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yvan salomone - Galerie Xippas

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galerie xippas<br />

108, RUE VIEILLE-DU-TEMPLE<br />

75003 PARIS<br />

<strong>yvan</strong> <strong>salomone</strong><br />

REVUE DE PRESSE<br />

TÉL + 33 1 40 27 05 55<br />

PARIS@XIPPAS.COM


Yvan Salomone,<br />

la traverSée<br />

deS aquarelleS<br />

Cet artiste voyageur, à la dérive des continents,<br />

explore les vagues à l’âme et les routes inexplorées<br />

de notre conscience. Ses couleurs aquatiques dessinent<br />

avec simplicité un monde profond qui nous observe<br />

et nous analyse. Il en fait un objet abstrait et réel,<br />

qu’il peint et écrit dans une tension permanente.<br />

Embarquement hors cadre.<br />

PIGMENTS<br />

PIGMENTS<br />

Yvan Salomone,<br />

the watercolour<br />

croSSing<br />

this nomadic artist, a continental drifter, explores<br />

the undulations of the soul and the unexplored roads<br />

of our conscience. his aquatic colours portray with<br />

simplicity a deep world that observes and analyses us.<br />

the subject becomes abstract and real, painted and<br />

written about in a state of permanent tension.<br />

all boarding now for a visual journey.<br />

113


sAint-MAlo. lA cité des corsAires.<br />

Début mars. Il m’avait dit qu’il revenait<br />

d’Afrique et, pour mon voyage, m’avait<br />

donné à lire cinq cents textes aux titres<br />

sonnant comme de petits exercices<br />

joyciens : [nAkeddAMper], [fishinferno],<br />

[MirlitorAle], de ceux qu’il écrit sur<br />

chaque œuvre deux ans après, comme<br />

des retours sur paysage, occasion de leur<br />

découvrir parfois une seconde nature.<br />

Et j’avais aussi à feuilleter ces éditions<br />

en noir et blanc, où il mêle photos et<br />

documents, et qui doivent nous dire<br />

encore autre chose de ce qui le travaille.<br />

AquArelle, écriture, édition, les trois<br />

éléMents insépArAbles de son activité,<br />

comme les trois cercles d’un nœud<br />

borroméen.<br />

Extrait de [pentefaible] qui lance la<br />

machine : « Du désert, je prends la route<br />

avec l’intention de trouver des objets<br />

dans tous les sens… La première fable<br />

le long d’un quai se présente sous<br />

l’apparence d’un cargo : le nom qu’il porte<br />

est Diane ! Je me détourne et abandonne<br />

d’anciens monuments pour rentrer chez<br />

moi avec ce preMier pAs dAns le pAysAge.<br />

Il s’effectue dans le tumulte où j’entretiens<br />

une douce querelle entre des pensées<br />

et des étendues, où mes mouvements<br />

sont des motifs. » Voilà les débuts d’une<br />

aventure qu’il poursuit depuis 1991.<br />

Action.<br />

Au début étAit le désespoir<br />

« L’élément déclencheur a été mon désespoir.<br />

Dans les années 88-89 je me suis retrouvé<br />

dans l’atelier, plus rien à dire, sécheresse<br />

absolue, physique et psychologique. Tout<br />

autour de la pièce, j’avais tracé une ligne à<br />

hauteur des yeux, une sorte de ligne d’horizon,<br />

où je punaisais et défaisais en permanence<br />

des restes d’expressions. L’extrême fin<br />

de toute une série de tentatives abîmées par<br />

de trop grandes admirations. Alors je suis<br />

sorti. J’habite à Saint-Malo, pas loin d’un<br />

port, je trouve du plaisir à me promener sur<br />

les quais, autant pour la mobilité de ce que<br />

j’y trouve que comme dernier espace, quand<br />

le désespoir vient buter sur une limite physique,<br />

géographique. Et curieusement, ces<br />

ports qui auraient dû m’amener à une sorte<br />

d’admiration maritime, à toute une mythologie,<br />

m’apparaissaient comme un immense<br />

atelier où tout était plaisant, changeant, une<br />

leçon d’architecture permanente avec des<br />

ruptures d’échelle. D’un seul coup, un navire<br />

de la taille d’un immeuble modifie l’espace.<br />

Il n’y a pas d’autre endroit sur la planète où<br />

un immeuble arrive et s’en va dans l’heure.<br />

Et qui, de plus, porte un nom de grande<br />

poésie, nom d’une femme, d’un personnage<br />

mythologique. D’un seul coup Diane est là,<br />

et demain ce sera Persée et après-demain<br />

Irène. Bernard Lamarche-Vadel, qui écoutait<br />

mes histoires à l’époque, m’a aidé à accélérer<br />

le processus devant m’amener à traduire ces<br />

situations éprouvées chaque jour. Et parmi<br />

les possibilités qui s’offraient à moi, j’ai<br />

pensé que la technique de l’aquarelle pouvait<br />

convenir. »<br />

peindre pour réfléchir<br />

« Pour moi, passé par une lignée Chirico,<br />

Pollock, Guston, Beuys, arriver avec un paysage<br />

aquarellé, c’était un peu inquiétant au<br />

vu de ce que j’avais admiré avant. Surtout en<br />

sachant l’image que je produis dans l’esprit<br />

des gens, quand on sait le genre de peinture<br />

pratiquée dans ces cités balnéaires. C’est<br />

devenu passionnant parce que je suis passé<br />

d’un mode ironique à un véhicule. Je ne suis<br />

pas vraiment un peintre au pur sens de la<br />

peinture, quelqu’un qui baigne dedans, non.<br />

J’utilise la peinture pour réfléchir. Il y a une<br />

grande ambiguïté quand on ne voit dans mon<br />

travail qu’un réalisme de plus. Pour reprendre<br />

Freud sur le rêve, j’aime à dire que la<br />

figuration n’est pas faite pour être comprise.<br />

Aujourd’hui, après vingt ans de conduite<br />

de ce véhicule, la conduite est plus aisée, je<br />

prends les virages un peu plus vite, et quand<br />

survient un dérapage, j’ai mes « rustines »,<br />

ces éléments noirs à la fois masques, lest<br />

de rééquilibrage d’une composition, ardoise<br />

magique de mon inconscient, ou qui sait<br />

symptômes d’une éruption à venir. »


les zones<br />

« J’ai toujours bougé. Mais initialement j’étais<br />

très attiré par les zones portuaires. Surtout<br />

pas la friche, surtout pas l’abandon, pas ce<br />

romantisme-là, mais des lieux qui fonctionnent<br />

avec une face qui ressemble à l’abandon.<br />

C’est ça qui m’intéresse. Comment, à un<br />

moment donné, il y a des interstices de fonctionnement,<br />

des zones qui pour un certain<br />

temps vont s’arrêter de fonctionner, avant de<br />

redémarrer. Par référence au personnage du<br />

Stalker d’Andreï Tarkovsky, je me considère<br />

comme un chasseur d’approche, je rentre<br />

sur une zone, donc potentiellement, le film<br />

ayant été tourné sur quelque chose comme<br />

trois hectares, j’aurais pu développer toute<br />

mon activité à Saint-Malo, d’autant qu’il y<br />

a vingt ans je pouvais y rentrer, alors que<br />

maintenant, pour de multiples raisons, zone<br />

franche, clandestinité, danger des outils,<br />

c’est grillagé. Mais je n’ai pas résisté à aller<br />

voir comment ces zones-là étaient ailleurs,<br />

pour finalement vérifier qu’elles étaient les<br />

mêmes. D’où une indifférence géographique<br />

totale. Que je sois en Afrique, aux États-Unis<br />

ou en Chine n’a aucune importance. Et c’est<br />

là encore où le réalisme de mes paysages<br />

s’effondre. Peu à peu, pratiquer ces zones<br />

m’a ouvert les yeux sur d’autres interstices<br />

existant dans ce monde. Alors, que je sois en<br />

Auvergne ou en train d’attendre quelqu’un<br />

à la gare, je peux apercevoir quelque chose<br />

que je n’aurais pas vu avant, sans cette<br />

initiation. »<br />

l’AquArelle sur le divAn<br />

« Faire une aquarelle hebdomadaire crée<br />

beaucoup de tension, dans la mesure où je<br />

cherche à obtenir, non pas la description de<br />

ce que j’ai vu, mais une histoire planquée<br />

dans le paysage qui m’a regardé. Quelle est<br />

cette rencontre qu’on a eue ensemble ? C’est<br />

cette énigme que je cherche en permanence<br />

et que je ne trouve pas. Une phrase est<br />

essentielle pour moi, celle de Freud décrivant<br />

la cure analytique : « Élever l’impuissance<br />

jusqu’à l’impossible ». À un moment, il faut<br />

aller chercher quelque chose tout en sachant<br />

qu’on ne le trouvera pas. Et là, on est quasiment<br />

à la naissance du désir. Et vingt ans<br />

après, j’ai encore du désir. À une époque,<br />

la tension était telle, avec cette impression<br />

de recevoir mes paysages, recevoir l’histoire<br />

qu’ils avaient à me dire, que j’avais souhaité,<br />

comme un psychanalyste, rentrer en contrôle<br />

pour me réparer un peu de cette tension. Le<br />

travail avec les jus est lent, quand le malade<br />

est trop mouillé il faut attendre qu’il sèche<br />

et, devant m’interrompre, j’ai le temps de<br />

la réflexion. Qu’est-ce que ce paysage me<br />

veut ? Et je n’abandonne jamais un paysage<br />

sans qu’il m’ait dit quelque chose. Donc, si je<br />

peux l’exprimer comme ça, j’ai des paysages<br />

en analyse. »<br />

fin de lA trAversée<br />

Les remparts accueillent ma promenade<br />

devant une mer retirée. Ces œuvres ne<br />

sont-elles pas l’exemple même de celles qui<br />

cachent leur identité réelle sous le masque de<br />

l’habitude ? N’est-ce pas l’artiste d’ailleurs<br />

qui dit aimer l’idée d’avancer masqué ? Je<br />

repense à cette phrase lancée au moment<br />

de l’au revoir, « mon œuvre est comme un<br />

coffre-fort qu’il ne faudrait pas ouvrir ».<br />

Lui serait-il comme un regret si cela nous<br />

menait trop loin dans la connaissance de son<br />

être intime ? Ou bien est-ce que, comme la<br />

lampe d’Aladin, sa maîtrise est difficile ? Les<br />

questions s’enchaînent. Curieusement, et<br />

comme en antithèse, les œuvres imposent<br />

leur composition, leur solidité, une sorte<br />

d’immanence. Dans un entretien récent<br />

avec l’artiste pour Peinture parlée au Centre<br />

Pompidou, Didier Semin évoque l’embarras<br />

de certains conservateurs à ranger ce travail<br />

dans la catégorie « art contemporain », car s’il<br />

lui emprunte ses protocoles, rythme de production,<br />

format toujours identique, titre de<br />

onze lettres précisément, il s’en écarte par la<br />

pratique ancienne choisie. Fortifiées par des<br />

textes qui leurs sont liés, les aquarelles nous<br />

reviennent autrement. Y gagnent une profondeur<br />

et comme un au-delà. Aujourd’hui,<br />

l’art figuratif ne peut plus faire l’économie<br />

du concept.<br />

JIM PALETTE<br />

Yvan Salomone est représenté en France par la<br />

galerie <strong>Xippas</strong>, en Belgique par la galerie Baronian-<br />

Francey et en Suisse par la <strong>Galerie</strong> Zannettacci.<br />

Son ouvrage, Le Point d’Ithaque, Cahiers 1991-2006<br />

(Les Presses du réel, collection Mamco, Genève),<br />

paraîtra en juin 2010.<br />

141


[u n d i v i s i b l e]<br />

[a e d i f i c a n d i]<br />

[sansypenser]<br />

[ a p o l l i n a i r e ]<br />

[commeprevue]<br />

[l a n c e p i e r r e]<br />

Aquarelles de 1991 à 2008. 95 × 138 cm<br />

Titres des œuvres<br />

[n i k e h e r c u l e]<br />

[u n i n v i s i b l e]<br />

[b a t t l e d r e s s]<br />

[ p e t i t e j u l i a ]<br />

[chateaudeau]<br />

[f a u x e n t r a i t]<br />

[m o l e c u l a i r e]<br />

[r i c k d e c k a r t]<br />

[bonaventur e]<br />

[ j o u r d e p l u i e]<br />

[homomorphou]<br />

[m e l a n k h o l i e]<br />

[ p a v i l l o n o i r ]<br />

[c omposi tion]<br />

[t e c h n i c o l o r ]<br />

[mar ionne t te]<br />

[c a p i t u l a i r e]<br />

[secondscene]


[ p u m i l i o a l b a]<br />

[f u n a m b u l i s t]<br />

[p a thofgr e en]<br />

[d e s a l l i a n c e]<br />

[d i s p a r a i t r e]<br />

[a p p a r a t c h i k]<br />

Watercolors from 1991 to 2008, 95 × 138 cm<br />

Titles of works<br />

[i m m o b i l i e r e]<br />

[u l t i m a r a t i o]<br />

[i n f l a t a b l e s ]<br />

[o l i e b e r g e r e]<br />

[ c e l i b a t a i r e ]<br />

[e r e e l e e r e e l]<br />

[ p r e s c r i p t i o]<br />

[ a i n s i l a n u i t ]<br />

[s ansepolcr o]<br />

[a u j o u r d n u i t]<br />

[ensemblason]<br />

[d i s j o n c t e u r]<br />

[recommencer]<br />

[a b s t r a c t i o n]<br />

[h e l i m a t l o s t]<br />

[e v a p o r a t i o n]<br />

[ t r a i t d u n i o n]<br />

[m a r i b a r b o l a]<br />

143


[legislateur]


145


sAint-MAlo. the corsAir city.<br />

Early March. He told me that he was<br />

coming back from Africa and, for the<br />

journey, gave me five hundred texts<br />

to read, with titles redolent of brief<br />

joyceAn exercises: [nAkeddAMper],<br />

[fishinferno], [MirlitorAle], the ones<br />

he writes about each work, two years on,<br />

like some kind of journey back to<br />

the scene, an opportunity to find a second<br />

nature within ; and to leaf through these<br />

black and white editions where he mixes<br />

photos and documents, and which must<br />

tell us still more about what torments him.<br />

wAtercolours, texts, editions, the three<br />

insepArAble eleMents of his work, like<br />

the three rings of a Borromean knot.<br />

An extract from [pentefaible (slight slope)]<br />

to start off: “From the desert, I set out<br />

with the intention of finding objects in all<br />

directions... The first tale from along the<br />

quayside appears in the form of a freighter<br />

bearing the name Diane! I turn away and<br />

abandon ancient monuments to return home<br />

with this first forAy into the lAndscApe.<br />

This happens in a turmoil, in which<br />

I maintain a small quarrel between thoughts<br />

and spaces, and in which my movements<br />

are patterns.” These are the first steps of an<br />

adventure he has been pursuing since 1991.<br />

Action.<br />

in the beginning wAs despAir<br />

“The catalyst was my despair. In the years<br />

1988–1989, I found myself at the studio<br />

with nothing to say, a complete drought in<br />

physical and psychological terms. Running<br />

right around the room, I had marked out a<br />

line at eye level ; a kind of horizon where I<br />

continuously pinned up and unpinned the<br />

remnants of my expression. The very end<br />

of a sequence of tentative pieces damaged<br />

by over-admiration. So I went out. I live in<br />

Saint-Malo, near a harbour. I love to wander<br />

along the quays, not just for the mobile quality<br />

of what I find there but also as a final<br />

space, where despair butts against physical<br />

and geographical limits. And curiously, these<br />

harbours which should have nudged me<br />

towards some kind of maritime admiration,<br />

towards a whole mythology, appeared as<br />

a giant studio where everything was pleasant,<br />

changeable, an unceasing lesson in<br />

architecture with fractures in scale. All of a<br />

sudden, a ship the size of a building alters<br />

the space. There is nowhere else on earth<br />

where a building can arrive and leave in the<br />

space of an hour. Added to which it bears<br />

a name from great poetry, a woman’s name,<br />

that of a mythological character. In one<br />

fell swoop Diane is there, and tomorrow it<br />

will be Persée; the next day, Irene. Bernard<br />

Lamarche-Vadel, who listened to my stories<br />

at the time, helped me to speed up the<br />

process, which would bring me to translate<br />

these situations experienced daily. And from<br />

among the possibilities available to me, I felt<br />

that the watercolour technique might suit.”<br />

pAinting in order to think<br />

“For me, having followed in the traditions<br />

of artists such as Chirico, Pollock, Guston,<br />

Beuys, to finish with a watercolour landscape<br />

is a little worrying, when you consider what<br />

I used to admire. Particularly knowing the<br />

image I evoke in people’s minds and when<br />

you know the style of painting produced<br />

in seaside towns. It has become absorbing<br />

because I have gone from an ironic mode to<br />

a vehicle. I am not really a painter in the true<br />

sense of the word, someone who is totally<br />

immersed in it, not really. I use painting as a<br />

way of thinking. There is huge ambiguity if<br />

you can only see in my work another form<br />

of realism. To go back to Freud and dreams,<br />

I like to say that representation is not meant<br />

to be understood. These days, after twenty<br />

years of using this vehicle, driving is easier,<br />

I take my corners a little faster and when I<br />

skid, I have my ‘patches’, those black elements<br />

which are all at once masks, ballast<br />

for restoring the balance of a composition,<br />

the magical blackboard of my unconscious<br />

or, who knows, the signs of an eruption to<br />

come.”


the AreAs<br />

“I have always been on the move. However,<br />

initially I was greatly attracted to harbour<br />

areas. Definitely not wasteland, not abandonment,<br />

or that sort of romanticism, but<br />

places which function with a face that looks<br />

like neglect. That is what interests me. How,<br />

at any given moment, there are interstices in<br />

the workings, areas which for a certain time<br />

will to cease to function, before starting up<br />

again. In reference to the character in Stalker<br />

by Andreï Tarkovsky, I think of myself as a<br />

hunter of approaches. I enter an area, therefore<br />

potentially, the film having been shot<br />

on something like three hectares, I could<br />

have developed all my work in Saint-Malo,<br />

in the same way as twenty years ago I could<br />

gain access to areas, whereas nowadays, for<br />

various reasons, free zoning, illegal immigration,<br />

dangers of equipment, these are fenced<br />

off. But I couldn’t resist going to see what<br />

those areas were like in other places, to be<br />

able to verify whether they were the same<br />

in the end. Which brings us to complete geographical<br />

indifference. The fact that I was<br />

in Africa, the United States or China made<br />

no difference. And this again is where the<br />

realism of my landscapes crumbles. Little<br />

by little, working on these areas opened my<br />

eyes to the other interstices that exist in the<br />

world. Therefore, whether I am in Auvergne<br />

or waiting for someone at the station, I can<br />

catch a glimpse of something that I might not<br />

have seen before without this initiation.”<br />

wAtercolour on the couch<br />

“Doing a weekly watercolour creates a huge<br />

amount of tension, in so far as I try to obtain,<br />

not so much a description of what I have<br />

seen, but the story behind the landscape that<br />

looked out at me. What is that encounter we<br />

shared? It is the enigma I hunt endlessly and<br />

which I cannot find. There is a sentence that<br />

is essential for me; one from Freud describing<br />

analytical therapy, “Raise powerlessness<br />

to impossible heights.“ At some point,<br />

you must seek something knowing full well<br />

you will not find it. And here, more or less<br />

we find the birth of desire. Twenty years on<br />

and I still have this desire. At one period, the<br />

tension was so great, with that impression<br />

of receiving my landscapes, receiving the<br />

story they had to tell me, that I wished, like<br />

a psychoanalyst, to regain control in order<br />

to restore myself after this tension. Working<br />

with colourwashes is slow. When the patient<br />

is too wet, you must wait till he dries out,<br />

so I am obliged to take a break and I have<br />

the time to think. What does this landscape<br />

want from me? I never give up on a landscape<br />

until it has said something to me. So,<br />

if I express it this way, the landscapes are<br />

undergoing analysis.”<br />

the end of the crossing<br />

The ramparts welcome my walk before a<br />

retreating sea. Are not these works the very<br />

examples of those who hide their true identity<br />

beneath the mask of habit? Is it not<br />

the artist, moreover, who claims to like the<br />

idea of advancing under a mask? I think<br />

back to this sentence thrown down at the<br />

time of a goodbye, “My work is like a safe<br />

which must not be opened.” Would it be like a<br />

regret which brought us too far into intimate<br />

self-knowledge? Or rather is it because, like<br />

Aladdin’s lamp, his craft is difficult? The<br />

questions are all connected. Oddly, and as<br />

if in antithesis, the works impose their own<br />

composition, their solidity; a kind of immanence.<br />

In a recent interview with the artist<br />

for Peinture parlée at the Pompidou Centre,<br />

Didier Semin mentions the difficulty for<br />

certain curators to categorize this work as<br />

“contemporary art”, for although it employs<br />

the protocol; the pace of production, the ever<br />

identical format and titles of precisely eleven<br />

letters, it diverges in the chosen use of<br />

traditional form. Strengthened by the texts<br />

linked to them, these watercolours strike us<br />

differently. Depth and an other-worldliness<br />

predominate. Nowadays, representational<br />

art can no longer dispense with the concept.<br />

JIM PALETTE<br />

Yvan Salomone is represented in France by the<br />

<strong>Xippas</strong> Gallery, in Belgium by the Baronian-Francey<br />

Gallery and in Switzerland by the Zannettacci Gallery.<br />

His work Le Point D’Ithaque, Cahiers 1991-2006<br />

(Les Presses du Réel, collection Mamco, Geneva),<br />

is due to appear in June 2010.<br />

147


[parcataules]


144 RUE DE RIVOLI<br />

75001 PARIS - 01 42 44 16 16<br />

XIPPAS<br />

4383936100508/GST/ARR<br />

Marine and<br />

Peintre des zones portuaires<br />

et des chantiers navals,<br />

YVAN SALOMONE expose ses<br />

aquarelles d'un monde lessivé.<br />

st ce parce qu il a renonce à les enca<br />

drer et les mettie sous verre 7 Est-ce<br />

parce qu'au lieu de les accrocher bord<br />

a bord, comme il le fait souvent, il les a<br />

mm ici légèrement écartées et isolees les<br />

unes des autres 9 Reste que les aquarelles<br />

d'Yvan Salomone sont ici comme a nu, epm-<br />

glees a meme le mur, et ainsi<br />

exposées elles n ont jamais paru<br />

aussi intenses ni aussi évidentes<br />

Intense paradoxe en ef<br />

fet que ces paysages industriels,<br />

ces vues de zones portuaires<br />

traduites par le moven désuet et suranné de<br />

l'aquarelle Et I emploi de ces couleurs vives<br />

(le vert d'une cuve, la "granderouge" d'un<br />

container) pour dire un monde en demi teinte<br />

et son economie décroissante<br />

Et pourtant ces peintures a l'eau collent parfaitement<br />

au su]et, a ce monde délave, défraîchi,<br />

lessive Accrochées en ligne sur tout<br />

le mur de la galerie <strong>Xippas</strong>, les 'mannes<br />

contemporaines" de Salomone forment un<br />

long panorama, un double travelling latéral<br />

sur une zone industrielle et portuaire deso<br />

lee vide de tout habitant, en proie a une<br />

desaffection chionique G est un paysage ho<br />

mogene qui se déroule ici, une bande continue<br />

entre terre et mer, quand bien même l'ar<br />

liste effectue ses reperages photogi aphiques<br />

dans les ports de Samt-Malo, Rotterdam,<br />

Shanghai ou ailleurs<br />

Tout aussi bien, on pourrait etre au Havre, a<br />

Gênes, Toulon, Saint-Pétersbourg ou Seattle,<br />

e est dire si ces peintures a l'eau ont la qualité<br />

d'images generiques - et par association<br />

d'idées me revient a l'esprit la lecture de Sm<br />

Errant dans ces<br />

ports désolés,<br />

l'œil traverse des<br />

souvenirs visuels.<br />

ade d'Edouard Levé, autre adepte des images<br />

géneriques, et dont le dernier roman est a lire<br />

comme un texte ambient ou suicide et paysage<br />

constituent un même état d'âme depressionnaire<br />

"Peu d'indices permettaient de dire ou les<br />

vues avaient ete prises Les paysages montraient<br />

des lieux anonymes, des zones industrielles ou mm<br />

meraales dans des banlieues de villes modernes,<br />

souvent a la limite entre fe? territoires urbains et<br />

ruraux On ne voyait aucun personnage Tune<br />

parvenais pas a désirer ces non lieux que l'on te<br />

donnait o von La vie semblait s'en etre échappée<br />

Qui pouvait vouloir vivre dans ces lieux ingrats,<br />

immenses et désertés '"<br />

Et c'est d'ailleurs un "journal",<br />

autre titre d'Edouard Levé, intime<br />

maîs distancie, que ce mur<br />

d'aquai elles réalisées a raison<br />

d'une par semaine depuis main<br />

tenant plus de vingt ans, dont les séchages<br />

peuvent former a la surface du papier de<br />

grosses gouttes d'écume - comme une "rivière<br />

de larmes', commente l'artiste qui donne par<br />

fois un sous-titre poétique et psychologisant<br />

a ces réalités sociales "douxvnages", 'jourdepluie",<br />

"enfermement", "melankhohe '<br />

Errant dans ces ports désoles, l'œil traverse<br />

encore des souvenirs visuels on pense aux<br />

photographies de sites industriels des Bêcher,<br />

on songe a la poétique des ruines chère a Di<br />

derot, et Yvan Salomone apparaît alors<br />

comme un Hubert Robert des chantiers na<br />

vais On songe encore a l'artiste americain Robert<br />

Smithson, avec la sensation de longer non<br />

plus un chantier naval a l'arrêt, maîs un ci<br />

metiere de land art, avec ses "ruines a l'en<br />

vers", ses hangars et ses containers comme<br />

autant de 'monuments involontaires"<br />

Jean-Max Colard<br />

Yvan Salomone Jusqu au 26 juillet a la galerie <strong>Xippas</strong><br />

108 rue Vieille du Temple Paris lll 8 tel 0140270555<br />

wwwxiDoascom<br />

Eléments de recherche : Toutes citations : - GALERIE XIPPAS - Les artistes : * VIK MUNIZ * LUCAS SAMARAS * TAKIS<br />

08 JUIL/14 JUIL 08<br />

Hebdomadaire Paris<br />

OJD : 37296<br />

Surface approx. (cm²) : 340<br />

Page 1/1


Untitled Document<br />

Maigres citadelles<br />

http://www.crdp.ac-creteil.fr/artecole/galerie/page<strong>salomone</strong>.htm<br />

YVAN SALOMONE<br />

intervention face aux oeuvres dans l'exposition Maquis<br />

au centre d'art Le Plateau à Paris dans le cadre des<br />

rencontres DE VISU du CRDP<br />

Les auteurs qui se sont penchés sur l'œuvre de Yvan Salomone<br />

insistent tantôt sur la singularité - du moins au regard de la création<br />

contemporaine - de sa technique et de ses motifs, tantôt sur la<br />

prétendue dimension systématique qui sous-tend sa démarche. Soit<br />

des données et des entrées dont l'artiste souhaite peu entendre<br />

parler, bien qu'elles soient consubstantiellement et intrinsèquement<br />

rattachées à son travail. Yvan Salomone aime au contraire insister<br />

sur l'importance que requièrent à ses yeux les différentes<br />

excroissances et métastases qui se sont développées à partir de<br />

son Lebenswerk à proprement parler, à savoir un grand nombre<br />

d'aquarelles peintes depuis l'été 1991. Or il est le premier à<br />

reconnaître que ces débordements - écrits, publications,<br />

photographies, films, projections, bandes-sons, site - parasitent son<br />

travail pictural. pour mieux le faire ressortir, dévoilant avec une<br />

parcimonie savamment dosée des fragments de significations que<br />

l'opacité iconique s'évertue de dissimuler.<br />

Il est difficile d'établir avec certitude ce qui est réellement en jeu<br />

dans l'œuvre de Yvan Salomone. Nous sommes en effet conscients<br />

que ses aquarelles ne renvoient pas exclusivement à la présence<br />

(l'absence ?) d'un passé qui tenterait de refaire surface. Nous<br />

10/05/2008 16:26<br />

Quels récits innervent ces aquarelles ? Quelles histoires racontentelles<br />

? Celles de leur producteur, assurément, qui ne craint pas<br />

d'investir un champ autobiographique aussi fragile que<br />

problématique, nous laissant entrevoir ses obsessions et sa<br />

solitude.Solitude et vide qui trouvent, faut-il le préciser, leur<br />

traduction dans ces paysages portuaires désertés et désincarnés,<br />

dans ces cargos, containers et autres vestiges industriels "<br />

suspendus " qui forment la trame iconographique de son œuvre.<br />

Quant aux obsessions, elles infiltrent avec une inquiétante<br />

irrégularité le corpus de Yvan Salomone, se donnant à voir à<br />

travers des reconfigurations incessantes de motifs originels (la<br />

grille, le " bloc " etc.) telles ces variations sur le mazzocchio<br />

uccellien qui ont finit par constituer l'un des leitmotiv de son travail,<br />

cette forme torsadée sidérant " encore " l'artiste " par sa perpétuelle<br />

et fantastique actualité ".Perpétuelle et fantastique actualité qui<br />

résume à elle seule ce qui est en germe dans l'œuvre de Yvan<br />

Salomone, tant cette formulation ô combien paradoxale nous oblige<br />

à entrer dans ce que Georges Didi-Huberman nomme, en<br />

hommage et en référence à la " survivance " warburgienne, un<br />

autre temps.<br />

L'œuvre de Yvan Salomone ne saurait donc se conjuguer au<br />

singulier et encore moins se plier au mainstream moderniste. Elle<br />

ne cesse de se dérober, de transgresser la prétendue linéarité qui<br />

la caractérise. Elle enveloppe plusieurs strates temporelles qui se<br />

juxtaposent, se prolongent, se complètent ou se neutralisent. C'est<br />

dire à quel point la supposée dimension " chrono-logique " de son<br />

travail est essentielle, celle-ci constituant une sorte de colonne<br />

vertébrale à partir de laquelle et à travers laquelle l'artiste tisse ses<br />

réseaux de temporalités et les séries de déplacements qui animent<br />

son œuvre.<br />

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Untitled Document<br />

sommes tout aussi conscients que ces territoires incertains qu'elles<br />

représentent ne se désintègrent pas dans un mode mnémonique<br />

précis pour la simple raison que le dispositif de répétition mis en<br />

place par l'artiste - Freud parlerait de " compulsion à répéter "<br />

(Wiederholungszwang) - ne fait qu'accentuer ce que ce dernier<br />

nomme " les résistances du refoulement ". Ce faisant, toute<br />

possibilité offerte au spectateur mais aussi dans une certaine<br />

mesure à l'artiste de véritablement mener à bien l'anamnèse soustendant<br />

son travail est inexorablement retardée, périclitée.<br />

http://www.crdp.ac-creteil.fr/artecole/galerie/page<strong>salomone</strong>.htm<br />

10/05/2008 16:26<br />

NOTES<br />

1- Contrairement à ce qui est souvent avancé, Yvan Salomone ne peint pas "<br />

C'est bien fragment par fragment que le monde de Yvan Salomone systématiquement " une aquarelle par semaine. Disons qu'il peint une aquarelle après<br />

se dévoile et fragment par fragment qu'il semble paradoxalement et l'autre et que cette chronologie correspond plus ou moins à un découpage<br />

définitivement (?) nous échapper. L'imperméabilité de ce monde aux hebdomadaire. Les tampons que Yvan Salomone appose en guise de signature sur ses<br />

images ne renvoient d'ailleurs qu'au nombre, variable, d'œuvres réalisées dans le mois<br />

flux interprétatifs, le refus qu'il nous impose de le pénétrer<br />

(par exemple 03 02 02 correspond à la troisième aquarelle du mois de février 2002<br />

pourraient d'ailleurs sans peine faire l'économie de cette logique etc.).<br />

répétitive contraignante. Les aquarelles sont en effet, prises 2- Sigmund Freud, " Note sur le ''Bloc-notes magique'' " (Notiz über den Wunderblock)<br />

(1925) in Résultats, idées, problèmes, vol. II (1921 - 1938), Paris, PUF, 1985 pour la<br />

isolément, suffisamment imprévisibles pour que leur mystère ne traduction française, p. 121.<br />

puisse être percé. Aquarelles dont la déliquescence - tout<br />

3- " A la mémoire est attachée une ambition, une prétention, celle d'être fidèle au passé<br />

particulièrement soulignée par les troublantes auréoles corrodant ; à cet égard, les déficiences relevant de l'oubli ne doivent pas être traitées d'emblée<br />

fréquemment ses images -, ne fait que renforcer la précarité d'une " comme des formes pathologiques, comme des dysfonctionnements, mais comme<br />

l'envers d'ombre de la région éclairée de la mémoire, qui nous relie à ce qui s'est passé<br />

peinture à l'eau " sur le point de s'ensevelir. Une peinture diluvienne avant que nous en fassions mémoire " (Paul Ricour, La Mémoire, l'Histoire, l'Oubli,<br />

qui essayerait donc par tous les moyens de provoquer sa propre Paris, Seuil, 2000, p.26).<br />

dislocation. Et qui semble y parvenir sans peine.<br />

4- Ibid, p. 37.<br />

5 - Cf. Sigmund Freud, " Remémoration, répétition et perlaboration " (1914) in La<br />

technique psychanalytique, Paris, PUF, 1953 pour la traduction française, pp. 105 - 115.<br />

Texte de ERIK VERHAGEN<br />

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le 7.IX.1996<br />

Cher Yvan,<br />

Vous continuez donc à nous donner des nouvelles des confins, et à décrire<br />

la lisière concentrée du pays, dans ses ports, ses entrepôts, ses<br />

machineries portuaires.<br />

Pour une bonne part, et la meilleure souvent selon moi, l'entreprise<br />

artistique moderne par une variété d'ambiguïté congénitale mesure sa<br />

profondeur et sa sincérité à là hauteur de l'élément comique qu'elle<br />

instaure; l'exigence semble y rire d'elle même dans sa caricature, son<br />

double, le jeu et l'auto-ironie. Sans doute parce que vous êtes<br />

foncièrement moderne, vous déduisant autant de Kafka que de Picabia, de<br />

Beckett que de Chirico, de Céline que de Gasiorowski ou de Malcolm<br />

Morley, immanquablement vous avez visé la situation comique par<br />

excellence; aquarelliste donc, et de surcroît, destin étrange des<br />

prolongements de l'absurde, peintre de marines et vivant à Saint Halo. Au<br />

ras des touristes, dans des factures réputées caduques et des figures<br />

très désuètes, qui configurent l'espace du clown, de quoi vous moquez<br />

vous ? aux frais de qui rit-on dans le décalage entre la posture timorée<br />

et l'éclat d'une volonté toute contemporaine de peindre ?<br />

On rit d'abord des moyens de la peinture. Terribles années 80, les<br />

tournesols tournoyaient sur les téléviseurs en raison de leur prix, et<br />

quelles lourdes tartines ne nous a t-on pas servies ? Prendre le chemin<br />

opposé à ce que réclame l'époque reste la seule attitude saine et<br />

respectable pour un artiste. En optant pour l'aquarelle, ouvrages de<br />

Dames, sensibilité atmosphériques, travaux d'enfants, exquise suavité du<br />

délayage des pigments, vous avez commencé par mettre la peinture en tord.<br />

Rire de ses petits moyens, sa fragilité, son caractère mineur,<br />

transparent, poétique de base. Et l'on voit bien comment, astucieusement,<br />

à ces moyens de l'aquarelle choisis par volonté d'imposer une épreuve à<br />

la peinture en la bridant dans sa matérialité mineure, vous apportez une<br />

juste compensation par la taille de vos peintures. Le rire souvent est<br />

déclenché par la saisie d'une série de ruptures d'échelle. Vos peintures<br />

qui ne sont que des aquarelles atteignent des formats de tableaux..<br />

Minoration, - renversement -, agrandissement, - renversement à nouveau -,<br />

ces grandes aquarelles présentent au sens strict du terme des no man's<br />

land. Vos paysages, c'est bien le cas de le dire, sont terriblement<br />

flottants. Pas un sur lequel on hésite entre reconnaître l'érection<br />

industrielle et constater ses résidus. Et rupture donc à nouveau; ces<br />

faibles moyens mais luxueusement déployés ne servent qu'à présenter une<br />

étape supérieure de l'ambiguïté de vos grandes peintures marines; le<br />

monument industriel se mire dans sa ruine et sa poussière. Votre affaire<br />

se redouble encore, vous croisez Francis Bacon, dans l'aquarelle sous<br />

verre, je vois où j'en suis, dans le no man's land; et je crois hélas<br />

comprendre pourquoi à l'intérieur de ce nouveau catalogue de vos<br />

peintures vous protégez chacune de vos oeuvres du sens de l'apparition<br />

d'un même entonnoir en regard des travaux. L'entonnoir, non seulement<br />

nous l'avons sur la tête en signe d'idiotie pour avoir métamorphosé nos<br />

confins en aires abstraites et désertes, traversées exclusivement par des<br />

valeurs économiques ; mais l'entonnoir, ce sont ces sites eux-mêmes,<br />

devant nous et derrière nous, le monde tel qu'il devient en lequel nous<br />

tombons comme dans le puits du non-être.<br />

Bien à vous, cher Yvan, et dans cette perspective métaphysique, bon<br />

courage !<br />

Bernard Lamarche -Vadel

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