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Mag-OJLV-Vol3-No1

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OUI je le veux !

DOSSIER : LA MONNAIE DU QUÉBEC INDÉPENDANT

MAGAZINE

OUI je le veux !

Volume 3 numéro 1 – 2022

Vive le Québec libre !

EMMANUEL

BILODEAU

« LE QUÉBEC

INDÉPENDANT SERA UN

MODÈLE D’INSPIRATION

POUR LA PLANÈTE. »

IRLANDE:

L’indépendance

inachevée

Le piège de la

péréquation

LECTURE : PORTRAITS DE PATRIOTES 1837-38

JONATHAN

LEMIRE

Espace voyage

LE FLEUVE À

COTEAU-DU-LAC


TABLE DES MATIÈRES

Coéditeurs

Martine Ouellet

Gilbert Paquette

Rédacteur en chef

Gilbert Paquette

Chroniqueurs

André Bélisle, Jean-Michel Goulet, Gaston Carmichael,

Maxime Laporte, Denis Monière, Gilbert Paquette

Collaborateurs

Jean-Pierre Émond, Sylvie Legault, Hélène Lavarière,

Jacques C. Martin, Denis Monière, Sylvie Morel,

Patrick Ney, Pierre-Marc Savard

Révision linguistique

Sylvie Pouliot

Design graphique

Savana Trudel

Mise en marché

Mouvement Québec indépendant (MQI)

DOSSIER TRANSPARLEMENTAIRE:

LA MONNAIE DU QUÉBEC INDÉPENDANT

PAR SYLVIE MOREL ET JACQUES C. MARTIN PAGE 10

ÉDITORIAL

Pétrole, pandémie et... monnaie canadienne...................................................................................3

ACTUALITÉ EN BREF.......................................................................................................................4

CHRONIQUE ÉCONOMIE

Le piège de la péréquation................................................................................................................9

CHRONIQUE FRANÇAIS

Loi 96 : Chant du cygne ou chant du coq pour le Québec français?..........................................14

ESPACE VOYAGE

Distributeur

DLL Presse diffusion

Impression

Imprimerie HLN

Abonnements

120, rue de Cadillac, Châteauguay (Québec)

J6K 4K8 info@mqi.quebec

DÉPÔT LÉGAL : 3 ième trimestre 2022

Dossier numérique : La monnaie d’un Québec indépendant

Oui je le veux! Volume 3 Numéro 1

978-2-924999-26-4 Version ePDF

978-2-924999-25-7 Version ePUB

978-2-924999-24-0 Version papier

ISSN : 2562-3729

Il est possible de reproduire, en tout ou en partie, les

textes de ce magazine à condition de citer l’auteur

et la source. Bien que toutes les précautions aient

été prises pour assurer l’exactitude et la véracité des

informations de cette publication, le MQI ne peut être

tenu responsable des erreurs issues de leur utilisation.

PAR HÉLÈNE LAVARIÈRE

PAGE 16

NOS MEMBRES PUBLIENT..........................................................................................................18

LA RÉPUBLIQUE DU QUÉBEC, 194 E PAYS À L’ONU

Le Québec, république progressiste dans le monde.....................................................................19

OSER S’ASSUMER

Entrevue avec Emmanuel Bilodeau................................................................................................ 20

INDÉPENDANCE SUR LA PLANÈTE

Irlande : l’indépendance inachevée.............................................................................................. 22

COMPRENDRE LE PASSÉ PRÉPARER L’AVENIR

Après 1995 : la résignation des élites et le plan B du pouvoir canadien................................... 24

CHRONIQUE ENVIRONNEMENT

Les catastrophes climatiques sont maintenant inexorables........................................................... 26

COIN LECTURE

Entrevue avec Jonathan Lemire, Historien des patriotes 1837-38.............................................. 27

NOUVELLES DU MQI.................................................................................................................. 30


ÉDITORIAL

GÉNÉRATION INDÉPENDANTE

MARTINE OUELLET

PÉTROLE, PANDÉMIE ET... MONNAIE CANADIENNE

Sortir du Canada et récupérer tous nos pouvoirs pour construire

la République du Québec impliquera très certainement la mise

en place de la Banque centrale québécoise et d’une monnaie

québécoise. Cela vous surprend?

Le Canada est un état pétrolier. C’est un fait indéniable. Il est

même l’un des pires états pétroliers d’un point de vue climatique.

Il produit le pétrole et le gaz les plus sales de la planète : le

pétrole bitumineux et le gaz de fracturation. L’ensemble de

ses politiques intérieures et extérieures vise à maintenir et

à renforcer sa position d’État pétrolier. Les exemples sont

éloquents : nationalisation de l’oléoduc Trans Mountain et son

extension, autorisation donnée à la va-vite au projet Bay du

Nord d’extraction du pétrole au large des côtes de Terre-Neuve,

retour du projet GNL de gaz dit « naturel » liquéfié obtenu par

procédé de fracturation principalement en Alberta. Ce dernier

projet implique un gazoduc sur notre territoire passant à travers

l’Abitibi jusqu’au Saguenay où l’on « blanchirait » le gaz sale

par l’utilisation de l’électricité pour sa liquéfaction avant de

l’exporter par bateau. Le projet GNL refait surface avec la guerre

en Ukraine, soi-disant pour soutenir l’Europe, alors que la crise

climatique dicte, pour l’avenir de l’humanité, de laisser sous terre

les combustibles fossiles, particulièrement les plus polluants.

POUR EXORCISER LES PEURS QUI EMPÊCHENT ENCORE TROP

DE QUÉBÉCOIS ET DE QUÉBÉCOISES DE CHOISIR LEUR LIBERTÉ,

IL EST ESSENTIEL DE RÉPONDRE CLAIREMENT, SANS DÉTOUR, À

LEURS INTERROGATIONS.

Le pétrole guide également les relations internationales et les

accords commerciaux du Canada, notamment l’accord Canada-

Europe qui ouvre le marché des services publics canadiens

aux mégasociétés européennes, permettant la privatisation des

services publics avec tous ses effets pervers en échange du retrait

d’une surtaxe envisagée par l’Europe sur le pétrole plus polluant

des sables bitumineux.

Le pétrole guide également la politique monétaire de la

Banque du Canada dans l’établissement des taux d’intérêt et la

valeur de la monnaie canadienne, ce qui nuit aux exportations

manufacturières du Québec depuis des décennies.

L’importance stratégique d’une banque centrale d’État est

souvent sous-estimée dans le milieu indépendantiste. La

pandémie de la COVID-19 a mis en évidence le rôle des

banques centrales des différents pays pour faire face à la crise. Et

ce ne sera probablement pas la dernière pandémie mondiale avec

les risques décuplés liés à la crise climatique. Elle nous rappelle

l’importance stratégique pour un État de posséder sa propre

banque centrale et sa propre monnaie comme en ont décidé des

pays progressistes de la taille du Québec comme la Norvège, le

Danemark, la Suède et la Finlande.

UNE BANQUE CENTRALE POUR LA

RÉPUBLIQUE DU QUÉBEC

Oui, nous pouvons choisir de conserver la monnaie canadienne

le temps de la transition vers la mise en place de la République

du Québec, mais qu’en sera-t-il ensuite? Je vous invite à lire

dans ce numéro notre dossier transparlementaire qui prend

position pour une monnaie québécoise. Je dois vous avouer

qu’il était temps que cette question soit abordée franchement

et directement. Pour exorciser les peurs qui empêchent encore

trop de Québécois et de Québécoises de choisir leur liberté,

il est essentiel de répondre clairement, sans détour, à leurs

interrogations.

Ne nous faisons pas d’illusions : il y a peu de chances que le

Canada accepte de donner voix au chapitre au Québec, devenu

pays, quant à sa politique monétaire. Il est donc indispensable

de se préparer à une telle éventualité. Le Canada ne pourra

alors plus nous faire chanter en refusant un droit de veto au

Québec à la Banque du Canada. Nous aurons, avec la monnaie

québécoise, un outil de plus à notre disposition pour faire face

à la crise climatique et aux autres défis sociaux et économiques

du Québec.

Magazine Magazine Oui, Oui, je le je veux! le veux! 3 3 Volume Volume 3 numéro 3 numéro 1 1


ACTUALITÉ EN BREF

IMMIGRATION : MINORISATION

OU ANGLICISATION?

Le Canada, en fixant les seuils d’immigration au Canada à

431 000 pour 2022, 447 000 pour 2023 et 451 000 en 2024,

poursuit une politique de minorisation des Québécois au sein

du Canada par la mise en place d’une immigration massive,

telle qu’elle était préconisée jadis dans le rapport Durham. Le

Québec est loin de pouvoir accueillir les 100 000 immigrants par

année qui lui seraient nécessaires pour maintenir sa proportion

actuelle de la population, soit 22,9 %. Le Québec accueillait

traditionnellement autour de 35 000 immigrants par année. En

augmentant le seuil à 50 000 l’an prochain, il n’arrivera pas à

intégrer à la majorité francophone ce flot accru d’immigrants,

plus élevé qu’en France ou aux États-Unis, ce qui accentuera la

régression du français au Québec.

Le Québec ne peut accepter cette évolution du Canada

postnational qui met en péril la nation québécoise, mais

nos « défenseurs » provincialistes à Québec et à Ottawa sont

impuissants. Le gouvernement Legault a réclamé un contrôle

partiel de l’immigration au Québec pour se faire dire non le jour

même par Ottawa. Le Bloc Québécois a présenté un projet de

loi pour maintenir 25 % des sièges du Québec au Parlement

canadien. L’adoption d’une telle loi ne se fera pas, car elle

demanderait des négociations constitutionnelles et l’accord de

sept provinces représentant 50 % de la population canadienne.

Comme le notent de plus en plus de commentateurs politiques,

la seule façon de sortir de l’impasse est la souveraineté qui

donnera au Québec le contrôle total de son immigration.

LE MINISTRE « ÉCOLOGISTE » GUILBAULT

APPROUVE UN AUTRE PROJET PÉTROLIER

En mai dernier, quelques

jours après la publication

du dernier rapport

du Groupe d’experts

intergouvernemental

sur l’évolution du climat

(GIEC) réclamant la

fin des investissements

dans les énergies fossiles,

le ministre Steven

Guilbault, ancien écologiste fondateur d’Équiterre, approuvait

le projet Bay du Nord de la multinationale norvégienne Equinor

et de la compagnie canadienne Husky Energy. Ce projet prévoit

exploiter un gisement de pétrole en eau profonde au large de

Terre-Neuve. On envisage d’y extraire jusqu’à 1 milliard de

barils de pétrole sur trente ans, soit l’équivalent de sept ans de

consommation de pétrole au Québec et des émissions annuelles

de GES de 7 à 10 millions d’autos.

Le bureau du ministre Guilbeault a affirmé que le projet

présentait des conditions environnementales strictes, mais son

ancien groupe Équiterre et le groupe Sierra contestent cette

rhétorique de l’industrie. On ne saurait produire du “pétrole

propre” puisque le processus d’extraction ne représente que 10 %

des émissions d’un projet pétrolier, les 90 % restants proviennent

de la combustion du pétrole.

Encore une fois, le gouvernement d’Ottawa et le ministre

Guilbault ont trahi leurs engagements parce qu’ils préfèrent

satisfaire l’industrie pétrolière. Les pseudo-arguments de

création d’emplois ne tiennent plus la route, car autant, sinon

plus d’emplois peuvent être créés aussi par la transition vers

les énergies propres. Avec l’achat du pipeline Trans Mountain

et son projet d’agrandissement, ce nouveau projet entre en

contradiction complète avec les objectifs climatiques d’Ottawa

et les avertissements du GIEC.

Magazine Oui, je le veux! 4 Volume 3 numéro 1


ACTUALITÉ EN BREF

OTTAWA ENLÈVE DES OBLIGATIONS

AUX SECTEURS LES PLUS POLLUANTS

Les deux principaux secteurs responsables des GES au Canada

– les industries des énergies fossiles et le domaine des transports –

sont dispensés d’atteindre la cible de réduction des émissions de

GES de 40 % par rapport à leur niveau de 2005 d’ici 2030. Par

contre, le plan Trudeau publié en mars prévoit que les émissions

des industries pétrolière et gazière, et celles des transports, ne

reculeront que de 31 % d’ici 2030.

Interrogé sur cette étonnante exception en faveur des deux

secteurs les plus polluants, le premier ministre Trudeau a

répondu à Vancouver : « Nous en demandons énormément à

l’industrie pétrolière. » Le commissaire à l’environnement et

au développement durable n’est toutefois pas de cet avis. Dans

son rapport déposé l’automne précédent, il dénonçait la lenteur

d’Ottawa, soulignant que « 30 ans d’engagements pris par le

gouvernement fédéral pour réduire les émissions de gaz à effet

de serre au Canada ont abouti à une hausse des émissions de

plus de 20 % depuis 1990 ». Il qualifiait le rachat du pipeline

Trans Mountain d’incohérence politique, laquelle coûterait plus

de 12,6 milliards pour le projet d’agrandissement en cours en

plus du coût d’achat de 4,5 milliards.

Le Canada force ainsi les contribuables québécois à contribuer

au dérèglement climatique, à l’encontre de leurs valeurs et de

la sécurité de la planète. Au Québec, l’indépendance nous

permettrait d’investir ces fonds pour sortir le pétrole et le gaz

de notre équation énergétique et de participer à la lutte contre le

réchauffement climatique.

LE POUVOIR DE DÉPENSER D’OTTAWA

DANS LES COMPÉTENCES DU QUÉBEC

Le programme du Parti libéral du Canada rendu public à la

dernière élection fédérale porte bien son nom. Le document

« Avançons ensemble » nous avertit que le gouvernement libéral

compte « avancer » dans les champs de compétence provinciaux

– santé, logement, affaires municipales ou services de garde –

en dépensant dans les champs de compétence exclusifs des

provinces. Ottawa ne tiendra pas compte de la Constitution

imposée au Québec et de ses compétences provinciales, sauf

pour bloquer les lois sur la laïcité et la langue française votées

par notre Assemblée nationale.

Le pouvoir fédéral de dépenser n’est reconnu nulle part dans la

Constitution. En récoltant des taxes et des impôts bien au-delà

de ses besoins partout au Canada et au Québec, le gouvernement

d’Ottawa se constitue une énorme réserve qu’il retourne aux

provinces à ses conditions ou qu’il dépense directement dans les

champs de responsabilités exclusives du Québec. C’est ainsi que

le Canada devient de plus en plus centralisé et uniformisé.

Ce « pouvoir » de dépenser d’Ottawa, bien accepté ailleurs au

Canada, a toujours été combattu par le Québec. On a tenté de

le baliser dans les accords de Meech (1987), de Charlottetown

(1992), dans l’entente-cadre sur l’union sociale (1999) ou dans

le projet proposé au gouvernement Harper (2014). Rien n’a

fonctionné. La seule façon de mettre fin au pouvoir unilatéral de

dépenser d’Ottawa est d’éliminer ce gouvernement de trop en

faisant du Québec un pays.

Magazine Oui, je le veux! 5 Volume 3 numéro 1


ACTUALITÉ EN BREF

SERVICES DÉFICIENTS AUX FRANCOPHONES DANS DES

HÔPITAUX ANGLOPHONES

Le Québec se paie le luxe de deux réseaux de soins de santé et de

services sociaux. Dans les établissements de santé anglophones,

plusieurs usagers francophones se plaignent régulièrement de

ne pas obtenir de services en français. En particulier, l’usager

qui veut consulter son rapport médical en français doit remplir

un formulaire en vue d’en obtenir un « résumé » et attendre

patiemment.

Un patient francophone aux prises avec le diagnostic d’une

maladie grave n’a pas droit à un traitement égal dans un État qui

prêche tout haut qu’il n’y a qu’une langue officielle au Québec.

Les recours auprès de l’OQLF ou du Protecteur du citoyen

s’avèrent illusoires, compte tenu du libellé actuel de la Charte

qui permet au rédacteur d’un rapport médical d’avoir recours

indifféremment au français ou à l’anglais. Le projet de loi 96

ne résout pas le problème, puisqu’il mentionne toujours le droit

du patient d’obtenir un « résumé » de son dossier clinique en

français, dans « les plus brefs délais ». Tout le monde sait ce que

signifie ce terme dans une administration publique.

Il serait temps que la loi impose le français comme langue

de travail dans tous les hôpitaux du Québec, et en particulier

la rédaction des dossiers cliniques en français, ce qui n’est

certainement pas le cas présentement. Sans cela, le droit des

patients de participer à leurs soins, de comprendre leur état et

d’être éclairés sur les soins reçus demeurera illusoire.

LES ÉTUDIANTS DES PAYS

FRANCOPHONES DISCRIMINÉS

PAR OTTAWA

En moins de deux ans, 35 642 candidats originaires des

principaux pays francophones du Maghreb et de l’Afrique

de l’Ouest qui voulaient venir étudier au Québec se sont vu

refuser leur demande par Ottawa. Les taux de refus pour ces

deux bassins de locuteurs francophones frôlent les 100 %,

contredisant les politiques officielles du Québec qui visent à

l’accueil et au maintien de ces étudiants en sol québécois après

la fin de leurs études pour augmenter la présence francophone.

Pendant ce temps, le gouvernement canadien ouvre grandes les

vannes à des étudiants anglophones venus surtout de l’Inde,

accueillis à pleines portes dans les collèges et les universités de

Montréal. Une étude publiée par l’IREC souligne qu’en 2019,

« plus de la moitié des étudiants internationaux du réseau

collégial provenaient de l’Inde (7687), dépassant les personnes

en provenance de la France (4072) ».

Selon une analyse du Devoir le printemps dernier, les cégeps

et les universités du Québec en région étaient les plus grandes

victimes de cette situation. C’est pourtant là où l’on voudrait

voir s’établir les immigrants internationaux. Au contraire, les

étudiants anglophones s’inscrivent dans les collèges et les

universités anglophones de Montréal, alors qu’on sait, depuis

une étude de Statistique Canada en avril dernier, que la majorité

de ces diplômés utiliseront l’anglais de façon prédominante au

travail. Sans un contrôle total de l’immigration par le Québec,

l’anglicisation se poursuivra au travail dans les entreprises du

Québec par l’octroi de permis d’études aux étudiants étrangers

anglophones. Cette situation ne pourra être corrigée que dans

un Québec souverain.

Magazine Oui, je le veux! 6 Volume 3 numéro 1


ACTUALITÉ EN BREF

OTTAWA S’ATTAQUE À LA CLAUSE DÉROGATOIRE POUR

COMBATTRE LES LOIS 21 ET 96 DU QUÉBEC

Le ministre fédéral de la Justice, David Lametti, a annoncé

que le gouvernement Trudeau contestera la possibilité pour le

gouvernement d’une province de recourir de façon préventive

à la disposition de dérogation (ou clause « nonobstant ») de la

Loi constitutionnelle de 1982. Cette démarche vise clairement

à faire retirer la disposition de dérogation des lois 21 et 96 que

le gouvernement du Québec a intégrée pour protéger ses lois

de décisions possibles de la Cour suprême du Canada. En vertu

de la Constitution imposée au Québec en 1982, la Loi sur la

laïcité de l’État (21) et la Loi sur la langue officielle et commune

du Québec, le français (96) pourraient être désavouées en tout

ou en partie. Le Québec devrait alors attendre des mois ou des

années pour pouvoir utiliser la clause dérogatoire et déclarer que les

dispositions contredites par la Cour s’appliqueront quand même.

En dévoilant son jeu si tôt, le gouvernement Trudeau réagit

à la colère que les deux projets de loi ont suscitée parmi les

anglophones du Québec et du Canada anglais où elles sont

faussement condamnées comme des lois racistes. Un éditorial

déchaîné et totalement abusif du Globe and Mail a même avancé

que le gouvernement du Québec procéderait à des perquisitions

abusives et des violations de droits individuels.

Ces accusations injustifiées et gratuites trahissent une volonté de

manipulation de l’opinion publique et un vieux fond oppresseur.

Aux yeux du Canada, l’Assemblée nationale du Québec n’a pas

le droit d’adopter démocratiquement des lois qui protègent ses

valeurs et sa langue. La seule réponse à leur donner est que le

Québec se donne sa propre constitution de pays souverain.

LES PLATEFORMES NUMÉRIQUES ET LE CRTC IGNORENT LA

SPÉCIFICITÉ CULTURELLE DU QUÉBEC

« Notre culture est menacée à haute vitesse, il est urgent d’agir! »,

clament de nombreux organismes culturels québécois, inquiets

que les films et musiques diffusées par Netflix ou Spotify

remplacent de plus en plus les productions culturelles d’ici.

L’Association québécoise de la production médiatique (AQPM)

demande de faire obligation aux plateformes internationales

de financer ou de diffuser des productions audiovisuelles

originales en français. L’Association des professionnels de

l’édition musicale (APEM) demande pour sa part à Ottawa

de contraindre les diffuseurs de musique à recommander de la

musique francophone d’ici.

Rien n’assure que ce sera fait, car c’est Ottawa qui s’arroge les

compétences en matière de communications numériques en

vertu d’un vide de la Constitution canadienne. L’État québécois

n’est pas consulté et est totalement absent des discussions avec

les plateformes internationales.

Par ses nouvelles lois C-10 et C-11, le ministère du Patrimoine

canadien, véritable ministère de la « Culture canadienne », a

confié des pouvoirs

étendus au CRTC.

Rien n’indique que le

CRTC sera sensible

à la protection des

productions culturelles

en français quand on

constate que l’offre

d’emploi du CRTC

pour trouver son prochain président estime « préférable », mais

pas « obligatoire », de maîtriser les deux langues. Or, c’est cet

organisme qui aura à décider si les plateformes respectent les

exigences des nouvelles lois canadiennes, lesquelles sont par

ailleurs extrêmement vagues quant au contenu francophone.

Tous les gouvernements du Québec ont tenté sans succès de

rapatrier au Québec les compétences d’Ottawa dans ce domaine

vital des communications et de la culture. Il est urgent de le faire

en se donnant les moyens d’un pays.

Magazine Oui, je le veux! 7 Volume 3 numéro 1


ACTUALITÉ EN BREF

LA JUSTICE EN PÉRIL PAR NÉGLIGENCE POLITIQUE

Le gouvernement canadien contrôle les fonctions majeures

de la justice au Québec, non seulement par les décisions de

la Cour suprême, mais en nommant tous les juges de la Cour

supérieure du Québec et de la Cour d’appel du Québec. Déjà

Source : https://educaloi.qc.ca/capsules/le-systeme-judiciaire-quebecois/

en mai 2017, la ministre québécoise réclamait la nomination

de 14 nouveaux juges à la Cour supérieure afin d’améliorer les

délais d’attente et d’éviter que des accusés ne profitent de l’arrêt

Jordan pour échapper à la justice. La ministre canadienne n’avait

alors nommé que 4 nouveaux juges au Québec et 28 ailleurs

au Canada. Depuis ce temps, plusieurs accusés au Québec ont

bénéficié de l’arrêt des procédures (arrêt Jordan) à cause des

délais judiciaires excessifs.

Du côté de la Cour du Québec, dont le personnel est nommé

par Québec, les choses ne vont pas mieux. En mai dernier, le juge

Serge Champoux a quitté son poste de président de la conférence

des juges pour manifester sa dissidence face à la décision – et aux

méthodes – de la juge en chef de la Cour du Québec, Lucie

Rondeau. Celle-ci menace de faire siéger ses magistrats un jour

sur deux à cause du manque de personnel assistant. Le ministre

Jolin-Barrette s’y oppose, inquiet des répercussions majeures que

cela entraînerait sur les délais judiciaires.

En examinant le schéma compliqué du système de justice

au Canada, on comprend que la justice se porterait mieux au

Québec grâce à la simplification et à l’efficacité qu’apporterait la

souveraineté dans ce domaine vital de notre démocratie.

LE SERMENT À LA REINE MAINTENU GRÂCE AU PARTI LIBÉRAL

DU QUÉBEC

En juin 2022, le député solidaire Sol Zanetti a déposé le

projet de loi 192 visant à reconnaître le serment des députés

envers le peuple du Québec comme seul serment obligatoire

à leur entrée en fonction. Si celui-ci avait été adopté, il serait

devenu optionnel pour les députés élus de prêter un serment

d’allégeance à Sa Majesté la reine du Canada. Ce serment

colonialiste dépassé pose un problème de conscience à tous les

députés indépendantistes et également à l’ensemble des députés

qui s’opposent à la monarchie depuis toujours.

On prétendait qu’un député qui refuserait de le poser ne pourrait

siéger à l’Assemblée nationale du Québec. Se basant sur l’avis

des constitutionnalistes qu’il a consultés, le député Zanetti a

conclu que le Québec peut très bien abolir le serment obligatoire

à la reine, comme il a aboli unilatéralement le Conseil législatif

en 1968. Ces questions se trouvant dans la constitution interne

du Québec, on peut donc les modifier au Québec de façon

unilatérale.

Il est plutôt rare qu’un parti d’opposition fasse adopter une loi,

mais dans ce cas-ci, le projet de loi avait reçu l’appui du parti

au pouvoir qui a décidé de l’appeler, mais à la dernière semaine

de la session. Selon le règlement de l’Assemblée nationale, il

faut alors obtenir le consentement de tous les partis. Le leader

parlementaire du Parti libéral, Marc Tanguay, s’y est toutefois

opposé, prétextant qu’il attaquait l’article 128 la Constitution

canadienne. Qu’il ait raison ou non, ce triste épisode nous

rappelle que nous vivrons malgré nous en monarchie tant que

nous serons une province du Canada.

Magazine Oui, je le veux! 8 Volume 3 numéro 1


CHRONIQUE ÉCONOMIE

LE PIÈGE DE LA PÉRÉQUATION

JEAN-MICHEL GOULET

Un jour ou l’autre, nous tombons tous dans le piège de la

péréquation, soit en nous laissant convaincre que le Québec

indépendant ne pourrait vivre sans, soit en perdant notre temps

avec des opposants qui ne cherchent qu’à empêcher le Québec

libre, peu importe la manière.

Avant, c’était la dette.

Maintenant que notre

dette nette est inférieure

à celle de l’Ontario

(42,4 % de notre PIB

en mars 2021 vs 43,1

% selon la Chaire en fiscalité et en finances publiques), est-ce

que nos amoureux du Canada font leur mea-culpa et déclarent

que l’indépendance est réalisable? Évidemment non, car ils ne

cherchent pas la vérité; ils tentent plutôt par tous les moyens

d’apeurer un peuple qui souffre de carences majeures en littératie

économique. Et cela ne date pas d’hier : pensons au coup de la

Brink’s en avril 1970.

Revenons à l’une des fausses peurs les plus populaires en

ce moment, « le Québec indépendant, ne recevant plus de

péréquation, ne serait pas économiquement viable ». Cette

prémisse est trompeuse, car la péréquation n’est pas une étude

sur l’économie du Québec indépendant. La prochaine fois qu’on

tentera de vous faire tomber dans le panneau de la péréquation,

je vous suggère de répondre du tac au tac : sur quelle étude

économique vous basez-vous? Une telle étude doit d’abord

tenir compte de l’ensemble des taxes, des tarifs et des impôts

récoltés sur le territoire québécois, et ensuite estimer l’ensemble

des dépenses du nouvel État indépendant. Elle doit faire des

hypothèses, car certaines dépenses canadiennes n’existeront plus,

par exemple les millions pour la monarchie britannique ou les

milliards pour le pipeline Trans Mountain. Il faut également

calculer les économies réalisées avec la fin des dédoublements

de ministères. Par ailleurs, on doit également considérer de

nouvelles dépenses. Ainsi, les ambassades québécoises devraient

nous coûter plus cher que le cinquième du coût des ambassades

canadiennes que nous payons en ce moment, car nous paierions

100 % des ambassades québécoises, qui elles ne devraient pas

être cinq fois plus petites.

Notre mouvement doit trouver une manière de renouveler

régulièrement cet exercice. On pourrait même aller plus loin

dans nos hypothèses, car ce calcul comptable est statique, il

ne tient pas compte d’éléments

favorisant l’économie québécoise :

une politique économique cohérente

basée sur nos intérêts premiers, et non

sur ceux de la nation voisine, l’effet

multiplicateur des investissements

qui en découlent, le contrôle

d’une devise québécoise avec une

politique monétaire soutenant

nos exportations manufacturières,

etc. Ces hypothèses devraient

minimalement être avancées quand on nous dresse la liste de

tous les marasmes économiques qui nous attendent, marasmes

qui « miraculeusement » n’ont pas eu lieu dans aucune des

indépendances pacifiques du siècle dernier en Occident.

Se défaire de nos peurs demande du courage et des connaissances.

J’ai la conviction que plus nous serons nombreux à risquer nos

carrières en prenant la parole publiquement pour l’indépendance,

plus grandes seront nos chances de vivre un jour au Québec libre.

Ce calcul a déjà été fait dans le livre Un gouvernement de trop,

qui estimait plutôt un surplus pour le Québec indépendant.

Magazine Oui, je le veux! 9 Volume 3 numéro 1


DOSSIER TRANSPARLEMENTAIRE

LA MONNAIE DU QUÉBEC INDÉPENDANT

INDÉPENDANCE ET SOUVERAINETÉ MONÉTAIRE

SYLVIE MOREL

Professeure associée, Département des relations industrielles, Université Laval

Historiquement, les indépendantistes ont été divisés sur le bien-fondé, advenant l’indépendance

du Québec, de créer une monnaie québécoise permettant de doter ce dernier d’une politique

monétaire. Pour ma part, je pense qu’un Québec indépendant devrait posséder une véritable

souveraineté monétaire, car la politique monétaire revêt une importance stratégique, cela plus

encore avec les transformations qu’elle connaît aujourd’hui et qui offrent aux pouvoirs publics

de nouvelles opportunités d’action.

LA MONNAIE : ATTRIBUT DE LA SOUVERAINETÉ ET FONDEMENT DU LIEN SOCIAL

La banque centrale et l’État souverain sont organiquement liés,

affirme Michel Aglietta, économiste spécialiste des institutions

monétaires. La monnaie est, selon lui, une institution essentielle

de la société et « l’ordre monétaire », comme « l’ordre politique »,

vise à faire société. Un Québec indépendant perdrait donc une

pièce maîtresse de son identité et de son développement s’il était

dépourvu de sa propre banque centrale et de sa propre monnaie.

La politique monétaire constitue un outil d’ajustement

économique majeur. L’instrument conventionnel du taux directeur

(qui agit sur la structure des taux d’intérêt dans l’économie)

est manié selon la conjoncture spécifique de chaque espace

national; par exemple, avec une politique monétaire québécoise,

la surchauffe du marché immobilier et le niveau d’endettement

des ménages seraient évalués à partir des situations prévalant au

Québec, et non en Ontario ou dans l’Ouest canadien, ce qui biaise

actuellement les résultats. En régime de change flottant, où le prix

des monnaies les unes par rapport aux autres est déterminé sur le

marché des changes, cela notamment en fonction des « balances

des paiements », un pays peut néanmoins défendre ou laisser

se déprécier sa monnaie selon

ses intérêts. Chose certaine,

dans un Québec indépendant,

le taux de change dépendrait

de la structure industrielle

québécoise et non de celle

du Canada pétrolier, qui plombe le secteur manufacturier

québécois. En effet, la montée des prix du pétrole génère

des pressions à la hausse sur le taux de change, ce qui nuit à

UNION MONÉTAIRE OU MONNAIE DISTICTE ?

Aux deux référendums de 1980 et de 1995 sur la souveraineté, le

gouvernement du Québec a proposé que le Québec indépendant

conserve le dollar canadien.

En 1980, dans La nouvelle entente Québec-Canada, le

gouvernement Lévesque proposait une « union monétaire où le

dollar sera maintenu comme seule monnaie ayant cours légal ».

Cette union monétaire Québec-Canada aurait été gérée par une

« autorité monétaire » centrale présidée alternativement par les deux

États, laquelle aurait assuré la création de la monnaie et l’action sur

le taux de change. Chaque État aurait eu par ailleurs sa propre

banque centrale assumant deux autres rôles : gestionnaire de la dette

publique et banquier du gouvernement.

Au référendum 1995, le projet loi de no 1, Loi sur l’avenir du

Québec, se limitait à préciser à l’article 14 : « La monnaie qui a cours

légal au Québec demeure le dollar canadien. » On peut expliquer

cette brièveté par la réticence générale de Jacques Parizeau à l’égard

de l’association, l’offre obligatoire de partenariat inscrite à l’article

3 du projet de loi lui ayant été imposée par ses partenaires Lucien

Bouchard et Mario Dumont.

Le maintien d’une Union monétaire avec le Canada pose plusieurs

difficultés politiques et économiques. Ce dossier montre que le

Québec indépendant aurait plutôt intérêt à créer sa propre monnaie,

pour se donner une politique monétaire adaptée à la réalité de son

économie.

Magazine Oui, je le veux! 10 Volume 3 numéro 1


DOSSIER TRANSPARLEMENTAIRE LA MONNAIE DU QUÉBEC INDÉPENDANT

la compétitivité du Québec et rend plus coûteux ses produits

pour les acheteurs étrangers. C’est ce qu’on a appelé le « mal

hollandais ». Une banque centrale québécoise pourrait aussi

utiliser l’instrument du taux de réserve (les avoirs détenus par

les banques commerciales auprès de la banque centrale) pour

agir sur son économie, tout comme celui des achats et ventes

de titres, surtout publics; l’articulation de ces opérations à celles

d’investisseurs institutionnels québécois comme la Caisse de

dépôt et placement du Québec serait une piste à explorer.

Tout cela renvoie à la question de la cohérence de l’action

publique. Un pays doit pouvoir déployer le menu entier des

politiques publiques (politiques monétaire, fiscale (recettes de

l’État), budgétaire (dépenses de l’État), industrielle, etc.) pour

poursuivre efficacement ses objectifs économiques. Tous ces

leviers doivent être coordonnés pour que les meilleures synergies

se développent, le contre-exemple étant la politique d’assurancechômage

(« assurance-emploi ») qui, échappant au Québec,

empêche ce dernier de mener une politique de l’emploi intégrée

dont j’ai montré l’impact discriminatoire1.

DE NOUVELLES POTENTIALITÉS

La convergence qui existe entre politique monétaire et politique

budgétaire mérite qu’on s’y attarde, d’autant plus que la politique

monétaire recèle de nouvelles potentialités. Le gouvernement

canadien a pu mener la politique de transferts aux particuliers et

aux entreprises qui a été la sienne durant la pandémie (prestation

canadienne d’urgence, subvention salariale d’urgence, etc.)

parce qu’une banque centrale – la Banque du Canada – était

là pour soutenir cette politique budgétaire. Ainsi, les dépenses

exceptionnelles engagées par les gouvernements pour stimuler

leur économie et éviter ainsi de graves crises économiques ont

entraîné des déficits budgétaires inimaginables jusque-là, que

les banques centrales (Banque du Canada, Réserve fédérale

américaine, Banque centrale européenne, etc.) ont financés, non

pas avec de l’argent préexistant, mais en rachetant massivement

des titres d’État (surtout des obligations). C’est ce qu’on appelle

l’« assouplissement quantitatif », une composante des politiques

monétaires non conventionnelles.

Plusieurs observateurs en ont conclu à une transformation

fondamentale de la nature de la politique monétaire, qui entame

sensiblement l’indépendance des banques centrales par rapport

aux pouvoirs politiques, car, différemment des autres politiques

publiques, qui relèvent des gouvernements, la politique monétaire

échoit aux banques centrales (en concertation avec les pouvoirs

politiques). D’aucuns, comme l’économiste Jézabel Couppey-

Soubeyran, pensent qu’une véritable interdépendance entre les

banques centrales et les États existe aujourd’hui parce que ces

derniers ont besoin d’une banque centrale pour mieux se financer

et que, inversement, les banques centrales s’appuient sur la

politique budgétaire des États pour atteindre leurs objectifs.

Considérant qu’il nous faut relever aujourd’hui des défis

colossaux, en particulier la transition écologique et le

développement des services publics dont la population a besoin,

cela entraînera de nouveaux déficits budgétaires. Une banque

centrale et une politique monétaire deviennent alors

indispensables. Cela d’autant plus que la soutenabilité des dettes

publiques dépend du degré de souveraineté monétaire des États

(un pays endetté dans la devise qu’il émet a une plus grande

marge de manœuvre qu’en cas inverse). Cette soutenabilité

s’accroît aussi à mesure que la dette publique est possédée par les

résidents, situation que des arrangements institutionnels peuvent

stimuler. J’ajoute que, puisque le risque climatique est de plus en

plus intégré aux indicateurs de la politique monétaire, maîtriser

celle-ci permettrait de renforcer l’avantage structurel dont jouit

le Québec en matière d’énergies propres.

Une autre innovation

est actuellement à

l’examen dans les

banques centrales : la

« monnaie électronique

de banque centrale »

(MEBC). Envisagée

notamment pour préserver le rôle de la monnaie publique dans

une économie numérique, la MEBC serait la forme numérique

des devises nationales. Le Québec restera-t-il en marge de cette

innovation qui pourrait dégrader son rapport de forces avec l’État

canadien? En effet, si les citoyennes et les citoyens du Canada

disposaient, avec une identité numérique, d’un tel compte à la

Banque du Canada (ou via les banques canadiennes), ne serait-il

pas plus ardu, techniquement et politiquement, de rompre avec

le pouvoir fédéral? La question mérite qu’on y prête attention.

CONCLUSION

On devrait redonner à la politique monétaire la place qui lui

revient dans le débat politique en réactualisant les arguments en

faveur d’une monnaie québécoise. À l’heure où les taux directeurs

sont en hausse, les discussions devraient s’étendre à la dimension

de genre de cette politique ainsi qu’aux enjeux des inégalités et

de la démocratie économiques.

1 S. Morel (2018), « Pour les femmes, une assurance-chômage intégrée aux politiques de l’emploi », dans RéCI, OUI Québec (dir.), Un Québec-pays. Le OUI des femmes,

Montréal, Les éditions du remue-ménage, p. 103-110.

Magazine Oui, je le veux! 11 Volume 3 numéro 1


DOSSIER TRANSPARLEMENTAIRE LA MONNAIE DU QUÉBEC INDÉPENDANT

LE CANADA N’EST PAS UNE ZONE MONÉTAIRE OPTIMALE POUR LE QUÉBEC 1

JACQUES C. MARTIN

L’auteur a travaillé dans le domaine des finances publiques au gouvernement du Québec, sous la

direction de monsieur Jacques Parizeau, alors conseiller économique auprès du premier ministre.

Les États ou les provinces membres d’un système monétaire unique, comme le Canada,

acceptent la présence d’une seule banque centrale, soit la Banque du Canada et renonçant par

le fait même à créer leur propre banque centrale, perdant alors accès à une politique monétaire

distincte. On peut se demander à qui profite surtout une monnaie canadienne unique, et aussi si

le Québec a intérêt à faire partie de la zone monétaire canadienne ou s’il devrait plutôt créer sa

propre monnaie dans le cadre d’un État québécois indépendant.

LA THÉORIE DES ZONES MONÉTAIRES OPTIMALES (ZMO) DE ROBERT MUNDELL 2

La théorie des zones monétaires optimales (ZMO), élaborée

par R. Mundell, permet de déterminer si un pays, un État ou

une province a intérêt à se joindre à une union monétaire en

adoptant une monnaie commune. Or, le nouveau mode de

paiement plus moderne via la monnaie électronique ou virtuelle

réduit énormément ce soi-disant avantage d’utiliser une

monnaie commune. Avec ce nouveau type de devise, un État (ou

une province) peut quitter plus facilement, par exemple la zone

euro, ou encore sortir de l’emprise de sa monnaie nationale 3 , par

exemple celle du Canada.

Une zone monétaire (ZM) n’est optimale, c’est-à-dire durable,

qu’à cinq conditions.

• L’asymétrie des chocs économiques dans la zone monétaire.

Très souvent, la Banque du Canada intervient pour ralentir

une poussée inflationniste trop vive en Ontario; les autres

régions (ou provinces) économiques la subissent et encaissent

souvent les contrecoups en termes de pertes d’emploi. Les chocs

économiques en provenance de l’Ontario sur le Québec sont

asymétriques, ce qui sous-tend que ces deux régions auraient

intérêt à former deux zones monétaires distinctes 4 .

1 Ce texte est une adaptation d’un article à paraître dans la revue L’Action nationale.

2 Robert A. Mundell (1961, septembre), « A Theory of Optimun Currency Areas », American Economic Review, vol. 51, no 4), p. 657-665.

Armand-Denis Schor (2000, décembre), « La théorie des zones monétaires optimales : l’optimum, le praticable, le crédible et le réel », L’Actualité économique, vol. 76, no 4.

3 J. E. Stiglitz (2016), L’Euro : comment la monnaie unique menace l’avenir de l’Europe, Éditions LLL, Les liens qui libèrent.

4 Denis Tremblay (1997, mai), La zone monétaire canadienne, mémoire présenté à la Faculté des sciences sociales, Département d’économie, Université Laval.

LA BANQUE DU CANADA, L’INFLATION ET L’EMPLOI

Une banque centrale comme la Banque du Canada assume des responsabilités importantes :

elle est le seul organisme du pays autorisé à émettre des billets de banque que les Canadiens peuvent utiliser en toute confiance ; elle

coordonne la politique monétaire qui vise à préserver la valeur de la monnaie et à maintenir l’inflation à un niveau stable et prévisible ;

elle agit comme agent financier du gouvernement ; elle promeut la stabilité et l’efficience du système financier, en supervisant les

marchés financiers, les banques et les coopératives de crédit.

Deux aspects de la politique monétaire sont particulièrement importants pour l’économie : l’établissement des taux d’intérêt et l’action

sur le taux de change. En période de ralentissement économique, lorsque le chômage augmente, la Banque du Canada peut alors

faciliter la consommation et les investissements en diminuant les taux d’intérêt, ou au contraire les augmenter en période d’inflation.

Sur un autre plan, la valeur de la monnaie étant constamment établie en fonction des autres monnaies selon l’activité économique

entre les pays, la Banque du Canada peut influer sur le taux de change, ce qui influence également l’exportation et les emplois qui en

dépendent.

Magazine Oui, je le veux! 12 Volume 3 numéro 1


DOSSIER TRANSPARLEMENTAIRE LA MONNAIE DU QUÉBEC INDÉPENDANT

• La circulation sans entrave des facteurs de production dans la

zone monétaire. Pour éviter que le taux de chômage augmente

partout au Canada, il est nécessaire qu’il y ait mobilité des facteurs

de production (capital et main-d’œuvre) d’une région comme le

Québec vers celle de l’Ontario ou vers d’autres provinces. Or,

à cause des barrières linguistiques et culturelles, en l’absence

de mobilité des facteurs de production, les chocs asymétriques

pourraient être amenuisés en faisant varier le taux de change, à

la condition que les régions ou les provinces affectées détiennent

leur propre monnaie.

• La diversification de la production. Plus les régions sont

spécialisées, plus elles s’exposent à encaisser des chocs

asymétriques. C’est le cas notamment des provinces maritimes

et de celles de l’Ouest qui sont très peu diversifiées, mais ce n’est

pas le cas du Québec.

• Le degré d’ouverture de l’économie. Selon MacKinnon, le

degré d’ouverture de l’économie d’une zone, d’une région ou

d’un pays s’ajoute aux indicateurs d’optimalité 5 . Plus l’économie

d’une région ou d’un pays est ouverte par rapport à celle de ses

partenaires dans une union monétaire, plus cette région ou ce

pays aspirera à des gains et à des avantages de sa participation à

celle-ci. C’est le cas de l’Ontario.

• L’intégration financière. La ZM canadienne est sans doute

intégrée sur le plan financier, mais cela s’opère au détriment du

Québec qui a vu, entre autres, son centre financier de Montréal

s’évaporer au profit de Toronto au cours des dernières décennies.

On peut donc voir qui bénéficie de l’union monétaire canadienne.

On observe une tendance à concentrer les investissements

de l’ensemble du territoire dans la province dominante de la

fédération. La politique monétaire du Canada a pour effet de

polariser les investissements publics et privés vers l’Ontario.

La conséquence de cette focalisation excessive de l’activité

économique dans une province pivot crée une distorsion ou un

dysfonctionnement dans la fédération canadienne. Pour atténuer

ce désordre fonctionnel, les fédérations comme le Canada ont

mis en place des systèmes de péréquation variés qui absorbent,

en partie, les chocs

causés par une

politique monétaire

unique.

Dans le régime

politique canadien

actuel, le Québec

subit les effets

toxiques de la politique monétaire canadienne. Il aurait donc

avantage à gérer sa propre politique monétaire ainsi qu’à émettre

une monnaie spécifique.

C’est précisément ce que l’Angleterre a choisi de faire en

n’acceptant pas de se joindre à la zone euro. Il en est de même

pour plusieurs pays développés de l’Europe du Nord de la taille

du Québec, tels que la Norvège, la Suède et le Danemark, qui

n’ont pas adhéré à la monnaie européenne même si les deux

derniers font partie de l’Union européenne (UE). D’autres pays

membres de l’UE, comme la Bulgarie, la Croatie, la Tchéquie, la

Hongrie, la Pologne et la Roumanie, ont également convenu de

ne pas adopter l’euro comme devise.

CONCLUSION

Les attaques permanentes en provenance du Canada anglais

concernant le fait que le Québec reçoit de la péréquation et que

nous serions les assistés sociaux de la Confédération témoignent

d’une méconnaissance élémentaire du fonctionnement du

fédéralisme canadien.

L’État du Québec n’est pas pauvre, mais subit les contrecoups de

la politique monétaire canadienne. En fait, la péréquation vise

à atténuer les effets délétères sur plusieurs régions (provinces),

résultant du dysfonctionnement de la politique monétaire. Le

Québec peut très bien se passer de la péréquation offerte par le

Canada en recouvrant toute sa latitude vis-à-vis de sa politique

monétaire et en émettant sa propre monnaie. À cette fin, l’État

du Québec n’a qu’à choisir de devenir un pays indépendant. Il

en a tous les moyens et peut même devenir un des États les plus

prospères dans le concert des nations.

5 R. MacKinnon (1963), « Optimun currency Areas », American Economic Review, no 53.

Magazine Oui, je le veux! 13 Volume 3 numéro 1


CHRONIQUE FRANÇAIS

MAXIME LAPORTE

Président du Mouvement Québec français

LOI 96 : CHANT DU CYGNE OU CHANT DU COQ

POUR LE QUÉBEC FRANÇAIS?

C’est donc chose faite. Le 24 mai dernier, l’Assemblée nationale

a adopté, à 79 voix contre 29, le fameux projet de loi no 96 du

gouvernement Legault : Loi sur la langue officielle et commune,

le français. Le ministre Simon Jolin-Barrette, parrain de cette

importante réforme de notre Charte de la langue française, l’a

présentée comme « le début d’une grande relance linguistique »

pour la nation québécoise. Qu’en est-il vraiment?

La loi 96 permettra-t-elle d’assurer ne serait-ce que le maintien

de la vitalité du français par rapport à l’anglais au Québec,

notamment dans la région métropolitaine? Ou d’atteindre 90

% des substitutions linguistiques des allophones vers le français?

À ces questions et à d’autres, la réponse est évidemment NON!

Alors, si la loi 96 est le début de quelque chose, c’est un début

bien timide ou, peut-être, une sorte de chant du cygne avant que

Montréal et ses banlieues ne basculent irrémédiablement dans le

néant de la canadianisation.

Pourtant, à la suite de l’adoption de la loi 101 en 1977, et

jusqu’aux années 1990, non seulement étions-nous parvenus à

maintenir la vitalité de notre langue commune, mais le français

était même en croissance.

Nous gagnions des points, au lieu d’en perdre. Bien sûr, il faut

rappeler la cause majeure de l’érosion de l’efficacité de notre loi

101, ce massacre à la tronçonneuse perpétré par les tribunaux

canadiens qui en ont invalidé des pans entiers. Cela, au nom

d’un ordre constitutionnel canadien imposé au Québec auquel

notre Assemblée nationale n’a jamais adhéré, lequel sert toujours

d’appui aux pourfendeurs du Québec français pour reprendre

leurs croisades de plus belle.

Magazine Oui, je le veux! 14 Volume 3 numéro 1


CHRONIQUE FRANÇAIS

lois et des tribunaux, et il renonce à

rétablir le français comme seule langue

de l’affichage commercial. En matière

scolaire, il renonce à revenir à la clause

Québec, tout comme il renonce à

étendre la loi 101 au cégep et à mettre

fin au surfinancement éhonté des

institutions publiques anglaises.

D’où le devoir qui incombait et incombe toujours à nos

dirigeants de rétablir la loi 101 originale, dans ses aspects les

plus importants, question de simple respect pour la démocratie

parlementaire québécoise. Alors que le gouvernement Legault

bénéficiait de toute la marge de manœuvre politique, de tout

l’appui nécessaire dans l’opinion publique, on s’attendait à ce

qu’il fasse preuve d’un courage analogue à celui d’un Camille

Laurin – dont les caquistes ne cessent pourtant de se réclamer.

Par sa timide réforme, la CAQ renonce à rétablir certaines des

dispositions fortes de la loi 101 originale, préférant à l’évidence

se complaire dans la soumission devant Ottawa et ses diktats

constitutionnels. Entre autres choses, ce gouvernement renonce

à rétablir le français comme seule langue officielle de l’État, des

Alors, devant la tragique insuffisance de

cette réforme, une seule réponse nous

apparaît possible. Dans l’immédiat,

nous, les porteurs de la cause du

français, entendons réclamer une

réforme digne de ce nom. Toutefois,

plus que jamais, il est illusoire de

penser que nous arriverons à nos fins en

demeurant encarcanés à l’intérieur de

l’enclos provincial qui nous sert de cité.

La vérité, c’est que le dernier espoir du Québec français réside

dans l’accession à l’indépendance nationale. Point barre. C’est à

cette réforme-là, la seule qui vaille, que tous les « nationalistes »

sérieux devront se consacrer dès à présent.

Chant du cygne pour le « nationalisme » factice de nos

carnavaliers caquistes en limousine, la loi 96 doit plutôt résonner

à la manière d’un chant du coq – d’un cri de réveil – aux oreilles de

tous ceux et celles qui veulent encore sincèrement que le Québec

vive.

Magazine Oui, je le veux! 15 Volume 3 numéro 1


ESPACE VOYAGE

COTEAU DU LAC :

LE FLEUVE ST-LAURENT

ET LA NATURE

HÉLÈNE LAVARIÈRE

Je suis une passionnée de la nature, que j’adore croquer en photos, depuis ma retraite comme infirmière.

La région de Coteau Du Lac où je demeure nous offre le fleuve qui vient des Grands Lacs avant d’arriver à l’archipel

de Montréal. Il est ici magnifique et regorge de beauté. Il abrite des oiseaux superbes et de magnifiques plans d’eau.

Magazine Oui, je le veux ! 16 Volume 3 numéro 1


ESPACE VOYAGE

Magazine Oui, je le veux ! 17 Volume 3 numéro 1


NOS MEMBRES PUBLIENT

Vous pouvez vous les procurer en ligne à : https://www.leslibraires.ca/

ou chez votre libraire préféré.

Magazine Oui, je le veux! 18 Volume 3 numéro 1


LA RÉPUBLIQUE DU QUÉBEC, 194 E PAYS À L’ONU

GASTON CARMICHAEL

LE QUÉBEC, RÉPUBLIQUE PROGRESSISTE

DANS LE MONDE

UN PAYS DOTÉ DU FILET SOCIAL LE PLUS

ROBUSTE EN AMÉRIQUE DU NORD

Le Québec est une société socialement avancée qui dispose

d’une trentaine de programmes visant la justice sociale. La

plupart sont gérés par le gouvernement du Québec : programme

d’aide sociale, programme de solidarité sociale, assurance

maladie, assurance médicaments, régime de rentes, protection

de la jeunesse, gratuité de services dentaires pour les jeunes

enfants, centres de la petite enfance (CPE), régime d’assurance

parentale, système d’éducation de la maternelle à l’université.

D’autres programmes, tels l’assurance emploi, les pensions de la sécurité de la vieillesse et les transferts sociaux et en santé aux

provinces, sont gérés actuellement par le gouvernement canadien, ce qui nuit grandement à la coordination des programmes, par

exemple lors les coupes effectuées par Ottawa à l’assurance emploi ou dans la santé par Ottawa. Les programmes actuellement gérés

par les deux paliers de gouvernement seront regroupés, financés et mieux coordonnés dans la République du Québec.

UN DES PAYS LES PLUS ÉGALITAIRES AU MONDE

Le coefficient Gini évalue les écarts de revenus entre les riches et les pauvres dans un pays; plus l’écart est faible, plus le pays est

égalitaire. Ce coefficient dans les pays industrialisés se distribue de 0,25 à 0,58 de 1976 à 2014. Le Québec (0,29) est un peu moins

égalitaire que la Suède (0,27), mais plus égalitaire que la moyenne canadienne (0,32), la France (0,30) ou les États-Unis (0,38).

LE QUÉBEC, TRÈS PRÉSENT SUR LA SCÈNE CULTURELLE INTERNATIONALE

• Céline Dion, vedette internationale de la chanson;

• Denis Villeneuve, cinéaste ayant fait sa marque à Hollywood dans des films comme

Incendies et Dune ;

• Xavier Dolan, gagnant de nombreux César du cinéma, et à qui la France a décerné

le titre honorifique de Chevalier des Arts et des Lettres ;

• Guy Laliberté, Gilles Ste-Croix et Daniel Gauthier, fondateurs du Cirque du Soleil ;

• Michel Tremblay, Marie Laberge, Anne Hébert, Mathieu Bock-Côté, etc., auteurs

traduits en plusieurs langues ;

• Yannick Nézet-Séguin, présentement chef du Metropolitan Opera de New York ;

• Dany Laferrière, membre de la prestigieuse Académie française.

Magazine Oui, je le veux! 19 Volume 3 numéro 1


OSER S’ASSUMER

ENTREVUE AVEC EMMANUEL BILODEAU

« LE QUÉBEC INDÉPENDANT SERA UN MODÈLE

D’INSPIRATION POUR LA PLANÈTE. »

DENIS MONIÈRE

Depuis sa sortie de l’École nationale de théâtre en 1992, Emmanuel Bilodeau a cumulé une quarantaine de rôles.

Très connu pour son rôle-titre dans la série télévisée René Lévesque, il a tenu des rôles marquants au théâtre et au

cinéma et il présente actuellement son deuxième spectacle d’humour, Manu dans le pétrin.

EMMANUEL BILODEAU

Denis Monière – Comment devient-on comédien? Quel a

été votre parcours avant de vous inscrire à l’École nationale

de théâtre?

Emmanuel Bilodeau – C’est un concours de circonstances. J’ai

d’abord étudié au cégep Garneau où j’ai fait de l’improvisation.

Je suis ensuite allé faire mon droit à l’Université de Montréal où

là aussi j’ai fondé une ligue d’improvisation. À l’époque, je rêvais

aussi d’être journaliste et j’ai travaillé à La Presse comme stagiaire

pendant mes études de droit. Je ne voulais pas me limiter, j’ai

donc passé mes auditions pour être admis à l’École de théâtre.

J’avais trop d’intérêts différents et je ne savais pas encore ce

que je voulais faire. Après avoir prêté serment à la reine pour

être avocat, le lendemain, j’ai décidé que cela ne m’intéressait

pas. Cela ne me passionnait pas assez. J’étais trop jeune. J’avais

l’impression d’étouffer. J’ai donc finalement opté pour le théâtre.

DM – Qui sont les comédiens qui vous ont le plus influencé?

EB – J’ai admiré Jacques Godin qui était mon idole et, par la

suite, Guy Nadon, Sylvie Drapeau, Al Pacino. Mais l’homme que

j’ai le plus admiré, c’est René Lévesque. Toute mon éducation

me menait vers lui. J’étais en pâmoison devant ses discours.

DM – Vous avez joué une quarantaine de personnages au

théâtre, au cinéma et à la télévision. Quels sont les rôles qui

vous ont le plus marqué dans votre carrière?

EB – J’ai joué le Visiteur d’Éric-Emmanuel Schmitt, expérience

très forte avec Jean-Louis Roux comme partenaire. Cela m’a

amené à jouer le rôle d’Hamlet par accident parce que le metteur

en scène cherchait un remplaçant pour Marc Béland. Ce fut

mon premier vrai grand rôle au Théâtre du Rideau Vert. J’ai joué

aussi dans Le volcan tranquille de Pierre Gauvreau. J’avais le rôle

principal. J’étais gâté en sortant de l’école. Je pensais que c’était

ça la vie : avoir toujours de grands rôles. J’ai joué aussi dans un

film de Robert Morin, dont le titre commençait par le mot en

« N » qu’on ne peut plus dire aujourd’hui. Après, j’ai auditionné

pour jouer René Lévesque, production canado-québécoise

commanditée par la CBC, tournée en français et en anglais. Ça

m’apparaissait louche comme projet, mais j’aimais tellement

René Lévesque que j’ai décidé d’auditionner. La rumeur veut

qu’on avait d’abord sollicité Roy Dupuis qui avait refusé.

DM – Pour ce rôle, vous avez

remporté le prix Gémeaux

pour le meilleur rôle masculin

en 2007; comment vous êtesvous

préparé pour jouer

René Lévesque?

EB – Mon principal défi

était de le démystifier et de

m’approprier le personnage en

Emmanuel Bilodeau dans

la série René Lévesque

n’ayant pas peur de montrer ses défauts. J’avais un problème de

confiance en moi et il paraît que René Lévesque avait ça aussi.

Alors, j’ai pu m’appuyer sur ce défaut commun pour l’incarner.

Le Québec avait aussi ce problème, j’ai donc joué sur cette

corde. On avait d’autres points communs. J’étais passionné

par la politique comme lui. J’avais étudié en droit comme lui,

j’avais aussi pratiqué le journalisme, ce qui nous rapprochait. Je

connaissais aussi depuis l’enfance son neveu qui était, comme

lui, petit et charismatique. Alors je me suis dit que je pouvais

me fier à mon expérience personnelle pour l’incarner. Lorsque

Magazine Oui, je le veux! 20 Volume 3 numéro 1


OSER S’ASSUMER

j’étais journaliste à La Presse, je l’avais rencontré pour faire une

entrevue exclusive quelques semaines avant sa mort et j’avais

conservé l’enregistrement de deux heures. Je l’ai réécouté pour

me préparer. Je me suis aussi plongé dans les documentaires

audiovisuels sur sa carrière, les biographies, ses discours. Je n’ai

eu qu’un mois pour me préparer. J’ai eu officiellement le rôle le

14 juillet et on commençait à tourner le 14 août. Je ne dormais

plus, je ne faisais que penser à lui. Jouer René Lévesque c’est fou

et je devais en plus le jouer en anglais et tout de suite après on

tournait en français.

DM – Aviez-vous un message ou une idée que vous vouliez

transmettre par votre interprétation?

EB – Ma principale intention était de le représenter comme il

était sans essayer d’en rajouter. Avec le réalisateur anglophone,

ça s’est bien passé parce qu’il était plus respectueux de mon jeu,

de ma vision du personnage qui était humble. Mon défi, c’était

de rendre justice au personnage avec humilité. Avec le réalisateur

francophone, ça s’est moins bien passé parce qu’il a voulu jouer la

carte de l’émotion et me faire exagérer certains traits.

DM – Comme humoriste, vous avez aussi interprété le rôle

d’un politicien corrompu, Tomato, en juillet 2012, au Gala

Juste pour rire. Quel est votre rapport à la vie politique et

aux politiciens?

EB – Je ne veux pas me moquer de la classe politique, mais il

y a eu tellement de corruption au Québec à une époque que

c’était un terreau fertile. J’avoue que j’ai une grande admiration

pour les politiciens. Peu importe les partis, ceux qui s’engagent

en politique sont très courageux, ce sont des gens qui sacrifient

une partie de leur bonheur pour redonner à la société; 95 % des

politiciens le font parce qu’ils croient à leurs idées et pas pour

s’enrichir ou pour la gloriole. Ils veulent faire avancer le Québec.

Moi, je crois vraiment à ça.

DM – Est-ce qu’on pourrait vous qualifier d’artiste engagé?

Si oui, quelles sont les causes qui vous tiennent le plus à

cœur?

EB – Lorsque j’ai commencé l’École de théâtre, je m’étais dit que

si un jour j’étais un peu connu, je voulais que ma notoriété serve

à quelque chose. Après mon rôle de René Lévesque, j’étais plus

connu et j’ai accepté d’être porte-parole de toutes sortes de causes

: l’environnement, le vélo l’hiver, les itinérants, les autistes, toutes

les causes sociales et environnementales. Je suis les traces de ma

mère qui était bénévole et qui militait pour plein de causes. J’ai

une fibre bénévole pour l’engagement communautaire.

DM – Pourquoi pensez-vous que le Québec doit devenir

un pays?

EB – Mon engagement pour l’indépendance du Québec a varié

d’intensité selon les époques de ma vie. J’ai toujours ce rêve que

le Québec devienne indépendant. Au début, mon engagement

était motivé par la nécessité d’assurer la pérennité de notre

culture et de notre langue. Maintenant, avec les changements

climatiques, il va y avoir des bouleversements dans tous les

coins du monde. Il faut être prêt et le Québec pourrait devenir

un modèle. L’indépendance va arriver naturellement parce

qu’avec nos richesses naturelles, l’eau et la grandeur de notre

territoire, le Québec va devenir un pôle attractif incroyable

pour des populations qui devront quitter leur propre pays. Il

faudra se préparer à cela et je pense qu’en donnant la priorité

à l’environnement, le Québec indépendant sera un modèle

d’inspiration pour la planète.

DM – Pourquoi, aujourd’hui, le milieu culturel se montre-t-il

indifférent ou distant quant à l’avenir politique du Québec?

EB – Les artistes sont

comme l’ensemble des

Québécois. Ils sont

devenus plus frileux,

moins passionnés par

la question nationale.

Cette indifférence

s’explique aussi par

leur formation qui est

Sur le plateau de tournage de The Revenant

axée beaucoup plus

sur la performance pour être efficace professionnellement et

beaucoup moins sur l’histoire politique. On veut être compétitif,

faire de l’argent. C’est pas rentable pour un humoriste qui veut

remplir ses salles d’être associé à quelque mouvement politique

que ce soit. C’est pas à la mode, mais j’ai l’impression que cela

va revenir. La flamme va être ramenée un jour lorsque les gens

comprendront qu’on possède toutes ces richesses et qu’on ne

peut pas faire ce que l’on veut à cause du système politique. Avec

les changements climatiques, on aura de nouvelles raisons de

vouloir l’indépendance.

DM – Pourquoi votre dernier spectacle qui sera à l’affiche

en octobre s’appelle-t-il Manu dans le pétrin?

EB – J’ai une petite de cinq ans et j’ai 57 ans. Avoir des enfants,

c’est difficile même si j’adore cela. La planète est dans le pétrin avec

la COVID, les inondations, les sécheresses, la surpopulation, voilà

les thèmes que j’aborde avec humour dans mon prochain spectacle.

Magazine Oui, je le veux! 21 Volume 3 numéro 1


INDÉPENDANCE SUR LA PLANÈTE

DENIS MONIÈRE

IRLANDE : L’INDÉPENDANCE INACHEVÉE

Qui aurait pu prédire qu’un jour les deux territoires de l’Irlande

seraient gouvernés par le même parti, celui qui a été l’un des

principaux artisans de l’indépendance en 1922 : le Sinn Féin, qui

prône la réunification des deux Irlandes. Il faut rappeler que tout

le système politique de l’Irlande du Nord a été conçu pour empêcher

une telle éventualité et assurer des majorités protestantes

garantes de l’union avec le Royaume-Uni.

Le 5 mai dernier, pour la première fois depuis l’indépendance de

l’Irlande il y a un siècle et la création de l’Irlande du Nord par

la partition, l’aile politique de l’IRA, le Sinn Féin, a obtenu une

majorité de sièges au Parlement de l’Ulster. Le Sinn Féin, formation

pour la réunification de l’Irlande, est arrivé en tête, avec

29 % des suffrages et 27 sièges. En vertu des accords passés en

1998, cette majorité lui donne le droit de nommer sa cheffe, Michelle

O’Neill, au poste de premier ministre. Déjà en 2019, au

congrès annuel de son parti qui avait pour thème « le temps de la

réunification », celle-ci déclarait : « La seule solution au chaos du

Brexit, c’est l’unification. La question n’est plus de savoir si, mais

quand se tiendra le référendum sur la réunification. »

Ce changement de cap politique s’inscrit dans les suites du

Brexit qui a rendu la situation de l’Ulster problématique puisque

la sortie du Royaume-Uni de l’Europe supposerait l’imposition

d’une frontière entre les deux parties de l’Irlande. Un protocole

sur l’Irlande du Nord a été convenu et permet à l’Irlande du

Nord de rester dans le marché unique de l’UE. Cet arrangement

déplaît aux partis unionistes nord-irlandais qui défendent

le maintien dans le Royaume-Uni et la loyauté à la couronne

d’Angleterre, parce qu’il instaure un nouveau statut pour la partie

nord de l’île, qui est reconnue de facto comme étant hors du

territoire du Royaume-Uni. Le Brexit a donc créé des conditions

favorables à une réunification de l’Irlande, perspective qui

ne semble plus effrayer les Irlandais du Nord. Rappelons qu’en

2016, une nette majorité de Nord-Irlandais (56 %) ont voté pour

rester dans l’Union européenne alors que le Parti unioniste irlandais

a défendu une sortie de l’Europe, ce qui a affaibli sa légitimité.

Il faut aussi savoir que l’Irlande se classe parmi les dix

pays les plus riches du monde quant au PIB par habitant.

Magazine Oui, je le veux! 22 Volume 3 numéro 1


INDÉPENDANCE SUR LA PLANÈTE

Première force politique de l’Irlande du Nord et du Sud, le Sinn

Féin, pour réunifier l’Irlande, peut non seulement s’appuyer sur

les avantages de la réunification économique instaurée de fait

par le protocole sur l’Irlande du Nord conclu avec l’Union européenne,

mais il peut aussi revendiquer la mise en œuvre d’une

disposition clé de l’accord de Belfast, à savoir la tenue d’un référendum

sur la réunification formelle de l’Irlande qui devrait

survenir dans les cinq prochaines années. Il faut toutefois noter

que selon l’accord de Belfast de 1998, il revient au Royaume-

Uni de décider du moment de cette consultation. Comme les

Britanniques ont l’art de compliquer les choses pour bloquer les

processus d’autodétermination, ce délai risque de s’allonger. Il

faut aussi introduire dans cette analyse de conjoncture l’éventualité

d’un autre référendum en Écosse, qui pourrait signifier

la dissolution du Royaume-Uni et favoriser la résolution de la

question irlandaise. Cela ne saurait tarder puisque la première

ministre d’Écosse, Nicola Sturgeon, a annoncé la tenue d’un

nouveau référendum d’ici la fin de 2023.

LE CATALAN GATE

Au moment où la Catalogne intensifie ses relations diplomatiques

avec le Québec en ouvrant une délégation à Québec, le

gouvernement espagnol était ébranlé par le scandale des écoutes

électroniques appelé Catalan Gate. Cette forfaiture a été révélée

par une équipe de l’université de Toronto (Citizen Lab) qui

a déterminé que plus de 65 personnalités indépendantistes,

catalanes et basques, ont été espionnées pendant des années

grâce au programme Pegasus. L’affaire catalane est de loin la

plus grande affaire d’espionnage au monde utilisant ce logiciel

espion. Cette information a été confirmée le 19 avril par The

New Yorker et par Aministie internationale qui a appelé les

autorités de l’Union européenne à sanctionner le gouvernement

espagnol.

Le président de la Generalitat Pere Aragones de même que ses

prédécesseurs Carle Puigdemont et Quin Torra, des dirigeants

d’Òmnium Cultural et de l’Assamblea Nacional Catalana,

des membres du Parlement et du Congrès, des avocats, ainsi

que des parents et amis proches ont été espionnés par les

services de renseignements espagnols entre 2015 et 2020. Ces

écoutes ont été réalisées à la demande du ministre de la justice

espagnol. On a aussi appris que le président de la Generalitat

de Catalunya avait été espionné en pleine négociation entre

ERC et PSOE pour investir Pedro Sánchez comme président.

Fait plus grave, le gouvernement de Pedro Sànchez a continué à

pratiquer cet espionnage même s’il avait besoin du soutien des

indépendantistes catalans pour gouverner.

Ces révélations de cyber-espionnage ont rapproché les partis

indépendantistes qui ont fait front commun pour dénoncer ces

atteintes aux droits fondamentaux et à la démocratie pratiquées

par l’Espagne. Esquerra Republicana qui dirige le gouvernement

catalan a menacé de retirer son appui au gouvernement espagnol

s’il ne corrigeait pas la situation. Cette temporisation a avivé

les divergences avec Carle Puiddemont qui préconisait une

rupture des relations avec Madrid. Le 10 mai 2022, Paz Esteban,

directrice du Centre national de renseignement a été destituée

pour espionnage.

Il s’agit d’un cas flagrant d’espionnage politique au cœur de

l’Europe. Ces attaques d’espionnage avaient une motivation

politique claire : obtenir des informations privées pour connaître,

à l’avance, chaque étape du mouvement indépendantiste catalan

afin d’affaiblir ce mouvement démocratique. La preuve en est

que la plupart des attaques, infections et hacks ont eu lieu à des

moments charnières de la prise de décision du mouvement tels

que les accords politiques, les investissements de la présidence

ou les choix stratégiques.

Après les arrestations et les détentions arbitraires des

indépendantistes catalans depuis le référendum de 2017, le

scandale des écoutes électroniques fait encore une fois la preuve

que les États constitués sont prêts à utiliser tous les moyens pour

empêcher les peuples de se libérer de leur tutelle. Le respect des

règles démocratiques ne compte pas quant il s’agit de combattre

les indépendantistes. A bon entendeur, salut...

Magazine Oui, je le veux! 23 Volume 3 numéro 1


COMPRENDRE LE PASSÉ PRÉPARER L’AVENIR

GILBERT PAQUETTE

APRÈS 1995 : LA RÉSIGNATION DES ÉLITES

ET LE PLAN B DU POUVOIR CANADIEN

Le référendum du 30 octobre 1995 n’a pas été une défaite de l’indépendance comme on le

répète souvent, même chez les indépendantistes, mais une tricherie du Canada. Il a manqué

54 288 votes au camp du OUI qui a recueilli plus de 60 % d’appui chez les francophones.

Sans les nombreuses manœuvres d’Ottawa souvent illégales, la victoire aurait changé de camp.

À la suite de la résignation des élites indépendantistes , se limitant à gouverner une province

sous le prétexte des finances, la riposte du pouvoir canadien a été intense et systématique.

À Ottawa, on l’avait échappé belle. Les moyens illégaux mis en

œuvre avaient assuré au NON une courte victoire apparente,

mais la moyenne des sondages de 1996 prédisait une victoire

de l’indépendance à 54 % si, comme on le craignait à Ottawa, le

Parti Québécois tenait un autre référendum ou déclenchait des

élections sur la souveraineté.

Lucien Bouchard refusa

de le faire. Dès son

assermentation, le nouveau

premier ministre fit savoir

« qu’il entendait d’abord

gouverner le Québec et

respecter le terme électoral

du mandat en cours 1 ».

Malgré tous les signes

de l’ingérence illégale du

Canada, il était résigné. Il

abdiquait comme s’il avait

perdu le référendum et

Source: Wikipédia

il s’était convaincu qu’un

troisième référendum serait perdant. Il fallait attendre « les

conditions gagnantes ». Il allait se concentrer sur la gouvernance

de la province et le « rétablissement » des finances publiques

comme si le Canada n’était pas responsable en grande partie

des problèmes financiers du Québec. Pire, il choisit la voie du

néolibéralisme pour « rétablir » les finances publiques par des

coupures de postes et de services publics. L’objectif du déficit

zéro, véritable cheval de Troie du conservatisme, avait remplacé

celui de l’indépendance. Le Québec se retrouverait ainsi sans

rapport de force devant l’offensive centralisatrice tous azimuts

qui se préparait à Ottawa.

* * *

De son côté, le gouvernement Chrétien était déterminé à

employer tous les moyens pour qu’une tentative d’émancipation

du Québec ne se reproduise plus jamais. Sa stratégie allait se

déployer sur trois plans : propagande, finances et constitution.

Sur le premier plan, on répéterait que l’indépendance avait été

défaite définitivement, qu’elle était une chose du passé dont les

gens ne voulaient plus entendre parler. Les « vieilles chicanes »

étaient dépassées et il fallait désormais s’occuper des « vraies

affaires ». Cet effort systématique de propagande allait se

concrétiser par le remplacement graduel des symboles nationaux

du Québec par des symboles canadiens. Des commandites à

même les fonds publics, en échange de contributions au parti

au pouvoir, allaient tapisser le Québec d’unifoliés dans le cadre

d’évènements visant à renforcer le sentiment d’appartenance au

Canada. Dans les médias, particulièrement à Radio-Canada,

on remplacerait le terme « québécois » par « canadiens », on

privilégierait une couverture « nationale » pancanadienne, on

donnerait des nouvelles de l’Ontario et des autres provinces

autant que celles du Québec.

Sur le plan financier, la stratégie d’Ottawa consistait à affamer

le Québec. L’énorme déficit canadien de 42 milliards de dollars

serait éliminé par une diminution de 79 % des transferts aux

provinces, particulièrement en santé, aggravant les problèmes

1 F. Épinette (1998), La question nationale au Québec, PUF, p. 121.

Magazine Oui, je le veux! 24 Volume 3 numéro 1


COMPRENDRE LE PASSÉ PRÉPARER L’AVENIR

à un ensemble de conditions inapplicables en pratique. Cette loi

fut votée par le Parlement fédéral contre la volonté des députés

du Bloc Québécois à Ottawa et de l’ensemble des députés de

l’Assemblée nationale du Québec, quel que soit leur parti.

* * *

Lucien Bouchard y opposa la loi 99 qui fut votée par l’Assemblée

nationale, affirmant que « seul le peuple québécois a le droit de

choisir le régime politique et le statut juridique du Québec ».

Il comptait sur une mobilisation populaire qui ne fut pas au

rendez-vous, en partie parce que son propre gouvernement avait

plongé le Québec dans quatre années d’austérité budgétaire qui

avaient laissé des divisions dans la population et une méfiance

envers la politique en général et le PQ-Bouchard en particulier.

L’offensive d’Ottawa avait réussi. Découragé et étant fortement

critiqué au sein de son parti, Lucien Bouchard remit sa démission

comme premier ministre du Québec le 11 janvier 2001.

Page couverture d’un livre de Daniel Turp sur cette période.

financiers du Québec. En réduisant unilatéralement ses

paiements aux provinces, l’État canadien disposerait de surplus

considérables qu’il pourrait dépenser lui-même dans les champs

de compétence exclusifs des provinces, au Québec en particulier.

Par la prestation canadienne pour enfants, par exemple, chaque

parent recevrait un chèque sur lequel figurerait une jolie feuille

d’érable. Seulement en éducation, Ottawa investirait plusieurs

milliards répartis entre les bourses d’études du millénaire, la

Fondation canadienne pour l’innovation et la Stratégie emploijeunesse.

Les taxes prélevées au Québec allaient y revenir sous

condition, de préférence directement aux individus, pour appuyer

l’idée qu’Ottawa était le principal gouvernement capable de

répondre aux besoins des Québécoises et des Québécois dans

tous les domaines.

Sur le plan constitutionnel, pendant la campagne référendaire,

le premier ministre Chrétien s’était engagé publiquement à

reconnaître le caractère distinct du Québec et à lui redonner

un droit de veto sur les changements constitutionnels. Après le

référendum, ces velléités de renouvellement du régime canadien

s’étaient envolées. Comme après le référendum de 1980, le

gouvernement canadien était décidé à maintenir le statu quo

et même à resserrer l’étau de la centralisation à Ottawa. Il était

surtout déterminé à bloquer tout nouvel exercice référendaire

visant l’indépendance du Québec. Le renvoi demandé à la Cour

suprême sur la sécession n’avait pas donné satisfaction à Ottawa,

de sorte que celui-ci allait faire adopter la loi C-20, dite de la

« clarté », qui soumettait le droit du Québec de choisir son avenir

Délaissant la démarche déterminée de Jacques Parizeau, un Parti

Québécois redevenu provincialiste s’était paralysé lui-même dans

l’attente de « conditions gagnantes », lesquelles avaient existé

pourtant en 1996 sans que le gouvernement y donne suite. Cette

résignation postréférendaire sera suivie de mises en veilleuse de

l’indépendance à toutes les campagnes électorales.

Magazine Oui, je le veux! 25 Volume 3 numéro 1


CHRONIQUE ENVIRONNEMENT

ANDRÉ BÉLISLE

Président de l’Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (AQLPA)

LES CATASTROPHES CLIMATIQUES SONT

MAINTENANT INEXORABLES

Climat : 2020 a été l’année la plus chaude, turbulente et violente

avant 2021, avant 2022… Nos gouvernements ont perdu le

nord depuis longtemps. Comme ils ne s’en souciaient pas, les

catastrophes climatiques se multiplient, et comme nous ne

sommes pas prêts à affronter ni les canicules mortelles, ni les

sécheresses dévastatrices, ni les feux de broussailles et de forêts

incontrôlables, ni les tempêtes, ouragans, tornades et inondations

qui suivent, l’avenir sera brutal.

À titre de militant de la première heure, ça fait maintenant

quarante ans que je suis au front pour la qualité de l’air et la

protection de l’atmosphère avec l’AQLPA, luttant pour les

générations qui nous suivent. Connaissant très bien l’histoire,

j’accuse donc d’incompétence, de laxisme et de tromperies nos

gouvernements successifs des trente dernières années.

Aucun de nos gouvernements, tant au Canada qu’au Québec,

n’est maintenant en mesure de respecter les engagements qu’euxmêmes

ont pris au cours de toutes ces années depuis 1992. Trente

ans de bla-bla-bla, comme le répète Greta Thunberg, encore et

encore…

Il serait vain de ma part de penser ou de dire que nous n’y

pouvons plus rien, car, bien au contraire, conscients que nous

aurons immanquablement à y faire face, nous savons aussi

que tant les moyens pour réduire la menace des gaz à effet de

serre, que leurs conséquences, les événements météorologiques

extrêmes, que les mesures d’adaptations nécessaires pour faire

face à la crise climatique sont connus. Nous devons donc en

conclure que nos gouvernements et institutions sont inadaptés,

voire souvent malintentionnés aussi.

Devant la dure réalité climatique, il faut sortir

du casier à homards, de la boîte de Pandore en

adaptant nos gouvernements et institutions

pour y faire face. La crise climatique est la

priorité des priorités.

Climat Québec propose justement et très

pertinemment d’agir en conséquence, soit de

faire en sorte que la crise climatique devienne

la priorité des priorités du gouvernement,

des ministères et des institutions publiques,

ce qu’aucun autre parti politique ne réalise

ou ne veut reconnaître encore, mais qui est

fondamental tant pour notre environnement et notre sécurité

que pour notre économie.

Nous avons tout à perdre avec d’autres gouvernements inadaptés

et tout à gagner avec un gouvernement responsable, adapté à

la situation, qui prend la mesure des problèmes, impose les

solutions innovantes nécessaires, crée de l’emploi pour protéger et

améliorer notre qualité de vie; c’est ce que j’appelle « encourager

le progrès ». Malheureusement, à ce jour, règle générale, nos

gouvernements ne proposent vraiment rien d’autre que plus de

bla-bla-bla et de regrets.

Pourtant, les grands défis auxquels nous faisons face nous

appellent plus que jamais à l’audace, au courage et à la cohérence.

Il faut articuler une démarche étatique complètement basée

sur la réponse du Québec à la crise climatique. Nous devons

développer la plus grande résilience possible pour faire face aux

bouleversements climatiques qui s’intensifient. Le Québec doit

se donner les moyens d’assurer que nous soyons prêts, et cela

passe par l’autonomie et l’indépendance à tous les niveaux pour

pouvoir prendre les décisions qui s’imposent. Nous obtiendrons

en retour la résilience écologique (c’est normalement la mission

de l’État), la solidité économique pour affronter les coups durs

(une responsabilité de l’État) ainsi que la sécurité énergétique

complète grâce à nos énergies propres et renouvelables garantes

de l’élimination des gaz à effet de serre provenant du brûlage de

combustibles fossiles qu’il faut éliminer (ce que l’état néglige de faire

sérieusement). Tous les secteurs d’activités économiques et sociales

sont présentement victimes devant la menace qui gronde. Nous

devons nous protéger et devenir des irréductibles survivants…

Magazine Oui, je le veux! 26 Volume 3 numéro 1


COIN LECTURE

JEAN-PIERRE ÉMOND

ENTREVUE AVEC JONATHAN LEMIRE,

HISTORIEN DES PATRIOTES 1837-38

chargé de projets, historien et recherchiste pour les festivités du

165e des événements 1837-1838 au Musée et régionalement.

Pour l’événement Les Retrouvailles à Saint-Eustache des

descendants des Patriotes et Loyaux en 2002, en plus des

recherches historiques pertinentes, j’ai remonté l’ascendance

généalogique de descendants actuels jusqu’à leur origine

patriote ou loyaliste. J’y ai contribué également à une exposition

temporaire sur Paul Sauvé. Je fus aussi recherchiste pour d’autres

expositions muséales (Saint-Eustache, Saint-Denis-sur-

Richelieu) et j’ai été chroniqueur (Histoires de 1837-1838) au

journal L’Éveil (2005-2015). En parallèle, j’ai écrit mon premier

livre sur Jacques Labrie.

JONATHAN LEMIRE

Jean-Pierre Émond – Comment, Jonathan Lemire, historien,

conférencier et chercheur, vous êtes-vous intéressé à

l’histoire des patriotes?

Jonathan Lemire – À Saint-Eustache, j’ai baigné dès la

maternelle dans l’histoire des patriotes. En 1987, j’avais sept ans.

Les festivités du 150e des événements de 1837-1838 et un livret

alors publié par la municipalité ont marqué mon enfance, mon

adolescence, suscitant ma carrière de chercheur et d’historien.

Détenteur d’un baccalauréat en histoire de l’Université de

Montréal avec spécialisation en histoire du Québec préindustriel

(1791-1840), j’ai axé mes travaux sur la région des Deux-

Montagnes. Le cours de l’UQAM Rébellions 1837-1838 avec

Gilles Laporte m’a fourni l’opportunité de collaborer étroitement

avec Gilles pour l’élaboration d’un dictionnaire résultant à

Patriotes et Loyaux (Gilles Laporte, 2004, Septentrion).

JPÉ – Quelles ont été vos premières réalisations

professionnelles?

JL – J’ai commencé à travailler comme guide et interprète au

Musée de Saint-Eustache et de ses Patriotes. En 2002, j’ai été

JPÉ – Votre premier livre s’intitule Dr Jacques Labrie. Écrits

et correspondance (2009, Septentrion), précédant Ludger

Duvernay. Lettres d’exil, 1837-1842 (2015, Georges Aubin

et Jonathan Lemire, VLB). Pourquoi vous êtes-vous d’abord

intéressé au docteur Labrie?

JL – Il fut un patriote très important, ami proche de Louis-

Joseph Papineau et beau-père de Jean-Olivier Chénier.

Diplômé de médecine (Édimbourg), il s’intéresse parallèlement

à tout (histoire, éducation), est officier de milice puis devient

député. Il fonde plusieurs écoles laïques, dont la révolutionnaire

Académie des filles. Ses recherches poussées l’amènent à

produire son Histoire du Canada (plus de 1000 pages) d’une

grande importance historique. Il décède prématurément en

1831, interrompant la publication de son Histoire qui brûlera

lors de l’incendie du village de Saint-Benoît en décembre 1837.

Néanmoins, il avait produit un résumé d’environ 100 pages qui

fut utilisé pour l’enseignement.

JPÉ – Comment est né le projet Portraits de patriotes 1837-

1838 (voir l’encadré)?

JL – Depuis longtemps, j’avais le projet de compléter l’œuvre de

l’abbé Laurin (1973) par des notes généalogiques et historiques

et des portraits inédits. Mon ouvrage parut en 2012 fait l’objet

d’un grand lancement médiatique en présence de Pierre-Karl

Péladeau, Bernard Landry, Daniel Paillé, Claude Béland et

Gilles Laporte. Ce recueil a depuis été réédité en format plus

accessible.

Magazine Oui, je le veux! 27 Volume 3 numéro 1


COIN LECTURE

UN OUVRAGE MARQUANT DE JONATHAN LEMIRE

Portraits de patriotes 1837-1838.

Œuvres de Jean-Joseph Girouard

(2012, VLB)

Notaire à Saint-Benoît, député et

patriote. Emprisonné en décembre

1837 au Pied-du-Courant, Jean-

Joseph Girouard y a réalisé des

esquisses de 97 patriotes codétenus.

L’abbé Clément Laurin a publié la

majorité des œuvres de Girouard en

1973. Après avoir contacté l’auteur

et l’éditeur de cet ouvrage et conduit

de multiples recherches complémentaires, Jonathan Lemire conçoit un recueil complet où le portrait de chacun des patriotes

sera appuyé par des notes bibliographiques et historiques exhaustives à la suite d’une révision soucieuse de l’exactitude

généalogique. Il nous présente en couleurs plus d’une centaine de portraits, incluant des inédits.

JPÉ – Vous avez reçu plusieurs distinctions pour vos travaux.

JL – En février 2013, la Médaille de l’Assemblée nationale

du Québec m’a été décernée en reconnaissance pour mon

travail d’historien sur les patriotes de la région, une initiative

de Daniel Goyer, député du comté. On m’a aussi décerné en

2019 le prix Fleur de Lys de la section Jean-Olivier-Chénier

de la Société Saint-Jean-Baptiste pour mon rayonnement en

histoire des patriotes. Puis le prix Cybèle (2009, Ville de Saint-

Eustache) ainsi que le prix Passion 2011 (Conseil de la culture

des Laurentides et SNQQ) pour la parution d’un livre sur le

docteur Labrie.

JPÉ – Vous avez aussi collaboré étroitement avec Francine

Ouellette, romancière.

JL – Je vouais déjà un grand respect à madame Ouellette. Un

soir, je reçois un appel de madame Ouellette me disant qu’elle a

épluché mon Dr Labrie et qu’elle voulait que je collabore à ses

deux derniers tomes de la saga Feu. J’en fus renversé! Débuta

ainsi une aventure stimulante comme réviseur historique avec

conférences et présences médiatiques conjointes!

JPÉ – Vous préparez actuellement un nouvel ouvrage?

JL – J’écris actuellement une monographie des troubles des

patriotes dans le vaste comté des Deux-Montagnes. On pourra y

lire de façon très factuelle, quasi heure par heure, le déroulement

des événements de 1815 à 1845. La passion historique de ma vie!

JPÉ – Comme historien, croyez-vous que l’indépendance du

Québec soit inéluctable?

JL – Auparavant, j’aurais dit oui. Les sondages actuels sont

décevants malgré un soutien à l’indépendance d’environ 35 %.

Au fond de mon cœur, j’espère que l’indépendance est inévitable.

Comme le disait Marcel Tessier, historien, si on avait mieux

enseigné notre histoire, on serait déjà indépendant. Oui, je suis

toujours indépendantiste.

JPÉ – D’où vient votre conviction indépendantiste?

JL – En 1995, j’avais quinze ans. J’étais déjà très versé dans

l’histoire des patriotes et je collectionnais tout. Au secondaire,

tout le monde avait son carton du Oui. Avec mes « chums », j’ai

assisté à une conférence de Jacques Parizeau dans une cabane à

sucre à Saint-Eustache. C’était donc important ce qu’il disait!

Puis j’ai assisté à une conférence de Michel Chartrand! Le soir

du référendum, j’étais avec ma famille à écouter les résultats,

espérant la victoire.

Je me rappelle qu’à l’été 2012 à Saint-Denis-sur-Richelieu,

j’avais mon kiosque de promotion Portraits de patriotes 1837-

1838. Je vois venir un homme avec un grand chapeau de paille.

Il me jase de mon livre, des patriotes et d’autres thèmes; un

homme d’une grande gentillesse, tout simple, très intelligent. Je

suis impressionné : j’ai vendu et dédicacé mon livre à Paul Rose!

Magazine Oui, je le veux! 28 Volume 3 numéro 1


COIN LECTURE

ANTI-QUÉBEC :LA HAINE DU QUÉBEC ET DES

FRANCOPHONES DE LA CONFÉDÉRATION À

AUJOURD’HUI de Pierre-Luc Bégin

Pierre-Luc Bégin, né en 1979,

est essayiste et professeur de

littérature. Indépendantiste

engagé, émule de Pierre

Falardeau, cofondateur avec

Patrick R. Bourgeois (qui signe

la préface de l’ouvrage) du

journal Le Québécois, il dirige

les Éditions du Québécois depuis leur fondation en 2003.

Son plus récent essai (2021) propose une synthèse des discours

haineux et des événements marquants contre les francophones

et les Québécois depuis la fin du XIXe siècle. L’ouvrage montre

la persistance de ces discours et des actions anti-Québec au fil

des décennies jusqu’à nos jours. Dans la presse francophone,

certains ont qualifié ces manifestations de « Quebec bashing » et

de génocide culturel.

À la lecture de l’ouvrage, on comprendra qu’il s’agit d’une

discrimination systémique du Canada à l’égard du Québec et

des francophones. Le rejet de la loi 21 sur la laïcité et celui de

la loi 96 sur la langue française n’en sont que les plus récentes

manifestations. La présente synthèse réalisée par Pierre-Luc

Bégin montre que le racisme suprémaciste WASP (White,

Anglo-Saxon and Protestant) est un phénomène majeur qui

imprègne l’histoire du Canada et la mentalité canadienneanglaise

avec constance depuis la Conquête britannique

jusqu’à aujourd’hui. La haine des francophones est débordante,

omniprésente et sans cesse renouvelée. Une raison fondamentale

pour nous inciter à sortir de ce Canada où nous nous attardons

depuis trop longtemps.

par Gilbert Paquette

GUY ROCHER : LE SOCIOLOGUE DU QUÉBEC

– TOME 2 (1963-2021) de Pierre Duchesne

Guy Rocher, l’un des pères de la sociologie au Québec, est l’auteur de plusieurs ouvrages

de référence de niveau international dans son domaine. Il s’est de plus engagé à fond dans

plusieurs changements marquants de l’histoire du Québec.

Pierre Duchesne relate le rôle central du sociologue comme membre de la commission Parent

qui a transformé notre système d’enseignement élitiste et religieux en un lieu d’éducation

laïque et ouvert. Le rôle de Rocher y est raconté comme un véritable thriller où celui-ci

interagit avec les multiples acteurs de l’éducation : l’Église qui en avait le contrôle total en

1960, l’État québécois et ses artisans, les collèges privés ou anglophones jaloux de leurs

privilèges, les multiples commentateurs ou détracteurs, sans compter les désaccords parfois

profonds au sein de la commission.

Aux côtés de Camille Laurin, il aura été au cœur de la rédaction de la loi 101. Il aura œuvré

à la création de Télé-Québec, de la SODEC, et de bien d’autres organismes. Guy Rocher

aura été l’architecte de la création des cégeps. Duchesne intègre à sa description de la vie de Guy Rocher des recherches solidement

documentées et une plume remplie d’émotion.

Particulièrement intéressante est la description de la transformation d’un fédéraliste en un souverainiste engagé. Cette biographie

témoigne du temps des grandes réformes de la Révolution tranquille au Québec. Pour en saisir toute l’ampleur, si vous n’aviez qu’une

seule biographie à lire, c’est incontestablement celle-ci qu’il vous faudrait parcourir.

par Sylvie Legault

Magazine Oui, je le veux! 29 Volume 3 numéro 1


NOUVELLES DU MQI

DENIS MONIÈRE

Au printemps 2022, le Mouvement Québec indépendant a poursuivi ses

activités en tenant deux conférences et en publiant le numéro 8 du magazine

OUI Je le veux! Compte tenu de l’élection québécoise du 3 octobre 2022, le

MQI limite ses activités à la publication du présent numéro durant la période électorale.

LES ASSISES D’UN QUÉBEC SOUVERAIN SUR LES

PLANS ÉCONOMIQUE ET FINANCIER

Le 14 mars dernier, nous avons reçu Richard Carrier qui a présenté une analyse d’un Québec souverain

sur les plans économique et financier. Monsieur Carrier a été directeur des études économiques au sein

du Secrétariat des commissions parlementaires sur l’avenir politique et constitutionnel du Québec en RICHARD CARRIER

1991 et 1992. Par la suite, il a travaillé au Conseil du trésor et au ministère du Revenu du Québec en matière de politique budgétaire

gouvernementale et d’administration de la politique fiscale. Dans sa présentation, il a montré à l’aide d’exemples concrets quels étaient

les avantages pour un pays de créer une banque centrale et une monnaie nationale. Il a analysé les effets de l’indépendance sur les

banques à charte, sur les bourses d’échanges des valeurs mobilières, sur la régulation des télécommunications et sur le contrôle de

la politique de défense sur le plan économique. Il a enfin traité des enjeux de la taxation des profits des entreprises transnationales,

de l’encadrement du commerce en ligne et de celui des paradis fiscaux. L’allocution avait pour but de susciter des pistes de réflexion

permettant au mouvement d’approfondir ce que les pouvoirs régaliens récupérés d’Ottawa permettraient de faire dans le Québec

indépendant.

L’INVASION DE L’UKRAINE PAR LA RUSSIE

Le 24 mai, le MQI a reçu Michel Roche, professeur en science politique à l’Université du Québec

à Chicoutimi, spécialiste de la politique russe. Il a traité de l’invasion russe de l’Ukraine et de ses

implications géopolitiques, mettant en relief les facteurs historiques et les facteurs internes à la société

MICHEL ROCHE russe. Il a soutenu que cette invasion condamnable est la conséquence de l’effondrement du régime

soviétique qui a affaibli le pouvoir de la Russie, combiné à la volonté des États-Unis de dissocier l’Europe de la Russie et d’empêcher

cette dernière de redevenir une superpuissance. Il a aussi examiné les conditions internes qui ont permis à Poutine d’agir comme

un potentat. Il estime que la Russie n’a rien à gagner à mener une guerre d’invasion, car il lui faut occuper un territoire peuplé de

44 millions d’habitants dont la plus grande partie lui est hostile, impliquant des coûts humains et financiers énormes, alors que la

Russie est déjà fragilisée sur le plan économique. Il pense que l’invasion, destinée à assurer la sécurité de la Russie, va produire l’effet

contraire comme on l’a vu avec l’adhésion de la Suède et de la Finlande à l’OTAN. L’invasion entraîne des difficultés économiques,

ce qui augmente chaque jour le risque d’une déstabilisation du régime. L’humiliation de la Russie que Poutine voulait combattre par

la conquête de l’Ukraine se retournera contre lui et risque d’emporter son régime.

Magazine Oui, je le veux! 30 Volume 3 numéro 1


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OUI je le veux !

Volume 3 numéro 1 – 2022

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BILODEAU

« LE QUÉBEC

INDÉPENDANT SERA UN

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POUR LA PLANÈTE. »

IRLANDE:

L’indépendance

inachevée

Le piège de la

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LECTURE : PORTRAITS DE PATRIOTES 1837-38

Vive le Québec libre !

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