LA LOI FAIT UN TABAC - DDE69

10 Vendredi 30 mai 2008
pour Pour Directmatin Lyonplus
PLUS
Après la peinture, la photographie et le
dessin, la bande dessinée (BD) est devenue
la nouvelle coqueluche des salles
des ventes, notamment à Paris.
Amateurs de BD, collectionneurs et spéculateurs
sont désormais présents aux grandes ventes
de planches de BD. Le record de vente
– 764 200 euros ! – atteint le 29 mars, à la
vente d’Artcurial, à Paris, par une
couverture originale de Tintin en
Amérique datant de 1932 et réalisée
par Hergé, a dopé le marché,
suscité un engouement nouveau
parmi les collectionneurs et stupéfié
les observateurs.
Forte sera donc sans doute l’affluence
à la vente organisée
aujourd’hui et demain, par Million
et Associés, à la salle Drouot-
Montaigne, à Paris. Des planches,
des peintures et des dessins de
dizaines d’auteurs fameux du 9eart (Pichard, Geluck, Margerin, Comès,
Cestac, Swarte, Denis, Mattoti, etc.)
y seront mis en vente.
La rencontre du marteau des
commissaires priseurs et des planches
d’auteurs de BD date d’une
dizaine d’années. Jusqu’alors, les
éditions originales d’albums
étaient plus prisées que les planches.
Mais, en 1999, une double
page originale du Sceptre d’Ottokar
«partait» à 100 000 euros. Dans les
années 2000, une planche du Nid
des marsupilamis, d’André Franquin,
était emportée pour 180 000 euros.
Cette reconnaissance de la BD est due à la
bonne santé de ce secteur de l’édition, aux
expositions sur Tintin, le Chat de Geluck ou
Blake et Mortimer, qui ont attiré des milliers
d’admirateurs, ou à la floraison de festivals
et salons. Et à des événements symboliques,
comme le don d’une planche originale de
L’affaire Tournesol (Tintin), la semaine dernière,
par la veuve d’Hergé, Fanny Rodwell, au
Musée national d’art moderne du centre
Georges Pompidou.
Cette reconnaissance officielle mais tardive
n’existerait pas sans la poignée de passionnés
de BD qui, dans leurs galeries, proposent depuis
des années des expositions-ventes de planches
originales d’auteurs. Ces galeries spécialisées
dans la BD, souvent établies à Paris, se comp-
Photo Lejaby
Culture. La bande dessinée a le vent en poupe. Des œuvres s’arrachent
à prix d’or dans les salles de vente et les maisons d’édition se portent
bien. Les auteurs exposent de plus en plus près des galeries d’art…
La planche et le marteau
tent sur les doigts de la main. Les galeries
Christian Desbois, Daniel Maghen ou Frédéric
Bosser, sans oublier la galerie 9 e art ou des galeries
virtuelles comme BDartiste, sont parmi
les plus importantes. Ces pionnières ont acquis
des caractéristiques propres, au fil des expositions,
et des affinités de leurs responsables
avec des auteurs de BD.
Catus erectus (2008), acrylique sur toile (200 x 200 cm) de Philippe Geluck.
“ Il faut vivre avec des artistes
de son temps. Or les auteurs
de BD sont par excellence nos
contemporains
”Christian Desbois, galeriste.
Diplômé des Arts déco, Christian Desbois
a lancé sa première galerie en 1984. « Je suis le
plus ancien et le moins connu», s’amuse-t-il. Après
des sérigraphies de cases de BD, il rencontre
Jacques Tardi puis Enki Bilal et leur propose
des expositions puis des ventes de planches
originales. «J’avais lu des livres de et sur Daniel-
Henry Kahnweiler ou Aimé Maeght, ces collectionneurs
et marchands d’art fameux. Sans oser me comparer
à eux mais à leur manière, je pense qu’il faut
LIQUIDATION TOTALE
avant changement
Spécialiste des grands bonnets (jusqu’à H)
et des grandes marques françaises depuis 1935
vivre avec des artistes de son temps. Or les auteurs
de BD sont par excellence nos contemporains»,
résume Christian Desbois.
Les plus grands noms de la BD d’aujourd’hui
– Loustal, Tardi, Mézières, Juillard, Mattoti et
bien sûr Bilal, «une locomotive» – ont exposé
dans la galerie de Christian Desbois. Il ne s’en
tient pas là. Après avoir monté une des premières
ventes d’Enki Bilal avec
Artcurial, il participe depuis 2002
aux biennales organisées par le
Musée d’art Thomas Henry, à
Cherbourg (Bilal, Schuiten, Juillard
et, cette année, Loustal).
La galerie Daniel Maghen est
installée, selon les vœux de son
responsable, sur un quai de
Seine, «près des galeries d’art, loin
des magasins de BD du Quartier
latin». Daniel Maghen a ouvert sa
première galerie en 1989, à l’âge
de 19 ans ! Il a acheté ses premières
planches avec un prêt étudiant…
Aujourd’hui, il dispose du
fonds de planches originales de
BD le plus riche – 8 000 pièces de
300 auteurs différents – et le plus
éclectique. Sa galerie expose et
vend des œuvres de Manara mais
aussi Lepage, Gibrat, Caza,
Moebius, Juillard, Cosey, etc.
Après avoir édité des «beaux
Du 16 mai
au
16 juillet
jusqu’à 60%
livres» sur les croquis et les dessins
de Juillard et Cosey, Daniel
Maghen s’est lancé, ce mois-ci,
dans l’édition d’albums de BD,
avec Ewen, du Biélorusse Arinouchkine.
La presse est l’autre passion de Frédéric
Bosser. Ce matheux diplômé d’histoire de
l’art a créé sa galerie de BD en 1997. Il y
expose et vend à la fois des valeurs confirmées
(Dany, Binet et bientôt Solé), des dessinateurs
de presse (Willem, Plantu) ou de jeunes
talents (Catel, Berthet). Mais il a aussi
lancé un mensuel, DBD, d’abord vendu dans
les librairies spécialisées puis en kiosques
depuis l’été 2006. «La presse m’a toujours intéressé»,
explique ce galeriste-patron de presse
qui, avec 10 000 exemplaires vendus en
moyenne, publie aussi des hors-série pour le
Salon du livre, et en discute avec le festival de
BD de Saint-Malo et Japan Expo. ■
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© GELUCK
Yves-Marie Labé
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