ELOGE DU VIDE - Le Carré Bleu

Vides urbains - Vides architecturaux
Différents degrés de vides spatiaux
émergents se créent, de la sphère architecturale
privée de la chambre et du patio,
aux espaces résiduels des banlieues, en
passant par la sphère publique de la rue, de
la place, de l'avenue, du parc. Le fil qui tisse
la toile urbaine n'est pas l'espace plein
mais plutôt le tracé du vide : la structure de
la voirie rend possible la communication à
travers les espaces publics des rues, boulevards,
places, avenues, qui se forment à partir
des masses édifiées de blocs, de murs, d'îlots
qui définissent les contours d'absence des
vides urbains.
La définition formelle des enceintes vides
des places urbaines résulte de la rencontre
des opérations typologiques – visant
à délimiter, à contenir complètement ou partiellement
l'espace, à modeler topographiquement,
en relation avec la compréhension
du lieu – et des opérations géométriques de
tracé dans lesquelles s'insèrent les présences
édifiées qui donnent forme à l'espace.
Dans le tissu urbain de la cité-Etat grecque,
le vide devient protagoniste de l'espace
public ouvert et vaste, multi et méta-fontionnel
de l'agora – centre civique, lieu public
de rencontre, marché, assemblée, lieu
de circulation philosophique et de divertissement
– entouré et modelé par la scénographie
architecturale, le vide des galeries
de portiques des stoa, temples et bâtiments
publics.
Dans la culture occidentale, l'héritage
de l'agora donne naissance, dans la cité romaine,
au forum, et la place, dans ses mul-
tiples expressions typologiques et morphologiques
au cours du processus historique médiéval,
de la Renaissance, baroque, classique
puis moderne, correspond à la présence
du vide signifiant, entendu comme l'espace
public par excellence, au sein de la
structure et de la hiérarchie des tracés urbains.
Le vide s'installe aussi dans la sphère urbaine
et métropolitaine du mouvement moderne,
proposée par Le Corbusier avec la Ville
Radieuse pour Paris et dans la fameuse
Carte d'Athènes (1941) qui énonce les fondements
d'une nouvelle organisation de
l'espace et de la société, en élargissant la
sphère de la ville à la planification du territoire,
dans laquelle l'espace urbain abandonne
l'image de la rue et de l'îlot traditionnel
et commence à être conçu en fonction de
systèmes de voirie rapides et du zoning
fonctionnel des blocs isolés insérés dans les
espaces libres en jardin.
La conception urbanistique exprimée
dans la Relation du Plan-Pilote de Brasilia
(1957) 43 , pour la fondation de la nouvelle capitale
brésilienne, se base sur des principes
géométriques, urbains, sociaux et politiques,
ayant pour objectif de résoudre les fonctions
vitales de la ville moderne. Lucio Costa
énonce dans une synthèse holistique les
concepts fondamentaux de la solution inspirée
qui lui « apparut, pour ainsi dire, toute
prête », à travers seize esquisses schématiques
qui définissent le tracé général et le caractère
particulier de chaque zone, et de
vingt-trois principes urbanistiques qui contemplent
le projet d'un art de vivre social
quotidien appréciable ; une solution inten-
27