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P10 11 SPOT - QUE FAIRE LE WEEK END ? Avril 2010<br />
À la découverte<br />
du cimetière de Loyasse<br />
Sur les hauteurs de Lyon se trouve le cimetière de Loyasse, premier cimetière moderne de la ville.<br />
Créé quatre ans après le Père-Lachaise parisien, il n’en possède pas l’aura romantique. Néanmoins,<br />
le long des allées, se cachent quelques émouvantes statues et de délirants monuments.<br />
Marie Signoret<br />
A la fin du XVIII e siècle, les cimetières paroissiaux<br />
souffrent de surpopulation. En 1807, la municipalité<br />
achète pour remédier à ce problème un terrain planté<br />
de vignes sur le flanc ouest de la colline de Fourvière.<br />
L’année suivante s’ouvrent les portes du cimetière de<br />
Loyasse. Les qualités du lieu répondent aux exigences<br />
hygiénistes de l’époque (le site est éloigné de la ville et<br />
venté afin de disperser les émanations putrides…)<br />
mais le sol est instable et l’accès peu aisé. Ce à quoi on<br />
remédiera avec la création du funiculaire Saint-Paul-<br />
Loyasse, de nos jours obsolète.<br />
FANTAISIES D'OUTRE-TOMBE<br />
Le XIX e siècle était friand du style néo, qu’il soit néogothique,<br />
néo-romain ou encore néo-égyptien…, les<br />
sculpteurs réinterprétant toute une symbolique funéraire<br />
de manière monumentale. La chauve-souris escorte<br />
l’âme du défunt dans l’au-delà, la chouette évoque la<br />
sagesse, le coq est le pasteur des âmes, le phénix<br />
personnifie la résurrection, le sablier la fugacité du<br />
temps… S’il est un exemple notable du style néoégyptien,<br />
il est à chercher du côté de la concession<br />
Lupin-Roux, allée n°7 : s’y élève un temple érigé en<br />
1820, orné de phénix, de chouettes, de cornes d’abondance<br />
et dont les quatre angles se terminent par des<br />
figures humaines représentant les esprits des morts. De<br />
son côté, la tombe érigée pour le philanthrope Pleney<br />
en 1827 (allée 80) arbore un tout autre style : celui<br />
d’un obélisque monumental, le plus haut du cimetière<br />
avec des mensurations de 5 mètres de largeur et de 9<br />
mètres de hauteur, surplombé d’une vierge pleureuse.<br />
Au-delà de sa fonction de demeure pour le corps, le<br />
monument funéraire est pensé pour rendre hommage<br />
au défunt. Une fonction qu’illustre la sculpture qui surplombe<br />
la concession Duvergier, allée 87 : représentant le<br />
travail et l’industrie par le biais d’un homme appuyé sur<br />
une masse de métallurgiste et une femme portant un<br />
bateau à vapeur, elle laisse peu de doutes quant à la<br />
profession exercée par son propriétaire. Dans une allée<br />
perpendiculaire, la 89, on s’arrêtera pour admirer la<br />
statue de style 1900 ornant la concession Guilleminet,<br />
à savoir une belle jeune fille en métal patiné, épaules<br />
nues, cheveux flottants et tenant à la main un bouquet<br />
de fleurs.<br />
R.I.P.<br />
Si les locataires de Loyasse ne rivalisent pas en<br />
«glamouritude» avec ceux du Père Lachaise (comment<br />
rivaliser avec Jim Morisson et Oscar Wilde ?), on croise<br />
au détour d’une allée quelques célébrités locales. À<br />
l’entrée du cimetière par exemple, allée 4, le médecin<br />
Antoine Gailleton (dont la tombe a été conçue par Tony<br />
Garnier) sur la gauche et le député-maire Edouard<br />
Herriot (sous un caveau aux charmes staliniens) sur la<br />
droite, allée 3. En parcourant l’allée centrale, on tombe<br />
nez à nez avec la tombe de Philippe Nizier-Antelme<br />
alias le Maître Philippe, mystique et pharmacien de<br />
renom. Sa tombe est sans conteste l’une des plus visitées<br />
du cimetière. A la fin du XIX e siècle, Maître Philippe<br />
officiait comme guérisseur par imposition des mains à<br />
Lyon dans un hôtel particulier de la rue de la Tête d’Or,<br />
et on parlait de ses dons de thaumaturge<br />
jusqu’à la cour de Russie. Quelques mauvaises prédictions<br />
le marginalisèrent toutefois à la fin de sa vie.<br />
Néanmoins, et ce plus d’un siècle après sa mort, les<br />
fidèles sont encore légion et fleurissent la tombe du<br />
Maître, espérant encore quelque miracle d’outretombe.<br />
Non loin de là, allée 10, repose Jean-Baptiste<br />
Willermoz. Ce que son épitaphe ne dit pas, c’est qu’il<br />
est le père de la franc-maçonnerie lyonnaise. En<br />
s’avançant un peu plus dans le cimetière, en face du<br />
monument de la famille Guimet (Jean-Baptiste a inventé<br />
le bleu outremer artificiel tandis qu’Émile a créé les<br />
musées éponymes de Lyon et Paris), allée 9, se trouve<br />
la tombe de Paul de Vivie dit Vélocio. Ce Stéphanois<br />
d’adoption a inventé le dérailleur, créé la première<br />
course cycliste de la région en 1882 et est à l’origine de<br />
la Fédération française de cyclotourisme. D’où la dévotion<br />
(éternelle) que lui portent les cyclotouristes stéphanois<br />
et lyonnais qui suivent encore les commandements de<br />
Vélocio, particulièrement le septième, essentiel : «Ne<br />
jamais pédaler par amour-propre». Quant aux trentetrois<br />
jouteurs à l’angle des allées 88 et 9, ils reposent<br />
ensemble sous une croix ornée de deux rames et d’une<br />
tête de mort, l’une des installation les plus vieilles du<br />
lieu. À une époque où la joute était un jeu très populaire,<br />
ils avaient fait le serment de ne jamais se séparer.<br />
Le dernier membre de l’équipe y fut enterré en 1870.<br />
>CIMETIÈRE DE LOYASSE<br />
43 rue du Cardinal-Gerlier, Lyon 5e / 04 37 70 70 00<br />
Ouvert tous les jours de 8h à 17h et de 8h à 17h 30<br />
de mai à octobre<br />
© Marie Signoret © Marie Signoret