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DOSSIER DE PRESSE<br />
PRIX DES AMÉRIQUES INSULAIRES<br />
Sixième Édition Gua<strong>de</strong>loupe Haïti<br />
Du 7 au 20 juin <strong>2010</strong><br />
Association <strong>Prix</strong> <strong>de</strong>s <strong>Amériques</strong> insulaires et <strong>de</strong> la Guyane<br />
Le Maud’huy - Sainte-Marthe - 97118 Saint-François<br />
Relations <strong>Presse</strong><br />
Véronique CIREDECK – I Com Icône<br />
Tél : 0690 36 01 01 – 0590 32 11 18 / Fax : 0590 32 11 62<br />
e.mail : i.com.icone@orange.fr <br />
Sommaire<br />
Sommaire______________________________________________________________________________ 2<br />
Note <strong>de</strong> présentation_____________________________________________________________________ 3<br />
Programme général <strong>de</strong>s rencontres ________________________________________________________ 4<br />
• Rencontres avec <strong>le</strong> public _________________________________________________________________ 4<br />
Programme <strong>de</strong> la rési<strong>de</strong>nce _______________________________________________________________ 5<br />
• Rencontres privées _______________________________________________________________________ 5<br />
Liste <strong>de</strong>s ouvrages référencés_____________________________________________________________ 6<br />
• Ecrivains en rési<strong>de</strong>nce à la Gua<strong>de</strong>loupe | 7 - 20 juin <strong>2010</strong>________________________________________ 6<br />
Biographies <strong>de</strong>s écrivains invités __________________________________________________________ 7<br />
• Dany Laferrière __________________________________________________________________________ 7<br />
• Kettly Mars ______________________________________________________________________________ 9<br />
• Jean-Euphe<strong>le</strong> Milcé ______________________________________________________________________ 10<br />
• Gisè<strong>le</strong> Pineau ___________________________________________________________________________ 11<br />
• Léone Ross ____________________________________________________________________________ 13<br />
• Evelyne Trouillot ________________________________________________________________________ 14<br />
• Lyonel Trouillot _________________________________________________________________________ 16<br />
• Marcio Veloz Maggiolo ___________________________________________________________________ 18<br />
Bilan <strong>de</strong> l’édition 2008___________________________________________________________________ 19<br />
Annexes ______________________________________________________________________________ 23<br />
Témoignages recueillis suite au séisme survenu en Haïti <strong>le</strong> 12 janvier <strong>2010</strong> ______________________ 23<br />
Informations pratiques et contacts ________________________________________________________ 46<br />
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Note <strong>de</strong> présentation<br />
Le séisme du 12 janvier nous amène à modifier l’esprit et <strong>le</strong> contenu <strong>de</strong> la sixième édition du <strong>Prix</strong> <strong>de</strong>s<br />
<strong>Amériques</strong> insulaires, prévue en juin <strong>2010</strong>.<br />
Pour mémoire, dans <strong>le</strong> projet initial, la manifestation <strong>de</strong>vait renforcer sa vocation à privilégier la relation avec la<br />
Caraïbe littéraire. Les différentes esca<strong>le</strong>s prévues à Saint-Domingue, en Haïti et en Martinique, avant <strong>le</strong> ren<strong>de</strong>zvous<br />
biennal à la Gua<strong>de</strong>loupe, témoignaient <strong>de</strong> cette volonté <strong>de</strong> rencontre et d’ouverture aux territoires<br />
romanesques du bassin caribéen.<br />
La réf<strong>le</strong>xion menée après la catastrophe avec <strong>le</strong>s membres du Jury, présidé par Dany Laferrière, <strong>le</strong>s acteurs et<br />
<strong>le</strong>s partenaires <strong>de</strong> la manifestation en Gua<strong>de</strong>loupe et en Haïti a permis <strong>de</strong> concevoir, selon un ca<strong>le</strong>ndrier<br />
modifié, un nouveau programme soucieux d’apporter un témoignage <strong>de</strong> fraternité aux écrivains haïtiens et <strong>de</strong><br />
contribuer avec mo<strong>de</strong>stie à la renaissance <strong>de</strong> l’activité culturel<strong>le</strong> à laquel<strong>le</strong> aspire <strong>le</strong> pays.<br />
Au <strong>le</strong>n<strong>de</strong>main du séisme, ces écrivains haïtiens ont <strong>le</strong>s premiers permis au mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> comprendre l’amp<strong>le</strong>ur du<br />
désastre. C’est dire combien <strong>le</strong>s médias, en particulier la presse écrite, avaient la conviction <strong>de</strong> l’importance <strong>de</strong><br />
<strong>le</strong>ur paro<strong>le</strong>, <strong>de</strong> la pertinence <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur regard sur la catastrophe mais aussi sur Haïti. Ce sont ces écrivains que<br />
nous souhaiterions mettre à l’honneur en organisant en Gua<strong>de</strong>loupe, en juin, saison traditionnel<strong>le</strong>ment dédiée à<br />
la tenue du <strong>Prix</strong> <strong>de</strong>s <strong>Amériques</strong> insulaires, une rési<strong>de</strong>nce d’écriture qui serait éga<strong>le</strong>ment pour eux l’occasion<br />
d’échanger avec tous <strong>le</strong>s publics.<br />
Ce premier ren<strong>de</strong>z-vous, du 7 au 20 juin, <strong>de</strong> la Gua<strong>de</strong>loupe avec l’écriture haïtienne servirait <strong>de</strong> phare et <strong>de</strong><br />
relais, à la secon<strong>de</strong> partie, probab<strong>le</strong>ment fin novembre, début décembre, <strong>de</strong> la déclinaison du programme à<br />
savoir, <strong>le</strong> concours Écrivains, nouvel<strong>le</strong> génération et <strong>le</strong> festival proprement dit qui prendra l’appellation Écritures<br />
<strong>de</strong>s <strong>Amériques</strong>, pour se substituer au <strong>Prix</strong> <strong>de</strong>s <strong>Amériques</strong> insulaires.<br />
En effet, <strong>le</strong>s dotations habituel<strong>le</strong>ment allouées au lauréat et aux écrivains nominés et la partie du budget <strong>de</strong><br />
communication consacrée à l’édition du livret littéraire, seront affectées à la réhabilitation <strong>de</strong> lieux <strong>de</strong> <strong>le</strong>cture en<br />
Haïti et enrichies <strong>de</strong> la contribution <strong>de</strong>s éditeurs sollicités pour <strong>de</strong>s dons <strong>de</strong> livres.<br />
En Gua<strong>de</strong>loupe, <strong>le</strong>s ren<strong>de</strong>z-vous traditionnels avec <strong>le</strong>s écrivains autour <strong>de</strong>s ouvrages en compétition laisseront<br />
la place à la restitution du concours, Écrivains, nouvel<strong>le</strong> génération et <strong>le</strong>s rencontres avec <strong>le</strong> public prolongeront<br />
l'action menée en faveur <strong>de</strong> la promotion et <strong>de</strong> la diffusion <strong>de</strong> la <strong>le</strong>cture.<br />
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Programme général <strong>de</strong>s rencontres<br />
Dans cette version nouvel<strong>le</strong> du <strong>Prix</strong> <strong>de</strong>s <strong>Amériques</strong> insulaires, <strong>le</strong>s écrivains <strong>de</strong> la Caraïbe, en rési<strong>de</strong>nce<br />
d’écriture à la Gua<strong>de</strong>loupe, vous convient à cette première session <strong>de</strong> rencontres littéraires.<br />
El<strong>le</strong>s ouvrent la saison du Festival Écritures <strong>de</strong>s <strong>Amériques</strong> durant <strong>le</strong>quel se retrouveront en décembre, d’Haïti<br />
à la Gua<strong>de</strong>loupe, <strong>le</strong>s membres du Jury<br />
Vendredi 11 juin I 18 heures 30 / 20 heures<br />
P<strong>le</strong>ine Page présentation : Gilda Gonfier.<br />
Rencontres avec <strong>le</strong> public<br />
Dany Laferrière I Kettly Mars I Jean-Euphè<strong>le</strong> Milcé I Gisè<strong>le</strong><br />
Pineau I Léone Ross I Evelyne Trouillot I Lyonel Trouillot I<br />
Marcio Veloz Maggiolo<br />
Maison du Patrimoine, Basse-Terre.<br />
Mercredi 16 juin I 14 heures 30 / 16 heures 30<br />
Lire aux éclats avec Dany Laferrière<br />
Médiathèque du Gosier.<br />
Vendredi 18 juin I 10 heures / 12 heures<br />
Une traversée littéraire au musée ren<strong>de</strong>z-vous<br />
proposé par Marc Dorcin et Samy Janvier.<br />
Léone Ross I Lyonel Trouillot<br />
Musée Schoelcher, Pointe-à-Pitre.<br />
Vendredi 18 juin I 19 heures / 20 heures 30<br />
L'écrivain rencontre animée par Éric Lefèvre.<br />
Dany Laferrière I Kettly Mars I Jean-Euphè<strong>le</strong> Milcé I Gisè<strong>le</strong><br />
Pineau I Léone Ross I Evelyne Trouillot I Lyonel Trouillot I<br />
Marcio Veloz Maggiolo<br />
Habitation Zevallos, <strong>le</strong> Mou<strong>le</strong>.<br />
Samedi 19 juin I 10 heures / 12 heures<br />
Des écrivains en dédicace<br />
Librairie Jasor, Pointe-à-Pitre.<br />
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Programme <strong>de</strong> la rési<strong>de</strong>nce<br />
Jeudi 10 juin I 14 heures 15 / 16 heures 30<br />
Rencontres privées<br />
Dany Laferrière I Kettly Mars I Jean-Euphè<strong>le</strong> Milcé I Gisè<strong>le</strong><br />
Pineau I Léone Ross I Evelyne Trouillot I Lyonel Trouillot I<br />
Marcio Veloz Maggiolo<br />
Conférence <strong>de</strong> presse Aéroport<br />
Lundi 14 I 09 heures / 11 heures<br />
Rencontre avec Jean-Euphè<strong>le</strong> Milcé, Evelyne Trouillot <strong>de</strong> 9h00-11H00<br />
Centre pénitentiaire Baie Mahault<br />
Mardi 15 I 09 heures / 11 heures<br />
Rencontre en milieu hospitalier avec Lyonel Trouillot <strong>de</strong> 9h00-11H00<br />
Centre hospitalier <strong>de</strong> Monteran – Saint-Clau<strong>de</strong><br />
Lecture avec Dany Laferrière, Kettly Mars <strong>de</strong> 9h00-11H00<br />
Maison d'arrêt Basse Terre<br />
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Liste <strong>de</strong>s ouvrages référencés<br />
ECRIVAINS EN RESIDENCE A LA GUADELOUPE | 7 - 20 JUIN <strong>2010</strong><br />
Livres <strong>de</strong> référence <strong>de</strong>s auteurs invités<br />
Haïti parmi <strong>le</strong>s vivants, Col<strong>le</strong>ctif Éditions Actes Sud, mai <strong>2010</strong><br />
coédition Le Point magazine,<br />
DANY LAFERRIERE<br />
L’énigme du retour, Éditions Grasset, septembre 2009<br />
Tout bouge autour <strong>de</strong> moi, Éditions Mémoire d’encrier, mars <strong>2010</strong><br />
KETTLY MARS<br />
Saisons sauvages, Éditions Mercure <strong>de</strong> France, février <strong>2010</strong><br />
JEAN-EUPHELE MILCE<br />
Un archipel dans mon bain, Éditions Bernard Campiche, juil<strong>le</strong>t 2006<br />
GISELE PINEAU<br />
Folie, al<strong>le</strong>r simp<strong>le</strong>, Éditions Philippe Rey, février <strong>2010</strong><br />
LEONE ROSS<br />
Le sang est toujours rouge, Éditions Actes Sud, avril 2003<br />
Le rire orange, Éditions Actes Sud, août 2001<br />
EVELYNE TROUILLOT<br />
La mémoire aux abois, Éditions Hoëbeke, mai <strong>2010</strong><br />
LYONEL TROUILLOT<br />
Yanvalou pour Charlie, Éditions Actes Sud, août 2009<br />
Haïti, une traversée littéraire, Éditions Philippe Rey, mars <strong>2010</strong>,<br />
en collaboration avec Louis-Philippe Da<strong>le</strong>mbert<br />
MARCIO VELOZ MAGGIOLO<br />
L’homme à l’accordéon, Éditions Anne Carrière, août 2004<br />
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Biographies <strong>de</strong>s écrivains invités<br />
Dany Laferrière<br />
Dany Laferrière, né Windsor Klébert Laferrière est un<br />
intel<strong>le</strong>ctuel, écrivain, et scénariste haïtien vivant au<br />
Canada, né à Port-au-Prince <strong>le</strong> 13 avril 1953.<br />
C'est à Montréal qu'il connaîtra <strong>le</strong> succès en 1985 avec<br />
la publication <strong>de</strong> son premier roman, Comment faire<br />
l'amour avec un nègre sans se fatiguer. Suivront alors<br />
neuf autres romans – cette dizaine <strong>de</strong> romans compose<br />
ce que l'auteur appel<strong>le</strong> « une autobiographie<br />
américaine ».<br />
Plus récemment, l'auteur s'engage dans <strong>le</strong> cinéma. Il<br />
transforme son roman Le Goût <strong>de</strong>s jeunes fil<strong>le</strong>s en<br />
scénario pour <strong>le</strong> film réalisé en 2004 par John L'Écuyer.<br />
En tant que réalisateur, <strong>le</strong> premier film <strong>de</strong> Dany<br />
Laferrière, Comment conquérir l'Amerique en une nuit,<br />
fait croiser ses <strong>de</strong>ux « univers » <strong>de</strong> Montréal et <strong>de</strong> Portau-Prince.<br />
Ce premier long-métrage est primé au Festival <strong>de</strong>s Films<br />
du Mon<strong>de</strong> à Montréal en septembre 2004.<br />
Présent en Haïti lors du tremb<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> terre du 12<br />
janvier <strong>de</strong>rnier pour <strong>le</strong> festival « Etonnants Voyageurs »<br />
qui <strong>de</strong>vait avoie lieu à Port-au-Prince du 14 au 21 janvier,<br />
Dany Laferrière a été l’un <strong>de</strong>s premiers écrivains à livrer<br />
son témoignage sur la catastrophe.<br />
Il est l’actuel prési<strong>de</strong>nt du prix <strong>de</strong>s <strong>Amériques</strong> Insulaires<br />
et <strong>de</strong> la Guyane, et lauréat du <strong>Prix</strong> Médicis 2009.<br />
7 / 46<br />
Œuvres principa<strong>le</strong>s<br />
Romans et récits :<br />
• Comment faire l'amour avec un nègre sans se<br />
fatiguer. Montréal : VLB, 1985 ; Paris : P. Belfond,<br />
1989 ; J'ai lu, 1990.<br />
• Éroshima. Montréal : VLB, 1987 ; Montréal : Typo,<br />
1998.<br />
• L'O<strong>de</strong>ur du café. (récit) Montréal : VLB, 1991 ;<br />
Montréal : Typo, 1999 ; Paris : Serpent à plumes,<br />
2001.<br />
• Le Goût <strong>de</strong>s jeunes fil<strong>le</strong>s. Montréal : VLB, 1992 ;<br />
Nouvel<strong>le</strong> édition, Montréal : VLB, 2004 ; Paris :<br />
Grasset, 2005.<br />
• Cette Grena<strong>de</strong> dans la main du jeune nègre est-el<strong>le</strong><br />
une arme ou un fruit ? Montréal : VLB, 1993 ; Typo,<br />
2000. Nouvel<strong>le</strong> édition, Paris : Serpent à Plumes,<br />
2002 / Montréal : VLB, 2002.<br />
• Chronique <strong>de</strong> la dérive douce. Montréal : VLB, 1994.<br />
• Pays sans chapeau. Outremont : Lanctôt, 1996 ;<br />
Paris : Serpent à plumes, 1999 ; Monaco : Serpent à<br />
plumes, 2004.<br />
• La Chair du maître. Outremont : Lanctôt, 1997 ;<br />
Paris : Serpent à plumes, 2000.<br />
• Le Charme <strong>de</strong>s après-midi sans fin. (récit)<br />
Outremont : Lanctôt, 1997. Paris : Le Serpent à<br />
plumes, 1998 ; 00h00.com, 1999.<br />
• Le Cri <strong>de</strong>s oiseaux fous. Outremont : Lanctôt, 2000 ;<br />
Paris : Serpent à plumes, 2000.<br />
• Je suis fatigué. Vincennes : Les Librairies Initia<strong>le</strong>s,<br />
2000 ; Outremont : Lanctôt, 2001.<br />
• Vers <strong>le</strong> sud. Paris : Grasset, 2006 ; Montréal :<br />
Boréal, 2006.<br />
• Je suis un écrivain japonais. Paris : Grasset, 2008 ;<br />
Montréal : Boréal, 2008.<br />
• L'énigme du retour. Paris : Grasset, 2009 ;<br />
Montréal : Boréal, 2009.<br />
• Tout bouge autour <strong>de</strong> moi. Montréal : Mémoire<br />
d'encrier, <strong>2010</strong>.<br />
Films :
• Haïti (Québec). Tahani Rached, réalisation. Dany<br />
Laferrière, narration. Office National du Film du<br />
Canada, 1985.<br />
• Comment faire l'amour avec un nègre sans se<br />
fatiguer (How to Make Love to a Negro without<br />
Getting Tired). Jacques W. Benoît, réalisation. Dany<br />
Laferrière, scénario. 1989.<br />
• Le Goût <strong>de</strong>s jeunes fil<strong>le</strong>s (On the Verge of a Fever).<br />
John L'Écuyer, réalisation. Dany Laferrière,<br />
scénario. 2004. Westmount (Québec) : Christal<br />
Films, 2004 (DVD). 88 min.<br />
• Comment conquérir l'Amérique en une nuit. Dany<br />
Laferrière, réalisation et scénario. 2004. Outremont<br />
(Québec) : Lanctôt, 2004 (scénario) ; Montréal :<br />
Équinoxe Films, 2005 (DVD). 96 min.<br />
• Vers <strong>le</strong> Sud (Heading South). Laurent Cantet,<br />
réalisation sur un scénario inspiré par trois nouvel<strong>le</strong>s<br />
<strong>de</strong> Dany Laferrière. 2005. 105 min.<br />
• La dérive douce d'un enfant <strong>de</strong> Petit-Goâve.<br />
Documentaire sur Dany Laferrière réalisé par Pedro<br />
Ruíz. Faits Divers Média, 2009. 90 min.<br />
8 / 46<br />
<strong>Prix</strong> et distinctions :<br />
Il a reçu <strong>le</strong> Grand <strong>Prix</strong> littéraire international Métropolis<br />
b<strong>le</strong>u en <strong>2010</strong> - <strong>Prix</strong> qui est remis par la Fondation<br />
Métropolis b<strong>le</strong>u <strong>de</strong> Montréal à un écrivain <strong>de</strong> calibre<br />
international et récompense l'ensemb<strong>le</strong> d'une œuvre<br />
pour son apport exceptionnel à la littérature<br />
contemporaine.<br />
- <strong>2010</strong> : Personnalité <strong>de</strong> l'année 2009 La <strong>Presse</strong>/Radio-<br />
Canada<br />
- <strong>Prix</strong> Médicis <strong>de</strong> 2009 pour son roman L'Énigme du<br />
retour.<br />
- 2009 :Grand <strong>Prix</strong> du livre <strong>de</strong> Montréal<br />
Artic<strong>le</strong>s :<br />
http://www.courrierinternational.com/breve/<strong>2010</strong>/01/14/<strong>le</strong>crivain-dany-laferriere-loue-la-solidarite-<strong>de</strong>-la-populationhttp://www.<strong>le</strong>point.fr/actualites-litterature/2009-08-31/<strong>le</strong>nigme-du-retour-laferriere-haiti-monamour/1038/0/372992
Kettly Mars<br />
Kettly Mars, écrivain haïtienne née à Port-au-Prince <strong>le</strong> 03<br />
septembre 1958.<br />
Après <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s classiques, Kettly Mars reçoit une<br />
formation en administration.<br />
Depuis vingt-cinq ans, el<strong>le</strong> travail<strong>le</strong> comme assistante<br />
administrative. Passionnée dès son plus jeune âge <strong>de</strong><br />
<strong>le</strong>cture et <strong>de</strong> poésie, el<strong>le</strong> commence à écrire au début<br />
<strong>de</strong>s années 1990.<br />
C'est par une poésie érotique et passionnée que Kettly<br />
Mars exprime ses premiers élans créateurs.<br />
El<strong>le</strong> passe ensuite à l'écriture <strong>de</strong> la nouvel<strong>le</strong> et reçoit en<br />
1996 <strong>le</strong> premier prix du Concours Jacques-Stephen<br />
A<strong>le</strong>xis <strong>de</strong> la Nouvel<strong>le</strong>.<br />
Cette distinction l'encourage à s'engager davantage dans<br />
la voie littéraire. Poète intimiste, Kettly Mars peint par<br />
petites touches sensuel<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s émotions que lui inspirent<br />
l'amour, la beauté <strong>de</strong> la nature, <strong>le</strong>s objets du quotidien.<br />
Dans ses nouvel<strong>le</strong>s, l'auteur haïtien campe avec réalisme<br />
et vivacité <strong>de</strong>s tab<strong>le</strong>aux une société déchirée par ses<br />
profonds antagonismes économiques et politiques. El<strong>le</strong><br />
tente quelques questionnements sur <strong>le</strong>s droits <strong>de</strong>s<br />
femmes, et montre <strong>le</strong> désarroi d'un peup<strong>le</strong> toujours en<br />
quête d'i<strong>de</strong>ntité. Kettly Mars participe éga<strong>le</strong>ment aux<br />
activités culturel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> son pays et est actuel<strong>le</strong>ment<br />
membre du jury du prix littéraire Henri Deschamps.<br />
9 / 46<br />
Œuvres principa<strong>le</strong>s<br />
Romans :<br />
• Kasalé. Port-au-Prince : Imprimeur II, 2003 ; La<br />
Roque d'Anthéron (France) : Vents d'Ail<strong>le</strong>urs, 2007.<br />
• L'heure hybri<strong>de</strong>. La Roque d'Anthéron : Vents<br />
d'Ail<strong>le</strong>urs, 2005.<br />
• Fado. Paris : Mercure, 2008.<br />
• Saisons sauvages. Paris : Mercure, <strong>2010</strong>.<br />
Roman-feuil<strong>le</strong>ton :<br />
• Kool-Klub. Port-au-Prince : L'Imprimeur II, 2007.<br />
• Kool-Klub, <strong>le</strong> temps <strong>de</strong>s loups. Port-au-Prince :<br />
L'Imprimeur II, 2008.<br />
Nouvel<strong>le</strong>s :<br />
• Un parfum d'encens. Port-au-Prince : Imprimeur II,<br />
1999.<br />
• Mirage-Hôtel. Port-au-Prince : Imprimerie Caraïbe,<br />
2002.<br />
Poésie :<br />
• Feu <strong>de</strong> miel. Port-au-Prince : Imprimeur II, 1997.<br />
• Feu<strong>le</strong>ments et sanglots. Port-au-Prince : Imprimeur<br />
II, 2001.<br />
Artic<strong>le</strong>s :<br />
http ://gangoueus.blogspot.com/<strong>2010</strong>/05/kettly-marssaisons-sauvages.html<br />
http ://www.rfi.fr/contenu/<strong>2010</strong>0309-kettly-mars-liaisonsdangereuses-haiti<br />
http ://www.evene.fr/livres/actualite/interview-kettly-marsheure-hybri<strong>de</strong>-francophonie-haiti-294.php
Jean-Euphe<strong>le</strong> Milcé<br />
Jean-Euphè<strong>le</strong> Milcé naît à Passe-Reine, Gonaïves <strong>le</strong> 14<br />
janvier 1969. Il fait <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> linguistique appliquée<br />
et <strong>de</strong> gestion <strong>de</strong> l'information à l'Université d'État d'Haïti<br />
et à l'Université <strong>de</strong> Fribourg en Suisse.<br />
Il dirige la Bibliothèque haïtienne <strong>de</strong>s Pères du Saint-<br />
Esprit <strong>de</strong> 1996 à 2000 et la Bibliothèque interculturel<strong>le</strong> <strong>de</strong><br />
Fribourg, en Suisse, <strong>de</strong> 2004 à 2006. Il collabore<br />
éga<strong>le</strong>ment au Département <strong>de</strong> manuscrit et <strong>de</strong> la<br />
Bibliothèque centra<strong>le</strong> <strong>de</strong> l'Université <strong>de</strong> Lausanne.<br />
Son roman, l'Alphabet <strong>de</strong>s nuits, paru en 2004, obtient <strong>le</strong><br />
<strong>Prix</strong> Georges Nico<strong>le</strong> en Suisse et est finaliste du <strong>Prix</strong><br />
Prince Pierre <strong>de</strong> Monaco entre autres. L'univers <strong>de</strong> Jean-<br />
Euphè<strong>le</strong> Milcé est construit autour <strong>de</strong>s drames <strong>de</strong> l'exil et<br />
<strong>de</strong>s incertitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la traversée.<br />
Jean-Euphè<strong>le</strong> Milcé vit actuel<strong>le</strong>ment en Haïti et travail<strong>le</strong><br />
sur <strong>de</strong>s projets <strong>de</strong> mise en place d'infrastructures<br />
culturel<strong>le</strong>s publiques.<br />
Œuvres principa<strong>le</strong>s<br />
Romans :<br />
• L'Alphabet <strong>de</strong>s nuits. Orbe (Suisse) : Campiche,<br />
2004.<br />
• Un Archipel dans mon bain. Orbe : Campiche, 2006.<br />
• Pase m yon Kou Foli, roman créo<strong>le</strong>. Port-au-Prince :<br />
<strong>Presse</strong>s Nationa<strong>le</strong>s d'Haïti, 2008.<br />
Recueil <strong>de</strong> nouvel<strong>le</strong>s :<br />
• L'envers <strong>de</strong>s rives. Port-au-Prince : <strong>Presse</strong>s<br />
Nationa<strong>le</strong>s d'Haïti, 2007.<br />
Nouvel<strong>le</strong>s parues dans <strong>de</strong>s ouvrages col<strong>le</strong>ctifs :<br />
• « Il p<strong>le</strong>ut l'ail<strong>le</strong>urs ». Nouvel<strong>le</strong> <strong>de</strong> Jean-Euphè<strong>le</strong><br />
Milcé, avec 60 photographies <strong>de</strong> Jean-Pierre<br />
10 / 46<br />
Grandjean. Magic Haïti. Jouxtens-sur-Mezery :<br />
Éditions Paro<strong>le</strong> d'image, 2004.<br />
• « Et... Dieu créa l'heure ». Écriture Lausanne<br />
(2004).<br />
• « Les maux dans la marge ». Balises (Bruxel<strong>le</strong>s,<br />
2005).<br />
• « Encre <strong>de</strong> mars ». Riveneuve Continents 2<br />
(printemps 2005) : 130-132.<br />
• « Le premier qui chute n'est pas d'ici ». Terra<br />
Cognita (Berne, 2006).<br />
• « Habiter désir ». La Nouvel<strong>le</strong> Revue Française 576<br />
(janvier 2006) : 169-177.<br />
• « Le temps expire dans trois jours ». Six Nouvel<strong>le</strong>s<br />
du Carnaval, textes réunis par Jean-Euphè<strong>le</strong> Milcé.<br />
Port-au-Prince : Page Ailée / Zémès, 2009 : 49-60.<br />
Poésie :<br />
• Jiwèt Van. Port-au-Prince : Pageailée, 1999.<br />
• Louvri tan. Port-au-Prince : <strong>Edition</strong>s <strong>de</strong> l'Î<strong>le</strong> /<br />
Bibliyotèk Nasyonal Ayiti, 1999.<br />
Essais :<br />
• Préservation et diffusion : <strong>de</strong>ux mon<strong>de</strong>s<br />
incompatib<strong>le</strong>s ? : proposition pour la gestion <strong>de</strong><br />
fonds patrimoniaux en Haïti. Fribourg : <strong>Presse</strong>s <strong>de</strong><br />
l'Université <strong>de</strong> Fribourg, 2003.<br />
• En parallè<strong>le</strong> avec <strong>le</strong> roman : Mise en perspective<br />
<strong>de</strong>s artic<strong>le</strong>s publiés par Bernard Clavel. Lausanne :<br />
Bibliothèque cantona<strong>le</strong> et universitaire, 2003.<br />
• Haïti, Naissance d'une î<strong>le</strong> noire. Lausanne :<br />
Bibliothèque cantona<strong>le</strong> et universitaire, 2004.<br />
Artic<strong>le</strong>s :<br />
http ://www.croix-rouge.fr/Actualite/Haiti-<strong>de</strong>-l-urgence-ala-post-urgence/Contribution-Jean-Euphe<strong>le</strong>-Milce-Haitigenere-aussi-ses-petits-bonheurs-1139<br />
http ://www.<strong>le</strong>courrier.ch/in<strong>de</strong>x.php<br />
?name=NewsPaper&fi<strong>le</strong>=artic<strong>le</strong>&sid=41839
Gisè<strong>le</strong> Pineau<br />
Gisè<strong>le</strong> Pineau est née à Paris en 1956. Ses parents sont<br />
gua<strong>de</strong>loupéens.<br />
Son père a quitté la Gua<strong>de</strong>loupe en 1943, répondant à<br />
l'Appel du 18 juin lancé par <strong>le</strong> Général <strong>de</strong> Gaul<strong>le</strong>.<br />
La grand-mère, Man Ya, sera une figure récurrente <strong>de</strong><br />
l'œuvre <strong>de</strong> Gisè<strong>le</strong> Pineau. On la retrouve dans son récit<br />
L'exil selon Julia et dans son roman <strong>de</strong> jeunesse Un<br />
papillon dans la cité.<br />
La famil<strong>le</strong>, regagne la France avec Man Ya. La France<br />
<strong>de</strong>vient <strong>le</strong> pays <strong>de</strong> l'exil pour Gisè<strong>le</strong> Pineau, exil vécu par<br />
procuration auprès <strong>de</strong> Man Ya qui raconte la<br />
Gua<strong>de</strong>loupe, <strong>le</strong>s contes, <strong>le</strong>s mystères du pays perdu. Le<br />
racisme, l'intolérance et la force <strong>de</strong>s préjugés rencontrés<br />
chaque jour nourriront plus tard l'œuvre <strong>de</strong> Gisè<strong>le</strong> Pineau<br />
qui s'attache, dans son écriture, à mettre en scène <strong>de</strong>s<br />
personnages en but à la vio<strong>le</strong>nce et l'injustice <strong>de</strong> ce<br />
mon<strong>de</strong> (in : L'Espérance-macadam ; L'Âme prêtée aux<br />
oiseaux).<br />
De 1970 à 1972, la famil<strong>le</strong> vit en Martinique. C'est la<br />
redécouverte d'une culture, d'une langue (<strong>le</strong> créo<strong>le</strong>),<br />
d'une histoire qui apparaîtront dans Femmes <strong>de</strong>s Antil<strong>le</strong>s,<br />
traces et Voix, 150 ans après l'Abolition <strong>de</strong> l'Esclavage.<br />
En 1975, Gisè<strong>le</strong> Pineau qui vient d'obtenir son<br />
baccalauréat, s'inscrit à l'Université <strong>de</strong> Paris X Nanterre.<br />
El<strong>le</strong> suit, pendant <strong>de</strong>ux années, <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Lettres<br />
Mo<strong>de</strong>rnes qu'el<strong>le</strong> abandonne faute d'argent.<br />
El<strong>le</strong> <strong>de</strong>vient infirmière en psychiatrie en 1979, se marie et<br />
repart pour la Gua<strong>de</strong>loupe où el<strong>le</strong> exercera pendant près<br />
<strong>de</strong> vingt ans sa profession au Centre Hospitalier<br />
Psychiatrique <strong>de</strong> Saint-Clau<strong>de</strong>. A l’automne 2000, el<strong>le</strong><br />
repart vivre à Paris. Mais l’appel <strong>de</strong> la Gua<strong>de</strong>loupe<br />
semb<strong>le</strong> plus fort, el<strong>le</strong> retourne dans l’î<strong>le</strong> si chère, où el<strong>le</strong><br />
mène toujours parallè<strong>le</strong>ment à sa carrière d’écrivain cette<br />
profession qui, dit-el<strong>le</strong>, équilibre sa vie.<br />
11 / 46<br />
Œuvres principa<strong>le</strong>s<br />
Romans :<br />
• La Gran<strong>de</strong> Drive <strong>de</strong>s esprits. Paris : Le Serpent à<br />
Plumes, 1993.<br />
• L'Espérance-Macadam. Paris : Stock, 1995.<br />
• L'Exil selon Julia. Paris : Stock, 1996.<br />
• L'Âme prêtée aux oiseaux. Paris : Stock, 1998.<br />
• Chair piment. Paris : Mercure, 2002.<br />
• F<strong>le</strong>ur <strong>de</strong> barbarie. Paris : Mercure, 2005.<br />
• Morne câpresse. Paris : Mercure, 2008.<br />
Récits :<br />
• Mes quatre femmes. Paris : Philippe Rey, 2007.<br />
• Folie, al<strong>le</strong>r simp<strong>le</strong> ; Journée ordinaire d'une<br />
infirmière. Paris : Philippe Rey, <strong>2010</strong>.<br />
Romans pour la jeunesse :<br />
• Un Papillon dans la cité. Paris : Sépia, 1992.<br />
• Le Cyclone Marilyn (illustré par Béatrice Favereau).<br />
Montréal : Hurtubise HMH, 1998 ; Paris : L'Élan<br />
Vert, 1998.<br />
• Caraïbe sur Seine. Paris : Dapper, 1999.<br />
• Case mensonge (illustré par Sylvain Bourrières). Je<br />
Bouquine 206 (avril 2001) ; Je Bouquine 153 (mai<br />
2004) ; Paris : Bayard jeunesse, 2004.<br />
• C'est la règ<strong>le</strong>. Paris : Thierry Magnier, 2002.<br />
• Les Colères du volcan. Paris : Dapper, 2004.<br />
Ouvrages <strong>de</strong> référence :<br />
• Femmes <strong>de</strong>s Antil<strong>le</strong>s ; traces et voix cent cinquante<br />
ans après l'abolition <strong>de</strong> l'esclavage (avec Marie<br />
Abraham). Paris : Stock, 1998.<br />
Nouvel<strong>le</strong>s :<br />
• « Paro<strong>le</strong>s <strong>de</strong> terre en larmes », « Ombres créo<strong>le</strong>s »<br />
et « Léna ». Paro<strong>le</strong>s <strong>de</strong> terre en larmes. Paris :<br />
Hatier, 1987 : 5-20 ; 96-110 ; 112-128.<br />
• « Une antique malédiction ». Le Serpent à plumes,<br />
15 (Printemps 1992) : 37-52.<br />
• « Aimée <strong>de</strong> Bois-Vanil<strong>le</strong> ». Le Serpent à plumes, 28<br />
(1994).<br />
• « Tourment d'amour ». Écrire la « paro<strong>le</strong> <strong>de</strong> nuit » ;<br />
la nouvel<strong>le</strong> littéraire antillaise. Paris : Gallimard<br />
(folio, essais), 1994 : 79-87.<br />
• « Piéça dévorée et pourrie ». Noir <strong>de</strong>s Î<strong>le</strong>s (col<strong>le</strong>ctif).<br />
Paris : Gallimard, 1995 : 159-203.<br />
• « Le ventre <strong>de</strong> Léocadie ». L'Express (octobre<br />
1998).
• « Amélie et <strong>le</strong>s anolis ». Nouvel<strong>le</strong>s <strong>de</strong>s <strong>Amériques</strong>.<br />
(Maryse Condé et Lise Gauvin, dir.) Montréal :<br />
L'Hexagone, 1998 : 25-40.<br />
• « Les enchaînés ». Tropiques, revue négro-africaine<br />
<strong>de</strong> littérature et <strong>de</strong> philosophie 61 (2ème semestre<br />
1998). (Dakar).<br />
• « Fichues racines ». Paradis Brisé, nouvel<strong>le</strong>s <strong>de</strong>s<br />
Caraïbes. Col<strong>le</strong>ction Étonnants Voyageurs. Paris :<br />
Hoëbeke, 2004 : 199-218.<br />
• « Ta mission, Marny ». Nouvel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> Gua<strong>de</strong>loupe.<br />
Paris : Magellan & Cie / Fort-<strong>de</strong>-France : Desnel,<br />
2009 : 11-30.<br />
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<strong>Prix</strong> et distinctions littéraires :<br />
• 1994 : Grand <strong>Prix</strong> <strong>de</strong>s <strong>le</strong>ctrices d'El<strong>le</strong>, pour La<br />
Gran<strong>de</strong> Drive <strong>de</strong>s esprits.<br />
• 1994 : <strong>Prix</strong> Carbet <strong>de</strong> la Caraïbe, pour La Gran<strong>de</strong><br />
Drive <strong>de</strong>s esprits.<br />
• 1996 : <strong>Prix</strong> du Livre RFO, pour L'Espérance-<br />
Macadam.<br />
• 1996 : <strong>Prix</strong> Terre <strong>de</strong> France, pour L'Exil selon Julia.<br />
• 1997 : <strong>Prix</strong> Rotary, pour L'Exil selon Julia.<br />
• 1998 : <strong>Prix</strong> Amerigo Vespucci, pour L'Âme prêtée<br />
aux oiseaux.<br />
• 2002 : <strong>Prix</strong> <strong>de</strong>s Hémisphères Chantal Lapicque,<br />
pour Chair piment.<br />
• 2006 : <strong>Prix</strong> Littéraire Rosine Perrier, pour F<strong>le</strong>ur <strong>de</strong><br />
barbarie.<br />
Artic<strong>le</strong>s :<br />
http ://www.bibliosurf.com/Mes-quatre-femmes<br />
http ://www.africultures.com/php/in<strong>de</strong>x.php<br />
?nav=artic<strong>le</strong>&no=8063
Léone Ross<br />
Leone Ross est née à Coventry, en Ang<strong>le</strong>terre, 26 juin<br />
1969. Leone a six ans quand sa mère retourne à la<br />
Jamaïque, terre <strong>de</strong> sa naissance. E<strong>le</strong>vée et éduquée en<br />
Jamaïque, el<strong>le</strong> obtient <strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>ures notes du corps<br />
professoral <strong>de</strong> l'Université <strong>de</strong>s In<strong>de</strong>s occi<strong>de</strong>nta<strong>le</strong>s en<br />
1990.<br />
El<strong>le</strong> retourne en Ang<strong>le</strong>terre pour y faire une maîtrise en<br />
journalisme international à l'Université <strong>de</strong> Londres.<br />
Londres où el<strong>le</strong> s’instal<strong>le</strong> et où el<strong>le</strong> vit toujours.<br />
Attachée à la Jamaïque, el<strong>le</strong> dit ne pouvoir imaginer qui<br />
ou quoi que ce soit sans ce lien à la terre : « c’est <strong>le</strong> vrai<br />
sens d’être chez soi. »<br />
Leone a commencé à travail<strong>le</strong>r en tant que journaliste,<br />
quand el<strong>le</strong> avait 15 ans, el<strong>le</strong> écrit <strong>de</strong>s artic<strong>le</strong>s en tant<br />
qu’ indépendant pour diverses ONG en Jamaïque et pour<br />
la Inter Press News Agency.<br />
Son premier travail dans une équipe a été pour <strong>le</strong> journal<br />
The Voice à Londres, où el<strong>le</strong> a fina<strong>le</strong>ment été promue au<br />
gra<strong>de</strong> <strong>de</strong> rédacteur en chef.<br />
El<strong>le</strong> a contribué à diverses publications, y compris pour<br />
<strong>le</strong>s entreprises comme : Mizz, <strong>le</strong> Sunday Times et <strong>le</strong><br />
magazine féministe Sibyl<strong>le</strong> au Royaume-Uni, et <strong>le</strong><br />
magazine MS aux États-Unis.<br />
13 / 46<br />
El<strong>le</strong> a publié son premier roman en 1996 chez un petit<br />
éditeur indépendant, et a écrit <strong>de</strong>s fictions pour toute une<br />
série d'anthologies publiées aux Etats-Unis, au<br />
Royaume-Uni, en Europe <strong>de</strong> l'Est et au Canada.<br />
Son <strong>de</strong>uxième roman a été publié au Royaume-Uni en<br />
1999 et traduit aux Etats-Unis et en France. Son travail<br />
traite généra<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> la race, la sexualité, <strong>le</strong>s états<br />
modifiés <strong>de</strong> conscience, et <strong>le</strong>s effets <strong>de</strong> l'enfance.<br />
En 2000, Leone a été <strong>le</strong> bénéficiaire d'une bourse du<br />
London Arts Board Writers Award. Aujourd'hui, el<strong>le</strong><br />
enseigne la littérature à l'Institut littéraire <strong>de</strong> la vil<strong>le</strong> <strong>de</strong><br />
Londres et est chargée <strong>de</strong> cours au Trinity Col<strong>le</strong>ge <strong>de</strong><br />
Dublin <strong>de</strong>puis 2001.<br />
El<strong>le</strong> est l’auteur <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux romans, « Le rire orange » et<br />
« Le sang est toujours rouge » parus respectivement en<br />
2001 et 2003 aux <strong>Edition</strong>s Actes Sud.<br />
Artic<strong>le</strong>s :<br />
http ://translate.goog<strong>le</strong>.fr/translate<br />
?hl=fr&langpair=en|fr&u=http<br />
://web.mac.com/<strong>le</strong>onerosswrites/Site/Welcome.html
Evelyne Trouillot<br />
Évelyne Trouillot est née <strong>le</strong> 2 janvier 1954 à Port-au-<br />
Prince (Haïti). Après <strong>le</strong>s étu<strong>de</strong>s secondaires, el<strong>le</strong> part<br />
pour <strong>le</strong>s États-Unis d'Amérique où el<strong>le</strong> fait <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s<br />
universitaires en langues et en éducation. Depuis son<br />
retour dans son pays en 1987 el<strong>le</strong> vit « à petits pas et à<br />
gran<strong>de</strong>s foulées, avec beaucoup d'humilité et <strong>de</strong><br />
détermination face à une situation souvent chaotique ».<br />
Évelyne Trouillot publie son premier recueil <strong>de</strong> nouvel<strong>le</strong>s<br />
La chambre interdite en 1996. Depuis, el<strong>le</strong> a publié <strong>de</strong>ux<br />
autres recueils <strong>de</strong> nouvel<strong>le</strong>s, Islan<strong>de</strong> suivi <strong>de</strong> La mer<br />
entre lait et sang et Par<strong>le</strong>z-moi d'amour ; éga<strong>le</strong>ment,<br />
<strong>de</strong>ux recueils <strong>de</strong> poèmes, Sans Parapluie <strong>de</strong> retour (en<br />
français) et Pli<strong>de</strong>twal (en créo<strong>le</strong>). Pour <strong>le</strong>s jeunes<br />
<strong>le</strong>cteurs, el<strong>le</strong> a écrit <strong>de</strong>s contes et <strong>de</strong>s récits <strong>de</strong> jeunesse.<br />
En 2002, el<strong>le</strong> publie une étu<strong>de</strong> qui présente à la fois un<br />
constat et une plaidoirie sur l'enfance et l'état <strong>de</strong> droit en<br />
Haïti.<br />
Son premier roman, Rosalie l'infâme (Dapper, 2003) se<br />
situe à Saint-Domingue dans <strong>le</strong>s années 1750 et<br />
présente <strong>le</strong>s esclaves comme <strong>de</strong>s individus avec <strong>le</strong>urs<br />
passions, <strong>le</strong>urs faib<strong>le</strong>sses, <strong>le</strong>ur détermination et <strong>le</strong>ur<br />
détresse. Rosalie l'infâme est l'histoire <strong>de</strong> la résistance<br />
au quotidien, racontée du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong>s femmes,<br />
hommes et enfants qui ont lutté contre l'esclavage <strong>de</strong><br />
manière individuel<strong>le</strong> et col<strong>le</strong>ctive, reflétant dans <strong>le</strong>urs<br />
combats <strong>le</strong> courage et la dignité <strong>de</strong> l'être humain faisant<br />
face à une situation inhumaine.<br />
L'Œil-Totem, <strong>le</strong> <strong>de</strong>uxième roman d'Évelyne Trouillot, est<br />
dédié à sa mère, à sa grand-mère et « à toutes ces<br />
figures <strong>de</strong> femmes, porteuses d'histoires, qui ont nourri<br />
[son] enfance et posé sur [el<strong>le</strong>] <strong>le</strong>ur œil-totem ». Le<br />
roman met en scène une vieil<strong>le</strong> peintre <strong>de</strong> 88 ans, Marie-<br />
Jeanne Thévenot Dorcil, porteuse <strong>de</strong> l'œil-totem, et son<br />
petit-fils Dimitri, revenu <strong>de</strong> la diaspora. Par ses<br />
conversations hebdomadaires avec el<strong>le</strong>, Dimitri construit<br />
la généalogie <strong>de</strong> la famil<strong>le</strong> Thévenot, la mystérieuse<br />
légen<strong>de</strong> d'une jarre enfouie et l'histoire <strong>de</strong> sa grandmère,<br />
dit Madame Karolis.<br />
Le mirador aux étoi<strong>le</strong>s (2007) est un roman qui abor<strong>de</strong><br />
<strong>le</strong>s thèmes <strong>de</strong>s préjugés <strong>de</strong> cou<strong>le</strong>ur et <strong>de</strong> classe qui<br />
perturbent <strong>le</strong>s relations entre <strong>le</strong>s êtres et se cachent sous<br />
<strong>de</strong>s tabous et secrets familiaux. Dans ce roman, on<br />
trouve <strong>de</strong>s clins d'œil à l'histoire : <strong>de</strong>s références à Portau-Prince<br />
sous l'occupation américaine et à certains<br />
actes <strong>de</strong> résistance <strong>de</strong>s citoyens haïtiens face à<br />
l'occupant.<br />
14 / 46<br />
Le premier texte théâtral d'Évelyne Trouillot, Le B<strong>le</strong>u <strong>de</strong><br />
l'î<strong>le</strong>, est primé par ETC Caraïbes et reçoit <strong>le</strong> prix<br />
Beaumarchais <strong>de</strong> la Caraïbe ex aequo en 2005. Il est mis<br />
en <strong>le</strong>cture à Paris, à la Martinique et la Gua<strong>de</strong>loupe. Le<br />
B<strong>le</strong>u <strong>de</strong> l'î<strong>le</strong> est joué à Port-au-Prince en septembre 2009<br />
par la troupe Dram'Art dans <strong>le</strong> cadre du festival théâtral<br />
Quatre chemins. Le B<strong>le</strong>u <strong>de</strong> l'î<strong>le</strong> se base sur une tragédie<br />
survenue en juin 2000 lorsque <strong>de</strong>s gar<strong>de</strong>s dominicains<br />
tirent sur une camionnette transportant <strong>de</strong>s Haïtiens<br />
voulant traverser la frontière haitiano-dominicaine ; plus<br />
d'une dizaine d'Haïtiens sont tués.<br />
Évelyne Trouillot partage son temps entre la littérature et<br />
l'éducation et dirige <strong>de</strong>puis 2002 pré-Texte, un bureau <strong>de</strong><br />
production <strong>de</strong> textes.<br />
Œuvres principa<strong>le</strong>s :<br />
Romans :<br />
• Rosalie l'infâme. Paris : Dapper, 2003 ; Port-au-<br />
Prince : <strong>Presse</strong>s Nationa<strong>le</strong>s d'Haïti, 2007.<br />
• L'Œil-Totem. Port-au-Prince : <strong>Presse</strong>s Nationa<strong>le</strong>s<br />
d'Haïti, 2006.<br />
• Le Mirador aux étoi<strong>le</strong>s. Port-au-Prince : L'Imprimeur<br />
II, 2007.<br />
• La mémoire aux abois. Paris : Hoëbeke, <strong>2010</strong>.<br />
Nouvel<strong>le</strong>s :<br />
• La chambre interdite. Paris : L'Harmattan, 1996.<br />
• Islan<strong>de</strong>, suivi <strong>de</strong> La mer, entre lait et sang. Port-au-<br />
Prince : Éditions <strong>de</strong> l'Î<strong>le</strong>, 1998.<br />
• Ma maison en <strong>de</strong>ntel<strong>le</strong> <strong>de</strong> bois, suivi <strong>de</strong> Une<br />
cousine inattendue. Port-au-Prince : Éditions<br />
Mémoire, 1999.<br />
• Par<strong>le</strong>z-moi d'amour... Haiti : Imprimerie Caraïbe,<br />
2002.<br />
Contes et récits pour enfants :<br />
• L'oiseau mirage. Port-au-Prince : Éditions Haïti<br />
Solidarité Internationa<strong>le</strong>, 1997.<br />
• L'î<strong>le</strong> <strong>de</strong> Ti Jean. Illustrations <strong>de</strong> Sophie Mondésir,<br />
avec un CD (interprétation et conception musica<strong>le</strong><br />
Mariann Mathéus) Paris : Dapper, 2004.<br />
• Poésie :<br />
• Sans parapluie <strong>de</strong> retour. Port-au-Prince - 2001.
• Pli<strong>de</strong>twal (en créo<strong>le</strong>). Port-au-Prince : <strong>Presse</strong>s<br />
Nationa<strong>le</strong>s d'Haïti, - 2005.<br />
Théâtre :<br />
• Le B<strong>le</strong>u <strong>de</strong> l'î<strong>le</strong>, 2005, inédit.<br />
• Mise en <strong>le</strong>cture au Théâtre du Rond-Point à Paris<br />
(2005), à la Martinique et en Gua<strong>de</strong>loupe ; mise en<br />
scène par la troupe Dram'Art à Port-au-Prince en<br />
septembre 2009<br />
<strong>Prix</strong> et distinctions littéraires :<br />
15 / 46<br />
• 2004 : <strong>Prix</strong> Soroptimist <strong>de</strong> la Romancière<br />
Francophone (Grenob<strong>le</strong>), pour Rosalie l'infâme.<br />
• 2005 : <strong>Prix</strong> Beaumarchais (ex æquo), pour Le B<strong>le</strong>u<br />
<strong>de</strong> l'î<strong>le</strong>.<br />
Artic<strong>le</strong>s récents :<br />
http://www.<strong>le</strong>nouvelliste.com/artic<strong>le</strong>forprint.php<br />
?PubID=1&Artic<strong>le</strong>ID=53271<br />
http ://www.gens<strong>de</strong>lacaraibe.org/in<strong>de</strong>x.php<br />
?option=com_content&view=artic<strong>le</strong>&id=4358 :lamemoire-aux-aboisou-<strong>le</strong>xpression-tota<strong>le</strong>-<strong>de</strong>-la-memoireevelyne-trouillot&catid=209
Lyonel Trouillot<br />
Professeur <strong>de</strong> littérature et poète, Lyonel Trouillot vit<br />
dans la capita<strong>le</strong> haïtienne et est l'auteur <strong>de</strong> romans<br />
édités par Actes Sud, parmi <strong>le</strong>squels "Rue <strong>de</strong>s pasperdus",<br />
"Thérèse en mil<strong>le</strong> morceaux" ou "Les Enfants<br />
<strong>de</strong>s héros". Si <strong>le</strong> jeune homme, issu d'une famil<strong>le</strong><br />
d'avocats, fait <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> droit, sa passion pour la<br />
littérature <strong>le</strong> rattrape vite : c'est en tant qu'écrivain qu'il<br />
fera carrière.<br />
La suite <strong>de</strong> son parcours est marquée par ses<br />
collaborations dans différents journaux et revues d'Haïti.<br />
L'écrivain publie éga<strong>le</strong>ment beaucoup <strong>de</strong> poèmes et <strong>de</strong><br />
textes critiques avant <strong>de</strong> se lancer dans l'écriture <strong>de</strong><br />
textes <strong>de</strong> chansons pour <strong>de</strong>s artistes comme Tambou<br />
Libète ou Manno Char<strong>le</strong>magne.<br />
Homme <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> expérience, Lyonel Trouillot est<br />
membre du col<strong>le</strong>ctif <strong>de</strong> la revue Cahiers du vendredi et<br />
codirecteur <strong>de</strong> la col<strong>le</strong>ction portant <strong>le</strong> même nom. Il ne<br />
cesse <strong>de</strong> mettre sa notoriété au service <strong>de</strong> la démocratie<br />
<strong>de</strong> son pays et <strong>de</strong> la résistance face à une dictature<br />
oppressante, comme en témoigne <strong>le</strong> roman<br />
"Bicentenaire", paru en 2006. En publiant<br />
successivement "L'Amour avant que j'oublie", en 2007,<br />
puis "Yanvalou pour Charlie" en 2009.<br />
Lyonel Trouillot témoigne <strong>de</strong> sa capacité à convoquer un<br />
registre intime et sentimental tout en confirmant son<br />
engagement social, une richesse <strong>de</strong> répertoire qui <strong>le</strong><br />
place parmi <strong>le</strong>s auteurs francophones <strong>le</strong>s plus<br />
passionnants <strong>de</strong> sa génération.<br />
16 / 46<br />
Oeuvres principa<strong>le</strong>s<br />
Romans :<br />
• Les Fous <strong>de</strong> Saint-Antoine : traversée rythmique.<br />
(préface par René Philoctète) Port-au-Prince :<br />
<strong>Edition</strong>s Deschamps, 1989.<br />
• Le Livre <strong>de</strong> Marie. Port-au-Prince : <strong>Edition</strong>s<br />
Mémoire, 1993.<br />
• Rue <strong>de</strong>s pas perdus. Port-au-Prince : <strong>Edition</strong>s<br />
Mémoire, 1996 ; Ar<strong>le</strong>s : Actes Sud, 1998.<br />
• Thérèse en mil<strong>le</strong> morceaux. Ar<strong>le</strong>s : Actes Sud,<br />
2000.<br />
• Les Enfants <strong>de</strong>s héros. Ar<strong>le</strong>s : Actes Sud, 2002.<br />
• Bicentenaire. Ar<strong>le</strong>s : Actes Sud, 2004.<br />
• L'Amour avant que j'oublie. Ar<strong>le</strong>s : Actes Sud, 2007 ;<br />
Port-au-Prince : <strong>Presse</strong>s Nationa<strong>le</strong>s d'Haïti, 2007.<br />
• Yanvalou pour Charlie. Ar<strong>le</strong>s : Actes Sud, 2009.<br />
Nouvel<strong>le</strong>s :<br />
• Les dits du fou <strong>de</strong> l'î<strong>le</strong>. Port-au-Prince : <strong>Edition</strong>s <strong>de</strong><br />
l'Î<strong>le</strong>, 1997.<br />
• « Mariéla ». Notre Librairie 143 (janvier-mars 2001) :<br />
140-142.<br />
• « Le Testament du mal <strong>de</strong> mer ». L'Odysée<br />
atlantique, [coffret <strong>de</strong>] 6 nouvel<strong>le</strong>s inspirées par <strong>le</strong><br />
Be<strong>le</strong>m. Ar<strong>le</strong>s : Actes Sud / Fondation Be<strong>le</strong>m, 2002.<br />
Le Testament du mal <strong>de</strong> mer, réédition avec Trois<br />
poètes (poèmes dédiés à René Philoctète, à<br />
Georges Castera et à Syto Cavé). Port-au-Prince :<br />
<strong>Presse</strong>s Nationa<strong>le</strong>s d'Haïti, 2004.<br />
• « Fait-divers sur écran noir ». Paradis Brisé,<br />
nouvel<strong>le</strong>s <strong>de</strong>s Caraïbes. Col<strong>le</strong>ction Étonnants<br />
Voyageurs. Paris : Hoëbeke, 2004 : 219-229.<br />
• « Yanvalou ». Nouvel<strong>le</strong>s d'Haïti (Col<strong>le</strong>ctif). Paris :<br />
Magellan & Cie, 2007 : 57-67.<br />
Récits :<br />
• Lettres <strong>de</strong> loin en loin, une correspondance<br />
haïtienne (avec Sophie Boutaud <strong>de</strong> La Combe).<br />
Paris : Acte Sud, 2008.<br />
Poésie (en français) :<br />
• La petite fil<strong>le</strong> au regard d'î<strong>le</strong>. Port-au-Prince :<br />
Éditions Mémoire, 1994.<br />
• « menm zwazo a mouri <strong>le</strong>vi... » (« <strong>le</strong> même oiseau<br />
meurt et renaît... »). Conjonction 195 (juil<strong>le</strong>tseptembre<br />
1992) : 54-5 ; repris dans Notre Librairie<br />
133 (janvier-avril 1998) : 5.<br />
• Éloge <strong>de</strong> la contemplation, suivi <strong>de</strong> Les dits du fou<br />
<strong>de</strong> l'î<strong>le</strong> et Ren<strong>de</strong>z-vous. Paris : Riveneuve, 2009.
Pwezi (an kreyòl) :<br />
• Depa<strong>le</strong>. (en collaboration avec Pierre Richard<br />
Narcisse) Port-au-Prince : <strong>Edition</strong>s <strong>de</strong> l'Association<br />
<strong>de</strong>s écrivains haïtiens, 1979.<br />
• Zanj nan dlo. Port-au-Prince : <strong>Edition</strong>s Mémoire,<br />
1995.<br />
Artic<strong>le</strong>s choisis :<br />
• « Haïti 90 : l'esthétique du délabrement ». Notre<br />
Librairie 133 (janvier-avril 1998) : 22-25.<br />
• « Patrimoine littéraire, connais pas ! ». Conjonction<br />
206 (2001) : 5-7.<br />
• « Je porte l'î<strong>le</strong> en moi comme la langue l'oxymore ».<br />
Notre Librairie 143 (janvier-mars 2001).<br />
• « Langues, voyages et archipels ». Pour une<br />
littérature-mon<strong>de</strong>, sous la direction <strong>de</strong> Michel Le Bris<br />
et Jean Rouaud. Paris : Gallimard, 2007 : 197-204.<br />
• « Jacques Roumain : mon Bogart <strong>de</strong> gauche ». Mon<br />
Roumain à moi. Port-au-Prince : <strong>Presse</strong>s Nationa<strong>le</strong>s<br />
d'Haïti, 2007 : 173-82.<br />
• « Bonjour mon frère » (poème). Une journée<br />
haïtienne, textes réunis par Thomas C. Spear.<br />
Montréal : Mémoire d'encrier / Paris : Présence<br />
africaine, 2007 : 185-189.<br />
• « Du Québec et <strong>de</strong> la littérature... ». Riveneuve<br />
Continents 6 (août 2008) : 203-207.<br />
• De nombreux artic<strong>le</strong>s dans Le Matin (voir <strong>le</strong> site du<br />
quotidien dans <strong>le</strong>s liens ci-<strong>de</strong>ssous).<br />
17 / 46<br />
Textes <strong>de</strong> Lyonel Trouillot enregistrés et mis en<br />
musique :<br />
• « Se pa fòt mwen » et « Pòtoprens ap graje fresko<br />
», textes <strong>de</strong> Lyonel Trouillot mis en musique et<br />
interprétés par Wooly Saint Louis Jean sur son<br />
disque Quand la paro<strong>le</strong> se fait chanson, Port-au-<br />
Prince : Productions Batofou, 2005.<br />
• « Wout », poème <strong>de</strong> Lyonel Trouillot dit par Pierre<br />
Brisson sur son disque À voix basse (volume 2).<br />
Port-au-Prince : Pierre J. Brisson, 2006.<br />
<strong>Prix</strong> et distinctions littéraires :<br />
• 2002 : <strong>Prix</strong> Gouverneur <strong>de</strong> la Rosée du Livre et <strong>de</strong><br />
la Littérature, Ministère <strong>de</strong> la Culture, Haïti, pour «<br />
Les Vendredis Littéraires ».<br />
• 2005 : <strong>Prix</strong> TSR du roman (Télévision Suisse<br />
Roman<strong>de</strong>), pour Bicentenaire.<br />
• 2005 : <strong>Prix</strong> Louis-Guilloux, pour Bicentenaire.<br />
• 2006 : <strong>Prix</strong> <strong>de</strong>s <strong>Amériques</strong> insulaires et <strong>de</strong> la<br />
Guyane (ex æquo), pour Bicentenaire.<br />
• 2009 : <strong>Prix</strong> Wep<strong>le</strong>r-Fondation La Poste, pour<br />
Yanvalou pour Charlie.<br />
Artic<strong>le</strong>s :<br />
http ://www.evene.fr/livres/actualite/haiti-lyonel-trouillotetonnants-voyageurs-tremb<strong>le</strong>ment-terre-2723.php<br />
http<br />
://homepage.mac.com/chemla/fic_doc/trouillot01.html
Marcio Veloz Maggiolo<br />
Essayiste, conteur, romancier, poète, dramaturge et<br />
journaliste, Mario Veloz Maggiolo est reconnu comme <strong>le</strong><br />
plus grand auteur dominicain contemporain. En 1996, il a<br />
reçu <strong>le</strong> <strong>Prix</strong> national <strong>de</strong> littérature pour l'ensemb<strong>le</strong> <strong>de</strong> son<br />
oeuvre. En France, on <strong>le</strong> découvre avec "L'homme à<br />
l'accordéon", en 2004, son premier roman traduit en<br />
français.<br />
C'est aussi un spécialiste en sciences-humaines. Après<br />
<strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> <strong>le</strong>ttres, <strong>de</strong> philosophie, d'histoire,<br />
d'anthropologie et d'archéologie, il <strong>de</strong>vient professeur<br />
d'ethnologie, et d'anthropologie à l'université autonome<br />
<strong>de</strong> Saint-Domingue.<br />
Œuvres principa<strong>le</strong>s<br />
• 1957 : Le so<strong>le</strong>il et <strong>le</strong>s choses<br />
• 1960 : The Good Thief<br />
• 1961 : Créon et six histoires<br />
• 1962 : Le fugitif<br />
• 1965 : La vie n'a pas <strong>de</strong> nom<br />
• 1966 : Anges <strong>de</strong> pierre<br />
• 1969 : Culture, <strong>le</strong> théâtre et <strong>le</strong>s histoires <strong>de</strong> Saint-<br />
Domingue<br />
• 1975 : A partir d'avril<br />
• 1977 : Culture dominicaine propos<br />
18 / 46<br />
• 1978 : Où avez <strong>le</strong> peup<strong>le</strong><br />
• 1980 : Sur la culture et la politique culturel<strong>le</strong> en<br />
République dominicaine<br />
• 1981 : La réunion mot<br />
• 1986 : Descendre <strong>le</strong> masque<br />
• 1986 : Florbella<br />
• 1986 : Histoires, raconte et casicuentos<br />
• 1986 : La poésie dans la fabrication et <strong>le</strong> retour à la<br />
Paro<strong>le</strong><br />
• 1993 : Le chef était pieds nus Intus (<strong>Prix</strong> National <strong>de</strong><br />
Poésie 1962)<br />
<strong>Prix</strong> et distinctions littéraires :<br />
• Judas - The Good Thief (Premio Nacional <strong>de</strong> Novela<br />
1962)<br />
• 1996 : Trujillo, Francisca Villa et Ghosts<br />
• Biographie Castañeda (Premio Nacional <strong>de</strong> Novela<br />
1981)<br />
• L'agonie <strong>de</strong> l'amour ferti<strong>le</strong> (National Short Story<br />
Award 1981)<br />
• Matières premières (prix annuel pour <strong>le</strong> roman<br />
1990)<br />
• Rites <strong>de</strong> cabaret (<strong>Prix</strong> annuel pour <strong>le</strong> roman 1992)<br />
Artic<strong>le</strong>s :<br />
http ://www.culturessud.com/contenu.php ?id=182
Retour sur <strong>le</strong>s débuts<br />
Bilan <strong>de</strong> l’édition 2008<br />
Fondé en juin 2000, à Saint-François, à l’initiative <strong>de</strong> l’écrivain Maryse Condé et <strong>de</strong> l’industriel, Amédée<br />
Huyghues Despointes, <strong>le</strong> <strong>Prix</strong> <strong>de</strong>s <strong>Amériques</strong> insulaires - prix Amédée Huyghues Hespointes - cherche<br />
à faire écho à l’imaginaire romanesque du grand bassin caribéen et à susciter auprès d’un large public<br />
<strong>le</strong> goût <strong>de</strong>s mots et <strong>de</strong>s histoires.<br />
Au cours d’une semaine <strong>de</strong> rencontres et <strong>de</strong> <strong>le</strong>ctures publiques, auxquel<strong>le</strong>s participent <strong>le</strong> jury, <strong>le</strong>s<br />
auteurs invités et <strong>le</strong>s écrivains en sé<strong>le</strong>ction, cette manifestation littéraire bienna<strong>le</strong>, centrée sur<br />
l’attribution d’un prix et <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux bourses d’écriture décernés à la Gua<strong>de</strong>loupe, apporte sa contribution à<br />
la connaissance et à la diffusion <strong>de</strong>s œuvres.<br />
Depuis la première édition dont <strong>le</strong>s auteurs invités, notamment Edwige Danticat, témoignaient <strong>de</strong> son<br />
ancrage dans <strong>le</strong>s zones francophone, hispanophone et anglophone <strong>de</strong> la Caraïbe, <strong>le</strong> <strong>Prix</strong> <strong>de</strong>s<br />
<strong>Amériques</strong> insulaires affermit aussi sa vocation d’ouverture aux écritures du mon<strong>de</strong>.<br />
Après avoir reçu en juin 2002 Zadie Smith, l’édition 2004 a permis <strong>de</strong> mettre en évi<strong>de</strong>nce la vitalité<br />
littéraire <strong>de</strong> l’océan indien grâce à la présence <strong>de</strong> Jean-Marie Gustave <strong>le</strong> Clézio, aujourd’hui membre du<br />
jury du <strong>Prix</strong>.<br />
La venue, lors <strong>de</strong> l’édition 2006, d’Alain Mabanckou, <strong>de</strong>venu éga<strong>le</strong>ment membre du jury, et <strong>de</strong> Yasmina<br />
Khadra a, pour sa part apporté un éclairage particulier aux productions du Maghreb et <strong>de</strong> l’Afrique.<br />
Bilan d’activité <strong>de</strong> l’édition 2008<br />
La cinquième édition du <strong>Prix</strong> <strong>de</strong>s <strong>Amériques</strong> insulaires qui s’est déroulée du 20 au 28 juin 2008, avait<br />
pour invités l’auteur dramatique et comédien Jean-René Lemoine, <strong>le</strong> romancier Pedro Pérez Sarduy.<br />
Pour conforter sa présence dans l’espace caribéen, el<strong>le</strong> a inauguré un nouveau passage au cœur d’un<br />
autre territoire <strong>de</strong> la Caraïbe.<br />
Sous l’égi<strong>de</strong> du Prési<strong>de</strong>nt du Jury Dany Laferrière, Alain Mabanckou, Gisè<strong>le</strong> Pineau, Michel Reinette, et<br />
certains <strong>de</strong>s écrivains en sé<strong>le</strong>ction dont Zoé Valdès, ont participé - du 20 au 22 juin- avec Yanick<br />
Lahens, Emmelie Prophète et Gary Victor à <strong>de</strong>s échanges organisés par <strong>le</strong> Ministère <strong>de</strong> la Culture<br />
d’Haïti et l’institut français <strong>de</strong> Port-au-Prince.<br />
D’autres auteurs tels Bonel Auguste, Duccha Charitab<strong>le</strong>, Pierre Clitandre, Kerline Devise et Clau<strong>de</strong><br />
Pierre <strong>le</strong>s ont accompagnés dans <strong>le</strong>s ren<strong>de</strong>z-vous programmés à Port-au-Prince et en province.<br />
À l’instar <strong>de</strong>s éditions précé<strong>de</strong>ntes, l’organisation en Gua<strong>de</strong>loupe - en juin 2008- <strong>de</strong> conférences et <strong>de</strong><br />
débats a offert, jusqu’à la désignation du lauréat, entre tous <strong>le</strong>s acteurs <strong>de</strong> la manifestation, <strong>le</strong>s<br />
personnalités invitées et <strong>le</strong>s écrivains nominés : Pedro Juan Gutiérrez, Mayra Montero et Zoé Valdès <strong>de</strong><br />
nombreuses occasions <strong>de</strong> partage au gré d’un ca<strong>le</strong>ndrier conçu pour inviter <strong>le</strong> public à la plus large<br />
participation et à une véritab<strong>le</strong> intimité avec <strong>le</strong> mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’écriture.<br />
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Une Après-midi au Fort, organisée en partenariat avec la Médiathèque Caraïbe et la librairie Jasor a<br />
retrouvé, par l’animation <strong>de</strong> séances <strong>de</strong> signatures et <strong>de</strong> <strong>le</strong>ctures, sa place d’excel<strong>le</strong>nce au centre <strong>de</strong><br />
cette saison littéraire et s’est enrichie d’un concert et <strong>de</strong> la projection du film <strong>de</strong> Philippe Bérenger :<br />
Cahier d’un retour au pays natal.<br />
Un nouveau ren<strong>de</strong>z-vous au théâtre <strong>de</strong> verdure du Lamentin : Jardin <strong>de</strong>s <strong>Amériques</strong> a offert au public la<br />
mise en <strong>le</strong>cture du texte Cambridge <strong>de</strong> Caryl Philipps par <strong>le</strong> comédien Jean-René Lemoine, précédée<br />
d’une performance musica<strong>le</strong>.<br />
Le jury, présidé par Dany Laferrière, était composé <strong>de</strong> :<br />
Alain Mabanckou | Eduardo Manet | Daniel Picouly | Gisè<strong>le</strong> Pineau | Simone Schwartz-Bart<br />
| Philippe Val<strong>le</strong>t.<br />
Les écrivains et personnalités invités étaient :<br />
Jean-René Lemoine | Michel Reinette | Pedro Pérez Sarduy | Yanick Lahens | Emmelie<br />
Prophète | Gary Victor<br />
Bonel Auguste | Duccha Charitab<strong>le</strong> | Pierre Clitandre | Kerline Devise | Clau<strong>de</strong>l Pierre .<br />
Parmi <strong>le</strong>s trois auteurs nominés : Pedro Juan Gutiérrez, Mayra Montero et Zoé Valdès, <strong>le</strong> jury a décidé<br />
<strong>de</strong> récompenser Pedro Juan Gutiérrez pour son roman Le nid du serpent publié en août 2007 aux<br />
éditions Albin Michel.<br />
Il a salué l’écriture crue et provocante <strong>de</strong> l’auteur, une voix nouvel<strong>le</strong> <strong>de</strong> la littérature cubaine où<br />
s’expriment <strong>le</strong>s rages d’un jeune homme contre la pauvreté et <strong>le</strong>s désordres d’une société.<br />
Deux bourses d’écriture ont été décernées à Mayra Montero et Zoé Valdès respectivement pour La<br />
Havane, 1957 publié aux éditions Gallimard en octobre 2007, un livre dans <strong>le</strong>quel la romancière<br />
réinvente <strong>le</strong>s cabarets, <strong>le</strong>s grands hôtels, <strong>le</strong> zoo et la mafia dans <strong>le</strong> Cuba d’avant Castro et, pour<br />
L’éternité <strong>de</strong> l’instant publié aux éditions Gallimard en mars 2007, un roman d’un genre nouveau,<br />
comme un retour aux sources, aux origines chinoises <strong>de</strong> son auteur.<br />
Le résultat du vote du jury qui a délibéré à la Gua<strong>de</strong>loupe a été annoncé par Patrick Poivre d’Arvor,<br />
retenu à Paris, dans <strong>le</strong> cadre d’une visioconférence.<br />
Objectifs<br />
Pour la cinquième édition, l’objectif du projet a été reconduit, à savoir : proposer à la Gua<strong>de</strong>loupe une<br />
manifestation littéraire d’envergure et contribuer ainsi au rayonnement culturel <strong>de</strong> la région. En se<br />
plaçant ainsi au carrefour <strong>de</strong>s écritures <strong>de</strong>s <strong>Amériques</strong> insulaires, l’archipel s’attache à <strong>de</strong>venir, l’espace<br />
d’une saison littéraire, <strong>le</strong> lieu <strong>de</strong> résonance <strong>de</strong> multip<strong>le</strong>s imaginaires.<br />
Une itinérance au cœur <strong>de</strong>s <strong>Amériques</strong> insulaires s’est conjuguée à cet objectif initial par un ancrage<br />
enthousiasmant en Haïti. Ainsi l’édition 2008 a t-el<strong>le</strong> confirmé sa volonté <strong>de</strong> dialogue et <strong>de</strong> fraternité<br />
avec d’autres î<strong>le</strong>s <strong>de</strong> la Caraïbe.<br />
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Contenus<br />
L’attribution du <strong>Prix</strong>, au terme d’une session d’animations littéraires a convié <strong>le</strong> public à rencontrer un<br />
large plateau d’écrivains.<br />
De la conférence inaugura<strong>le</strong> : Je suis un écrivain japonais présentée par Dany Laferrière à la rési<strong>de</strong>nce<br />
départementa<strong>le</strong>, à la désignation <strong>de</strong>s lauréats, <strong>de</strong> nombreux ren<strong>de</strong>z-vous ont permis aux <strong>le</strong>cteurs d’être,<br />
dans la liberté <strong>de</strong>s débats, au contact <strong>de</strong>s écrivains et <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs œuvres.<br />
Un programme, largement diffusé, indiquait <strong>le</strong>s tab<strong>le</strong>s ron<strong>de</strong>s, entretiens, conférences et dédicaces<br />
proposés dans <strong>le</strong>s nombreux lieux <strong>de</strong> <strong>le</strong>cture publique qui ont accueilli <strong>le</strong>s échanges.<br />
La réception en Haïti et en Gua<strong>de</strong>loupe <strong>de</strong>s écrivains <strong>de</strong>s Caraïbes insulaires et <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s auteurs<br />
invités a mobilisé en retour la contribution <strong>de</strong>s <strong>le</strong>cteurs, <strong>de</strong>s intel<strong>le</strong>ctuels et <strong>de</strong> la presse.<br />
Outre ces échanges qui manifestent la volonté d’associer au plus prés <strong>le</strong> public à la connaissance <strong>de</strong>s<br />
œuvres en compétition, et plus particulièrement à cel<strong>le</strong>s <strong>de</strong>s trois nominés présents au long <strong>de</strong> la<br />
semaine <strong>de</strong> rencontres, la diffusion d’un livret a assuré l’impact littéraire <strong>de</strong> la manifestation et laissé<br />
une trace durab<strong>le</strong> <strong>de</strong> l’engagement et <strong>de</strong> l’adhésion <strong>de</strong>s partenaires.<br />
Le Comité <strong>de</strong> pilotage, constitué notamment d’une directrice <strong>de</strong> Médiathèque, d’un professeur <strong>de</strong><br />
collège, d’un professeur <strong>de</strong>s éco<strong>le</strong>s et d’un journaliste, a été partie prenante <strong>de</strong> l’opération et s’est<br />
impliqué, dans <strong>le</strong>s secteurs respectifs d’intervention <strong>de</strong> ses différents membres, avant, pendant et après<br />
la manifestation.<br />
En <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s partenaires institutionnels, qui répon<strong>de</strong>nt très généreusement au projet <strong>de</strong> la<br />
manifestation, <strong>le</strong>s déci<strong>de</strong>urs du mon<strong>de</strong> économique et culturel ont été sollicités sur <strong>le</strong> plan financier et<br />
organisationnel.<br />
La sucrerie Gar<strong>de</strong>l avec laquel<strong>le</strong> l’entreprise Siagat, qui initie et assure l’organisation <strong>de</strong> la<br />
manifestation, entretient <strong>de</strong>s liens historiques, a confirmé l’attribution <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux bourses d’écriture qui<br />
permettent <strong>de</strong> pérenniser ainsi un chal<strong>le</strong>nge intéressant.<br />
Une priorité a été donnée à la recherche <strong>de</strong> fonds privés auprès <strong>de</strong>s acteurs économiques <strong>de</strong> la<br />
Gua<strong>de</strong>loupe, qui ont répondu à hauteur <strong>de</strong> 51 000 €, soit près <strong>de</strong> 40 % du budget réalisé.<br />
Les relations privilégiées établies pendant la manifestation permettent d’espérer <strong>le</strong>s voir renouve<strong>le</strong>r <strong>le</strong>ur<br />
partenariat dans <strong>le</strong> cadre <strong>de</strong>s prochaines éditions du <strong>Prix</strong> et <strong>le</strong> rayonnement <strong>de</strong>s manifestations<br />
littéraires, <strong>de</strong> motiver <strong>de</strong> nouveaux sponsors d’autant que la distinction <strong>de</strong> Jean-Marie <strong>le</strong> Clézio,<br />
membre du jury du <strong>Prix</strong>, retenu cette année en Corée mais présent au travers d’un long message<br />
adressé au public, ajoute <strong>le</strong> prestige du prix Nobel <strong>de</strong> littérature à la manifestation.<br />
Public et médiatisation<br />
L’édition <strong>de</strong> supports <strong>de</strong> communication variés a permis <strong>de</strong> donner une large visibilité à la manifestation,<br />
relayée quotidiennement par une campagne <strong>de</strong> promotion radiophonique financée par <strong>le</strong> Conseil<br />
Général et la librairie Jasor.<br />
Certains <strong>de</strong> ces supports ont été diffusés en amont, notamment <strong>le</strong>s dossiers <strong>de</strong> presse, programmes,<br />
affiches et communiqués.<br />
Pour ce qui concerne <strong>le</strong>s livrets, ils ont été distribués gratuitement pendant la manifestation et laissés à<br />
la disposition <strong>de</strong>s <strong>le</strong>cteurs <strong>de</strong>s médiathèques et bibliothèques d’Haïti et <strong>de</strong> la Gua<strong>de</strong>loupe. Des roll-up<br />
ont assuré la permanence du visuel du <strong>Prix</strong> <strong>de</strong>s <strong>Amériques</strong> insulaires dans <strong>le</strong>s différents lieux <strong>de</strong><br />
rencontre.<br />
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Grâce au recrutement d’une attachée <strong>de</strong> presse et à la présence d’une stagiaire <strong>de</strong> l’EFAP, la mise en<br />
place et <strong>le</strong> suivi d’un média-planning, orienté vers <strong>le</strong>s émissions <strong>de</strong> proximité en radio et en télévision a<br />
permis aux écrivains <strong>de</strong> se faire connaître du grand public. La conférence du Prési<strong>de</strong>nt du Jury a<br />
notamment été diffusée dans son intégralité sur une chaîne régiona<strong>le</strong>.<br />
Ce public, particulièrement nombreux lors d’un grand ren<strong>de</strong>z-vous comme Une Après-Midi au Fort a<br />
montré ses capacités d’intervention et d’échanges et prouvé l’impact <strong>de</strong> la manifestation sur la scène<br />
culturel<strong>le</strong> <strong>de</strong> la Gua<strong>de</strong>loupe.<br />
Le Prési<strong>de</strong>nt, <strong>le</strong>s membres du jury, <strong>le</strong>s auteurs nominés, <strong>le</strong>s personnalités et <strong>le</strong>s écrivains invités ont<br />
rencontré <strong>de</strong> nombreux <strong>le</strong>cteurs en Haïti dans différents lieux comme la Fokal, l’Institut français <strong>de</strong> Portau-Prince,<br />
<strong>le</strong>s bibliothèques <strong>de</strong> province, en Gua<strong>de</strong>loupe dans <strong>le</strong>s médiathèques, <strong>le</strong> Fort F<strong>le</strong>ur d’Épée<br />
du Gosier ou <strong>le</strong> théâtre <strong>de</strong> Verdure du Lamentin.<br />
L’itinérance en Haïti avait ouvert un champ prometteur <strong>de</strong> relations, cristallisées par la création du<br />
concours Écrivains, nouvel<strong>le</strong> génération. El<strong>le</strong>s <strong>de</strong>vaient s’enrichir <strong>de</strong> nouveaux partages avec la<br />
Caraïbe littéraire anglophone et hispanophone notamment, dans <strong>le</strong> cadre <strong>de</strong> l’esca<strong>le</strong> prévue à Saint-<br />
Domingue en juin <strong>2010</strong>.<br />
Mais, après <strong>le</strong> séisme du 12 janvier, <strong>le</strong> Festival Écritures <strong>de</strong>s <strong>Amériques</strong> est sommé <strong>de</strong> modifier son<br />
rythme et sa trajectoire pour suivre <strong>le</strong> sillage <strong>de</strong>s écrivains qui, au milieu <strong>de</strong>s ruines, ont témoigné du<br />
pouvoir <strong>de</strong> la littérature pour dire Haïti à la face du mon<strong>de</strong>. Une première séquence <strong>de</strong> la manifestation<br />
aura lieu en juin, à la Gua<strong>de</strong>loupe, sous la forme d’une rési<strong>de</strong>nce d’auteurs haïtiens, favorab<strong>le</strong> à<br />
l’écriture autant qu’aux ren<strong>de</strong>z-vous avec <strong>le</strong>s <strong>le</strong>cteurs.<br />
La secon<strong>de</strong>, initiée en novembre par la tenue du concours Écrivains, nouvel<strong>le</strong> génération prolongera, <strong>le</strong><br />
dialogue et <strong>le</strong>s échanges entre nos <strong>de</strong>ux pays, à travers <strong>le</strong>s différentes variations du programme<br />
littéraire.<br />
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Annexes<br />
Témoignages recueillis suite au séisme survenu en Haïti <strong>le</strong> 12 janvier <strong>2010</strong><br />
Suite au séisme <strong>de</strong> janvier <strong>2010</strong> qui a touché Haïti ; <strong>le</strong>s auteurs <strong>de</strong> l’î<strong>le</strong> et <strong>de</strong> Gua<strong>de</strong>loupe témoignent et<br />
donnent <strong>le</strong>urs sentiments sur cet évènement.<br />
Haïti : <strong>le</strong> témoignage <strong>de</strong> Dany Laferrière<br />
Romancier récompensé à l'automne 2009 par <strong>le</strong> prix Médicis pour L'Enigme du retour (Grasset), Dany Laferrière faisait<br />
partie <strong>de</strong>s écrivains invités au festival Etonnants Voyageurs en Haïti, qui <strong>de</strong>vait avoir lieu à Port-au-Prince du 14 au 21<br />
janvier. Après plusieurs jours passés dans la capita<strong>le</strong> haïtienne, <strong>de</strong> retour à Montréal, où il rési<strong>de</strong> <strong>de</strong>puis <strong>de</strong> longues années,<br />
il nous a accordé, vendredi 15 janvier, un entretien.<br />
Où étiez-vous lorsque <strong>le</strong> séisme s'est produit ?<br />
J'étais à l'Hôtel Karibé, qui se situe à Pétionvil<strong>le</strong>, en<br />
compagnie <strong>de</strong> l'éditeur Rodney Saint-Eloi. Il venait juste<br />
d'arriver et voulait al<strong>le</strong>r dans sa chambre. Comme j'avais<br />
faim, je l'ai entraîné au restaurant et cela l'a peut-être<br />
sauvé… Nous étions donc en train <strong>de</strong> dîner lorsque nous<br />
avons entendu un bruit très fort. Dans un premier temps,<br />
j'ai pensé que c'était une explosion qui venait <strong>de</strong>s<br />
cuisines, puis ensuite j'ai compris qu'il s'agissait d'un<br />
tremb<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> terre. Je suis aussitôt sorti dans la cour<br />
et me suis couché par terre. Il y a eu soixante secon<strong>de</strong>s<br />
interminab<strong>le</strong>s où j'ai eu l'impression que ça allait non<br />
seu<strong>le</strong>ment jamais finir, mais que <strong>le</strong> sol pouvait s'ouvrir.<br />
C'est énorme. On a <strong>le</strong> sentiment que la terre <strong>de</strong>vient une<br />
feuil<strong>le</strong> <strong>de</strong> papier. Il n'y plus <strong>de</strong> <strong>de</strong>nsité, vous ne sentez<br />
plus rien, <strong>le</strong> sol est tota<strong>le</strong>ment mou.<br />
Et après ces soixante secon<strong>de</strong>s ?<br />
Nous nous sommes re<strong>le</strong>vés et nous nous sommes<br />
dit qu'il fallait s'éloigner <strong>de</strong> l'hôtel, qui est un<br />
bâtiment assez haut, donc peu sûr. Nous sommes alors<br />
<strong>de</strong>scendus vers <strong>le</strong> terrain <strong>de</strong> tennis, où tout <strong>le</strong> mon<strong>de</strong><br />
s'est regroupé. Deux ou trois minutes plus tard, nous<br />
avons commencé à entendre <strong>de</strong>s cris… Près <strong>de</strong> l'hôtel,<br />
où il n'y avait que peu <strong>de</strong> dégâts, il y a, dans la cour, <strong>de</strong><br />
23 / 46<br />
petits immeub<strong>le</strong>s où <strong>le</strong>s gens vivent à l'année. Tous<br />
étaient effondrés. On a dénombré neuf morts. Alors qu'on<br />
redoutait d'autres secousses, <strong>de</strong>s personnes se sont<br />
<strong>le</strong>vées pour commencer à porter secours.<br />
Un énorme si<strong>le</strong>nce est tombé sur la vil<strong>le</strong>. Personne ne<br />
bougeait ou presque. Chacun essayait d'imaginer où<br />
pouvaient se trouver ses proches. Car lorsque <strong>le</strong> séisme<br />
s'est produit, mardi 12 janvier, Port-au-Prince était en<br />
p<strong>le</strong>in mouvement. A 16heures, <strong>le</strong>s élèves traînent encore<br />
après <strong>le</strong>s cours. C'est <strong>le</strong> moment où <strong>le</strong>s gens font <strong>le</strong>urs<br />
<strong>de</strong>rnières courses avant <strong>de</strong> rentrer et où il y a <strong>de</strong>s<br />
embouteillages. Une heure d'éclatement total <strong>de</strong> la<br />
société, d'éparpil<strong>le</strong>ment. Entre 15 et 16heures, vous<br />
savez où se trouvent vos proches mais pas à 16h50.<br />
L'angoisse était tota<strong>le</strong>. El<strong>le</strong> a créé un si<strong>le</strong>nce étourdissant<br />
qui a duré <strong>de</strong>s heures. Ensuite, on a commencé à<br />
rechercher <strong>le</strong>s gens. Nous sommes retournés à l'hôtel et,<br />
grâce à la radio américaine et au bouche-à-oreil<strong>le</strong>, on a<br />
appris que <strong>le</strong> palais prési<strong>de</strong>ntiel s'était effondré mais que<br />
<strong>le</strong> prési<strong>de</strong>nt Préval était sauf. Mais personne autour <strong>de</strong><br />
nous n'avait <strong>de</strong> nouvel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> sa famil<strong>le</strong>.<br />
Comment en avez-vous eu ?<br />
Grâce à mon ami, <strong>le</strong> romancier Lyonel Trouillot,<br />
admirab<strong>le</strong>. Bien qu'il ait <strong>de</strong>s difficultés pour marcher, il est<br />
venu à pied jusqu'à l'hôtel. Nous étions sur <strong>le</strong> terrain <strong>de</strong>
tennis, il ne nous a pas vus. Il est revenu <strong>le</strong> <strong>le</strong>n<strong>de</strong>main en<br />
voiture pour m'emmener chez ma mère. Après quoi, nous<br />
sommes passés voir <strong>le</strong> grand Frankétienne [dramaturge<br />
et écrivain], qui avait sa maison fissurée et qui était en<br />
larmes. Juste avant <strong>le</strong> séisme, il répétait <strong>le</strong> solo d'une <strong>de</strong><br />
ses pièces <strong>de</strong> théâtre qui évoque un tremb<strong>le</strong>ment <strong>de</strong><br />
terre à Port-au-Prince. Il m'a dit: "On ne peut plus jouer<br />
cette pièce."<br />
Je lui ai répondu: "Ne laisse pas tomber, c'est la culture<br />
qui nous sauvera. Fais ce que tu sais faire." Ce<br />
tremb<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> terre est un événement tragique, mais la<br />
culture, c'est ce qui structure ce pays. Je l'ai incité à sortir<br />
en lui disant que <strong>le</strong>s gens avaient besoin <strong>de</strong> <strong>le</strong> voir.<br />
Lorsque <strong>le</strong>s repères physiques tombent, il reste <strong>le</strong>s<br />
repères humains. Frankétienne, cet immense artiste, est<br />
une métaphore <strong>de</strong> Port-au-Prince. Il fallait qu'il sorte <strong>de</strong><br />
chez lui. En me rendant chez ma mère, j'étais angoissé<br />
car j'ai vu <strong>de</strong>s immeub<strong>le</strong>s en apparence soli<strong>de</strong>s<br />
tota<strong>le</strong>ment détruits, et aussi d'innombrab<strong>le</strong>s victimes.<br />
Même à Pétionvil<strong>le</strong>, moins touchée ?<br />
Oui, beaucoup. J'ai commencé à <strong>le</strong>s compter, puis j'ai<br />
cessé… C'étaient <strong>de</strong>s pi<strong>le</strong>s <strong>de</strong> corps que <strong>le</strong>s gens<br />
disposaient avec soin, <strong>le</strong> long <strong>de</strong>s routes, en <strong>le</strong>s couvrant<br />
d'un drap ou d'un tissu. Après <strong>le</strong> temps <strong>de</strong> si<strong>le</strong>nce et<br />
d'angoisse, <strong>le</strong>s gens ont commencé à sortir et à<br />
s'organiser, à colmater <strong>le</strong>urs maisons. Car ce qui a sauvé<br />
cette vil<strong>le</strong> c'est l'énergie <strong>de</strong>s plus pauvres. Pour ai<strong>de</strong>r,<br />
pour al<strong>le</strong>r chercher à manger, tous ces gens ont créé une<br />
gran<strong>de</strong> énergie dans toute la vil<strong>le</strong>. Ils ont donné<br />
l'impression que la vil<strong>le</strong> était vivante. Sans eux, Port-au-<br />
Prince serait restée une vil<strong>le</strong> morte, car <strong>le</strong>s gens qui ont<br />
<strong>de</strong> quoi vivre sont restés chez eux pour la plupart.<br />
C'est pour témoigner <strong>de</strong> cette énergie que vous êtes<br />
rentré ?<br />
En effet, mais pas seu<strong>le</strong>ment. Lorsque l'ambassa<strong>de</strong> du<br />
Canada m'a proposé d'embarquer vendredi, j'ai accepté<br />
car je craignais que cette catastrophe ne provoque un<br />
discours très stéréotypé. Il faut cesser d'employer ce<br />
terme <strong>de</strong> malédiction. C'est un mot insultant qui sousentend<br />
qu'Haïti a fait quelque chose <strong>de</strong> mal et qu'il <strong>le</strong><br />
paye.<br />
C'est un mot qui ne veut rien dire scientifiquement. On a<br />
subi <strong>de</strong>s cyclones, pour <strong>de</strong>s raisons précises, il n'y a pas<br />
eu <strong>de</strong> tremb<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> terre d'une tel<strong>le</strong> magnitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>puis<br />
<strong>de</strong>ux cents ans. Si c'était une malédiction, alors il faudrait<br />
dire aussi que la Californie ou <strong>le</strong> Japon sont maudits.<br />
24 / 46<br />
Passe encore que <strong>de</strong>s télévangélistes américains<br />
préten<strong>de</strong>nt que <strong>le</strong>s Haïtiens ont passé un pacte avec <strong>le</strong><br />
diab<strong>le</strong>, mais pas <strong>le</strong>s médias… Ils feraient mieux <strong>de</strong> par<strong>le</strong>r<br />
<strong>de</strong> cette énergie incroyab<strong>le</strong> que j'ai vue, <strong>de</strong> ces hommes<br />
et <strong>de</strong> ces femmes qui, avec courage et dignité,<br />
s'entrai<strong>de</strong>nt. Bien que la vil<strong>le</strong> soit en partie détruite et que<br />
l'Etat soit décapité, <strong>le</strong>s gens restent, travail<strong>le</strong>nt et vivent.<br />
Alors <strong>de</strong> grâce, cessez d'employer <strong>le</strong> terme <strong>de</strong><br />
malédiction, Haïti n'a rien fait, ne paye rien, c'est une<br />
catastrophe qui pourrait arriver n'importe où.<br />
Il y a une autre expression qu'il faudrait cesser<br />
d'employer à tort et à travers, c'est cel<strong>le</strong> <strong>de</strong> pillage.<br />
Quand <strong>le</strong>s gens, au péril <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur vie, vont dans <strong>le</strong>s<br />
décombres chercher <strong>de</strong> quoi boire et se nourrir avant que<br />
<strong>de</strong>s grues ne viennent tout raser, cela ne s'apparente pas<br />
à du pillage mais à <strong>de</strong> la survie. Il y aura sans doute du<br />
pillage plus tard, car toute vil<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux millions<br />
d'habitants possè<strong>de</strong> son quota <strong>de</strong> bandits, mais jusqu'ici<br />
ce que j'ai vu ce ne sont que <strong>de</strong>s gens qui font ce qu'ils<br />
peuvent pour survivre.<br />
Comment est perçue la mobilisation<br />
internationa<strong>le</strong> ?<br />
Les gens sentent que cette fois, cette ai<strong>de</strong> est sérieuse,<br />
que ce n'est pas un geste théâtral comme cela a pu se<br />
produire par <strong>le</strong> passé. On perçoit que <strong>le</strong>s gouvernements<br />
étrangers veu<strong>le</strong>nt vraiment faire quelque pour chose pour<br />
Haïti, et aussi que dans <strong>le</strong> pays personne ne veut<br />
détourner cette ai<strong>de</strong>. Car ce qui vient <strong>de</strong> se produire est<br />
bien trop grave. Il y a tant à faire, à commencer par<br />
ramasser <strong>le</strong>s morts. Cela prendra sans doute plusieurs<br />
semaines. Ensuite, il faudra déblayer toute la vil<strong>le</strong> pour<br />
éviter <strong>le</strong>s épidémies. Mais <strong>le</strong> problème numéro un, c'est<br />
l'eau, car à Port-au-Prince, el<strong>le</strong> est polluée.<br />
Habituel<strong>le</strong>ment, on la fait bouillir pour la boire, mais il n'y<br />
a plus <strong>de</strong> gaz.<br />
Les Haïtiens espèrent beaucoup <strong>de</strong> la communauté<br />
internationa<strong>le</strong>. Si <strong>de</strong>s choses sont décidées à un très<br />
haut niveau, dans <strong>le</strong> cadre d'un vaste plan <strong>de</strong><br />
reconstruction, alors <strong>le</strong>s Haïtiens sont prêts à accepter<br />
cette <strong>de</strong>rnière souffrance. La représentation <strong>de</strong> l'Etat, à<br />
travers <strong>le</strong> gouvernement décimé, étant touchée, c'est <strong>le</strong><br />
moment d'al<strong>le</strong>r droit vers <strong>le</strong> peup<strong>le</strong> et <strong>de</strong> faire enfin<br />
quelque chose d'audacieux pour ce pays.<br />
Propos recueillis par Christine Rousseau<br />
Artic<strong>le</strong> paru dans l'édition du Mon<strong>de</strong> datée du<br />
17.01.10
Des mots lâchés en catastrophe, James NOEL<br />
Poète-vitrier né à Hinche, James Noël publie dans diverses revues et journaux et a vu son recueil « <strong>le</strong> sang visib<strong>le</strong> du vitrier<br />
» édité chez Vents d’ail<strong>le</strong>urs. Ses textes poétiques sont éga<strong>le</strong>ment mis en musique.<br />
Texte paru initia<strong>le</strong>ment dans <strong>le</strong> Nouvel Observateur du 25 janvier <strong>2010</strong>. Cet artic<strong>le</strong> est reproduit avec l’autorisation <strong>de</strong><br />
l’auteur.<br />
DES MOTS LACHES EN CATASTROPHE<br />
Nous ne sommes pas à notre première fin du mon<strong>de</strong> en Haïti.<br />
Ici la mort saccage abondamment. Nous p<strong>le</strong>urons nos<br />
morts sans plus disposer d’une seu<strong>le</strong> goutte <strong>de</strong> larme<br />
dans <strong>le</strong> corps. Plus <strong>de</strong> dix jours après <strong>le</strong> drame, <strong>le</strong>s rues<br />
sont dégagées <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs montagnes <strong>de</strong> cadavres. Les<br />
famil<strong>le</strong>s qui ont découvert <strong>le</strong>urs morts <strong>le</strong>s enterrent sans<br />
perdre <strong>de</strong> temps dans <strong>le</strong>ur cour, question d’éviter la fosse<br />
commune. Ces morts-là, ne sont pas encore déclarés.<br />
De toutes <strong>le</strong>s victimes <strong>de</strong> cette fin du mon<strong>de</strong> sur mesure,<br />
en saura-t-on jamais <strong>le</strong> nombre un jour ?<br />
Les rues sont déblayées, mais <strong>le</strong>s ruines mangent tout<br />
l’espace, faudrait attendre encore <strong>de</strong>s semaines, voire<br />
plusieurs mois pour débarrasser la cité <strong>de</strong> tous ces<br />
bâtiments brisés, <strong>de</strong> toutes ces vies cassées en bloc<br />
sous <strong>le</strong>s décombres. Ces <strong>de</strong>rniers jours à Port-au-Prince,<br />
après <strong>le</strong> séisme assassin-démolisseur <strong>de</strong> magnitu<strong>de</strong> 7,<br />
<strong>le</strong>s habitants se réveil<strong>le</strong>nt, pour ceux qui arrivent à<br />
dormir, avec <strong>le</strong> saisissement d’être authentiquement<br />
vivants. Les questions d’urgence qui se posent lors <strong>de</strong>s<br />
retrouvail<strong>le</strong>s... Est-ce qu’un tel ou une tel<strong>le</strong> a survécu ou<br />
pas ? Si la personne a survécu, ça provoque un<br />
soulagement, sinon on accepte sans mot dire.? Plus <strong>de</strong><br />
dix jours après, et je suis sûr que ça va me coûter la vie<br />
entière, cette tristesse insoutenab<strong>le</strong>, cette perte capita<strong>le</strong><br />
que cel<strong>le</strong> d’une vil<strong>le</strong>, avec ses palais et ses élus.<br />
Ses églises et ses dieux. Tous <strong>le</strong>s lieux symboliques ont<br />
coulé bas (bibliothèques, musées, éco<strong>le</strong>s publiques et<br />
privées) Que reste-t-il quand tout s’effondre ? Une fou<strong>le</strong><br />
éperdue qui ne sait plus sur quel pied danser. Des<br />
artistes peut-être. Des cita<strong>de</strong>l<strong>le</strong>s <strong>de</strong> dou<strong>le</strong>ur sûrement.<br />
Des rêves <strong>de</strong> tombeaux munis <strong>de</strong> masques à oxygène<br />
pour accueillir nos morts dans une éternité plus<br />
respirab<strong>le</strong>.?Hier mes frères sont venus me rendre visite,<br />
m’apportant <strong>de</strong>s provisions <strong>de</strong> nourritures en provenance<br />
<strong>de</strong> Hinche, où toute ma famil<strong>le</strong> s’est entassée dans la<br />
maison maternel<strong>le</strong>. Il parait que cette vil<strong>le</strong> n’a pas du tout<br />
été touchée, pas un seul mort, pas un b<strong>le</strong>ssé. Donc ma<br />
sœur sinistrée du côté <strong>de</strong> Canapé-vert à Port-au-Prince,<br />
a pris ses jambes à son cou avec son mari et ses quatre<br />
25 / 46<br />
enfants pour se réfugier avec <strong>le</strong>s autres membres <strong>de</strong> la<br />
famil<strong>le</strong> sous <strong>le</strong> toit maternel. Un rêve que ma mère<br />
chérissait <strong>de</strong>puis toujours, celui <strong>de</strong> rassemb<strong>le</strong>r en même<br />
temps ses enfants et ses petits enfants.<br />
El<strong>le</strong> envoie mes frères comme messagers pour me<br />
convaincre <strong>de</strong> retourner sans délai avec ma compagne et<br />
ma petite fil<strong>le</strong>. Les sismographes préten<strong>de</strong>nt que cette<br />
vil<strong>le</strong>, par sa position géographique, serait toujours<br />
épargnée au cas d’un éventuel séisme. Mes frères se<br />
lamentent, on n’a toujours pas <strong>de</strong> nouvel<strong>le</strong> <strong>de</strong> Blanc,<br />
notre cousin. Ce <strong>de</strong>rnier, je présume, doit être porté<br />
disparu, j’en connais beaucoup <strong>de</strong> cet ordre-là, dont<br />
jamais on ne saura comment faire <strong>le</strong> <strong>de</strong>uil.<br />
C’est <strong>le</strong> cas <strong>de</strong> l’amoureux <strong>de</strong> Sergine, Gérard Le<br />
Chevallier, un magnifique salvadorien passionné d’Haïti.<br />
Il venait d’inscrire sur sa peau un tatouage <strong>de</strong> la terrib<strong>le</strong><br />
déesse Erzulie Dantor. Les secouristes n’ont pas encore<br />
repéré Le Chevallier qui était l’une <strong>de</strong>s éminences grises<br />
<strong>de</strong> la mission onusienne perdue sous <strong>le</strong>s décombres <strong>de</strong><br />
L’hôtel Christopher.<br />
Mes frères ajoutent d’autres noms propres dans mon<br />
carnet <strong>de</strong> nécrologie intime : Samanta, Liline, ainsi que<br />
l’épouse toute neuve du fils ainé <strong>de</strong> mon parrain.?Je<br />
n’arrive pas à me conso<strong>le</strong>r pour l’ami Axel, ce père <strong>de</strong><br />
famil<strong>le</strong> quadragénaire qui remuait ciel et terre pour é<strong>le</strong>ver<br />
dans la dignité ces trois enfants, tous péris sous <strong>le</strong>s<br />
décombres <strong>de</strong> sa maison à la rue Chrétien. Comment<br />
dormir sinistré avec autant <strong>de</strong> morts issus d’une même<br />
famil<strong>le</strong> ??Je pense à mon ami, l’écrivain Georges<br />
Angla<strong>de</strong>, tué avec sa femme Mireil<strong>le</strong> par <strong>le</strong> séisme. La<br />
veil<strong>le</strong>, il m’avait adressé un beau courrier rayonnant <strong>de</strong><br />
mil<strong>le</strong> feux, pour saluer en même temps mon retour en<br />
Haïti et la naissance <strong>de</strong> ma fil<strong>le</strong>.<br />
On se promettait <strong>de</strong> trinquer nos verres à la soirée<br />
d’ouverture du festival Étonnant voyageur qui <strong>de</strong>vait<br />
débuter <strong>le</strong> <strong>le</strong>n<strong>de</strong>main, mais la fête <strong>de</strong>s voyageurs<br />
étonnés n’aura pas lieu en ce maudit soir du douze<br />
janvier, car Port-au-Prince était déjà une vil<strong>le</strong> au soir <strong>de</strong>
sa vie. Définitivement trop triste la date du douze janvier.<br />
Douze comme si toutes <strong>le</strong>s heures p<strong>le</strong>uraient en même<br />
temps la perte sèche <strong>de</strong> toutes ces vies.?Que dire <strong>de</strong> la<br />
vil<strong>le</strong> <strong>de</strong> Léogane ? De la vil<strong>le</strong> <strong>de</strong> Jacmel ? Détruites<br />
comme <strong>de</strong>s châteaux <strong>de</strong> cartes. Quelqu’un nous a<br />
appelés <strong>le</strong> <strong>le</strong>n<strong>de</strong>main pour nous apprendre que la mer <strong>de</strong><br />
Jacmel était partie. Il y voyait <strong>de</strong>s poissons morts<br />
plongés dans un fond sec. Nous craignions tous un<br />
retour en force <strong>de</strong> cette mer, <strong>le</strong> risque du tsunami, mais<br />
ce phénomène redoutab<strong>le</strong> a dû se rendre compte qu’il<br />
était déjà passé par là et a laissé tomber <strong>le</strong> projet <strong>de</strong><br />
revenir avec bruits et fureurs.?L’après tremb<strong>le</strong>ment <strong>de</strong><br />
terre est une réalité, une expérience hors norme à<br />
laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong>s Haïtiens doivent faire face avec beaucoup <strong>de</strong><br />
fiel, pour se remettre <strong>de</strong>bout, beaucoup <strong>de</strong><br />
transcendance et <strong>de</strong> force intérieure pour se remettre et<br />
réapprendre à marcher. Je pense comme à un film<br />
d’horreur aux 200 000 b<strong>le</strong>ssés dont, pour la plupart, <strong>le</strong>s<br />
mé<strong>de</strong>cins ont dû, pour faire court, en<strong>le</strong>ver un bras, ou<br />
amputer une jambe. Serait-il trop tôt pour s’apitoyer<br />
<strong>de</strong>vant <strong>le</strong> sombre tab<strong>le</strong>au <strong>de</strong> tout un peup<strong>le</strong> d’éclopés, <strong>de</strong><br />
veuves et d’orphelins, sans compter <strong>le</strong> lot <strong>de</strong>s détraqués.<br />
Pensons à la profon<strong>de</strong>ur du trauma et à toutes <strong>le</strong>s folies<br />
inédites que nos pauvres têtes vont <strong>de</strong>voir<br />
encaisser.?Nous ne sommes pas à notre première fin du<br />
mon<strong>de</strong> en Haïti? L’année 2004 c’était hier, date<br />
marquant <strong>le</strong> bicentenaire <strong>de</strong> la république d’Haïti, mais la<br />
fête n’a pas eu lieu. Al<strong>le</strong>z savoir pourquoi ? Une bonne<br />
occasion pour réveil<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s fantômes parlants et pour<br />
ouvrir la boîte <strong>de</strong> pandore. Une bonne occasion aussi<br />
pour la presse occi<strong>de</strong>nta<strong>le</strong> d’en finir avec <strong>le</strong>s clichés, <strong>de</strong><br />
cesser d’être <strong>de</strong>s ruminants d’un bricolage d’histoire,<br />
monté <strong>de</strong> toutes pièces, raconté pour el<strong>le</strong> et par el<strong>le</strong>même.<br />
Lors <strong>de</strong> cette fameuse année 2004, <strong>le</strong> mon<strong>de</strong> a<br />
26 / 46<br />
retenu <strong>de</strong> nous l’image négative d’un peup<strong>le</strong> <strong>de</strong> barbares<br />
s’entre-déchirant <strong>de</strong>ux cents ans après une révolution.<br />
Lors <strong>de</strong> cette même année, une tempête surnommée<br />
Jeanne la tueuse a fait plus <strong>de</strong> trois mil<strong>le</strong> morts dans la<br />
cité <strong>de</strong>s Gonaïves. Le mon<strong>de</strong> entier a dû retourner <strong>le</strong>s<br />
projecteurs sur <strong>le</strong> pays. Des centaines <strong>de</strong> millions <strong>de</strong><br />
dollars ont été promis. Des dizaines <strong>de</strong> millions ont été<br />
volatilisés avant même d’arriver dans la vil<strong>le</strong> inondée. La<br />
presse internationa<strong>le</strong> avait une fol<strong>le</strong> compassion pour<br />
nous, mais <strong>le</strong> coup <strong>de</strong> théâtre s’est produit avec <strong>le</strong><br />
Tsunami qui nous a volé <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> <strong>de</strong> triste ve<strong>de</strong>tte sur la<br />
scène internationa<strong>le</strong>. Et Haïti s’est remis <strong>de</strong> plus bel<strong>le</strong> à<br />
hur<strong>le</strong>r sans témoins, à p<strong>le</strong>urer dans la solitu<strong>de</strong>.?C’était<br />
hier encore, en 2008, on s’en souvient, quatre tempêtes,<br />
phénomène rares dans la littérature météorologique<br />
haïtienne, ont frappé coup sur coup <strong>le</strong> pays. Les<br />
journalistes <strong>de</strong> l’univers s’excitaient pour nous une fois<br />
<strong>de</strong> plus, mais la crise économique mondia<strong>le</strong> nous a pris<br />
par-<strong>de</strong>rrière.<br />
Dans cet univers en banqueroute, il était <strong>de</strong>venu presque<br />
impudique <strong>de</strong> crier au-secours.?Maintenant voici<br />
qu’arrive un séisme <strong>de</strong> magnitu<strong>de</strong> 7.3, ce qui ne rentre<br />
pas du tout dans <strong>le</strong>s habitu<strong>de</strong>s du sol haïtien. Ce<br />
tremb<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> notre tiers d’î<strong>le</strong> qui a provoqué un<br />
tressail<strong>le</strong>ment mondial est un test brutal pour nous <strong>le</strong>s<br />
Haïtiens et un grand cri d’a<strong>le</strong>rte pour <strong>le</strong> mon<strong>de</strong>. Au plus<br />
fort <strong>de</strong> ces manifestations <strong>de</strong> solidarité planétaire, Haïti<br />
serait-el<strong>le</strong> encore blackboulée par une autre catastrophe<br />
qui pourrait survenir dans n’importe quel coin du globe,<br />
replaçant <strong>le</strong> pays <strong>de</strong>rrières ses barreaux familiers et<br />
l’oubli coutumier ?
Un si<strong>le</strong>nce <strong>de</strong> <strong>de</strong>uil défiant un arrêt <strong>de</strong> mort, Jean-Clau<strong>de</strong> BAJEUX<br />
Jean-Clau<strong>de</strong> Bajeux est Directeur Exécutif du Centre œcuménique <strong>de</strong>s Droits Humains (CEDH) à Port-au-Prince.<br />
Ce plaidoyer, pour un <strong>de</strong>uil national,<br />
je voulais l’adresser à ceux qui nous gouvernent,<br />
non pas pour <strong>le</strong>ur dire <strong>de</strong> sortir <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur si<strong>le</strong>nce mais<br />
au contraire<br />
pour pénétrer tous ensemb<strong>le</strong> dans un mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> si<strong>le</strong>nce<br />
affronter <strong>le</strong> monumental défi <strong>de</strong> la mort.<br />
Les trois cent petites fil<strong>le</strong>s <strong>de</strong> Saint Gérard<br />
el<strong>le</strong>s sont toutes parties, dansant, chantant<br />
dans un adieu <strong>de</strong> pieds nus et <strong>de</strong> jupe longue,<br />
et tant <strong>de</strong> milliers d’autres sous <strong>le</strong> béton concassé,<br />
<strong>le</strong> 21 janvier, en un jour, en un seul voyage,<br />
dix mil<strong>le</strong> personnes basculées dans <strong>le</strong>s terres <strong>de</strong><br />
Titanyen.<br />
En cet état <strong>de</strong> mort nous n’aurions que faire <strong>de</strong> discours<br />
<strong>de</strong> ceux qu’on débite comme <strong>de</strong>s pensums,<br />
vi<strong>de</strong>s comme vent, plus so<strong>le</strong>nnels que <strong>de</strong>s draps<br />
mortuaires.<br />
La mort el<strong>le</strong> ne mâche pas ses mots : el<strong>le</strong> fait ce qu’el<strong>le</strong><br />
fait<br />
avec une efficacité qui pétrifie.<br />
regardant danser <strong>le</strong>s écolières <strong>de</strong> Saint-Gérard,<br />
nous revoyons ce spectac<strong>le</strong> qu’el<strong>le</strong>s nous laissent<br />
victoire sur un <strong>de</strong>uil <strong>de</strong> mort<br />
quand dans nos yeux el<strong>le</strong>s revivent,<br />
par la mémoire par notre regard et notre si<strong>le</strong>nce<br />
el<strong>le</strong>s dansent une danse <strong>de</strong> vie<br />
survivant à tout instant,<br />
par <strong>le</strong>ur naturel<strong>le</strong> grâce<br />
défiant l’immobi<strong>le</strong> grimace <strong>de</strong> la mort<br />
cette subite avalanche si bruta<strong>le</strong>ment infligée<br />
UN SILENCE DE DEUIL DEFIANT UN ARRÊT DE MORT<br />
27 / 46<br />
si cruel<strong>le</strong>ment, à la face du mon<strong>de</strong><br />
sachant que nous n’aurions<br />
jamais assez <strong>de</strong> f<strong>le</strong>urs pour <strong>le</strong>s embaumer,<br />
jamais assez d’encens pour <strong>le</strong>ur offrir,<br />
ni <strong>de</strong> mots pour dire seu<strong>le</strong>ment la litanie <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs<br />
prénoms,<br />
et encore moins<br />
assez <strong>de</strong> larmes pour <strong>le</strong>s p<strong>le</strong>urer<br />
au terrib<strong>le</strong> gron<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> la terre<br />
répond notre si<strong>le</strong>nce,<br />
dans une persistante existence<br />
d’une autre nature et d’un autre mon<strong>de</strong><br />
si<strong>le</strong>nce du regard et <strong>de</strong> la mémoire<br />
évocation reconnaissance <strong>de</strong> ces cinq minutes <strong>de</strong> danse<br />
qui réveil<strong>le</strong>nt <strong>le</strong>s disparus<br />
par la mort même <strong>de</strong>venue capsu<strong>le</strong>s d’éternité.<br />
Imaginons <strong>le</strong> pays couvert d’un <strong>de</strong>uil <strong>de</strong> trois fois cent<br />
jours<br />
nos regards <strong>de</strong>venant <strong>le</strong> défi que nous dédions aux dieux<br />
du malheur<br />
inventant répétant<br />
intemporels<br />
gestes et rituels, <strong>le</strong>s chants et <strong>le</strong>s danses,<br />
<strong>le</strong>s récits souvenirs et rêves<br />
<strong>le</strong>s promesses <strong>le</strong>s parfums et <strong>le</strong>s pardons<br />
offran<strong>de</strong>s<br />
à tant d’âmes qui flottent parmi nous.
Les signes d'Haïti, Jacky DAHOMAY<br />
Jacky Dahomay est professeur <strong>de</strong> philosophie à la Gua<strong>de</strong>loupe. Il a participé à divers projets en Haïti notamment à<br />
l’élaboration du Plan national d’éducation et a été membre du Comité présidé par Régis Debray consacré à l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> la<br />
France à Haïti.<br />
Les signes d’Haïti.<br />
La catastrophe qui frappe Haïti est terrib<strong>le</strong>, comme s’il y<br />
avait là une finalité <strong>de</strong> la nature qui aurait visé<br />
symboliquement <strong>le</strong>s institutions fondamenta<strong>le</strong>s du pays.<br />
Même la représentation religieuse en a été frappée. Le<br />
tremb<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> terre <strong>de</strong> Lisbonne en 1755 avait produit<br />
un bou<strong>le</strong>versement <strong>de</strong> la pensée philosophique et<br />
théologique européenne et une forte polémique entre<br />
Voltaire et Rousseau. Nous avons en ce moment à<br />
l’esprit ces vers extraits du poème que Voltaire avait<br />
consacré à l’événement : « D’autres peup<strong>le</strong>s naîtront <strong>de</strong><br />
vos murs écrasés / Le Nord va s’enrichir <strong>de</strong> vos pertes<br />
fata<strong>le</strong>s »<br />
Mais nous ne sommes plus au XVIII° sièc<strong>le</strong> et nos<br />
problématiques postmo<strong>de</strong>rnes sont bien éloignées <strong>de</strong><br />
cel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> Voltaire et <strong>de</strong> Rousseau. Pourtant nous avons<br />
<strong>le</strong> sentiment que <strong>le</strong> séisme qui produit un tel malheur<br />
dans l’ancienne « per<strong>le</strong> <strong>de</strong>s Antil<strong>le</strong>s » nous invite à<br />
dépasser une émotion légitime quoique trop médiatisée<br />
et à penser quelque chose que nous ne pensons pas<br />
encore et qui serait déterminant pour <strong>le</strong> mon<strong>de</strong> et la<br />
philosophie politique <strong>de</strong> ce XXI° sièc<strong>le</strong> commençant.<br />
Mais quoi ? L’écrivain haïtien René Depestre nous<br />
affirme qu’il faut voir, à travers ce soutien massif à Haïti,<br />
une forme d’éveil d’une société civi<strong>le</strong> mondia<strong>le</strong>. A l’aube<br />
du XIX° sièc<strong>le</strong>, Haïti avait obligé <strong>le</strong>s Droits <strong>de</strong> l’homme à<br />
accomplir <strong>le</strong>ur universalité dans <strong>le</strong>ur concrétu<strong>de</strong>.<br />
Aujourd’hui, ce pays meurtri mais digne donne une<br />
nouvel<strong>le</strong> dimension effective à l’idée d’humanité.<br />
Mais que dire d’autre ? Bérard Cenatus, directeur <strong>de</strong><br />
l’ENS écroulée sous <strong>le</strong>s gravas, « ce mélange <strong>de</strong> sang,<br />
<strong>de</strong> liqueurs et <strong>de</strong> poudre » (pour citer encore Voltaire),<br />
refuse <strong>de</strong> nous par<strong>le</strong>r. Il nous fait dire qu’il n’y a rien à<br />
déclarer face à une tel<strong>le</strong> catastrophe. C’est sans doute<br />
vrai et nous comprenons <strong>le</strong> mutisme <strong>de</strong> notre ami. Il y a<br />
là <strong>de</strong> l’ineffab<strong>le</strong>, nous renvoyant à notre humanité brute,<br />
compassionnel<strong>le</strong>, compulsionnel<strong>le</strong> et ici, seuls <strong>le</strong> cri ou <strong>le</strong><br />
si<strong>le</strong>nce sont possib<strong>le</strong>s.<br />
28 / 46<br />
Mais pouvons-nous nous taire quand même <strong>le</strong>s chiens<br />
ne se taisent pas ? Le sociologue haïtien, Laennec<br />
Hurbon, m’a raconté sa fuite dans <strong>le</strong>s rues <strong>de</strong> Port-au-<br />
Prince - <strong>le</strong> séisme l’ayant surpris au Champ <strong>de</strong> Mars. Il<br />
nous a dit cette fou<strong>le</strong> et ces cris insoutenab<strong>le</strong>s, ces gens<br />
courant comme lui en tous sens comme <strong>de</strong>s fourmis<br />
fol<strong>le</strong>s. Or, avoue-t-il, la chose qui l’a frappé <strong>le</strong> plus c’est<br />
un chien, vers <strong>le</strong> Canapé vert, sans doute abandonné,<br />
qui ne cessait <strong>de</strong> japper à tue-tête, si on nous permet<br />
l’expression, comme s’il voulait interpel<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s hommes en<br />
déroute ne comprenant pas <strong>le</strong>ur fuite désordonnée.<br />
Laennec nous dit ne pas comprendre pourquoi, outre <strong>le</strong>s<br />
bâtiments officiels <strong>de</strong> l’Etat et <strong>de</strong> l’Eglise qui<br />
s’effondraient en sang et en poussière, c’est ce chien qui<br />
l’a frappé. Est-ce là un signe à déchiffrer ? C’est comme<br />
si <strong>le</strong> chien, issu <strong>de</strong> la nature, interrogeait <strong>le</strong>s hommes sur<br />
ce qui pourrait être comme un effondrement <strong>de</strong> la culture.<br />
Le tremb<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> terre, irruption sauvage d’une nature<br />
cruel<strong>le</strong> et innocente, semb<strong>le</strong> pervertir <strong>le</strong> rapport<br />
nature/culture cher aux anthropologues. Toute la<br />
transition entre nature et culture ou <strong>le</strong> lieu focal <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur<br />
connexion, se symbolise dans <strong>le</strong> chien, être <strong>de</strong> la nature<br />
sans doute, mais qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, malgré nos malheurs, à<br />
être articulé avec la culture. Bon courage au chien !<br />
Si donc <strong>le</strong>s chiens ne se taisent pas, nous ne <strong>de</strong>vons pas<br />
nous taire. Il faut par<strong>le</strong>r, pour notre ami Bérard Cenatus<br />
qui ne <strong>le</strong> peut pas en ce moment. Rousseau a raison.<br />
Cessons d’incriminer la nature. Il en va toujours <strong>de</strong> la<br />
responsabilité <strong>de</strong>s hommes. Le séisme dévoi<strong>le</strong> au grand<br />
jour l’incapacité historique <strong>de</strong>s élites politiques haïtiennes<br />
à mener <strong>le</strong>ur peup<strong>le</strong> à une véritab<strong>le</strong> émancipation<br />
politique et socia<strong>le</strong>. Devant l’omniprésence <strong>de</strong>s<br />
puissances internationa<strong>le</strong>s et <strong>le</strong> délitement <strong>de</strong> l’Etat<br />
haïtien malgré l’existence d’un prési<strong>de</strong>nt dérouté et<br />
rescapé, il est absolument nécessaire <strong>de</strong> constituer une<br />
société civi<strong>le</strong> forte. Les poètes et écrivains comme Dany<br />
Laferrière insistent pour nous montrer qu’Haïti n’est pas<br />
mort, qu’il lui reste la culture. Mais <strong>le</strong>s poètes n’ont pas<br />
toujours été <strong>de</strong> bons politiques (on <strong>le</strong> sait <strong>de</strong>puis Platon).<br />
Cette culture est là, il est vrai, et c’est ce qui permet aux
haïtiens <strong>de</strong> survivre dans la dignité, mais l’heure est à la<br />
construction d’une fondation politique nouvel<strong>le</strong>, d’un<br />
authentique espace public permettant cette refondation.<br />
Nous pensons à la mobilisation <strong>de</strong> la société civi<strong>le</strong> ayant<br />
entraîné la chute <strong>de</strong> Jean-Clau<strong>de</strong> Duvalier, mobilisation<br />
populaire que <strong>le</strong> populisme <strong>de</strong> Jean-Bertrand Aristi<strong>de</strong> et<br />
<strong>de</strong> ses amis a dévoyée, pour un nouveau malheur<br />
d’Haïti. Il appartient donc à <strong>de</strong>s personnalités fortes et<br />
respectées (comme Michè<strong>le</strong> Duvivier Pierre-Louis,<br />
ancienne Premier ministre) <strong>de</strong> tout mettre en œuvre pour<br />
l’existence d’une société civi<strong>le</strong> forte face aux pouvoirs qui<br />
se mettront en place dans <strong>le</strong> cadre <strong>de</strong> la reconstruction<br />
du pays.<br />
Mais encore une fois que pèsent <strong>le</strong>s mots sur <strong>le</strong>s<br />
tragédies <strong>de</strong> l’histoire ? Nous avons envie <strong>de</strong> nous taire<br />
ou <strong>de</strong> crier mais voici que <strong>de</strong> nouveau nous repensons<br />
au chien du Canapé vert. Si la nature a été cruel<strong>le</strong> lors<br />
du séisme, avec <strong>le</strong> chien c’est comme si el<strong>le</strong> dirigeait<br />
toute l’attention <strong>de</strong> notre humanité vers <strong>le</strong> cri <strong>de</strong> la fou<strong>le</strong>,<br />
vers ces p<strong>le</strong>urs et ces plaintes, vers ce qu’il y là <strong>de</strong><br />
profondément tragique au sens <strong>le</strong> plus authentique du<br />
terme. La tragédie grecque exprimait dans ces plaintes et<br />
ces dou<strong>le</strong>urs (surtout venant <strong>de</strong>s femmes selon Nico<strong>le</strong><br />
Loraux) quelque chose <strong>de</strong> l’humain qui n’a pu être<br />
résorbé par <strong>le</strong> politique, comme ce qui serait un reste <strong>de</strong><br />
nos constructions politiques, souvent arbitraires. Et <strong>le</strong>s<br />
cris et <strong>le</strong>s dou<strong>le</strong>urs expulsées vers <strong>le</strong> ciel muet à Port-au-<br />
Prince désignent aussi, face à un Etat effondré, une<br />
souffrance populaire que jamais la politique n’a su<br />
véritab<strong>le</strong>ment prendre en compte. Mais cela ne s’adresse<br />
pas qu’à l’Etat haïtien ni à ses élites politiques<br />
défaillantes. C’est toute la politique mo<strong>de</strong>rne qui est<br />
visée dans ses fon<strong>de</strong>ments et, en ce sens, <strong>le</strong> drame<br />
haïtien est la gran<strong>de</strong> tragédie qui ouvre <strong>le</strong> XXI° sièc<strong>le</strong>.<br />
29 / 46<br />
Car comment expliquer que <strong>le</strong> pays qui a connu la<br />
première révolte d’esclaves ayant réussi soit aujourd’hui<br />
<strong>le</strong> plus meurtri <strong>de</strong> la planète ? Avec la colonisation et<br />
l’esclavage, Haïti, per<strong>le</strong> <strong>de</strong>s Antil<strong>le</strong>s pour <strong>le</strong>s dominants,<br />
a été comme une épine dans <strong>le</strong>s pieds <strong>de</strong> la mo<strong>de</strong>rnité,<br />
quelque chose qu’el<strong>le</strong> n’a pas su positivement assumer.<br />
Aujourd’hui encore, la première république noire se<br />
dévoi<strong>le</strong> soudain <strong>le</strong> talon d’Achil<strong>le</strong> <strong>de</strong> nos temps<br />
postmo<strong>de</strong>rnes. La politique <strong>de</strong>s puissants <strong>de</strong> ce mon<strong>de</strong><br />
trouve là ses limites <strong>de</strong> même que tous <strong>le</strong>urs plans <strong>de</strong><br />
développement économico-politiques. Voilà pourquoi <strong>le</strong><br />
mal qui frappe <strong>le</strong> peup<strong>le</strong> haïtien nous interpel<strong>le</strong> tous et<br />
nous invite à <strong>le</strong> penser.<br />
Mais en attendant, nous n’avons pas <strong>de</strong> concepts<br />
pouvant rendre compte d’un tel malheur et toute notre<br />
philosophie politique est ébranlée. Faut-il alors, entre <strong>le</strong><br />
cri et <strong>le</strong> concept, redonner la paro<strong>le</strong> aux poètes ? Sans<br />
doute. Ces bribes <strong>de</strong> vers, du poète Anthony Phelps, que<br />
nous aimions réciter à Bérard Cenatus quand nous<br />
étions étudiants à Bor<strong>de</strong>aux, nous reviennent à l’esprit : «<br />
Si triste est la saison, qu’il est venu <strong>le</strong> temps <strong>de</strong> se par<strong>le</strong>r<br />
par signes…. Le logos s’est réfugié dans <strong>le</strong> mutisme <strong>de</strong><br />
la pierre ». Recueillons-nous donc et communions avec<br />
<strong>le</strong> si<strong>le</strong>nce <strong>de</strong> notre ami Bérard et avec celui <strong>de</strong> tous ces<br />
survivants et <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>urs morts aux sépultures<br />
inachevées.<br />
Jacky Dahomay
Paro<strong>le</strong> pour Haïti, Max RIPPON<br />
CATAPLASME<br />
Les hasards d’un commerce cupi<strong>de</strong><br />
Nous a fait germer sur <strong>de</strong>s rives<br />
distantes<br />
Nous, long lasso d’î<strong>le</strong>s chevauchant<br />
<strong>le</strong>s fail<strong>le</strong>s profon<strong>de</strong>s<br />
Tétons hérissés dans <strong>le</strong>s turquoises<br />
caraïbes<br />
Te voilà Haïti Toma<br />
Sœur b<strong>le</strong>ssée<br />
Terre lardée<br />
Linceul césarisé à vif<br />
Si je <strong>de</strong>vais par<strong>le</strong>r <strong>de</strong> toi encore<br />
Jumel<strong>le</strong> ari<strong>de</strong> tant <strong>de</strong> fois éprouvée<br />
J’épouserais <strong>le</strong> plus infime battement<br />
<strong>de</strong> ton cœur<br />
Pour essorer tes plaintes résignées<br />
Avec mon drap trop vieux, <strong>de</strong> har<strong>de</strong>s<br />
remisées<br />
Les hasards <strong>de</strong> ce commerce cupi<strong>de</strong><br />
et honteux<br />
A fait partition <strong>de</strong> terres soumises<br />
Et ton sol tant <strong>de</strong> fois mis à ru<strong>de</strong><br />
partie<br />
30 / 46<br />
De sang asséché <strong>de</strong>puis si longtemps<br />
S’est laissé briser en une seu<strong>le</strong> semonce à sept <strong>de</strong>grés<br />
décomptés<br />
Si je <strong>de</strong>vais alors<br />
Dire ma part <strong>de</strong> souffrances<br />
Quand tes tripes <strong>le</strong> soir<br />
S’éta<strong>le</strong>nt à même <strong>le</strong>s flancs <strong>de</strong>s coulées cathodiques<br />
Je me ferais fils <strong>de</strong> Toma chérie<br />
Délitant mes dou<strong>le</strong>urs dans <strong>le</strong>s rizières si<strong>le</strong>ncieuses <strong>de</strong><br />
l’Artibonite inconsolée<br />
Je me ferais messager vagabond <strong>de</strong>s guerriers aphones<br />
Pour chambou<strong>le</strong>r la sieste <strong>de</strong>s puissants<br />
Je me voudrais buvard multip<strong>le</strong>, doci<strong>le</strong> et poreux<br />
Pour éponger tes larmes<br />
Pour partager tes doutes et <strong>le</strong>ver tes inquiétu<strong>de</strong>s<br />
J’interrogerais <strong>le</strong>s <strong>le</strong>n<strong>de</strong>mains lointains plongés dans la<br />
gorge <strong>de</strong>s horizons<br />
Pour donner à tes jours <strong>le</strong> meil<strong>le</strong>ur du brillant <strong>de</strong>s so<strong>le</strong>ils<br />
Je fermerais <strong>le</strong>s yeux aux assauts <strong>de</strong>s midis grondants<br />
Pour t’inventer <strong>de</strong>s aubes qui esquivent<br />
l’engourdissement du <strong>de</strong>rnier angélus<br />
Une paro<strong>le</strong> pour Haïti. Janvier <strong>2010</strong><br />
Max Rippon
Haïti ou la santé du malheur, Yanick LAHENS<br />
Lauréate en 2009 du prix RFO du livre pour son roman « La cou<strong>le</strong>ur <strong>de</strong> l’aube » (Sabine Wespieser), Yanick Lahens est<br />
aussi l’auteur <strong>de</strong> nombreuses nouvel<strong>le</strong>s parmi <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s « La Petite Corruption » publié aux éditions Mémoire d'encrier. El<strong>le</strong><br />
enseigne la littérature à Port-au-Prince.<br />
Texte paru dans <strong>le</strong> Cahier central <strong>de</strong> Libération en date du mardi 19 janvier <strong>2010</strong>, publié avec l’autorisation <strong>de</strong> l’auteur.<br />
«Haïti ou la santé du malheur»<br />
A 4 heures 53 minutes, <strong>le</strong> mardi 12 janvier <strong>2010</strong>, Haïti a<br />
basculé dans l’horreur. Le séisme a duré une minute<br />
trente secon<strong>de</strong>s. Debout dans l’embrasure d’une porte,<br />
pendant que <strong>le</strong>s murs semb<strong>le</strong>nt vouloir cé<strong>de</strong>r tout autour,<br />
<strong>le</strong> sol se dérober sous vos pieds, une minute trente<br />
secon<strong>de</strong>s c’est long, très long. Dans <strong>le</strong>s secon<strong>de</strong>s qui ont<br />
suivi, la clameur grosse <strong>de</strong> milliers <strong>de</strong> hur<strong>le</strong>ments d’effroi,<br />
<strong>de</strong> cris <strong>de</strong> dou<strong>le</strong>ur, est montée comme d’un seul ventre<br />
<strong>de</strong>s bidonvil<strong>le</strong>s a<strong>le</strong>ntour, <strong>de</strong>s immeub<strong>le</strong>s plus cossus<br />
autour <strong>de</strong> la place et est venue me saisir à la gorge<br />
jusqu’à m’asphyxier. Et puis j’ai ouvert <strong>le</strong> portail <strong>de</strong> la<br />
maison. Sur <strong>le</strong> commencement <strong>de</strong> l’horreur. Là, déjà, au<br />
bout <strong>de</strong> ma rue. Des corps jonchés au sol, <strong>de</strong>s visages<br />
empoussiérés, <strong>de</strong>s murs démolis. Avec cette certitu<strong>de</strong><br />
que plus loin, plus bas dans la vil<strong>le</strong>, ce serait terrifiant.<br />
Nous avons tout <strong>de</strong> suite porté secours aux victimes<br />
mais nous ne pouvions pas ne pas p<strong>le</strong>urer.<br />
Et dans ce crépuscu<strong>le</strong> tropical toujours si prompt à se<br />
faire dévorer par la nuit, je n’ai pas pu m’empêcher <strong>de</strong><br />
poser cette question qui me tarau<strong>de</strong> <strong>de</strong>puis: pourquoi<br />
nous <strong>le</strong>s Haïtiens? Encore nous, toujours nous ? Comme<br />
si nous étions au mon<strong>de</strong> pour mesurer <strong>le</strong>s limites<br />
humaines, cel<strong>le</strong>s face à la pauvreté, face à la souffrance,<br />
et tenir par une extraordinaire capacité à résister et à<br />
retourner <strong>le</strong>s épreuves en énergie vita<strong>le</strong>, en créativité<br />
lumineuse. J’ai trouvé mes premières réponses dans la<br />
ferveur <strong>de</strong>s chants qui n’ont pas manqué <strong>de</strong> se <strong>le</strong>ver<br />
dans la nuit. Comme si ces voix qui montaient, tournaient<br />
résolument <strong>le</strong> dos au malheur, au désespoir. J’ai<br />
parcouru <strong>le</strong> <strong>le</strong>n<strong>de</strong>main matin une vil<strong>le</strong> chaotique, jonchée<br />
<strong>de</strong> cadavres, certains déjà recouverts d’un drap blanc ou<br />
d’un simp<strong>le</strong> carton, <strong>de</strong>s corps d’enfants, <strong>de</strong> jeunes,<br />
empilés <strong>de</strong>vant <strong>de</strong>s éco<strong>le</strong>s, <strong>de</strong>s mouches dansant déjà<br />
autour <strong>de</strong> certains autres, <strong>de</strong>s b<strong>le</strong>ssés, <strong>de</strong>s vieillards<br />
hagards, <strong>de</strong>s bâtiments et <strong>de</strong>s maisonnettes détruits. Il<br />
ne manquerait que <strong>le</strong>s trompettes <strong>de</strong> l’Ange <strong>de</strong><br />
l’Apocalypse pour annoncer la fin du mon<strong>de</strong> si <strong>le</strong><br />
courage, la solidarité et l’immense patience <strong>de</strong>s uns et<br />
31 / 46<br />
<strong>de</strong>s autres n’étaient venus nous rattacher au plus tenu <strong>de</strong><br />
l’essentiel…<br />
Une longueur d’avance<br />
A ce principe d’humanité, <strong>de</strong> solidarité qui ne <strong>de</strong>vrait<br />
jamais faire naufrage et que <strong>le</strong>s pauvres connaissent si<br />
bien. Pour dire la puissance <strong>de</strong> la vie. Ces vivants si<br />
farouchement vivants dans une vil<strong>le</strong> morte. Patients<br />
jusqu’à l’extrême limite. Les quelques inévitab<strong>le</strong>s pillards<br />
systématiquement relayés par la presse internationa<strong>le</strong> ne<br />
font pas <strong>le</strong> poids face à tant <strong>de</strong> vie et <strong>de</strong> dignité<br />
revendiquées.<br />
Et je tirai ma <strong>le</strong>çon en pensant à un mot <strong>de</strong> Camus<br />
envoyé par un ami écrivain: «Nous avons maintenant la<br />
familiarité du pire. Cela nous ai<strong>de</strong> à lutter encore.» Cet<br />
acharnement m’a semblé non point <strong>le</strong> fait d’une<br />
quelconque fatalité (laissons cela à ceux qui voudraient<br />
encore par paresse ou déroba<strong>de</strong> évoquer <strong>le</strong> cliché d’une<br />
Haïti maudite) mais celui d’une suite <strong>de</strong> hasards qui nous<br />
ont propulsés au cœur <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s enjeux du mon<strong>de</strong><br />
mo<strong>de</strong>rne. Pour <strong>de</strong> nouvel<strong>le</strong>s <strong>le</strong>çons d’humanité. Encore<br />
et encore…<br />
Hasard géologique qui nous a fixés sur la fail<strong>le</strong><br />
dantesque <strong>de</strong>s séismes, hasard géographique qui nous a<br />
placés sur la route <strong>de</strong>s cyclones en nous sommant, en<br />
sommant <strong>le</strong> mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> repenser à chacune <strong>de</strong> ces<br />
catastrophes, <strong>le</strong>s causes profon<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la pauvreté.<br />
Hasard historique qui nous a amenés à réaliser<br />
l’impensab<strong>le</strong> au début du XIXe sièc<strong>le</strong>, une révolution<br />
pour sortir du joug <strong>de</strong> l’esclavage et du système colonial.<br />
Notre révolution est venue indiquer aux <strong>de</strong>ux autres qui<br />
l’avaient précédée l’américaine et la française, <strong>le</strong>urs<br />
contradictions et <strong>le</strong>urs limites, qui sont cel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> cette<br />
mo<strong>de</strong>rnité dont el<strong>le</strong>s ont <strong>de</strong>ssiné <strong>le</strong>s contours, la difficulté<br />
à humaniser <strong>le</strong> Noir et à faire <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs terres <strong>de</strong>s<br />
territoires à part entière. A la démesure du système qui<br />
nous oppressait nous avons répondu par la démesure<br />
d’une révolution. Pour exister. Exister, entre autres, au<br />
prix d’une <strong>de</strong>tte à payer à la France, au prix d’une mise<br />
au ban <strong>de</strong>s nations. Ce qui ne nous a pas soustraits du
<strong>de</strong>voir <strong>de</strong> solidarité agissante envers tous ceux qui,<br />
comme Bolivar en Amérique latine ou ail<strong>le</strong>urs, au début<br />
<strong>de</strong> ce XIXe sièc<strong>le</strong>, luttaient pour <strong>le</strong>ur liberté. Et puisque<br />
nous avons ouvert la terre d’Haïti à tous ceux-là, nous<br />
avons une longueur d’avance dans ce savoir-là. Savoir<br />
qui se révè<strong>le</strong> d’une brûlante actualité dans ce moment<br />
où, à travers la catastrophe qui frappe Haïti, <strong>de</strong>vrait se<br />
jouer la réciproque et pourquoi pas la redéfinition sinon la<br />
refondation <strong>de</strong>s principes <strong>de</strong> la solidarité à l’échel<strong>le</strong><br />
mondia<strong>le</strong>.<br />
La Révolution américaine et la Révolution française,<br />
contrairement à la nôtre, ont, el<strong>le</strong>s, su faire avancer la<br />
question <strong>de</strong> la citoyenneté. Nous n’avons pas su user <strong>de</strong><br />
la constance et <strong>de</strong> la mesure qu’exigeait la construction<br />
<strong>de</strong> la citoyenneté qui aurait dû mettre <strong>le</strong>s hommes et <strong>le</strong>s<br />
femmes <strong>de</strong> cette terre à l’abri <strong>de</strong> conditions infrahumaines<br />
<strong>de</strong> vie. Parce que la démesure a ses limites, la<br />
glorification stéri<strong>le</strong> du passé comme refuge aussi. Qu’on<br />
se souvienne <strong>de</strong> Césaire qui fait dire à l’épouse du roi<br />
Christophe, dans la tragédie du même nom, <strong>de</strong> prendre<br />
gar<strong>de</strong> que l’on ne juge <strong>le</strong>s malheurs <strong>de</strong>s fils à la<br />
démesure du père.<br />
Sur un pied d’égalité<br />
En dépit <strong>de</strong> ces limites-là, en dépit <strong>de</strong> sa pauvreté, <strong>de</strong><br />
ses vicissitu<strong>de</strong>s politiques, <strong>de</strong> son exiguïté, Haïti n’est<br />
32 / 46<br />
pas une périphérie. Son histoire fait d’el<strong>le</strong> un centre. Je<br />
l’ai toujours vécu comme tel. Comme une métaphore <strong>de</strong><br />
tous <strong>le</strong>s défis auxquels l’humanité doit faire face<br />
aujourd’hui et pour <strong>le</strong>squels cette mo<strong>de</strong>rnité n’a pas tenu<br />
ses promesses. Son histoire fait qu’el<strong>le</strong> dialogue sur un<br />
pied d’égalité avec <strong>le</strong> reste du mon<strong>de</strong>. Qu’el<strong>le</strong> oblige<br />
encore aujourd’hui à la faveur <strong>de</strong> cette catastrophe à<br />
poser <strong>le</strong>s questions essentiel<strong>le</strong>s <strong>de</strong>s rapports Nord-Sud,<br />
cel<strong>le</strong>s aussi fondamenta<strong>le</strong>s <strong>de</strong>s rapports Sud Sud, et à<br />
ne pas esquiver <strong>le</strong>s questions et <strong>le</strong>s urgences <strong>de</strong> fond.<br />
Qu’el<strong>le</strong> somme aussi plus que jamais ses élites<br />
dirigeantes à changer radica<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> paradigme <strong>de</strong><br />
gouvernance. Tous <strong>le</strong>s symbo<strong>le</strong>s déjà faib<strong>le</strong>s <strong>de</strong> l’Etat se<br />
sont effondrés, la population est aux abois et la vil<strong>le</strong><br />
dévastée. De cette Tabula rasa <strong>de</strong>vra naître un Etat enfin<br />
réconcilié (même partiel<strong>le</strong>ment) avec sa population.<br />
Mais Haïti donne une autre mesure tout essentiel<strong>le</strong> du<br />
mon<strong>de</strong>, cel<strong>le</strong> <strong>de</strong> la créativité. Parce que nous avons<br />
aussi forgé notre résistance au pire dans la constante<br />
métamorphose <strong>de</strong> la dou<strong>le</strong>ur en créativité lumineuse.<br />
Dans ce que René Char appel<strong>le</strong> «la santé du malheur».<br />
Je n’ai aucun doute que nous, écrivains, continuerons à<br />
donner au mon<strong>de</strong> une saveur particulière.<br />
Port-au-Prince, Haïti, dimanche 17 janvier <strong>2010</strong>
De la catastrophe <strong>de</strong> l’intime à la catastrophe d’un pays, José PLIYA<br />
Auteur <strong>de</strong> théâtre contemporain José Pliya, lauréat en 2003, du <strong>Prix</strong> du Jeune Théâtre André Roussin <strong>de</strong> l’Académie<br />
Française pour « Le comp<strong>le</strong>xe <strong>de</strong> Thénardier» et l'ensemb<strong>le</strong> <strong>de</strong> son œuvre, riche d'une douzaine <strong>de</strong> pièces publiées aux<br />
éditions l'Avant-scène théâtre, est <strong>de</strong>puis juil<strong>le</strong>t 2005 directeur général <strong>de</strong> l'Artchipel, Scène Nationa<strong>le</strong> <strong>de</strong> la Gua<strong>de</strong>loupe.<br />
«Haïti : <strong>de</strong> la catastrophe <strong>de</strong> l’intime à la<br />
catastrophe d’un pays, résolument <strong>de</strong>bout »<br />
Lorsque j’ai pris la direction généra<strong>le</strong> <strong>de</strong> l’Artchipel,<br />
scène nationa<strong>le</strong> <strong>de</strong> la Gua<strong>de</strong>loupe, j’ai voulu initier un<br />
projet <strong>de</strong> création théâtra<strong>le</strong>.<br />
C’est ainsi que j’ai rencontre Haïti par <strong>le</strong> biais d’un grand<br />
roman « Amour, Colère et Folie » <strong>de</strong> Marie Vieux<br />
Chauvet (édition Emina So<strong>le</strong>y).<br />
J’en ai fait l’adaptation théâtra<strong>le</strong> et <strong>le</strong> premier vo<strong>le</strong>t «<br />
Amour » a été créé en 2007 avec dans <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> titre une<br />
immense comédienne haïtienne, Magali Comeau Denis.<br />
Magali et ses enfants vont bien.<br />
Ce chef d’œuvre <strong>de</strong> la littérature est un poignard plongé<br />
dans la misère politique, socia<strong>le</strong>, sexuel<strong>le</strong>, humaine du<br />
pays haïtien. Roman mythique, interdit sous François<br />
Duvalier, ouvrage <strong>de</strong> résistance et <strong>de</strong> prophétie.<br />
Je vous laisse lire ce que Marie Vieux Chauvet écrit en<br />
1968 par la voie <strong>de</strong> sa narratrice Claire Clamont dans «<br />
Amour » :<br />
Nous avons <strong>de</strong>puis quelques temps <strong>de</strong>s airs <strong>de</strong> chiens<br />
hargneux, harcelés que nous sommes par la peur, l’été,<br />
<strong>le</strong> so<strong>le</strong>il. Un terrib<strong>le</strong> so<strong>le</strong>il <strong>de</strong> cœur d’été haïtien nous tire<br />
la langue. Une langue épaisse, gigantesque, chargée<br />
d’effluves, qui nous lèche la peau du corps et nous brû<strong>le</strong><br />
sur place. Notre sueur cou<strong>le</strong> sans fin. Nous sommes<br />
maudits. Cyclones, tremb<strong>le</strong>ments <strong>de</strong> terre, sécheresse,<br />
rien ne nous a fait grâce. Les mendiants pullu<strong>le</strong>nt. Les<br />
rescapés du <strong>de</strong>rnier cataclysme, infirmes à moitié nus,<br />
hantent <strong>le</strong>s barrières <strong>de</strong>s maisons. Chacun feint <strong>de</strong> ne<br />
pas <strong>le</strong>s voir. Par quel mirac<strong>le</strong> ce peup<strong>le</strong> a-t-il pu pendant<br />
si longtemps rester bon, inoffensif, hospitalier et gai<br />
malgré la misère, l’injustice, <strong>le</strong>s préjugés sociaux ?<br />
On soulage <strong>de</strong>s centaines <strong>de</strong> souffrances pour en voir<br />
éclore <strong>de</strong>s millions d’autres. Peine perdue. La faim du<br />
corps, cel<strong>le</strong> <strong>de</strong> l’âme ; cel<strong>le</strong> <strong>de</strong> l’intelligence, cel<strong>le</strong> <strong>de</strong>s<br />
sens. Toutes <strong>le</strong>s souffrances se va<strong>le</strong>nt. L’homme, pour<br />
se défendre, a cultivé sa cruauté. Nous nous exerçons à<br />
nous entr’égorger. La haine entre nous est née. D’el<strong>le</strong><br />
sont sortis <strong>de</strong>s tortionnaires. Ils torturent avant d’égorger.<br />
C’est un héritage colonial auquel nous nous<br />
cramponnons. Nous sommes <strong>de</strong>venus méchants par<br />
contagion : agenouil<strong>le</strong>ments sur du sel en grains,<br />
33 / 46<br />
obligation pour <strong>le</strong>s suppliciés <strong>de</strong> compter <strong>le</strong>s coups qui<br />
<strong>le</strong>ur enlèvent la peau du corps, patates bouillantes dans<br />
la bouche sont <strong>le</strong>s moindres châtiments que certains<br />
hommes infligent à <strong>le</strong>urs petits domestiques, véritab<strong>le</strong>s<br />
esclaves, à <strong>le</strong>urs maîtresses, à <strong>le</strong>urs amantes cachées…<br />
Mon sang bouillonne, la révolte gron<strong>de</strong> en moi.<br />
Claire, la vieil<strong>le</strong> fil<strong>le</strong>, la noirau<strong>de</strong> « mal sortie » ignorée <strong>de</strong><br />
l’homme qu’el<strong>le</strong> aime, sexuel<strong>le</strong>ment frustrée nous<br />
raconte au fil <strong>de</strong>s pages la catastrophe <strong>de</strong> son cœur et<br />
<strong>de</strong> son corps ; el<strong>le</strong> est la métaphore du peup<strong>le</strong> haïtien.<br />
Constat luci<strong>de</strong>, implacab<strong>le</strong> mais ô combien digne et<br />
responsab<strong>le</strong>. Mais, par <strong>de</strong>là <strong>le</strong> cyc<strong>le</strong> ininterrompu <strong>de</strong> la<br />
catastrophe, ce que nous dit Marie Vieux Chauvet c’est<br />
que ce peup<strong>le</strong> est et restera toujours vivant, résolument<br />
<strong>de</strong>bout :<br />
Les cris d’une fou<strong>le</strong> en émeute m’arrachent à mon délire.<br />
D’où viennent ces cris ?…<br />
Je cache <strong>le</strong> poignard dans mon corsage.<br />
Je <strong>de</strong>scends.<br />
Dans la rue, <strong>le</strong>s mendiants, armés par Calédu, éructent.<br />
Les paysans brandissent <strong>de</strong>s torches. Ils hur<strong>le</strong>nt !<br />
Calédu et ses sbires chargent.<br />
Vingt corps tombent.<br />
Les bal<strong>le</strong>s siff<strong>le</strong>nt tout près <strong>de</strong> moi.<br />
Je reconnais Joël et Jean tapis <strong>de</strong>rrière <strong>le</strong>s balustra<strong>de</strong>s.<br />
Des uniformes jonchent <strong>le</strong> sol.<br />
Le commandant recu<strong>le</strong> tout en tirant.<br />
Il a peur. Il se rapproche à reculons <strong>de</strong> ma maison.<br />
Je <strong>le</strong> guette, je l’attends.<br />
Je <strong>le</strong> vois hésiter, tourner la tête dans tous <strong>le</strong>s sens.<br />
Le voilà à portée <strong>de</strong> ma main.<br />
Je lui plonge <strong>le</strong> poignard dans <strong>le</strong> dos.<br />
Une fois, <strong>de</strong>ux fois ; trois fois.<br />
Le sang gic<strong>le</strong>.<br />
Il se retourne en agrippant la porte.<br />
Son regard.<br />
Pas <strong>de</strong> remords.<br />
Les mendiants, comme <strong>de</strong>s fous, se ruent sur son<br />
cadavre. J’entends hur<strong>le</strong>r Joël Marti: « A la prison !
Libérons <strong>le</strong>s prisonniers ! » Une vaste clameur lui<br />
répond.<br />
Jean Luze apparaît ; une arme fumante au poing.<br />
-« Je suis fatiguée, si tu savais comme je suis fatiguée »<br />
Il me saisit <strong>le</strong>s mains. Je tiens encore <strong>le</strong> poignard rouge<br />
<strong>de</strong> sang.<br />
-« Comme une bête, il est mort comme une bête, comme<br />
un chien… »<br />
-« Tu l’as tué ? Toi ? C’est donc toi qui l’as eu ? Ah !<br />
Claire ! »<br />
Sa joue contre la mienne, son souff<strong>le</strong> dans mon oreil<strong>le</strong>.<br />
Ses bras qui m’étouffent.<br />
-« Si tu savais comme je suis fatiguée…»<br />
Est-ce moi qui ai prononcé ces mots ?<br />
Est-ce moi qui l’ai doucement, très doucement repoussé<br />
?<br />
34 / 46<br />
Est-ce moi…<br />
Je <strong>le</strong> quitte.<br />
J’entre dans ma chambre, m’enferme à doub<strong>le</strong> tour.<br />
Ce sang sur mes mains, ce sang sur ma robe, ce sang<br />
sur <strong>le</strong> poignard…<br />
(temps)<br />
J ‘aperçois par la fenêtre <strong>le</strong>s torches qui vacil<strong>le</strong>nt dans <strong>le</strong><br />
vent.<br />
Les portes <strong>de</strong>s maisons sont ouvertes et la vil<strong>le</strong> entière,<br />
<strong>de</strong>bout.<br />
Tâchons d’être et <strong>de</strong> rester <strong>de</strong>bout avec Haïti.
Haïti Année Zéro, Jean-René LEMOINE<br />
Comédien, auteur, metteur en scène, Jean-René Lemoine se consacre aujourd’hui à la mise en scène et à l’écriture<br />
dramatique. A ce titre, il a publié <strong>de</strong> nombreux textes pour <strong>le</strong> théâtre, notamment « Ecchymose » aux éditions Les Solitaires<br />
intempestifs et « L’Adoration » aux éditions Lanzman.<br />
Texte paru dans <strong>le</strong> Cahier central <strong>de</strong> Libération en date du mardi 19 janvier <strong>2010</strong>, publié avec l’autorisation <strong>de</strong> l’auteur.<br />
Haïti, Année Zéro.<br />
Avant toute chose, redisons-<strong>le</strong>. Il n’y a pas <strong>de</strong><br />
malédiction haïtienne. Si malédiction il y a, el<strong>le</strong> est dans<br />
<strong>le</strong> fantasme d’un Occi<strong>de</strong>nt dont on se <strong>de</strong>man<strong>de</strong> s’il n’a<br />
pas besoin d’une terre où dévi<strong>de</strong>r sa propre peur. «Haïti,<br />
pays <strong>le</strong> plus pauvre <strong>de</strong>s <strong>Amériques</strong>», ce slogan mis en<br />
exergue dans <strong>de</strong> si nombreux artic<strong>le</strong>s, semb<strong>le</strong> brandi<br />
comme une amu<strong>le</strong>tte, un exorcisme. Que signifient ces<br />
mots, répétés à l’envi comme une sentence ? Que c’est<br />
là et pas ail<strong>le</strong>urs que ce séisme <strong>de</strong>vait advenir ? Qu’il n’y<br />
a plus, qu’il n’y aura jamais plus d’espoir ? Qu’il existe<br />
sur terre un espace dédié exclusivement à l’horreur ? Au<br />
début <strong>de</strong>s années 80, la rumeur disait que <strong>le</strong> foyer du<br />
sida était en Haïti.<br />
La peste était née là-bas. Ce pays-là représentait l’infini<br />
danger tout comme maintenant il synthétise pour<br />
beaucoup l’infinie misère et <strong>le</strong> cataclysme annoncé. Et<br />
avant encore, quand je me disais haïtien, on me<br />
répondait «ah oui, <strong>le</strong>s Tontons Macoutes !» cette<br />
proposition n’étant même pas insérée dans une phrase<br />
structurée. Haïti était réductib<strong>le</strong> à ce seul lieu commun.<br />
Je sais combien ce pays est pauvre, fragi<strong>le</strong>, malmené. Je<br />
sais qu’il a connu une kyriel<strong>le</strong> <strong>de</strong> malheurs, a subi, entre<br />
autres, <strong>le</strong>s dictatures <strong>de</strong>s Duvalier, père et fils, mais on<br />
ne raconte pas une terre, aussi meurtrie soit-el<strong>le</strong>, en<br />
faisant un zoom sur une plaie. C’est lacunaire et donc<br />
faux.<br />
Il serait plus juste <strong>de</strong> dire qu’Haïti est un pays<br />
bou<strong>le</strong>versant qui dans sa dou<strong>le</strong>ur cè<strong>le</strong> aussi une<br />
incroyab<strong>le</strong> et inestimab<strong>le</strong> vitalité. C’est un pays où <strong>le</strong>s<br />
gens ont une force <strong>de</strong> résilience qui <strong>le</strong>s maintient <strong>de</strong>bout,<br />
un pays où la vio<strong>le</strong>nce fait <strong>de</strong>s ravages, mais où l’individu<br />
n’est pas agressif. Un pays qui a résolu son Œdipe avec<br />
la France, dont il fut la plus riche colonie, qui a conservé<br />
et transfiguré sa mémoire africaine. Un pays<br />
incroyab<strong>le</strong>ment riche en traditions, où l’art et <strong>le</strong> mystère<br />
sont partout. C’est un pays <strong>de</strong> peinture, <strong>de</strong> sculpture, <strong>de</strong><br />
littérature, <strong>de</strong> musique. C’est aussi <strong>le</strong> pays où une<br />
religion, <strong>le</strong> vaudou, accompagne <strong>de</strong> ses rites <strong>le</strong> quotidien<br />
35 / 46<br />
d’un peup<strong>le</strong> et là encore, on est loin <strong>de</strong>s clichés <strong>de</strong><br />
sorcel<strong>le</strong>rie. Un pays <strong>de</strong> contes et <strong>de</strong> mythologies où <strong>le</strong><br />
merveil<strong>le</strong>ux est à la croisée d’innombrab<strong>le</strong>s chemins. Un<br />
pays qui a gardé, dans son extrême dénuement, <strong>le</strong> sens<br />
et la générosité. Beaucoup <strong>de</strong> gens qui y ont vécu<br />
pourraient en témoigner, car aussi paradoxal que cela<br />
puisse paraître, on en tombe souvent amoureux.<br />
Haïti fait partie du mon<strong>de</strong><br />
Alors, <strong>de</strong> grâce, finissons-en avec cette épuisante et<br />
suintante compassion kouchnérienne, osons d’abord<br />
entendre ce que cette terre qui gémit maintenant tente <strong>de</strong><br />
nous dire. Comprenons qu’el<strong>le</strong> p<strong>le</strong>ure ses victimes et<br />
respectons son affliction. A l’annonce <strong>de</strong> la catastrophe<br />
j’ai été sidéré. J’avais beau regar<strong>de</strong>r <strong>le</strong>s images<br />
hallucinantes, je n’arrivais pas à <strong>le</strong>s intégrer comme étant<br />
la réalité.<br />
Ensuite, j’ai, comme beaucoup, cherché à savoir où<br />
étaient mes proches, qui était vivant, qui était mort. Je<br />
voudrais dire à tous ceux qui souffrent, mes<br />
condoléances : dire que je souffre avec eux. Je sais<br />
combien c’est peu <strong>de</strong> chose, mais je me souviens que<br />
<strong>de</strong>s mots m’ont consolé quand je pensais être<br />
inconsolab<strong>le</strong> et je <strong>le</strong>s glisse, ces mots, comme un<br />
talisman (qu’il est temps maintenant pour moi <strong>de</strong> rendre)<br />
dans la main <strong>de</strong> qui voudra <strong>le</strong>s prendre.<br />
Cela étant dit, je salue l’élan <strong>de</strong> solidarité que je vois<br />
naître <strong>de</strong> toutes parts et l’humanité que témoignent tous<br />
ceux que je rencontre. Le mon<strong>de</strong> semb<strong>le</strong> comprendre<br />
qu’Haïti fait partie du mon<strong>de</strong> et qu’on ne peut plus<br />
abandonner cette contrée comme on l’a fait <strong>de</strong>puis si<br />
longtemps. Des gens agissent en cet instant,<br />
ar<strong>de</strong>mment, distribuent aux sinistrés <strong>de</strong> l’eau, <strong>de</strong> la<br />
nourriture, <strong>de</strong>s soins. Tout cela est admirab<strong>le</strong>. Mais il faut<br />
dès maintenant penser l’avenir. Une amie haïtienne me<br />
disait : «On ne peut pas laisser <strong>le</strong>s gens à la fois dans <strong>le</strong><br />
dénuement et dans <strong>le</strong> traumatisme <strong>de</strong> l’au revoir, quand<br />
<strong>le</strong>s organisations humanitaires s’en vont.»
On sait que <strong>le</strong>s catastrophes ont sur beaucoup l’impact<br />
du spectaculaire. On sait à quel<strong>le</strong> vitesse ce même<br />
spectac<strong>le</strong> se démo<strong>de</strong>. Mais si on ne change pas <strong>de</strong> point<br />
<strong>de</strong> vue, toutes ces images diffusées en bouc<strong>le</strong>s n’auront<br />
servi à rien. On ne peut pas poser un frê<strong>le</strong> paravent <strong>de</strong><br />
charité sur un tel désastre et ensuite s’en al<strong>le</strong>r, la messe<br />
étant dite. Il faut, il est indispensab<strong>le</strong> que naisse une<br />
pensée pour que toute cette souffrance, toutes ces<br />
<strong>de</strong>structions n’aient pas eu lieu en vain.<br />
Il faut absolument penser à reconstruire. C’est d’abord la<br />
communauté internationa<strong>le</strong> qui en a <strong>le</strong> pouvoir. Cela ne<br />
veut pas dire mettre Haïti sous tutel<strong>le</strong>, comme on enlève<br />
ses droits à un parent fou. Haïti est un parent, mais<br />
luci<strong>de</strong>. C’est un pays qui a besoin d’ai<strong>de</strong> pour se re<strong>le</strong>ver<br />
et retrouver une cohérence. C’est un pays qui traverse la<br />
mort et <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à renaître. Je sais qu’il y a là-bas,<br />
malgré l’exo<strong>de</strong> dont on a tant parlé, <strong>de</strong>s gens capab<strong>le</strong>s<br />
d’agir. Il faut une concertation avec eux pour penser cette<br />
reconstruction. Si cela est mis en place, alors un espoir<br />
est possib<strong>le</strong>. L’espoir d’un vrai changement. Reconstruire<br />
un véritab<strong>le</strong> espace <strong>de</strong> vie, c’est un projet extraordinaire<br />
qui peut générer un profond bou<strong>le</strong>versement. Cette<br />
utopie peut <strong>de</strong>main <strong>de</strong>venir réalité.<br />
36 / 46<br />
Un espoir s’est <strong>le</strong>vé.<br />
Lorsque l’on m’a <strong>de</strong>mandé ce témoignage, j’ai répondu<br />
que j’étais incapab<strong>le</strong> d’écrire, car pétrifié, il me fallait du<br />
temps. Et puis bien sûr, à la secon<strong>de</strong> suivante, j’ai<br />
commencé à écrire, dans ma tête. Je sais que <strong>de</strong>s<br />
écrivains diront, raconteront ce qui s’est passé. Cela<br />
aussi est important. J’espère que <strong>le</strong>urs mots pourront<br />
non seu<strong>le</strong>ment témoigner du désastre, car une mémoire<br />
est nécessaire, mais qu’ils diront aussi que quelque<br />
chose s’est ouvert, qu’un espoir exemplaire s’est <strong>le</strong>vé<br />
dans cette î<strong>le</strong> <strong>de</strong> la Caraïbe, sœur <strong>de</strong> dou<strong>le</strong>ur et complice<br />
<strong>de</strong> tant d’autres î<strong>le</strong>s, <strong>de</strong> tant d’autres pays.
Rester en vie et perpétuer la vie, Kettly MARS<br />
Née à Port-au-Prince où el<strong>le</strong> rési<strong>de</strong> toujours, Kettly Mars commence sa carrière d’auteur par l’écriture <strong>de</strong> poèmes. Lauréate<br />
en 1996 du prix Jacques-Stéphen-A<strong>le</strong>xis <strong>de</strong> la nouvel<strong>le</strong>, el<strong>le</strong> affirme aussi sa vocation d’écrivain par la publication chez<br />
Vents d’ail<strong>le</strong>urs <strong>de</strong> « L’heure hybri<strong>de</strong> » en 2005 et <strong>de</strong> « Kasalé » en 2007.<br />
(Texte paru dans <strong>le</strong> journal Die Zeit en date du 21 janvier, publié avec l’autorisation <strong>de</strong> l’auteur)<br />
Rester en vie et perpétuer la vie…<br />
Pétion-Vil<strong>le</strong>, Haïti<br />
Je suis <strong>de</strong> ceux et cel<strong>le</strong>s qui ont survécu au séisme du<br />
12 janvier 2009. J’ai encore une maison. Ma famil<strong>le</strong><br />
proche est vivante, nous ne p<strong>le</strong>urons aucune perte. J’ai<br />
<strong>de</strong> la chance d’avoir encore <strong>de</strong> l’é<strong>le</strong>ctricité et d’accé<strong>de</strong>r à<br />
l’internet. Alléluia ! Quand j’ouvre mon pc et qu’un<br />
nouveau nom figure dans la liste <strong>de</strong> mes contacts en<br />
ligne, je respire un grand coup. Ayibobo ! Nous sommes<br />
<strong>de</strong>ux famil<strong>le</strong>s voisines et nous mettons nos moyens en<br />
commun pour tenir.<br />
Des secousses jusqu’au milieu <strong>de</strong> la journée, quatre<br />
jours après. Je suis traumatisée, j’en ai conscience mais<br />
je ne peux tout simp<strong>le</strong>ment pas retenir mon corps quand<br />
il panique. Je crois qu’environ <strong>de</strong>ux millions <strong>de</strong><br />
personnes souffrent du même traumatisme. Nous<br />
entendons <strong>le</strong> bruit sinistre qui vient avec la secousse et<br />
nous sentons la terre frémir sous nos pieds, mais nous<br />
ne savons pas toujours si la sensation est imaginée ou<br />
ressentie. L’enfer va-t-il encore danser sous nos pieds ?<br />
J’appel<strong>le</strong> cela <strong>le</strong> syndrome <strong>de</strong> la secousse.<br />
Je souffre aussi du syndrome <strong>de</strong> la porte ouverte. Quand<br />
je suis dans la maison, je dois toujours avoir une porte<br />
ouverte sous <strong>le</strong>s yeux. Pour courir plus vite que la mort.<br />
Une illusion pourtant. Les survivants ont survécu parce<br />
que <strong>le</strong>s maisons sous <strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s ils se trouvaient ne sont<br />
pas tombées. Les autres n’ont pas eu <strong>le</strong> temps <strong>de</strong> sortir.<br />
En quelques secon<strong>de</strong>s, tout était fini, <strong>de</strong>ux spasmes <strong>de</strong>s<br />
entrail<strong>le</strong>s <strong>de</strong> la terre et notre <strong>de</strong>stin faisait une tête à<br />
queue. Nous dormons encore sous <strong>le</strong>s étoi<strong>le</strong>s. Dieu, ce<br />
que <strong>le</strong>s nuits sont bel<strong>le</strong>s !<br />
Dans <strong>le</strong>s quartiers populaires du bas <strong>de</strong> Port-au-Prince,<br />
après quatre jours, <strong>le</strong>s humains cohabitent avec <strong>le</strong>s<br />
cadavres décomposés. La dou<strong>le</strong>ur mûrit, el<strong>le</strong> habite la<br />
vil<strong>le</strong>. Les moyens du Centre National <strong>de</strong> l’Equipement<br />
sont dépassés, il faudrait cinquante fois plus <strong>de</strong> camions<br />
pour emporter, brû<strong>le</strong>r ou enterrer <strong>le</strong>s morts. Une o<strong>de</strong>ur<br />
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pesti<strong>le</strong>ntiel<strong>le</strong> recouvre <strong>le</strong>s quartiers <strong>le</strong>s plus touchés, on<br />
ne peut <strong>le</strong>s traverser sans vomir. Exo<strong>de</strong> vers la province.<br />
Certaines rues sont bondées <strong>de</strong> gens qui vont dans<br />
toutes <strong>le</strong>s directions. Il faut quitter la capita<strong>le</strong>, ces rues<br />
qui sont <strong>de</strong>s veines éclatées. Les vo<strong>le</strong>urs hantent <strong>le</strong> bas<br />
<strong>de</strong> la vil<strong>le</strong>, on pil<strong>le</strong> <strong>le</strong>s magasins. On braque <strong>le</strong>s piétons,<br />
on dépouil<strong>le</strong> <strong>le</strong>s gens du peup<strong>le</strong> du peu qu’ils ont.<br />
Il y a <strong>de</strong>s quartiers qui sont plus touchés que d’autres,<br />
mais tous sont touchés. Bidonvil<strong>le</strong>s, bas <strong>de</strong> la capita<strong>le</strong>,<br />
quartiers popu<strong>le</strong>ux, quartiers rési<strong>de</strong>ntiels. Pour une fois<br />
en Haïti <strong>le</strong>s clivages <strong>de</strong> société n’ont fait aucune<br />
différence, <strong>le</strong> séisme ne connait ni classe socia<strong>le</strong> ni<br />
cou<strong>le</strong>ur <strong>de</strong> peau. Nous p<strong>le</strong>urons tous <strong>de</strong>s morts, chaque<br />
appel, chaque visite nous apprend plus <strong>de</strong> fatalités. Des<br />
b<strong>le</strong>ssures que nous ne pouvons encore vivre en toute<br />
conscience. Le choc est là, on voudrait en avoir rêvé.<br />
L’ai<strong>de</strong> internationa<strong>le</strong> est présente, <strong>le</strong> mon<strong>de</strong> entier a<br />
entendu la rumeur qui a emporté Haïti dans ses<br />
profon<strong>de</strong>urs. Ce pays qui fait par<strong>le</strong>r <strong>de</strong> lui toujours pour<br />
<strong>de</strong>s raisons tragiques. Ce pays marqué du signe du<br />
sang. Les autorités sont dépassées par la situation. On<br />
n’entend pas <strong>le</strong> gouvernement. Il reste muet, il ne par<strong>le</strong><br />
pas à son peup<strong>le</strong>. Il nous confirme sa faib<strong>le</strong>sse.<br />
Le chef <strong>de</strong> l’état ne sait pas trouver <strong>le</strong>s mots pour par<strong>le</strong>r<br />
au peup<strong>le</strong>, pour nous encourager, nous donner<br />
confiance. Nous sommes frappés à la tête. Nous,<br />
Haïtiens, avons jusqu’à présent <strong>le</strong> sentiment d’être livrés<br />
à nous-mêmes. Pourtant l’ai<strong>de</strong> a débarqué et continue <strong>de</strong><br />
débarquer massivement. Le gouvernement <strong>de</strong> la<br />
République Dominicaine voisine a été l’un <strong>de</strong>s premiers à<br />
réagir, oubliant tous <strong>le</strong>s conflits qui nous opposent à<br />
cause <strong>de</strong> la migration haïtienne qui est un problème<br />
économique et politique grave entre nos <strong>de</strong>ux pays. Les<br />
États-Unis d’Amérique, la France, <strong>le</strong> Canada, l’Europe, <strong>le</strong><br />
Japon, la Chine, tous se mobilisent, tous veu<strong>le</strong>nt faire
atterrir <strong>de</strong>s avions dans notre espace aérien bondé. Il n’y<br />
a plus <strong>de</strong> tour <strong>de</strong> contrô<strong>le</strong> à l’aéroport. Il y a même eu un<br />
inci<strong>de</strong>nt diplomatique suite au refus <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s<br />
autorités étrangères contrôlant l’aéroport <strong>de</strong> laisser<br />
atterrir un avion hôpital venant d’Europe.<br />
Mais cette ai<strong>de</strong> internationa<strong>le</strong> ne cou<strong>le</strong> pas dans <strong>le</strong>s rues,<br />
pas encore <strong>de</strong> tentes, pas encore <strong>de</strong> dispensaires<br />
ambulants, pas encore <strong>de</strong> soulagement. Nos hôpitaux<br />
sont dépassés, plus <strong>de</strong> médicaments, aucun soin ne<br />
peut-être donné. Le peup<strong>le</strong>, la masse <strong>de</strong>s sans-abris qui<br />
occupe <strong>le</strong>s rues et <strong>le</strong>s places publiques attend toujours,<br />
dans la peur et la frustration. Il y a toujours <strong>de</strong>s hommes,<br />
<strong>de</strong>s femmes et <strong>de</strong>s enfants en vie sous <strong>le</strong>s décombres.<br />
Pour eux, pour ceux qui <strong>le</strong>s recherchent et <strong>le</strong>s atten<strong>de</strong>nt,<br />
l’espoir diminue d’heure en heure. Ceux qui <strong>le</strong> peuvent<br />
quittent <strong>le</strong> pays par la frontière, l’exo<strong>de</strong> à un autre niveau.<br />
Sur <strong>le</strong>s places publiques, <strong>de</strong>s installations <strong>de</strong> fortune, on<br />
s’agglutine pê<strong>le</strong>-mê<strong>le</strong>. On fait ses besoins ou on peut. On<br />
a faim, soif, et on souffre. Et on prie, toute la nuit. Pour la<br />
cinquième nuit consécutive ils ont prié, <strong>le</strong>s mains <strong>le</strong>vées<br />
au ciel. Jésus!... Jésus ! Le nom sur toutes <strong>le</strong>s lèvres.<br />
Nous avons trop péché, c’est la punition divine.<br />
Repentez-vous ! Une tel<strong>le</strong> épreuve ne peut-être qu’une<br />
punition <strong>de</strong> Dieu, fatigué <strong>de</strong> nous voir pêcher. Diffici<strong>le</strong><br />
d’en<strong>le</strong>ver cela <strong>de</strong>s têtes, diffici<strong>le</strong> <strong>de</strong> ne pas croire à la<br />
malédiction. Surtout quand 90% <strong>de</strong>s églises chrétiennes<br />
sont tombées. Le combat du bien contre <strong>le</strong> mal.<br />
L’archevêque <strong>de</strong> Port-au-Prince a péri.<br />
Où sont <strong>le</strong>s vodouisants ? Aucun tambour n’a résonné<br />
dans la beauté <strong>de</strong>s nuits criblées d’étoi<strong>le</strong>s. La<br />
suprématie chrétienne se révè<strong>le</strong> dans toute sa<br />
puissance. En Haïti, <strong>le</strong> vodou évolue dans une certaine<br />
ombre, <strong>de</strong> façon mitigée, acceptée sur un plan esthétique<br />
et défendu par une génération d’artistes qui y voient un<br />
élément puissant <strong>de</strong> notre culture, un matière première<br />
au potentiel esthétique inépuisab<strong>le</strong>; mais rejeté par <strong>le</strong>s<br />
chrétiens, particulièrement ceux <strong>de</strong>s cultes réformés. Le<br />
vodou traverse notre structure menta<strong>le</strong>, l’haïtien est<br />
mystique <strong>de</strong> nature, il vit près <strong>de</strong> ses rêves.<br />
C’est pourquoi cet héritage spirituel ne peut pas<br />
disparaître <strong>de</strong> notre culture. Mais il vit en situation<br />
hypocrite. Ceux qui en ce moment prendraient <strong>le</strong> risque<br />
<strong>de</strong> faire un service vodou se verraient probab<strong>le</strong>ment<br />
lynchés. Cela s’est déjà vu dans <strong>de</strong>s situations <strong>de</strong> crises<br />
politiques aigües dans <strong>le</strong> passé en Haïti. La foi vodou<br />
<strong>de</strong>vra rester « un<strong>de</strong>rground », <strong>le</strong>s esprits <strong>de</strong> nos ancêtres<br />
<strong>de</strong>vront encore souffrir <strong>de</strong> la soif et <strong>de</strong> la faim.<br />
Alors qu’on se chamaillait pour <strong>le</strong>s prochaines é<strong>le</strong>ctions<br />
législatives, alors que <strong>le</strong>s politiciens s’attrapaient par <strong>le</strong>s<br />
cheveux pour quelques places au sénat ou à la chambre<br />
<strong>de</strong>s députés, tout paraît a présent tel<strong>le</strong>ment dérisoire. Le<br />
pouvoir actuel veut se perpétuer, c’est une sorte<br />
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d’instinct qui pousse <strong>le</strong> politicien haïtien à se<br />
déshumaniser. Toujours la même histoire du petit<br />
groupe qui veut tout gar<strong>de</strong>r, et gar<strong>de</strong>r <strong>le</strong> statu quo <strong>de</strong> la<br />
misère pour tous <strong>le</strong>s autres.<br />
Le gouvernement a été frappé <strong>de</strong> p<strong>le</strong>in fouet. Presque<br />
tous <strong>le</strong>s immeub<strong>le</strong>s étatiques sont tombés, entrainant<br />
dans <strong>le</strong>urs chutes <strong>de</strong>s dizaines, <strong>de</strong>s centaines <strong>de</strong> cadres<br />
du gouvernement. La faib<strong>le</strong>sse <strong>de</strong>s structures rend la<br />
distribution <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong> internationa<strong>le</strong> impossib<strong>le</strong> jusqu’au<br />
matin <strong>de</strong> ce cinquième jour. Émeutes et pillages sont<br />
inévitab<strong>le</strong>s si la ceinture <strong>de</strong> sécurité <strong>de</strong> la vil<strong>le</strong> n’est pas<br />
garantie par <strong>de</strong>s forces militaires et policières soli<strong>de</strong>s. On<br />
attend <strong>de</strong>s milliers <strong>de</strong> militaires américains dans <strong>le</strong>s<br />
prochains jours. Mais la frustration en attendra-t-el<strong>le</strong><br />
autant avant d’éclater ?<br />
La société civi<strong>le</strong> se réveil<strong>le</strong>, cherche à se rassemb<strong>le</strong>r<br />
pour ai<strong>de</strong>r, monter <strong>de</strong>s cellu<strong>le</strong>s d’urgence. Il a fallu<br />
enterrer <strong>le</strong>s morts en vitesse ; il y a encore <strong>de</strong>s milliers<br />
<strong>de</strong> corps sans sépultures à l’échel<strong>le</strong> <strong>de</strong> toute la capita<strong>le</strong>,<br />
<strong>de</strong> ses environs, <strong>de</strong>s vil<strong>le</strong>s <strong>de</strong> Léogâne, vers <strong>le</strong> sud, <strong>de</strong><br />
Jacmel au sud-est, <strong>de</strong> Cabaret, à l’Ouest et bien d’autres<br />
encore. Maintenant il faut concentrer toutes nos<br />
énergies pour un grand élan <strong>de</strong> solidarité, <strong>le</strong> plus grand<br />
élan <strong>de</strong> solidarité que notre histoire exigera <strong>de</strong> nous. Car<br />
<strong>le</strong>s jours à venir sont sombres. L’année scolaire semb<strong>le</strong><br />
compromise, tous <strong>le</strong>s services sociaux sont gravement<br />
touchés. Les épidémies nous menacent. Tout est à<br />
reconstruire dans un pays déjà pauvre, déjà touché par<br />
<strong>le</strong> sous-développement endémique. L’immensité <strong>de</strong> la<br />
tâche est écrasante. Mais il vaut mieux ne pas la<br />
considérer dans sa totalité, nous <strong>de</strong>vons voir la première<br />
main à tendre, la première souffrance à soulager. Rester<br />
en vie et perpétuer la vie, un jour à la fois, une heure à la<br />
fois.<br />
Nous sommes dans un instant <strong>de</strong> nos vies où seu<strong>le</strong> la foi<br />
nous tient <strong>de</strong>bout. La foi en un pays qui s’appel<strong>le</strong> Haïti et<br />
qui malgré tous <strong>le</strong>s coups reçus, <strong>le</strong>s coups qu’il s’est<br />
donné, ne veut pas mourir. Une nation née dans <strong>de</strong><br />
drô<strong>le</strong>s <strong>de</strong> circonstances, dans <strong>le</strong> feu, <strong>le</strong> fer et <strong>le</strong> sang.<br />
Une nation qui traîne un passé <strong>de</strong> gloire <strong>de</strong>venu trop<br />
lourd à porter. Ce tremb<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> terre nous met à<br />
genoux, <strong>le</strong> nez dans la boue, dans la détresse la plus<br />
tota<strong>le</strong>. Est-ce <strong>le</strong> coup <strong>de</strong> grâce pour Haïti ? Nous disons<br />
non. C’est peut-être une chance, une renaissance. Une<br />
force émergera peut-être <strong>de</strong> cette épreuve, el<strong>le</strong> fera peutêtre<br />
tomber <strong>le</strong>s ban<strong>de</strong>aux sur nos yeux, ceux qui nous<br />
empêchent <strong>de</strong> nous voir tels que nous sommes. Nous<br />
avons <strong>le</strong> droit à ce rêve <strong>de</strong> pure folie. Mais nous avons<br />
besoin <strong>de</strong> la force <strong>de</strong>s autres avec nous, pour <strong>de</strong> vrai,<br />
pour longtemps.
L'urgence <strong>de</strong> dire, Emmelie PROPHETE<br />
Lauréate en 2009 du grand prix littéraire Caraïbe <strong>de</strong> l’ADELF - Association <strong>de</strong>s Écrivains <strong>de</strong> Langue Française pour « Le<br />
Testament <strong>de</strong>s solitu<strong>de</strong>s » paru aux éditions Mémoire d’encrier, Emmelie Prophète est directrice <strong>de</strong> la Direction Nationa<strong>le</strong> du<br />
Livre au Ministère <strong>de</strong> la Culture.<br />
(Texte paru dans <strong>le</strong> Cahier central <strong>de</strong> Libération en date du mardi 19 janvier <strong>2010</strong>, publié avec l’autorisation <strong>de</strong> l’auteur.)<br />
L’urgence <strong>de</strong> dire<br />
Je ne sais si c’est mon cœur qui bat ou si c’est la terre<br />
qui tremb<strong>le</strong> sous mes pieds. Diffici<strong>le</strong> <strong>de</strong> faire la<br />
différence. Tout s’est curieusement mélangé <strong>de</strong>puis ce<br />
mardi 12 janvier 17 heures, heure loca<strong>le</strong>. Les mots et <strong>le</strong>s<br />
choses. Les vivants et <strong>le</strong>s morts. Je ne peux plus p<strong>le</strong>urer.<br />
Il y a trop <strong>de</strong> morts, trop d’amis sous <strong>le</strong>s décombres, trop<br />
<strong>de</strong> mauvaises nouvel<strong>le</strong>s qui arrivent.<br />
Je relis au hasard une nouvel<strong>le</strong> <strong>de</strong> Georges Angla<strong>de</strong> titré<br />
« La carte rouge d’Haïti » C’est une bel<strong>le</strong> nouvel<strong>le</strong>. Estce<br />
la beauté du texte ou la mort <strong>de</strong> Georges qui me fait<br />
p<strong>le</strong>urer ? Georges est mort. Enseveli sous <strong>le</strong>s décombres<br />
<strong>de</strong> sa maison, ce mardi 12. Le tremb<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> terre<br />
semb<strong>le</strong> avoir voulu tout gommer d’un seul coup. Le<br />
passé. L’avenir. Le pays.<br />
La poussière est tenace. Les o<strong>de</strong>urs aussi. Il ne reste<br />
que cela <strong>de</strong> la vil<strong>le</strong>. Il ne reste que cela <strong>de</strong> la vie. O<strong>de</strong>urs<br />
et poussières.<br />
La réunion du PEN Haïti <strong>de</strong> vendredi <strong>de</strong>rnier semb<strong>le</strong><br />
dater d’une autre époque, <strong>le</strong> festival du film et du livre<br />
Etonnants voyageurs qui aurait du commencer <strong>le</strong> 14<br />
janvier et qui aurait du être une bel<strong>le</strong> fête <strong>de</strong> la paro<strong>le</strong> et<br />
<strong>de</strong> l’amitié semb<strong>le</strong> être un <strong>de</strong> ces rêves qu’on ne raconte<br />
pas. Un rêve bruta<strong>le</strong>ment cassé par <strong>le</strong> malheur.<br />
Que sont ces mots écrits, ces mémoires encombrées,<br />
tout ce désir d’être dans cet espace <strong>de</strong> peur et <strong>de</strong><br />
confusion ? Je prends la mesure <strong>de</strong> la banalité, <strong>de</strong> la<br />
relativité <strong>de</strong>s choses. Cela me fait presque du bien ce<br />
vendredi matin- tiens on est vendredi !-, <strong>le</strong>s jours existent<br />
donc toujours ? <strong>de</strong> ne me sentir personne. Je suis tous<br />
ces corps anonymes en décomposition déposés sur <strong>le</strong>s<br />
trottoirs. Le hasard qui a fait que je ne sois pas parmi eux<br />
39 / 46<br />
est trop flou. Il n’est pas <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong>s choses qui<br />
puissent se comprendre, encore moins se dire. Même la<br />
force <strong>de</strong>s choses ne m’y fait pas croire. Etre vivant ici et<br />
maintenant cela ne veut rien dire, ou pas grand-chose…<br />
Les journées sont longues. L’eau et la nourriture<br />
s’épuisent. Lutter pour la vie. Lutter pour la mort. Donnemoi<br />
un peu <strong>de</strong> ta mort Christine, je te donnerai un peu <strong>de</strong><br />
ma vie. J’ai envie <strong>de</strong> continuer à partager <strong>de</strong>s choses<br />
avec toi comme on avait partagé Marquez, Barrico,<br />
Schmidt.<br />
Je suis coincée avec <strong>le</strong>s autres survivants dans l’inutilité<br />
<strong>de</strong>s choses. Je suis un personnage <strong>de</strong> roman, orphelin<br />
<strong>de</strong> <strong>le</strong>cteurs et d’amitiés. J’accepte la vacuité, comme on<br />
accepte sa naissance, sans avoir rien <strong>de</strong>mandé. Je<br />
touche du doigt ce passé tel<strong>le</strong>ment présent.<br />
Les enfants du désastre n’ont peur <strong>de</strong> rien. Ils sont <strong>de</strong>s<br />
centaines à sortir <strong>de</strong>s morts et <strong>de</strong>s <strong>de</strong>mi vivants sous <strong>le</strong>s<br />
décombres. Ce sont <strong>de</strong>s personnages <strong>de</strong> prochains<br />
romans, <strong>de</strong>s héros qui resteront anonymes, invisib<strong>le</strong>s<br />
qu’ils sont <strong>de</strong>rrière <strong>le</strong>urs masques <strong>de</strong> fortune, <strong>de</strong>rrière<br />
<strong>le</strong>ur pauvreté.<br />
Des festivals <strong>de</strong> la vie, du livre, <strong>de</strong> la musique, nous en<br />
ferons. Nous en referons sur <strong>le</strong>s décombres et pour vous<br />
rendre hommage chers héros, chers morts.<br />
Il y a sans doute plus que jamais l’urgence du dire,<br />
l’urgence du témoignage. La rumeur qui se confirme<br />
toujours est cel<strong>le</strong> <strong>de</strong> la vie.<br />
Emmelie Prophète<br />
Port-au-Prince, Haïti<br />
15 janvier <strong>2010</strong>
Interview <strong>de</strong> Lyonel TROUILLOT<br />
Lauréat du <strong>Prix</strong> Wep<strong>le</strong>r 2009 pour <strong>le</strong> roman « Yanvalou pour Charlie » publié chez Actes Sud, Lyonel Trouillot est aussi un<br />
intel<strong>le</strong>ctuel engagé sur <strong>le</strong> front <strong>de</strong> la reconstruction démocratique <strong>de</strong> son pays. Haïti <strong>de</strong>meure la source <strong>de</strong> son inspiration<br />
romanesque<br />
Interview <strong>de</strong> Lionel Trouillot réalisé par Soazig Quéméner.<br />
Le Journal du Dimanche, édition du dimanche 17 janvier <strong>2010</strong>.<br />
"On <strong>le</strong>ur <strong>de</strong>man<strong>de</strong>, foutre, <strong>de</strong> diriger !"<br />
Où êtes-vous, comment al<strong>le</strong>z-vous?<br />
Depuis mardi soir, nous sommes une vingtaine à<br />
partager une cour, <strong>le</strong>s plus actifs sortant vers <strong>le</strong>s rues. Il<br />
y a ma sœur et mon beau-frère, spécialistes en<br />
éducation, dont l’université privée, <strong>le</strong> rêve d’une vie, s’est<br />
effondrée. Il y a en <strong>de</strong>ssous <strong>de</strong>s vivants et <strong>de</strong>s morts. Ils<br />
se démènent pour essayer <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong> pour sortir<br />
<strong>le</strong>s corps. C’est diffici<strong>le</strong>. On a fina<strong>le</strong>ment sorti quelques<br />
étudiants vivants, mais il y a encore en <strong>de</strong>ssous <strong>de</strong>s<br />
cadavres qui pourrissent. Il y a la femme <strong>de</strong> mon frère<br />
qui a perdu une cousine sous <strong>le</strong>s décombres du<br />
supermarché préféré <strong>de</strong>s élites et <strong>de</strong>s coopérants. Nous<br />
sommes chanceux. Parmi <strong>le</strong>s plus chanceux. Dans<br />
d’autres quartiers, c’est pire.<br />
Quatre jours après <strong>le</strong> séisme, comment surviton<br />
à Port-au-Prince?<br />
Il y a <strong>le</strong>s vivants qui comptent <strong>le</strong>urs morts, et <strong>le</strong>s<br />
décombres, et l’o<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> la mort, et la rareté qui s’instal<strong>le</strong><br />
au fur et à mesure. Et <strong>le</strong> soir tombé, l’obscurité et <strong>le</strong> bruit<br />
<strong>de</strong>s bal<strong>le</strong>s. Car cela commence à tirer. Les tentatives <strong>de</strong><br />
pillage, <strong>de</strong> vol, se multiplient (cela a quand même pris<br />
trois jours, preuve d’un haut <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> civilisation) et la<br />
police réagit par l’action la plus faci<strong>le</strong>, la plus prompte: <strong>le</strong><br />
coup <strong>de</strong> feu. C’est cela l’état <strong>de</strong>s lieux, <strong>de</strong>s gens qui<br />
dorment sur <strong>de</strong>s terrains vagues, <strong>de</strong>s efforts pour<br />
ramasser <strong>le</strong>s cadavres et <strong>le</strong>s enterrer pour essayer <strong>de</strong><br />
sauver <strong>le</strong>s vivants emmurés, la pagail<strong>le</strong> aussi: qui<br />
appe<strong>le</strong>r? Où al<strong>le</strong>r? Comment obtenir <strong>de</strong>s soins pour <strong>le</strong>s<br />
b<strong>le</strong>ssés?<br />
Vous sentez-vous abandonnés?<br />
La colère monte. Sur une radio, un homme hur<strong>le</strong>:<br />
"Préval, souke bounda a" (littéra<strong>le</strong>ment: "Préval, secouetoi<br />
<strong>le</strong> cul!"). C’est vrai qu’on ne sent pas la présence <strong>de</strong><br />
l’Etat. Nombreux sont <strong>le</strong>s survivants bien portants qui<br />
voudraient ai<strong>de</strong>r, mais personne ne <strong>le</strong>ur dit quoi faire.<br />
40 / 46<br />
L’ai<strong>de</strong> arrive, mais qui coordonne quoi? On en a marre<br />
que <strong>le</strong>s médias rappel<strong>le</strong>nt qu’Haïti est <strong>le</strong> pays <strong>le</strong> plus<br />
pauvre <strong>de</strong> l’Amérique. On en a marre que ce<br />
tremb<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> terre soit une nouvel<strong>le</strong> occasion <strong>de</strong> sortir<br />
<strong>le</strong>s clichés, <strong>de</strong> <strong>de</strong>ssiner <strong>le</strong>s mêmes caricatures. Mais on<br />
est surtout agacé <strong>de</strong> la disparition <strong>de</strong> l’Etat. Le<br />
tremb<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> terre n’a pas tué l’Etat. On <strong>le</strong>ur<br />
<strong>de</strong>man<strong>de</strong>, foutre, <strong>de</strong> diriger!<br />
"Ce pays est viab<strong>le</strong>"<br />
Que pensez-vous <strong>de</strong> cette conférence sur la<br />
reconstruction d’Haïti qui est déjà annoncée?<br />
Conférence… Propositions américaines… Luttes<br />
d’influence déjà? Volontés <strong>de</strong> mainmise? On s’interroge.<br />
Cela paraît précipité. Est-ce <strong>le</strong> moment <strong>de</strong> par<strong>le</strong>r <strong>de</strong> tout<br />
cela? Tout discours, toute attitu<strong>de</strong> qui pourrait laissé<br />
penser que l’on souhaite en profiter pour par<strong>le</strong>r <strong>de</strong><br />
l’échec d’Haïti ne peut que braquer et inquiéter. Les<br />
Haïtiens n’accepteront pas que <strong>le</strong> tremb<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> terre<br />
se transforme en prétexte à autre chose. D’ail<strong>le</strong>urs, <strong>le</strong>s<br />
choses sont nettes. Leurs pays ont rapatrié <strong>le</strong>s<br />
ressortissants étrangers, avec quelques Haïtiens<br />
(partenaires affectifs). C’est normal. On sourit en pensant<br />
au poids d’un passeport ou d’une relation. Les<br />
nationalités jouent dans <strong>le</strong>s grands malheurs. Sans que<br />
cela renvoie aux comportements <strong>de</strong>s personnes. Avec<br />
son passeport canadien, je n’ai jamais vu Dany Laferrière<br />
aussi haïtien que lors <strong>de</strong> cette catastrophe.<br />
On a beaucoup entendu dans <strong>le</strong>s témoignages cette<br />
semaine qu’Haïti était fini?<br />
Ce pays est viab<strong>le</strong>, meurtri, matériel<strong>le</strong>ment détruit par ce<br />
foutu tremb<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> terre, miné aussi par <strong>de</strong>s<br />
problèmes sociopolitiques, mais viab<strong>le</strong>, en tant qu’entité<br />
politique. C’est cela la mise <strong>de</strong> ceux et cel<strong>le</strong>s qui<br />
essayent <strong>de</strong> sortir <strong>le</strong>s gens sous <strong>le</strong>s ruines, <strong>de</strong>s jeunes<br />
qui essayent <strong>de</strong> mettre en place <strong>de</strong>s comités <strong>de</strong> quartier,
<strong>de</strong>s nombreux cadres, enseignants, <strong>le</strong>a<strong>de</strong>rs politiques,<br />
ingénieurs, intel<strong>le</strong>ctuels, écrivains, tués par <strong>le</strong><br />
tremb<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> terre. C’était cela la mise <strong>de</strong> ce jeune<br />
homme, Pierre-Richard Jean-Pierre, enseignant,<br />
animateur culturel, qui venait d’accepter <strong>le</strong> poste <strong>de</strong> chef<br />
<strong>de</strong> cabinet <strong>de</strong> la ministre <strong>de</strong> la Culture, sur <strong>le</strong>quel <strong>le</strong><br />
ministère s’est effondré. Ici, ni <strong>le</strong>s morts, ni <strong>le</strong>s vivants ne<br />
réclament une inter gouvernance.<br />
Comment se remettre alors d’une tel<strong>le</strong><br />
catastrophe?<br />
Avec l’ai<strong>de</strong> étrangère (on ne pourra pas <strong>le</strong> faire seuls) et<br />
dans la dignité (c’est Haïti qu’il faut construire et pas une<br />
fiction ni une communauté cobaye <strong>de</strong> quelque nouvel<br />
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ordre), il faudra reconstruire un pays avec moins<br />
d’injustice socia<strong>le</strong>, avec un meil<strong>le</strong>ur partage <strong>de</strong>s<br />
richesses. Avec un Etat plus digne et au service <strong>de</strong> la<br />
population. Même lorsque nos maisons ont tremblé et se<br />
sont effondrées sur nos têtes, tuant nos proches et<br />
détruisant nos quelques biens, nous n’avons pas cessé<br />
d’y croire. De cette "communauté du pire" dont parlait<br />
Camus, tirons la <strong>le</strong>çon <strong>de</strong> la nécessité d’un meil<strong>le</strong>ur<br />
vivre-ensemb<strong>le</strong>. Ce tremb<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> terre, qu’on ne s’y<br />
trompe pas, n’a pas rendu <strong>le</strong>s Haïtiens moins haïtiens,<br />
mais <strong>le</strong>ur offre une terrib<strong>le</strong> occasion d’être eux-mêmes et<br />
solidaires.
Pour Haïti, Ernest PEPIN<br />
Poète et romancier récompensé par <strong>le</strong> <strong>Prix</strong> Casa <strong>de</strong> las Americas pour <strong>le</strong>s recueils "Boucan <strong>de</strong> Mots Libres » et "L'Ecran<br />
Rouge" paru aux éditions Gallimard, Ernest Pépin entretient <strong>de</strong>puis longtemps <strong>de</strong>s liens <strong>de</strong> littérature et d’affection avec <strong>le</strong><br />
pays-Haïti. Il est Directeur <strong>de</strong>s Affaires Culturel<strong>le</strong>s et du Patrimoine au Conseil Général <strong>de</strong> la Gua<strong>de</strong>loupe.<br />
POUR HAÏTI<br />
Les voi<strong>le</strong>s <strong>de</strong> la mort sont apparues. Pays brisé, enseveli<br />
sous <strong>le</strong>s décombres d’un cauchemar. Et <strong>le</strong>s rues que l’on<br />
voit comme <strong>de</strong>s fantômes hur<strong>le</strong>nt sous <strong>le</strong> masque <strong>de</strong>s<br />
jours.<br />
Haïti ! Haïti ! Au visage <strong>de</strong> cendre, au ciel couvert <strong>de</strong><br />
sang, prie d’une voix somnambu<strong>le</strong>.<br />
Il y a une nièce, une sœur, un père dont l’absence nous<br />
hè<strong>le</strong>. Ils habitent l’invisib<strong>le</strong> dans un décor <strong>de</strong> mouches.<br />
Il y a ceux qui dorment <strong>de</strong>bout ou à même <strong>le</strong>s trottoirs.<br />
Leurs yeux calcinés refusent <strong>de</strong> se fermer.<br />
Il y a ceux qui portent sur <strong>le</strong>ur tête <strong>le</strong> désespoir dans une<br />
valise.<br />
Haïti s’agenouil<strong>le</strong> auprès <strong>de</strong>s immeub<strong>le</strong>s décomposés,<br />
<strong>de</strong>s corps tuméfiés, et toute la vil<strong>le</strong> marche d’un pas <strong>de</strong><br />
fossoyeurs.<br />
Désastre qu’on emporte dans <strong>de</strong>s draps <strong>de</strong> fortune.<br />
Désastre d’entrail<strong>le</strong>s quand la vie s’évapore dans un<br />
regard d’eau morte. La mu<strong>le</strong> du malheur court toujours<br />
comme une femme fol<strong>le</strong>.<br />
Nous sommes, avec vous, hommes <strong>de</strong> boues sèches et<br />
femmes que <strong>le</strong> si<strong>le</strong>nce déchire.<br />
Nous sommes, avec vous, enfants <strong>de</strong> ma<strong>le</strong>mort quand <strong>le</strong><br />
pays s’en va, <strong>de</strong> secousses en secousses, dévorer <strong>le</strong>s<br />
enfances.<br />
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Nous sommes avec vous et nous disons pour vous une<br />
paro<strong>le</strong> bienveillante.<br />
Paro<strong>le</strong> déshabillée où seu<strong>le</strong> règne une larme<br />
Vous êtes toutes nos guerres et c’est notre sang qu’un<br />
cimetière allume comme un cierge.<br />
Vous êtes l’ombre couchée <strong>de</strong> nos oublis d’antan. Les<br />
éclats <strong>de</strong> nos si<strong>le</strong>nces d’antan.<br />
Des sièc<strong>le</strong>s ont crié meurtris <strong>de</strong> tant <strong>de</strong> cris et l’arbre<br />
s’est nourri du si<strong>le</strong>nce <strong>de</strong>s oiseaux.<br />
Mais la terre <strong>de</strong>meure<br />
Haïti n’est pas mort sous ses paupières <strong>de</strong> nuit<br />
Haïti ne mourra pas trop <strong>de</strong> poètes l’ont créé<br />
Nous donnons <strong>le</strong>ur nom à <strong>de</strong>main, au petit jour <strong>de</strong>s mots,<br />
à la griffe <strong>de</strong> l’espoir, au petit peup<strong>le</strong> faiseur <strong>de</strong> mirac<strong>le</strong>s<br />
Haïti so<strong>le</strong>il <strong>de</strong>s carrefours et qui va son chemin <strong>de</strong><br />
lumière convulsée, d’imprévisib<strong>le</strong> survie parmi <strong>le</strong>s<br />
cimetières et la graphie <strong>de</strong>s vents<br />
Haïti ne mourra pas<br />
Nous lui tendons <strong>le</strong>s mains p<strong>le</strong>ines d’ancêtres-frères et<br />
nous p<strong>le</strong>urons parce qu’il faut p<strong>le</strong>urer mais nous écrivons<br />
sur tous <strong>le</strong>s murs tombés pour que renaisse l’enfant<br />
vieil<strong>le</strong> <strong>de</strong> trois jours sans nom :<br />
HAÏTI NE MOURRA PAS !<br />
Ernest Pépin<br />
Faugas<br />
Le 16 janvier <strong>2010</strong>
Le témoignage <strong>de</strong> Maryse CONDE<br />
Née à la Gua<strong>de</strong>loupe Maryse Condé, est l’auteur d’une œuvre considérab<strong>le</strong>. Souvent inspirés <strong>de</strong>s réalités antillaises, ses<br />
romans et ses livres pour la jeunesse accor<strong>de</strong>nt une large place à Haïti. El<strong>le</strong> a participé à la première édition du festival «<br />
Étonnants voyageurs » à Port-au-Prince en 2009.<br />
Je ne saurais imaginer <strong>de</strong> sentiment plus cruel que celui<br />
qu’on éprouve en se trouvant dans un appartement<br />
confortab<strong>le</strong>, protégé, donnant sur <strong>le</strong> Hudson et <strong>le</strong>s beaux<br />
arbres effeuillés par l’hiver <strong>de</strong> la berge et d’assister<br />
minute par minute à la désolation qui s’abat sur Haïti.<br />
Pour une fois je ne reproche pas à CNN son goût du<br />
spectaculaire et du morbi<strong>de</strong>.<br />
J’absorbe tout: <strong>le</strong>s morts éparpillés à travers <strong>le</strong>s rues, <strong>le</strong>s<br />
b<strong>le</strong>ssés sortis pénib<strong>le</strong>ment <strong>de</strong>s décombres, <strong>le</strong>s sansabris,<br />
<strong>le</strong>s monuments affaissés, <strong>le</strong>s maisons détruites,<br />
toute cette souffrance. Mes amis qui étaient en train<br />
d’adopter <strong>de</strong>s enfants haïtiens m’informent que<br />
l’orphelinat est pratiquement détruit et que tous <strong>le</strong>s<br />
papiers ont disparu. Ils avaient tout préparé pour<br />
accueillir ces petits, <strong>de</strong>s chambres, <strong>de</strong>s jouets, en un mot<br />
rien ne manquait. D’autres amis, Haïtiens ceux-là, sont<br />
sans nouvel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs famil<strong>le</strong>s, moi-même j’envoie <strong>de</strong>s<br />
mails ici et là et ne reçois pas <strong>de</strong> réponse. J’apprends<br />
que Jacmel, lieu <strong>de</strong> souvenirs si agréab<strong>le</strong>s, est détruit et<br />
malgré moi <strong>de</strong>s larmes me viennent aux yeux.<br />
Parfois <strong>de</strong>s pensées plus prosaïques m’assail<strong>le</strong>nt.<br />
J’écrivais un roman composé <strong>de</strong> trois histoires dont l’une<br />
se passait à Port-au-Prince. Me basant sur <strong>le</strong>s<br />
informations que je recevais, la fin en était optimiste. Le<br />
pays serait en train <strong>de</strong> s’engager dans une ère <strong>de</strong> paix et<br />
<strong>de</strong> prospérité relatives. Les kidnappings avaient<br />
pratiquement cessé. Les chefs <strong>de</strong> ban<strong>de</strong> avaient tous<br />
déposé <strong>le</strong>s armes. Maintenant que <strong>le</strong> pays est à<br />
reconstruire il me faudra tout réécrire. Ou tout au moins<br />
changer <strong>le</strong>s <strong>de</strong>rnières pages. Après <strong>de</strong>ux jours où je vis<br />
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en pensant au cataclysme, lasse <strong>de</strong> me repaître <strong>de</strong> tous<br />
ces malheurs, je passe sur TV5 Mon<strong>de</strong> et j’apprends<br />
qu’Eric Rohmer a rejoint lui aussi <strong>le</strong> mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’invisib<strong>le</strong><br />
par <strong>de</strong>s voies moins douloureuses, je pense.<br />
En hommage au cinéaste, la télévision propose un film.<br />
El<strong>le</strong> avait annoncé “Le genou <strong>de</strong> Claire”, mais c’est “Ma<br />
nuit chez Mau<strong>de</strong>” qu’el<strong>le</strong> présente. Je m’en veux <strong>de</strong><br />
prendre tant <strong>de</strong> plaisir à réentendre ces dialogues<br />
lumineux, à admirer <strong>le</strong> jeu <strong>de</strong> Françoise Fabian et <strong>de</strong><br />
Jean-Louis Trintignant. Hélas l’être humain est ainsi fait,<br />
comp<strong>le</strong>xe, pluriel. A la fin du film, je retourne à mes<br />
images <strong>de</strong> <strong>de</strong>struction. Evi<strong>de</strong>mment il y a <strong>de</strong>s moments<br />
absur<strong>de</strong>s. Le Pasteur Robertson revient sur la<br />
malédiction d’Haïti qui aurait signé un pacte avec <strong>le</strong><br />
diab<strong>le</strong> pour sortir du colonialisme français. Le<br />
commentateur d’extrême droite, Rush Limbaugh,<br />
conseil<strong>le</strong> <strong>de</strong> ne pas envoyer un sou pour Haïti car <strong>le</strong><br />
prési<strong>de</strong>nt Obama qu’il déteste en ferait son affaire<br />
personnel<strong>le</strong>. Sur une autre chaîne j’apprends que Brad<br />
Pitt et Angelina Jolie consacrent un million <strong>de</strong> dollars <strong>de</strong><br />
<strong>le</strong>ur fortune personnel<strong>le</strong> à ai<strong>de</strong>r ce malheureux pays<br />
sinistré. D’autres célébrités font aussi <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur mieux.<br />
Moi je ne peux offrir que ma dou<strong>le</strong>ur et ma profon<strong>de</strong><br />
sympathie à ce pays que j’aime <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s années et<br />
que j’admire.<br />
Maryse Condé, Ecrivaine
Photos <strong>de</strong>s ouvrages <strong>de</strong>s<br />
écrivains invités<br />
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L'énigme du retour Tout bouge autour <strong>de</strong> moi<br />
Dany LAFERRIERE Dany LAFERRIERE<br />
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Saison sauvages Un archipel dans mon bain<br />
Kettly MARS Jean-Euphe<strong>le</strong> MILCE<br />
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Folie, al<strong>le</strong>r simp<strong>le</strong> Le sang est toujours rouge<br />
Gisè<strong>le</strong> PINEAU Leone ROSS<br />
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Le rire Orange Yanvalou pour Charlie<br />
Leone ROSS Lyonel TROUILLOT<br />
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Haïti, une traversée littéraire L'homme à l'accordéon<br />
Lyonel TROUILLOT Marcio VELOZ MAGGIOLO<br />
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Informations pratiques et contacts<br />
Contacts<br />
• Association <strong>Prix</strong> <strong>de</strong>s <strong>Amériques</strong> insulaires et <strong>de</strong> la Guyane<br />
Le Maud’huy - Sainte-Marthe - 97118 Saint-François<br />
Tél : 05 90 88 40 11 – Fax : 0590 88 71 82 - GSM : 0690 58 11 45<br />
Mail : marie.abraham@wanadoo.fr / anne_senemaud@yahoo.fr / jean-luc@arobasyk.com<br />
Site internet : http://www.prix<strong>de</strong>sameriques.org<br />
• Contact <strong>Presse</strong><br />
Véronique CIREDECK – I Com Icône<br />
Tél : 0690 36 01 01 – 0590 32 11 18 / Fax : 0590 32 11 62<br />
Mail : i.com.icone@orange.fr<br />
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