Un long dimanche de fiançailles & Joyeux Noël - Gymnasium am ...
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<strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong> & <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong><br />
- DEUX FILMS ET LES FAITS HISTORIQUES -<br />
Eine Beson<strong>de</strong>re Lernleistung im Fach Französisch<br />
Miri<strong>am</strong> Speyer, 12 F1<br />
Schuljahr 2006/2007<br />
Betreuen<strong>de</strong> Lehrerin : StR’ Sophie Heß<br />
<strong>Gymnasium</strong> <strong>am</strong> Rittersberg, Kaiserslautern
Sommaire<br />
I. Ma « BLL » en bref 3<br />
II. Ma démarche 4<br />
III. Introduction 5<br />
IV. Résumés <strong>de</strong>s films sous l’angle historique<br />
1. <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> 7<br />
2. <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong> 8<br />
V. Les éléments <strong>de</strong> la guerre dans les films et les faits historiques<br />
1. La propagan<strong>de</strong> 10<br />
2. Au front<br />
2.1 La vie dans les tranchées 13<br />
2.2 Le déroulement d’une attaque 16<br />
3. L’attitu<strong>de</strong> face à la guerre<br />
3.1 L’enthousiasme <strong>de</strong>s premiers jours 17<br />
3.2 Les fraternisations 19<br />
3.3 Les mutineries et les mutilations volontaires 23<br />
3.4 Les années 20 - le <strong>de</strong>uil 25<br />
VI. Conclusion 28<br />
VII. Bibliographie 32<br />
VIII. Selbstständigkeitserklärung 34<br />
2
I. Ma « BLL » en bref<br />
Dans ma « BLL », je travaille sur la question <strong>de</strong> l’authenticité historique <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux films traitant<br />
la Première Guerre mondiale. Le Long <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>, un film <strong>de</strong> Jean-Pierre Jeunet,<br />
réalisé en 2003, parle d’une jeune femme qui cherche son fiancé, disparu en 1917. <strong>Joyeux</strong><br />
<strong>Noël</strong>, mis en scène par Christian Carion et sorti en 2005, traite <strong>de</strong>s fraternisations sur le front<br />
occi<strong>de</strong>ntal à <strong>Noël</strong> 1914. Tous les <strong>de</strong>ux films sont faits pour le grand écran.<br />
J’ai choisi les aspects <strong>de</strong> « la propagan<strong>de</strong> », <strong>de</strong> « la vie au front » et <strong>de</strong> « l’attitu<strong>de</strong> face à la<br />
guerre » comme sujets <strong>de</strong> recherche. J’ai rassemblé les informations historiques et je les ai<br />
comparées avec la présentation <strong>de</strong> ces éléments dans les films. Ce travail d’analyse aboutit à<br />
ma conclusion et mon jugement final.<br />
Les analyses montrent que les <strong>de</strong>ux films contiennent <strong>de</strong>s exagérations et <strong>de</strong>s éléments<br />
inventés par les metteurs en scène. Mais sachant que les films s’adressent au grand public et<br />
ne visent pas à être <strong>de</strong>s documentaires, ils sont pourtant appropriés à fournir une première<br />
image <strong>de</strong> la Gran<strong>de</strong> Guerre aux spectateurs.<br />
3
II. Ma démarche<br />
Le sujet <strong>de</strong> ce travail est né lors <strong>de</strong> la rédaction <strong>de</strong> ma « Facharbeit » (<strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong><br />
<strong>fiançailles</strong> - Le livre et sa réalisation par Jean-Pierre Jeunet). Au cours <strong>de</strong> mon analyse<br />
littéraire, la question <strong>de</strong> l’authenticité historique a fortement attiré mon attention. Comme cela<br />
dépassait le cadre <strong>de</strong> la « Facharbeit » où il était question <strong>de</strong> la réalisation du film sur la base<br />
du roman, je me suis décidée à analyser les <strong>de</strong>ux films (<strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong> et<br />
<strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong>) en mettant l’accent sur le fond historique.<br />
Tout d’abord, il était difficile <strong>de</strong> se procurer le film <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> : Il était impossible <strong>de</strong><br />
l’acheter en Allemagne bien qu’il s’agisse d’une coopération entre Anglais, Français et<br />
Allemands avec <strong>de</strong>s acteurs très connues en Allemagne (Daniel Brühl, Benno Fürmann).<br />
Finalement, mon professeur a pu l’acheter en France.<br />
En novembre, j’ai commencé par regar<strong>de</strong>r les <strong>de</strong>ux films en prenant <strong>de</strong>s notes concernant les<br />
aspects historiques. Ensuite, j’ai lu le livre « La Gran<strong>de</strong> Guerre 1914-1918 » <strong>de</strong> Stéphane<br />
Audoin-Rouzeau et d’Annette Becker que j’avais acheté lors d’un voyage à Reims. Il s’agit<br />
<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux auteurs que l’on trouve souvent dans <strong>de</strong>s bibliographies concernant la Première<br />
Guerre mondiale. Puis, j’ai lu « 14-18, Le grand bouleversement » <strong>de</strong> Jay Winter et <strong>de</strong> Blaine<br />
Baggett, un livre qu’un professeur français m’avait conseillé. Afin <strong>de</strong> cerner un peu mon<br />
travail, je me suis mise à concevoir une première structure et une introduction pour que<br />
l’objectif <strong>de</strong> mon travail se précise.<br />
Grâce au journal intime <strong>de</strong> mon arrière grand-père qui parle <strong>de</strong> la guerre <strong>de</strong> 14-18, j’ai réussi à<br />
me faire une image assez claire <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> tous les jours d’un soldat <strong>de</strong> l’époque. Ensuite il<br />
était facile pour moi d’écrire mon premier texte sur « Les fraternisations ». Cette démarche<br />
s’est passée à la fin <strong>de</strong> l’année 2006 et surtout pendant les vacances <strong>de</strong> <strong>Noël</strong>. Pour me<br />
procurer d’autres livres, j’ai commandé <strong>de</strong>s livres à la bibliothèque régionale. Il a fallu<br />
attendre plusieurs semaines avant qu’ils arrivaient parce que les bibliothèques à<br />
Kaiserslautern n’ont pas <strong>de</strong> livres en français concernant la Gran<strong>de</strong> Guerre. En outre, les<br />
recherches sur l’Internet n’étaient pas satisfaisantes.<br />
Par la suite, j’ai progressé <strong>de</strong> plus en plus au cours <strong>de</strong>s mois suivants. Pendant ce temps-là, il<br />
fallait modifier plusieurs fois la structure que j’avais rédigée au début puisqu’il se révélait que<br />
certains <strong>de</strong> mes points d’analyse n’étaient pas réalisables, car il était difficile <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>s<br />
sources fiables. C’est pourquoi j’ai abandonné l’idée d’analyser le rôle <strong>de</strong>s brancardiers et <strong>de</strong>s<br />
prêtres avec leurs droits et <strong>de</strong>voirs. Il n’était pas non plus possible <strong>de</strong> m’occuper <strong>de</strong> la<br />
4
question <strong>de</strong>s prisonniers <strong>de</strong> guerre et surtout du cas particulier d’une femme faite prisonnière,<br />
comme c’est le cas pour Anna Sörensen dans <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong>.<br />
Vers la fin du mois d’avril 2007, j’ai terminé les textes d’analyse ainsi que le résumé <strong>de</strong><br />
l’action du film <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong>. Puis, j’ai commencé à m’occuper <strong>de</strong> la conclusion, le texte le<br />
plus important <strong>de</strong> mon travail puisqu’il résume tous mes résultats et aboutit à un jugement<br />
final.<br />
<strong>Un</strong> voyage à Verdun en mai m’a donné la possibilité <strong>de</strong> voir <strong>de</strong> plus près les lieux <strong>de</strong> bataille.<br />
Les photos que j’ai prises à cette occasion me servent <strong>de</strong> preuves visuelles à ma comparaison.<br />
Au mois <strong>de</strong> juin, j’ai terminé ma conclusion et j’ai commencé à réviser mon travail. Là, un<br />
nouveau problème s’est révélé : Est-ce qu’il fallait utiliser le présent historique ou plutôt<br />
employer le passé au moment où je parle <strong>de</strong> la réalité <strong>de</strong> 1914-1918 ? Personne ne pouvait me<br />
donner <strong>de</strong> vrai conseil. Donc, je me suis décidée à employer le passé dans <strong>de</strong>ux articles afin<br />
<strong>de</strong> les rendre plus clairs.<br />
Au cours <strong>de</strong> mon séjour <strong>de</strong> classe à Londres, j’ai visité le « Imperial War Museum ». La<br />
vitrine traitant les fraternisations m’a encore relevé <strong>de</strong> nouveaux aspects que j’ai pu intégrer<br />
dans ce travail au <strong>de</strong>rnier moment.<br />
III. Introduction<br />
De nos jours, le cinéma a gagné <strong>de</strong> plus en plus d’importance et d’influence. Mais beaucoup<br />
<strong>de</strong> films réalisés pour le grand écran qui traitent <strong>de</strong>s événements historiques (Il faut sauver le<br />
Soldat Ryan, Marie Antoinette, Pearl Harbor, Munich, …), ne montrent pas <strong>de</strong> faits<br />
authentiques. Ces films déforment donc l’image <strong>de</strong> l’histoire dans la perception du spectateur.<br />
Dans le cas <strong>de</strong> la Première Guerre mondiale, ce phénomène est encore plus frappant. Elle est<br />
souvent réduite à quelques mots clés, avant tout à la bataille <strong>de</strong> Verdun. En Allemagne cette<br />
guerre joue un rôle beaucoup moins important que la Deuxième Guerre mondiale. A l’école,<br />
ce sujet n’est traité qu’assez brièvement.<br />
Les <strong>de</strong>ux films <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong> <strong>de</strong> l’an 2003 et <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> <strong>de</strong> 2005 tentent<br />
<strong>de</strong> nous rappeler la Gran<strong>de</strong> Guerre, comme l’on surnomme la guerre <strong>de</strong> 1914-1918 en France.<br />
Cette expression a été utilisée pour la première fois par le général Joffre en 1912. Il l’a prise<br />
du titre d’un livre du général allemand Falkenhausen : La Gran<strong>de</strong> Guerre aujourd’hui. 1<br />
1 Frémy, Dominique et Frémy, Michèle : Quid 2001.<br />
5
Puisque beaucoup <strong>de</strong> gens savent peu <strong>de</strong> cette guerre, ces films peuvent nous donner<br />
beaucoup d’informations, même s’il ne s’agit pas toujours <strong>de</strong> faits historiques. Cependant, vu<br />
l’importance <strong>de</strong> ces films en tant que source d’informations historiques, il est intéressant <strong>de</strong><br />
s’occuper <strong>de</strong> la véracité <strong>de</strong>s éléments montrés dans les <strong>de</strong>ux films.<br />
Pour pouvoir juger dans quelle mesure les <strong>de</strong>ux films montrent <strong>de</strong> véritables faits historiques<br />
ou bien s’ils sont uniquement <strong>de</strong>s scènes nostalgiques et inventées, je analyserai la<br />
propagan<strong>de</strong>, la vie au front et l’attitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s soldats face à la guerre montrés dans ces <strong>de</strong>ux<br />
films. Je les comparerai avec les faits historiques pour voir en quel sens ces films peuvent être<br />
<strong>de</strong>s sources historiques qui peuvent nous approcher <strong>de</strong> cette guerre et non pas seulement une<br />
distraction du grand public cinéphile.<br />
Comme les <strong>de</strong>ux films ne montrent que la guerre sur le front occi<strong>de</strong>ntal, cet exposé ne traitera<br />
également que la guerre sur le front <strong>de</strong> l’ouest.<br />
Le rôle d’Anna Sörensen dans <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> ne sera qu’abordé dans la conclusion. <strong>Un</strong>e<br />
véritable analyse <strong>de</strong> son rôle mènerait trop loin . En plus, étant donné que sa présence au front<br />
semble si irréaliste, son rôle manque d’intérêt d’une véritable analyse.<br />
Pour m’informer moi-même sur mon sujet, j’ai fait avant tout <strong>de</strong>s recherches littéraires. Grâce<br />
à mon grand-père, je suis tombé sur le journal intime <strong>de</strong> mon arrière grand-père, Walter<br />
Speyer. Il parle <strong>de</strong> ses premiers mois au front en Belgique, près <strong>de</strong> Langemarck. Il décrit les<br />
assauts en pleine marche et le développement <strong>de</strong>s tranchées. Vers la fin <strong>de</strong> son journal, Walter<br />
Speyer évoque même les fraternisations à <strong>Noël</strong>. Il traite alors exactement un <strong>de</strong>s sujets <strong>de</strong><br />
mon travail.<br />
Lors d’un voyage à Verdun et la visite du « Imperial War Museum » à Londres j’ai pu<br />
approfondir mes connaissances <strong>de</strong> <strong>de</strong>tte pério<strong>de</strong>.<br />
Finalement, je tiens à bien remercier mon grand-père pour tous les renseignements qu’il ma<br />
fournies au sujet <strong>de</strong> la guerre et les articles <strong>de</strong> journaux qu’il m’a prêtés. <strong>Un</strong> grand merci aussi<br />
à mon professeur Mme Heß pour son ai<strong>de</strong> et son investissement.<br />
6
1. « <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> »<br />
IV. Résumés <strong>de</strong>s films sous l’angle historique<br />
Quelques jours avant <strong>Noël</strong> 1914 sur le front occi<strong>de</strong>ntal : Des troupes françaises, écossaises et<br />
alleman<strong>de</strong>s s’opposent, n’étant séparés que quelques mètres l’une <strong>de</strong> l’autre dans leurs<br />
tranchées. <strong>Un</strong>e attaque française, soutenue par les Britanniques, contre l’ennemi échoue avec<br />
un grand nombre <strong>de</strong> morts. Dorénavant, les forces <strong>de</strong> l’Entente, surtout les Français, craignent<br />
une contre-attaque <strong>de</strong>s Allemands. La veille <strong>de</strong> <strong>Noël</strong>, du côté <strong>de</strong> ceux-ci, le chanteur Nikolaus<br />
Sprink est appelée à l’arrière : Sa compagne, la soprano Anna, est venue exprès <strong>de</strong> Berlin et<br />
elle a organisé une soirée <strong>de</strong> chant chez le Prince. Pendant que Sprink chante alors pour le<br />
Haut Comman<strong>de</strong>ment, ses c<strong>am</strong>ara<strong>de</strong>s atten<strong>de</strong>nt dans les tranchées entre une centaine <strong>de</strong><br />
sapins <strong>de</strong> <strong>Noël</strong>, envoyés par le grand quartier général au front. Apeurés, ils enten<strong>de</strong>nt le chant<br />
heureux <strong>de</strong>s Écossais d’en face. Sprink, à l’arrière, déci<strong>de</strong> <strong>de</strong> chanter le soir au front pour ses<br />
c<strong>am</strong>ara<strong>de</strong>s. Il ne réussit pas à empêcher Anna <strong>de</strong> le suivre. Revenu au front, il incite ses<br />
c<strong>am</strong>ara<strong>de</strong>s à placer les sapins illuminés sur le parapet <strong>de</strong> la tranchée. Ces lumières<br />
inhabituelles augmentent la peur <strong>de</strong>s Français. Mais au moment où Sprink entonne « Stille<br />
Nacht » [« Douce Nuit »], les soldats, peu importe <strong>de</strong> quel côté ils viennent, sont hypnotisés<br />
par son chant. Après le premier couplet, un Ecossais reprend l’air avec une cornemuse.<br />
Toujours en chantant, Sprink monte sur le parapet <strong>de</strong> la tranchée. Malgré les protestations <strong>de</strong><br />
son lieutenant, il quitte son c<strong>am</strong>p et s’avance vers le milieu du No Man’s Land. <strong>Un</strong>e <strong>de</strong>uxième<br />
chanson terminée, le lieutenant allemand rejoint Sprink afin <strong>de</strong> le reconduire dans sa tranchée.<br />
Mais à ce moment-là, les lieutenants écossais et français les rejoignent successivement. Ils<br />
conviennent d’une trêve pour <strong>Noël</strong>. Suivant le modèle <strong>de</strong> leurs supérieurs, les soldats quittent<br />
lentement leurs tranchées et s’approchent timi<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> leurs adversaires. Ils échangent <strong>de</strong>s<br />
<strong>de</strong>nrées, ils se montrent même <strong>de</strong>s photos <strong>de</strong> leurs f<strong>am</strong>illes. À minuit, l’aumônier militaire<br />
écossais célèbre une messe au milieu du No man’s land pour tous les soldats. Le len<strong>de</strong>main,<br />
les adversaires enterrent les morts <strong>de</strong>s combats <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rniers mois ensemble. Anna, choquée du<br />
nombre <strong>de</strong> morts, essaie <strong>de</strong> convaincre son compagnon <strong>de</strong> fuir avec elle. Quoiqu’il renonce à<br />
déserter, il se constituera plus tard prisonnier avec Anna.<br />
Après l’enterrement, les soldats jouent au foot et aux cartes. Au moment où le lieutenant<br />
allemand apprend que son artillerie va attaquer les tranchées adverses, il invite les Français et<br />
les Écossais à se mettre à l’abri dans les positions alleman<strong>de</strong>s. Comme les artilleries<br />
7
françaises et britanniques ne tar<strong>de</strong>nt pas <strong>de</strong> riposter, les Allemands s’abritent à leur tour chez<br />
leurs adversaires.<br />
Accompagnées par la musique <strong>de</strong>s cornemuses, la trêve <strong>de</strong> <strong>Noël</strong> se termine et les Allemands<br />
retournent dans leurs tranchées.<br />
Grâce à la censure postale, les supérieurs <strong>de</strong> chaque c<strong>am</strong>p apprennent ce qui s’est passé au<br />
front à <strong>Noël</strong>. Craignant <strong>de</strong>s problèmes moraux, ils déci<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> remplacer l’unité française<br />
ainsi que l’unité écossaise. Selon l’évêque écossais, les Allemands ne sont pas <strong>de</strong>s enfants du<br />
Seigneur. Il renvoie l’aumônier puisqu’il est convaincu que celui n’a pas le droit <strong>de</strong> célébrer<br />
la messe pour eux. Le régiment allemand est muté d’office : il part pour le front oriental.<br />
2. « <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong> »<br />
En 1917, cinq soldats, Manech, Benoît, Ange, Six-Sous et Bastoche sont escortés à travers<br />
<strong>de</strong>s tranchées du front <strong>de</strong> l’ouest vers les premières lignes. Ils sont tous cond<strong>am</strong>nés à mort<br />
pour mutilation volontaire. Afin d’échapper à la tuerie <strong>de</strong> la Première Guerre Mondiale,<br />
quatre d’entre eux se sont mutilés la main, tandis que Bastoche a été blessé lors d’un acci<strong>de</strong>nt.<br />
Mais au lieu <strong>de</strong> les fusiller, le général Pétain déci<strong>de</strong> <strong>de</strong> les faire jeter par-<strong>de</strong>ssus le parapet <strong>de</strong><br />
la tranchée « Bingo Crépuscule » dans le No man’s land entre les lignes alleman<strong>de</strong>s et<br />
françaises. On s’attend à ce qu’ils y meurent <strong>de</strong> faim, <strong>de</strong> froid ou qu’ils y soient abattus par<br />
les Allemands.<br />
En Bretagne, Mathil<strong>de</strong>, la fiancée <strong>de</strong> Manech, ne croit pas à la mort <strong>de</strong> son <strong>am</strong>ant. Elle est<br />
convaincue qu’il est toujours en vie, bien qu’elle ait reçu l’acte <strong>de</strong> décès.<br />
Après la guerre, elle se lance dans une enquête pour prouver ses pressentiments. Elle fait la<br />
connaissance d’anciens militaires qui l’ai<strong>de</strong>nt à éluci<strong>de</strong>r les circonstances <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rniers instants<br />
<strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> Manech. Avec l’ai<strong>de</strong> d’un détective, <strong>de</strong> son avocat et <strong>de</strong> réponses à plusieurs<br />
annonces dans <strong>de</strong> différents journaux, elle obtient <strong>de</strong>s informations <strong>de</strong> plus en plus détaillées.<br />
Mais Mathil<strong>de</strong> n’est pas la seule qui cherche obstinément à tirer au clair les circonstances <strong>de</strong><br />
la mort <strong>de</strong>s cinq soldats. Tina Lombardi, la compagne d’Ange, fait elle aussi <strong>de</strong>s recherches<br />
pour savoir si son <strong>am</strong>ant est encore vivant. Au moment où elle découvre les circonstances<br />
cruelles <strong>de</strong> sa mort, elle déci<strong>de</strong> <strong>de</strong> se venger. Elle essaie <strong>de</strong> tuer tous ceux qui ont fait du mal à<br />
Ange. Après avoir commis plusieurs meurtres, elle est arrêtée et cond<strong>am</strong>née à mort.<br />
Le jour où l’avocat <strong>de</strong> Mathil<strong>de</strong> trouve la tombe <strong>de</strong> Manech sur un cimetière militaire, elle<br />
semble perdre l’espoir. Mais c’est à ce moment-là que Céléstin Poux, un ancien c<strong>am</strong>ara<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
son fiancé, fait apparition et lui donne <strong>de</strong> nouveau <strong>de</strong> l’espoir : Il lui montre le lieu où se<br />
8
trouvait jadis la tranchée « Bingo Crépuscule ». Il lui raconte les <strong>de</strong>rniers moments <strong>de</strong> la vie<br />
<strong>de</strong> Manech : Il gravait MMM [« Mathil<strong>de</strong> aime Manech »] sur un tronc d’arbre au moment où<br />
un avion allemand l’a <strong>de</strong>scendu. Ce qu’il ne sait pas, c’est que Manech n’est que blessé par la<br />
balle, et non pas tué.<br />
Mathil<strong>de</strong> fait aussi la connaissance d’une Alleman<strong>de</strong> dont le frère a été tué à Bingo<br />
Crépuscule. Grâce à ses informations et au décodage <strong>de</strong> la lettre d’adieu <strong>de</strong> Benoît, Mathil<strong>de</strong><br />
peut prouver qu’au moins ce <strong>de</strong>rnier a pu se sauver. Elle le retrouve, vivant caché, angoissé<br />
par l’idée d’être retrouvé par les militaires et cond<strong>am</strong>né. Benoît raconte alors à Mathil<strong>de</strong> que<br />
Manech n’est pas mort sur le ch<strong>am</strong>p <strong>de</strong> bataille. Après les grands combats pendant la nuit du<br />
7 au 8 janvier 1917, <strong>de</strong>ux soldats français, Benj<strong>am</strong>in Gor<strong>de</strong>s et Jean Desrochelles, sont allés<br />
voir si les cond<strong>am</strong>nés sont encore vivants. Mais les <strong>de</strong>ux ont été tués par l’artillerie<br />
alleman<strong>de</strong>. Après leur mort, Benoît, qui s’était caché, a échangé le matricule <strong>de</strong> Gor<strong>de</strong>s avec<br />
le sien. Comme Manech était encore en vie, Benoît a aussi changé sa plaque avec celle du<br />
soldat Desrochelles. Puis, Benoît a porté Manech à l’hôpital et il s’est enfui après. Il a<br />
retrouvé sa f<strong>am</strong>ille et ils ont commencé une nouvelle vie. Manech, atteint d’une <strong>am</strong>nésie<br />
totale, est reconnu par la mère <strong>de</strong> Desrochelles comme étant son fils et elle s’occupe <strong>de</strong> lui.<br />
Après le décès <strong>de</strong> sa mère adoptive, Manech vit dans un asile <strong>de</strong> l’église. C’est là où Mathil<strong>de</strong><br />
le retrouve finalement son fiancé.<br />
9
V. Les éléments <strong>de</strong> la guerre dans les films et les faits<br />
1. Propagan<strong>de</strong><br />
historiques<br />
Pendant que leurs pères mènent la guerre au front, les enfants participent au conflit à leur<br />
propre façon. Le film « <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> » commence par <strong>de</strong>s photos d’avant guerre : on voit<br />
entre autres une photo avec <strong>de</strong>ux garçons en uniforme <strong>de</strong> soldat. Ensuite, le film montre un<br />
écolier français seul dans une salle <strong>de</strong> classe. Il récite un conte d’enfant où il encourage les<br />
enfants français à aller reconquérir l’Alsace. Après, un petit Anglais dans le même entourage<br />
récite une diatribe sur l’ennemi allemand. La séquence finit par un garçon allemand qui<br />
décl<strong>am</strong>e un poème plein <strong>de</strong> haine contre les Anglais. 2<br />
Mémorial <strong>de</strong> Verdun, 19/05/07<br />
Ces scènes reflètent ce qui s’est passé en réalité dans les années <strong>de</strong> guerre <strong>de</strong> 1914-1918. Les<br />
écoliers dans tous les pays belligérants <strong>de</strong>viennent la cible d’une propagan<strong>de</strong> particulière : La<br />
guerre entre dans les écoles et dans les jeux d’enfants.<br />
L’enseignement adapte la guerre à la salle <strong>de</strong> classe : chaque matière est inspirée par la guerre<br />
(p.ex. : <strong>de</strong>s calculs, <strong>de</strong>s dictées,…). L’école a une nouvelle tâche : apprendre la haine <strong>de</strong><br />
l’Allemand aux enfants. 3 Elle <strong>de</strong>vient elle-même un lieu <strong>de</strong> propagan<strong>de</strong>, elle inculque aux<br />
2 <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong>, film (1:40sv)<br />
3 cf. Mon papa en guerre, p.13<br />
Enfants <strong>de</strong> France, espoir <strong>de</strong><br />
<strong>de</strong>main, préparez-vous !<br />
Soyez forts !<br />
Assurez l’avenir <strong>de</strong> la Race et<br />
<strong>de</strong> la défense <strong>de</strong> la Patrie !<br />
10
enfants que la France est supérieure aux autres nations. L’Allemand est traité <strong>de</strong> « Boche », ce<br />
qui est une insulte grave, et il est déclaré d’être un sauvage. 4<br />
L’industrie <strong>de</strong>s jeux, elle aussi, joue un rôle important dans le conflit. En France aussi bien<br />
qu’en Allemagne, <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong> jeux guerriers surgissent. Des livres et <strong>de</strong>s ban<strong>de</strong>s<br />
<strong>de</strong>ssinées présentent les soldats comme <strong>de</strong>s héros. Leurs adversaires par contre symbolisent le<br />
diable. 5 Des jouets comme <strong>de</strong>s poupées et <strong>de</strong>s petits soldats permettent aux enfants <strong>de</strong><br />
reproduire la guerre. Mais celle-ci est une guerre irréelle : Elle ne connaît ni la mort ni la<br />
souffrance <strong>de</strong>s siens. Personne n’ouvre les yeux <strong>de</strong>s enfants à ce que la guerre signifie<br />
vraiment, même pas leurs pères qui se trouvent dans les tranchées et qui vivent chaque jour<br />
cette situation atroce.<br />
L’Eglise participe aussi à l’éducation <strong>de</strong>s enfants dans cet esprit. Elle crée <strong>de</strong>s journées<br />
annuelles où elle apprend aux petits <strong>de</strong> « ‘combattre’ par la prière ». 6 En outre, elle organise la<br />
« croisa<strong>de</strong> <strong>de</strong>s enfants » où elle tâche <strong>de</strong> renforcer la morale et la foi <strong>de</strong>s enfants. 7<br />
Le serment <strong>de</strong> l’évêque écossais à la fin du film « <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> » 8 paraît donc réaliste. Il<br />
prononce une diatribe sur les Allemands, en disant qu’ils ne se conduisent ni pensent comme<br />
<strong>de</strong>s êtres humains. Il va encore plus loin : Selon lui, les Allemands ne sont que <strong>de</strong>s brutes et<br />
non pas <strong>de</strong>s enfants du Seigneur. La guerre est, d’après lui, une croisa<strong>de</strong>, une guerre sacrée où<br />
les forces du Bien luttent contre les forces du Mal. Le fait <strong>de</strong> tuer les Allemands est un ordre<br />
<strong>de</strong> Dieu.<br />
Mais les enfants ne sont pas les seules victimes <strong>de</strong> la propagan<strong>de</strong>. Toute la nation <strong>de</strong>vient la<br />
victime du « bourrage <strong>de</strong> crâne » - une propagan<strong>de</strong> qui cache la vérité du ch<strong>am</strong>p <strong>de</strong> bataille et<br />
ne parle que <strong>de</strong>s héros 9 : « Le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’arrière dut se contenter, la plupart du temps, d’une<br />
image <strong>de</strong> la réalité et <strong>de</strong> l’horreur <strong>de</strong>s ch<strong>am</strong>ps <strong>de</strong> batailles déformée par le prisme <strong>de</strong> la<br />
propagan<strong>de</strong> journalistique. » 10 On mobilise <strong>de</strong>s écrivains et <strong>de</strong>s artistes 11 , afin <strong>de</strong> soutenir le<br />
moral du peuple et d’augmenter l’acceptation <strong>de</strong>s sacrifices pour la guerre comme les<br />
problèmes <strong>de</strong> nourriture. Les aliments sont rationnés. À cause d’une mauvaise récolte et du<br />
blocus maritime <strong>de</strong>s Anglais, l’Allemagne souffre d’une f<strong>am</strong>ine en hiver 1916/1917. 12<br />
4 cf. Audoin-Rouzeau, Stéphane : Gran<strong>de</strong> Guerre. p.144<br />
5 cf. Audoin-Rouzeau, Stéphane : Gran<strong>de</strong> Guerre. p.60<br />
6 Mon papa en guerre p.13<br />
7 cf. http://www.historial.org/fr/object/child.htm (30/12/2006)<br />
8 <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong>, film (1:32:48sv.)<br />
9 cf. Audoin-Rouzeau, Stéphane : Gran<strong>de</strong> Guerre, p.58<br />
10 http://www.revue-quasimodo.org/PDFs/9%20-%20HardierJagielski.pdf (02/03/07), p.88<br />
11 cf. Baggett, Blaine : 14-18, Le grand bouleversement. p. 107<br />
12 cf. Audoin-Rouzeau, Stéphane : Gran<strong>de</strong> Guerre, p.56<br />
11
En plus, tout le peuple qui ne participe pas à la guerre au front doit soutenir la patrie aux<br />
« fronts intérieurs » 13 : Les femmes sont forcées <strong>de</strong> travailler durement dans l’industrie<br />
guerrière. 14 La propagan<strong>de</strong> fait croire au peuple qu’il participe à une guerre pour la<br />
civilisation et elle diabolise l’ennemi en le déclarant être l’incarnation du Mal. Même les<br />
journalistes au front sont obligés à contribuer à la propagan<strong>de</strong> : Ils sont chargés d’écrire <strong>de</strong>s<br />
mensonges sur ce qui se passe au front : par exemple tandis que le premier jour <strong>de</strong> la bataille<br />
<strong>de</strong> la Somme est un échec désastreux pour les Anglais, les journalistes parlent d’un grand<br />
succès pour les Britanniques. 15 Pour remonter le moral au front, les supérieurs militaires<br />
donnent <strong>de</strong> fausses informations sur la situation générale puisque les combattants eux-mêmes<br />
ne sont souvent que mal instruits. Mais ces mensonges sans volonté se dévoilent assez vite<br />
aux soldats et cela entraîne un manque <strong>de</strong> confiance <strong>de</strong> leur part vis-à-vis <strong>de</strong> leurs<br />
supérieurs. 16<br />
13 cf. Audoin-Rouzeau, Stéphane : Gran<strong>de</strong> Guerre, p.51<br />
14 cf. Audoin-Rouzeau, Stéphane : Gran<strong>de</strong> Guerre, p.52<br />
15 cf. Baggett, Blaine : 14-18, Le grand bouleversement. p.187<br />
16 Walter Speyer, p.28<br />
12
2. Au front<br />
2.1 La vie dans les tranchées<br />
Au moment où la guerre a éclaté, tout le mon<strong>de</strong> croyait qu’elle serait courte, qu’elle durerait à<br />
peine quelques mois, comme le propagaient les autorités. Mais en novembre 1914 au plus<br />
tard, les soldats et quartiers généraux <strong>de</strong> tous les côtés ont dû se rendre compte qu’une<br />
victoire rapi<strong>de</strong> était impossible. Au cours du mois <strong>de</strong> novembre au front occi<strong>de</strong>ntal (à l’est, ce<br />
sera un an plus tard), la guerre <strong>de</strong> mouvement s’est finalement terminée et la guerre <strong>de</strong>s<br />
tranchées a commencé. 17 Sur une <strong>long</strong>ueur <strong>de</strong> 700 Km, il se créait un réseau <strong>de</strong> tranchées et<br />
<strong>de</strong> boyaux. 18 Les soldats y luttaient violemment pendant plus <strong>de</strong> trois ans pour quelques<br />
mètres <strong>de</strong> terrain.<br />
La vie d’un soldat dans une <strong>de</strong> ces tranchées signifiait une vie pleine <strong>de</strong> souffrances et <strong>de</strong><br />
privations. Surtout le film « <strong>Un</strong> Long Dimanche <strong>de</strong> Fiançailles » porte cela sur l’écran : Le<br />
soldat est const<strong>am</strong>ment en danger, il n’a j<strong>am</strong>ais <strong>de</strong> pause, il doit toujours envisager la mort <strong>de</strong><br />
ses c<strong>am</strong>ara<strong>de</strong>s aussi bien que sa propre mort. Pendant une attaque <strong>de</strong> l’artillerie, la terre<br />
tremble, les sifflements <strong>de</strong>s obus le terrorisent et dans son « inquiétu<strong>de</strong> animale » 19 son «<br />
cœur cogne comme une bête à folie prise au piège ». 20 Les poilus sont exposés à voir la<br />
violence crue. 21 De plus, ils sont traumatisés par les atrocités qu’ils sont obligées à voir et à<br />
supporter, par exemple l’abus <strong>de</strong>s cadavres 22 , <strong>de</strong>s corps défigurés et démembrés. 23 En outre,<br />
l’utilisation <strong>de</strong>s gaz inflige <strong>de</strong> la terreur aux soldats. 24 Le film nous montre un extrait <strong>de</strong> la<br />
réalité cruelle <strong>de</strong>s tranchées. Les journées au front étaient empreintes <strong>de</strong> peur et <strong>de</strong> violence.<br />
« La vision <strong>de</strong>s cadavres accrochées [aux] pointes <strong>de</strong> métal [<strong>de</strong>s réseaux <strong>de</strong> barbelés], leur<br />
o<strong>de</strong>ur, constituaient un <strong>de</strong>s spectacles les plus atroces que les soldats aient dû endurer ». 25<br />
Même la scène où Manech est couvert <strong>de</strong> sang et <strong>de</strong> chair <strong>de</strong> son c<strong>am</strong>ara<strong>de</strong> tué est réaliste. 26 Il<br />
n’était pas rare qu’un éclat d’obus ait projeté <strong>de</strong>s parties <strong>de</strong> la chair d’un soldat tué sur ceux<br />
près <strong>de</strong> lui, encore en vie. 27<br />
17 cf. Baggett, Blaine : 14-18, Le grand bouleversement, p.90<br />
18 cf. Audoin-Rouzeau, Stéphane : Gran<strong>de</strong> Guerre, p.30<br />
19 Audoin-Rouzeau, Stéphane : Gran<strong>de</strong> Guerre p.130<br />
20 <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>, film (1:20:10)<br />
21 cf. <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>, film (5:01)<br />
22 cf. <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>, film (57:10)<br />
23 cf. <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>, film (3:35)<br />
24 cf. <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>, film (9:22)<br />
25 cf. Audoin-Rouzeau, Stéphane : Gran<strong>de</strong> Guerre, p.31<br />
26 cf. <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>, film (10:22)<br />
27 cf. Audoin-Rouzeau, Stéphane : Gran<strong>de</strong> Guerre, p.40<br />
13
Les soldats <strong>de</strong>vaient supporter les cadavres défigurés dans leurs tranchées et les cris <strong>de</strong>s<br />
mourants dans le No Man’s land. Le film « <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> » le montre dans la scène où Palmer,<br />
le brancardier est dans une impasse. Les blessés ne sont qu’à quelques mètres <strong>de</strong> lui, mais il<br />
lui est défendu <strong>de</strong> sortir <strong>de</strong> la tranchée pour les sauver. Comme il ne supporte plus les<br />
gémissements d’un mourant, il sort quand même, accompagné d’un autre brancardier. Ce<br />
<strong>de</strong>rnier est tué immédiatement par un tireur Allemand. À la suite, Palmer a <strong>de</strong>s ennuis parce<br />
qu’on le juge coupable <strong>de</strong> la mort du brancardier. 28 Donc, ce que le film suggère est vrai :<br />
Pour les blessés et les mourants sur le No Man’s land, un sauvetage était quasiment<br />
impossible puisqu’un soldat qui sortait <strong>de</strong> sa tranchée risquait d’être tué sur le coup. Au front,<br />
on ne pouvait rien faire pour les morts. On les jetait hors <strong>de</strong> la tranchée, sur les plaines, pour<br />
ne pas <strong>de</strong>voir supporter leur o<strong>de</strong>ur. Seulement à l’arrière, il était possible <strong>de</strong> les enterrer<br />
provisoirement. 29<br />
Exposés aux pires atrocités, les poilus ont crée un univers tout à fait différent <strong>de</strong> leur vie<br />
quotidienne. Tout en se rappelant leur vie antérieure, ils éditaient <strong>de</strong>s journaux du front 30 ,<br />
jouaient aux cartes et au foot, bricolaient et écrivaient tous ensembles plus <strong>de</strong> cinq millions <strong>de</strong><br />
lettres par jour. 31 De toute façon, le courrier a gagné beaucoup d’importance lors <strong>de</strong> la Gran<strong>de</strong><br />
Guerre puisqu’il était le seul lien entre les combattants et leurs proches à l’arrière. 32 Comme<br />
l’on voit dans « <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> » 33 , ces lettres étaient soumises à une censure militaire : <strong>de</strong>s<br />
bureaux <strong>de</strong> censure contrôlaient <strong>de</strong>s échantillons, cherchant <strong>de</strong>s informations qui pourraient<br />
servir à l’ennemi. Il fallait aussi que les fraternisations lors les jours <strong>de</strong> <strong>Noël</strong> 1914 restent<br />
absolument secrètes puisque le Haut Comman<strong>de</strong>ment y voyait un problème <strong>de</strong> moral grave. 34<br />
De plus, <strong>de</strong>s centaines <strong>de</strong> poilus écrivaient <strong>de</strong>s journaux intimes - <strong>de</strong> nos jours <strong>de</strong>s sources<br />
personnelles <strong>de</strong> la vie d’un simple soldat.<br />
Au cours <strong>de</strong>s années passées dans les tranchées, la certitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> ne pas être seul avec la perte<br />
<strong>de</strong>s c<strong>am</strong>ara<strong>de</strong>s, la souffrance et la peur est <strong>de</strong>venue très importante pour les soldats : <strong>Un</strong> poilu<br />
comme Benoît Notre-D<strong>am</strong>e du « Long Dimanche <strong>de</strong> Fiançailles », ne s’intégrant quasiment<br />
pas dans le régiment était très rare. On peut même dire qu’un « soldat ne peut survivre<br />
<strong>long</strong>temps dans les tranchées s’il reste coupé <strong>de</strong> ses c<strong>am</strong>ara<strong>de</strong>s ». 35<br />
Mais la vie dans les tranchées cachait encore <strong>de</strong>s souffrances plus subtiles :<br />
28<br />
cf. <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong>, film (14:59 & 23:54)<br />
29<br />
cf. Hölle von Verdun, Deutschland 2006, (45:35)<br />
30<br />
cf. Audoin-Rouzeau, Stéphane : Gran<strong>de</strong> Guerre, p.44<br />
31<br />
cf. Mon papa en guerre, p.12<br />
32<br />
cf. http://www.revue-quasimodo.org/PDFs/9%20-%20HardierJagielski.pdf (02/03/07), p.84<br />
33<br />
cf. <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong>, film (1:27:40)<br />
34<br />
cf. Baggett, Blaine : 14-18, Le grand bouleversement, p.99 & <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong>, film (1:37:30)<br />
35<br />
Audoin-Rouzeau, Stéphane : Gran<strong>de</strong> Guerre, p.44<br />
14
L’approvisionnement était toujours difficile. Il arrivait que les soldats n’aient pas assez à<br />
boire et à manger comme le montre le film « <strong>Un</strong> <strong>long</strong> Dimanche <strong>de</strong> Fiançailles ». 36 Les<br />
chemins à l’arrière coupés, il n’a été parfois possible <strong>de</strong> recevoir <strong>de</strong> la nourriture que la nuit.<br />
Mais en trébuchant dans l’obscurité, les courriers ont souvent renversé les aliments <strong>de</strong> façon<br />
que les repas soient sales et déjà froids au moment où ils arrivaient à leurs <strong>de</strong>stinataires. 37 De<br />
plus, il suffisait d’une courte pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> pluie et les tranchées aussi bien que les ch<strong>am</strong>ps <strong>de</strong><br />
bataille se transformaient en un « océan <strong>de</strong> boue » 38 <strong>de</strong> sorte que les maladies augmentaient et<br />
les tranchées étaient noyées dans la boue. 39<br />
<strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>, film (2:37) Baggett, B. et Winter, J.: 14-18 Le grand bouleversement, p. 95<br />
En fait, les soldats qui ont vécu dans les tranchées étaient exposés aux saisons, à la chaleur en<br />
été et au froid en hiver. Il n’y avait que quelques positions alleman<strong>de</strong>s qui offraient le<br />
chauffage ou l’électricité aux soldats. 40 Cela aussi est porté sur l’écran par le « Long<br />
<strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong> ». 41<br />
En outre, il n’existait que rarement un abri assez soli<strong>de</strong> pour protéger <strong>de</strong>s coups <strong>de</strong> grand<br />
calibre. Souvent, ce genre <strong>de</strong> refuge a plutôt été la tombe <strong>de</strong> ceux qui s’y abritaient en les<br />
enterrant vivants. 42<br />
Souvent, les tranchées <strong>de</strong> première ligne n’étaient séparées que <strong>de</strong> quelques centaines <strong>de</strong><br />
mètres les unes <strong>de</strong>s autres. Les soldats d’un c<strong>am</strong>p pouvaient observer l’autre c<strong>am</strong>p mener sa<br />
vie quotidienne. C’est pour cela que <strong>de</strong>s accords non officiels se sont développés entre les<br />
partis adversaires : On est convenu par exemple <strong>de</strong> ne pas lancer d’attaques lorsque l’autre<br />
36 cf. <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>, film (47:43)<br />
37 cf. Walter Speyer, p.33<br />
38 Baggett, Blaine : 14-18, Le grand bouleversement, p.99<br />
39 cf. Walter Speyer, p.33sv<br />
40 cf. Audoin-Rouzeau, Stéphane : Gran<strong>de</strong> Guerre, p.30<br />
41 cf. <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>, film (1:36)<br />
42 cf. Audoin-Rouzeau, Stéphane : Gran<strong>de</strong> Guerre, p.30<br />
15
c<strong>am</strong>p prenait son déjeuner ou <strong>de</strong> ne j<strong>am</strong>ais attaquer les latrines. Parfois, il s’est même<br />
développé un état <strong>de</strong> « vivre et laisser vivre ». 43 C’est le cas pour le secteur <strong>de</strong> Bouchavesnes<br />
dans le « Long <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> Fiançailles » : Entre les Français et les Allemands d’en face, il y<br />
a un « statut quo », le secteur « dort ». 44 Cette proximité <strong>de</strong> l’adversaire était aussi le<br />
déclencheur <strong>de</strong>s fraternisations à <strong>Noël</strong> 1914, dont parle le film « <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> ».<br />
2.2 Le déroulement d’une attaque<br />
Comme la guerre <strong>de</strong> mouvement diffère beaucoup <strong>de</strong> la guerre <strong>de</strong>s tranchées qui s’est établie<br />
en automne 1914, il faut donc distinguer les attaques qui correspon<strong>de</strong>nt à l’une ou à l’autre<br />
forme <strong>de</strong> la guerre.<br />
Au début <strong>de</strong> la guerre, les soldats <strong>de</strong>vaient craindre d’être surpris par <strong>de</strong>s assauts en pleine<br />
marche. Souvent sans aucun abri, les soldats étaient en proie aux projectiles <strong>de</strong> l’ennemi. 45<br />
Les guerriers se sont retranchés par exemple dans <strong>de</strong>s maisons abandonnées 46 et ils ont ouvert<br />
le feu lors du passage <strong>de</strong> leurs adversaires. Parfois, il n’était pas clair d’où les projectiles<br />
venaient, donc dans quelle direction il fallait riposter. 47 On dit même que les civilistes dans<br />
les villages attaquaient les soldats. 48 Donc, les soldats, dès qu’ils avaient conquis un village,<br />
fouillaient les maisons pour se rassurer qu’il n’y ait pas d’ennemis. En outre, comme<br />
l’artillerie ne s’installait pas à un endroit fixe dans la guerre <strong>de</strong> mouvement, elle ne jouait pas<br />
<strong>de</strong> rôle aussi important qu’au moment du surgissement <strong>de</strong>s tranchées.<br />
En général, les attaques dès la mise en place <strong>de</strong> la guerre <strong>de</strong>s tranchées suivaient le schéma<br />
suivant : L’attaque commence par le bombar<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> l’artillerie. Son but est <strong>de</strong> détruire<br />
l’artillerie et les positions <strong>de</strong> l’ennemi. Selon le maréchal Fayolle, cela est vital pour les<br />
attaquants : « L’attaque ne [peut] (…) réussir que si l’artillerie <strong>de</strong> la défense est absolument<br />
hors d’état d’intervenir. » 49 Il faut aussi qu’elle détruise les réseaux <strong>de</strong> barbelés <strong>de</strong>vant les<br />
tranchées ainsi que les mitrailleuses. Pour l’assaut <strong>de</strong>s fantassins, il est important que les fils<br />
<strong>de</strong> fer barbelés soient détruits puisque ils posent aux attaquants une barrière insurmontable. 50<br />
43 Baggett, Blaine : 14-18, Le grand bouleversement, p.99<br />
44 <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>, film (15:30)<br />
45 cf. Walter Speyer, p.22<br />
46 cf. Walter Speyer, p.21<br />
47 cf. Walter Speyer, p.12<br />
48 cf. Walter Speyer, p.11<br />
49 Marie-Émile Fayolle: Cahiers secrets <strong>de</strong> la Gran<strong>de</strong> Guerre, p.41<br />
50 cf. Audoin-Rouzeau, Stéphane : Gran<strong>de</strong> Guerre, p.131<br />
16
<strong>Un</strong>e attaque face aux mitrailleuses en marche est vouée à l’échec 51 , comme on peut le voir<br />
dans le « Long Dimanche <strong>de</strong> Fiançailles ». 52 Personne ne peut échapper à cette grêle <strong>de</strong> balles<br />
produit par <strong>de</strong>s armes qui tirent environ 500 balles par minute. 53 Après le bombar<strong>de</strong>ment,<br />
l’infanterie, c’est-à-dire les soldats à pied dans les tranchées, se préparent à l’assaut. Les<br />
poilus mettent leurs baïonnettes au canon et après avoir reçu <strong>de</strong>s instructions et <strong>de</strong><br />
l’encouragement <strong>de</strong> leurs supérieurs, ils quittent la tranchée sur l’ordre « En avant ! ». Ils<br />
traversent le No Man’s land et essaient <strong>de</strong> pénétrer dans la tranchée <strong>de</strong> l’adversaire. 54 Cela est<br />
visualisé par les <strong>de</strong>ux films. 55<br />
Lors <strong>de</strong>s scènes <strong>de</strong> combat, tous les <strong>de</strong>ux metteurs en scènes utilisent la technique <strong>de</strong> la<br />
c<strong>am</strong>éra portée. 56 Cela signifie que le cadreur court après un personnage, et par le mouvement<br />
<strong>de</strong> la c<strong>am</strong>éra le spectateur à l’impression <strong>de</strong> regar<strong>de</strong>r à travers les yeux d’un combattant. Cet<br />
effet est encore renforcé par le bruitage avec les sifflements <strong>de</strong>s obus, les explosions et la<br />
pétara<strong>de</strong> <strong>de</strong>s mitrailleuses.<br />
Le « Long <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong> » renforce l’impression du spectateur <strong>de</strong> se trouver<br />
directement au combat et alors const<strong>am</strong>ment en danger en filmant toutes les scènes au front<br />
en couleurs gris et bleu. C’est aussi pour cela que les scènes paraissent extrêmement réalistes<br />
au spectateur.<br />
Souvent l’attaque échouait car le quartier général l’avait mal préparée. 57 Il se peut qu’il y ait<br />
plus <strong>de</strong> soldats dans la tranchée adversaire que l’on croyait avant. 58 Comme c’est le cas pour<br />
l’assaut du début <strong>de</strong> « <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> ». 59<br />
3. L’attitu<strong>de</strong> face á la guerre<br />
3.1 L’enthousiasme <strong>de</strong>s premiers jours<br />
La crise <strong>de</strong> juillet 1914 n’aurait pas dû aboutir à une guerre. Mais la forte disposition à la<br />
guerre <strong>de</strong>s gouvernements <strong>de</strong>s pays concernés, causée par l’espoir d’avoir la possibilité <strong>de</strong><br />
mettre en œuvre <strong>de</strong>s projets conçus <strong>de</strong>puis <strong>long</strong>temps, menait directement à une « solution<br />
51 cf. Audoin-Rouzeau, Stéphane : Gran<strong>de</strong> Guerre, p.41<br />
52 cf. <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>, film (1:21:53)<br />
53 cf. Audoin-Rouzeau, Stéphane : Gran<strong>de</strong> Guerre, p.41<br />
54 cf. Audoin-Rouzeau, Stéphane : Gran<strong>de</strong> Guerre, p.131<br />
55 cf. <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> (film), 09:13 & <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong> (film),1:21:20<br />
56 cf. <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> (film), 08:14 & <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong> (film), 09:57<br />
57 cf. Audoin-Rouzeau, Stéphane : Gran<strong>de</strong> Guerre, p.131<br />
58 cf. Audoin-Rouzeau, Stéphane : Gran<strong>de</strong> Guerre, p.132<br />
59 cf. <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> (film), 11:13<br />
17
guerrière ». 60 Les déclarations <strong>de</strong> guerre début août provoquaient alors <strong>de</strong>s sentiments<br />
différents. Surtout l’opinion publique <strong>de</strong>s nations belligérantes était fort enthousiaste vis-à-vis<br />
d’une guerre, not<strong>am</strong>ment grâce à la propagan<strong>de</strong>. De plus, l’Allemagne étant considérée<br />
comme l’agresseur provoquait d’énormes sentiments patriotiques surtout dans la société<br />
française. 61<br />
Le peuple se rassemblait et fêtait les soldats qui défilaient dans les rues, en chantant <strong>de</strong>s<br />
chansons patriotiques. 62 <strong>Un</strong>e troupe qui quittait la caserne pour monter dans le train pour le<br />
front était accompagnée par les habitants émus jusqu’à la gare. 63<br />
Dans les <strong>de</strong>ux films, on ne peut pas généraliser l’attitu<strong>de</strong> face à la guerre. Pour Willi<strong>am</strong>,<br />
l’Écossais du film « <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> », la déclaration <strong>de</strong> la guerre est la meilleure nouvelle qui<br />
puisse arriver. 64 Il est heureux et il ferait tout pour <strong>de</strong>venir soldat. Ce personnage reflète donc<br />
l’enthousiasme du peuple. Les hommes font la queue <strong>de</strong>vant les bureaux militaires pour<br />
s’inscrire comme volontaires 65 , ils payent même pour être acceptés. 66<br />
Le frère ca<strong>de</strong>t <strong>de</strong> Willi<strong>am</strong>, Jonathan, est plus sceptique. Il ne partage pas cet enthousiasme.<br />
Finalement, il se laisse emporter par la joie <strong>de</strong> son aîné. 67 Palmer, le prêtre et brancardier,<br />
pleure au moment où il apprend la nouvelle. 68 Il sait déjà que la guerre symbolise avant tout la<br />
souffrance et le <strong>de</strong>uil. Voilà une <strong>de</strong>s questions qui échappent à beaucoup <strong>de</strong> poilus :<br />
« Oubliez-vous les leçons d’histoire (…) ? Ne savez-vous pas tout ce que le mot guerre<br />
renferme d’horreur et <strong>de</strong> souffrances ? » 69 écrit un soldat à sa f<strong>am</strong>ille, ne comprenant pas du<br />
tout l’euphorie générale. Dans son journal intime, rédigé en 1916, un Walter Speyer raconte<br />
un événement qui s’est passé en juillet 1914 : « Der [ein Mann, <strong>de</strong>r die Balkankriege<br />
1912/1913 überlebt hatte] sprach vom Krieg als etwas Entsetzlichem. Wir lachten - uns fehlte<br />
die Erfahrung » (« Il [un homme qui a survécu à la guerre <strong>de</strong>s balkans, 1912/1913] parlait <strong>de</strong><br />
la guerre comme <strong>de</strong> quelque chose d’atroce. Nous riions- il nous manquait l’expérience »). 70<br />
Dans les <strong>de</strong>ux films, la plupart <strong>de</strong>s personnages ne sont pas venus volontairement sous les<br />
drapeaux. Comme Six-Sous, Manech n’a pas le choix, il part pour la guerre parce qu’il y est<br />
obligé. 71 Le cas du Corse Ange est différent. Il était en prison, mais en 1916, même les droits<br />
60<br />
cf. Kursbuch Geschichte. Von <strong>de</strong>r Antike bis zur Gegenwart. p.226<br />
61<br />
cf. Bach, André: Fusillés pour l’exemple, p 82<br />
62<br />
cf. Bach, André: Fusillés pour l’exemple, p.74<br />
63<br />
cf. Walter Speyer, p.7<br />
64<br />
cf. <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong>, film (4:23)<br />
65<br />
cf. Walter Speyer, p.2sv<br />
66<br />
cf. Baggett, Blaine : 14-18, Le grand bouleversement, p.178<br />
67<br />
cf. <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong>, film (4:47)<br />
68<br />
cf. <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong>, film (5:11)<br />
69<br />
Bach, André: Fusillés pour l’exemple, p.81<br />
70<br />
Walter Speyer, p.3<br />
71<br />
cf. <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>, film (1:07:57)<br />
18
communs sont appelés sous les drapeaux. Ange, lui, pouvait choisir entre rester à la prison ou<br />
partir au front. 72 Benoît Notre-D<strong>am</strong>e du « Long <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong> » est appelé sous les<br />
drapeaux contre son gré 73 , aussi bien que le chanteur Sprink du film « <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> ». Ce<br />
<strong>de</strong>rnier insiste sur ce fait même vis-à-vis du Prince. 74<br />
Alors ni le « Long <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong> » ni « <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> » reflètent l’attitu<strong>de</strong> face à la<br />
guerre déclenchée ainsi qu’elle était en 1914.<br />
3.2 Les fraternisations<br />
Le film « <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> » traite tout d’abord <strong>de</strong>s fraternisations au front occi<strong>de</strong>ntal lors <strong>de</strong> la<br />
veille <strong>de</strong> <strong>Noël</strong> 1914. Ces fraternisations ont vraiment eu lieu, elles se sont déroulées sur <strong>de</strong>ux<br />
tiers du front <strong>de</strong> l’ouest. 75 Mais elles se sont passées sous <strong>de</strong> diverses manières. À la suite, je<br />
vais ex<strong>am</strong>iner ce qui s’est vraiment passé pour pouvoir distinguer les éléments inventés par le<br />
metteur en scène.<br />
Dans le film, le rapprochement <strong>de</strong>s adversaires commence au moment où les Allemands<br />
mettent leurs sapins <strong>de</strong> <strong>Noël</strong> au <strong>de</strong>ssus du parapet <strong>de</strong> la tranchée. 76 Ces sapins ont existé<br />
vraiment et dans quelques secteurs, en effet, les soldats les avaient mis en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> la<br />
tranchée. répérant ces lumières inhabituelles, les Anglais en face ont craint une attaque. 77 La<br />
même chose arrive au lieutenant Au<strong>de</strong>bert et à ses hommes dans le film. 78 Il suit le chant <strong>de</strong><br />
Sprink, accompagné d’une cornemuse écossaise. Cela rasure les Français. On peut même dire<br />
que Sprink hypnotise les Français et les Écossais en chantant « Stille Nacht » [« Douce<br />
Nuit »]. Après qu’une cornemuse lui a joué le début d’ « A<strong>de</strong>ste Fi<strong>de</strong>les », il reprend l’air et<br />
traverse le No Man’s Land en chantant avec un sapin illuminé à la main. 79 À ce moment-là<br />
Sprink démontre le puvoir <strong>de</strong> la musique : Les Écossais montent sur le parapet <strong>de</strong> leur<br />
tranchée et personne ne pense plus à tirer. Quand il a terminé sa chanson, son lieutenant,<br />
Horstmeyer, sort <strong>de</strong> la tranchée pour l’inciter à rentrer. Mais à cet instant, Gordon, le<br />
lieutenant britannique, traverse le No Man’s land et se joint à eux. Peu après, Au<strong>de</strong>bert les<br />
rejoint <strong>de</strong> son côté. Ils concluent une trêve pour <strong>Noël</strong>. Cependant, en 1914, les événements ne<br />
72 cf. <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>, film (8:21)<br />
73 cf. <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>, film (6:52)<br />
74 cf. <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong>, film (34 :48)<br />
75 cf. Baggett, Blaine : 14-18, Le grand bouleversement, p.99<br />
76 cf. <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong>, film (44:11)<br />
77 cf. Baggett, Blaine : 14-18, Le grand bouleversement, p.97<br />
78 cf. <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong>, film (44:32)<br />
79 cf. <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong>, film (47:30)<br />
19
se sont pas déroulés <strong>de</strong> la même façon. Les actions dans le film sont plutôt un rassemblement<br />
d’inci<strong>de</strong>nts ayant eu lieu sur tout le front occi<strong>de</strong>ntal. À l’endroit par exemple, où les soldats<br />
avaient mis les sapins, ils ont crié aux Anglais d’en face où se trouvaient leurs sapins. 80 Dans<br />
un autre secteur, les Allemands ont siffloté pour se faire remarquer. Ensuite, ils sont convenus<br />
avec les Anglais d’une trêve pour <strong>Noël</strong>. 81<br />
Presque partout où les soldats fraternisaient, la musique jouait un rôle important : Soit les<br />
soldats chantaient ensemble, soit juste un parmi eux faisait <strong>de</strong> la musique, comme par<br />
exemple un ténor français dans un coin du front et un violoniste allemand dans un autre. 82 Ou<br />
bien un orchestre allemand jouait les hymnes nationaux <strong>de</strong> leurs adversaires. 83<br />
Après le chant <strong>de</strong> Sprink et la décision d’une trêve, les soldats <strong>de</strong>s trois c<strong>am</strong>ps sortent <strong>de</strong> leurs<br />
tranchées 84 et s’avancent un peu intimidés, à pas incertain vers leurs voisins d’en face. Se<br />
regardant pour la première fois, ils échangent du chocolat et <strong>de</strong> l’alcool. Les soldats se<br />
montrent réciproquement <strong>de</strong>s photos <strong>de</strong> leurs f<strong>am</strong>illes. Cela aussi est très proche <strong>de</strong> la réalité.<br />
Il existe même <strong>de</strong>s photos sur lesquelles nous pouvons voir <strong>de</strong>s Allemands, <strong>de</strong>s Anglais et <strong>de</strong>s<br />
Français ensemble :<br />
Baggett, B. et Winter, J.: 14-18 Le grand bouleversement, p.98 : Anglais & Allemands ensemble sur le no man’s land<br />
80 cf. Baggett, Blaine : 14-18, Le grand bouleversement, p.99<br />
81 cf. http://www.merrychristmas-<strong>de</strong>rfilm.<strong>de</strong>/downloads/mc_begleitmaterial.pdf (29/12/06),p.14<br />
82 cf. Baggett, Blaine : 14-18, Le grand bouleversement, p.96<br />
83 cf. Baggett, Blaine : 14-18, Le grand bouleversement, p.97<br />
84 cf. <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong>, film (51:06)<br />
20
<strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong>, film (54:12); Les Écossais et Allemands échangent <strong>de</strong> la nourriture<br />
A <strong>Noël</strong>, quelques soldats sont sortis <strong>de</strong> leur tranchée et ont traversé le No Man’s land sans<br />
armes pour souhaiter « <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> » 85 . Ils s’envoyaient réciproquement <strong>de</strong>s lettres et<br />
échangeaient <strong>de</strong> la nourriture et même quelques cartouches. 86<br />
Les trêves à la fin <strong>de</strong> l’an 1914 ont eu une durée plus ou moins <strong>long</strong>ue dans <strong>de</strong> différents<br />
secteurs. 87 La fraternisation dans le film dure la nuit et tout le len<strong>de</strong>main. À minuit, le prêtre<br />
écossais, Palmer, célèbre une messe au milieu du No man’s land et tous les soldats l’écoutent<br />
attentivement. Au cours <strong>de</strong>s prières, Palmer invite Sprink à chanter <strong>de</strong> nouveau, mais celui-ci<br />
arrive à convaincre sa compagne Anna Sörensen <strong>de</strong> chanter « l’Ave Maria ». Elle voulait<br />
absolument l’accompagner au front après avoir chanté pour le Prince allemand. Les prêtres au<br />
front ont vraiment célébré <strong>de</strong>s messes à <strong>Noël</strong> 1914, mais seulement pour leurs propres c<strong>am</strong>ps.<br />
Pendant ce temps, le c<strong>am</strong>p adverse n’a pas tiré un seul coup. 88 Les <strong>de</strong>ux partis n’ont donc pas<br />
fêté ensemble. Il s’agit d’une invention du réalisateur. De plus, une messe ensemble telle<br />
qu’elle est montrée paraît irréaliste dans la mesure où le latin <strong>de</strong>s Écossais aurait dû être<br />
incompréhensible pour les Allemands.<br />
Le len<strong>de</strong>main matin, les lieutenants déci<strong>de</strong>nt d’enterrer les morts. Palmer prononce la<br />
bénédiction. Cela a effectivement eu lieu : Dans un coin du front, <strong>de</strong>s Allemands et <strong>de</strong>s<br />
Écossais ont inhumé les morts ensemble. Lors <strong>de</strong> cette célébration, ils ont prononcé le Psaume<br />
XXIII et le Notre Père, une fois en allemand et une fois en anglais. 89 Au moins, les c<strong>am</strong>ps ont<br />
profité <strong>de</strong> la trêve pour récupérer leurs morts dans le No Mans Land. 90 Le même jour, dans le<br />
85<br />
cf. http://www.merrychristmas-<strong>de</strong>rfilm.<strong>de</strong>/downloads/mc_begleitmaterial.pdf (29/12/06)<br />
p.17 & cf. Baggett, Blaine : 14-18, Le grand bouleversement, p.97<br />
86<br />
cf. Walter Speyer, p.41<br />
87<br />
cf. Walter Speyer, p.41<br />
88<br />
cf. Baggett, Blaine : 14-18, Le grand bouleversement, p. 98<br />
89<br />
cf. Baggett, Blaine : 14-18, Le grand bouleversement, p.99<br />
90 cf. Walter Speyer, p.41<br />
21
film, les soldats organisent un match <strong>de</strong> football et ils jouent aux cartes. 91 C’est un fait<br />
historique : Au moins, <strong>de</strong>s Allemands et <strong>de</strong>s Britanniques ont joué au foot. Ayant perdu, les<br />
premiers ont offert un tonneau aux Anglais. 92<br />
L’après-midi du jour <strong>de</strong> <strong>Noël</strong>, Horstmayer apprend que l’artillerie alleman<strong>de</strong> bombar<strong>de</strong>ra<br />
bientôt les positions écossaises et françaises. Il prévient les <strong>de</strong>ux lieutenants et il leur propose<br />
<strong>de</strong> se mettre avec leurs hommes à l’abri dans la tranchée alleman<strong>de</strong>. Au<strong>de</strong>bert et Gordon<br />
acceptent cette offre et le suivent avec leurs soldats. Après la fin du bombar<strong>de</strong>ment, les<br />
« invités » conseillent à Horstmayer et à ses hommes <strong>de</strong> venir avec eux parce que leur<br />
artillerie va riposter. Les Allemands se mettent donc à l’abri dans les tranchées <strong>de</strong> leurs<br />
ennemis. Dans son journal intime, Walter Speyer mentionne que le c<strong>am</strong>p français a bien<br />
proposé aux Allemands <strong>de</strong> se rendre visite les uns aux les autres. Les Allemands ont<br />
fortement approuvé cette proposition, mais ayant peur d’être responsable d’une telle action,<br />
Speyer l’a interdit. 93 Il n’est donc pas improbable qu’un c<strong>am</strong>p ait visité un autre lors <strong>de</strong>s<br />
fraternisations à <strong>Noël</strong> 1914.<br />
Il est arrivé parfois que les soldats ont envoyé <strong>de</strong>s messages au parti d’en face (il faut savoir<br />
que les premières lignes n’étaient séparées que <strong>de</strong> quelques dizaines <strong>de</strong> mètres les unes <strong>de</strong>s<br />
autres 94 ) pour l’avertir d’une attaque d’artillerie imminente. 95<br />
Au moment où les quartiers généraux <strong>de</strong>s trois c<strong>am</strong>ps apprennent la trêve officieuse <strong>de</strong> <strong>Noël</strong>,<br />
ils sont, dans le film aussi bien qu’en réalité, horrifiés. Pour eux, il s’agit <strong>de</strong> haute trahison. Il<br />
y avait alors eu un soldat cond<strong>am</strong>né à mort 96 , mais il semble qu’il s’agit d’un cas unique. La<br />
plupart <strong>de</strong>s soldats accusés sont cond<strong>am</strong>nés à <strong>de</strong>s sanctions disciplinaires, entre autres <strong>de</strong>s<br />
dégradations, la prison et la corvée. 97 Par contre, les soldats du film « <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> » sont<br />
traités moins sévèrement : les régiments sont remplacés par <strong>de</strong> nouvelles troupes, l’unité<br />
écossaise est dissoute. Palmer, le prêtre est renvoyé 98 et Au<strong>de</strong>bert et ses hommes sont mutés<br />
d’office dans le secteur <strong>de</strong> Verdun. L’unité alleman<strong>de</strong> est envoyée au front <strong>de</strong> l’Est. 99<br />
Les fraternisations à <strong>Noël</strong> 1914 sont les seuls inci<strong>de</strong>nts <strong>de</strong> ce genre sur le front occi<strong>de</strong>ntal<br />
pendant la Première Guerre mondiale. Les <strong>Noël</strong>s 1915-1918 sont fêtés séparément, chacun<br />
dans son c<strong>am</strong>p. 100<br />
91<br />
cf. <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong>, film (1:15:53sv)<br />
92<br />
cf. Imperial War Museum, Londres<br />
93<br />
Walter Speyer, p.41<br />
94<br />
cf. Audoin-Rouzeau, Stéphane: Gran<strong>de</strong> Guerre, p. 30<br />
95<br />
cf. Baggett, Blaine : 14-18, Le grand bouleversement, p.99<br />
96<br />
cf. http://www.merrychristmas-<strong>de</strong>rfilm.<strong>de</strong>/downloads/mc_begleitmaterial.pdf (29/12/06), p.18<br />
97<br />
cf. http://www.merrychristmas-<strong>de</strong>rfilm.<strong>de</strong>/downloads/mc_begleitmaterial.pdf (29/12/06), p.17<br />
98<br />
cf. <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong>, film (1:29:40sv.)<br />
99<br />
cf. <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong>, film (1:37:20sv.)<br />
100<br />
cf. http://www.merrychristmas-<strong>de</strong>rfilm.<strong>de</strong>/downloads/mc_begleitmaterial.pdf (29/12/06), p.18<br />
22
3.3 Les mutineries et les mutilations volontaires<br />
« Dans toutes les armées, la guerre d’usure et les attaques meurtrières entraînèrent <strong>de</strong>s refus<br />
d’obéissance et <strong>de</strong> désertions (…). ». 101 Dans les <strong>de</strong>ux films, c’est exactement le cas.<br />
Personne parmi les combattants ne se sent à l’aise dans sa situation actuelle. Chacun<br />
préférerait être chez lui. Ce sentiment <strong>de</strong> ne pas vouloir participer à la guerre est aussi un<br />
problème général <strong>de</strong> la guerre <strong>de</strong> 1914 à 1918.<br />
Surtout les automutilations dans le « Long <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong> » reflètent cette attitu<strong>de</strong>.<br />
Ce film parle du sort <strong>de</strong> cinq soldats accusés <strong>de</strong> mutilation volontaire. Ils sont jetés par-<strong>de</strong>ssus<br />
le parapet <strong>de</strong> leur tranchée dans le No Man’s land pour y « crever, la gueule ouverte » 102 entre<br />
la tranchée alleman<strong>de</strong> et celle <strong>de</strong>s Français. Comme Tina Lombardi le dit 103 , c’était l’idée du<br />
maréchal Pétain en 1915 <strong>de</strong> se débarrasser <strong>de</strong>s mutilés <strong>de</strong> cette façon : « Des 40 soldats d’une<br />
unité voisine qui se sont mutilés à une main avec un coup <strong>de</strong> fusil Pétain voulait en fusiller<br />
25. Aujourd’hui, il recule. Il donne l’ordre <strong>de</strong> les lier et <strong>de</strong> les jeter <strong>de</strong> l’autre côté du parapet<br />
aux tranchées les plus rapprochées <strong>de</strong> l’ennemi. Ils y passeront la nuit. Il n’a pas dit si on les y<br />
laisserait mourir <strong>de</strong> faim. » 104<br />
Déjà début septembre 1914, les premiers soldats étaient accusés <strong>de</strong> mutilation volontaire.<br />
Mais il n’existait pas encore <strong>de</strong> paragraphe dans le Co<strong>de</strong> <strong>de</strong> justice militaire français déclarant<br />
ces mutilations un crime. Puisque les supérieurs militaires craignaient <strong>de</strong> sévères problèmes<br />
moraux, il a fallu qu’on ait la possibilité <strong>de</strong> poursuivre les mutilations volontaires en justice.<br />
Les autorités militaires ont alors cherché à classer un tel acte et dès lors, ce délit était jugée<br />
comme « abandon <strong>de</strong> poste en présence <strong>de</strong> l’ennemi », et dans la plupart <strong>de</strong>s cas, sanctionné<br />
par la peine <strong>de</strong> mort. 105 Puisque les quartiers généraux croyaient que l’on <strong>de</strong>vait être dur avec<br />
les déserteurs, ceux-ci ont été fusillés pour l’exemple <strong>de</strong>vant leurs compagnies. 106 Pourtant, il<br />
y avait <strong>de</strong>s débats au sujet du jugement <strong>de</strong> ces actes : Les supérieurs militaires n’étaient même<br />
pas en accord entre eux. Au début, il arrivait que les peines différaient <strong>de</strong> régiment en<br />
régiment, variant entre quelque mois <strong>de</strong> prison et la peine <strong>de</strong> mort. 107<br />
Mais <strong>de</strong> telles mutilations ne se sont pas passées uniquement du côté français. Dans le c<strong>am</strong>p<br />
allemand, les soldats tentaient eux aussi d’échapper à la tuerie. Étant obligé <strong>de</strong> vivre dans la<br />
boue et sous la pluie avec trop peu d’abris et approvisionné avec peu <strong>de</strong> nourriture et <strong>de</strong><br />
101 Audoin-Rouzeau, Stéphane : Gran<strong>de</strong> Guerre, p.89<br />
102 <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>, film (15:19)<br />
103 cf. <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> fiancailles, film (1:33:09)<br />
104 Marie-Émile Fayolle: Cahiers secrets <strong>de</strong> la Gran<strong>de</strong> Guerre, p.79<br />
105 cf. Bach, André : Fusillés pour l’exemple, p.322<br />
106 cf. Bach, André : Fusillés pour l’exemple, p.332 & <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>, film (9:24)<br />
107 cf. Bach, André : Fusillés pour l’exemple, p323sv.<br />
23
mauvaise qualité, certains soldats arrivaient au point où ils ne supportaient plus les conditions<br />
<strong>de</strong> vie au front. 108<br />
Les mé<strong>de</strong>cins militaires étaient chargés <strong>de</strong> démasquer les mutilés. Avec une blessure au pied<br />
ou à la main gauche, un soldat était particulièrement suspect. 109 Après leur ex<strong>am</strong>en, les<br />
mé<strong>de</strong>cins ont fait un « certificat médico-légal » où ils classaient le soldat suspect ou non<br />
suspect <strong>de</strong> mutilation volontaire. Ils parvenaient à ce jugement après <strong>de</strong>s entretiens avec le<br />
soldat où celui-ci avait l’occasion d’expliquer les circonstances <strong>de</strong> sa blessure et après <strong>de</strong>s<br />
ex<strong>am</strong>ens médicaux prouvant à quelle distance la blessure avait été infligée. Les suspects<br />
étaient donc poursuivis en justice par les Conseils <strong>de</strong> guerre. 110 C’est exactement le cas <strong>de</strong>s<br />
cinq cond<strong>am</strong>nés dans le « Long <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong> ». Bastoche est cond<strong>am</strong>né à cause<br />
d’un tel « certificat médico-légal » : Bien qu’il soit innocent, il est cond<strong>am</strong>né à mort parce que<br />
l’on a trouvé <strong>de</strong>s traces <strong>de</strong> poudre sur sa main. 111 Manech, lui, a dressé sa main avec une<br />
cigarette brûlante par-<strong>de</strong>ssus le parapet <strong>de</strong> la tranchée afin d’être blessé par un tireur<br />
allemand. Cela marche comme prévu, mais il est trahi par un sergent rigoureux, quoique ses<br />
c<strong>am</strong>ara<strong>de</strong>s cherchent à le protéger. 112 Finalement il est envoyé en conseil <strong>de</strong> guerre et plus<br />
tard cond<strong>am</strong>né à mort.<br />
Ces conseils <strong>de</strong> guerre spéciaux étaient mis en service en septembre 1914 pour arriver vite à<br />
une cond<strong>am</strong>nation. Ils étaient spécialisés sur les dossiers d’automutilation, abandon <strong>de</strong> poste<br />
et <strong>de</strong> désertion et ils jugaient par un processus simplifié. 113 Grâce à l’influence du parlement,<br />
on a abandonné ces conseils spéciaux en 1916 et <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong> cond<strong>am</strong>nés étaient graciés<br />
par le prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la République. Les cinq cond<strong>am</strong>nés du « Long <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong> »<br />
obtiennent aussi une telle grâce. Mais leur supérieur, ne s’intéressant quasiment pas à la vie<br />
<strong>de</strong> ses soldats, ne donne pas l’ordre <strong>de</strong> l’exécuter. 114 C’est un fait que, pendant la première<br />
Guerre Mondiale, certains supérieurs abusaient <strong>de</strong> leur pouvoir et humiliaient leurs soldats. 115<br />
En 1917, dans l’armée française, on peut constater encore un autre phénomène : les soldats<br />
ont mutiné, ils ont refusé l’obéissance. Cela est dû à l’échec <strong>de</strong> l’offensive du général Robert<br />
Georges Nivelle au Chemin <strong>de</strong>s D<strong>am</strong>es. Cette attaque a commencé le 16 avril 1917 et elle<br />
108<br />
cf. Walter Speyer, p.33<br />
109<br />
cf. http://pdl.warnerbros.com/wbol/fr/movies/un<strong>long</strong><strong>dimanche</strong>/uploads/<strong>long</strong>_<strong>dimanche</strong>_pedago.pdf<br />
(20/07/06), p.4<br />
110<br />
cf. Bach, André : Fusillés pour l’exemple, p.325<br />
111<br />
cf. <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>, film (03:58)<br />
112<br />
cf. <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>, film (11:13)<br />
113<br />
cf. http://pdl.warnerbros.com/wbol/fr/movies/un<strong>long</strong><strong>dimanche</strong>/uploads/<strong>long</strong>_<strong>dimanche</strong>_pedago.pdf<br />
(20/07/06), p.3<br />
114<br />
cf. <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>, film (1:33:21)<br />
115<br />
cf. Baggett, Blaine : 14-18, Le grand bouleversement, p.233<br />
24
était « <strong>de</strong>stinée à percer définitivement dans le front adverse ». 116 Fin avril, les Français<br />
comptaient 250 000 victimes, mais ils n’avaient gagné que 500 mètres <strong>de</strong> terrain. Néanmoins,<br />
cet échec n’était pas la seule cause pour les mutineries : Elles étaient aussi provoquées par les<br />
mauvaises conditions <strong>de</strong> vie, la mauvaise organisation <strong>de</strong>s permissions et les attaques <strong>de</strong><br />
positions imprenables. 117 Lors <strong>de</strong> cette « grève générale <strong>de</strong> l’armée française » 118 , <strong>de</strong>s unités<br />
complètes refusaient <strong>de</strong> retourner en première ligne. Ce comportement a abouti au<br />
remplacement <strong>de</strong> Nivelle par Philippe Pétain qui a mis fin aux mutineries en <strong>am</strong>éliorant la<br />
situation <strong>de</strong>s soldats, mais aussi en punissant les mutins : 3247 d’environ 30 000 à 40 000<br />
mutins étaient jugés par la justice militaire, 554 entre eux cond<strong>am</strong>nés à mort et 49 parmi eux<br />
finalement exécutés. 119<br />
3.4 Les années 20 – le <strong>de</strong>uil<br />
A la fin <strong>de</strong> la Gran<strong>de</strong> Guerre, entre 9 et 10 millions d’hommes y avaient trouvé la mort, entre<br />
eux, plus <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux millions d’Allemands, 1,3 millions <strong>de</strong> Français et 950 000 <strong>de</strong><br />
Britanniques. 120<br />
La guerre <strong>de</strong> 1914-1918 était une guerre tout à fait nouvelle. Le nombre <strong>de</strong>s mobilisés et la<br />
technique <strong>de</strong>s armes étaient d’une nouvelle <strong>am</strong>pleur. 121 Le fait que les soldats mouraient<br />
d’une autre façon entraînait aussi : Parfois mutilés jusqu’à être méconnaissable ou déchirés<br />
par les obus, il n’était plus possible d’i<strong>de</strong>ntifier les morts. 122 Dans certains cas même, les<br />
morts étaient déjà enterrés quand un bombar<strong>de</strong>ment détruisit les tombes et déchirait les<br />
cadavres. 123 Tout cela a entraîné un grand nombre <strong>de</strong> disparus. Pour leurs f<strong>am</strong>illes, le <strong>de</strong>uil<br />
sans corps et sans tombe individuelle était pratiquement impossible. Parfois il n’était même<br />
pas prouvé que le disparu soit vraiment mort. 124<br />
Le « Long <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong> » est en fait une histoire <strong>de</strong> <strong>de</strong>uil, « d’un <strong>de</strong>uil impossible,<br />
refusé. ». 125 Mathil<strong>de</strong>, le personnage principal, refuse d’admettre la mort <strong>de</strong> son fiancé. Bien<br />
qu’elle ait reçu l’acte <strong>de</strong> décès, elle est convaincue que « si Manech était mort, [elle] le<br />
116 Audoin-Rouzeau, Stéphane : Gran<strong>de</strong> Guerre, p.89<br />
117 cf. Baggett, Blaine : 14-18, Le grand bouleversement, p.241<br />
118 Audoin-Rouzeau, Stéphane : Gran<strong>de</strong> Guerre, p.90<br />
119 cf. Audoin-Rouzeau, Stéphane : Gran<strong>de</strong> Guerre, p.91<br />
120 cf. http://<strong>de</strong>.wikipedia.org/wiki/1._Weltkrieg#Verluste<br />
121 cf. Kursbuch Geschichte, p.230<br />
122 cf. http://www.revue-quasimodo.org/PDFs/9%20-%20HardierJagielski.pdf (02/03/07), p.79<br />
123 cf. Kühn, Karl : Großvater in Langemark (…). Frankfurter Rundschau (3/03/1990)<br />
124 cf. http://www.revue-quasimodo.org/PDFs/9%20-%20HardierJagielski.pdf (02/03/07), p.82sv,<br />
125 Bénévant, Christine, dossier, p.364<br />
25
saurait. ». 126 Donc, elle essaie obstinément <strong>de</strong> dévoiler ce qui s’est passé les premiers jours <strong>de</strong><br />
l’année 1917 au front <strong>de</strong> la Somme afin <strong>de</strong> prouver ses pressentiments. Mathil<strong>de</strong> commence<br />
une enquête et, comme les proches <strong>de</strong>s disparus après la guerre 127 , elle cherche le contact avec<br />
ceux qui ont vu son fiancé peu avant sa mort. Céléstin Poux, un <strong>de</strong>s c<strong>am</strong>ara<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Manech, se<br />
rend même avec elle à l’endroit où se trouvait jadis la tranchée « Bingo Crépuscule ». En<br />
réalité, cela a effectivement eu lieu. Surtout peu après la guerre, puisqu’il était défendu aux<br />
civilistes <strong>de</strong> pénétrer dans les secteurs <strong>de</strong> guerre, beaucoup <strong>de</strong> f<strong>am</strong>illes se sont rendues aux<br />
anciens ch<strong>am</strong>ps <strong>de</strong> bataille et aux cimetières militaires pour voir les tombes <strong>de</strong> leurs<br />
proches. 128 Mathil<strong>de</strong>, elle aussi, visite le cimetière militaire d’Her<strong>de</strong>lin où son avocat a<br />
découvert la tombe <strong>de</strong> Manech. 129<br />
Le <strong>de</strong>uil <strong>de</strong> Tina Lombardi, la fiancé du Corse, est d’une autre qualité : Après avoir découvert<br />
comment son Ange a trouvé la mort, son <strong>de</strong>uil tourne en haine et en désir <strong>de</strong> vengeance. Elle<br />
est imbue <strong>de</strong> la volonté <strong>de</strong> laisser souffrir tous ceux qui ont fait du mal à son fiancé. La jeune<br />
femme est tellement furieuse qu’elle est même prête à mourir pour rendre justice à son <strong>am</strong>ant.<br />
Dans « <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> » le <strong>de</strong>uil est traité d’une façon différente. Là, ce ne sont pas les proches,<br />
mais les c<strong>am</strong>ara<strong>de</strong>s qui doivent immédiatement surmonter le traumatisme <strong>de</strong> la mort <strong>de</strong> leurs<br />
copains. En même temps, ils doivent envisager leur propre mort. Jonathan, le jeune Écossais,<br />
re<strong>de</strong>vient un enfant face à la mort <strong>de</strong> son frère aîné : il renonce obstinément à accepter le<br />
décès <strong>de</strong> Willi<strong>am</strong>. Dans les lettres à sa mère, il ne mentionne pas que son frère est mort, tout<br />
au contraire, il invente ce qu’il écrit. 130 En essayant <strong>de</strong> l’enterrer le jour <strong>de</strong> <strong>Noël</strong>, c’est lui qui<br />
donne la première impulsion aux funérailles <strong>de</strong>s morts plus tard dans le film. 131 À ce moment<br />
précis dans « <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> » le spectateur peut apprécier la valeur <strong>de</strong> l’enterrement. Il<br />
constitue un nouveau lien entre les <strong>de</strong>ux c<strong>am</strong>ps adverses – le <strong>de</strong>uil unit même les ennemis.<br />
126 <strong>Un</strong> Long Dimanche <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>, film, (12:09)<br />
127 cf. http://www.revue-quasimodo.org/PDFs/9%20-%20HardierJagielski.pdf (02/03/07), p.85sv<br />
128 cf. http://www.revue-quasimodo.org/PDFs/9%20-%20HardierJagielski.pdf (02/03/07), p.88sv<br />
129 cf. <strong>Un</strong> Long Dimanche <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>, film (1:03:11)<br />
130 <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong>, film, (1:17:30)<br />
131 <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong>, film, (1:08:06)<br />
26
Cimetière <strong>de</strong> soldats à Verdun, 19/05/07 <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>, (1:10:06)<br />
En effet, l’enterrement est très important, même au front. Quoique le quartier général français<br />
ait réservé la tombe individuelle aux supérieurs militaires, les soldats ont enterré leurs<br />
c<strong>am</strong>ara<strong>de</strong>s dans <strong>de</strong>s tombes individuelles pour que leurs cadavres puissent être retrouvés et<br />
i<strong>de</strong>ntifiés après la guerre. Ce procédé a abouti à un changement <strong>de</strong> loi en novembre 1915. Dès<br />
lors, l’Etat français prévoit la sépulture individuelle aux frais <strong>de</strong> l’État pour chaque poilu. 132<br />
En 1919 l’État français a décidé d’enterrer, comme symbole, un soldat non i<strong>de</strong>ntifié sous l’arc<br />
<strong>de</strong> triomphe, nommé le « Soldat Inconnu », afin <strong>de</strong> donner un lieu <strong>de</strong> <strong>de</strong>uil à tous ceux dont le<br />
proche reste disparu. 133<br />
La tombe du soldat inconnu à Paris<br />
132 cf. http://www.revue-quasimodo.org/PDFs/9%20-%20HardierJagielski.pdf (02/03/07), p.83<br />
133 cf. http://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_du_soldat_inconnu<br />
27
VI. Conclusion<br />
Au cours <strong>de</strong>s analyses, il s’est révélé qu’il est impossible <strong>de</strong> juger les <strong>de</strong>ux réalisations en<br />
quelques phrases. Il faut bien distinguer les différents éléments présentés afin <strong>de</strong> pouvoir les<br />
évaluer <strong>de</strong> leur authenticité.<br />
Bien que les <strong>de</strong>ux films traitent du même événement historique, le rôle qu’il y joue est<br />
différent. « L’expression ‘film historique’ prise dans l’acceptation la plus large inclut à la fois<br />
<strong>de</strong>s films où l’histoire n’est qu’un prétexte, et ceux où elle est envisagée <strong>de</strong> façon plus<br />
sérieuse. L’histoire est, dans le premier cas, un cadre ou un simple décor, servant <strong>de</strong> toile <strong>de</strong><br />
fond à l’évocation et au récit ; dans le second cas elle <strong>de</strong>vient la matière et la substance même<br />
du film. » 134 On peut donc distinguer les <strong>de</strong>ux films en question <strong>de</strong> la façon suivante : Le<br />
« Long Dimanche <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong> » appartient à la première catégorie, les faits historiques<br />
servent <strong>de</strong> cadre à l’enquête <strong>de</strong> Mathil<strong>de</strong>. Mais ce cadre pourrait aussi être une autre guerre.<br />
« <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> » par contre traite d’un événement historique. Ici, l’histoire n’est pas seulement<br />
le cadre, mais la matière même du film. L’action montrée ne peut pas se dérouler à une autre<br />
époque ou à un autre lieu.<br />
Les <strong>de</strong>ux metteurs en scène, eux aussi, ont une approche différente <strong>de</strong> leur matière : Jean-<br />
Pierre Jeunet a mis en scène le roman du même nom <strong>de</strong> Sébastien Japrisot. Pour son livre,<br />
celui-ci a fait <strong>de</strong>s recherches pendant plusieurs années. Pour lui, il était important d’éviter <strong>de</strong>s<br />
anachronismes. 135 Jeunet n’avait donc qu’à assurer l’authenticité historique du décor <strong>de</strong> son<br />
film et non pas celle <strong>de</strong>s événements. Pour garantir par exemple l’authenticité <strong>de</strong>s scènes <strong>de</strong><br />
combat, il a pris modèle sur le film « Il faut sauver le soldat Ryan ». 136 Le cas <strong>de</strong> « <strong>Joyeux</strong><br />
<strong>Noël</strong> » est différent. Ici, c’était Christian Carion, le metteur en scène lui-même qui s’est<br />
occupé du scénario. Inspiré par le livre « Batailles <strong>de</strong> Flandres et d’Artois » d’Yves Buffetaut,<br />
il s’est décidé à faire un film sur les fraternisations <strong>de</strong> <strong>Noël</strong> 1914 au front occi<strong>de</strong>ntal. 137<br />
Carion ne <strong>de</strong>vait pas seulement vérifier l’authenticité <strong>de</strong> son décor, mais aussi la véracité <strong>de</strong><br />
son scénario.<br />
En gros, les <strong>de</strong>ux films suivent l’histoire telle qu’elle s’est vraiment passée. Au début du<br />
« Long <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong> » par exemple, <strong>de</strong>s soldats africains blessés traversent<br />
l’écran. 138 Là, il s’agit d’un fait historique : La France et la Gran<strong>de</strong> Bretagne ont mobilisé<br />
134<br />
Nacache, Jacqueline (Hrsg.) : L’analyse <strong>de</strong> film en question. Paris 2006, p.173<br />
135<br />
cf. Bénévant, Christine: dossier dans Japrisot, Sébastien: <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>. o.O., p.358<br />
136<br />
cf. audiocommentaire Jeunet, 09:57<br />
137<br />
cf. http://<strong>de</strong>.wikipedia.org/wiki/Merry_Christmas_%28Film%29, 26/04/07<br />
138<br />
cf. <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>, film (13:30)<br />
28
eaucoup <strong>de</strong> soldats <strong>de</strong> leurs colonies pour la guerre. 139 Le film montre également le<br />
déroulement <strong>de</strong>s attaques <strong>de</strong> façon réaliste. Par le récit <strong>de</strong> Céléstin Poux, les sentiments d’un<br />
soldat pendant une attaque d’artillerie peuvent être ressentie par le spectateur. 140<br />
Pourtant, on peut constater <strong>de</strong>s anachronismes et certains détails <strong>de</strong>s films qui ne<br />
correspon<strong>de</strong>nt pas à la guerre selon les sources historiques : Au début du « Long <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong><br />
<strong>fiançailles</strong> », les tranchées et les soldats sont montrés <strong>de</strong> façon réaliste, mais la voix off d’une<br />
femme et la musique plutôt romantique peuvent être considérés comme <strong>de</strong>s euphémismes. Ils<br />
donnent une allure nostalgique à la scène, ce qui est, à mon avis, absolument inadéquat vu la<br />
situation <strong>de</strong>s cond<strong>am</strong>nés. 141 Bien que Jeunet ait sciemment changé la neige dans le roman<br />
contre la boue pour ne pas évoquer une image trop douce 142 , il fait juste le contraire en<br />
ajoutant cette musique.<br />
Le début <strong>de</strong> « <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> » convient mieux à la situation. Les trois garçons dans les salles <strong>de</strong><br />
classes représentent <strong>de</strong> manière réaliste l’endoctrinement <strong>de</strong>s enfants à l’école. Puis, le<br />
travelling <strong>de</strong> la c<strong>am</strong>era à travers l’Écosse est une introduction réussie du film. Aussi,<br />
l’enthousiasme du jeune Écossais Willi<strong>am</strong> vis-à-vis <strong>de</strong> la guerre déclenchée reflète la réalité<br />
en 1914. Mais Christian Carion, lui aussi, ne suit pas toujours la réalité historique : L’attitu<strong>de</strong><br />
face à la guerre <strong>de</strong>s personnages principaux n’est pas représentative : Seuls les <strong>de</strong>ux frères<br />
écossais sont heureux. 143 En réalité, une gran<strong>de</strong> partie du peuple était enthousiaste face à la<br />
guerre. 144 Dans les <strong>de</strong>ux films, cet enthousiasme semble être un phénomène singulier. Je<br />
pense que les réalisateurs ne montrent que très peu la joie vis-à-vis <strong>de</strong> la guerre parce qu’elle<br />
semble abominable aujourd’hui.<br />
Tôt ou tard, les <strong>de</strong>ux réalisateurs glissent dans <strong>de</strong>s exagérations : Jeunet construit un lazaret<br />
dans un hangar d’un zeppelin 145 dont il dit lui-même : « (...) Nur die Explosion <strong>de</strong>s Zeppelins<br />
habe ich erfun<strong>de</strong>n. So blöd war d<strong>am</strong>als keiner, ein Lazarett unter einem mit Wasserstoff<br />
gefüllten Luftschiff einzurichten. Aber <strong>de</strong>r explodieren<strong>de</strong> Zeppelin machte einen schönen<br />
Effekt. » 146 [« Je n’ai inventé que l’explosion du zeppelin. Autrefois, il n’y avait personne <strong>de</strong><br />
si bête d’installer un hôpital sous un aéronef plein d’hydrogène. Mais le zeppelin explosant<br />
faisait un joli effet. »]. Jeunet s’adapte donc plutôt aux données du cinéma <strong>am</strong>éricain qu’à la<br />
véracité historique. Christian Carion, quant à lui exagère au moment où il décrit les<br />
139 cf. Audoin-Rouzeau, Stéphane: Gran<strong>de</strong> Guerre, p.78<br />
140 cf. <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong> (film), (1:20:07)<br />
141 cf. <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong> (film), 02:16sv.<br />
142 cf. Audio commentaire <strong>de</strong> Jean-Pierre Jeunet 10:52<br />
143 cf. <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> (film), 4 :10<br />
144 cf. Walter Speyer, p.2sv<br />
145 cf. <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong> (film), 1:51:34<br />
146 http://www.tagesspiegel.<strong>de</strong>/kultur/in<strong>de</strong>x.asp?gotos=http://archiv.tagesspiegel.<strong>de</strong>/toolboxneu.php?ran=on&url=http://archiv.tagesspiegel.<strong>de</strong>/archiv/26.01.2005/1611550.asp#art<br />
(17/09/2006)<br />
29
fraternisations : Il ne montre pas la situation telle qu’elle s’est vraiment passée dans un<br />
secteur particulier du front occi<strong>de</strong>ntal, mais une somme <strong>de</strong> différents actes <strong>de</strong> fraternisation.<br />
Ainsi, il crée un tel « ensemble » entre les ennemis que les scènes qui ont pour la plupart<br />
vraiment eu lieu, paraissent irréalistes et exagérés au spectateur.<br />
Quant aux fraternisations, le metteur en scène <strong>de</strong> « <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> » surprend en montrant <strong>de</strong>s<br />
personnages principaux parlant parfaitement les langues étrangères : Le lieutenant français<br />
parle l’anglais presque sans accent et le supérieur allemand ainsi qu’Anna et Sprink parlent<br />
français et anglais. 147 Bien que l’on ait déjà enseigné les langues étrangères en 1914 et bien<br />
avant, il est quand même très improbable que les personnages les parlent avec une telle<br />
perfection.<br />
Mais le point le plus contestable, c’est l’introduction <strong>de</strong> la chanteuse Anna Sörensen : En<br />
premier lieu, son rôle est une invention du metteur en scène, il n’est pas vraisemblable qu’une<br />
femme ait eu accès au front, et surtout aux premières lignes. De plus, elle n’est même pas<br />
Alleman<strong>de</strong> mais Danoise. A mon avis, son rôle est absolument superflu. Le personnage<br />
d’Anna ne contribue rien à l’histoire, mais au contraire il nuit à la crédibilité <strong>de</strong> l’histoire. En<br />
outre, elle expose son compagnon et le lieutenant français au danger : en convaincant le<br />
premier <strong>de</strong> déserter et <strong>de</strong> se faire prisonnier français, et en poussant le <strong>de</strong>rnier dans la situation<br />
où il est contraint d’expliquer à ses supérieurs la présence incompréhensible <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux<br />
Allemands dans ses lignes. 148<br />
En ce qui concerne la musique, il faut constater qu’elle embellisse le sujet. La musique d’un<br />
caractère avant tout mélancolique et romantique <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux documents dresse un tableau plutôt<br />
nostalgique <strong>de</strong> la guerre.<br />
En revanche, il faut se rappeler que les <strong>de</strong>ux films sont <strong>de</strong>stinés au grand écran et ne peuvent<br />
pas être considérés comme <strong>de</strong>s documentaires. Bien qu’ils se servent d’un arrière-plan<br />
historique et que « <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> » se permette même le sous-titre « Décembre 1914. <strong>Un</strong>e<br />
histoire vraie que l’Histoire a oublié », les <strong>de</strong>ux films sont avant tout conçus pour attirer un<br />
grand public et pour distraire. Les films ne peuvent et ne veulent pas remplacer un<br />
documentaire sérieux ou une source littéraire. En même temps, ils ont un avantage vis-à-vis<br />
d’autres sources : Ils visualisent les souffrances et privations <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong> tous les jours d’un<br />
soldat au front. Sur le plan émotionnel, les films réussissent à approcher le spectateur <strong>de</strong> la<br />
situation historique puisqu’il peut s’i<strong>de</strong>ntifier avec les personnages. De plus, un grand nombre<br />
<strong>de</strong> spectateurs se voit confronté à cette époque historique et au <strong>de</strong>stin <strong>de</strong>s hommes <strong>de</strong> ce<br />
temps-là.<br />
147 cf. <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> (film), 49:40 & 1:09:40<br />
148 cf. <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> (film), 1:26:00<br />
30
En conclusion, je dirais que tout en tenant compte du fait que « <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> » et « <strong>Un</strong> <strong>long</strong><br />
<strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong> » ne représentent pas toujours la réalité historique, ils sont - dans le<br />
cadre d’un <strong>long</strong> métrage - chacun à sa manière, bien appropriés à fournir une première<br />
approche à la guerre <strong>de</strong> 1914-1918 au grand public. Tandis que « <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> » convainc<br />
surtout par la vraisemblance <strong>de</strong>s fraternisations quoiqu’il per<strong>de</strong> dans la mesure où il introduit<br />
la chanteuse danoise, le « Long <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong> » visualise la violence crue <strong>de</strong> la<br />
Gran<strong>de</strong> Guerre et p<strong>long</strong>e le spectateur directement dans le combat. Même si l’enquête <strong>de</strong> la<br />
jeune Mathil<strong>de</strong> est fictive et que le film glisse dans la nostalgie en se servant <strong>de</strong>s couleurs<br />
sépia, l’histoire semble avoir pu se dérouler <strong>de</strong> cette façon.<br />
31
Sources littéraires :<br />
VII. Bibliographie<br />
Audoin-Rouzeau, Stéphane et Becker, Annette : La Gran<strong>de</strong> Guerre 1914-1918. o.O.,<br />
Gallimard 1998<br />
Audoin-Rouzeau, Stéphane et Becker, Annette : 14-18, retrouver la Guerre. o.O., Editions<br />
Gallimard 2000<br />
Ausbüttel, Frank u.a.: Grundwissen Geschichte. Aachen 2003<br />
Bach, André : Fusillés pour l’Exemple, 1914-1915. Paris 2003<br />
Bénech, Géraud et Loiseau, Laurent (Hrsg.) : Carnets <strong>de</strong> Verdun. Paris 2006<br />
Bénévant, Christine: dossier dans Japrisot, Sébastien: <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>. o.O.,<br />
Editions Gallimard, 2004<br />
Baggett, Blaine et Winter, Jay : 14-18, Le grand bouleversement. Presses <strong>de</strong> la cité, 1997<br />
Erdmann, Karl Dietrich : Der erste Weltkrieg, Handbuch <strong>de</strong>r Deutschen Geschichte Bd. 18.<br />
München 6 1986<br />
Fayolle, Marie-Émile : Cahiers secrets <strong>de</strong> la Gran<strong>de</strong> Guerre, annotés par Henry Cont<strong>am</strong>ine.<br />
Paris 1964<br />
Frémy, Dominique et Frémy, Michèle : Quid 2001. Paris 2000<br />
Guéno, Jean-Pierre : 1914-1918, Mon papa en guerre. Paris 2005 (erstmals 2004)<br />
Guéno, Jean-Pierre et Laplume, Yves. (Hrsg.) : Paroles <strong>de</strong> Poilus. Paris 2004 (erstmals<br />
1998)<br />
Japrisot, Sébastien : <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>. o.O., Editions Denoël 1991<br />
Jäger, Dr. Wolfgang (u.a.) : Kursbuch Geschichte, Von <strong>de</strong>r Antike bis zur Gegenwart.<br />
Rheinland-Pfalz, Berlin 2001<br />
Kühn, Karl : Großvater in Langemark, Eine Reise zu <strong>de</strong>n Soldatenfriedhöfen <strong>de</strong>s ersten<br />
Weltkriegs. Frankfurter Rundschau, (03/03/1990)<br />
La Gran<strong>de</strong> Guerre vue par les artistes et les écrivains (1914-1918). Paris 2006<br />
Geschichte und Geschehen : Rheinland-Pfalz, Saarland. Bd.3, Stuttgart 1997<br />
Nacache, Jacqueline (Hrsg.) : L’analyse <strong>de</strong> film en question. Paris 2006<br />
Speyer, Dr. Walter: Erinnerungen, Berichte und Briefe. Sta<strong>de</strong> 1985<br />
Speyer, Miri<strong>am</strong>: <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong> - Le livre et sa réalisation par Jean-Pierre<br />
Jeunet. Kaiserslautern 2006<br />
32
Sources sur l’Internet :<br />
http://pdl.warnerbros.com/wbol/fr/movies/un<strong>long</strong><strong>dimanche</strong>/uploads/<strong>long</strong>_<strong>dimanche</strong>_pedago.p<br />
df (20/07/2006)<br />
http://www.tagesspiegel.<strong>de</strong>/kultur/in<strong>de</strong>x.asp?gotos=http://archiv.tagesspiegel.<strong>de</strong>/toolbox-<br />
neu.php?ran=on&url=http://archiv.tagesspiegel.<strong>de</strong>/archiv/26.01.2005/1611550.asp#art<br />
(17/09/2006)<br />
http://www.merrychristmas-<strong>de</strong>rfilm.<strong>de</strong>/downloads/mc_begleitmaterial.pdf (29/12/2006)<br />
http://www.revue-quasimodo.org/PDFs/9%20-%20HardierJagielski.pdf (02/03/2007)<br />
http://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_du_soldat_inconnu (26/04/2007)<br />
http://<strong>de</strong>.wikipedia.org/wiki/Merry_Christmas_%28Film%29, (26/04/2007)<br />
Autres sources :<br />
Carion, Christian : <strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong>. France 2005, DVD<br />
Die Hölle von Verdun. ZDF, Deutschland 2006, DVD<br />
Imperial War Museum, Londres<br />
Jeunet, Jean-Pierre : <strong>Un</strong> <strong>long</strong> <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong>. France 2003, DVD<br />
Mémorial <strong>de</strong> Verdun<br />
Images sur le frontispice :<br />
<strong>Joyeux</strong> <strong>Noël</strong> :<br />
http://www.dvdlive.be/images/large/512/joyeux_noel_01.jpg (01/07/2007)<br />
Long <strong>dimanche</strong> <strong>de</strong> <strong>fiançailles</strong> :<br />
http://cinemasansfrontieres.free.fr/spip/IMG/jpg/un_<strong>long</strong>_<strong>dimanche</strong>_aff.jpg<br />
(01/07/2007)<br />
33
VIII. Selbstständigkeitserklärung<br />
Hiermit erkläre ich, Miri<strong>am</strong> Speyer, dass ich diese Beson<strong>de</strong>re Lernleistung selbstständig und<br />
nur unter Zuhilfenahme <strong>de</strong>r angegebenen Quellen angefertigt habe.<br />
Otterbach, <strong>de</strong>n 5. Juli 2007<br />
Miri<strong>am</strong> Speyer<br />
34