Le Verbe Magazine | Juillet 2020
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« Quand on ne se voit pas d’avenir, on ne
peut pas se projeter. Les enfants se rattachent
à ce qu’ils trouvent. Ce contexte
leur donne une liberté qui n’en est pas
une. C’est un piège : lorsque les enfants
sortent et trainent autour du camp, cela
les expose à toutes sortes de risques. Ils
sont vulnérables à la consommation de
drogue et à la prostitution. »
Les inquiétudes du père Alfred sont
légitimes. Dans ce contexte, préserver
l’innocence de ses protégés est un défi
quotidien.
L’HUMAIN DANS
L’ENFANT
La persévérance scolaire est une autre
priorité des responsables ecclésiaux,
qui s’attristent du fait que les enfants
réfugiés soient plus préoccupés par leur
survie que par les études. Le père Alfred
insiste : « Le plus beau cadeau à offrir à un
réfugié, c’est l’éducation. Quand on forme
un enfant, on lui donne la clé qui lui permettra
de se prendre en charge, partout
où il sera. Les Rwandais sont nombreux à
avoir pu étudier lorsqu’ils étaient en exil.
Même s’ils n’avaient plus de pays, ils ont
reçu une éducation. Ils sont
rentrés avec beaucoup de
L'Enfance missionnaire, choses. »
qui s'appelle Mond'Ami
au Canada francophone,
est une œuvre intégrée
aux Œuvres pontificales
missionnaires. Cette
organisation travaille
avec les enfants afin
d'éveiller leur conscience
et de les amener à
s'engager pour leur
prochain. En 2020-2021,
Mond'Ami soutiendra
deux projets d'animation
auprès des jeunes des
camps de réfugiés au
Rwanda.
Le vicaire général souhaite
le meilleur à ces jeunes en
qui il se reconnait et s’efforce
de leur offrir soutien et
affection.
« On souligne les anniversaires
des enfants des
camps au niveau diocésain.
On organise une collecte, et
les autres enfants viennent
avec de petits cadeaux.
Lorsqu’on célèbre la journée
de l’Enfance missionnaire,
ils apportent une partie des
récoltes familiales afin de
les partager avec ceux qui
vivent dans les camps. Ça
ne couvre pas tous leurs
besoins. Ce peu de matériel
a d’abord une valeur symbolique.
Les enfants réfugiés voient que les
gens du pays ont de la compassion pour
eux. Quand il y a des fêtes, ils viennent
chanter et danser avec nous. Quand je
vais dire la messe là-bas, je suis bien
accueilli. »
Le sentiment d’appartenance, qui
mesure l’attachement et la reconnaissance
ressentis à l’égard d’une communauté,
est nécessaire au développement
de toute personne. À travers ces petites
attentions, le père Alfred prend soin de
l’humain dans l’enfant. Il leur permet
non seulement de mieux vivre le présent,
mais, surtout, de pouvoir rêver
d’un avenir.
LA GUÉRISON INTÉRIEURE
En fin de compte, les activités de l’Enfance
missionnaire s’inscrivent dans un projet
pastoral plus large axé sur la guérison
intérieure et l’éducation à la solidarité.
« Nous visons la mixité et l’intégration
des enfants. Parce qu’ils sont accueillis
dans la région, les réfugiés ne se
sentent pas comme des étrangers. Ils
rencontrent d’autres enfants et s’en font
des amis. Quand ceux qui vivent l’exil
ne restent qu’entre eux, ils ne pensent
qu’à leurs problèmes. On veut que les
enfants puissent découvrir un autre
monde. Il est vrai que nous sommes
dans une région pauvre, alors ils ne vont
pas découvrir grand-chose ! Mais il y a
une joie à se sentir chez soi. »
Pendant que les enfants, fiers, n’en
finissent plus de me serrer la main, le
soleil se couche derrière Gihembe. Il est
temps de rentrer. Je ne saurai jamais ce
que l’Enfance missionnaire a réellement
changé dans la vie des jeunes réfugiés.
Quand je les questionne à ce sujet, ils
me disent simplement qu’ils aiment
prier, chanter et danser. Comme tous les
enfants.
Ce projet de reportage a été rendu possible
grâce à un partenariat avec les Œuvres pontificales
missionnaires du Canada. Pour en
savoir davantage sur leur mission :
opmcanada.ca.
10 le-verbe.com