Mme Imane Rayess - l' officiel du mariage
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N°4099 <strong>du</strong> Samedi 28 et Dimanche 29 Janvier 2012<br />
AVANT LA SORTIE DE SON NOUVEAU LIVRE<br />
Dr. Boga Sako Gervais : “Gbagbo ne mérite pas la CPI”<br />
•L'ex-président de <strong>l'</strong>APDH dénonce les violations des droits de <strong>l'</strong>Homme sous Ouattara<br />
Dr. Boga Sako Gervais est bien<br />
connu comme <strong>l'</strong>un des principaux<br />
acteurs des organisations<br />
de défense des droits de<br />
<strong>l'</strong>Homme en Côte d'Ivoire.<br />
Après avoir fondé et présidé<br />
aux destinées de <strong>l'</strong>Association<br />
pour la protection des<br />
droits humains (APDH), il a<br />
créé en 2010 la FIDHOP (Fondation<br />
ivoirienne pour les<br />
droits de <strong>l'</strong>Homme et la vie<br />
politique). Suite à la crise<br />
postélectorale, il s'est réfugié<br />
dans un pays européen.<br />
Depuis son lieu d'exil, Dr. Boga<br />
Sako Gervais a publié un livre<br />
intitulé «La Guerre d'Abidjan<br />
n'aurait jamais dû avoir lieu».<br />
Avec comme sous-titrage : «Et<br />
si M. Sarkozy avait trompé le<br />
monde entier sur la crise ivoirienne<br />
de 2010 ?» Avant la sortie<br />
<strong>officiel</strong>le de ce livre, ce<br />
samedi 28 janvier 2012, il<br />
assène dans cet entretien,<br />
ses vérités sur le conflit postélectoral<br />
en Côte d'Ivoire.<br />
«La guerre d’Abidjan<br />
n’aurait jamais dû avoir<br />
lieu». C'est le titre <strong>du</strong> livre<br />
que vous avez écrit. Comment<br />
vous est venue<br />
l’idée d’écrire ?<br />
En ce début d’année 2012,<br />
permettez-moi d’abord de<br />
renouveler ma compassion la<br />
plus profonde à toutes les<br />
familles ivoiriennes, sans distinction<br />
aucune, qui ont été<br />
les principales victimes de la<br />
crise atroce que notre pays a<br />
connue, fin 2010 et début<br />
2011. En tant que leader<br />
d’opinion engagé, acteur ou<br />
activiste passionné des Droits<br />
de l’Homme au sein de la<br />
société civile, ce livre représente<br />
ma part de responsabilité<br />
vis-à-vis des milliers de<br />
morts et de blessés de la<br />
crise ivoirienne de 2010.<br />
Cependant, au-delà <strong>du</strong> pardon<br />
que nous devons demander<br />
au peuple, je continue de<br />
dénoncer et de condamner<br />
toutes les graves violations<br />
des Droits de l’Homme que<br />
nous avons vécues. «La<br />
guerre d’Abidjan n’aurait<br />
jamais dû avoir lieu» est mon<br />
second livre. Le premier a été<br />
publié chez l’Harmattan, en<br />
France, ce deuxième est<br />
publié en Italie, lors de mon<br />
séjour après ma sortie <strong>du</strong><br />
pays en juin 2011. Il me fallait<br />
écrire afin d’éclairer le monde<br />
entier, qui a été berné par le<br />
Président français Nicolas<br />
Sarkozy. D’où le sous-titre <strong>du</strong><br />
livre : «Et si M. Sarkozy avait<br />
trompé le monde entier sur la<br />
crise ivoirienne de 2010 ?»<br />
Ce sont les éléments de l’enquête<br />
réalisée par les<br />
membres de notre Fondation<br />
ivoirienne pour les Droits de<br />
l’Homme (FIDHOP) sur cette<br />
élection de 2010, des témoignages<br />
avec lesquels je suis<br />
sorti <strong>du</strong> pays, et que j’ai enrichis<br />
et embellis. Je veux que<br />
toute la vérité soit rétablie<br />
dans la crise ivoirienne, à travers<br />
ce livre. Je tiens à ce que<br />
les vrais auteurs des pires<br />
violations des Droits de<br />
l’Homme dans cette crise<br />
soient connus !<br />
Le titre de cette œuvre est<br />
révélateur, avec un ton<br />
pathétique. Regrettezvous<br />
de n’avoir pas pu<br />
faire assez pour que la<br />
Côte d’Ivoire soit épargnée<br />
de cette guerre ?<br />
Écoutez, je me reproche<br />
beaucoup. En tant qu’être<br />
humain, je ne suis qu’un<br />
pauvre pécheur ! Mais dans<br />
cette crise-là, je crois, devant<br />
Dieu et grâce à Lui, avoir fait<br />
ce qu’un modeste citoyen et<br />
membre de la société civile<br />
comme moi, qui n’est ni<br />
membre d’un parti politique,<br />
ni président de la République,<br />
ni ministre, ni député, ni<br />
maire… pouvait faire. J’ai vu<br />
le danger venir, j’ai prévenu,<br />
POLITIQUE<br />
Dans un nouveau livre qu'il dédicace aujourd'hui,<br />
Dr Boga Sako Gervais donne sa lecture de la crise<br />
postélectorale en Côte d'Ivoire. (Ph: DR)<br />
j’ai averti et j’ai alerté. Mais en<br />
vain ! Lorsque la Cedeao a<br />
évoqué la première fois l’idée<br />
d’une intervention militaire<br />
dans notre pays à travers<br />
l’Ecomog, alors je me suis<br />
révolté et avec des collègues<br />
de la société civile, j’ai porté<br />
une plainte devant la Cour de<br />
Justice de la Cedeao. Ensuite,<br />
je suis allé à Addis-Abeba<br />
avec Me Hervé Gouaméné<br />
faire <strong>du</strong> lobbying et <strong>du</strong> plaidoyer,<br />
afin d’éviter une intervention<br />
militaire… Hélas ! La<br />
résolution de la crise par les<br />
armes s’est imposée, car<br />
c’était le choix de MM. Ouattara<br />
et Soro Guillaume, <strong>du</strong><br />
RHDP et <strong>du</strong> Président Sarkozy.<br />
Il faut donc que les uns et<br />
les autres l’assument, au lieu<br />
de diaboliser M. Gbagbo qui<br />
suggérait plutôt le recomptage<br />
des bulletins de vote et qui<br />
a fini par se retrancher dans<br />
sa résidence à Cocody. Dans<br />
ce livre, je dévoile tout !<br />
Quelles sont les thèses<br />
que vous défendez exactement<br />
dans ce livre ?<br />
Partons <strong>du</strong> titre et <strong>du</strong> soustitre.<br />
Pour moi, «La guerre<br />
d’Abidjan n’aurait jamais dû<br />
avoir lieu !», est la principale<br />
thèse que je défends. J’estime<br />
qu’un conflit postélectoral<br />
ne devrait jamais se résoudre<br />
par des armes et se solder<br />
par plusieurs milliers de morts<br />
inutiles. C’est impensable et<br />
inadmissible ce qui s’est<br />
passé en Côte d’Ivoire. Pour<br />
renverser un seul homme, qui<br />
a été de surcroît déclaré vainqueur<br />
de l’élection par le<br />
Conseil constitutionnel, on a<br />
tué plus de trois milles personnes.<br />
C’est vraiment diabolique<br />
! Ailleurs, aux États-Unis<br />
ou en Haïti, on a procédé<br />
autrement; pourquoi pas chez<br />
nous aussi ? Je pleure avec<br />
toutes les victimes ; je pleure<br />
pour la Côte d’Ivoire, mon<br />
pays. Dans le sous-titre, j’accuse<br />
M. Nicolas Sarkozy et la<br />
communauté internationale :<br />
au lieu de «protéger les<br />
civils» et rechercher la paix<br />
par tous les moyens, ils ont<br />
préféré la guerre. Ce slogan<br />
de «protéger les civils» n’était<br />
qu’un prétexte pour intervenir<br />
militairement en Côte d’Ivoire<br />
et en Libye.<br />
Dix mois après l’arrestation<br />
de Laurent Gbagbo,<br />
quel bilan faites-vous des<br />
Droits de l’Homme en<br />
Côte d’Ivoire ?<br />
Vous le voyez et vous le vivez<br />
chaque jour, depuis l’avènement<br />
de M. Alassane Ouattara<br />
au pouvoir, les violations<br />
des Droits de l’Homme sont<br />
pires. Les Droits civils et politiques,<br />
notamment le droit à<br />
la vie est le plus violé, parce<br />
que des personnes continuent<br />
d'être tuées. Chaque<br />
jour, il y a des morts. Depuis<br />
la fin mai 2011 où le Président<br />
Ouattara avait parlé de trois<br />
mille morts, on peut être<br />
aujourd’hui à près de quatre à<br />
cinq mille morts. Y compris<br />
tous ces accidents de la route<br />
et ces attaques répétées,<br />
conséquences de la déstabilisation<br />
psychologique et<br />
morale des populations. Cette<br />
crise a des conséquences<br />
insoupçonnées. Les droits<br />
économiques, sociaux et culturels<br />
ne sont pas épargnés,<br />
car la crise est devenue le<br />
quotidien des Ivoiriens. Les<br />
emplois tardent à se créer, le<br />
PPTE est toujours un mirage.<br />
Un mot sur la récente<br />
manifestation <strong>du</strong> FPI à<br />
Yopougon ?<br />
C’est la preuve concrète de<br />
l’illusion de démocratie et de<br />
la négation de l’État de droit<br />
que ce régime offre aux Ivoiriens,<br />
à la communauté internationale<br />
et à tous ceux qui<br />
ont rêvé. Et j’ai pitié pour tous<br />
ceux qui ont tenté ou qui ten-<br />
teraient de justifier ou d’expliquer<br />
cette barbarie. Le régime<br />
actuel doit accepter les<br />
critiques et le droit à la différence.<br />
Les avoirs des partisans<br />
de Laurent Gbagbo continuent<br />
d’être l’objet de gel,<br />
occasionnant, selon toute<br />
vraisemblance, la mort de<br />
certains. Que font les<br />
défenseurs des droits<br />
humains ?<br />
C’est criminel de geler les<br />
comptes d’honnêtes citoyens!<br />
Être criminel, ce n’est pas<br />
seulement prendre une arme<br />
pour tuer. On peut l’être en<br />
mettant par exemple un<br />
embargo sur les médicaments,<br />
ou en fermant brusquement<br />
des banques sans<br />
en informer au préalable les<br />
clients, ou encore en gelant,<br />
de façon injustifiée voire dictatoriale,<br />
les comptes de personnalités<br />
sur qui il ne pèse<br />
qu’une présomption de corruption<br />
ou de crimes économiques.<br />
Je suis obligé de<br />
condamner ce gel des<br />
comptes, qui me semble<br />
injustifié et inapproprié, parce<br />
que la plupart des investissements<br />
et des avoirs de toutes<br />
ces personnes peuvent se<br />
découvrir et se saisir si elles<br />
étaient déclarées coupables.<br />
L’arrestation et l’emprisonnement<br />
de M. Laurent Gbagbo,<br />
de son épouse, de son fils, de<br />
son gouvernement et de la<br />
plupart de ses partisans sont<br />
tout aussi injustifiés et graves.<br />
Ce sont des abus qui donnent<br />
au nouveau régime un caractère<br />
de dictature, puisqu’il<br />
s’agit en réalité de conflits<br />
politiques qu’ils veulent coûte<br />
que coûte résoudre par la justice,<br />
alors qu’ils ont mis en<br />
place une commission de<br />
réconciliation nationale. Et je<br />
reste persuadé que le Président<br />
Laurent Gbagbo ne<br />
mérite pas d'être transféré et<br />
écroué à la Cour pénale internationale<br />
(CPI). Toutefois,<br />
j'espère que le procès qui<br />
s'ouvrira à la CPI permettra<br />
au monde entier de découvrir<br />
la grosse machination contre<br />
la Côte d'Ivoire. Quant aux<br />
ONG des Droits de l’Homme,<br />
elles sont responsables de<br />
leurs actes et de leurs<br />
silences. Moi, je prends mes<br />
responsabilités et je les assume.<br />
Réalisé par H. ZIAO<br />
P a g e 5 h t t p : / / w w w . l i n t e r - c i . c o m