Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
- 318 -<br />
un prestige et une autorité sociale, sinon religieuse, sur la collectivité.<br />
Le grand archer masqué et drapé de Djerat vers lequel se tendent,<br />
de bas en haut deux mains me paraît en être un bon exemple (fig. 70, nO 1<br />
et photo 60)<br />
La sexual i té, très affi rmée, apres aVOI r accru la pUIssance de la<br />
communauté, a pu compenser par la bestialité les pertes occasionnées au<br />
monde animal et permettre de s'imposer à lui. Les accouplements de femmes<br />
consentantes avec des zoomorphes ont pu exprimer des désirs de fusion<br />
entre les deux mondes, s'il est vrai que "le chasseur archaïque vivait<br />
dans une symbiose mystique avec les animaux qu' il chassait, les reconnaissait<br />
comme leur frère ou leur parent" (Eliade, 1973).<br />
Le faible niveau industriel de l'outillage trouvé dans les habitats<br />
de Chasseurs pourrait avoir été une conséquence de la mobilité qui, chez<br />
les Pygmées actuels, donne priorité à la vannerie et aux objets de cuir.<br />
Rôle psychique et social des figurations rupestres<br />
On a vu les mobiles variés ayant motivé les oeuvres des Chasseurs :<br />
scènes à but ou comportement magique ; rappel de drames vécus ou de hauts<br />
faits du clan; images personnalisées de fauves dont on voulait soit<br />
neutraliser la malveillance, soit compenser la mort; recherche de la<br />
protection par la minimisation des chasseurs devant les éléphants de<br />
Mathendous à l'oeil tracé au double contour, ou au contraire souvent<br />
omis à Djerat et au Tibesti.<br />
L'art rupestre a ainsi répondu aux préoccupations de groupes dont<br />
les oeuvres les plus significatives sont concentrées en quelques hautslieux:<br />
dans l'aire du <strong>Nil</strong>, Korosko, Abka, Gorgod ; au Tibesti, Gonoa ;<br />
au <strong>Sahara</strong> central, Djerat et le Messak Settafet (Mathendous) ; au Hoggar,<br />
Oufêké et Edj idj. Ces hauts lieux furent le siège de cérémonies et de<br />
pratiques rituelles concernant ensemble le monde des hommes et celui des<br />
fauves. Et ceux qui les présidaient durent être les premiers intéressés à<br />
la création d'oeuvres durables qui, pour de nombreuses générations,<br />
furent au coeur des rassemblements où les collectivités concernées<br />
affirmaient leur identité.<br />
Ces réunions et leur cadre parfois impressionnant ont été de nature<br />
à susciter les fortes impulsions et le climat psychique conduisant à la<br />
création d'oeuvres devenues un patrimoine moral commun. Mais l'émergence<br />
d'artistes inspirés, conscients de leur rôle et maîtres de leurs moyens,<br />
voués à la diffusion d'un art naturaliste unifié, reste encore sans<br />
explication satisfaisante, sauf peut être à Gonoa (Tibesti) où la<br />
présence de pierres maniables portant des gravures ébauchées dans les<br />
habitats au pied des falaises, peut faire penser à des essais, qui ont pu<br />
aussi avoir eu des supports périssables.<br />
L'initiation et sa valeur sociale<br />
"Les Chasseurs préhistoriques ne pouvaient aff ronter des ammaux<br />
souvent terrifiants sans une stimulation rituelle capable à la fois de<br />
les aider à dominer leur peur instinctive des fauves et de leur enseigner<br />
les attitudes les plus favorables à l'approche et à l'attaque de ces<br />
monstres. .. L' initiation était un apprentissage du contrôle des<br />
émotions du chasseur tout autant que des techniques de chasse, un<br />
entraînement intérieur et extérieur des néophytes" (R.Allier, E.U.,<br />
10,p.300).<br />
La magie et des manifestations plastiques comme les danses rythmées<br />
furent un bon moyen psychologique pour inculquer à de jeunes chasseurs<br />
les éléments de leur formation, peut être en milieu fermé comme les