vendu, de la farine jusqu’aux grains, en passant<br />

par le fabuleux « maïs sosso ». Pas trop loin de ces bacs, des billots<br />

servaient au découpage de la viande, de la morue séchée, dont l’odeur<br />

empestait toute la boutique. Il faut reconnaître que cette « boutique<br />

chinois » était un capharnaüm d’objets rangés ou suspendus puisque<br />

le magasin constituait la boutique d’alimentation où se dressaient des<br />

remparts de conserves, des murailles d’étoffes et de mousseline, des<br />

cartons de bouteilles ; on y trouvait un coin (pour ne pas dire rayon)<br />

bricolage, toiles, mercerie, librairie etc<br />

La boutique chinois, avec ses diverses marchandises, sa buvette pour le<br />

« p’tit coup d’sec » mettait sa grosse balance à la disposition des planteurs<br />

pour peser leurs productions de maïs, de manioc, ou d’huiles essentielles<br />

(qui sans doute se vendait au kilo !!). Là, s’échangeaient les marchandises<br />

mais aussi les nouvelles du quartier.<br />

Mais dans cette Réunion où le «bon pour» constitue la monnaie<br />

scripturale la plus courante, souvent le commerçant chinois joue le rôle<br />

de banquier. Il ne pouvait en être autrement. Surtout lorsque 80% des<br />

ventes s’effectuent uniquement à crédit. Une pratique qui concerne autant<br />

les classes défavorisées que les couches sociales les plus aisées. Ainsi les<br />

boutiques font de l’avance et permettent à bien des gens d’attendre la fin<br />

du mois sans beaucoup de peine. L’argent-carnet vient donc au secours<br />

de la population en attendant le revenu des récoltes ou le versement des<br />

différentes allocations<br />

Parfois ces chinois avaient plus d’un tour dans leur sac, car au retour<br />

d’un enterrement dans le quartier, certains offraient un « p’tit coup d’sec<br />

» aux parents et amis du défunt. Ce geste touchait bien sûr la clientèle.<br />

Plus tard ces chinois enrichis, leurs enfants bénéficieront d’un certain<br />

capital, et c’est ainsi qu’ils ouvriront une quincaillerie, ou une superette<br />

par exemple, mieux organisée que la boutique de leurs parents.<br />

Le chinois est toujours en activité, mais le créole dira quand il verra<br />

un autre créole s’ennuyer, et revenir, et encore et encore, on lui dira qu’il<br />

est comme « un chinois sans boutique ».<br />

Cela veut bien dire que le chinois est indissociable à sa boutique, sans<br />

celle-ci, il est perdu.<br />

Encyclopédie de la Réunion

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