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L'agroécologie, une solution pour l'agriculture au Nord et au Sud ?

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<strong>au</strong>xquels sont confrontés nos sociétés ? l’agriculture en<br />

est un. En face de la paysannerie, il y a des sociétés très<br />

importantes, les firmes de l’agro-industrie connectées à<br />

celles des biotechnologies <strong>et</strong> à l’industrie pharmaceutique.<br />

Je ne sais pas qui va gagner, je sais qu’il y a ce rapport<br />

de force <strong>et</strong> que nos sociétés doivent être conscientes<br />

qu’elles sont à un tournant, qu’il y a là un choix de société<br />

fondamental <strong>pour</strong> l’avenir. Il f<strong>au</strong>t donc appuyer tous les<br />

endroits où émergent ces rapports de force favorables à<br />

des agricultures paysannes <strong>et</strong> à la nourriture – je préfère<br />

ce terme à celui d’alimentation – je pense que c’est très<br />

important. Le rapport de forces est très inégal, mais il y<br />

a quand même plus de paysans que de multinationales. A<br />

certains endroits, des territoires sont gagnés, je citerai un<br />

exemple <strong>au</strong> Brésil : les agrovillages sont des endroits qui<br />

ont été récupérés par les sans terre avec des villages, des<br />

coopératives, <strong>et</strong>c. Ces gens, parce qu’ils avaient en tête<br />

le schéma dominant de l’agriculture industrielle, se sont<br />

d’abord lancés dans c<strong>et</strong>te voie, mais p<strong>et</strong>it à p<strong>et</strong>it ils ont pris<br />

conscience qu’ils étaient en train de détruire leur sol alors<br />

qu’ils n’avaient que celui-là, alors ils ont commencé à<br />

m<strong>et</strong>tre en place de l’agroécologie, de l’agroforesterie, <strong>et</strong>c.<br />

Désormais, ce sont des lieux d’expérimentation in vivo<br />

<strong>et</strong> à long terme d’agroécologie où les gens vivent ainsi<br />

depuis dix ou quinze ans <strong>et</strong> vivent bien. J’y ai même entendu<br />

<strong>une</strong> femme me dire qu’elle n’avait jamais été <strong>au</strong>ssi<br />

heureuse de sa vie. C’était <strong>une</strong> paysanne qui avait occupé<br />

des terres pendant dix ans <strong>et</strong> qui vit maintenant dans un<br />

agrovillage. Donc on peut changer les rapports de force ;<br />

eux, ils ont réussi à le faire. Donc c’est faisable, mais il<br />

f<strong>au</strong>t que nous réfléchissions <strong>au</strong>ssi chez nous, la réforme<br />

agraire n’est pas forcément réservée <strong>au</strong>x pays du <strong>Sud</strong>.<br />

Pourquoi, ici, les meilleures terres, celles de la Be<strong>au</strong>ce ou<br />

de votre région, sont-elles entre les mains de gens dont<br />

on sait pertinemment qu’ils vont les détruire, alors que<br />

les gens qui font des expérimentations <strong>pour</strong> s<strong>au</strong>ver la biodiversité,<br />

on leur donne des terres marginales, des subventions<br />

marginales ? Là <strong>au</strong>ssi ce sont des exemples sur<br />

lesquels on peut réfléchir. J’essaie de pointer les enjeux,<br />

mais l’opinion doit <strong>au</strong>ssi agir, surveiller ce qu’on fait de<br />

notre territoire par exemple. Le maire de Loos en Gohelle<br />

disait ce matin que la ville récupérait quinze hectares<br />

<strong>pour</strong> essayer de produire <strong>au</strong>trement, c’est un début, mais<br />

je trouve ça très bien. Si les gens partout s’interrogent sur<br />

le sol qui les entoure <strong>et</strong> ce qu’on est en train d’en faire :<br />

<strong>une</strong> nouvelle <strong>au</strong>toroute ? Un nouve<strong>au</strong> centre commercial ?<br />

Alors les choses commenceront à bouger. C<strong>et</strong>te réflexion<br />

doit être menée partout concrètement, localement <strong>et</strong> à<br />

tous les nive<strong>au</strong>x.<br />

Pascale LEROY, CCFD Terre Solidaire :<br />

Les consommateurs peuvent agir, par exemple <strong>au</strong> travers<br />

des campagnes que mène le CCFD, comme « l’Europe<br />

plume l’Afrique » par rapport <strong>au</strong> poul<strong>et</strong>, ou celle<br />

contre Total. Ces campagnes perm<strong>et</strong>tent de faire pression,<br />

mais il f<strong>au</strong>t <strong>au</strong>ssi en savoir davantage <strong>pour</strong> pouvoir agir<br />

mieux, <strong>et</strong> partager c<strong>et</strong>te information afin d’être plus efficace<br />

<strong>et</strong> de ne pas agir seul chacun de son côté.<br />

36<br />

Intervention dans la salle :<br />

Be<strong>au</strong>coup de pouvoir tient dans la main de chacun, on<br />

est citoyen, consommateur <strong>et</strong> responsable. En faisant des<br />

choix à chaque fois qu’on fait ses courses, on peut orienter<br />

le débat : si chaque citoyen dans sa comm<strong>une</strong> allait<br />

solliciter les élus <strong>pour</strong> souhaiter la création d’<strong>une</strong> Amap,<br />

est-ce que ça participerait de ce changement de direction ?<br />

Siliva PEREZ-VITORIA :<br />

Je suis un peu embarrassée. Je suis très critique visà-vis<br />

de la notion de consommateur. Parler de consommateurs,<br />

c’est réduire les gens à l’acte d’achat, <strong>et</strong> ça me<br />

gêne de réduire les gens à <strong>une</strong> catégorie économique. Guy<br />

Debord disait que le consommateur est acteur d’<strong>une</strong> pièce<br />

de théâtre qu’il n’a pas écrite. C’est <strong>une</strong> bonne définition,<br />

puisque la consommation est un choix dans lequel très<br />

souvent vous n’avez pas l’ensemble des éléments qui<br />

amènent à ce choix. On ne peut agir dans ce cas que sur un<br />

choix prédéterminé. Je ne veux pas faire ici d’équivalence<br />

entre aller dans <strong>une</strong> Amap <strong>et</strong> aller dans <strong>une</strong> grande surface,<br />

manger bio ou manger conventionnel, bien sûr ce n’est<br />

pas pareil. Mais je ne pense pas que ce soit le moteur du<br />

changement. Le moteur du changement est be<strong>au</strong>coup plus<br />

global, il implique de prendre en compte la totalité des<br />

éléments qui concourent <strong>au</strong> fait que vous n’avez parfois,<br />

<strong>pour</strong> des raisons économiques, le choix qu’entre ach<strong>et</strong>er<br />

<strong>au</strong> supermarché <strong>et</strong> ach<strong>et</strong>er <strong>au</strong> supermarché. Les gens les<br />

plus p<strong>au</strong>vres achètent <strong>au</strong> supermarché parce qu’ils ont<br />

moins d’argent, c’est vrai, c’est meilleur marché, s<strong>au</strong>f que<br />

le prix du supermarché n’a rien à voir avec le vrai prix.<br />

Le prix du supermarché vous le payez trois fois : vous ne<br />

payez pas cher en magasin, mais vous payez par ailleurs<br />

<strong>pour</strong> toutes les subventions que reçoit l’ensemble du secteur<br />

qui produit <strong>pour</strong> le supermarché à travers les impôts,<br />

vous payez les conséquences que cela a <strong>pour</strong> votre santé à<br />

travers la Sécurité sociale, <strong>et</strong> vous payez les conséquences<br />

<strong>pour</strong> l’environnement par exemple à travers votre facture<br />

d’e<strong>au</strong>. La consommation s’arrête <strong>au</strong> seuil du problème,<br />

donc je pense que renvoyer les gens à leur individualité<br />

en tant que consommateurs ne suffit pas.<br />

Didier FINDINIER :<br />

Je voudrais amplifier ces propos en les localisant sur<br />

mon territoire. Je suis agriculteur bio depuis 25 ans. Pendant<br />

20 ans, je me suis marginalisé par ma démarche solitaire,<br />

<strong>et</strong> depuis j’ai découvert les concepts d’agroécologie<br />

<strong>et</strong> d’agroforesterie. Parallèlement depuis que j’essaie<br />

ces méthodes, a grandi en moi le besoin d’aller vers mes<br />

voisins <strong>et</strong> de créer <strong>une</strong> économie villageoise, de m’appuyer<br />

sur les racines, c’est-à-dire recréer ce qui existait<br />

il n’y a même pas un siècle, ce qui a disparu il y a 70<br />

ans. J’ai connu des vieux qui m’ont raconté qu’à leur mariage<br />

leurs costumes avaient été faits dans leur village,<br />

on a l’impression que ça n’a jamais existé, mais le travail<br />

avec les chev<strong>au</strong>x, tout cela, ce n’est pas très ancien même<br />

si notre génération ne le connaît pas. J’essaie par mon<br />

expérience de tendre la main <strong>au</strong>x agriculteurs tendance<br />

FNSEA. Nous avons la chance en quelque sorte d’être<br />

sur un territoire un peu difficile où il pleut be<strong>au</strong>coup, où

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