Télécharger les actes du Colloque GEOFLORE 2007 - Floraine
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1997-<strong>2007</strong> - Dixième anniversaire<br />
de <strong>Floraine</strong><br />
Actes <strong>du</strong> colloque <strong>GEOFLORE</strong> <strong>2007</strong><br />
Cartographie de la flore, de la végétation et des milieux
<strong>GEOFLORE</strong> <strong>2007</strong><br />
Dixième anniversaire de <strong>Floraine</strong><br />
<strong>Floraine</strong>, association des Botanistes Lorrains, a été constituée le 27 novembre 1996 au cours<br />
d.une assemblée qui réunissait une trentaine de personnes au Jardin Botanique <strong>du</strong> Montet. La<br />
déclaration officielle en a été faite le 3 février 1997 après réunion d un conseil<br />
d administration qui a travaillé à organiser <strong>les</strong> premières activités de notre association. Elle<br />
est agréée « protection de la nature » depuis décembre 2006.<br />
Depuis, de nombreuses sorties ont été organisées à travers la Lorraine, mais également en<br />
Alsace avec nos amis de la Société Botanique d Alsace. En hiver, sont organisées des<br />
conférences sur des thèmes très variés (Connaissance <strong>du</strong> genre Viola, Influence des<br />
changements climatiques sur la flore, biographies de botanistes célèbres comme Godron ou<br />
Buc hoz.).<br />
<strong>Floraine</strong> participe également à des expositions ou autres manifestations festives (Année Ecole<br />
de Nancy, Journées <strong>du</strong> Développement Durable, Fêtes <strong>du</strong> Champignon à Void-Vacon en<br />
Meuse, Fête de la Truffe à Pulnoy pour ne citer que <strong>les</strong> principa<strong>les</strong>).<br />
Deux publications rendent compte de nos activités : Willemetia bulletin de liaison trimestriel<br />
et LASER (Lorraine Atlas Suivi Etudes et Recherche) bulletin annuel qui fait le point sur <strong>les</strong><br />
connaissances botaniques en Lorraine en lien avec le projet d Atlas.<br />
Nous organisons également des stages sur différents thèmes (plantes comestib<strong>les</strong>,<br />
phytosociologie .).<br />
Des cours de botanique ont été dispensés par nos meilleurs spécialistes, professeurs<br />
d Université. Et enfin, sans que cela soit exhaustif, nous participons à un certain nombre de<br />
comités de pilotage Natura 2000.<br />
<strong>Floraine</strong> travaille selon des thèmes annuels dont <strong>les</strong> derniers sont : en 2004, étude de la flore<br />
des truffières en Meuse, en 2005 année des Lumières à Nancy, Buc.hoz, médecin botaniste de<br />
Stanislas 1er Roi de Pologne, Duc de Lorraine et de Bar, 2006 année des jeunes où nous<br />
avons travaillé en relation avec <strong>les</strong> élèves <strong>du</strong> lycée paysager et horticole de Roville-aux-<br />
Chênes.<br />
Enfin depuis 2002 nous avons mis en place un projet d atlas de la flore de Lorraine qui devrait<br />
aboutir à la publication d un ouvrage d.ici 5 à 6 ans. Aujourd.hui ce sont plus de 170 000<br />
données actuel<strong>les</strong> qui ont été engrangées dans notre base de données avec le partenariat de la<br />
DIREN Lorraine, l Inventaire Forestier National, le Conseil Général de Meurthe-et-Moselle,<br />
le Parc Naturel Régional de Lorraine en attendant d autres partenariats.<br />
Cet atlas est accessible sur Internet sur notre site : www.floraine.net.<br />
Ce colloque a été ren<strong>du</strong> possible grâce à la participation de la DIREN Lorraine, <strong>du</strong> Conseil<br />
Régional de Lorraine, des Conseils Généraux de Meurthe-et-Moselle, Moselle et Vosges, de<br />
la Communauté Urbaine <strong>du</strong> Grand Nancy, de l Agence de l Eau Rhin-Meuse, de L INRA<br />
Nancy-Champenoux avec une mention particulière pour Danièle AUBERT, infographiste qui<br />
a réalisé un très beau site internet, l Office National des Forêts et enfin l Inventaire Forestier<br />
National.<br />
Un grand merci également aux membres <strong>du</strong> comité d organisation et aux contributeurs sans<br />
qui cette fête n aurait pas été.<br />
Le Président de <strong>Floraine</strong><br />
François VERNIER
PICHARD Olivier<br />
Généralités :<br />
Méthodologie et outils informatiques pour<br />
l'élaboration de l'atlas des plantes de Lorraine<br />
Au printemps 2002, <strong>Floraine</strong>, l’association des botanistes de Lorraine a souhaité initier un<br />
atlas des plantes de Lorraine. L’objectif était à la fois d’obtenir la meilleure connaissance possible de<br />
la répartition de toutes <strong>les</strong> espèces végéta<strong>les</strong> vasculaires (phanérogames et ptéridophytes) sur le<br />
territoire lorrain mais également de permettre de dégager des mesures de protection des espèces <strong>les</strong><br />
plus rares ou en forte régression.<br />
L'élaboration d'un atlas floristique à l'échelle de la Lorraine étant une vaste entreprise<br />
pour une association gérée uniquement par des bénévo<strong>les</strong>, il était nécessaire de définir une<br />
méthodologie d’obtention de données à la fois simple, rigoureuse et exploitable en un minimum de<br />
temps. Ce projet a obtenu le soutien financier <strong>du</strong> Conseil Général de Meurthe-et-Moselle et de la<br />
DIREN Lorraine. Des conventions de partenariat ont été signées avec l’Inventaire Forestier National<br />
et le Parc Naturel Régional de Lorraine.<br />
Méthodologie :<br />
A partir des degrés de rareté définis dans la "Nouvelle Flore de Lorraine" de<br />
F. VERNIER, nous avons opté pour une localisation par mail<strong>les</strong> de 5*5 Km pour tous <strong>les</strong> taxons et à<br />
au moins 100 mètres près pour ceux qui sont définis rares à très rares. La majorité des contributeurs<br />
de l’atlas utilisent un GPS offrant ainsi une localisation très précise. Pour éviter un travail fastidieux<br />
de report de contours sur des cartes, la localisation des plantes devait être renseignée par des<br />
coordonnées de type "longitude, latitude". Une fois ces données saisies dans un simple tableur, au<br />
format Excel ou même texte, il est ainsi possible d'intégrer automatiquement ces données dans<br />
n'importe quel système d'information géographique.<br />
5
Chaque maille est identifiée<br />
par ses coordonnées sud-ouest.<br />
Une fiche de relevé standard permet<br />
d obtenir <strong>les</strong> informations suivantes :<br />
- L auteur <strong>du</strong> relevé ;<br />
- La personne ressource (personnes qui<br />
coordonne l atlas au niveau régional ou<br />
botaniste confirmé pouvant assister<br />
éventuellement l auteur <strong>du</strong> relevé) ;<br />
- L année <strong>du</strong> relevé<br />
- Les coordonnées X et Y <strong>du</strong> carré ;<br />
- Tous <strong>les</strong> taxons rencontrés dans la<br />
maille sont à cocher.<br />
Si le taxon est rare à très rare, l auteur doit alors compléter une fiche dite "de relevé<br />
des taxons rares ou très rares". Cette fiche comporte <strong>les</strong> informations suivantes :<br />
Nom <strong>du</strong> taxon de la liste standard ;<br />
Coordonnées X et Y <strong>du</strong> lieu d observation. Les coordonnées peuvent être<br />
notées en Lambert I ou en latitude/longitude (degrés décimaux, WGS84) ;<br />
Si la répartition <strong>du</strong> taxon s étend sur au moins plusieurs dizaines de mètres, <strong>les</strong><br />
coordonnées de l angle <strong>du</strong> rectangle matérialisant l éten<strong>du</strong>e <strong>du</strong> taxon est également noté (X2 ;<br />
Y2) de cette façon :<br />
6<br />
S
L inscription de la commune dominante permet de détecter des erreurs de saisie de<br />
coordonnées.<br />
L abondance est notée selon 3 critères : 1 à 10 indivi<strong>du</strong>s (A) ; 10 à 100 (B) ou<br />
plus de 100 (C) ;<br />
Mois et année de l observation ;<br />
L inscription <strong>du</strong> nom de la maille correspondant à la fiche de relevé<br />
standard permet de vérifier que l espèce a bien été notée dans la fiche<br />
standard ;<br />
Des remarques sur la localisation <strong>du</strong> taxon ou ses caractéristiques peuvent être<br />
précisées.<br />
Les données sont ensuite saisies dans un fichier "Excel". Une macro (programme)<br />
permet d éviter l oubli de la saisie des coordonnées des taxons rares à très rares et de ne pas<br />
avoir à ressaisir le nom des taxons.<br />
Outils informatiques :<br />
Exemple de fiche de relevé des taxons rares ou très rares<br />
Afin de disposer d'un système de gestion de base de données relationnel<strong>les</strong> peu<br />
coûteuse, facile à mettre en uvre et capable de gérer un grand nombre de données, nous<br />
avons choisi la base de données Mysql associée au langage de programmation PHP. Ces deux<br />
outils sont "opensource" et donc totalement gratuits. Mysql gère de très grandes bases de<br />
données. Celle de l'atlas des plantes de Lorraine, qui comporte déjà plus de 100 000 données,<br />
ne devrait pas en nécessiter plus de quelques millions, ce qui est largement en deçà des<br />
capacités de l'outil choisi.<br />
L'avantage de l association de Mysql avec le langage de programmation PHP est<br />
d être totalement adapté à une utilisation sur Internet et de permettre une interrogation en<br />
temps réel depuis n'importe quel ordinateur relié à la toile. PHP est une technologie serveur,<br />
c'est à dire que l'ensemble des informations sont traitées par le serveur hébergeant l'atlas et<br />
non sur le poste de l'internaute, garantissant ainsi une très grande fiabilité et une très large<br />
compatibilité avec l'ensemble des navigateurs (Internet explorer, Firefox, Opera ) et des<br />
plateformes (Windows, Linux, Mac OS ).<br />
Outre la possibilité de pré-programmer de nombreuses requêtes, PHP dispose<br />
également d'un mo<strong>du</strong>le permettant de dessiner des formes géométriques incluant cerc<strong>les</strong> et<br />
polygones. Les coordonnées géographiques saisies dans le cadre de l'atlas sont converties<br />
automatiquement en coordonnées "pixels" de l'écran offrant ainsi une représentation<br />
cartographique dynamique selon des requêtes effectuées par l'utilisateur. Le mo<strong>du</strong>le<br />
cartographique permet également de superposer tout type d'image, y compris des fonds de<br />
cartes topographiques au 1/25000. Cette technique offre un système d'information<br />
géographique peu coûteux, très fiable et consultable par Internet.<br />
La relative simplicité <strong>du</strong> langage de programmation PHP, qui peut s'acquérir au prix de<br />
quelques heures de formation, permet une évolutivité de l'interface de consultation de l'atlas.<br />
7
Les premiers résultats de l atlas des plantes de Lorraine peuvent<br />
être consultés à cette adresse :<br />
http://www.floraine.net/atlas<br />
On peut notamment consulter la carte des prospections<br />
qui comporte 4 niveaux de couleurs :<br />
Blanc : la maille n'a pas été prospectée ;<br />
Bleu claire : la maille a été prospectée et<br />
moins de 150 taxons ont été identifiés ;<br />
Bleu moyen : la maille a été prospectée et de 150 à<br />
300 taxons ont été identifiés ;<br />
Bleu foncé : la maille a été prospectée et plus de<br />
300 ont été identifiés.<br />
Lorsqu'il y a plus de 300 taxons dans une maille on peut<br />
considérer que l'ensemble des taxons y ont été relevés.<br />
A ce jour, plus de 170 395 données ont été saisies totalisant 1441 taxons. La page de<br />
recherche des taxons permet de sélectionner l'un de ces 1441 taxons.<br />
En sélectionnant par exemple le Hêtre<br />
(Fagus Sylvatica), il est alors possible<br />
de visualiser <strong>les</strong> premiers résultats (cf<br />
carte ci-contre).<br />
La présence <strong>du</strong> taxon sélectionné dans<br />
une maille est symbolisée par un trait<br />
oblique rouge. Le fond de carte<br />
correspond au degré de prospection<br />
présenté ci-dessus.<br />
Les noms des auteurs ayant<br />
contribués au dit taxon en Lorraine<br />
sont listés à la suite de la carte de<br />
répartition.<br />
En cliquant sur une des mail<strong>les</strong><br />
où l'espèce à été identifiée, on peut<br />
alors accéder à l'ensemble des espèces<br />
présentes sur ladite maille.<br />
Pour <strong>les</strong> taxons rares à très rares, il est également possible de visualiser précisément<br />
leur présence sur un fond de carte au 1/25 000. (cartes au 1/25000 numérisées) auprès de<br />
l'IGN. Pour le moment, l'accès n'est pas public car <strong>Floraine</strong> étudie la possibilité d'acquérir <strong>les</strong><br />
droits de diffusion des SCAN 25®<br />
8
Taxa, genèse d une base de données botaniques franc-comtoise.<br />
Gil<strong>les</strong> Bailly, Conservatoire Botanique de Franche-Comté, Porte Rivotte, 25000<br />
Besançon. courriel : gil<strong>les</strong>.bailly.cbfc@orange.fr<br />
Résumé : développée initialement pour la réalisation de l Atlas des plantes rares ou<br />
protégées de Franche-Comté, la base de données relationnelle TAXA ©SBFC/CBFC est devenue, au<br />
fil <strong>du</strong> temps, un outil fédérateur pour la botanique comtoise. Ressource commune <strong>du</strong><br />
Conservatoire Botanique de Franche-Comté et de la Société Botanique de Franche-Comté,<br />
elle est mise à disposition des membres de la SBFC, contribuant ainsi au recueil et à la<br />
valorisation des données botaniques issues <strong>du</strong> réseau associatif régional. Les étapes de son<br />
évolution sont retracées et une présentation sommaire de ses fonctionnalités est proposée. Une<br />
réflexion sur l intérêt des bases botaniques loca<strong>les</strong> et sur <strong>les</strong> problèmes d inter-compatibilité<br />
est amorcée.<br />
Mots-clés : inventaire botanique, Atlas floristique, base de données relationnelle.<br />
L orée <strong>du</strong> XXI e siècle a vu la floraison de nombreuses initiatives loca<strong>les</strong> portant sur la<br />
systématisation des inventaires botaniques départementaux ou régionaux soutenus par le<br />
développement de base de données ad hoc.<br />
TAXA ©SBFC/CBFC est une base de données relationnelle développée sur le progiciel<br />
4D TM ; l outil appartient conjointement au Conservatoire Botanique de Franche-Comté et à la<br />
Société Botanique de Franche-Comté.<br />
Historique<br />
Le projet d élaboration d un Atlas des plantes d intérêt patrimonial de Franche-<br />
Comté est né, dès 1995, de l initiative d un petit groupe de botanistes comtois (cf. Y. FERREZ<br />
et J.-F. PROST, 2001) . En 1997, la collecte des données sous forme de bordereaux étant<br />
amorcée, <strong>les</strong> besoins d un outil informatique pour le stockage et <strong>les</strong> gestions des observations<br />
est rapidement ressenti. Une dotation amenée par la DIREN de Franche-Comté permet le<br />
développement d une première base répondant à un cahier des charges limité :<br />
stocker l information en l organisant selon un nombre limité de champs standard :<br />
taxon observé, informateur(s), date, commune<br />
exploiter l information en procédant à des requêtes ;<br />
- automatiser partiellement l édition des cartes de distribution des taxons publiées<br />
dans l ouvrage.<br />
Ce cahier des charges donnera naissance à une première base de données<br />
relationnelle, de structure assez simple, dénommée « Atlas ». La mise en uvre est réalisée<br />
par un des botanistes (G. BAILLY) impliqués dans la réalisation de l Atlas et ayant à son actif<br />
d autres développements, dont la base Ecoplant© ENGREF . Concernant la partie cartographique,<br />
elle est assurée par un mo<strong>du</strong>le interne, développé sous 4D Draw TM , permettant la<br />
représentation des observations sous forme de points colorés sur un fond topographique<br />
schématique. La distribution des taxons est représenté sur une base communale, en utilisant le<br />
barycentre des territoires communaux. Les points peuvent être édités en deux couleurs en<br />
tenant compte d une année de référence de manière à distinguer <strong>les</strong> données anciennes, non<br />
revues récemment des données modernes. Pour l Atlas, l année 1980 a servi de seuil. Les<br />
cartes ainsi pro<strong>du</strong>ites ont été intégrées à la maquette de l ouvrage après modification dans un<br />
logiciel de DAO.<br />
Édité en 2001, l Atlas des plantes rares ou protégées de Franche-Comté (fig. 1)<br />
comporte 350 cartes de distribution de taxons d intérêt patrimonial synthétisant près de 4 500<br />
9
observations élémentaires. Cette réalisation a fédéré l activité bénévole d un noyau d une<br />
dizaine de botanistes régionaux et de plus d une centaine d informateurs naturalistes.<br />
Fig. 1 : atlas des plantes rares ou protégées de Franche-Comté, extrait.<br />
L Atlas étant finalisé, <strong>les</strong> auteurs ont choisi de pérenniser l équipe réunie en<br />
constituant, en 2001, la Société Botanique de Franche-Comté. Le réseau de sociétés<br />
naturalistes étant déjà bien développé en Franche-Comté, l activité de la SBFC se concentre<br />
sur la réalisation et l édition des inventaires de la flore de Franche-Comté et sur <strong>les</strong> problèmes<br />
de systématique végétale. Les inventaires peuvent concerner des entités géographiques<br />
(inventaire de la flore patrimoniale <strong>du</strong> bassin <strong>du</strong> Drugeon [GUYONNEAU, ANDRE et FERREZ,<br />
2006] , révision de ZNIEFF ) ou se concentrer sur un groupe taxonomique (inventaire de<br />
Gagea lutea [ANDRE, 2004], inventaire des Gentianacées de Franche-Comté et <strong>du</strong> massif <strong>du</strong><br />
Jura [FERREZ, 2006] ). Des outils pour l identification des groupes diffici<strong>les</strong> sont élaborés<br />
(clé des Utricularia de Franche-Comté [ANDRE et FERREZ, 2005], clé d identification des<br />
églantiers indigènes [SBFC, 2006] ). Les travaux de la société sont publiés dans un bulletin<br />
annuel, <strong>les</strong> Nouvel<strong>les</strong> Archives de la Flore jurassienne.<br />
Le développement de ces nouvel<strong>les</strong> activités, en particulier la généralisation des<br />
travaux d inventaires, a incité au redéploiement de la base Atlas. Celle-ci constituait une<br />
première ébauche, tout-à-fait fonctionnelle relativement à sa première mission, mais le besoin<br />
d un outil plus généraliste était pressenti. Des échanges avec d autres développeurs,<br />
travaillant sur des outils assez semblab<strong>les</strong> (base Biogeographica, mise en place par L.<br />
DELAUNAY) ont aidé à la conception d un nouveau modèle de structuration des données plus<br />
efficient. En 2001, un petit comité réunissant des botanistes de la SBFC et le développeur<br />
définit <strong>les</strong> orientations de la nouvelle base qui prend le nom de « TAXA » (fig. 2). Cette<br />
évolution est accomplie grâce à un travail bénévole. Pratiquement, pour l utilisateur, elle<br />
amène <strong>les</strong> améliorations suivantes :<br />
intégration <strong>du</strong> glossaire taxonomique de KERGUELEN-BOCK (BDNFF) ;<br />
saisie des inventaires par liste ; la base Atlas était destinée à gérer des observations<br />
mono-spécifiques à partir d une liste ré<strong>du</strong>ite d espèces patrimonia<strong>les</strong> ; l extension des<br />
inventaires au fond floristique commun con<strong>du</strong>it au développement d un outil d aide à la saisie<br />
permettant de saisir ergonomiquement un grand nombre de taxons relevés sur un même site ;<br />
développement d une interface à trois volets permettant de consulter de manière<br />
synoptique <strong>les</strong> listes d inventaire, <strong>les</strong> observations élémentaires et la liste régionale des taxons<br />
(fig. 3)<br />
10
Fig 2 : Taxa, écran de démarrage.<br />
Fig 3 : interface générale de Taxa en mode consultation.<br />
En 2003, un Conservatoire Botanique de Franche-Comté voit le jour après une<br />
longue gestation. Cette création, fortement soutenue par la SBFC, marque une étape dans le<br />
développement de TAXA ©SBFC/CBFC . Peu après la création <strong>du</strong> Conservatoire, en juillet 2004,<br />
une convention est signée entre la SBFC et le CBFC portant sur l utilisation conjointe de<br />
l outil Taxa ©SBFC/CBFC et sur la mise en commun des données botaniques. Les droits<br />
d utilisation sont cédés par le développeur aux deux associations. Le CBFC reçoit ainsi une<br />
dotation de près de 50 000 données élémentaires saisies grâce l activité bénévole des<br />
membres de la SBFC.<br />
L incorporation de TAXA ©SBFC/CBFC à l activité <strong>du</strong> CBFC entraîne une nouvelle série de<br />
développements afin d adapter la base aux missions <strong>du</strong> Conservatoire ; <strong>les</strong> fonctionnalités<br />
suivantes, parmi d autres, sont ajoutées :<br />
11
gestion des synonymes nomenclaturaux et transcription à la volée de la saisie dans<br />
le référentiel choisi ;<br />
gestion de données phénologiques (fig. 4) ;<br />
Fig 4 : interface de saisie des données phénologiques.<br />
Fig 5 : interface de saisie des relevés phytosociologiques.<br />
gestion de listes phytosociologiques, <strong>les</strong> taxons étant quantifiés en abondancedominance<br />
;<br />
prise en compte des données phytosociologiques à un double niveau : niveau<br />
synusial et niveau phytocénotique pour la description des végétations complexes multistratifiées<br />
(fig. 5)<br />
intégration des codifications CORINE biotope, Natura 2000 et de la nomenclature<br />
phytosociologique pour la qualification des syntaxons ;<br />
représentation des distributions des taxons d après un maillage Lambert 5 x 5 km,<br />
alternativement à la représentation par commune;<br />
- calcul de la rareté des taxons sur la base <strong>du</strong> maillage Lambert<br />
12
Fig 6 : mode de fonctionnement <strong>du</strong> réseau des informateurs ;<br />
Fonctionnement<br />
L outil est distribué gratuitement aux informateurs qui souhaitent l utiliser pour la<br />
saisie. Un runtime téléchargeable permet d exécuter l application sur un poste indivi<strong>du</strong>el. Des<br />
versions tournant sous Mac OS X TM ou sous <strong>les</strong> différentes déclinaisons de Windows TM<br />
peuvent être générées à partir de la même base-source.<br />
La base étant répartie sur plusieurs postes distants (actuellement une trentaine), un<br />
mode de fonctionnement, toujours en vigueur, est instauré : une base servant à la<br />
centralisation de la donnée est placée sous la responsabilité d un administrateur en charge de<br />
contrôler la validité des données entrantes. Des extraits de la base centrale sont confiés, selon<br />
leurs requêtes, aux informateurs, en fonction des secteurs géographiques ou des thèmes<br />
taxonomiques qu'ils souhaitent étudier. Les données saisies par <strong>les</strong> informateurs sont ensuite<br />
expédiées à interval<strong>les</strong> réguliers vers la base centrale sous forme de fichiers texte générés par<br />
la base, transmis habituellement en pièces jointes par courrier électronique. Les données sont<br />
automatiquement retranscrites et ré-incorporées à la base centrale où el<strong>les</strong> peuvent être<br />
contrôlées par l administrateur (fig. 6).<br />
À la mi-<strong>2007</strong>, la base Taxa compte près de 255 000 données élementaires, dont 32<br />
500 intégrées à des listes d inventaires, parmi <strong>les</strong>quel<strong>les</strong> 4 000 relevés phytosociologiques<br />
régionaux, le tout concernant 2 662 taxons. Une partie de ces données provient actuellement<br />
de l activité <strong>du</strong> Conservatoire Botanique de Franche-Comté mais l apport bénévole des<br />
membres de la Société Botanique est loin d être négligeable. Un programme d inventaire<br />
systématique de l ensemble de la flore comtoise a été initié par le CBFC en 2004. Le territoire<br />
régional a été divisé en près de 720 carrés de 5 x 5 km établis sur le carroyage Lambert II.<br />
Chaque année, lors d une « foire aux carrés » certains de ceux-ci sont choisis par des<br />
botanistes de la SBFC qui se chargent d en faire l inventaire exhaustif. En 2006, cet<br />
inventaire recueillait 45 000 nouvel<strong>les</strong> données élémentaires dont 44% issus de l activité<br />
bénévole de membres de la SBFC (fig. 7). Parmi <strong>les</strong> autres informateurs alimentant la base, il<br />
faut citer Espace Naturel Comtois ainsi que d autres partenaires associatifs, institutionnels<br />
(LPO, ONF ) et des bureaux d études.<br />
13
Fig 7 : état d avancement de l inventaire général de la flore comtoise au début <strong>2007</strong> ; la<br />
densité de la couleur des points tra<strong>du</strong>it le nombre de taxons observés dans une maille Lambert II 5 x 5<br />
km. Les points noirs correspondent aux inventaires de plus de 250 taxons.<br />
Dans le cadre de certains programmes (enquête Jonquille, enquête Ambroisie, en<br />
cours ), l information a également été recueillie sous forme d un formulaire accessible sur<br />
une page <strong>du</strong> site Web <strong>du</strong> CBFC.<br />
Perspectives<br />
TAXA ©SBFC/CBFC est un outil en constante évolution. Les prochains développements<br />
vont s'orienter vers la mise au point d outils répondant à une des fonctions <strong>du</strong> CBFC :<br />
l identification des habitats naturels régionaux et l estimation de leur valeur patrimoniale ainsi<br />
que de leur état de conservation dans une perspective de protection de la flore in situ. Cette<br />
expertise passe par l élaboration de référentiels locaux (FERREZ, 2004), mis à la disposition<br />
des intervenants de terrain (bureaux d étude, ONF, gestionnaires de Réserves Naturel<strong>les</strong> )<br />
susceptib<strong>les</strong> de pro<strong>du</strong>ire des cartographies d habitats. L activité <strong>du</strong> CBFC génère elle-même<br />
un flux important de relevés floristiques (plusieurs centaines à plusieurs milliers par an) qu'il<br />
faut identifier relativement au référentiel phytosociologique.<br />
Cette mission requiert le renforcement <strong>du</strong> référentiel phytosociologique régional dans<br />
le sens d une plus grande exhaustivité et passe par la rationalisation <strong>du</strong> diagnostic à l aide de<br />
méthodes statistiques. Pour répondre à ces besoins, TAXA ©SBFC/CBFC va se doter en <strong>2007</strong> d un<br />
mo<strong>du</strong>le « Syntaxa » qui devrait offrir <strong>les</strong> fonctions suivantes :<br />
exportation des données sous forme de tableaux phytosociologiques pré-élaborés, avec<br />
classification automatique des taxons selon leur rang syntaxonomique (fonction déjà<br />
partiellement intégrée à la version actuelle) ;<br />
renforcement des échanges avec le logiciel de statistique open source R ;<br />
gestion d une collection de tableaux phytosociologiques de référence, décrivant <strong>les</strong><br />
divers syntaxons régionaux ;<br />
utilisation de cette collection de référence pour développer un outil d aide au<br />
diagnostic des relevés entrants ; ce projet intégrera à TAXA ©SBFC/CBFC certains fonctions déjà<br />
offertes par le logiciel PHYTOBASE, développé par F. GILLET, également utilisé par le CBFC<br />
(GILLET, 2004)<br />
14
Les communications présentées <strong>du</strong>rant le colloque <strong>Floraine</strong> ont montré la diversité<br />
des solutions apportées par <strong>les</strong> Sociétés Botaniques et <strong>les</strong> institutions à la gestion des données<br />
collectées et à leur publication. On pourrait craindre que cette diversité ne devienne un<br />
obstacle aux échanges inter-régionaux et aux synthèses nationa<strong>les</strong>. Néanmoins, il apparaît que<br />
la manière de structurer <strong>les</strong> données est assez convergente entre <strong>les</strong> diverses réalisations. Par<br />
ailleurs, cette auto-organisation à un niveau local est stimulante pour <strong>les</strong> botanistes et pour <strong>les</strong><br />
personnes qui offrent leurs compétences informatiques. Elle permet une bonne adaptabilité<br />
des solutions numériques aux besoins régionaux et elle conforte <strong>les</strong> botanistes quant à l utilité<br />
de leur travail d inventaire dans la mesure où la mise à disposition des données, sous forme<br />
d Atlas, d artic<strong>les</strong> ou de publication Web est rapide. Cette réactivité ne pourrait sans doute<br />
pas être obtenue avec une solution centralisée d inventaire.<br />
Il conviendra sans doute d assurer, à moyen terme, des compatibilités entre <strong>les</strong> diverses sources,<br />
nécessaires à la communication des données. Ceci suppose un travail de réflexion sur <strong>les</strong> modè<strong>les</strong> de<br />
données utilisés par <strong>les</strong> diverses structures et sur <strong>les</strong> référentiels fondamentaux (référentiels<br />
botaniques, codes communaux ) à adopter. L informatique démultiplie <strong>les</strong> possibilités d intervention<br />
sur <strong>les</strong> données et l écriture de procé<strong>du</strong>res de transcodage est également envisageable Dans le cadre<br />
de l activité <strong>du</strong> CBFC, il est prévu de développer des passerel<strong>les</strong> informatique permettant l échange et<br />
la mutualisation des données notamment entre, d une part, l université de Neuchâtel, et, d autre part,<br />
le Conservatoire Botanique National Alpin, l arc jurassien constituant l entité phytogéographique<br />
fédératrice.<br />
Bibliographie<br />
ANDRE M. et FERREZ Y., 2005. Les Utricularia de Franche-Comté. Nouvel<strong>les</strong><br />
Archives de la Flore jurassienne, n° 3, p 29-39.<br />
FERREZ Y., 2004. Connaissance des habitats naturels et semi-naturels de Franche-<br />
Comté, réferentiels et valeur patrimoniale. Conservatoire Botanique de Franche-Comté,<br />
DIREN Franche-Comté, Conseil Régional de Franche-Comté, 57 p.<br />
FERREZ Y. (coord.), 2006. Inventaire des Gentianacées (y compris <strong>les</strong><br />
Ményanthacées) de Franche-Comté et <strong>du</strong> massif <strong>du</strong> Jura. Nouvel<strong>les</strong> Archives de la Flore<br />
jurassienne, n° 4, p 25-36.<br />
FERREZ Y., PROST J.-F, ANDRE M., CARTERON M., MILLET P., PIGUET A. et VADAM<br />
J.-C., 2001. Atlas des plantes rares ou protégées de Franche-Comté Besançon, Société<br />
d horticulture <strong>du</strong> Doubs et des amis <strong>du</strong> jardin botanique. Turriers, Naturalia Publications, 312 p.<br />
GILLET F., 2004. Guide d utilisation de phytobase 7, base de données<br />
phytosociologiques. Doc. <strong>du</strong> Laboratoire d écologie végétale, Univ. Neuchâtel. 39 p.<br />
GUYONNEAU J., ANDRE M. et FERREZ Y., 2006. Suivi de la flore dans le Bassin <strong>du</strong><br />
Drugeon (Doubs). Principaux résultats de la saison de terrain 2005. Nouvel<strong>les</strong> Archives de la<br />
Flore jurassienne, n° 4, p 5-15.<br />
S.B.F.C., 2006. Compte-ren<strong>du</strong> des observations réalisées lors de l atelier «<br />
connaissance des Rosa indigènes en Franche-Comté », le 21 octobre 2006. Proposition d une<br />
clef de détermination provisoire pour la Franche-Comté, l Ain et le Jura neuchâtelois.<br />
Nouvel<strong>les</strong> Archives de la Flore jurassienne, n° 4, p 21-24.<br />
15
L'inventaire forestier national : un outil pour l'inventaire<br />
et la cartographie de la végétation.<br />
Catherine CLUZEAU & Raymonde VIRION<br />
Inventaire forestier national - 14 rue Girardet - CS 4216 - 54042 Nancy cedex.<br />
catherine.cluzeau@ifn.fr ; raymonde.virion@ifn.fr<br />
Intro<strong>du</strong>ction<br />
L inventaire forestier national (IFN) a été créé en 1958 au sein <strong>du</strong> Ministère de<br />
l Agriculture afin de disposer de chiffres sur la ressource forestière. L inventaire des forêts<br />
françaises est réalisé en continu par l IFN depuis plus de 45 ans sur tout le territoire<br />
métropolitain, indépendamment de toute question de propriété.<br />
Jusqu en 2004, l IFN procédait à des inventaires départementaux. Il fallait une<br />
quinzaine d années pour couvrir l ensemble de la France à raison de 6 à 7 départements<br />
inventoriés par an. Depuis novembre 2004, l'ensemble <strong>du</strong> territoire est inventorié chaque<br />
année.<br />
Pro<strong>du</strong>its de l'IFN<br />
L'IFN pro<strong>du</strong>it essentiellement deux types d'information :<br />
des cartes forestières<br />
des données statistiques (dendrométriques et phytoécologiques)<br />
Les cartes forestières sont réalisées à partir de l'analyse de photographies aériennes.<br />
Ce sont des cartes départementa<strong>les</strong> actualisées tous <strong>les</strong> 10 ans environ. Les principaux types<br />
de peuplement forestier ainsi que <strong>les</strong> landes sont cartographiés à l'échelle <strong>du</strong> 1/25 000 avec<br />
une surface minimale de représentation variant de 2,25 à 4 ha selon <strong>les</strong> départements. El<strong>les</strong><br />
sont notamment utilisées pour estimer la surface des différents types de peuplement et<br />
servaient de base à la constitution de l'échantillon de points visités au sol dans la méthode<br />
d'inventaire utilisée jusqu'en 2004.<br />
Vous pouvez voir ces cartes sur le site internet de l'IFN à l'adresse suivante :<br />
http://www.ifn.fr/spip/rubrique.php3?id_rubrique=67<br />
Les données statistiques sont principalement issues des mesures et observations<br />
réalisées sur le terrain par échantillonnage. El<strong>les</strong> permettent d'estimer <strong>les</strong> surfaces de forêt<br />
selon leur structure et leur composition en essences, pour <strong>les</strong> différentes catégories de<br />
propriété (publique/privée), de même que <strong>les</strong> volumes sur pied et la pro<strong>du</strong>ction des<br />
principa<strong>les</strong> essences forestières.<br />
Depuis 1992 (et le début des années 1980 pour certains départements <strong>du</strong> nord-est et<br />
<strong>du</strong> sud-est de la France), <strong>les</strong> relevés dendrométriques de l IFN sont systématiquement<br />
complétés par des relevés phytoécologiques, afin de décrire <strong>les</strong> conditions de croissance des<br />
peuplements. Ces relevés comprennent des observations topographiques, pédologiques et<br />
floristiques. Les relevés dendrométriques apportaient déjà une information sur la répartition<br />
des espèces ligneuses arborescentes en France, celle-ci s'est enrichie de la description de la<br />
flore arbustive et herbacée.<br />
16
Méthode d'inventaire<br />
De 1960 à 2004, <strong>les</strong> inventaires étaient départementaux avec une périodicité<br />
moyenne de 12 ans. Le taux d'échantillonnage était de l'ordre de 1 point pour 130 ha de forêt,<br />
soit en moyenne 1 000 points par département.<br />
En septembre 2004, l'Ifn a modifié sa méthode d'échantillonnage pour passer à un<br />
inventaire systématique annuel. L'ensemble <strong>du</strong> territoire national est couvert chaque année<br />
avec un taux de sondage de 1 point pour 2 000 ha de forêt, ce qui représente environ 7 000<br />
points par an.<br />
Dispositif de mesures au sol<br />
Les placettes d'inventaire de l'Ifn sont des placettes temporaires. El<strong>les</strong> sont formées<br />
de 4 cerc<strong>les</strong> concentriques de rayons variab<strong>les</strong>. Le plus grand cercle (rayon de 25 m et surface<br />
de 20 ares) est utilisé pour la description générale <strong>du</strong> peuplement et la topographie, <strong>les</strong> cerc<strong>les</strong><br />
de 6, 9 et 15 m de rayon pour <strong>les</strong> mesures des arbres. La description <strong>du</strong> sol et le relevé<br />
floristique sont réalisés dans le cercle de 15 m.<br />
Description <strong>du</strong> peuplement<br />
et topographie locale :<br />
cercle de 25 m<br />
de rayon<br />
Données dendrométriques<br />
Relevé floristique<br />
cercle de 15 m de rayon (soit 700m²)<br />
Placettes de mesures des arbres (cerc<strong>les</strong> de 6m, 9m et 15m de rayon selon<br />
la dimension des arbres)<br />
Figure 1. Schéma d'une placette de mesure de l'Ifn.<br />
La description globale <strong>du</strong> peuplement comprend une caractérisation de sa structure<br />
(futaie, taillis, etc.), de sa composition via l'estimation <strong>du</strong> taux de couvert par essence et de<br />
l'importance de la régénération.<br />
Un grand nombre de mesures indivi<strong>du</strong>el<strong>les</strong> sont effectuées sur <strong>les</strong> arbres de diamètre<br />
supérieur à 7,5 cm à 1,30 m : essence, origine (graine/rejet), état végétatif, hauteur totale,<br />
circonférences à différentes hauteurs pour calculer le volume de la tige, accroissements en<br />
diamètre et en hauteur, âge (sur un échantillon d'arbres), etc.<br />
17<br />
Description <strong>du</strong> sol :<br />
fosse de 40 cm de<br />
profondeur et<br />
sondage à la tarière (1 m)
Données phytoécologiques<br />
La végétation est inventoriée sur le cercle de 15 m de rayon (soit une surface de 700<br />
m² environ). Les agents de terrain de l'Ifn font la liste des espèces ligneuses et herbacées<br />
(bryophytes terrico<strong>les</strong> et ptéridophytes comprises) présentes sur la placette et affectent à<br />
chaque taxon une note d abondance-dominance dérivée <strong>du</strong> coefficient de Braun-Blanquet :<br />
1 : présence mais recouvrement < 5% de la surface<br />
2 : 5 - 25 % de la surface<br />
3 : 25 - 50 % de la surface<br />
4 : 50 - 75 % de la surface<br />
5 : > 75 % de la surface<br />
Les caractéristiques topographiques suivantes sont relevées sur le plus grand cercle<br />
(25 m de rayon) et en considérant aussi l'environnement de la placette : altitude, exposition,<br />
pente, position topographique, pente opposée (masque).<br />
Une fosse pédologique creusée à proximité <strong>du</strong> centre de la placette permet de<br />
caractériser le type de sol, la roche-mère, la charge en cailloux, la texture <strong>du</strong> sol, la<br />
profondeur d apparition de l hydromorphie et de la carbonatation. Il faut ajouter à ces<br />
descripteurs pédologiques, le type d humus et l'importance des affleurements rocheux<br />
appréciés sur la placette de 15 m de rayon.<br />
Les observations et mesures de terrain sont effectuées en toute saison, y compris <strong>les</strong><br />
relevés floristiques.<br />
Bases de données de l'IFN<br />
L'Ifn possèdent 3 famil<strong>les</strong> de données dans ses bases : <strong>les</strong> données cartographiques,<br />
<strong>les</strong> données arbres et peuplement et <strong>les</strong> données phytoécologiques. Seu<strong>les</strong> <strong>les</strong> informations<br />
concernant la flore et le sol sont mentionnées ici.<br />
La base de données phytoécologiques de l Ifn contient actuellement près de 120 000<br />
relevés réalisés entre 1985 et aujourd'hui. C'est une source de données unique sur la flore<br />
forestière française puisqu'elle couvre l ensemble <strong>du</strong> territoire métropolitain (Corse comprise)<br />
avec une forte densité de relevés. De plus, ces données ont été recueillies selon un protocole<br />
identique et sont géoréférencées (pour <strong>les</strong> relevés <strong>les</strong> plus récents). Le caractère cyclique des<br />
inventaires permet également de suivre l évolution de la végétation forestière dans le temps.<br />
Deux séries de données floristiques espacées de 12 ans environ sont actuellement disponib<strong>les</strong><br />
pour 9 départements.<br />
Le nombre de taxa enregistrés par l'Ifn dans l'ensemble de ses relevés floristiques est<br />
de 2175 avec en moyenne 18 taxa par relevé (mini : 1 taxon et maxi : 76 taxa). On trouve en<br />
moyenne 5 genres ou espèces d'arbres par relevé (mini : 1 et maxi : 21).<br />
Les relevés d'été (avril à octobre inclus) comptent en moyenne 19 taxa (maxi : 76) et<br />
<strong>les</strong> relevés d'hiver 16 (maxi : 62).<br />
Exemp<strong>les</strong> d'études de la végétation forestière à partir des données de l'Ifn<br />
Bien que mises en place à l origine pour caractériser <strong>les</strong> conditions stationnel<strong>les</strong> des<br />
forêts en France, <strong>les</strong> données phytoécologiques, et plus particulièrement floristiques, de l Ifn<br />
sont utilisées dans un cadre plus large. El<strong>les</strong> permettent notamment d étudier la distribution<br />
géographique des espèces et de modéliser leurs aires de répartition en fonction de paramètres<br />
18
environnementaux. Ces études contribuent à améliorer <strong>les</strong> connaissances autoécologiques des<br />
espèces forestières et à simuler leur distribution future sous l'effet des changements globaux à<br />
moyen et long terme. A travers la valeur bioindicatrice des espèces végéta<strong>les</strong>, <strong>les</strong> données<br />
floristiques de l'Ifn peuvent aussi être utilisées pour dresser des cartes de distribution<br />
géographique des principaux facteurs écologiques (cf. cartes présentées dans le poster réalisé<br />
par Raymonde Virion et présenté à ce colloque) et étudier leur évolution dans le temps.<br />
Quelques exemp<strong>les</strong> d'utilisation des données Ifn dans le cadre d'études portant sur la<br />
végétation forestière sont présentés ci-après.<br />
1. Atlas floristiques<br />
En 2004, l'association <strong>Floraine</strong> a contacté l'échelon Ifn de Nancy dans le cadre de la<br />
réalisation de l'Atlas des plantes de Lorraine. Un partenariat a été mis en place entre <strong>les</strong> deux<br />
structures pour intégrer <strong>les</strong> données floristiques de l'Ifn dans l'atlas et en retour assurer un<br />
contrôle de validité de ces données et la formation des agents Ifn à l'identification des<br />
bryophytes par des membres de <strong>Floraine</strong> (voir Figures 2 et 3 ci-dessous).<br />
Cette première expérience a été suivie de la mise en oeuvre d'autres conventions <strong>du</strong><br />
même type entre l'Ifn et la Société Botanique d'Alsace, le Conservatoire Botanique National<br />
<strong>du</strong> Massif Central et celui <strong>du</strong> Bassin Parisien.<br />
Figure 2 : répartition d'Abies alba en Lorraine - extrait de l'atlas des plantes de Lorraine<br />
(carte dynamique visible sur le site internet de <strong>Floraine</strong>).<br />
Un trait rouge dans une cellule indique que l'espèce a été vue au moins une fois dans cette<br />
maille de 5 x 5 km depuis 1998. Les cases blanches n'ont pas encore été prospectées.<br />
19
Figure 3 : répartition d'Abies alba en Lorraine d'après <strong>les</strong> inventaires Ifn des départements<br />
lorrains (1990-1993). En noir : <strong>les</strong> points avec A. alba (1683), en gris <strong>les</strong> points sans A. alba (5595).<br />
2. Changements à long terme de la végétation forestière : apport des<br />
données de l'Ifn<br />
Dans le cadre d'un programme de recherche lancé en 2001 par le GIP-Ecofor sur <strong>les</strong><br />
forêts et <strong>les</strong> modifications de l'environnement, l'Inra-Nancy (Laboratoire de phytoécologie<br />
forestière) a sollicité l'Ifn pour participer à une étude sur <strong>les</strong> impacts des modifications de<br />
l environnement sur <strong>les</strong> forêts.<br />
Plusieurs chercheurs européens ont mis en évidence des modifications de la<br />
végétation dans <strong>les</strong> forêts de l'Europe de l'ouest au cours des dernières décennies. Dans <strong>les</strong><br />
forêts <strong>du</strong> nord-est de la France on a constaté une augmentation des espèces nitrophi<strong>les</strong> et une<br />
diminution des espèces acidiclines depuis la fin des années 1970.<br />
Les principaux objectifs de cette étude pilote étaient de savoir s il était possible de<br />
suivre <strong>les</strong> évolutions à long terme de la végétation forestière à partir des relevés<br />
phytosociologiques de l Ifn et de confirmer ou infirmer <strong>les</strong> résultats déjà obtenus par l Inra<br />
dans le nord-est de la France sur un intervalle de 20 ans. La végétation forestière présente le<br />
20
double intérêt d'être à la fois un bon bioindicateur des conditions stationnel<strong>les</strong> et un<br />
composant de la biodiversité.<br />
Nous avons comparé <strong>les</strong> caractéristiques de la végétation forestière des départements<br />
de l Ardenne et <strong>du</strong> Haut-Rhin sur deux cyc<strong>les</strong> d inventaire (11 ans d intervalle). Ce sont <strong>les</strong> 2<br />
premiers départements pour <strong>les</strong>quels il existait à l'époque 2 séries temporel<strong>les</strong> d inventaire<br />
avec des relevés phytoécologiques. Ont été étudiées entre autres caractéristiques liées à la<br />
flore :<br />
- <strong>les</strong> changements de la richesse spécifique globale et par relevé<br />
- l'évolution de la fréquence de chaque espèce<br />
- le changement des valeurs indicatrices d'Ellenberg et de Gégout<br />
Les relevés floristiques pouvant être associés sur chaque placette d'inventaire à des<br />
informations dendrométriques, l'évolution des caractéristiques globa<strong>les</strong> des peuplements<br />
(structure, type de peuplement) a également été prise en compte afin de mieux comprendre <strong>les</strong><br />
modifications de flore observées.<br />
La méthode d'échantillonnage et <strong>les</strong> protoco<strong>les</strong> de mesures sont également à<br />
considérer avec attention dans ce genre d'étude et plus particulièrement <strong>les</strong> effets observateurs<br />
et saison qui sont connus pour avoir une grande influence sur la qualité des relevés<br />
floristiques. Ainsi lors de l'inventaire forestier <strong>du</strong> Haut-Rhin en 1988, 54 % des relevés ont été<br />
réalisés en été, dont <strong>les</strong> 2/3 en montagne. En 1999, lors de l'inventaire suivant, 81 % des<br />
relevés ont été effectués en été.<br />
Les résultats de cette étude montrent que la richesse floristique (nombre moyen<br />
d espèces par relevé) a nettement augmenté entre <strong>les</strong> deux cyc<strong>les</strong>, en relation d une part, avec<br />
une meilleure identification des espèces par <strong>les</strong> équipes de l Ifn et d autre part, sous l effet de<br />
changements environnementaux locaux et globaux. En résumé, <strong>les</strong> espèces de milieux riches<br />
et/ou anthropisés (espèces neutro-nitrophi<strong>les</strong>) progressent. Ce sont pour la plupart des espèces<br />
caractéristiques des coupes forestières ou des lisières ainsi que des espèces que l on voit<br />
apparaître ou progresser dans <strong>les</strong> essais de fertilisations des sols forestiers, indiquant donc une<br />
tendance à l eutrophisation (enrichissement) des sols.<br />
Il existe des différences régiona<strong>les</strong> dans cette évolution de la flore liées notamment<br />
au contexte stationnel des peuplements.<br />
L arrivée de plus de 7 000 nouveaux relevés floristiques chaque année est<br />
prometteuse et permettra d ici quelques années de travailler à l échelle de tout le territoire<br />
métropolitain<br />
3. Modélisation de l'aire climatique potentielle des grandes essences<br />
forestières<br />
Cette étude a été réalisée dans le cadre <strong>du</strong> projet de recherche CARBOFOR sur la<br />
Séquestration de carbone dans <strong>les</strong> grands écosystèmes forestiers en France (2002-2004),<br />
faisant lui-même partie <strong>du</strong> programme Gestion et Impacts <strong>du</strong> Changement Climatique (GICC)<br />
coordonné par le Medd.<br />
L'objectif de ce volet <strong>du</strong> projet CARBOFOR était d'étudier, à l'échelle <strong>du</strong> territoire<br />
national, <strong>les</strong> effets des contraintes climatiques sur l extension de l'aire potentielle des<br />
principa<strong>les</strong> essences forestières, et de modéliser le déplacement de ces aires sous l'effet des<br />
changements climatiques.<br />
21
L analyse de la présence/absence de 67 espèces ligneuses sur l ensemble <strong>du</strong> territoire<br />
a été réalisée à partir de plus de 104 000 relevés de l'Ifn effectués entre 1985 et 2001.<br />
Les données climatiques actuel<strong>les</strong> utilisées dans le cadre <strong>du</strong> projet correspondent : i)<br />
aux interpolations <strong>du</strong> modèle AURELHY de Météo-France et ii) aux données <strong>du</strong> Service<br />
d Archivage et de Traitement Météorologique des Observations Spatia<strong>les</strong> (SATMOS)<br />
CNRS / Météo-France. Les données climatiques futures sont issues <strong>du</strong> scénario ARPEGE.<br />
Les relevés pédologiques ne sont systématiques à l Ifn que depuis 1992. En<br />
conséquence il existe des manques importants sur le territoire. Pour prendre en compte la<br />
nature <strong>du</strong> substrat dans le contrôle des aires de répartition, la carte des sols de France au 1/1<br />
000 000 ème<br />
(INRA-Orléans) a été dérivée à l aide de fonctions de pédo-transfert en une carte<br />
thématique donnant trois classes d acidité pour <strong>les</strong> substrats.<br />
Les modè<strong>les</strong> de répartition actuelle des essences forestières issues de l'analyse de la<br />
présence/absence des espèces en fonction des paramètres édaphiques et climatiques présentés<br />
ci-dessus permettent de calculer la probabilité de présence d'une essence en un point donné <strong>du</strong><br />
territoire (voir Figure 4).<br />
Les aires potentiel<strong>les</strong> futures des essences sont simulées par la prise en compte dans<br />
<strong>les</strong> modè<strong>les</strong> de répartition actuelle des éléments climatiques futurs prédits par le modèle<br />
climatique ARPEGE pour <strong>les</strong> 50 et 100 prochaines années (voir Figure 4).<br />
Les conclusions de ce travail montrent que la distribution des aires géographiques<br />
potentiel<strong>les</strong> des essences sur le territoire national fait apparaître un déplacement des groupes<br />
d essences méridionaux vers le Nord et vers l Est. Les groupes montagnards et continentaux<br />
tendent à régresser fortement. Cette conclusion rejoint <strong>les</strong> résultats prédits en terme de<br />
fonctionnement et de pro<strong>du</strong>ction. Les espèces <strong>les</strong> plus sensib<strong>les</strong> et donc vulnérab<strong>les</strong> sont <strong>les</strong><br />
espèces supportant mal <strong>les</strong> sécheresses édaphiques et cel<strong>les</strong> en limite Sud de leur aire<br />
naturelle comme le Hêtre. Il est opportun de noter que cette évolution est prédite dans un laps<br />
de temps de 50 ans, inférieur à la <strong>du</strong>rée de révolution de la plupart des espèces forestières<br />
concernées et de rappeler l optimisme <strong>du</strong> scénario B2, utilisé dans cette étude, qui prédit<br />
l accumulation en gaz à effet de serre la plus lente des scénarios considérés par le GIEC.<br />
Ces résultats ne doivent pas être considérés comme des prévisions <strong>du</strong> fait d'une part,<br />
de la précision des scénarios climatiques et d'autre part, des incertitudes concernant le<br />
comportement des essences. Il faudrait intégrer dans ces modè<strong>les</strong> d'évolution des informations<br />
sur la capacité de migration des espèces pour coloniser de nouvel<strong>les</strong> niches climatiques en<br />
quelques dizaines d'années, sur l'adaptation à de nouvel<strong>les</strong> situations de compétition, sur<br />
l'influence de nouveaux pathogènes et symbiotes et sur la variabilité génétique. Autant de<br />
processus qui ne sont pas toujours bien connus actuellement pour toutes <strong>les</strong> espèces et dont il<br />
va falloir prévoir l'évolution sous l'effet des changements climatiques en cours.<br />
22
a)<br />
b) c)<br />
Figure 4 : aire de répartition <strong>du</strong> sapin pectiné, a) répartition actuelle observée (données Ifn),<br />
b) répartition actuelle modélisée, c) simulation pour 2100.<br />
Dans <strong>les</strong> figures 4b et 4c, <strong>les</strong> couleurs indiquent une probabilité de présence de l'espèce. Plus <strong>les</strong><br />
couleurs sont chaudes plus la probabilité est forte (bleu foncé : de 0.1 à 0.2, rouge foncé : de 0.9 à 1).<br />
Références bibliographiques<br />
Badeau V., Dupouey J.L., Cluzeau C., Drapier J., 2005. Aires potentiel<strong>les</strong> de répartition des<br />
essences forestières d'ici 2010. Forêt entreprise, 2005 (2), n° 162, p. 25-29.<br />
Cluzeau C., Dupouey J.-L., Drapier J., Virion R., 2001. Étude des modifications à long terme<br />
de la végétation forestière à partir des données de l IFN. Rev. For. Fr., 53(3-4), 413-419.<br />
Drapier J., Cluzeau C., 2001. La base de données écologiques de l'IFN. In : Actes <strong>du</strong><br />
séminaire IFN 2000 "Collecte et utilisation des données forestières". Revue forestière française, vol.<br />
LIII, n° 3-4, 2001, p. 365-371.<br />
Dupouey J.L., Thimonier A., Bost F., Becker M., Picard J.F., Timbal J., 1999. Changements<br />
de la végétation dans <strong>les</strong> forêts <strong>du</strong> Nord-Est de la France entre 1970 et 1990. Revue Forestière<br />
Française, 2, 219-230.<br />
Rapport final de l'étude Carbofor téléchargeable sur :<br />
http://www.nancy.inra.fr/extranet/com/carbofor/carbofor-D1-resume.htm#entete<br />
23
L'approche cartographique des stations forestières<br />
Sylvain GAUDIN<br />
Ingénieur environnement et développement<br />
CRPF de Champagne-Ardenne<br />
6 place Sainte-Croix<br />
51000 CHÂLONS en CHAMPAGNE<br />
sylvain.gaudin@crpf.fr<br />
03 26 65 18 25<br />
Connaître la répartition de la flore ou de la végétation sur de vastes territoires<br />
permet d'établir des atlas, de définir des limites chorologiques ou de visualiser <strong>les</strong> effets<br />
possib<strong>les</strong> des changements globaux.<br />
Il faut aussi parfois avoir une approche fine des milieux à des fins de gestion. Par<br />
exemple, la connaissance précise des stations à l'échelle d'une forêt permet de définir et<br />
cartographier <strong>les</strong> potentialités ainsi que de choisir <strong>les</strong> cortèges d'essences adaptées. De<br />
même, sur <strong>les</strong> sites retenus pour le réseau européen Natura 2000, la cartographie des habitats<br />
aboutit au géoréférencement des différents milieux, à la définition spatiale des enjeux et à la<br />
localisation des interventions à réaliser.<br />
Cette contribution présente <strong>les</strong> modalités de mise en uvre d'une cartographie<br />
précise des stations forestières. L'objectif est d'aboutir, à la suite de relevés de terrain, à une<br />
carte dont l'échelle de validité sera par exemple le 1:5000e ou le 1:10 000e.<br />
La notion de station forestière<br />
Un simple parcours en forêt permet facilement d'identifier des changements de<br />
végétation. Par exemple, il est possible de traverser en quelques centaines de mètres des<br />
zones de physionomie différente :<br />
Sur le plateau où dominent le chêne sessile et le charme, la flore <strong>du</strong> sous-bois est<br />
composée de chèvrefeuille (Lonicera periclymenum), de millet diffus (Milium effusum),<br />
d'atrichie on<strong>du</strong>lée (Atrichum un<strong>du</strong>latum) et de canche cespiteuse (Deschampsia cespitosa).<br />
Les sols y sont assez profonds et la texture dominante est limoneuse.<br />
Sur le versant, le hêtre, l'érable champêtre et l'alisier torminal composent le<br />
peuplement. Le sous-bois est riche en arbustes comme le camerisier à balai (Lonicera<br />
xylosteum), la viorne lantane (Viburnum lantana), le fusain (Evonymus europeae) ainsi qu'en<br />
plantes herbacées : brachypode des bois (Brachypodium sylvaticum), mélique uniflore<br />
(Melica uniflora). Le sol à dominante argileuse est peu profond et laisse rapidement la place<br />
à des cailloux calcaires.<br />
En bas de versant, le chêne pédoncule, le frêne et l'orme lisse dominent. La flore<br />
<strong>du</strong> sous-bois comprend notamment l'ail des ours (Allium ursinum), la ficaire (Ranunculus<br />
ficaria), la reine des prés (Filipen<strong>du</strong>la ulmaria) et la circée de Paris (Circaea lutetiana). Le<br />
sol limoneux en surface puis argileux est profond. II est marqué de taches qui tra<strong>du</strong>isent des<br />
périodes d'engorgement hivernal.<br />
Ces constatations ont été faites rapidement par <strong>les</strong> premiers botanistes. Pour trouver<br />
certaines plantes, il fallait herboriser dans des lieux bien précis, aux conditions de milieu<br />
particulières. Il existe, même si <strong>les</strong> liens sont imparfaits, des relations entre la végétation et<br />
le sol. C'est en partant de ces constatations qu'a été définie la notion de station forestière.<br />
Une station est une éten<strong>du</strong>e de terrain de superficie variable, homogène dans ses conditions<br />
physiques et biologiques (mésoclimat, topographie, composition floristique et structure de la<br />
végétation spontanée, sol).<br />
24
Ainsi il est possible de définir par exemple une station de versant nord, sur sol<br />
superficiel et caillouteux, à mésoclimat froid et à flore neutrophile et hygrosciaphile. Sur une<br />
station, la flore sert de bio-indicateur et est classée en groupes ayant <strong>les</strong> mêmes affinités<br />
écologiques (plantes des milieux humides, plantes des milieux riches en nitrates, plantes<br />
exigeantes en humidité atmosphérique...). La connaissance de la station permet de connaître<br />
localement la fertilité et d'énumérer <strong>les</strong> essences forestières à favoriser dans <strong>les</strong> peuplements,<br />
voire à implanter. Sur une ou plusieurs régions naturel<strong>les</strong>, il est possible de construire un<br />
catalogue des stations qui énumère <strong>les</strong> différents types de stations, <strong>les</strong> caractérise, donne<br />
leurs potentialités et permet de <strong>les</strong> identifier sur le terrain grâce à une clef de détermination.<br />
Les méthodes de cartographie<br />
Les différentes méthodes<br />
Pour réaliser une carte des stations, il est nécessaire d'effectuer des relevés<br />
phytoécologiques qui prennent en compte la topographie, l'exposition, la pédologie et la<br />
végétation. Trois méthodes sont possib<strong>les</strong> pour organiser l'échantillonnage (nombre et<br />
positionnement des relevés) et optimiser le travail de terrain (figure 1).<br />
La cartographie systématique s'appuie sur un parcours de la forêt selon une grille<br />
régulière.<br />
L'opérateur chemine entre <strong>les</strong> points et détermine à chaque n ud le type de station.<br />
Un transect est un itinéraire rectiligne d'échantillonnage recouvrant une diversité maximale de<br />
situations topographiques, géologiques, géomorphologiques et végéta<strong>les</strong>. Ainsi, réaliser une<br />
cartographie par transects revient à définir des cheminements et à <strong>les</strong> parcourir en réalisant<br />
des relevés (en notant <strong>les</strong> changements stationnels). La cartographie par zonage préalable a<br />
pour fondement la définition de zones a priori homogènes <strong>du</strong> point de vue stationne! (en<br />
synthétisant toutes <strong>les</strong> informations uti<strong>les</strong>). La phase de terrain sert alors à valider ou à<br />
recadrer le découpage initial et à déterminer de manière précise <strong>les</strong> types de stations.<br />
La méthode par zonage préalable<br />
- Principes<br />
La méthode par zonage préalable apparaît comme intéressante car elle optimise la<br />
disposition des relevés et limite ainsi leur nombre. La mise en pratique de cette méthode est<br />
donc moins coûteuse. Son efficacité a donc été testée en Champagne-Ardenne par le CRPF.<br />
L'observation conjointe de plusieurs données permet à l'opérateur de réaliser une<br />
stratification préalable avant d'aller sur le terrain. Il s'agit :<br />
25
- de la topographie (lue sur <strong>les</strong> courbes de niveau des cartes topographiques ou issue<br />
d'un modèle numérique de terrain),<br />
- de la géologie, issue des cartes <strong>du</strong> BRGM au 1:50 000e,<br />
- des photographies aériennes,<br />
- <strong>du</strong> catalogue des stations s'il est disponible pour la forêt étudiée.<br />
À ces données usuel<strong>les</strong> auxquel<strong>les</strong> sont familiarisés <strong>les</strong> gestionnaires de milieux<br />
naturels, il faut ajouter trois « lois » qui ont été définies par le laboratoire de pédologie de<br />
l'université de Franche-Comté (Lucot et Gaiffe, 1994). Il s'agit de :<br />
- la loi des chaînes de sols,<br />
- la loi des compartiments,<br />
- la loi des buttes.<br />
En règle générale, <strong>les</strong> eaux de ruissellement font que « <strong>les</strong> hauts nourrissent <strong>les</strong> creux<br />
». On observe ainsi des transferts de matière le long des pentes. Les sols des zones convexes<br />
sont soumis à des pertes de matière (<strong>les</strong>sivage, érosion, ruissellement) alors que <strong>les</strong> sols des<br />
dépressions connaissent un apport de matériaux (accumulation, <strong>les</strong>sivage, érosion karstique).<br />
On arrive ainsi à la notion de chaîne de sols.<br />
Il existe des variations plus ou moins continues entre <strong>les</strong> points hauts et <strong>les</strong> creux (ce<br />
qui permet au cartographe d'anticiper <strong>les</strong> variations). Les sols colluviaux des positions basses<br />
présentent généralement une faible variabilité dans un contexte donné. Les relevés pourront y<br />
être limités.<br />
Le sol et <strong>les</strong> roches sous-jacentes ont des propriétés physiques propres. Ils ont donc<br />
localement un comportement différent en ce qui concerne l'écoulement des eaux, notamment<br />
en raison de leur porosité. Il est possible de distinguer quatre systèmes principaux :<br />
- Les systèmes drainants hyper-poreux. Ils correspondent à un réseau de pores très<br />
ouverts (roches fracturées). Les processus d'entraînement et d'érosion fortement favorisés y<br />
limitent l'épaisseur des sols.<br />
- Les systèmes drainants poreux. Le réseau poral y est grossier (roches fissurées,<br />
dépôts alluviaux anciens sablo-graveleux...). Les eaux s'infiltrent verticalement et <strong>les</strong><br />
ruissellements latéraux épisodiques n'entraînent qu'une érosion modérée.<br />
- Les systèmes étanches ouverts. Dans ces systèmes, le réseau de pores trop fins<br />
limite l'infiltration et provoque l'apparition de nappes. Il s'agit soit de nappes perchées (en<br />
26
position de plateau), soit de nappes phréatiques (en plaine alluviale).<br />
- Les systèmes étanches fermés. Ils correspondent aux compartiments non drainants<br />
et aux cuvettes fermées. L'eau y est prisonnière car elle ne peut pas s'écouler.<br />
Définir le ou <strong>les</strong> systèmes présents sur la forêt à cartographier revient à appliquer la<br />
loi des compartiments.<br />
Lorsqu'il existe un relief un peu marqué sur le massif à cartographier, il est possible<br />
de définir des zones convexes (buttes) et des dépressions. Ce modelé résulte de la circulation<br />
des eaux de ruissellement.<br />
Ces eaux ont tendance à progresser le long des discontinuités géologiques et dans <strong>les</strong><br />
zones de partage entre matériaux (figure 3).<br />
Sachant cela, deux buttes voisines ont de fortes chances de présenter des stations différentes.<br />
Cette loi des buttes permet donc d'avoir une première approche focalisée sur <strong>les</strong> buttes pour<br />
estimer si el<strong>les</strong> présentent des différences significatives d'un point de vue stationnel. En<br />
revanche, la loi des chaînes de sols indique que <strong>les</strong> fonds varieront peu en raison <strong>du</strong><br />
colluvionnement qui masque <strong>les</strong> formations sous-jacentes.<br />
Mise en place sur un exemple<br />
La forêt de Pierrepont, située dans <strong>les</strong> crêtes pré-ardennaises a été cartographiée<br />
selon la méthode par zonage préalable. La mise en uvre des critères et des lois con<strong>du</strong>isant à<br />
la stratification est résumé sur la figure 4.<br />
- Topographie et exposition : la forêt possède une zone de plateau au sud, une zone<br />
de versants dans sa partie centrale et une zone de bas de versant et de fond de vallon au nord.<br />
Les versants sont globalement exposés au nord.<br />
- Géologie et géomorphologie : trois formations géologiques sont présentes sur cette<br />
forêt. Les sols lourds issus <strong>du</strong> Callovien se retrouvent sur la dépression au nord. Les versants<br />
sont constitués de gaize oxfordienne, et le plateau, de sols développés sur des sab<strong>les</strong> argileux.<br />
Il existe donc ici une bonne concordance entre topographie et géologie.<br />
- La loi des compartiments : La carte géologique annonce des marnes <strong>du</strong> Callovien<br />
en bas de versant.<br />
La position topographique basse et la texture lourde des sols vont in<strong>du</strong>ire des<br />
systèmes étanches à nappe temporaire ou permanente. L'Oxfordien inférieur forme le versant<br />
de la cuesta. La gaize domine, même si des matériaux fins peuvent être ponctuellement<br />
présents. En raison de la perméabilité de la roche et de la pente, le système reposant sur<br />
l'Oxfordien est drainant. Les dépôts de l'Albien sont faits de sab<strong>les</strong> argileux et glauconieux.<br />
Ils sont en position topographique de plateau.<br />
Il peut en résulter soit un système étanche ouvert (avec une nappe perchée), soit un<br />
système drainant poreux.<br />
27
.<br />
- La loi des buttes : Cette loi indique que <strong>les</strong> points hauts peuvent très souvent avoir des<br />
sols présentant des différences. Les buttes ont donc été repérées par un symbole (+) sur la carte<br />
présentée figure 4, <strong>les</strong> creux par un symbole (-). Les relevés de terrain devront échantillonner<br />
chaque butte.<br />
Les limites de stations entre <strong>les</strong> buttes devront être recherchées.<br />
- La loi des chaînes de sols : II existe des colluvionnements entre <strong>les</strong> points hauts (+)<br />
et <strong>les</strong> points bas<br />
(-). Les transects effectués en allant de l'un à l'autre permettront de recenser des sols<br />
de profondeur variable.<br />
- L'apport <strong>du</strong> catalogue des stations : <strong>les</strong> types de stations <strong>du</strong> catalogue des crêtes<br />
pré-ardennaises sont construits en fonction de divers paramètres dont la topographie,<br />
l'exposition ou le matériau géologique. II est donc possible d'énumérer <strong>les</strong> types potentiels<br />
sur la carte. La lecture <strong>du</strong> catalogue montre que <strong>les</strong> versants ne sont pas nécessairement<br />
homogènes. Les zones <strong>les</strong> plus abruptes correspondent sûrement à des zones sur éboulis de<br />
gaize à système poreux hyperdrainant (type 3). Les zones à pente moins forte (bas ou haut de<br />
pente) correspondent à des stations sur système poreux drainant (type 4 ou 10). Une limite<br />
potentielle supplémentaire a donc été tracée sur la carte en fonction des courbes de niveau. Au<br />
sud de cette ligne, la pente est plus raide qu au nord.<br />
La phase de terrain a pour but d identifier <strong>les</strong> types de stations présents. Le parcours<br />
doit permettre de vérifier <strong>les</strong> hypothèses et d apporter suffisamment d informations pour<br />
réaliser la carte. Il peut être modifié en cours de route pour tenir compte des premiers résultats<br />
obtenus. Vingt relevés ont été effectués sur cette forêt.<br />
28
La validation de la méthode par zonage préalable<br />
Méthode utilisée<br />
Quelle que soit la méthode de cartographie utilisée, il est toujours possible de réaliser<br />
une carte. Il faut cependant, pour juger de la pertinence de la méthode testée, connaître la<br />
validité des résultats cartographiques obtenus. La méthode de cartographie par zonage<br />
préalable a été essayée sur une dizaine de forêts présentant une grande variété de situations<br />
(petites ou grandes surfaces, topographie marquée ou non, nombre d assises géologiques<br />
variable...). Une fois la carte résultant de la méthode par zonage préalable réalisée, une<br />
seconde campagne de terrain utilisant une méthode systématique dense (relevés le plus<br />
souvent au quart d hectare ou au demi-hectare) a eu lieu (figure 5).<br />
Les résultats obtenus<br />
La superposition de la carte initiale et des relevés de vérification (figure 6) permet de<br />
définir un certain nombre d indicateurs :<br />
l indice de bonne superposition,<br />
la comparaison des types de stations rencontrés et des surfaces couvertes par<br />
chaque type selon la méthode utilisée,<br />
le nombre de zones oubliées par la méthode par zonage préalable...<br />
Par exemple, sur la forêt de Pierrepont, l indice de bonne superposition est de 73 %.<br />
Cela signifie que sur presque trois quarts des relevés de vérification effectués, il y a<br />
concordance avec la carte tracée à l issue de la méthode par zonage préalable. Dans certains<br />
29
cas, la mauvaise concordance des résultats repose simplement sur un léger décalage dans le<br />
tracé d une limite. Dans d autres cas, il y a un oubli complet d une zone d un type de station<br />
différent.<br />
Lors de la cartographie par zonage préalable, quatre types de station n ont pas été<br />
rencontrés alors que la vérification systématique a montré leur présence. Ces quatre types<br />
couvrent cependant une surface cumulée assez ré<strong>du</strong>ite (environ 5 % de la surface de la forêt).<br />
La surface totale occupée par chaque type de station varie peu entre <strong>les</strong> deux méthodes. En<br />
revanche, une dizaine d unités cartographiques (de taille modeste) n ont pas été repérées lors<br />
de la cartographie par zonage préalable (figure 7).<br />
Bilan des tests<br />
Des résultats analogues ont pu être obtenus sur l ensemble des forêts testées. Par<br />
exemple, la figure 8 montre la valeur prise par l indice de bonne superposition sur l ensemble<br />
des forêts testées.<br />
Figure 8. Valeur de l indice de bonne superposition sur <strong>les</strong> forêts testées.<br />
Même si <strong>les</strong> tests sont trop peu nombreux pour conclure de manière définitive, <strong>les</strong><br />
premiers résultats étaient suffisamment satisfaisants pour que le CRPF propose à destination<br />
des gestionnaires de forêts ou de milieux naturels, des fiches pratiques pour mettre en oeuvre<br />
la cartographie des stations (Gaudin, 2004). Une de ces fiches indique la ou <strong>les</strong> méthodes de<br />
cartographie <strong>les</strong> plus adaptées en fonction des caractéristiques de la région naturelle. Il<br />
semble, par exemple, que la méthode par zonage préalable fonctionne d autant mieux :<br />
que le relief de la forêt à cartographier est marqué,<br />
que <strong>les</strong> formations géologiques sont diversifiées et qu el<strong>les</strong> influent sur la diversité<br />
des sols.<br />
30
Pour conclure, la cartographie des stations, en particulier celle par zonage préalable,<br />
nécessite un certain savoir-faire. En effet, il est nécessaire de synthétiser et d interpréter au<br />
mieux <strong>les</strong> données et de réaliser de manière judicieuse <strong>les</strong> relevés de terrain. Cette approche<br />
fine des milieux, s appuyant sur le caractère indicateur de la flore, permet de connaître <strong>les</strong><br />
milieux naturels et d optimiser leur gestion.<br />
31
Bibliographie<br />
BAZIN N. et GAUDIN S., 2002, Tests d une méthode de cartographie rapide des<br />
stations forestières, Synthèse générale, CRPF de Champagne-Ardenne, version 1.1, Châlons<br />
en Champagne, Rapportd étude, 47 p. et annexes.<br />
Téléchargeable à l adresse : http://perso.orange.fr/le.mago/Acrobat/Tests.pdf<br />
DELPECH R. et al., 1985, Typologie des stations forestières, Vocabulaire, Paris, IDF,<br />
243 p.<br />
DENIS P., 1997, Cartographie des stations forestières, Bois et Forêts en Pays de la<br />
Loire, n°50, pp. 2-3.<br />
GAUDIN S., 2004, La cartographie des stations : méthodes et conseils, CRPF de<br />
Champagne-Ardenne, version 1.6, Châlons en Champagne, 11 fiches.<br />
Téléchargeable à l adresse : http://www.crpf.fr/crpfchampagne/pdf/Cartographie.pdf<br />
GAUDIN S., 2006, Utiliser et valoriser une carte des stations : exemple en Brie<br />
champenoise, CRPFde Champagne-Ardenne, version 1.51, Châlons en Champagne, 6 fiches.<br />
Téléchargeable à l adresse : http://www.crpf.fr/crpfchampagne/pdf/Valorisation.pdf<br />
GIRAULT D., 1985, Les stations forestières des Crêtes Pré-Ardennaises, DDAF des<br />
Ardennes, 103 p.<br />
LUCOT E. et GAIFFE M., 1994, Cartographie de massifs forestiers témoins sur<br />
substrats calcaires <strong>du</strong> Nord-Est de la France, Intégration de l indice de pierrosité dans la<br />
caractérisation des sols, Université de Franche-Comté, Laboratoire de pédologie, 12 p. et<br />
annexes.<br />
ONF DR Alsace, 1990, Cartographie des stations forestières pour l aménagement, 14 p.<br />
32
Vers un atlas de la flore vasculaire de Wallonie<br />
par L.-M. De<strong>les</strong>caille 1 , M. Dufrêne 1 , J.-L. Gathoye 1 , J. Saintenoy-Simon 2 , C.<br />
Teugels 1,3 et F. van Rossum 4 . *<br />
1. Un Atlas de la flore vasculaire de Wallonie, pour quoi faire ?<br />
La connaissance de la distribution historique des plantes vasculaires de la flore belge<br />
repose essentiellement sur l édition de l'Atlas de la flore belge et luxembourgeoise de van<br />
Rompaey & Delvosalle (1972). Cet atlas est le fruit d'un travail de compilation de données<br />
floristiques anciennes issues de publications, notamment <strong>du</strong> Prodrome de Durant (1899),<br />
d'herbiers, et de données recueillies entre 1939 et 1971 par L. Delvosalle, E. van Rompaey et<br />
de nombreux collaborateurs professionnels et amateurs. Certaines données, récoltées jusqu en<br />
1977, ont été ajoutées dans la seconde édition (van Rompaey & Delvosalle, 1979). A cette<br />
époque, <strong>les</strong> auteurs avaient pour principal objectif de donner une image correcte de la<br />
distribution géographique des espèces végéta<strong>les</strong>. Ils eurent aussi le mérite d'adapter une<br />
méthode de représentation cartographique par quadrillage <strong>du</strong> territoire en mail<strong>les</strong><br />
kilométriques, développée par des botanistes néerlandais dès le début <strong>du</strong> 20 e siècle (Goethart<br />
& Jongmans, 1903-1908), et mise en place en Belgique par l Institut Floristique Belge<br />
devenu, en 1976, l'Institut Floristique Belgo-Luxembourgeois (IFBL). Ce carroyage est<br />
également utilisé au Grand-Duché de Luxembourg et dans le nord de la France (Institut<br />
floristique franco-belge, Delvosalle, 1977).<br />
Depuis la publication de l'atlas, de nombreux botanistes amateurs ou professionnels<br />
ont continué à collecter des données floristiques, publiées - parfois dans des publications<br />
confidentiel<strong>les</strong>, sous forme d artic<strong>les</strong>, d'additions, de compléments, ou simplement conservées<br />
dans des carnets de terrain. Les techniques ont également évolué, de même que <strong>les</strong> objectifs.<br />
Un atlas est devenu un outil incontournable pour la conservation de la biodiversité.<br />
En effet, la connaissance de la distribution des plantes supérieures permet :<br />
- d avoir une idée précise de leur distribution et de leur évolution, en particulier pour <strong>les</strong><br />
espèces prioritaires ou d habitats prioritaires en matière de conservation mais aussi comme<br />
indicateurs biologiques des grands changements environnementaux;<br />
- d évaluer la rareté des espèces;<br />
- de suivre l évolution (régression, progression) des espèces rares (listes rouges) ou des<br />
espèces envahissantes (listes noires);<br />
- de localiser <strong>les</strong> "c urs de nature" qui montrent une grande diversité, ainsi que <strong>les</strong> stations<br />
d'espèces vulnérab<strong>les</strong> insuffisamment incluses au sein des sites protégés (et donc<br />
d identifier des terrains pour de nouvel<strong>les</strong> réserves naturel<strong>les</strong>) ;<br />
- de fournir des données actualisées pour le suivi de l'état de l'environnement par<br />
bioindicateurs, pour <strong>les</strong> études d'incidences, pour l évaluation de l état de conservation des<br />
habitats Natura 2000 ;<br />
- de permettre l'adaptation de la législation, etc.<br />
Depuis la publication de l'atlas de 1979, de nombreuses espèces ont vu leur statut se<br />
modifier ou leur distribution évoluer (De<strong>les</strong>caille & Saintenoy-Simon, <strong>2007</strong>). Beaucoup se<br />
sont raréfiées ou ont disparu, alors que d'autres, souvent exotiques, ont connu une progression<br />
* 1 - Centre de Recherche de la Nature, des Forêts et <strong>du</strong> Bois Avenue Maréchal Juin, 23 B - 5030 Gembloux<br />
2 - Association pour l'Etude de la Floristique Rue A. Roland, 61 B - 1030 Bruxel<strong>les</strong><br />
3 - Unité de Gestion des Ressources forestières et des Milieux naturels - Faculté Universitaire des Sciences Agronomiques de<br />
Gembloux Avenue de la Faculté d'Agronomie, 2 B - 5030 Gembloux<br />
4 - Jardin botanique national de Belgique Domaine de Bouchout B - 1860 Meise<br />
33
spectaculaire. Il est donc primordial de faire une synthèse des données floristiques collectées<br />
ces 30 dernières années et, si besoin est, de <strong>les</strong> compléter par de nouveaux inventaires. En<br />
Flandre, <strong>les</strong> autorités compétentes sont parvenues à fédérer <strong>les</strong> institutions scientifiques et <strong>les</strong><br />
groupements d'amateurs pour pro<strong>du</strong>ire en 2006 un "Atlas de la flore de Flandre et de la<br />
Région bruxelloise", fruit de la collaboration de plus de 1400 personnes, amateurs et<br />
professionnels (van Lan<strong>du</strong>yt et al., 2006). Grâce à une collaboration entre la Direction de la<br />
Conservation de la Nature <strong>du</strong> Ministère de la Région Wallonne, le Centre de Recherche de la<br />
Nature, des Forêts et <strong>du</strong> Bois (CRNFB) et l'Association pour l'Etude de la Floristique (AEF),<br />
un pré-atlas des espèces rares, menacées ou protégées est déjà disponible sous format<br />
électronique (Saintenoy-Simon et al., 2006) 1 . Il reprend notamment <strong>les</strong> principa<strong>les</strong><br />
informations sur la distribution actuelle et ancienne et sur l'évolution <strong>du</strong> statut de quelques<br />
580 taxons indigènes ou anciennement naturalisés, auxquels on peut ajouter 65 taxons<br />
intro<strong>du</strong>its ou en voie de naturalisation, au statut variable.<br />
2. La création <strong>du</strong> Groupe de Travail Atlas de la Flore<br />
Un groupe de travail s'est constitué en vue de mettre au point la méthodologie de<br />
collecte des informations existantes ou à recueillir et afin d offrir une aide aux personnes<br />
désireuses de participer au projet. Il comprend des représentants <strong>du</strong> CRNFB, <strong>du</strong> Jardin<br />
botanique national de Belgique, de l'AEF et de l'Unité de Gestion des Ressources forestières<br />
et des Milieux naturels (Faculté Universitaire des Sciences Agronomiques de Gembloux).<br />
L objectif final est la publication d'un atlas complet à l'horizon 2010 mais aussi de réaliser un<br />
bilan sur <strong>les</strong> espèces menacées (actualisation de la Liste Rouge).<br />
3. Le système utilisé pour la cartographie<br />
Afin de conserver un lien avec le passé et de permettre des comparaisons, le système<br />
développé par l'IFBL a été conservé : il repose sur des inventaires par maille kilométrique (1 x<br />
1 km) et sur une synthèse cartographique par maille de 4 x 4 km. Dans le but de constituer<br />
une base de données aussi détaillée que possible, une localisation plus précise est demandée<br />
pour <strong>les</strong> espèces rares (localisation par GPS, par exemple).<br />
Traditionnellement, <strong>les</strong> botanistes divisaient <strong>les</strong> cartes topographiques de l'Institut<br />
Géographique National (IGN) au 1/50.000e en 40 cases (5 en x et 8 en y). Dans <strong>les</strong> anciennes<br />
versions des cartes, le coin inférieur gauche était décalé de 12 m en x et de 180 m en y par<br />
rapport aux coordonnées kilométriques Lambert entières. Actuellement, <strong>les</strong> nouvel<strong>les</strong> cartes<br />
de l IGN au 1/20.000e sont recadrées sur <strong>les</strong> coordonnées Lambert entières. Malgré <strong>les</strong><br />
risques d'erreur liés à l'utilisation des nouvel<strong>les</strong> cartes, on a décidé de garder l'ancien<br />
quadrillage.<br />
Dans le but de faciliter la tâche des collaborateurs, des supports cartographiques (fonds IGN<br />
nouveaux au 1/20.000e avec surimpression de la grille IFBL) seront disponib<strong>les</strong> sur simple<br />
demande au CRNFB ou directement imprimab<strong>les</strong> via une page Web spécifique au projet. Ceci<br />
assurera de surcroît l exactitude de la superposition de la grille sur la carte.<br />
4. Collecte des données<br />
Afin de répondre au mieux aux attentes des prospecteurs de terrain, deux listes<br />
floristiques classiques sont à leur disposition :<br />
- une liste floristique condensée (liste de l'AEF) qui a l avantage de tenir sur un document de<br />
format A4;<br />
- un nouveau bordereau de terrain inspiré de celui développé par le Conservatoire botanique<br />
national de Bailleul pour l atlas <strong>du</strong> Nord/Pas-de-Calais et adapté pour l atlas de Wallonie. Ce<br />
1 http://mrw.wallonie.be/dgrne/sibw/espèces/ecologie/plantes/listerouge/<br />
34
dernier est constitué de 4 pages (1 A3 recto-verso) et est organisé de manière à éviter au<br />
maximum <strong>les</strong> changements de pages, tout en apportant un certain nombre d informations<br />
complémentaires sur <strong>les</strong> habitats et sur <strong>les</strong> taxons inventoriés (indigénat, statut de protection,<br />
rareté, liste rouge). Afin de rester conviviale, la liste floristique ne comporte que <strong>les</strong> taxons<br />
susceptib<strong>les</strong> d'être observés. Les taxons simplement adventices, spontanés ou cultivés (sauf<br />
grandes cultures) ne sont pas repris dans la liste, de même que <strong>les</strong> taxons considérés comme<br />
éteints depuis plus de 50 ans. Une liste complète des taxons observés (actuellement ou jadis)<br />
en Wallonie est par ailleurs disponible sur le site Web. Un champ libre est toujours prévu<br />
pour ajouter des taxons qui ne figureraient pas sur la liste de base mais que l'observateur<br />
souhaite ajouter.<br />
La première page <strong>du</strong> formulaire est destinée à recueillir <strong>les</strong> informations sur la date et<br />
le lieu de récolte, le collecteur de l'information, <strong>les</strong> biotopes inventoriés, la confidentialité des<br />
données. Dans le cadre de la mise à disposition de données biogéographiques par des tiers à<br />
l'administration wallonne, un code de déontologie a été élaboré pour la définition et la gestion<br />
des concepts de droit d'auteur 2 . Ce code, inspiré de celui de la Fédération des Banques de<br />
Données Biogéographiques, définit ce qu'est une donnée biogéographique détaillée (donnée<br />
complète avec localisation précise <strong>du</strong> lieu d'observation) ou une donnée biogéographique<br />
résumée (donnée localisée dans une grille d'observation - dans ce cas, grille de 1 x 1 km de<br />
côté). Il définit également l'auteur de la donnée (la personne physique qui est l'inventeur de la<br />
donnée taxonomique et de sa localisation géographique) et le contributeur (la personne qui<br />
met en forme, gère ou synthétise des données dont il n'est pas l'auteur). Celui-ci est<br />
généralement le responsable d'une association qui assure la collecte de l'information auprès de<br />
ses membres et qui fournit ensuite <strong>les</strong> données à l'administration qui <strong>les</strong> utilise. Le code<br />
d'accès défini par l'auteur ou le contributeur limite <strong>les</strong> possibilités de diffusion des données<br />
par l'administration qui, rappelons-le, est tenue de fournir <strong>les</strong> informations dont elle dispose<br />
aux citoyens qui en font la demande. Ainsi, la donnée initiale peut être diffusée librement, soit<br />
sous forme détaillée, soit sous forme résumée. La diffusion de la donnée initiale sous forme<br />
détaillée ou sous forme résumée peut également être subordonnée à l'autorisation de l'auteur<br />
et/ou <strong>du</strong> contributeur. D'autres cas de figure sont encore prévus par le code de déontologie ;<br />
nous renvoyons le lecteur intéressé au site de la DGRNE. Pour information, il existe aussi une<br />
procé<strong>du</strong>re de mise à disposition de données biogéographiques gérées par le CRNFB à<br />
l'intention des bureaux d'études ou des groupes de recherche.<br />
La dernière page <strong>du</strong> formulaire a été particulièrement développée à l'intention des<br />
gestionnaires de réserves naturel<strong>les</strong> mais aussi des observateurs de terrain pour leur permettre<br />
de fournir des informations plus précises, si possible de nature (semi)quantitative, sur <strong>les</strong><br />
taxons <strong>les</strong> plus rares.<br />
Transmission des informations<br />
Les données collectées seront centralisées au CRNFB mais resteront accessib<strong>les</strong> aux<br />
différents partenaires <strong>du</strong> projet. Ce choix résulte <strong>du</strong> fait que le Centre gère déjà plusieurs<br />
bases de données biogéographiques en Région wallonne et dispose de l'infrastructure et des<br />
compétences informatiques nécessaires. La communication des données peut se faire de<br />
différentes manières.<br />
Un prototype d encodage en ligne a été développé et est actuellement en phase de test au<br />
CRNFB. Il permet à chaque collaborateur disposant d'un mot de passe d encoder et<br />
d'enregistrer ses données à travers une interface graphique propre ou à travers celle de Google<br />
Maps, mais également de visualiser <strong>les</strong> synthèses pro<strong>du</strong>ites. Dès qu il sera totalement<br />
opérationnel, ce service sera proposé sur le Web.<br />
2 http://mrw.wallonie.be/dgrne/ong/fbdb/deonto.html<br />
35
D'autre part, un formulaire standardisé sous forme de tableur sera mis en ligne pour<br />
le transfert des données. Il est conçu de manière a permettre l'intégration facile, rapide et sans<br />
perte d'information des données dans le logiciel Data-Fauna-Flora (DFF) utilisé pour la<br />
gestion de toutes <strong>les</strong> banques de données biogéographiques gérées par le CRNFB.<br />
Les collaborateurs qui ne disposent pas <strong>du</strong> temps ou <strong>du</strong> matériel nécessaire peuvent<br />
toujours envoyer leurs formulaires de terrain qui seront encodés par <strong>les</strong> soins <strong>du</strong> groupe de<br />
travail.<br />
Programmation des prospections<br />
Pour avoir une cartographie fiable, il est nécessaire de couvrir l ensemble <strong>du</strong><br />
territoire de la façon la plus complète et la plus homogène possible, et donc de prospecter le<br />
plus grand nombre possible de cases de 1x1 km au sein des carrés IFBL de 4x4 km. La<br />
Wallonie compte 19280 cases de 1x1km, ce qui représente une énorme charge de travail.<br />
L objectif est qu au minimum 4 cases de 1x1 km soient prospectées dans chaque carré de 4x4<br />
km. Toutefois, pour avoir un inventaire floristique presque exhaustif (et donc représentatif)<br />
d'un carré de 4x4 km, 9 à 10 cases de 1x1km sur <strong>les</strong> 16 cases devraient idéalement être<br />
prospectées (Van Lan<strong>du</strong>yt et al., 2006). A titre de comparaison, 3 % des carrés 4 x 4 km de<br />
l'atlas de 1979 ne comportaient qu'un seul relevé, 30 % n'en comptaient que 2 et 40 % n'en<br />
comptaient que 3 ou 4 (van Rompaey et Delvosalle, 1979).<br />
Pour optimiser le travail, il est aussi important que <strong>les</strong> prospecteurs évitent<br />
d'inventorier des cases déjà très bien couvertes. Dès 2008, un accès en ligne de l état des<br />
prospections permettra de rendre compte de l'état d'avancement <strong>du</strong> projet. L objectif est de<br />
combler <strong>les</strong> zones lacunaires, sur un mode interactif et dynamique. Une liste de carrés<br />
« vides » est toutefois déjà disponible pour <strong>les</strong> inventaires <strong>2007</strong>.<br />
Bibliographie<br />
De<strong>les</strong>caille, L.-M. & Saintenoy-Simon, J., <strong>2007</strong>. Les plantes vasculaires. In : Cellule Etat<br />
de l'Environnement Wallon. Rapport analytique sur l'état de l'environnement wallon 2006-<br />
<strong>2007</strong>. MRW - DGRNE, Namur : 598-599.<br />
Delvosalle, L., 1977. Le projet de carte de l'Institut floristique franco-belge Normandie-<br />
Rhin. Documents floristiques, 1 (1) : 5-11.<br />
Durant, Th., 1899. Prodrome de la flore belge. T. 3 : phanérogames. Bruxel<strong>les</strong>, A.<br />
Castaigne, 1112 p.<br />
Goethart, W.J.C. & Jongmans, W.J., 1903-1908. Plantenkaartjes voor Nederland. Leiden.<br />
Saintenoy-Simon, J. (coll. Y. Barbier, L.-M. De<strong>les</strong>caille, M. Dufrêne, J.-L. Gathoye, P.<br />
Verté), 2006. Première liste des espèces rares, menacées et protégées de la Région Wallonne<br />
(Ptéridophytes et spermatophytes).<br />
http://biodiversite.wallonie.be/especes/ecologie/plantes/listerouge/<br />
van Lan<strong>du</strong>yt et al., 2006. Atlas van de Flora van Vlaanderen en het Brussels Gewest.<br />
Brussel, Instituut voor natuur- en bosonderzoek & Nationale Plantentuin van België, 1007 p.<br />
van Rompaey, E. & Delvosalle, L., 1972. Atlas de la flore belge et luxembourgeoise.<br />
Ptéridophytes et spermatophytes. Meise, Jardin botanique national de Belgique.<br />
van Rompaey, E. & Delvosalle, L., 1979. Atlas de la flore belge et luxembourgeoise.<br />
Ptéridophytes et spermatophytes. 2e édition. Meise, Jardin botanique national de Belgique.<br />
36
Présentation de l application Recorder pour la gestion des<br />
données biogéographiques au Luxembourg<br />
Tania Walisch & Guy Colling<br />
Musée National d Histoire Naturelle <strong>du</strong> Luxembourg<br />
25, rue Munster<br />
L-2160 Luxembourg<br />
Mots-clés : biodiversité, données d observations, données de collection, Recorder,<br />
thesaurus, portail internet, Luxembourg.<br />
Le musée national d histoire naturelle <strong>du</strong> Luxembourg (MNHNL) a comme mission<br />
d'assembler et de gérer des données d'observations et de collections <strong>du</strong> patrimoine naturel et<br />
de rendre ces informations accessib<strong>les</strong> au public. En 1987, le MNHNL a commencé à<br />
développer une première banque de données relationnelle appelée Luxnat afin de regrouper<br />
<strong>les</strong> informations <strong>du</strong> patrimoine naturel. Entre 1999 et 2000 le Musée a mené une étude<br />
comparative des systèmes de banques de données biogéographiques existants et a finalement<br />
opté pour l'application Recorder, développée par le Joint Nature Conservation Comittee en<br />
Grande-Bretagne.<br />
37<br />
NBN<br />
Figure<br />
1. Schéma montrant <strong>les</strong> différentes versions de Recorder et <strong>les</strong> développements d outils<br />
annexes de gestions de données biologiques et de systèmes d information sur la biodiversité<br />
en Grande-Bretagne. La signature <strong>du</strong> traité de Rio en 1992 a stimulé ces projets et a permis<br />
l établissement <strong>du</strong> National Biodiversity Network (réseau national de la biodiversité en GB)<br />
en 2000.
Avant de pouvoir implémenter Recorder 2000 au MNHNL, il était nécessaire d y<br />
intégrer le système de coordonnées géographiques luxembourgeois. La liste des taxons de la<br />
banque de données Luxnat, ainsi qu'une liste des plantes vasculaires <strong>du</strong> Luxembourg et des<br />
dictionnaires standardisées (localités, méthodes d'observation etc.) ont également été intégrés<br />
dans Recorder 2000. Depuis lors des nouvel<strong>les</strong> versions plus performantes de Recorder sont<br />
apparues et la plus récente version Recorder 6 est basée sur une banque de données<br />
relationnelle utilisant MS-SQL server (fig. 1).<br />
Figure 2. L application Recorder 6 utilise des arbres hiérarchiques pour naviguer dans la<br />
structure complexe des données. Elle comporte des fonctionnalités pour ajouter, éditer et<br />
gérer <strong>les</strong> données à tous <strong>les</strong> niveaux. Un certain nombre de tâches, comme par exemple la<br />
pro<strong>du</strong>ction de rapports ont des assistants automatiques pour guider l utilisateur. La figure<br />
montre la fenêtre principale des observations ainsi que la fenêtre des sites d observation.<br />
Recorder 6 a été conçu à la base pour la gestion de données d observations de la<br />
faune et de la flore (fig. 2). Récemment l'accessibilité des collections biologiques a été<br />
reconnue d'importance communautaire et le Musée national d'histoire naturelle est devenu un<br />
des partenaires <strong>du</strong> projet de recherche européen BIOCASE (Biodiversity Collection Access<br />
Service for Europe http://www.biocase.org/ ; Contrat N° EVR1-CT-2001-40017). Le but de<br />
ce projet est de mettre à disposition des citoyens et de la communauté scientifique<br />
internationale la myriade de données stockées dans <strong>les</strong> collections muséa<strong>les</strong> européennes.<br />
38
Dans le cadre de ce projet, le MNHN sera le n ud national devant regrouper toutes <strong>les</strong><br />
informations concernant <strong>les</strong> collections de données sur le patrimoine naturel luxembourgeois<br />
(collections et observations) et <strong>les</strong> mettre à disposition à l aide d Internet. C'est dans cette<br />
optique que le MNHNL a développé entre 2002 et 2005 dans le cadre <strong>du</strong> projet eCulture <strong>du</strong><br />
Ministère de la Culture, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche une extension<br />
importante pour Recorder 6 afin de pouvoir intégrer <strong>les</strong> données des collections dans la<br />
banque de données (fig. 3). Cette extension a compris également le développement d'un<br />
Thesaurus permettant de gérer toutes sortes de concepts (taxonomiques, méthodologiques,<br />
géographiques )(fig. 3).<br />
Figure 3. Aperçu <strong>du</strong> mo<strong>du</strong>le des collections et <strong>du</strong> thésaurus développés pour<br />
Recorder 6 par le MNHNL.<br />
Afin de gérer <strong>les</strong> données relevant <strong>du</strong> patrimoine naturel de manière centralisée au<br />
MNHNL, la banque de données Recorder 6 a été installée sur un serveur MS-SQL. L'accès à<br />
distance par le Web est possible grâce à un accès CITRIX © . Des CD d'installation et des<br />
licences gratuites de Recorder 2002 utilisant une base de données en MS-Access ont été<br />
distribuées aux administrations et aux organisations actives dans le domaine de la<br />
conservation de la nature ainsi qu aux collaborateurs scientifiques participant de manière<br />
bénévole à l inventaire de la faune et de la flore <strong>du</strong> Luxembourg. Ces différents acteurs<br />
39
saisissent depuis plusieurs années <strong>les</strong> données qu ils relèvent sur le terrain dans leurs propres<br />
installations de Recorder 2002 pour ensuite <strong>les</strong> transférer en format xml via un modèle<br />
standard de transfert de données au MNHNL (fig. 4). Le Musée pro<strong>du</strong>it et gère <strong>les</strong> listes<br />
taxonomiques d'une manière centralisée afin de garantir la compatibilité des données et il est<br />
responsable de la distribution des nouvel<strong>les</strong> versions de Recorder aux utilisateurs externes. Ce<br />
système opérationnel permet au Musée de jouer le rôle de n ud national pour la biodiversité<br />
au Luxembourg.<br />
Figure 4. Le projet de l'Atlas des plantes menacées <strong>du</strong> Luxembourg est géré grâce à<br />
Recorder 6 au MNHNL. Les observations récentes des espèces végéta<strong>les</strong> menacées ont été<br />
faites et saisies directement dans Recorder 6 par des collaborateurs scientifiques bénévo<strong>les</strong>,<br />
des conservateurs <strong>du</strong> Musée et des bureaux d études et se basent sur un contrôle sur le terrain<br />
des indications recherchées dans des sources historiques diversifiées (Herbier LUX,<br />
publications, anciennes flores, atlas non publié de L. Reichling, ancienne base de données<br />
Luxnat ).<br />
Le projet eCulture a également permis le développement d un portail <strong>du</strong> patrimoine<br />
naturel (luxnat.mnhn.lu) qui extrait <strong>les</strong> données à partir de la base de données de Recorder et<br />
<strong>les</strong> rend publiques par l'intermédiaire <strong>du</strong> Web. Le portail affiche des données d'observations<br />
pour un taxon donné par l'intermédiaire d'une recherche texte ou à partir d'un arbre<br />
hiérarchique systématique. Il permet également de rechercher des observations liées à un nom<br />
d une commune, d une localité ou d un lieu-dit ou à une région géographique en cliquant sur<br />
une carte <strong>du</strong> Luxembourg. Il fournit des données simp<strong>les</strong> liées à une observation, montre une<br />
carte de distribution, une image et une description de chaque taxon à l internaute (fig. 5).<br />
40
Figure 5. Exemple <strong>du</strong> résultat de la recherche d une espèce donnée dans le portail <strong>du</strong><br />
patrimoine naturel luxembourgeois (luxnat.mnhn.lu). Les données de distribution, le texte et<br />
la photo proviennent de la base de données Recorder 6 <strong>du</strong> Musée.<br />
Les développements futurs de Recorder 6 concernent d'une part son<br />
internationalisation et d'autre part la création d'outils Web. Actuellement le Bundesamt für<br />
Naturschutz en Allemagne est en train de réaliser une version allemande de Recorder 6 qui va<br />
être utilisée pour la saisie des données floristiques au niveau national. Le MNHNL et le<br />
musée Naturalis de Leiden aux Pays-Bas envisagent dorénavant une collaboration pour un<br />
développement d une version internet de Recorder 6 qui va permettre la saisie rapide de<br />
données d'observations et des collections en évitant des mises à jour d'installations loca<strong>les</strong><br />
ainsi que des problèmes de sauvegarde des données des utilisateurs particuliers.<br />
41
Evaluation des biais d'échantillonnage dans <strong>les</strong> analyses des<br />
régressions/extensions dans <strong>les</strong> Atlas de répartition<br />
Marc Dufrêne<br />
Observatoire de la Faune, de la Flore et des Habitats<br />
Centre de Recherche de la Nature, des Forêts et <strong>du</strong> Bois (MRW/DGRNE)<br />
Avenue Maréchal Juin, 23<br />
B-5030 Gembloux<br />
Belgique<br />
M.Dufrene@mrw.wallonie.be<br />
http://biodiversite.wallonie.be<br />
Intro<strong>du</strong>ction<br />
Les Atlas de répartition ont pour premier objectif de faire un bilan de la répartition des<br />
espèces d un groupe biologique à un moment donné en cartographiant la localisation des<br />
indivi<strong>du</strong>s ou des populations dans des mail<strong>les</strong> géographiques plus ou moins précises. Lorsque<br />
de tel<strong>les</strong> synthèses sont réalisées à deux périodes différentes, la tentation est forte de comparer<br />
<strong>les</strong> répartitions des espèces d un atlas à l autre pour évaluer leur évolution (régression,<br />
stabilité, extension). Les Atlas sont d ailleurs un des supports essentiels de la réalisation des<br />
listes rouges d espèces menacées (IUCN, 2001) qui sont des outils importants pour identifier<br />
<strong>les</strong> priorités en matière de gestion et de conservation de la biodiversité.<br />
De tel<strong>les</strong> comparaisons dans le temps sont faci<strong>les</strong> lorsqu on dispose de jeux de<br />
données récoltées avec des protoco<strong>les</strong> similaires et la même intensité d échantillonnage locale<br />
et régionale. Hors, <strong>les</strong> Atlas sont, par nature, des ensemb<strong>les</strong> hétérogènes de données récoltées<br />
de manière différente à chaque période, avec de nombreux collaborateurs qui inventorient des<br />
zones de travail de manière indépendante et avec des techniques plus ou moins spécifiques.<br />
Les méthodes d investigation ont aussi bien évolué d une période à l autre. Les Atlas ont<br />
souvent été critiqués pour leur caractère hétérogène mais cette hétérogénéité est aussi<br />
défen<strong>du</strong>e par d autres comme un avantage car assimilée à un échantillonnage aléatoire. Il est<br />
évident qu ils recèlent de l information sur <strong>les</strong> tendances, mais il faut être prudent pour <strong>les</strong><br />
mettre en évidence.<br />
Cette contribution a pour but de montrer, avec différents exemp<strong>les</strong> tirés de l analyse<br />
de données de répartition de différents groupes biologiques, <strong>les</strong> caractéristiques majeures des<br />
échantillonnages de données biologiques dans de grandes régions. On résumera <strong>les</strong> méthodes<br />
existantes et on proposera quelques pistes simp<strong>les</strong> à prendre en compte lors de l analyse des<br />
tendances sur de tel<strong>les</strong> données pour comparer des échantillonnages réalisés à des périodes<br />
différentes. On montrera comment évaluer de manière simple l exhaustivité de<br />
l échantillonnage avec la distribution de fréquence <strong>du</strong> nombre d espèces par maille et la<br />
relation généralement étroite qui existe entre l intensité de l échantillonnage et le nombre<br />
d espèces. On vérifiera notamment si des hypothèses comme le fait que toutes <strong>les</strong> espèces<br />
sont échantillonnées de la même manière ou que l ensemble <strong>du</strong> groupe peut être considéré<br />
comme stable dans le temps sont validées. On montrera aussi comment évaluer la répartition<br />
des différences d échantillonnage dans le temps et l impact que cela peut avoir sur <strong>les</strong><br />
hypothèses de base des tests habituels.<br />
42
Les méthodes de base<br />
La Figure 1 montre la répartition de deux espèces de papillons visés par la Directive<br />
européenne CE/92/43 (Faune-Flore-Habitats). L évolution des deux espèces semble à priori<br />
être opposée, le Cuivré des marais (Lycaena dispar) ayant tendance à augmenter son aire de<br />
répartition depuis l an 2000 alors que le Cuivré de la Bistorte (Lyacena helle) semble avoir<br />
régressé. La question qui se pose rapidement est celle de la pertinence de cette tendance<br />
apparente : s agit-il d une tendance réelle ou est-ce dû à un effet d une variation géographique<br />
de l échantillonnage entre <strong>les</strong> deux périodes, tout à fait possible dans le cadre de suivi<br />
d espèces emblématiques.<br />
1995 - 2000 2001 - 2006<br />
Lycaena dispar<br />
Lycaena helle<br />
Figure 1. Carte de répartition de deux espèces de papillons diurnes dans la région continentale de la<br />
Wallonie<br />
De nombreux chercheurs ont essayé de maîtriser ce problème de la variation<br />
géographique de l échantillonnage en développant différentes approches. L une des<br />
premières, souvent attribuée en Belgique à Stroot & Depiereux (1989) mais en fait au moins<br />
déjà utilisée par Desender (1986), consiste à comparer le nombre de mail<strong>les</strong> occupées par une<br />
espèce à l ensemble des mail<strong>les</strong> occupées par <strong>les</strong> autres espèces, la mention d une espèce dans<br />
une maille étant un premier indicateur de l effort d échantillonnage.<br />
Desender (1986) propose un test de Chicarré (test de G par exemple) pour mesurer<br />
l importance de la différence entre la fréquence observée d une espèce et sa fréquence<br />
atten<strong>du</strong>e calculée en fonction des différences d échantillonnage. Si une espèce i occupe<br />
respectivement 58 et 54 carrés pour deux périodes et que l ensemble des observations des<br />
autres espèces est de 4523 et 6345 pour des périodes équivalentes, la valeur de Chicarré est de<br />
4.7, la probabilité associée est de 3% et on peut donc considérer que l espèce régresse bien.<br />
Au lieu d utiliser toutes <strong>les</strong> espèces, certains auteurs comme Maes & Van Swaay (1997)<br />
utilisent une sélection d espèces qui sont considérées comme étant de bons indicateurs de<br />
l échantillonnage (espèces répan<strong>du</strong>es qui n ont à priori pas modifié leur aire de répartition).<br />
Il est évident qu avec ces approches, le facteur clé est le rapport de la mesure<br />
d échantillonnage. S il est surévalué, on aura tendance à déclarer de nombreuses espèces<br />
comme étant en régression alors que ce n est pas vrai. S il est sous-évalué, on sera incapable<br />
de détecter des tendances qui nécessiteraient pourtant des actions sur le terrain. Par ailleurs,<br />
ces approches relatives supposent que la somme des observations <strong>du</strong> groupe d espèces est<br />
stable dans le temps. Si, par exemple, toutes <strong>les</strong> espèces régressent de la même manière,<br />
43
aucune tendance ne sera détectée. Ces approches supposent aussi que toutes <strong>les</strong> espèces ont la<br />
même probabilité de rencontre, ce qui est loin d être vrai. Il est donc crucial dans <strong>les</strong> analyses<br />
de tendance d avoir une maîtrise la plus importante possible de l échantillonnage.<br />
Comment évaluer l échantillonnage ?<br />
Une première étape est de vérifier si le nombre de visites réalisées dans des mail<strong>les</strong><br />
est un bon prédicteur <strong>du</strong> nombre d espèces. La Figure 2 montre une relation générale qui est<br />
souvent observée pour de nombreux groupes biologiques, ici <strong>les</strong> Libellu<strong>les</strong>. Cette relation<br />
peut permettre de définir des seuils à partir desquels des mail<strong>les</strong> peuvent être utilisées pour<br />
des comparaisons absolues de tendance.<br />
Nbr<br />
espèces<br />
R 2 = 75%<br />
Log(nombre de visites)<br />
Figure 2. Relation entre le nombre de visites et le nombre d espèces pour un jeu de<br />
données de Libellu<strong>les</strong><br />
Cette relation n est toutefois mise en évidence que lorsque le nombre moyen de<br />
visites par maille est relativement important et c est loin d être le cas dans des groupes<br />
biologiques où la présence mesurable des espèces sur le terrain n est pas limitée à quelques<br />
semaines (fort renouvellement des espèces au cours <strong>du</strong> temps). Dans <strong>les</strong> autres cas, seu<strong>les</strong> des<br />
méthodes indirectes peuvent être utilisées.<br />
Nombre<br />
de mail<strong>les</strong><br />
40<br />
35<br />
30<br />
25<br />
20<br />
15<br />
10<br />
5<br />
0<br />
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13<br />
Nombre<br />
de mail<strong>les</strong><br />
30<br />
25<br />
20<br />
15<br />
10<br />
5<br />
0<br />
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13<br />
44<br />
Nombre<br />
de mail<strong>les</strong><br />
Augmentation de l échantillonnage<br />
18<br />
16<br />
14<br />
12<br />
10<br />
8<br />
6<br />
4<br />
2<br />
0<br />
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13<br />
Nombre d espèces Nombre d espèces Nombre d espèces<br />
Figure 3. Evolution de la distribution de fréquence <strong>du</strong> nombre d espèces par maille en<br />
fonction de l intensité de l échantillonnage
Un élément indirect pour évaluer le caractère exhaustif de l échantillonnage est la réalisation<br />
de courbe de distribution de fréquence <strong>du</strong> nombre d espèces par maille. En effet, lorsqu on<br />
commence à faire des inventaires dans une région, on commence par avoir de nombreux<br />
carrés avec très peu d espèces. Plus l intensité des observations augmente (Figure 3), plus le<br />
nombre d espèces par carré augmente et progressivement se découvre une distribution de<br />
fréquence <strong>du</strong> nombre d espèces en forme de cloche, normale et relativement étroite quand une<br />
région est bien échantillonnée et qu elle est relativement homogène.<br />
50<br />
45<br />
40<br />
35<br />
30<br />
25<br />
20<br />
15<br />
10<br />
5<br />
0<br />
%<br />
Libellu<strong>les</strong><br />
(1x1 km)<br />
2 6 10 14 18 22 26 30 34 38 42 46 50 54<br />
45<br />
25<br />
20<br />
15<br />
10<br />
5<br />
0<br />
Flore 1979<br />
(4x4 km)<br />
100 140 180 220 260 300 340 380 420 460 500 540 580 620<br />
Nombre d espèces Nombre d espèces<br />
Figure 4. Fréquence relative <strong>du</strong> nombre d espèces par maille dans deux groupes<br />
inventoriés de manière différente<br />
Ce type de graphique montre très rapidement (Figure 4) que des groupes biologiques<br />
inventoriés sans structure d échantillonnage (Libellu<strong>les</strong>, à l échelle des carrés 1x1 km)<br />
peuvent avoir des profils bien différents de ceux pour <strong>les</strong>quels un échantillonnage<br />
systématique est en place (Flore, Atlas de 1979). Il est aussi possible de réaliser ce type de<br />
graphique par région naturelle pour vérifier si certaines régions sont plus ou moins bien<br />
échantillonnées que d autres et pour tenir compte alors des différences de richesse en espèces<br />
qui peuvent <strong>les</strong> caractériser. On peut aussi tester des effets de la taille des mail<strong>les</strong> (10, 5 ou 1<br />
km ?) pour identifier l échelle géographique à laquelle <strong>les</strong> comparaisons sont <strong>les</strong> plus<br />
pertinentes.<br />
Nbr Nbr<br />
90<br />
80<br />
70<br />
60<br />
50<br />
40<br />
30<br />
20<br />
10<br />
0<br />
0 20 40 60 80 100 120 140 160 180 200<br />
40<br />
30<br />
20<br />
10<br />
0<br />
%<br />
< 1950<br />
60<br />
50<br />
> 1950<br />
0 20 40 60 80 100 120 140 160 180 200<br />
Nombre d espèces Nombre d espèces<br />
Figure 5. Différence de fréquence <strong>du</strong> nombre d espèces par maille des données de l atlas<br />
des Coléoptères Carabides pour deux périodes<br />
Appliqué aux deux périodes qu on souhaite comparer, ce type de représentation montre aussi<br />
<strong>les</strong> différences d exhaustivité entre <strong>les</strong> deux périodes. Dans le cas illustré à la Figure 5, seule<br />
une petite partie des carrés a été bien échantillonnée (seuil fixé habituellement : > 30 espèces)
avant 1950, même si <strong>les</strong> carrés <strong>les</strong> plus riches en espèces ont été observés à cette période. Il<br />
est alors nécessaire d être prudent dans <strong>les</strong> interprétations des tendances des espèces.<br />
L effet de la probabilité de rencontre<br />
Lorsqu on travaille avec un rapport de référence commun à toutes <strong>les</strong> espèces, on<br />
suppose que <strong>les</strong> espèces ont toutes la même probabilité de rencontre quand on commence à<br />
inventorier une maille. C est évidemment loin d être le cas sur le terrain. En effet, <strong>les</strong> espèces<br />
rares à l échelle de la Région wallonne sont aussi très fréquemment plus rares à l intérieur<br />
d un carré de 10 x 10 km. Même dans <strong>les</strong> carrés où el<strong>les</strong> sont présentes, <strong>les</strong> chances de <strong>les</strong><br />
observer sont moindres que cel<strong>les</strong> d espèces largement répan<strong>du</strong>es.<br />
Nbr<br />
espèces<br />
20<br />
18<br />
Espèces très répan<strong>du</strong>es<br />
Espèces communes<br />
16<br />
14<br />
12<br />
10<br />
8<br />
6<br />
4<br />
2<br />
0<br />
Espèces rares<br />
0 50 100 150 200<br />
Nombre de visites<br />
Figure 6. Evolution <strong>du</strong> nombre d espèces d Odonates en fonction <strong>du</strong> nombre de<br />
visites réalisées dans <strong>les</strong> carrés 10 x 10 km. Les espèces sont subdivisées en 3 groupes en<br />
fonction de leur rareté à l échelle de la région.<br />
La Figure 6 montre <strong>les</strong> relations entre le nombre d espèces d Odonates observées<br />
dans des carrés de 10 x 10 km et la fréquence des visites qui y ont été effectuées depuis 1990.<br />
Si on répartit <strong>les</strong> espèces en trois groupes en fonction de leur rareté régionale (> 80 carrés : 19<br />
espèces très répan<strong>du</strong>es, entre 80 et 25 carrés : 18 espèces communes, < 25 carrés : 29 espèces<br />
rares), on observe des évolutions bien différentes qui vont d une courbe logarithmique avec<br />
une asymptote (le nombre total de 19 espèces répan<strong>du</strong>es) vers des courbes apparemment<br />
exponentiel<strong>les</strong>.<br />
46
Nbr<br />
espèces<br />
300<br />
250<br />
200<br />
150<br />
100<br />
50<br />
0<br />
Espèces répan<strong>du</strong>es : > 500 carrés ( 241)<br />
Espèces communes : 100-500 (351)<br />
Espèces rares : < 100 carrés (885)<br />
0 100 200 300 400 500 600 700<br />
Nbr espèces total<br />
Figure 7. Evolution <strong>du</strong> nombre d espèces de trois groupes d espèces de la Flore<br />
et <strong>du</strong> nombre total d espèces observées dans <strong>les</strong> carrés IFBL wallons 4 x 4 km.<br />
Des profils similaires sont observés dans d autres groupes biologiques et notamment<br />
la Flore (données de l Atlas de 1979, Van Rompaey & Delvosalle, 1979). Pour ce dernier<br />
groupe (Figure 7), comme on ne dispose pas d un indicateur de la fréquence des visites ou de<br />
l exhaustivité de l échantillonnage, on utilise le nombre total d espèces comme indicateur<br />
indirect (cfr Figure 2). Le graphique montre bien que <strong>les</strong> carrés caractérisés par un faible<br />
nombre d espèces sont dominés par <strong>les</strong> espèces répan<strong>du</strong>es. Cela peut être évidemment dû à la<br />
diversité des habitats présents dans un carré mais aussi tout simplement à l intensité des<br />
visites dans un carré.<br />
Les deux graphiques confirment bien que plus on échantillonne un carré, plus on<br />
observe d abord des espèces très répan<strong>du</strong>es, puis des espèces communes et enfin des espèces<br />
rares. Par définition, <strong>les</strong> espèces n ont donc pas la même probabilité d être observées et il faut<br />
en tenir compte dans l analyse. Il est donc alors difficile d admettre que la disparition d une<br />
espèce rare compense l observation d une espèce répan<strong>du</strong>e dans <strong>les</strong> analyses de tendance et il<br />
est nécessaire d avoir des indicateurs de l intensité de l échantillonnage associés à la récolte<br />
de données biologiques.<br />
La variabilité géographique de l échantillonnage<br />
L importance de la probabilité de rencontre est essentiellement <strong>du</strong>e au fait qu entre<br />
<strong>les</strong> larges périodes qui caractérisent généralement <strong>les</strong> Atlas, la manière dont on échantillonne<br />
<strong>les</strong> carrés ou <strong>les</strong> mail<strong>les</strong> a fort évolué. Cela est surtout vrai pour <strong>les</strong> groupes biologiques qui<br />
ne font pas l objet de prospections systématiques de mail<strong>les</strong> comme on essaye de le faire avec<br />
<strong>les</strong> Oiseaux ou la Flore. Il est par exemple évident en Wallonie que pour <strong>les</strong> papillons, <strong>les</strong><br />
Coléoptères Carabides ou <strong>les</strong> libellu<strong>les</strong>, le nombre de carrés visités après 1980 ou 1990 est<br />
beaucoup plus important qu il ne l était avant. La Figure 8 montre que si on calcule un index<br />
symétrique de rapport d échantillonnage comme (per2 - per1) / (per2 + per1) avec per1 =<br />
nombre d espèces à la période 1 (ici < 1990) et per2 = nombre d espèces à la période 2 (ici ><br />
1989), on confirme que de nombreux carrés ont été mieux échantillonnés après 1989.<br />
47
14<br />
11<br />
47<br />
34<br />
82<br />
Ratio : (per2-per1)<br />
(per1+per2)<br />
Figure 8. Variation géographique de l échantillonnage dans le temps (avant et<br />
après 1990) montrant que le nombre de carrés qui ont augmenté en nombre d espèces<br />
est beaucoup plus important (116 carrés > 0.2) que le nombre de carrés avec moins<br />
d espèces (25 carrés < -0.2).<br />
Comme ces nouveaux carrés ne sont pas nécessairement échantillonnés de manière<br />
très intense et que la probabilité de rencontre favorise largement <strong>les</strong> espèces très répan<strong>du</strong>es, il<br />
est très probable que <strong>les</strong> espèces répan<strong>du</strong>es soient largement dominantes dans <strong>les</strong> observations<br />
des périodes récentes et que donc, el<strong>les</strong> ne peuvent servir de référence ou que la somme totale<br />
des observations au cours d une période n est pas un indicateur correct pour le rapport<br />
d échantillonnage.<br />
Ce problème potentiel est sans doute moins manifeste dans <strong>les</strong> programmes<br />
d inventaires de mail<strong>les</strong> qui sont réalisés systématiquement mais à la seule condition que<br />
l intensité de l échantillonnage soit similaire au cours des deux périodes. C est en pratique<br />
rarement le cas, au moins dans certaines régions.<br />
La solution : tenir compte de l échantillonnage !<br />
Il est donc pratiquement incontournable de mesurer l intensité de l échantillonnage qui a été<br />
réalisé dans <strong>les</strong> différentes mail<strong>les</strong> au cours des différentes périodes étudiées. Cette évaluation<br />
de l échantillonnage impose que <strong>les</strong> observations soient stockées de manière assez détaillée<br />
afin d être capable d identifier la proportion des mail<strong>les</strong> géographiques qui ont été<br />
inventoriées (toponyme, polygone, site, ) ainsi que le nombre de visites effectuées ou <strong>les</strong><br />
techniques d échantillonnage réalisées (inventaire systématique, relevé partiel, observation<br />
ponctuelle). Ces informations devraient figurer dans <strong>les</strong> bases de données biologiques au<br />
même titre que <strong>les</strong> résultats de l échantillonnage, c est-à-dire la liste des espèces observées. Il<br />
est donc nécessaire que la structure des bases de données puisse gérer cette information. C est<br />
par exemple le cas de la base de données Data Fauna Flora (Barbier et al, 2000) où la<br />
structure des trois tab<strong>les</strong> principa<strong>les</strong> pour décrire des observations suppose de définir des<br />
localisations géographiques (table des stations) dans <strong>les</strong>quel<strong>les</strong> on effectue des<br />
échantillonnages (table des conditions) pour <strong>les</strong>quels enfin, on donne <strong>les</strong> listes d espèces et<br />
informations associées (table des observations).<br />
48
Dans bien des cas, on ne dispose pas de ces données descriptives de<br />
l échantillonnage dans <strong>les</strong> anciens relevés qui servent de référence actuellement, mais el<strong>les</strong><br />
sont pourtant nécessaires pour être capable dans le futur de réaliser des évaluations des<br />
tendances qui seront <strong>les</strong> plus correctes possible.<br />
Une approche espèce par espèce en évaluant l échantillonnage se dessine aussi<br />
comme étant la plus précise et la plus proche de la réalité de terrain. En pratique, l idée de<br />
base est de sélectionner toutes <strong>les</strong> mail<strong>les</strong> où une espèce a été observée et de ne garder pour<br />
<strong>les</strong> comparaisons entre périodes que <strong>les</strong> mail<strong>les</strong> qui ont été échantillonnées aux deux périodes<br />
de manière supposée similaire. Par exemple, Dufrêne et al. (2003) ont utilisé cette technique<br />
pour <strong>les</strong> papillons et <strong>les</strong> libellu<strong>les</strong> en ne prenant en compte que <strong>les</strong> visites réalisées pendant la<br />
période de vol (définie par le jeu de données) de chacune des espèces.<br />
Le tableau suivant montre <strong>les</strong> différences de résultats obtenus pour une espèce<br />
répan<strong>du</strong>e, le Paon <strong>du</strong> jour (Inachis io). Dans le cas de l approche relative, comme cette espèce<br />
pourtant très répan<strong>du</strong>e a été relativement moins observée en deuxième période (après 2000),<br />
elle est considérée comme en régression. Or, si on utilise l approche spécifique, l espèce<br />
apparaît comme stable car elle a été observée dans 167 carrés différents avant le 1 er janvier<br />
2000 et 159 carrés différents après et le nombre de carrés échantillonnés de la même manière<br />
est de 225 carrés.<br />
Période 1 Période 2 Ratio<br />
Période 1 Période 2<br />
Ratio relatif<br />
spécifique<br />
328 665<br />
167 159<br />
Inachis io<br />
Inachis io<br />
Autres<br />
espèces<br />
10685 24577 Inventoriés 225 225<br />
Chi 2 = 4.3 P() = 4%<br />
Chi<br />
Régression<br />
2 = 0.2 P() = 66%<br />
Stabilité<br />
Tableau 1. Comparaison de l approche relative comparant l évolution des nombres<br />
de carrés 1x1 km occupé par Inachis io par rapport à ceux occupés par <strong>les</strong> autres espèces de<br />
papillons et de l approche spécifique en ne sélectionnant que <strong>les</strong> carrés 1x1 où l espèce a été<br />
mentionnée aux deux périodes et qui ont été échantillonnés correctement (dans le cas présent<br />
pendant la période de vol) aux deux périodes.<br />
Il ressort aussi de ces analyses que seulement environ 50% des observations sont<br />
effectivement utilisab<strong>les</strong> car, soit très souvent on ne repasse pas aux mêmes endroits<br />
qu auparavant, soit le nombre de nouveaux carrés échantillonnés est très important. Pour<br />
maximiser la qualité des futures comparaisons, il sera nécessaire d organiser <strong>les</strong> prospections<br />
pour maximiser la couverture des populations connues des espèces <strong>les</strong> plus sensib<strong>les</strong>. C est ce<br />
qui est en cours dans <strong>les</strong> programmes d inventaire et de surveillance des papillons et des<br />
libellu<strong>les</strong> en Wallonie (http://biodiversite.wallonie.be/especes/).<br />
49
Conclusions<br />
Cette contribution n avait pour but que d essayer de révéler <strong>les</strong> biais potentiels des<br />
jeux de données utilisés lors de la définition des tendances dans la répartition d espèces et<br />
notamment dans la définition des listes rouges. On ne peut que conseiller de structurer au<br />
mieux <strong>les</strong> programmes d inventaires de terrain afin qu ils soient <strong>les</strong> plus comparab<strong>les</strong><br />
possib<strong>les</strong> dans la manière dont on a inventorié au cours des périodes étudiées. Les bases de<br />
données doivent de leur côté permettre de gérer <strong>les</strong> informations relatives à l intensité de<br />
l échantillonnage. On ne peut que se méfier des comparaisons utilisant un rapport relatif<br />
commun à toutes <strong>les</strong> espèces, surtout quand l intensité des inventaires est loin d être<br />
comparable. Si c est le cas, il y a un risque non négligeable d identifier des espèces comme<br />
étant menacées alors qu el<strong>les</strong> ne le sont pas nécessairement. Toutefois, <strong>les</strong> populations<br />
d espèces rares sont souvent <strong>les</strong> mieux surveillées et il est facile de contrôler l existence ou<br />
non de tendances à la régression par un protocole de suivi adapté.<br />
Remerciements<br />
Les données utilisées pour réaliser <strong>les</strong> différentes analyses de synthèse résultent, pour<br />
<strong>les</strong> papillons et <strong>les</strong> libellu<strong>les</strong>, de programmes d inventaire et de surveillance de l état de<br />
l environnement wallon financés par la Région wallonne. Nous profitons de cette occasion<br />
pour remercier <strong>les</strong> nombreux bénévo<strong>les</strong> qui participent aux inventaires et nous ne pouvons<br />
que <strong>les</strong> encourager à continuer à améliorer l intensité et la qualité de l échantillonnage.<br />
Références bibliographiques<br />
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Guide d'utilisation. Université de Mons-Hainaut, Mons, Belgique. 106 pp<br />
Desender, K., 1986. Distribution and ecology of Carabid beet<strong>les</strong> in Belgium (Coleoptera,<br />
Carabidae). Parts 1-4. Documents de travail, I.R.Sc.N.B., Bruxel<strong>les</strong>.<br />
Dufrêne, M., Fichefet, V. & Goffart, Ph., 2003. Red lists in Wallonia : existing tools<br />
and their limits. Report of a communication to EIS - Colloquium organized in Cardiff (UK)<br />
September 2003.<br />
IUCN, 2001. Catégories et Critères de l UICN pour la Liste Rouge : Version 3.1.<br />
Commission de la sauvegarde des espèces de l UICN. UICN, Gland, Suisse et Cambridge,<br />
Royaume-Uni. ii + 32 pp.<br />
Stroot, Ph. & Depiereux, E., 1989. Proposition d'une méthodologie pour établir des<br />
"Listes Rouges" d'Invertébrés menacés. Biological Conservation, 48 : 163-179.<br />
Maes, D. and van Swaay, Ch.A.M., 1997. A new methodology for compiling<br />
national Red Lists applied to butterflies (Lepidoptera, Rhopalocera) in Flanders (N-Belgium)<br />
and the Netherlands, Journal of Insect Conservation, 1 : 113-124.<br />
Van Rompaey, E. & Delvosalle, L. 1979. Atlas de la Flore belge et luxembourgeoise.<br />
Jardin Botanique National, Meise.<br />
50
La régression des plantes protégées de Lorraine au cours <strong>du</strong><br />
20 ème siècle établie à partir de la cartographie communale de leur<br />
distribution.<br />
Serge MULLER, Laboratoire Interactions Ecotoxicologie, Biodiversité,<br />
Ecosystèmes, UMR CNRS n° 7146, UFR Sci. F.A., Université Paul Verlaine - Metz, rue <strong>du</strong><br />
Général De<strong>les</strong>traint, 57070 METZ, muller@univ-metz.fr.<br />
Résumé<br />
L atlas de la distribution actuelle des plantes protégées de Lorraine (216 espèces) a été<br />
établi sur la base d une cartographie communale de la distribution des espèces concernées. La<br />
comparaison avec <strong>les</strong> données anciennes (en particulier cel<strong>les</strong> des différentes éditions de la<br />
flore de Godron et <strong>les</strong> catalogues floristiques de la fin <strong>du</strong> 19 ème siècle) permet d évaluer <strong>les</strong><br />
modifications de la distribution de ces espèces (progression ou régression) au cours <strong>du</strong> 20 ème<br />
siècle.<br />
La validité de ces comparaisons est toutefois conditionnée par l intensité et la qualité des<br />
prospections réalisées aussi bien au 19 ème siècle que récemment. Le bilan établi permet ainsi<br />
d identifier <strong>les</strong> espèces pour <strong>les</strong>quel<strong>les</strong> des prospections complémentaires devraient être<br />
établies en priorité pour en préciser la distribution actuelle. Par ailleurs, certaines espèces<br />
protégées n ont été distinguées des espèces voisines qu au 20 ème siècle. C est le cas de<br />
Dactylorhiza praetermissa, Epipactis leptochila, E. muelleri, Ranunculus rionii, etc. Pour ces<br />
espèces, une comparaison avec leur distribution au siècle précédent s avère donc impossible.<br />
La comparaison de la distribution à un siècle d intervalle permet ainsi de distinguer 7<br />
groupes d espèces : (1) <strong>les</strong> espèces indiquées par erreur dans le territoire lorrain, (2) cel<strong>les</strong><br />
pour <strong>les</strong>quel<strong>les</strong> <strong>les</strong> données sont insuffisantes pour établir une comparaison, (3) cel<strong>les</strong> qui sont<br />
apparues au 20 ème siècle ou sont en progression depuis un siècle, (4) <strong>les</strong> espèces à situation<br />
relativement stable, qui se sont maintenues ou n ont subi qu une faible régression, (5) cel<strong>les</strong><br />
qui ont subi une régression assez forte (disparition de ¼ à ¾ <strong>du</strong> nombre de stations), (6) cel<strong>les</strong><br />
qui ont subi une forte régression (disparition de plus de ¾ des localités), comme par exemple<br />
Carex davalliana, Gentiana cruciata, Hammarbya paludosa, Helichrysum arenarium,<br />
Pulicaria vulgaris, Sisymbrium supinum, Spiranthes spiralis, (7) cel<strong>les</strong> qui n ont plus été<br />
retrouvées à la fin <strong>du</strong> 20 ème siècle et au début <strong>du</strong> 21 ème et qui sont donc considérées comme<br />
disparues. Ainsi <strong>les</strong> 20 espèces suivantes n ont plus été retrouvées en Lorraine depuis des<br />
périodes plus ou moins anciennes : Anacamptis coriophora, Anagalis tenella, Botrychium<br />
multifi<strong>du</strong>m, Calamagrostis purpurea subsp. phragmitoides, Carex praecox, Cryptogamma<br />
crispa, Dryopteris cristata, Epipogium aphyllum, Eriophorum gracile, Herminium monorchis,<br />
Hypochaeris maculata, Isoetes echinospora, Lindernia palustris, Ludwigia palustris,<br />
Pulsatilla vernalis, Saxifraga paniculata, Scorzonera laciniata, Se<strong>du</strong>m villosum, Subularia<br />
aquatica, Viola elatior.<br />
Cette comparaison plaide ainsi pour la mise en place de plans régionaux de conservation<br />
pour <strong>les</strong> espèces <strong>les</strong> plus menacées de Lorraine et de plans d urgence de restauration pour<br />
cel<strong>les</strong> qui sont dans une situation critique.<br />
Intro<strong>du</strong>ction<br />
L érosion de la biodiversité consécutive à l action de l homme est malheureusement<br />
devenue un constat classique. En France, c est avant tout Aymonin (1972, 1975, 1980a,<br />
1980b, 1982, 1999) qui a lancé à partir des années 1970 <strong>les</strong> premiers cris d alarme sur la<br />
régression de la flore. Contrairement à des pays voisins comme l Allemagne, la Belgique ou<br />
le Royaume-Uni, l ampleur de ces régressions reste cependant peu documentée dans notre<br />
pays <strong>du</strong> fait des insuffisances de la connaissance générale de notre flore.<br />
51
Certaines synthèses ont toutefois été tentées sur la base des données disponib<strong>les</strong>, comme<br />
le livre rouge de la flore menacée de France (Olivier et al., 1995), actuellement en cours de<br />
complément et de réactualisation. Ces synthèses doivent être fondées sur des données précises<br />
relatives à l évolution de la distribution des espèces rares et menacées. Après l établissement<br />
des listes d espèces protégées, d abord au niveau national (en 1982), puis au niveau régional<br />
(à partir de 1986), des ouvrages ont été publiés en vue d une meilleure connaissance de la<br />
distribution et de l évolution des stations de ces espèces patrimonia<strong>les</strong> (Danton & Baffray,<br />
1995 pour la France métropolitaine ; Arnal, 1998 pour l Ile de France ; Ferrez et al., 2001<br />
pour la Franche-Comté, Arnal & Guittet, 2004 pour l Essonne, etc, etc).<br />
La présente étude repose sur la publication récente d une synthèse relative aux plantes<br />
protégées de Lorraine (Muller, 2006). Elle a pour objectif d analyser plus en détail l évolution<br />
de la distribution des espèces concernées au cours <strong>du</strong> 20 ème siècle.<br />
Historique de l étude et de la connaissance de la flore lorraine<br />
L étude de la flore lorraine a commencé assez tardivement, puisque très peu de données<br />
ont été publiées avant 1800. Par contre, le début <strong>du</strong> 19 ème siècle correspond à un foisonnement<br />
de travaux dans <strong>les</strong> quatre départements de notre région : flore de la Moselle de Holandre<br />
(1829), flore de la Meuse de Doisy (1835), catalogue floristiques des Vosges de Mougeot<br />
(1845) et surtout la synthèse de tous ces travaux dans la flore de la Lorraine de D.A. Godron,<br />
qui fit l objet de trois rééditions successives (1843/44, 1857, 1883), si bien qu on dispose à la<br />
fin <strong>du</strong> 19 ème siècle d une assez bonne connaissance de la flore de ce territoire.<br />
La première moitié <strong>du</strong> 20 ème siècle connut un net ralentissement des études botaniques,<br />
sans aucun doute lié à l impact humain des deux guerres mondia<strong>les</strong>, qui ont <strong>du</strong>rement touché<br />
ce territoire. Un renouveau de la botanique lorraine ne s amorce que dans la deuxième moitié<br />
<strong>du</strong> siècle, en grande partie sous l impulsion de botanistes belges, d abord J. Duvigneaud à<br />
partir des années 1950, puis G.H. Parent à partir des années 1970, qui ont tous deux apporté<br />
une contribution essentielle à la connaissance de la flore de ce territoire (Parent, 1987 ;<br />
Muller, 2006).<br />
Ce renouveau a également été encouragé par un certain nombre d impulsions publiques et<br />
privées à partir des années 1970/80 (lancement de l inventaire des ZNIEFF, inventaires<br />
coordonnés par l Institut Européen d Ecologie, travaux initiés par <strong>les</strong> Conservatoire et Jardins<br />
botaniques de Nancy, création des Parcs Naturels Régionaux de Lorraine, des Vosges <strong>du</strong><br />
Nord et des Ballons des Vosges, création <strong>du</strong> Conservatoire des Sites lorrains en 1984, etc).<br />
Les publications des listes des plantes protégées au niveau national (en 1982), puis au niveau<br />
régional en Lorraine (en 1994) ont également stimulé <strong>les</strong> prospections relatives aux espèces<br />
concernées, réalisées sous l impulsion et la coordination des Conservatoire & Jardins<br />
botaniques de Nancy et plus récemment avec le concours de l association <strong>Floraine</strong>, fondée en<br />
1997.<br />
Méthodologie : Faisabilité, intérêt et difficultés d une comparaison de la flore à un<br />
siècle d écart<br />
La plupart des données anciennes, en particulier cel<strong>les</strong> publiées dans <strong>les</strong> flores et <strong>les</strong><br />
catalogues floristiques, correspondent à l indication des territoires communaux de présence<br />
des espèces rares et remarquab<strong>les</strong>. Parfois ces indications sont précédées de celle <strong>du</strong> chef-lieu<br />
de canton ou d arrondissement (c est souvent le cas dans la flore de Godron), qu il ne faut<br />
donc pas retenir comme une localité de présence de l espèce El<strong>les</strong> peuvent aussi être<br />
accompagnées de la mention <strong>du</strong> lieu-dit. Cette mention se substitue aussi parfois à l indication<br />
52
de la commune (par exemple tourbière de Faux-en-Forêt, étang de Waldeck), mais il est en<br />
général possible de rapporter cette mention à un territoire communal identifié. Par contre<br />
l indication « Hohneck » est très ambiguë, car l espèce peut être présente sur territoire lorrain<br />
ou alsacien<br />
Il faut également prendre garde aux communes qui portent le même nom dans plusieurs<br />
départements (par exemple Sorbey en 55 et 57, Moussey en 57 et 88), ainsi qu aux communes<br />
fusionnées au cours <strong>du</strong> 20 ème siècle. Mais un minimum de perspicacité permet, dans la grande<br />
majorité des cas, de déjouer <strong>les</strong> pièges de ces données anciennes et de <strong>les</strong> rapporter sans<br />
erreurs aux territoires communaux actuels. Les inventaires récents peuvent sans difficultés<br />
être rapportés aux mêmes unités spatia<strong>les</strong>, ce qui permet d établir des comparaisons et en<br />
même temps de responsabiliser <strong>les</strong> populations et autorités communa<strong>les</strong> concernées par<br />
rapport à leur patrimoine.<br />
Toutefois la comparaison des distributions des espèces se heurte parfois à des difficultés<br />
taxonomiques ou chorologiques:<br />
- Certaines données plus ou moins anciennes (et parfois aussi récentes) se révèlent<br />
par la suite correspondre à des erreurs d identification. Ainsi la mention de Carex dioica à<br />
Montenach s est ensuite révélée être erronée.<br />
- Dans certains cas, la localisation des espèces reste trop imprécise (par exemple,<br />
massif <strong>du</strong> Hohneck) Il arrive aussi qu elle n ait n a pas été précisée pour des espèces<br />
relativement communes au 19 ème siècle (par exemple Gagea villosa).<br />
- Pour certaines espèces, <strong>les</strong> connaissances de leur distribution restaient très<br />
imprécises par suite d un manque d intérêt et de prospection dans <strong>les</strong> habitats concernés.<br />
Ainsi il a pu être montré que la forte régression supposée de Carex hordeistichos lors de la<br />
rédaction en 1995 <strong>du</strong> livre rouge de la flore menacée de France n était pas réelle, car des<br />
prospections détaillées à la fin <strong>du</strong> 20 ème siècle ont montré que l espèce restait sensiblement<br />
aussi abondante actuellement qu au 19 ème siècle (Muller et al., 1999).<br />
- Certains taxons n ont été distingués que récemment. Parmi <strong>les</strong> espèces protégées<br />
en Lorraine, c est le cas de Dactylorhiza praetermissa, Dryopteris remota, Epipactis muelleri,<br />
E. leptochila, Ranunculus rionii, pour <strong>les</strong>quels la distribution ancienne n est donc pas connue.<br />
- D autres espèces n ont été découvertes dans notre région qu au cours <strong>du</strong> 20 ème<br />
siècle. Ces espèces étaient soit méconnues antérieurement, soit el<strong>les</strong> constituent des<br />
acquisitions récentes (spontanées ou intro<strong>du</strong>ites par l homme) de notre flore.<br />
Résultats : Bilan de la comparaison<br />
La comparaison des distributions des espèces entre la fin <strong>du</strong> 19 ème et celle <strong>du</strong> 20 ème siècle<br />
permet de distinguer différents groupes d espèces :<br />
Espèces<br />
indiquées<br />
par<br />
erreur en<br />
Lorraine<br />
Données<br />
insuffisantes<br />
Espèces<br />
apparues<br />
ou en<br />
progression<br />
Espèces<br />
stab<strong>les</strong> ou<br />
en faible<br />
régression<br />
53<br />
Espèces<br />
en<br />
régression<br />
assez forte<br />
(1/4 à 3/4)<br />
Espèces<br />
en forte<br />
régression<br />
(> 3/4)<br />
Espèces<br />
disparues<br />
5 12 11 82 69 17 20<br />
1. Les espèces indiquées par erreur sur le territoire lorrain<br />
Pour quelques espèces protégées, il s est avéré que <strong>les</strong> données étaient erronées, soit au<br />
niveau de leur identification (Asplenium cuneifolium, Carex dioica, Sorbus latifolia), soit de<br />
leur présence sur le territoire lorrain (Anemone narcissiflora, Hieracium alpinum).
2. Les espèces pour <strong>les</strong>quel<strong>les</strong> <strong>les</strong> données sont insuffisantes pour établir une<br />
comparaison<br />
Ce sont principalement des taxons qui n ont été identifiés ou indivi<strong>du</strong>alisés qu au cours <strong>du</strong><br />
20 ème siècle, comme Dactylorhiza praetermissa, Dryopteris remota, Epipactis leptochila, E.<br />
muelleri, Ranunculus rionii, ainsi que ceux dont l existence en Lorraine n a été établie que<br />
récemment (Galium fleurotii, Leontodon hyoseroides, Silene vulgaris subsp. glareosa,<br />
Trichomanes speciosum, Viola canina subsp. ruppii). Ainsi, la découverte en 1915 dans <strong>les</strong><br />
Vosges de la fougère Hymenophyllum tunbrigense et la mise en évidence d une dizaine de<br />
stations entre <strong>les</strong> vallées de la Plaine et <strong>du</strong> Rabodeau peuvent tra<strong>du</strong>ire aussi bien une<br />
méconnaissance antérieure de la distribution de cette petite espèce que son extension récente<br />
(Muller et al., 2006). Il en est de même pour l Orchidée Epipactis microphylla, dont<br />
l existence n était pas signalée en Lorraine au 19 ème siècle (Parent, 1996). Sa discrétion et le<br />
petit nombre d indivi<strong>du</strong>s de chaque population peuvent expliquer qu elle n ait pas été<br />
découverte avant la fin <strong>du</strong> 20 ème siècle. Mais peut-être est-elle aussi en extension ? Pour toutes<br />
ces espèces, l absence de données sur leur distribution au cours <strong>du</strong> 19 ème siècle ne permet pas<br />
d établir de comparaison avec leur situation de la fin <strong>du</strong> 20 ème siècle.<br />
3. Les espèces apparues ou en progression depuis un siècle<br />
Il s agit d espèces pour <strong>les</strong>quel<strong>les</strong> la distribution actuelle est sensiblement plus éten<strong>du</strong>e<br />
que celle de la fin <strong>du</strong> 19 ème siècle. Ainsi Vallisneria spiralis a connu au cours <strong>du</strong> 20 ème siècle<br />
une extension de son aire de distribution dans le réseau hydrographique lorrain, en particulier<br />
dans la Moselle (Walter, 1935 ; Georges, <strong>2007</strong>). De même Armeria vulgaris n était pas connu<br />
en Lorraine au 19 ème siècle et a été observé pour la première fois au début <strong>du</strong> 20 ème siècle,<br />
d abord dans le Warndt (Krause, 1907), puis dans la région de Bitche (Walter, 1937). Sa<br />
présence résulte vraisemblablement d une intro<strong>du</strong>ction anthropique involontaire, peut-être par<br />
l intermédiaire des mouvements de troupes militaires (espèce obsidionale). Selon Parent<br />
(1990), il en est de même pour Buphtalmum salicifolium. Un cas sans doute analogue est celui<br />
de Trientalis europaea dans sa station <strong>du</strong> Reisberg, dont <strong>les</strong> modalités de croissance de<br />
l espèce ont permis d estimer son intro<strong>du</strong>ction aux environs de 1918 (Simon, 1995).<br />
La présence et l extension de la fougère Matteucia struthiopteris résultent probablement<br />
d intro<strong>du</strong>ctions d origine anthropique, vraisemblablement comme plante horticole (Dardaine<br />
& Vernier, 1994 ; Vernier, 1998). Il en est sans doute de même pour Doronicum<br />
pardalianches, au moins pour ses stations de plaine. L apparition de Bupleurum tenuissimum<br />
dans <strong>les</strong> zones halophi<strong>les</strong>, découverte au début des années 1960 (Kapp, 1961), peut par contre<br />
correspondre à un cas d ornithochorie à longue distance. C est peut-être aussi le cas pour<br />
Eleocharis multicaulis, non mentionné de la région de Bitche par Schultz (1846) et découvert<br />
sur <strong>les</strong> étangs de ce secteur au début <strong>du</strong> 20 ème siècle<br />
De même il semble que Blackstonia perfoliata, non mentionné en Lorraine avant 1970,<br />
présente une extension spontanée actuelle de son aire de distribution (Parent, 1973 ; Dardaine,<br />
2002 ; Muller, 2008, à paraître). C est également le cas de l espèce halophile Alopecurus<br />
bulbosus, qui avait été découverte en Lorraine dès 1810. Son extension dans <strong>les</strong> zones<br />
halophi<strong>les</strong> de la vallée de la Seille au cours des dernières décennies <strong>du</strong> 20 ème siècle est<br />
clairement documentée depuis la publication de référence de Duvigneaud (1967). Pour la<br />
fougère Asplenium viride, une expansion naturelle a aussi pu être mis en évidence en Lorraine<br />
dans des habitats anthropiques (Parent, 1980).<br />
Les 11 espèces mentionnées ci-dessus peuvent donc être considérées comme étant dans<br />
une situation plus favorable en Lorraine à la fin <strong>du</strong> 20 ème siècle qu à la fin <strong>du</strong> 19 ème .<br />
54
4. Les espèces relativement stab<strong>les</strong> : maintien des populations au cours <strong>du</strong> 20ème<br />
siècle ou perte de moins de ¼ des localités anciennes<br />
Pour un certain nombre d espèces protégées, la comparaison de leur distribution à la fin<br />
<strong>du</strong> 19 ème et <strong>du</strong> 20 ème siècle n a pas mis en évidence de variation sensible <strong>du</strong> nombre de<br />
localités. Cela peut être le cas d espèces rares ou peu répan<strong>du</strong>es, inféodées à des habitats bien<br />
spécifiques, comme Asplenium obovatum subsp. billotii sur rochers de grès, Potentilla<br />
crantzii (une seule station connue !) sur rocher de serpentine, Fumana procumbens sur<br />
affleurements calcaires, Luronium natans dans des lacs oligotrophes ou encore Andromeda<br />
polifolia en tourbières. Dans certains cas il s agit aussi d espèces plus répan<strong>du</strong>es, comme<br />
Aster amellus dans <strong>les</strong> pelouses calcaires, Ranunculus lingua dans <strong>les</strong> roselières, Buxus<br />
sempervirens, Gagea lutea ou Leucojum vernum en forêt.<br />
Un cas particulier est constitué par <strong>les</strong> espèces qui ont connu une régression, puis une<br />
reconstitution de leurs populations par suite de la protection de leurs habitats et/ou de la<br />
réintro<strong>du</strong>ction de l espèce. C est le cas en particulier de Calla palustris, qui avait fortement<br />
régressé en Lorraine jusqu à la moitié <strong>du</strong> 20 ème siècle, puis a restauré sa situation par suite de<br />
l intro<strong>du</strong>ction réussie de l espèce dans plusieurs sites tourbeux de la région de Gérardmer à<br />
partir de plantes de la station de Retournemer et de son extension naturelle consécutive à la<br />
protection de ses habitats dans <strong>les</strong> Vosges <strong>du</strong> Nord.<br />
5. Les espèces en régression assez forte (disparition de ¼ à ¾ des localités au cours<br />
<strong>du</strong> 20 ème siècle)<br />
Près <strong>du</strong> tiers des espèces protégées de Lorraine (soit 69 espèces) a été rangé dans cette<br />
catégorie. Il s agit généralement d espèces dont <strong>les</strong> habitats ont sensiblement régressé dans<br />
notre région. On y retrouve en premier lieu de nombreuses espèces inféodées à des zones<br />
humides, comme Carex limosa, C. pulicaris, Cicuta virosa, Dianthus superbus, Drosera<br />
longifolia, Eleocharis quinqueflora, Eriophorum latifolium, E. vaginatum, Gentiana<br />
pneumonanthe, Gratiola officinalis, Inula britannica, , Hippuris vulgaris, Juncus capitatus,<br />
Limosella aquatica, Littorella uniflora, Lycopodiella inundata, Mentha pulegium,<br />
Menyanthes trifoliata, Nymphoides peltata, Parnassia palustris, Pedicularis palustris,<br />
Samolus valerandi, Scheuchzeria palustris, Schoenus nigricans, Stellaria palustris, ,<br />
Teucrium scordium, Thelypteris palustris, Triglochin palustre, Utricularia minor, etc.<br />
Un certain nombre d espèces protégées des pelouses sèches entrent également dans cette<br />
catégorie, comme Botrychium lunaria, Crepis praemorsa, Dactylorhiza viridis, Daphne<br />
cneorum, Euphorbia seguieriana, Linum leonii, Melampyrum cristatum, Neotinea ustulata,<br />
Orchis simia, Orobanche major, Thesium linophyllon, Trifolium scabrum, etc.<br />
Plus rarement il peut s agir d espèces forestières ou inféodées aux lisières ou coupes<br />
forestières (Campanula cervicaria, Centaurea montana, Cypripedium calceolus, Genista<br />
germanica, Tephroseris helenitis).<br />
6. Les espèces en forte régression (disparition de plus des ¾ des localités au cours <strong>du</strong><br />
20 ème siècle).<br />
17 espèces ont été rattachées à ce groupe. Ce sont encore principalement des espèces de<br />
zones humides (Blysmus compressus, Carex davalliana, Gymnadenia odoratissima,<br />
Hammarbya paludosa, Pilularia globulifera, Potamogeton alpinus, Pulicaria vulgaris,<br />
Radiola linoides, Ranunculus baudotii, Ruppia maritima) ou de pelouses sèches, calcaires ou<br />
sableuses (Anemone sylvestris, Gentiana cruciata, Helichrysum arenarium, Rosa gallica,<br />
Se<strong>du</strong>m rubens, Sisymbrium supinum, Spiranthes spiralis).<br />
55
Ainsi la régression est particulièrement forte pour Gentiana cruciata, malgré des<br />
découvertes récentes (en <strong>2007</strong>) de quelques stations inédites par C. Courte dans le Barrois<br />
(Muller, 2008, à paraître), dernier bastion de l espèce en Lorraine, puisque l espèce est<br />
considérée comme disparue dans <strong>les</strong> départements de la Moselle et des Vosges.<br />
Mais la situation la plus préoccupante actuellement est certainement celle d Helichrysum<br />
arenarium, dont il ne subsiste en <strong>2007</strong> qu une seule population stérile, restreinte à une surface<br />
de 20 x 50 cm² (qui constitue la dernière station française de l espèce !), alors que cette<br />
immortelle était connue au 19 ème siècle en une dizaine de localités lorraines situées dans 4<br />
secteurs géographiques différents (Parent, 1997).<br />
7. Les espèces considérées comme disparues<br />
Ce sont des espèces qui n ont plus été revues au cours des dernières décennies, malgré des<br />
recherches spécifiques. Vingt espèces sont actuellement rangées dans cette catégorie. Ce sont<br />
des espèces aquatiques (Isoetes echinospora, Subularia aquatica), de vases d étangs en assec<br />
(Lindernia palustris, Ludwigia palustris), de marais tourbeux (Anagallis tenella, Dryopteris<br />
cristata, Eriophorum gracile, Se<strong>du</strong>m villosum), de mégaphorbiaies subalpines (Calamagrostis<br />
purpurea subsp. phragmitoides), de pelouses ou prairies relativement oligotrophes<br />
(Anacamptis coriophora Carex praecox Herminium monorchis, Viola elatior), de landes<br />
(Pulsatilla vernalis, Hypochoeris maculata, Botrychium multifi<strong>du</strong>m), d éboulis ou<br />
d affleurements rocheux (Cryptogamma crispa, Saxifraga paniculata), plus rarement de<br />
forêts (Epipogium aphyllum) et même de milieux rudéralisés (Scorzonera laciniata).<br />
Toutefois la redécouverte de certaines d entre el<strong>les</strong> reste toujours possible. En particulier,<br />
Calamagrostis phragmitoides nécessiterait d être recherché attentivement dans la station<br />
découverte au Ballon d Alsace par Philippi (1970). De même, concernant Scorzonera<br />
laciniata, il serait assez surprenant qu une espèce inféodée à des milieux rudéralisés, qui sont<br />
partout en extension, ait pu totalement disparaître<br />
En effet, plusieurs autres espèces qui étaient considérées comme disparues à la fin des<br />
années 1990 ont été redécouvertes au cours des dernières années, ainsi Hammarbya paludosa<br />
(Mathé & Pierné, 2001), Cicendia filiformis (Pax, 2002) et Spiranthes spiralis (Muller, 2005),<br />
ce qui laisse des espoirs de redécouvertes pour d autres espèces<br />
Discussion et conclusion<br />
Cette comparaison permet d établir, pour <strong>les</strong> espèces bénéficiant d une connaissance<br />
suffisante, que 47% d entre el<strong>les</strong> (groupes 3 et 4, soit 93 espèces) sont dans un état de<br />
conservation satisfaisant, alors que 53% (groupes 5, 6 et 7, soit 106 espèces) marquent une<br />
régression plus ou moins sensible. Parmi cel<strong>les</strong>-ci, la régression est très forte (plus des ¾ des<br />
stations anciennes disparues) pour 17 espèces (8,5%), alors que 20 espèces (soit 10%) sont<br />
considérées comme disparues. Des prospections complémentaires sont nécessaires pour<br />
préciser la distribution d espèces dont la distribution précise reste mal connues (Circaea<br />
alpina, Hypericum elodes, Listera cordata, Pulicaria vulgaris, Wahlenbergia hederacea, etc)<br />
et rechercher également certaines espèces considérées comme disparues (en particulier<br />
Calamagrostis purpurea subsp. phragmitoides, Scorzonera laciniata, Se<strong>du</strong>m villosum), pour<br />
<strong>les</strong>quel<strong>les</strong> subsiste un espoir de redécouverte.<br />
Ce bilan doit surtout inciter à la mise en place de plans de conservation pour <strong>les</strong> espèces<br />
<strong>les</strong> plus menacées (Anemone sylvestris, Gentiana cruciata, etc) et de plans d urgence de<br />
restauration pour <strong>les</strong> espèces en situation critique (Diphasiastrum zeilleri, Gagea pratensis,<br />
Helichrysum arenarium, etc).<br />
56
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58
Changements observés de la végétation dans <strong>les</strong> montagnes<br />
<strong>du</strong> Sud-Est de la France entre 1984 et 1998<br />
Jeanne Bodin 1,2 , Jean Luc Dupouey 1 , Vincent Badeau 1 , Catherine Cluzeau 3 ,<br />
Jacques Drapier 3 , Eric Bruno 4<br />
1. UMR Écologie et Écophysiologie Forestière, INRA-Nancy, 54280 Champenoux<br />
mail : <strong>du</strong>pouey@nancy.inra.fr<br />
2. Institut für Geobotanik, Université de Hanovre, Allemagne<br />
3. Ifn-Nancy<br />
4. Ifn-Montpellier<br />
Résumé<br />
La végétation <strong>du</strong> sous-bois forestier est un excellent bio-indicateur de<br />
l environnement, climatique en particulier. En montagne, où <strong>les</strong> gradients verticaux de<br />
température et donc de végétation sont forts, on peut espérer pouvoir suivre <strong>les</strong> effets des<br />
changements climatiques en cours grâce à un rééquilibrage rapide de la végétation avec cet<br />
environnement climatique.<br />
Nous présentons ici <strong>les</strong> résultats d une étude de rééchantillonnage de la<br />
végétation dans 11 départements <strong>du</strong> Sud-Est de la France entre 1984 et 1998, sans<br />
relocalisation des placettes anciennes. Nous étudions <strong>les</strong> modifications de l optimum<br />
d altitude des espèces. Sur 1949 taxons échantillonnés, 123 sont suffisamment fréquents, bien<br />
reconnus et présentent une réponse à l altitude en forme de courbe « en cloche » aux deux<br />
dates d échantillonnage. Pour ces 123 taxons, le déplacement moyen en 14 ans est de 20 m<br />
vers le haut. Ce résultat suggère un effet <strong>du</strong> réchauffement climatique en cours, mais d autres<br />
interprétations possib<strong>les</strong> sont discutées.<br />
Mots-clés : dynamique de la végétation ; forêt ; montagne ; altitude ; changement<br />
climatique ; Inventaire forestier national ; rééchantillonnage<br />
Abstract<br />
Forest floor vegetation is a reliable bioindicator of the environment, including<br />
of climatic conditions. In the mountains, where vertical gradients of temperature and, hence,<br />
vegetation, are strong, one can expect monitoring early impacts of climate warming because<br />
species should be able to rapidly track their climatic niche.<br />
Here we present first results from a resampling study of vegetation in<br />
southeastern part of France, between 1984 and 1998. The sampling scheme was not based on<br />
permanent plots and the two samp<strong>les</strong> from each date were independent. The number of plots<br />
observed by National forest inventory teams was high: over 15000 at each date.<br />
Consequently, we modelled species presence as a function of elevation at each of the two<br />
sampling dates and analyzed shifts of the estimated optimum of presence within 14 years.<br />
Over 1949 observed taxa, 123 only were frequent enough, reliably identified and presented a<br />
bell-shaped curve at the two sampling dates. The average elevation shift of the optimum over<br />
these 123 taxa was of 20 metres towards highest elevation. This result suggests an impact of<br />
climatic warming in the Alps on forest vegetation. However, other potential causes of this<br />
shift are discussed.<br />
Keywords : vegetation dynamics ; forest ; mountain ; elevation ; climatic change ;<br />
national forest inventory ; resampling.<br />
59
Contexte et objectifs<br />
La température moyenne annuelle de la planète a augmenté de 0,6°C au cours<br />
<strong>du</strong> XX e siècle. En France, ce réchauffement a été plus élevé, de 0,9°C pour la température<br />
moyenne et de 1,2°C pour la température minimale (Moisselin et al. 2002). Ce réchauffement<br />
s est accéléré à la fin <strong>du</strong> XX e siècle, atteignant 0,5°C/décennie entre 1970 et 2000. Peut-on<br />
déjà observer des effets de cette augmentation de la température sur l aire de répartition des<br />
espèces ? Nous avons, pour répondre à cette question, étudié <strong>les</strong> changements de la végétation<br />
forestière dans <strong>les</strong> montagnes <strong>du</strong> Sud-Est de la France, observés au travers des données de<br />
l Inventaire forestier national (Ifn).<br />
En montagne, la diminution de température est en moyenne de 1°C pour une<br />
élévation en altitude de 150 mètres, alors que, en plaine, ce même écart de température<br />
correspond à un déplacement de 150 kilomètres vers le Nord. On considère donc qu en<br />
réponse au réchauffement <strong>du</strong> climat, puisque la distance à parcourir est beaucoup plus faible,<br />
<strong>les</strong> espèces peuvent plus facilement retrouver l optimum de leur niche climatique en<br />
montagne qu en plaine. De plus, <strong>les</strong> obstac<strong>les</strong> à la migration <strong>du</strong>s à l urbanisation et aux<br />
surfaces agrico<strong>les</strong> y sont moindres.<br />
Ainsi, Grabherr et al. (1994) et Walther et al. (2005) ont observé une<br />
augmentation de la richesse en espèces des sommets alpins, liée à une immigration d espèces<br />
des étages inférieurs qu ils interprètent comme un effet <strong>du</strong> réchauffement climatique. D autre<br />
part, une remontée de la limite supérieure de la forêt est observée dans de nombreuses régions<br />
<strong>du</strong> monde. Ces observations faites dans <strong>les</strong> milieux supra-forestiers sont délicates à interpréter<br />
en raison des récentes et fortes variations de la pression de pâturage dans <strong>les</strong> mêmes zones<br />
(Didier & Brun 1998).<br />
Les forêts de montagne présentent, par rapport aux milieux supra-forestiers,<br />
l avantage d avoir été moins influencées par ces variations des pratiques de pâturage, ou <strong>du</strong><br />
moins cette influence est-elle un peu moins récente. D autre part, la sylviculture y est en<br />
moyenne moins intensive qu en plaine.<br />
La majorité des études réalisées sur <strong>les</strong> changements de végétation à moyen ou<br />
long terme l ont été par rééchantillonage de placettes permanentes. Cette méthode présente<br />
l inconvénient de confondre <strong>les</strong> effets <strong>du</strong> vieillissement des peuplements avec ceux des<br />
changements environnementaux. Nous utilisons ici une nouvelle méthode, basée sur le<br />
rééchantillonnage de placettes non permanentes. Au lieu d étudier l apparition ou la<br />
disparition d espèces dans des placettes permanentes, nous bâtissons des modè<strong>les</strong> de présence<br />
de chaque espèce en fonction de l altitude et nous testons le décalage éventuel de ces courbes<br />
de réponse au cours <strong>du</strong> temps.<br />
Echantillonnage<br />
L Ifn a réalisé deux cyc<strong>les</strong> complets de relevés phytoécologiques en 1984 et<br />
1998 dans le Sud-Est de la France. Il s agit de l année moyenne de chacun des deux cyc<strong>les</strong><br />
d inventaire, qui se sont étalés en fait de 1981 à 1989 pour le premier et de 1992 à 2004 pour<br />
le second. Les relevés sont répartis dans 11 départements (Alpes de Haute Provence, Hautes<br />
Alpes, Alpes maritimes, Ardèche, Bouches <strong>du</strong> Rhône, Drôme, Gard, Hérault, Var, Vaucluse<br />
et Corse <strong>du</strong> Nord). Ils sont distribués de 0 à 2500 mètres d altitude. L échantillonnage est<br />
stratifié, par département, en fonction <strong>du</strong> type de peuplement (essence dominante et structure)<br />
et de la classe de propriété foncière. Il est reconstruit de façon indépendante à chacun des<br />
deux inventaires.<br />
60
Les relevés contiennent des observations topographiques (pente, altitude,<br />
exposition ), pédologiques et floristiques. La végétation est inventoriée dans un cercle de 6<br />
m de rayon lors <strong>du</strong> premier inventaire et de 15 m de rayon lors <strong>du</strong> second. La liste des espèces<br />
ligneuses et herbacées (bryophytes terrico<strong>les</strong> et ptéridophytes comprises) présentes dans la<br />
placette est dressée, chaque taxon étant affecté d une note de dominance dérivée <strong>du</strong><br />
coefficient de Braun-Blanquet (Cluzeau & Virion, ce volume).<br />
Nous disposons au total de 15754 relevés pour le premier inventaire floristique<br />
et de 15231 pour le second. Le nombre moyen d espèces par relevé est de 16,6 en 1984, pour<br />
25,3 en 1998. On comptabilise au total 1949 taxons sur <strong>les</strong> deux cyc<strong>les</strong>, dont 1139 taxons<br />
communs aux deux cyc<strong>les</strong>. Nous disposons enfin d une note de fiabilité de la détermination<br />
<strong>du</strong> taxon estimée par <strong>les</strong> observateurs de l IFN.<br />
Analyse des données<br />
La présence des espèces est modélisée par régression logistique, en<br />
intro<strong>du</strong>isant comme variab<strong>les</strong> explicatives l altitude et son carré :<br />
logit (p) = log[p/(1-p)] = a*altitude 2 + b*altitude + c + (1)<br />
avec p : probabilité de présence de l espèce,<br />
a, b et c : paramètres <strong>du</strong> modèle,<br />
: erreur.<br />
La position altitudinale de l optimum de l espèce est estimée à partir des paramètres<br />
<strong>du</strong> modèle :<br />
optimum = -b/2a (2)<br />
Le modèle (1) est ajusté indépendamment pour chaque espèce et pour chacun<br />
des deux cyc<strong>les</strong> d inventaire. Seu<strong>les</strong> <strong>les</strong> espèces présentant un nombre d occurrences<br />
supérieur à 50 à chaque date ont été retenues dans cette analyse. Cel<strong>les</strong> pour <strong>les</strong>quel<strong>les</strong> le<br />
paramètre a <strong>du</strong> modèle (1) est positif et significativement différent de zéro présentent une<br />
réponse de type « courbe en cloche » à l altitude. Parmi ces espèces, nous ne conservons que<br />
cel<strong>les</strong> pour <strong>les</strong>quel<strong>les</strong> l optimum d altitude estimé par le modèle se situe dans la gamme des<br />
altitudes échantillonnées (0 à 2200 m). Lorsque c est le cas aux deux dates, on peut alors<br />
calculer le déplacement de leur optimum entre <strong>les</strong> deux cyc<strong>les</strong> d inventaire. Nous avons<br />
finalement testé, par un test t apparié de comparaison de moyenne, si le déplacement moyen<br />
de l ensemble de ces espèces était significativement différent de zéro, indiquant alors un<br />
mouvement altitudinal global de la végétation. Nous n avons retenu, pour ce test, que <strong>les</strong><br />
espèces reconnues avec une fiabilité maximale par <strong>les</strong> équipes de l Ifn.<br />
Résultats<br />
Le tableau I synthétise <strong>les</strong> résultats obtenus :<br />
Sur <strong>les</strong> 1949 taxons observés aux deux échantillonnages, seuls 386 présentent une<br />
fréquence de présence supérieure à 50 à chacune des deux dates d inventaire.<br />
Parmi ceux-ci, 243 montrent une distribution « en cloche » en fonction de l altitude,<br />
mais seuls 157 présentent un optimum situé entre 0 et 2200 m.<br />
On ne conserve enfin que <strong>les</strong> 123 taxons ayant une très bonne fiabilité de<br />
reconnaissance par <strong>les</strong> équipes de terrain.<br />
61
Sur ces 123 taxons retenus, 79 présentent un décalage positif de leur optimum,<br />
c est-à-dire une montée en altitude (fig. 1a), contre 44 seulement présentant un décalage<br />
négatif (fig. 1b). La valeur moyenne des déplacements de ces 123 taxons est de +20,0 mètres<br />
(+17,8 mètres en valeur médiane). Cette valeur est significativement différente de 0 selon un<br />
test t apparié. En considérant que le gradient de température moyenne est de -0,56°C/100 m,<br />
une remontée de 17,8 mètres en 14 ans équivaut, dans le cadre hypothétique d un<br />
rééquilibrage parfait de l optimum de la niche des espèces avec leur climat, à un changement<br />
de température de +0,07°C par décennie.<br />
Figure 1 : Distribution observée de la fréquence de deux espèces par classes<br />
d altitudes (vert : 1984 ; bleu : 1998), et ajustement d un modèle de régression logistique<br />
(noir : 1984 ; rouge : 1998). a) exemple de déplacement vers le haut : Corylus avellana. b)<br />
exemple de déplacement vers le bas : Mercurialis perennis.<br />
Discussion<br />
Méthodes<br />
Le mode de rééchantillonnage sur placettes non permanentes a pro<strong>du</strong>it des<br />
résultats utilisab<strong>les</strong> pour l étude des modifications de la végétation sur 14 ans. La très forte<br />
intensité d échantillonnage (plus de 15000 relevés à chaque cycle, soit environ un relevé pour<br />
130 ha de forêt à chaque date) permet d estimer la courbe de réponse des espèces à l altitude,<br />
et en particulier la position de son optimum, avec une bonne précision. On peut ainsi détecter<br />
des changements de faible amplitude et mettre en évidence des évolutions de la végétation<br />
malgré la courte période de temps séparant <strong>les</strong> deux échantillonnages.<br />
62
Nombre total 1949 taxons<br />
Occurrence > 50 à chaque date 386 taxons<br />
Courbe « en cloche »<br />
et optimum entre 0 et 2200 m<br />
63<br />
157 taxons<br />
Forte fiabilité de reconnaissance 123 taxons<br />
Augmentation / diminution d altitude 79 / 44 taxons<br />
Valeur médiane des déplacements + 17,8 m<br />
Déplacement en équivalent<br />
température<br />
0,08°C / décennie<br />
Tableau I : Résultats de l analyse par régression logistique <strong>du</strong> déplacement altitudinal<br />
des taxons dans le Sud-Est de la France entre 1984 et 1998.<br />
Il faut noter que le nombre moyen d espèces par relevé a fortement augmenté<br />
entre <strong>les</strong> deux inventaires en raison d une surface d observation plus importante et d une<br />
meilleure exhaustivité <strong>du</strong> relevé au deuxième cycle d échantillonnage. Or, ce nombre moyen<br />
d espèces a augmenté plus fortement dans <strong>les</strong> altitudes élevées qu en plaine et collines : audessus<br />
de 1000 m d altitude, il passe de 16,7 à 27,3 espèces par relevé entre <strong>les</strong> deux dates<br />
d échantillonnage, alors qu il passe de 16,6 à 24,7 espèces par relevé en dessous de cette<br />
altitude. Les augmentations d altitude que nous avons observées sont donc en partie liées à cet<br />
accroissement différentiel de la richesse spécifique entre haute et basse altitude. Le rôle exact<br />
de ce possible biais reste à quantifier.<br />
Résultats<br />
Un nombre significatif d espèces, soit plus de deux tiers des espèces retenues<br />
dans l analyse, montre une augmentation de leur optimum. La valeur médiane de la remontée<br />
est de 18 mètres, correspondant à un réchauffement de 0,07°C par décennie. Cette valeur est<br />
légèrement en deçà <strong>du</strong> réchauffement moyen mesuré en France au cours de l ensemble <strong>du</strong><br />
XX ème siècle qui est de presque 0,1°C par décennie. Elle est largement inférieure aux valeurs<br />
observées depuis 1970, qui atteignent 0,5°C par décennie. Plusieurs facteurs peuvent<br />
expliquer ce retard entre le réchauffement réellement mesuré et <strong>les</strong> déplacements observés de<br />
la végétation. De nombreuses espèces forestières sont connues pour leur très faible pouvoir de<br />
dispersion (Dupouey et al. 2002). En montagne, la remontée en altitude des graines pourrait<br />
être plus difficile que leur descente. Pour de nombreuses espèces, <strong>les</strong> milieux forestiers<br />
fermés sont peu favorab<strong>les</strong> à la colonisation et seule l ouverture <strong>du</strong> couvert suite à une<br />
perturbation peut permettre leur installation.<br />
Notre modèle n intègre que l altitude. Or, d autres facteurs environnementaux<br />
pourraient venir modifier la relation que nous avons observée entre la présence des espèces et<br />
l altitude, au premier rang desquels l exposition. Il faut donc soit s assurer que ces facteurs<br />
n ont pas varié dans l ensemble de l échantillon entre <strong>les</strong> deux cyc<strong>les</strong> d inventaire, soit <strong>les</strong><br />
intégrer dans notre modèle de présence des espèces. Une analyse de la distribution aux deux
dates des expositions mesurées sur le terrain n indique pas de variation nette. Mais d autres<br />
modifications de l environnement forestier sont intervenues au cours de la seconde moitié <strong>du</strong><br />
XX ème siècle. Ainsi, <strong>les</strong> surfaces libérées par l abandon <strong>du</strong> pâturage et la déprise agricole en<br />
montagne ont permis la progression de la forêt, en particulier dans le Sud de la France (Saïd et<br />
al. 2003). Le second cycle d inventaire contient donc probablement plus de forêts récentes<br />
que le premier. D autre part, on constate une eutrophisation des sols forestiers entraînée par<br />
<strong>les</strong> dépôts d azote atmosphériques, menant également à une modification des communautés<br />
végéta<strong>les</strong> par l augmentation de la fréquence de présence des espèces nitrophi<strong>les</strong> (Thimonier<br />
1994). L analyse des caractéristiques écologiques et fonctionnel<strong>les</strong> des espèces pour<br />
<strong>les</strong>quel<strong>les</strong> nous avons observé une variation d altitude devrait permettre de mieux interpréter<br />
<strong>les</strong> causes des changements observés.<br />
En conclusion, si nous observons bien une remontée globale de la végétation,<br />
celle-ci ne peut pas être reliée de façon non ambiguë au réchauffement climatique. En effet,<br />
<strong>les</strong> échantillons que nous avons étudiés présentent des variations entre <strong>les</strong> deux dates, soit en<br />
raison des méthodes d échantillonnage, soit en raison d autres changements de<br />
l environnement que le seul réchauffement climatique, qui pourraient venir interagir avec<br />
l effet de l altitude.<br />
Références<br />
Cluzeau C., Virion R., <strong>2007</strong> ; L Inventaire forestier national : un outil pour l inventaire et la<br />
cartographie de la végétation. Actes <strong>du</strong> <strong>Colloque</strong> Géoflore, Nancy, 10-12/5/07, ce volume.<br />
Didier L., Brun J.-J., 1998 ; Limite supraforestière et changements environnementaux : pour<br />
une approche pluriscalaire et spatialisée des écosystèmes d altitudes. Géographie physique<br />
et quaternaire, 52, 1-9.<br />
Dupouey JL., Sciama D., Koerner W., Dambrine E. et Rameau JC., 2002 ; La végétation des<br />
forêts anciennes, Revue Forestière Française, 54 (6), p. 521-531.<br />
Grabherr G., Gottfried M., Pauli H., 1994 ; Climate effects on mountain plants. Nature, 369,<br />
448.<br />
Moisselin J.-M., Schneider M., Canellas C., Mestre O., 2002 ; Les changements climatiques<br />
en France au XX ème siècle. Étude des longues séries homogénéisées de données de<br />
température et de précipitations. La météorologie, 38, 45-56.<br />
Said S., Rameau J., Brun J.-J., 2003 ; Evolution et diversité végéta<strong>les</strong> en Corse suite à la<br />
déprise agricole. Revue Forestière Française, 55 (4), 309-322.<br />
Thimonier A., 1994 ; Changements de la végétation et des sols en forêt tempérée européenne<br />
au cours de la période 1970-1990. Rôle possible des apports atmosphériques. Thèse de<br />
Doctorat, Paris XI-Orsay.<br />
Walther, G.-R., Beissner S. & Burga C., 2005 ; Trends in the upward shift of alpine plants.<br />
Journal of Vegetation Science, 16, 541-548.<br />
64
Les conservatoires botaniques nationaux : une répartition<br />
interrégionale pour une connaissance nationale<br />
D. Malengreau, fédération des Conservatoires botaniques nationaux<br />
Avec la collaboration de L. Poncet, CBN <strong>du</strong> Bassin Parisien<br />
Depuis 1990, le réseau des Conservatoires botaniques nationaux (CBN)<br />
couvre progressivement le territoire national, dans le cadre de missions redéfinies par<br />
le Code de l environnement en 2004 et d un agrément ministériel. L originalité de<br />
l action des CBN en matière de connaissance et de conservation de la flore et des<br />
habitats, ainsi que la responsabilité que leur donne leur agrément en matière d appui<br />
technique et d expertise, <strong>les</strong> con<strong>du</strong>it à assurer, dans la mesure <strong>du</strong> possible, le transfert<br />
de ces connaissances vers tous ceux qui interviennent dans la gestion <strong>du</strong> milieu naturel<br />
et l aménagement <strong>du</strong> territoire. Les orientations et perspectives des CBN en matière<br />
de connaissance sont précisées et un état de la connaissance rassemblée par <strong>les</strong> CBN<br />
est présenté (plus de 15 millions de données de répartition sur la flore métropolitaine).<br />
Les Conservatoires botaniques nationaux collectent, valident et gèrent<br />
l information sur la flore et <strong>les</strong> habitats dans des bases de données établies à l échelle<br />
de leur territoire d agrément et doivent cependant veiller à l interopérabilité de leurs<br />
bases de données et se doter d outils permettant de regrouper l information pertinente<br />
pour répondre aux besoins nécessitant une approche nationale.<br />
Devenus des acteurs incontournab<strong>les</strong> de la connaissance de la flore en France<br />
et en capacité d intervenir à toutes <strong>les</strong> échel<strong>les</strong> de connaissances (locale,<br />
départementale ou régionale, nationale), <strong>les</strong> CBN se coordonnent au niveau national<br />
dans le cadre de leur Fédération qui remplit des missions spécifiques, comme par<br />
exemple pour le Système D information sur la nature et <strong>les</strong> paysages, développé par le<br />
Ministère de l écologie et <strong>du</strong> développement <strong>du</strong>rable.<br />
65
Prédiction spatiale des aires de distribution d'habitats naturels<br />
forestiers : <strong>du</strong> domaine biogéographique à la gestion des Zones<br />
Spécia<strong>les</strong> de Conservation<br />
Damien MARAGE 1 , Benoît RENAUX 1<br />
1 AgroParisTech, UMR1092 Laboratoire d'étude des Ressources Forêt-Bois<br />
(LERFoB), 14 rue Girardet, CS 4216 F-54000 Nancy<br />
Auteur correspondant : marage@engref.fr<br />
Thématique : exploration spatiale des données<br />
Résumé<br />
La modélisation spatiale des communautés végéta<strong>les</strong> est un enjeu majeur pour<br />
mesurer à la fois l'impact des changements globaux et donner des indications pour <strong>les</strong><br />
gestionnaires d'espaces naturels. Ces derniers et <strong>les</strong> décideurs sont en effet de plus en plus<br />
demandeur de données et de modè<strong>les</strong> spatialement explicites sur de vastes espaces<br />
géographiques et, qui plus est, à haute résolution.<br />
Matériel et méthodes. La plupart des modè<strong>les</strong> de prédiction spatiale de communautés<br />
végéta<strong>les</strong> à l'échelle de domaine biogéographique n'ont pas un niveau de précision à l'échelle<br />
locale satisfaisant pour <strong>les</strong> gestionnaires car ils n'intègrent pas des gradients écologiques<br />
directs comme des variab<strong>les</strong> édaphiques. Nous avons modélisé, sur l'ensemble <strong>du</strong> territoire<br />
national, six habitats forestiers d'intérêt communautaire (sensu Directive 92/43 "Habitat,<br />
Faune, Flore"), au pas de 50 m. Pour calibrer ces modè<strong>les</strong>, nous avons utilisé 2108 relevés<br />
extraits de la base de données ECOPLANT. Des régressions logistiques pas à pas ont été<br />
utilisées pour modéliser la réponse de chaque habitat forestier en fonction de variab<strong>les</strong><br />
climatiques et édaphiques. Des statistiques de performance classique (courbe ROC, AUC et<br />
matrice de confusion) ont été utilisées pour évaluer ces six modè<strong>les</strong>. 2091 relevés de la base<br />
de données SOPHY ont ensuite été employé pour valider ces modè<strong>les</strong>. A l'échelle de trois<br />
futures Zones Spéciale de Conservation, la concordance spatiale a été calculée entre <strong>les</strong><br />
prédictions et <strong>les</strong> valeurs observées par des cartographies de terrain.<br />
Résultats. De très bonnes qualités de prédiction sont obtenues pour quatre des six<br />
habitats forestiers modélisés (D² > 0.40, AUC > 0.90, taux de succès > 90%). Tous <strong>les</strong><br />
modè<strong>les</strong> sont améliorés en prenant en compte <strong>les</strong> variab<strong>les</strong> édaphiques (pH eau et rapport<br />
C/N). Les mêmes qualités de prédiction ont été obtenues avec <strong>les</strong> données de validation issues<br />
de la base de données SOPHY. Le niveau de concordance spatiale au niveau local est<br />
comparable à celui obtenu par <strong>les</strong> cartographies de terrain.<br />
Synthèse et applications. Nos recherches s'inscrivent dans la démarche d'évaluation<br />
de l'état de conservation des habitats naturels puisque nous avons accès à la fois à l'aire de<br />
distribution potentielle et aux surfaces correspondantes, ceci pour une résolution spatiale<br />
concordant avec <strong>les</strong> attentes des gestionnaires. Notre démarche méthodologique peut<br />
s'appliquer à d'autres types d'habitats naturels non-obstant <strong>les</strong> limitations liées au nombre<br />
d'occurrences dans <strong>les</strong> bases de données disponib<strong>les</strong>. Nos travaux permettent également de<br />
connaître, à la fois au sein et en dehors <strong>du</strong> réseau Natura 2000, la distribution des habitats<br />
naturels. Ceci a évidemment des implications importantes dans le cadre des changements<br />
environnementaux à venir. Notre étude apparaît alors comme un outil efficace pour asseoir la<br />
fonctionnalité de réseaux d'espaces protégés car <strong>les</strong> futurs changements environnementaux<br />
vont sûrement réorganiser et impacter <strong>les</strong> écosystèmes continentaux terrestres à toutes <strong>les</strong><br />
échel<strong>les</strong>.<br />
Mots-clés: Aire de répartition, carte de distribution potentielle, France, habitat<br />
naturel, hêtre, Natura 2000, niche écologique, variab<strong>les</strong> édaphiques, S.I.G<br />
Nomenclature phytosociologique: Bardat et al. 2004 [2]<br />
66
Intro<strong>du</strong>ction<br />
La modélisation spatiale des communautés végéta<strong>les</strong> est un enjeu majeur pour<br />
mesurer à la fois l'impact des changements globaux [34, 35], et donner des indications pour<br />
<strong>les</strong> gestionnaires d'espaces naturels [8, 20]. Ces derniers et <strong>les</strong> décideurs sont en effet de plus<br />
en plus demandeurs de données et de modè<strong>les</strong> spatialement explicites sur de vastes espaces<br />
géographiques et, qui plus est, à haute résolution [21].<br />
La volonté politique de créer [1], dans l'Union Européenne, un vaste réseau<br />
d espaces naturels (Réseau Natura 2000), nécessite de cartographier ces espaces, puis de<br />
disposer d outils capab<strong>les</strong> d'en suivre l évolution et d'en apprécier le bon état de conservation.<br />
La cartographie des habitats naturels est donc le point de passage obligé avant toutes actions<br />
concertées de gestion. Malgré <strong>les</strong> efforts d harmonisation et de vulgarisation pour la<br />
description des habitats et leurs cartographies [30, 31], ce travail reste un exercice difficile et<br />
coûteux.<br />
Les travaux sur la modélisation statique de la distribution des communautés<br />
végéta<strong>les</strong> tentent de relier leur aire de distribution à des variab<strong>les</strong> environnementa<strong>les</strong> qui<br />
définissent au mieux la niche écologique de ces communautés. De nombreux travaux sur ce<br />
sujet existent [3, 7, 14, 17, 19, 21, 22, 32, 37]. Beaucoup de travaux ont été axés sur la<br />
prédiction des communautés végéta<strong>les</strong> alpines [5, 6, 11, 13, 28, 29, 37]. Mais peu d études ont<br />
été con<strong>du</strong>ites spécifiquement sur des habitats forestiers inscrits à l'annexe I de la Directive<br />
92/43 "Habitat, Faune, Flore")[18, 23, 26].<br />
La plupart des modè<strong>les</strong> de prédiction spatiale de communautés végéta<strong>les</strong>, à l'échelle<br />
de domaine biogéographique, n'ont pas un niveau de précision à l'échelle locale satisfaisant<br />
pour <strong>les</strong> gestionnaires car ils n'intègrent pas de gradients écologiques directs comme des<br />
variab<strong>les</strong> édaphiques.<br />
Notre objectif est de modéliser, au pas de 50 m, sur l'ensemble <strong>du</strong> territoire national<br />
français, six habitats forestiers d'intérêt communautaire à l'aide de variab<strong>les</strong> climatiques,<br />
topographiques et édaphiques géoréférencées. Nous testerons sur de futures Zones Spécia<strong>les</strong><br />
de Conservation (ZSC) la qualité de prédiction de nos modè<strong>les</strong> à l'échelle locale.<br />
Matériels et méthodes<br />
Jeux de données<br />
Pour calibrer <strong>les</strong> modè<strong>les</strong>, nous avons utilisé 2108 relevés extraits de la base de<br />
données EcoPlant [12]. Pour la validation, nous avons extrait 2091 relevés forestiers de la<br />
base de données SOPHY [4].<br />
Habitats d'intérêt communautaire modélisés<br />
Six habitats forestiers d'intérêt communautaire, relevant des forêts <strong>du</strong> Fagetalia<br />
sylvaticae, ont été modélisés. Le tableau I indique le nom <strong>du</strong> syntaxon, le code EUR 25 [10]<br />
et l'occurrence de ces habitats dans <strong>les</strong> deux jeux de données. Les cahiers d'habitats forestiers<br />
donnent une description détaillée de ces habitats [30].<br />
Prédicteurs spatialisés<br />
La résolution spatiale des modè<strong>les</strong> est de 50 m, car toutes <strong>les</strong> sources de données<br />
géoréferencées ont été conditionnées par la résolution <strong>du</strong> Modèle Numérique de Terrain<br />
(MNT) issu de la BD Alti de l'IGN. L'ensemble des prédicteurs géoréférencés a été mis au<br />
format Grid et incorporé sous ArcInfo 8.3. La description de ces prédicteurs est donnée dans<br />
le tableau II.<br />
67
Tableau I. Hêtraies d'intérêt communautaire modélisées ; syntaxonomie (Bardat et<br />
al. 2004), code EUR 25, prévalence (P) dans <strong>les</strong> jeux de données.<br />
Syntaxonomie Code EUR 25 Données de calibration Données de validation<br />
- n° de (EcoPlant)<br />
(SOPHY)<br />
l'habitat élémentaire<br />
(n = 2108)<br />
(n = 2091)<br />
N P N P<br />
Carpinion betuli<br />
Endymio-Fagetum<br />
9130-3 56 0.026<br />
39 0.018<br />
Galio odorati-Fagetum<br />
9130-5 175 0.083<br />
18 0.008<br />
Poo chaixii-Fagetum<br />
Fagion sylvaticae<br />
9130-6 214 0.101<br />
34 0.016<br />
Hordelymo-Fagetum<br />
9130-9 52 0.024<br />
35 0.016<br />
Festuco altissimae-<br />
Abietetum<br />
Luzulo-Fagion<br />
9130-10 99 0.046<br />
61 0.029<br />
sylvaticae<br />
Luzulo luzuloidis-<br />
Fagetum<br />
9110-(2,3,4) 100 0.047<br />
44 0.021<br />
Tableau II. Prédicteurs environnementaux spatialisés utilisés pour la modélisation<br />
des six habitats forestiers d'intérêt communautaire.<br />
Nom Définition<br />
Unité<br />
Climat<br />
SUMT Somme des températures<br />
mensuel<strong>les</strong> moyennes °C<br />
AMPLIT Amplitude thermique annuelle<br />
MGSR Radiations solaires moyennes<br />
sur la saison de végétation<br />
(Mars-Octobre)<br />
WIPREC Précipitations hiverna<strong>les</strong><br />
moyennes<br />
février)<br />
(décembre -<br />
WB6 Bilan hydrique climatique de<br />
°C<br />
j m -<br />
2 jour _1<br />
mm<br />
juin: P - ETP* mm<br />
Topographie<br />
Pente Pente dérivée <strong>du</strong> MNT au pas<br />
de 50 m<br />
Mini Moyenne Maxi Source<br />
59.9<br />
68<br />
-<br />
125.1 217.6 Météo-France<br />
Modèle<br />
AURELHY<br />
88.9 15.4 20.7 Météo-France<br />
Modèle<br />
AURELHY<br />
12298.6 49319.2 71850.2 ENGREF<br />
113 81.4 266.6 Méteo<br />
Modèle<br />
France -<br />
-138.2 -52.4 246.0<br />
AURELHY<br />
ENGREF<br />
0 5.2 78.9 IGN- BD Alti<br />
Altitude Altitude au-dessus <strong>du</strong> niveau<br />
de la mer issue <strong>du</strong> MNT au<br />
pas de 50 m<br />
0 304.1 4799 IGN-BD Alti<br />
Sol<br />
(horizon A)<br />
pH pH (H2O) 3.3 5.1 8.2 ENGREF - IFN<br />
CN C/N ratio 7.9 17 45.8 ENGREF-IFN<br />
* La méthode retenue pour le calcul de l'ETP est celle de Turc (1961) [36]
Modélisation statistique<br />
Calibration des modè<strong>les</strong><br />
L ajustement des modè<strong>les</strong> est caractérisé par une mesure de la ré<strong>du</strong>ction de la<br />
variance. Dans le cadre des modè<strong>les</strong> généralisés, l estimation se fait par la méthode <strong>du</strong><br />
maximum de vraisemblance (Maximum-Likelihood Estimation (MLE) [16]. Dans ce cas,<br />
l ajustement se caractérise par la mesure de la ré<strong>du</strong>ction de la déviance, exprimée à travers le<br />
D². Un D² ajusté a été également calculé. Il tient compte <strong>du</strong> nombre d observations (n) et <strong>du</strong><br />
nombre de prédicteurs (p). C est une mesure adéquate pour comparer des modè<strong>les</strong> qui<br />
incluent différentes combinaisons de variab<strong>les</strong>, comme dans notre cas. Il est de la forme [15]:<br />
<br />
2<br />
adjusted D <br />
1<br />
( n 1)<br />
/( n p)<br />
1<br />
D²<br />
Pour l ensemble des régressions logistiques multip<strong>les</strong> pas à pas, le critère d Akaiké<br />
(AIC) a été retenu pour sélectionner <strong>les</strong> modè<strong>les</strong> [25].<br />
L'autocorrélation spatiale peut augmenter artificiellement la qualité de prédiction des<br />
modè<strong>les</strong> lorsque <strong>les</strong> données de calibration et de validation sont trop proches <strong>les</strong> unes des<br />
autres [9]. Afin d'éviter ce problème, nous avons donc sélectionné <strong>les</strong> relevés de calibration de<br />
manière à ce qu'ils soient géographiquement distants d'au moins 500 m. Lorsque ce n'était pas<br />
le cas, la règle de décision a été de retenir ces relevés, si et seulement si, la différence<br />
d'altitude était supérieure à 50 m, l'exposition supérieure à 90 ° et la valeur de pH d'au moins<br />
une unité.<br />
Validation des modè<strong>les</strong><br />
La validation interne des modè<strong>les</strong> est basée sur <strong>les</strong> statistiques de performance<br />
classique utilisées dans le cadre des modè<strong>les</strong> de prédiction d'absence/présence [24]. A partir<br />
d'une matrice de confusion, l Area Under the Curve (AUC) dérivée de la méthode ROC, le<br />
taux de succès (S), la sensibilité (Sn) et la spécificité (Sp) des modè<strong>les</strong> ont été calculés.<br />
L interprétation de ces statistiques suit <strong>les</strong> recommandations de Manel et al. (2001)[24].<br />
La constitution des cartes de distribution potentielle des communautés repose sur une<br />
méthodologie déjà éprouvée par Guisan et al. (2000) [15]. Les cartes de probabilités sont<br />
basées sur le seuil de probabilité optimisé. Celui-ci correspond au point de la courbe ROC où<br />
la somme de sensitivité et de la spécificité <strong>du</strong> modèle est maximale [24].<br />
Les modè<strong>les</strong> sont ensuite testés par comparaison des cartes de prédiction avec des<br />
cartes indépendantes, réalisées sur trois sites Natura 2000 lorrains. Le taux de succès est<br />
calculé d après la table de contingence issue de la comparaison entre carte observée et<br />
modélisée. Cette statistique est maintenant largement employée pour évaluer la concordance<br />
spatiale [5, 14, 19, 22, 27, 37].<br />
Résultats et discussion<br />
De très bonnes qualités de prédiction sont obtenues pour quatre des six habitats<br />
forestiers modélisés (D² > 0.40, AUC > 0.90, taux de succès > 90%) (Tab. III). Il s'agit<br />
respectivement des hêtraies atlantiques à Jacinthe (9130-3), des hêtraies montagnardes à Orge<br />
d'Europe (9130-9), des Hêtraies-sapinières à Fétuque (9130-10) et des hêtraies montagnardes<br />
à Luzule blanchâtre (9110-(2,3,4)). La qualité de prédiction de tous <strong>les</strong> modè<strong>les</strong> est améliorée<br />
en prenant en compte <strong>les</strong> variab<strong>les</strong> édaphiques spatialisées (pH eau et rapport C/N).<br />
Les modè<strong>les</strong> ajustés pour <strong>les</strong> hêtraies collinéennes continenta<strong>les</strong> à Aspérule odorante<br />
(9130-5) et cel<strong>les</strong> à Pâturin de Chaix (9130-6) sont de moins bonne qualité que <strong>les</strong> précédents<br />
(Tab. III).<br />
Les mêmes ordres de grandeur en termes de qualité de prédiction ont été obtenus<br />
avec <strong>les</strong> données de validation issues de la base de données SOPHY (Tab. III).<br />
69
La figure 1 représente pour chacun des habitats modélisés, la carte de répartition "à<br />
dire d'expert" et la carte de présence/absence, au seuil optimal de la courbe ROC, issue des<br />
prédictions des différents modè<strong>les</strong>. A l'échelle <strong>du</strong> territoire national, nous observons<br />
globalement une bonne adéquation entre <strong>les</strong> cartes de répartition "à dire d'expert" et <strong>les</strong><br />
modè<strong>les</strong> de prédiction obtenus. Concernant l'Endymio-Fagetum, nous constatons que notre<br />
modèle le prédit plus à l'Est que ne le prévoit "l'expert"(Fig. 1 a et a'). Nous constatons que<br />
notre modèle repro<strong>du</strong>it assez fidèlement l'aire de répartition de Endymion nutans [33]. Pour<br />
<strong>les</strong> hêtraies collinéennes continenta<strong>les</strong> à Aspérule odorante (9130-5) et Pâturin de Chaix<br />
(9130-6), <strong>les</strong> deux cartes de distribution potentielle se recoupent de manière conséquente<br />
(93% de surface commune), mais sont assez fidè<strong>les</strong> aux cartes pro<strong>du</strong>ites "à dire d'expert" (Fig.<br />
1 b et c). Pour <strong>les</strong> hêtraies montagnardes à Orge d'Europe (Fig. 1, d), le modèle <strong>les</strong> prédit de<br />
manière quasi similaire à celle prévue par l'expert, à savoir dans l'arc jurassien et <strong>les</strong> Alpes <strong>du</strong><br />
Nord. Les Hêtraies-sapinières à Fétuque (9130-10), normalement inféodées au massif vosgien<br />
(Fig. 1, e), sont prédites en dehors de cette dition. La carte prédite inclue une partie des Alpes<br />
<strong>du</strong> Nord et le Massif central. Une association vicariante <strong>du</strong> Festuco-Abietetum (9130-10), le<br />
Milio effusi-Fagetum (9130-7) est présente dans le Jura, <strong>les</strong> Alpes <strong>du</strong> nord et le Massif<br />
Central. Les prédictions <strong>du</strong> 9130-10 dans ces trois massifs ne sont donc pas aberrantes car <strong>les</strong><br />
conditions écologiques sont quasi similaires. Enfin, nous ne constatons pas de hiatus majeur<br />
entre la carte "à dire d'expert" des Hêtraies montagnardes à Luzule blanchâtre (9110-(2,3,4))<br />
et la carte prédite. Les prédictions spatia<strong>les</strong> obtenues (Fig. 1) permettent ainsi d estimer la<br />
distribution potentielle de ces six habitats forestiers d'intérêt communautaire. Le déterminisme<br />
de ces habitats forestiers est principalement contrôlé par des variab<strong>les</strong> édaphiques (pH eau),<br />
climatiques (amplitude thermique, précipitations hiverna<strong>les</strong>) et physiographiques (pente<br />
notamment). En Suisse, Maggini et al. 2006 obtiennent <strong>les</strong> mêmes qualité de prédiction que<br />
cel<strong>les</strong> que nous avons obtenues [23].<br />
Tableau III. Résultats des régressions logistiques pas à pas et statistiques de<br />
performance associées pour <strong>les</strong> données de calibration et de validation<br />
Habitat<br />
Null Deviance Adju Optimum<br />
Calibration Validation<br />
EUR 25 b. deviance re<strong>du</strong>ction sted- probability<br />
code Var.<br />
D²<br />
AUC S Sn Sp AUC S Sn Sp<br />
9130-3 5 516.85 265.97 0.48 0.06 0.97 91 96 91 0.87 88 97 88<br />
9130-5 5 1206.10 846.73 0.29 0.17 0.88 81 85 81 0.73 81 79 81<br />
9130-6 6 1384.55 937.18 0.32 0.14 0.89 77 89 76 0.85 91 85 91<br />
9130-9 7 487.74 245.75 0.49 0.06 0.97 92 94 92 0.82 98 67 98<br />
9130-10 5 798.83 416.51 0.47 0.07 0.95 89 94 89 0.87 88 99 87<br />
9110-2 5 804.84 386.19 0.52 0.07 0.96 90 89 90 0.74 90 64 91<br />
Le niveau de concordance spatiale, au sein des trois sites Natura 2000, varie de 16%<br />
à 89%. Ce taux de succès dépend des sites étudiés et des habitats. Concernant le massif de la<br />
Reine (site FR4100189), deux habitats modélisés correspondaient aux habitats présents sur le<br />
site, respectivement le Galio odorati-Fagetum et le Poo chaixii-Fagetum. Le taux de succès<br />
de ce dernier est égal à 55% tandis que celui <strong>du</strong> Galio odorati-Fagetum est de 89%. Le massif<br />
de Parroy (site FR4100192) est constitué principalement des forêts relevant <strong>du</strong> Poo chaixii-<br />
Fagetum. Le taux de succès, dans ce massif, est de 80%. Enfin, le massif de Longegoutte, site<br />
FR4100202, situé dans le massif vosgien, présente <strong>les</strong> habitats 9130-10 et 9110-2. Les taux de<br />
succès sont respectivement de 62% pour le 9110-2 et seulement de 16% pour le 9130-10.<br />
Pour valider <strong>les</strong> cartes d habitats pro<strong>du</strong>ites lors de la rédaction des documents<br />
d'objectifs, notre démarche s avère prometteuse. Si <strong>les</strong> modè<strong>les</strong> présentent globalement de<br />
bonnes qualités de prédiction et s avèrent performants, c'est qu'ils rendent compte, à la fois,<br />
70
de l'hétérogénéité climatique à l'échelle locale (contrastes microclimatiques) et de celle des<br />
paramètres édaphiques (niveau trophique et nutrition azoté).<br />
Ces modè<strong>les</strong> restent perfectib<strong>les</strong> dans la mesure où d'autres variab<strong>les</strong> édaphiques,<br />
tel<strong>les</strong> la réserve utile, le niveau d'hydromorphie pourraient être incorporées, à l'instar de ce qui<br />
a été réalisé sur <strong>les</strong> variab<strong>les</strong> pH eau et C/N. Notamment, <strong>les</strong> modè<strong>les</strong> des habitats collinéens<br />
continentaux (9130-5 et 6) devraient être améliorés par la prise en compte de ces variab<strong>les</strong><br />
édaphiques hydriques. La prise en compte des zones alluvia<strong>les</strong> permettrait également de<br />
modéliser d'autres types d'habitas forestiers inféodés à ces milieux.<br />
Nos recherches peuvent s'inscrire dans la démarche d'évaluation de l'état de<br />
conservation des habitats naturels forestiers puisque nous avons accès à la fois à l'aire de<br />
distribution potentielle et aux surfaces correspondantes ; ceci pour une résolution spatiale<br />
concordant avec <strong>les</strong> attentes des gestionnaires. Notre démarche méthodologique peut<br />
s'appliquer à d'autres types d'habitats naturels non-obstant <strong>les</strong> limitations liées au nombre<br />
d'occurrences dans <strong>les</strong> bases de données disponib<strong>les</strong>. Nos travaux permettent également de<br />
connaître, à la fois au sein et en dehors <strong>du</strong> réseau Natura 2000, la distribution de ces habitats<br />
naturels. Ceci a évidemment des implications importantes dans le cadre des changements<br />
environnementaux à venir. Notre étude apparaît alors comme un outil efficace pour asseoir la<br />
fonctionnalité de réseaux d'espaces protégés car <strong>les</strong> futurs changements environnementaux<br />
vont sûrement réorganiser et impacter <strong>les</strong> écosystèmes continentaux terrestres à toutes <strong>les</strong><br />
échel<strong>les</strong>.<br />
71
(a)<br />
(a')<br />
(d)<br />
(d')<br />
Figure. 1.Aires de répartition observées " à dire d'expert" des six types de hêtraies<br />
d'intérêt communautaire et leur aires de distribution potentielle modélisées : (a - extrait <strong>du</strong><br />
cahier d'habitat forestier) (a') 9130-3; (b) (b'), 9130-5, (c) (c'), 9130-6, (d) (d') 9130-9; (e)<br />
(e') 9130-10; (f) (f') 9110-2. Les départements en jaune représentent <strong>les</strong> zones pour <strong>les</strong>quel<strong>les</strong><br />
<strong>les</strong> informations floristiques sont momentanément indisponib<strong>les</strong>.<br />
72<br />
(b)<br />
(b')<br />
(e)<br />
(e')<br />
(c)<br />
(c')<br />
(f)<br />
(f')
Remerciements<br />
Nous tenons à remercier Messieurs Bruno Tessier <strong>du</strong> Cros, de la Direction territoriale de<br />
l'Office National des Forêts de Lorraine ainsi que Fabien Dupont, <strong>du</strong> Parc Naturel Régional<br />
des Ballons des Vosges, pour la fourniture des données cartographiques de validation.<br />
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73
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74
Carte phytogéographique des forêts françaises et<br />
modélisation de l impact <strong>du</strong> changement climatique<br />
Dupouey Jean-Luc, Badeau Vincent, Wallerich Maud, UMR 1137 INRA-UHP,<br />
Équipe Phytoécologie forestière, INRA, 5280 Champenoux, courriel : <strong>du</strong>pouey@nancy.inra.fr<br />
Cluzeau Catherine, Ifn, Echelon de Nancy, 14 rue Girardet, CS 4216, 54042 Nancy<br />
Cedex, courriel : catherine.cluzeau@ifn.fr<br />
A la suite de nos travaux portant sur la modélisation de la niche bioclimatique des<br />
grandes essences forestières françaises et de son évolution prévue au cours <strong>du</strong> XXI e siècle<br />
sous l effet des changements climatiques (projet Carbofor), nous présentons ici <strong>les</strong> premiers<br />
résultats obtenus sur la caractérisation et l évolution de la niche des espèces herbacées des<br />
forêts françaises (projet ANR QDiv).<br />
Nous utilisons une approche biogéographique qui repose sur trois étapes : (1)<br />
délimitation cartographique et caractérisation de la végétation des principa<strong>les</strong> zones<br />
phytogéographiques françaises, (2) recherche des caractères édaphiques et climatiques<br />
discriminants ces régions phytogéographiques et (3) projection de ces aires<br />
phytogéographiques dans <strong>les</strong> scénarios climatiques futurs.<br />
La première étape est basée sur une analyse des 100 000 relevés de végétation<br />
forestière effectués par l Inventaire forestier national (Ifn) entre 1992 et 2005, à raison d un<br />
relevé pour 130 ha de forêts environ. Les relevés sont regroupés en 308 petites régions<br />
forestières avant analyse. Sur un total initial de plus de 2000 taxons relevés, seu<strong>les</strong> 1111<br />
espèces sont retenues dans l analyse après élimination des taxons de trop faible fréquence ou<br />
posant des problèmes d identification particuliers.<br />
La seconde étape repose sur la spatialisation des données climatiques de<br />
températures et précipitations mensuel<strong>les</strong> au pas de 1 km sur la France entière (modèle<br />
Aurelhy de Météo-France), sur <strong>les</strong> données pédologiques issues de la carte des sols de France<br />
au 1 :1 000 000 (INRA) ou relevées par l Ifn au même endroit que <strong>les</strong> relevés de végétation.<br />
Pour <strong>les</strong> projections de déplacement des zones phytogéographiques au cours <strong>du</strong> XXI e<br />
siècle, nous utilisons le scénario Arpège B2 de Météo-France, un scénario « modéré » dans<br />
lequel la température moyenne n augmente que de 2,3°C en 2100.<br />
Ces données sont analysées par analyse canonique des correspondances, qui prend en<br />
compte de façon conjointe dans l analyse relevés de végétation et <strong>les</strong> données climatiques ou<br />
édaphiques, ou par analyse factorielle des correspondances classique, dans laquelle le<br />
couplage entre données floristiques et environnementa<strong>les</strong> est fait a posteriori.<br />
Pour la première fois, nous pouvons identifier et ordonner sur des bases objectives<br />
<strong>les</strong> principaux facteurs de structuration de la végétation forestière à l échelle nationale. Le<br />
caractère plus ou moins méditerranéen de la végétation est le principal facteur de variation de<br />
la végétation forestière sur notre territoire, le caractère montagnard de la végétation est le<br />
second et le degré d acidité des sols impose le troisième gradient de variation. Le caractère<br />
atlantique de la végétation ne s indivi<strong>du</strong>alise pas comme un facteur de variation à part entière,<br />
car le nombre d espèces qui lui sont liées est probablement trop faible, mais il apparaît de<br />
façon combinée, en un gradient unique, avec le caractère montagnard.<br />
Les scénarios climatiques permettent de localiser ces zones phytogéographiques dans<br />
la France de 2100. La zone méditerranéenne, ou plus exactement la zone subméditerranéenne,<br />
s étend alors au Nord de la Loire. Les zones de végétation montagnardes<br />
régressent, en particulier dans <strong>les</strong> Alpes externes, alors que la zone atlantique s étend<br />
fortement vers l Est (Champagne) et dans le Centre de la France. Nous discutons la<br />
signification exacte de ces cartes en termes de prévision de déplacement de la végétation.<br />
75
La Thurifèraie de Saint-Crépin (Hautes-Alpes),<br />
Analyses historiques, spatia<strong>les</strong> et temporel<strong>les</strong><br />
Laurent LATHUILLIERE<br />
Office National des Forêts, Agence <strong>du</strong> Puy-de-Dôme, Responsable <strong>du</strong> service<br />
Aménagements Marmilhat sud, BP 107, 63 370 LEMPDES<br />
T : 04 73 42 01 32 / F : 04 73 42 01 66 / Mél : laurent.lathuilliere@onf.fr<br />
RESUME<br />
Le Genévrier thurifère (Juniperus thurifera L.) est une cupressacée présente dans le<br />
bassin Ouest méditerranéen (Maroc, Espagne), et en France, dans <strong>les</strong> Alpes surtout<br />
méridiona<strong>les</strong>, <strong>les</strong> Pyrénées et la Corse. Il représente un élément remarquable <strong>du</strong> patrimoine<br />
naturel français, et forme des écosystèmes riches et variés. Son histoire et sa dynamique ont<br />
depuis toujours été étroitement liées aux populations qui l entouraient.<br />
L un des peuplements de genévriers thurifères le plus important, se situe à Saint-Crépin<br />
dans <strong>les</strong> Hautes-Alpes, et a fait l objet de récentes études qui ont permis dans un premier<br />
temps d analyser l état des peuplements, <strong>les</strong> enjeux de dynamiques végéta<strong>les</strong> et d évolution,<br />
<strong>les</strong> risques pour <strong>les</strong> populations, et ensuite de définir des mesures, pour limiter <strong>les</strong> menaces<br />
qui pèsent sur l espèce, et mettre en uvre des interventions concrètes associant <strong>les</strong> acteurs <strong>du</strong><br />
site.<br />
Le genévrier thurifère, bien que considéré comme une relique glaciaire, est en voie<br />
d extension en France, mais un suivi de ses populations, de leur régénération, de leur<br />
extension et des phases de reconquête des essences ligneuses, et une gestion conservatoire des<br />
principaux sites, sont nécessaires pour le préserver et permettre son renouvellement, voir son<br />
développement.<br />
AIRE DE REPARTITION DU GENEVRIER THURIFERE<br />
Le genévrier thurifère est présent uniquement autour de la Méditerranée occidentale :<br />
dans <strong>les</strong> Atlas marocains surtout, en Espagne de manière conséquente puisqu il y couvre<br />
plusieurs centaines de milliers d hectare (seul ou en mélange), dans <strong>les</strong> Pyrénées françaises (2<br />
secteurs seulement autour de Marignac en Haute-Garonne et de Ussat en Ariège), dans <strong>les</strong><br />
Alpes, en Corse (massif <strong>du</strong> Cinto et <strong>du</strong> Niolù) et quelques stations en Italie (cf. carte en<br />
annexe 1).<br />
Cette espèce autrefois considérée comme rare, couvre une aire assez vaste et s avère<br />
bien présente dans <strong>les</strong> montagnes des Alpes <strong>du</strong> sud. Cependant, seu<strong>les</strong> 6 stations étaient citées<br />
dans <strong>les</strong> Alpes au début <strong>du</strong> siècle dernier. La plus importante et la plus célèbre était la station<br />
de Saint Crépin dans <strong>les</strong> Hautes-Alpes, mais tout au long <strong>du</strong> 20 ème siècle de nombreux<br />
botanistes ou forestiers se sont intéressés à cette espèce remarquable et ont découvert de<br />
nombreuses stations, parfois importantes constituant de véritab<strong>les</strong> peuplements, <strong>les</strong><br />
thurifèraies.<br />
Le département où le genévrier thurifère est le plus présent est sans aucun doute celui<br />
des Hautes-Alpes avec quelques unes des plus bel<strong>les</strong> thurifèraies de France (Saint-Crépin,<br />
Saint-Genis, Saint-André de Rosans). Il en existe aussi dans <strong>les</strong> Alpes-Maritimes (haute vallée<br />
de la Tinée et Col de Tende) et d'assez nombreux sites dans <strong>les</strong> Alpes-de-Haute-Provence<br />
(notamment dans <strong>les</strong> hautes vallées de la Bléone et <strong>du</strong> Verdon).<br />
Dans <strong>les</strong> Alpes <strong>du</strong> nord, il est présent uniquement autour de Grenoble et de la<br />
Chartreuse méridionale, au nord <strong>du</strong> Vercors, en Savoie au-dessus de Montmélian (limite d'aire<br />
au nord), ainsi que plus au sud de manière assez diffuse dans la partie est <strong>du</strong> département<br />
Drôme avec quelques populations importantes (Saou, Pommerols).<br />
76
HABITATS ET ECOCOMPLEXES LIES AU GENEVRIER THURIFERE<br />
Le Genévrier thurifère est une espèce méditerranéo-montagnarde sud-occidentale qui<br />
occupe des stations xéro-thermophi<strong>les</strong> et héliophi<strong>les</strong> (falaises, crêtes ou barres rocheuses,<br />
pentes fortes rocailleuses, exposées au sud, fortement ensoleillées), entre 600 et 1800<br />
mètres d altitude dans <strong>les</strong> Alpes méridiona<strong>les</strong>, et entre 300 et 800 m dans <strong>les</strong> Alpes<br />
septentriona<strong>les</strong>. C'est un arbre au tempérament d'acier qui peut pousser dans des conditions<br />
d'eau et de sol très diffici<strong>les</strong>, là où pratiquement aucune autre espèce ligneuse ne lui fait de<br />
concurrence.<br />
Les habitats naturels constitués par le Genévrier thurifère ont d ailleurs été identifiés<br />
comme étant d intérêt communautaire (matorrals arborescents à Juniperus ssp. / Eur 25 :<br />
5210), et prioritaire (forêts endémiques à Juniperus ssp. / Eur 25 : 9560), participant ainsi au<br />
réseau Natura 2000. Sept types d habitats élémentaires ont été retenus pour décrire la<br />
variabilité écofloristique des thurifèraies en France (RAMEAU & al, 2001).<br />
Si ces habitats (et toutes leurs transitions entre des formations pastora<strong>les</strong>, parfois présteppiques,<br />
et des formations boisées) sont d un grand intérêt, ils forment avec <strong>les</strong> milieux qui<br />
leur sont associés (rochers, falaises, pelouses, éboulis, landes, fruticées et même parfois petits<br />
marais ou zones humides) des écocomplexes d une forte valeur patrimoniale, qui recèlent de<br />
nombreuses richesses faunistiques et floristiques, avec des espèces remarquab<strong>les</strong>, protégées<br />
ou menacées, comme par exemple : la Dauphinelle ou Pied d Alouette fen<strong>du</strong> (Delphinium<br />
fissum), la Fraxinelle (Dictamnus albus), l Astragale de Montpellier (Astragalus<br />
monspessulanus), la Notholaène de Maranta (Notholaena marantae) etc...<br />
Par ailleurs, outre la présence dans <strong>les</strong> formations de genévrier thurifère et pin sylvestre<br />
<strong>du</strong> Guil<strong>les</strong>trin (haute vallée de la Durance) de l Isabelle (Graellsia isabellae, Lépidoptère<br />
hétérocère, protégé au niveau national (arrêté <strong>du</strong> 3 août 1979) et inscrit à l Annexe II de la<br />
Directive Habitats), plusieurs espèces d insectes inféodées aux genévriers (par exemple<br />
Pamene juniperana Miller var. thuriferana Cleu, Nothris thuriferella Cleu) trouvent autour<br />
des genévriers thurifères, des conditions écologiques et/ou microclimatiques rappelant cel<strong>les</strong><br />
de leur aire d origine (Espagne ou Afrique <strong>du</strong> nord).<br />
.<br />
UTILISATIONS ET USAGES DU GENEVRIER THURIFERE<br />
Le genévrier thurifère a souvent été utilisé par <strong>les</strong> populations loca<strong>les</strong> pour de multip<strong>les</strong><br />
usages. Son bois est odorant (utilisé comme succédané de l'encens), très <strong>du</strong>r, résistant et<br />
imputrescible. Les gens s'en servaient pour faire des meub<strong>les</strong> (notamment des lits, l'odeur<br />
éloignant <strong>les</strong> punaises), des parties de charpente ou des piquets de clôture ou de vigne.<br />
Si en France son utilisation est anecdotique actuellement (stylos), en Espagne où il<br />
couvre de grandes surfaces, il fait l objet d un véritable commerce, et est utilisé notamment<br />
pour la construction (structures et parements).<br />
Au Maroc, il est beaucoup utilisé pour le chauffage (le genévrier thurifère étant par<br />
excellence l arbre de la haute montagne marocaine) ou la cuisine (seule source de<br />
combustible), ainsi que parfois pour réaliser de menus objets (outils, bijoux...), ou pour<br />
préparer, par distillation d importantes quantités de bois, une pâte aux vertus cicatrisantes et<br />
antiseptiques pour <strong>les</strong> hommes et <strong>les</strong> bêtes. Il y est également apprécié des populations car il<br />
fournit un feuillage pour le bétail, <strong>les</strong> chèvres des Atlas n étant pas reboutées par celui-ci<br />
(alors qu en Espagne et en France, el<strong>les</strong> ne le consomment pas).<br />
Ce feuillage a par contre été employé en France, et depuis longtemps, en médecine<br />
populaire ou vétérinaire pour ses propriétés stimulantes, purgatives et emménagogues.<br />
77
LA THURIFERAIE DE SAINT CREPIN<br />
Présentation <strong>du</strong> site et historique<br />
La commune de Saint-Crépin se situe dans la haute vallée de la Durance (entre<br />
Guil<strong>les</strong>tre et Briançon, Hautes-Alpes), dont le climat se caractérise par une faib<strong>les</strong>se des<br />
précipitations (600-700 mm/an), une grande amplitude des températures, un ensoleillement<br />
élevé et des influences méditerranéennes nettes. Ces conditions climatiques et stationnel<strong>les</strong><br />
(sécheresse et froid) sont favorab<strong>les</strong> au genévrier thurifère qui y est assez abondant, mais<br />
souvent présent par pieds isolés.<br />
La thurifèraie de Saint-Crépin, située sur un versant abrupt à exposition ouest à sudouest,<br />
de 950 à 1300 m d'altitude, constitue par contre un véritable peuplement sur près<br />
d une cinquantaine d hectares. L insolation et l'ensoleillement sont intenses et la<br />
sécheresse estivale est forte, renforçant <strong>les</strong> contraintes climatiques de la vallée.<br />
Cette station semble connue depuis 1789 grâce à Dominique Villars, mais celui-ci ne<br />
parle en réalité que de Saint Clément près d Embrun, proche de Saint Crépin il est vrai, mais<br />
il est possible qu il ne soit pas allé à Saint Crépin à l époque.<br />
Il faudra attendre 1877 pour voir apparaître une mention explicite de Saint-Crépin par<br />
MATHIEU dans sa Flore Forestière, dans laquelle il indique que le genévrier sabine (c est<br />
seulement en 1898 que DE COINCY rattachera nos genévriers thurifères au Juniperus<br />
thurifera décrit par Linné en 1753) «forme quelquefois à lui seul de petits massifs boisés ».<br />
De fait, le site a toujours eu une grande importance pour <strong>les</strong> botanistes et <strong>les</strong> forestiers,<br />
en particulier Philibert GUINIER, dont le père Ernest GUINIER, écrivait déjà vers 1900 à<br />
propos <strong>du</strong> Genévrier thurifère, « combien il serait désirable que l'Etat fit l'acquisition <strong>du</strong> bois<br />
de Genévriers de Saint-Crépin pour sauver <strong>les</strong> vieux sujets remarquab<strong>les</strong> par leur grosseur<br />
autant que pour perpétuer cette essence sur ce terrain où le parcours incessant des moutons<br />
enlève tout espoir de régénération».<br />
Son souhait s est finalement réalisé sous l impulsion de Philibert GUINIER, lorsque ce<br />
dernier est devenu en 1921, directeur de l'Ecole Nationale des Eaux et des Forêts, et qu il<br />
s'est attaché à sauvegarder ce milieu qui semblait menacé.<br />
En effet, la commune de Saint Crépin avait proposé dès 1921 de vendre la propriété<br />
dite de la Bellive à l Etat, mais sa volonté expresse de conserver la jouissance <strong>du</strong> pâturage<br />
sur le site (très apprécié compte tenu de sa situation juste au dessus <strong>du</strong> village et de son<br />
exposition) et la clause restrictive liée à celui-ci rendait l'acquisition par l'Administration<br />
des Eaux et Forêts impossible, le code forestier interdisant formellement l'établissement<br />
dans une forêt domaniale d'un droit d'usage de cette nature.<br />
L'Ecole Nationale des Eaux et des Forêts par contre, dotée de la personnalité civile, a<br />
heureusement pu se substituer à l'Etat et depuis le 12 septembre 1924 est donc devenue<br />
propriétaire de la partie la plus boisée et la plus intéressante de la thurifèraie, sur 20 ha, «pour<br />
le motif "enseignement forestier"» (POURTET, 1975). L'Ecole des Eaux et Forêts créait ainsi<br />
bien avant l'heure, une Réserve Naturelle (un «Parc National en miniature» selon<br />
GUINIER, 1931), rare réalisation française en la matière à l'époque.<br />
En dépit de cette acquisition et de son intérêt patrimonial, la thurifèraie n'a fait l'objet<br />
que d'études ponctuel<strong>les</strong> depuis sa découverte. Il semblait pour beaucoup de personnes à<br />
l'époque que l'acquisition par l'Ecole était suffisante pour assurer sa protection. Pourtant<br />
GUINIER, en 1931, insistait déjà sur l'intérêt de mesures conservatoires en plus d'une simple<br />
"mise en défens" pour assurer la pérennité <strong>du</strong> massif.<br />
POURTET a également proposé en 1975 quelques mesures envisageab<strong>les</strong> pour cette<br />
station qui, étant la plus importante en France, «mérite d'être un objet d'étude et de bénéficier<br />
de quelques soins». Certaines mesures ont été appliquées, mais il n'y a cependant pas eu de<br />
78
gestion particulière, et il n a été entrepris par l Ecole que quelques interventions ponctuel<strong>les</strong> :<br />
création en 1924 d un sentier aujourd hui disparu, mise en défens d'une placette<br />
d ensemencement disparue également - dans <strong>les</strong> années 1930 pour étudier la régénération<br />
naturelle <strong>du</strong> thurifère, réfection partielle <strong>du</strong> bornage et mise en place de panneaux.<br />
Première étude d ensemble <strong>du</strong> site<br />
Ce paysage étant exceptionnel en France et d'un grand intérêt biologique et<br />
historique, <strong>les</strong> évolutions dynamiques de la végétation observées sans qu en soient connus<br />
<strong>les</strong> causes et enjeux, ont incité à réaliser une étude approfondie <strong>du</strong> site, démarche préalable<br />
à toute réflexion conservatoire.<br />
C'est ainsi que sous l impulsion de Jean-Claude RAMEAU, enseignant-chercheur à<br />
l E.N.G.R.E.F. et très attaché comme Philibert GUINIER, au genévrier thurifère, une<br />
première étude écologique de cette thurifèraie a été réalisée en 1994 (Laurent<br />
LATHUILLIERE) en collaboration avec l'E.N.G.R.E.F., propriétaire, et le Conservatoire<br />
Botanique National Alpin de Gap. Elle a concerné à la fois la propriété de la Bellive au<br />
sens strict, et <strong>les</strong> secteurs situés de part et d autre, car il était évident qu une analyse de<br />
l ensemble <strong>du</strong> site était indispensable.<br />
Les données disponib<strong>les</strong> à l époque étant très limitées, mis à part quelques documents<br />
historiques et photographiques (le seul plan datait de l acquisition en 1924), l objectif<br />
premier était de réaliser un état des lieux de la propriété, d un point de vue écologique et<br />
dendrométrique. Une analyse historique a rapidement semblé nécessaire pour comprendre<br />
<strong>les</strong> dynamiques végéta<strong>les</strong> de ces formations, de toute évidence très liées aux populations de<br />
la vallée. Nous avons donc travaillé sous <strong>les</strong> trois aspects :<br />
- spatial : étude de la répartition des genévriers thurifères et des principa<strong>les</strong> essences<br />
ligneuses, étude des peuplements existants et des formations végéta<strong>les</strong>, étude<br />
dendrométrique des ligneux (diamètre, hauteur, âge mesuré ou estimé par carottage, port,<br />
sex-ratio) ;<br />
- historique : étude des documents d archives existants : clichés photographiques,<br />
rapports d études, descriptions anciennes, évolution de la population de Saint-Crépin ;<br />
- temporel : comparaison des photographies anciennes (début <strong>du</strong> 20 ème siècle) et des<br />
clichés pris en 1993, ainsi que des photographies aériennes (campagnes de 1948, 1971,<br />
1990).<br />
Nous avons ainsi pu réaliser une première carte de la végétation <strong>du</strong> site, intégrant <strong>les</strong><br />
formations boisées à genévrier thurifère et/ou pin sylvestre et pin noir. Celle-ci a mis en<br />
évidence pour la première fois de manière quantitative, l importance des surfaces occupées<br />
par <strong>les</strong> essences ligneuses concurrentes <strong>du</strong> genévrier thurifère, par rapport au peuplement<br />
originel de genévrier thurifère, et de manière qualitative <strong>les</strong> zones de dynamiques végéta<strong>les</strong><br />
(dissémination et régénération).<br />
L analyse des courbes de populations <strong>du</strong> village de Saint-Crépin a montré (comme<br />
d ailleurs dans l ensemble de l arc alpin) de nombreuses fluctuations, avec un maximum<br />
d habitants (environ 1200) vers 1835, et ensuite une décroissance régulière jusqu en 1970,<br />
mais assez marquée à partir de 1900.Nous reviendrons ultérieurement sur <strong>les</strong><br />
interprétations et conclusions que nous avons pu en tirer.<br />
Nous avons pu établir un premier bilan de l état de conservation de la thurifèraie, et<br />
avons proposé une interprétation dynamique de l évolution <strong>du</strong> site depuis <strong>les</strong> sièc<strong>les</strong><br />
derniers, ce qui a relancé l intérêt et l implication <strong>du</strong> propriétaire et de ses partenaires, et a<br />
permis de proposer des orientations de gestion conservatoire.<br />
C est ainsi qu en 1996 et 1997, plusieurs interventions ont été réalisées par la<br />
commune et l O.N.F., avec la participation financière <strong>du</strong> Sivom <strong>du</strong> canton de Guil<strong>les</strong>tre, de<br />
l Etat et de l Union Européenne : réfection <strong>du</strong> sentier des Guions, travaux sylvico<strong>les</strong> de<br />
79
dégagement des Genévriers par l extraction des pins envahissant la thurifèraie sur une<br />
surface d environ 5 ha, pose d un panneau d information, et achat d une clôture à moutons.<br />
Deuxième étude complète <strong>du</strong> site<br />
La propriété de l E.N.G.R.E.F. bénéficiant <strong>du</strong> régime forestier depuis le 5 février 1999<br />
et sa gestion étant assurée par l Office National des Forêts, une nouvelle étude <strong>du</strong> site menée<br />
en 2005 (Nicolas LORIQUE) a permis d établir un nouveau diagnostic, de compléter <strong>les</strong><br />
documents cartographiques, de poursuivre <strong>les</strong> études (notamment dendrométriques), et surtout<br />
d élaborer le plan d aménagement forestier de la forêt pour la période 2006-2025, afin<br />
également de préciser <strong>les</strong> mesures de gestion à mettre en oeuvre sur le site.<br />
L approche écologique a été différente de celle menée en 1994, en raison d une part de<br />
l objectif d aménagement forestier (il a ainsi été établi une carte des stations, une carte<br />
spécifique de dynamique végétale), et d autre part d une évolution dans la caractérisation des<br />
végétations : une carte des habitats naturels a été réalisée alors que cette notion n était pas<br />
encore prise en compte en tant que telle en 1994. De même, la carte des peuplements s est<br />
basée sur une analyse dendrométrique plus que de physionomie végétale, laquelle avait<br />
présidé en 1994.<br />
Néanmoins, <strong>les</strong> résultats obtenus lors de ces deux études sont tout à fait comparab<strong>les</strong> et<br />
montrent en un espace de temps court, une évolution nettement perceptible des formations<br />
végéta<strong>les</strong>, déjà identifiée en 1994. Ils permettent surtout de disposer désormais de dispositifs<br />
et documents qui permettront à l avenir de suivre plus précisément <strong>les</strong> évolutions <strong>du</strong> site.<br />
Analyses dendrométriques<br />
L inventaire dendrométrique a été effectué en 2005 sous la forme de placettes<br />
circulaires permanentes (une soixantaine) afin de permettre un suivi dans le temps de la<br />
structure des formations ligneuses. Les données de 1994 ne constituaient qu une première<br />
approche dendrométrique réalisée dans un but surtout historique : âge, dimensions et<br />
forme.<br />
Nous avons ainsi mis en évidence à l époque l étonnante diversité de forme des<br />
genévriers thurifères, depuis <strong>les</strong> sujets à port columnaire, caractéristique des indivi<strong>du</strong>s <strong>les</strong> plus<br />
jeunes (quelques dizaines d années) en croissance libre, aux sujets <strong>les</strong> plus âgés et <strong>les</strong> plus<br />
tourmentés dont <strong>les</strong> troncs et <strong>les</strong> branches présentent des mouvements et des circonvolutions<br />
déconcertantes de la part d un arbre, en passant par <strong>les</strong> sujets multicau<strong>les</strong> (ces derniers en<br />
particulier dans <strong>les</strong> falaises et <strong>les</strong> barres rocheuses).<br />
Si la forme de ces derniers s explique aisément par l impact des pierres et blocs qui se<br />
détachent fréquemment des zones rocheuses et étêtent <strong>les</strong> tiges, celle des sujets<br />
pluricentenaires (certains indivi<strong>du</strong>s ont vraisemblablement plus d un millier d années comptetenu<br />
<strong>du</strong> nombre de cernes déterminés sur une petite partie seulement <strong>du</strong> diamètre) est plus<br />
surprenante, et résulte également des nombreuses mutilations que <strong>les</strong> habitants <strong>du</strong> village leur<br />
ont fais subir au cours des sièc<strong>les</strong> en prélevant au fur et à mesure de leurs besoins des tiges et<br />
des branches (notamment pour en faire des piquets d échalas). Les photographies anciennes et<br />
récentes montrent que certains indivi<strong>du</strong>s semblent n avoir pas changé depuis un siècle !<br />
Par ailleurs, <strong>les</strong> données relatives à l âge des genévriers thurifères montrent :<br />
- une dominance de genévriers thurifères multiséculaires (plus de 250 ans), de<br />
dimensions importantes (le plus imposant a une circonférence de 7,10 m), aux formes<br />
tourmentées, au c ur <strong>du</strong> site constituant la thurifèraie originelle ;<br />
- la présence de sujets âgés de moins de 150 ans, de croissance régulière dans <strong>les</strong><br />
secteurs en recolonisation autour de la thurifèraie principale ;<br />
- un déficit marqué d arbres âgés de 150 à 200 ans, quelque soit la situation (hors cas<br />
des falaises et rochers, non explorés).<br />
80
Interprétation de la dynamique <strong>du</strong> genévrier thurifère sur le site<br />
Le Genévrier thurifère est considéré comme une relique de l ère tertiaire, qui à partir de<br />
stations refuges, aurait grâce à la dissémination des galbu<strong>les</strong> par <strong>les</strong> oiseaux, participé aux<br />
formations pré-steppiques lors des premières phases de reconquête post-glaciaire dans tout<br />
l arc alpin. Il se serait ainsi implanté dans plusieurs vallées présentant des conditions<br />
écologiques favorab<strong>les</strong> et une moindre concurrence d autres espèces post-pionnières.<br />
Il a trouvé à Saint Crépin des conditions optima<strong>les</strong> pour son écologie, mais il y a<br />
vraisemblablement été favorisé par <strong>les</strong> populations humaines qui avaient conscience des<br />
bienfaits et apports de cette essence polyvalente.<br />
En effet, lorsque <strong>les</strong> villages se sont développés, et <strong>les</strong> communautés ayant vécu pendant<br />
longtemps en autarcie grâce à l élevage (le mouton était l avoir par excellence) et<br />
l agriculture, <strong>les</strong> habitants ont mis à profit <strong>les</strong> particularités <strong>du</strong> genévrier thurifère d une part<br />
(utilisation <strong>du</strong> bois pour la construction et surtout <strong>les</strong> échalas), et <strong>du</strong> site d autre part (pour le<br />
pâturage). Les populations qui se sont succédées ont donc préservé cette essence, même aux<br />
époques de déforestation intenses.<br />
Les habitants ont prélevés sur <strong>les</strong> arbres jusqu au début <strong>du</strong> siècle dernier, le bois dont ils<br />
avaient besoin (échalas notamment), ce qui a causé <strong>les</strong> mutilations dont on observe<br />
aujourd hui <strong>les</strong> effets dans <strong>les</strong> formes tourmentées des vieux thurifères.<br />
Le pâturage préservait le genévrier thurifère, bien implanté au c ur <strong>du</strong> site, de la<br />
concurrence d autres espèces ligneuses, mais le passage et le piétinement intense des<br />
animaux, dégradait le sol et empêchait toute régénération, en particulier il y 150 à 200 ans,<br />
lorsque <strong>les</strong> populations étaient <strong>les</strong> plus importantes dans toute la vallée. Cela explique<br />
l absence d indivi<strong>du</strong>s de cette tranche d âge.<br />
Avec la déprise agricole et pastorale après 1900, la pression <strong>du</strong> bétail a diminué et de<br />
nombreuses surfaces cultivées ou parcourues ont été abandonnées progressivement par <strong>les</strong><br />
hommes et ont pu être colonisées par <strong>les</strong> genévriers thurifères (avec de meilleures<br />
conditions de germination) à partir <strong>du</strong> peuplement originel au c ur <strong>du</strong> cirque, et des<br />
indivi<strong>du</strong>s situés en stations primaires dans <strong>les</strong> falaises, barres rocheuses. Mais dans le<br />
même temps <strong>les</strong> autres ligneux n étaient plus contenus et ont commencé leur colonisation<br />
de la thurifèraie, en particulier <strong>les</strong> pins sylvestres.<br />
Ce phénomène a été accentué par l intro<strong>du</strong>ction de boisements de pin sylvestre<br />
et pin noir à proximité immédiate <strong>du</strong> site (dans le cadre des opérations de<br />
restauration des terrains de montagne) qui ont fournis un important potentiel de<br />
graines et donc de dissémination. Cette dynamique est bien visible par comparaison<br />
diachronique des photographies aériennes et des clichés <strong>du</strong> site (cf. annexe 2).<br />
Synthèse sur <strong>les</strong> évolutions des peuplements<br />
Ces deux récentes analyses, con<strong>du</strong>ites à 10 années d intervalle, et leur comparaison avec<br />
<strong>les</strong> données historiques, montrent ainsi que <strong>les</strong> menaces pour le thurifère sont :<br />
- d'une part, l'envahissement rapide par <strong>les</strong> pins (sylvestre, et marginalement pin noir<br />
d Autriche), qui ont une croissance bien plus rapide, surpassent en hauteur <strong>les</strong> genévriers<br />
thurifères, et risquent à court ou moyen terme de faire disparaître ces habitats, dans <strong>les</strong><br />
stations secondaires, et notamment au c ur de la thurifèraie ;<br />
- d'autre part, le problème <strong>du</strong> renouvellement des peuplements et de la faible<br />
régénération naturelle de l'espèce dans <strong>les</strong> parties <strong>les</strong> plus anciennes : forte dégradation des<br />
sols (érosion et sur-piétinement par le pâturage au siècle dernier), et faible taux de<br />
germination des graines. En effet, <strong>les</strong> études actuel<strong>les</strong> de l INRA (ROQUES, 2005) sur la<br />
prédation des galbu<strong>les</strong> de thurifère par son cortège d acariens associés démontrent le très<br />
81
faible potentiel de semences viab<strong>les</strong>, et donc le déficit de régénération. Si ce phénomène est<br />
probablement compensé par la longévité de l espèce, il ne tient malheureusement pas compte<br />
de la concurrence des autres ligneux.<br />
Par contre, l espèce en elle-même n est pas menacée grâce à son importante<br />
régénération dans <strong>les</strong> milieux issus de la déprise agricole et pastorale (terrasses et pelouses)<br />
tout autour de la thurifèraie originelle. Ce ne sont cependant pas des milieux sélectifs, mais<br />
plutôt transitoires, et d autres essences viendront s y implanter ultérieurement.<br />
L'envahissement par la végétation ligneuse présente par ailleurs des risques d'incendies<br />
(une centaine d'hectares ont brûlés en 1993 sur le versant opposé à la thurifèraie).<br />
Plan d aménagement forestier et règ<strong>les</strong> de gestion<br />
Le plan d aménagement forestier, élaboré par l O.N.F., a été validé par l E.N.G.R.E.F.,<br />
propriétaire, en novembre 2006, et approuvé par le préfet de région le 15 mars <strong>2007</strong>. Il s agit<br />
ainsi, après sa mise en protection en 1924, <strong>du</strong> premier document de gestion <strong>du</strong>rable de ce<br />
patrimoine naturel et écologique, unique en France. Il définit la thurifèraie comme série<br />
d intérêt écologique particulier, l exclut de toute sylviculture, et affirme sa vocation de<br />
protection d un patrimoine naturel exceptionnel.<br />
L'objectif principal <strong>du</strong> propriétaire et de l aménagement forestier est donc la<br />
préservation de la biodiversité, des milieux naturels, de la thurifèraie, mais le principal<br />
problème de la conservation n'est pas lié à l'espèce en elle-même, car d'une part la<br />
régénération est assez importante autour de la thurifèraie (sur <strong>les</strong> pelouses et <strong>les</strong> terrasses<br />
abandonnées), et d'autre part, <strong>les</strong> vieux arbres semblent pouvoir encore vivre pendant<br />
plusieurs dizaines, voir centaines d'années. C'est surtout la dynamique de la végétation qui<br />
menace la pérennité des genévriers thurifères.<br />
Les mesures conservatoires suivantes ont donc été décidées :<br />
- une intervention directe sur <strong>les</strong> peuplements pour limiter la progression des pins<br />
et autres ligneux, favoriser la régénération naturelle et le renouvellement <strong>du</strong> peuplement, et<br />
prévenir dans le même temps <strong>les</strong> risques d'incendie par débroussaillage régulier, opérations<br />
en cours de réalisation sur une dizaine d hectares dans le cadre d un contrat « Natura<br />
2000 » ;<br />
- un entretien, par un pâturage extensif et contrôlé, des pelouses pré-steppiques, tout<br />
en cherchant à assurer une meilleure régénération naturelle <strong>du</strong> genévrier thurifère ;<br />
- la réalisation d'études approfondies sur différents aspects de la biologie, de la<br />
croissance, et <strong>du</strong> fonctionnement écologique de la thurifèraie (notamment en ce qui concerne<br />
la régénération et la prédation des galbu<strong>les</strong>), avec mise en place de placettes de suivi<br />
permanentes ;<br />
- enfin, une mise en valeur, pour le public, <strong>du</strong> site, de son histoire, des milieux, sous<br />
forme notamment d un sentier de découverte.<br />
CONCLUSIONS<br />
Le genévrier thurifère est une espèce présentant de nombreux intérêts tant écologiques<br />
qu'historiques, culturels ou économiques, au sein de son aire. Il possède ainsi une très forte<br />
valeur patrimoniale. Il forme à Saint Crépin des paysages très particuliers, préservés et<br />
façonnés par des sièc<strong>les</strong> d'histoire, de civilisations agro-pastora<strong>les</strong> et d'évolution naturelle.<br />
82
Contrairement aux thurifèraies <strong>du</strong> Maroc actuellement fortement dégradées par <strong>les</strong><br />
populations qui y vivent (pour le bois de chauffage ou pour nourrir le bétail), l espèce est<br />
actuellement en lente voie d'extension en France : il ne faudrait donc pas le considérer<br />
comme une relique sans avenir.<br />
Les évolutions dynamiques mises en évidence au travers de l exemple de Saint Crépin<br />
sont également valab<strong>les</strong> pour toute l aire <strong>du</strong> genévrier thurifère dans <strong>les</strong> Alpes françaises :<br />
- d'une part, la diminution <strong>du</strong> pâturage et <strong>du</strong> parcours en forêt laisse le champ libre à<br />
d'autres essences (pins ou chêne pubescent) qui s implantent rapidement et sont en général<br />
bien plus vigoureuses que le thurifère, risquant de le faire régresser et faire disparaître ses<br />
habitats naturels et associés ;<br />
- d autre part, la déprise humaine, agricole et pastorale libère de nombreuses surfaces<br />
(terrasses, labours) qui sont assez rapidement colonisées par de jeunes thurifères à proximité<br />
des principaux peuplements, ou même de stations isolées. Mais ce phénomène n'est<br />
vraisemblablement que transitoire, et la dynamique ultérieure con<strong>du</strong>ira certainement à la<br />
même situation que précédemment (envahissement par des essences concurrentes et<br />
reboisement progressif).<br />
Dans ces dynamiques, <strong>les</strong> stations primaires, protégées de la concurrence ligneuse,<br />
jouent un rôle fondamental de refuge et de dissémination de l espèce.<br />
Les récentes analyses « historico-spatio-temporel<strong>les</strong> » réalisées permettent désormais,<br />
avec la participation des différents acteurs <strong>du</strong> site de Saint-Crépin (propriétaire, commune,<br />
scientifiques, gestionnaire) et le soutien financier de l Etat et de l Union Européenne<br />
(notamment au travers <strong>du</strong> réseau Natura 2000), de mieux connaître l espèce et le site, de<br />
mettre en uvre <strong>les</strong> principa<strong>les</strong> mesures de gestion préconisées pour préserver et améliorer de<br />
manière <strong>du</strong>rable ces peuplements relictuels, mais non sans avenir, de Genévrier thurifère.<br />
REMERCIEMENTS<br />
Nos remerciements s adressent à toutes <strong>les</strong> personnes qui nous ont apporté leur aide<br />
et leur soutien au sein des services de l O.N.F. : Grégoire GAUTIER (Direction de<br />
l Environnement et <strong>du</strong> Développement Durable), François VERNIER (Lorraine), Pascal<br />
CHONDROYANNIS et Jean-Christophe GATTUS (Hautes-Alpes), Jean-Pierre ROCHE et<br />
Michel VEROLLET (Puy-de-Dôme).<br />
Nous remercions également Luc GARRAUD (Conservatoire Botanique National Alpin<br />
de Gap), Bernard ESMIEU et Jean COMBE (commune de Saint-Crépin), Damien MARAGE<br />
et Jean-Claude GEGOUT (ENGREF), avec une pensée particulière pour Jean-Claude<br />
RAMEAU.<br />
ELEMENTS DE BIBLIOGRAPHIE<br />
BOREL, A.; POLIDORI, J.L.; 1983. Le Genévrier thurifère (Juniperus thurifera L.)<br />
dans le Parc National <strong>du</strong> Mercantour (Alpes-Maritimes). Bulletin de la Société Botanique de<br />
France, Lettres botaniques, 130 (3) : 227-242.<br />
CHAS, E.; 1994. Atlas de la Flore des Hautes-Alpes . Edition Conservatoire Botanique<br />
national Alpin de Gap-Charance, Conservatoire des Espaces Naturels de Provence et des<br />
Alpes <strong>du</strong> sud, Parc national des Ecrins. Gap. 816 p.<br />
CONRAD, M.; 1986. Essai sur la répartition de Juniperus thurifera en Corse, en 1985.<br />
Le Monde des Plantes, 80 : 423-424.<br />
De COINCY ; 1898. Remarques sur le Juniperus thurifera L. et <strong>les</strong> espèces voisines <strong>du</strong><br />
bassin de la Méditerranée. Bulletin de la Société Botanique de France, Tome 45 - p. 429-433.<br />
83
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Conservatoire Botanique National Alpin. Gap. 925 p.<br />
GUINIER, P. ; 1931. Le peuplement de Genévrier thurifère de Saint-Crépin (Hautes-<br />
Alpes). IIème Congrès International pour la Protection de la Nature, Rapport, 584 pages : p.<br />
235-238.<br />
LATHUILLIERE, L.; 1994. Le Genévrier thurifère (Juniperus thurifera L.). Ecole<br />
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Gap-Charance, Mémoire d études Formation des Ingénieurs Forestiers. 80 p. + annexes.<br />
LATHUILLIERE, L.; 1996. Le Genévrier thurifère, élément remarquable <strong>du</strong> patrimoine<br />
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38, et 157 : 36-39.<br />
LORIQUE, N.; 2005. La thuriféraie de Saint Crépin : proposition d aménagement<br />
conservatoire et tentative d étude dendroécologique. Ecole Nationale <strong>du</strong> Génie Rural, des<br />
Eaux et des Forêts, Office National des Forêts, Université Paul Sabatier. Mémoire d études<br />
Formation des Ingénieurs Forestiers. 68 p + annexes.<br />
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POURTET, J. ; 1975. Fiche d'inventaire de la station de Genévriers thurifères de Saint-<br />
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RAMEAU, JC.; BENSETTITI, F.; CHEVALLIER, H.; BARTOLI, M.; 2001. Cahiers<br />
d habitats Natura 2000. Tome 1 Habitats forestiers / Vol. 2. La Documentation Française,<br />
Paris.<br />
ROQUES, A.; 2005. Les insectes et acariens associés au Genévrier thurifère et leur<br />
impact sur la conservation de l espèce, INRA Orléans communication aux journées <strong>du</strong><br />
patrimoine 2005 de Saint-Crépin.<br />
84
Etude de la Variabilité génétique des populations de<br />
Gladiolus palustris dans la partie occidentale<br />
de son aire de répartition<br />
Par<br />
Tiphaine MAURICE<br />
Université Paul Verlaine Metz -Laboratoire des Interactions Ecotoxicologie,<br />
Biodiversité, Ecosystèmes - U.F.R. Sci.F.A., Campus Bridoux, Avenue <strong>du</strong> Général<br />
De<strong>les</strong>traint - F 57070 METZ<br />
tiphaine.maurice@umail.univ-metz.fr<br />
Avant propos<br />
Dans le cadre d une convention de collaboration entre l Université Paul Verlaine de Metz<br />
et le Musée National d'Histoire Naturelle <strong>du</strong> Luxembourg, une étude sur la variabilité<br />
génétique de Gladiolus palustris, une espèce rare et menacée au niveau européen, a pu être<br />
mise en place à l aide d une technique de génétique moléculaire.<br />
I/ Présentation de Gladiolus palustris<br />
Gladiolus palustris, une espèce menacée<br />
Durant <strong>les</strong> dernières décennies, beaucoup d espèces végéta<strong>les</strong> rares et menacées ont<br />
régressé sur l ensemble de leur aire de répartition européenne. C est le cas notamment de<br />
Gladiolus palustris, ou Glaïeul des marais, qui outre la cueillette, est menacé principalement<br />
par la perte de son habitat naturel à cause <strong>du</strong> drainage, des changements de mode<br />
d exploitation (abandon de pratiques agrico<strong>les</strong> adaptées comme la fauche tardive ou par<br />
rotation ou le pâturage extensif), de la construction d infrastructures qui sont souvent à<br />
l origine de la destruction de stations et de la fermeture des milieux.<br />
Statuts et protections<br />
Il s agit d une espèce menacée et rare au niveau européen, répertoriée à l annexe II de la<br />
directive Habitats-Faune-Flore 92/43/EEC (29 septembre 2003) suite à son élargissement<br />
(règlement n°1882/2003).<br />
G. palustris figure également sur l annexe 1 des espèces strictement protégées suite à<br />
l arrêté <strong>du</strong> 20 janvier 1982 relatif à la liste des espèces végéta<strong>les</strong> protégées sur l'ensemble <strong>du</strong><br />
territoire français, modifié le 31 août 1995. Sont interdits à ce titre sa destruction, sa coupe,<br />
son arrachage, sa détention, son transport et son achat sur l ensemble <strong>du</strong> territoire<br />
métropolitain (art. L. 411-1 <strong>du</strong> Code de l environnement).<br />
G. palustris est également répertorié sur la liste des taxons <strong>du</strong> Livre Rouge (Tome 1).<br />
La cotation IUCN <strong>du</strong> Glaïeul des marais pour la France est « Vulnérable », et la catégorie<br />
patrimoniale à laquelle il a été intégré est « C2 » qui regroupe <strong>les</strong> espèces présentent dans au<br />
moins trois pays <strong>du</strong> monde, rares et/ou menacées seulement en France.<br />
Biologie de Gladiolus palustris<br />
Gladiolus palustris est un géophyte vivace et glabre de 30 à 60 cm de haut en moyenne.<br />
Son corme, mesurant de 1 à 2 cm, est ovoïde à arrondie et enveloppée de fibres radica<strong>les</strong><br />
brunes entrecroisées en mail<strong>les</strong> très larges ova<strong>les</strong>centes et fortement réticulées dans sa partie<br />
supérieure. Cette tunique fibreuse semble protéger <strong>les</strong> bulbes des inondations et de la<br />
87
déshydratation (Ferrez Y., Mombrial F., 2006) auquel la plante est soumise dans le milieu<br />
dans lequel elle vit.<br />
Sa tige simple, cylindrique et grêle est surmontée par une inflorescence terminale en<br />
grappe unilatérale et lâche, pro<strong>du</strong>isant de 3 à 7 fleurs sessi<strong>les</strong> de couleur rose violacé. Ses<br />
fleurs, relativement grandes (2,5 à 4 cm de long et 0,6 à 1,6 cm de large), sont écartées de 20 à<br />
30 mm (Kirschleger F., 1836) et possèdent deux spathes lancéolées, ne dépassant pas le tiers<br />
de la longueur <strong>du</strong> périanthe (Ferrez Y., Mombrial F., 2006). Ces fleurs s épanouissent<br />
successivement <strong>du</strong> bas vers le haut, et de part leur protandrie présentent d abord un stade<br />
mâle, avant de passer à l état hermaphrodite en développant le style (Käsermann C. et Moser<br />
D.M., 1999).<br />
La période de floraison s étend de juin en plaine, à juillet en montagne (Ferrez Y.,<br />
Mombrial F., 2006). Le fruit est une capsule obovale à trois loges (Danton P., Baffray M.,<br />
1995) polyspermes, avec une capacité moyenne de 40 à 60 graines. La capsule arrondie au<br />
sommet possède une hauteur variant de 14 à 16 mm (Bulova T., 2002). L ovaire est infère.<br />
Les graines de couleur brune à rouille sont aplaties et ailées de façon assez large et lâche<br />
(Kirschleger F., 1836). La dissémination est donc de type anémochore, mais la dissémination<br />
de type hydrochore n est pas à exclure lors des inondations hiverna<strong>les</strong> (Ferrez Y. et Mombrial<br />
F., 2006). Après maturation, la dissémination prend effet, selon <strong>les</strong> stations, de fin juillet à miaoût.<br />
Ses feuil<strong>les</strong> lancéolées-linéaires, aiguës au sommet et longuement engainantes à la<br />
base sont ordinairement au nombre de 3 (certains indivi<strong>du</strong>s repro<strong>du</strong>ctifs possédant 2, voir 4<br />
feuil<strong>les</strong>). Cel<strong>les</strong>-ci sont étroites (0,4 à 1 cm) et allongées (10 à 40 cm) (Danton P., Baffray<br />
M., 1995).<br />
Contrairement à d autres taxons eurasiatiques, cette espèce est capable d avoir recours à<br />
une multiplication sexuée et pro<strong>du</strong>it des semences viab<strong>les</strong> (Vinciguerra L., 2001). La<br />
multiplication végétative est assurée par la pro<strong>du</strong>ction de caïeux à la base <strong>du</strong> bulbe. La<br />
pro<strong>du</strong>ction de plus d un petit bulbe par saison est très rare (Bulova T., 2002).<br />
Concernant <strong>les</strong> pollinisateurs, il semble que G. palustris soit plus attractif visuellement<br />
qu olfactivement avec mise à disposition de quantités ré<strong>du</strong>ites de nectar pour <strong>les</strong> insectes<br />
(Mora F., Artéro A., 2006).<br />
Habitat<br />
G. palustris est une plante des prairies ou dépressions humides marécageuses, supportant<br />
bien <strong>les</strong> inondations temporaires. On la retrouve également en clairière ou en lisière de bois<br />
bordant ces biotopes. Cependant, il faut des milieux ouverts pour cette plante à tendance<br />
héliophile qui tolère temporairement l ombre. Sa répartition altitudinale varie de 150 m en<br />
plaine (Alsace) à 1200 m dans l étage montagnard (Ain) pour la France.<br />
D un point de vue phytosociologique, ces prairies humides appartiennent au Molinion<br />
(caeruleae en France), le sol y est pauvre en nutriment mais riche en matière organique,<br />
souvent calcaire mais parfois acide en surface, argileux et à mull (Vinciguerra L., 2001).<br />
Les groupements relevant <strong>du</strong> Molinion sont étroitement liés aux activités anthropiques, ils<br />
sont traditionnellement exploités comme prairie à litière et ne sont pas engraissés (Ferrez Y.,<br />
Mombrial F., 2006). Quand <strong>les</strong> pratiques agrico<strong>les</strong> cessent, Molinia caerulea envahit le milieu<br />
empêchant le développement <strong>du</strong> Glaïeul des marais de par sa densité, on peut avoir une<br />
évolution <strong>du</strong> milieu vers une mégaphorbiaie en plaine ou assister à une fermeture <strong>du</strong> milieu<br />
par envahissement des ligneux.<br />
La présence <strong>du</strong> Glaïeul des marais est un indicateur d humidité <strong>du</strong> sol bien que ce sol<br />
doive être à humidité fluctuante (plus humide après <strong>les</strong> précipitations et plus sec après <strong>les</strong><br />
périodes plus sèches) (Vinciguerra L., 2001). Le caractère fluctuant de la nappe est un facteur<br />
prédominant dans le maintien de ce type de prairie et <strong>du</strong> Glaïeul des marais. Grâce au corme<br />
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vivace de cette plante, qui assure la pérennité <strong>du</strong> Glaïeul <strong>du</strong>rant la mauvaise saison, l espèce<br />
est adaptée à de fortes variations <strong>du</strong> niveau piézométrique. Elle supporte ainsi <strong>les</strong> sécheresses,<br />
mais aussi des inondations prolongées (Ferrez Y., Mombrial F., 2006).<br />
Répartition mondiale et française<br />
D'origine eurasiatique ou sud-est européenne, le Glaïeul des marais s'est installé à la<br />
faveur de la période sub-boréale <strong>du</strong> post-glaciaire (Burckel C., 200?). Il a actuellement une<br />
aire de répartition euro-continentale à tendance subméditerranéenne, dont la limite nord de<br />
distribution s arrête en Pologne, et la limite Sud en Albanie.<br />
Au niveau de la France, on le retrouve uniquement dans l est <strong>du</strong> pays au sein de cinq<br />
départements : Bas-Rhin, Territoire de Belfort, Jura, Ain et Haute Savoie.<br />
Mesures visant à limiter cette régression<br />
Dans l état actuel des connaissances, <strong>les</strong> mesures visant à limiter sa régression sont :<br />
Protection des zones humides<br />
Maintien de la fauche tardive<br />
Limitation des reboisements<br />
Aucun engraissement<br />
Information et sensibilisation <strong>du</strong> public<br />
Programme de surveillances régulières<br />
II/ Présentation de l AFLP<br />
La technique de génétique moléculaire utilisée ici est une AFLP (Amplified Fragment<br />
Length Polymorphisms) qui correspond à une PCR (Polymerase Chain Reaction) avec une<br />
amplification de segments d ADN qui sont, pour l essentiel, inconnus des scientifiques.<br />
En premier lieu, on va extraire l ADN des tissus des feuil<strong>les</strong>. Puis, on pourra procéder à<br />
une digestion de cet ADN par des enzymes de restriction.<br />
Des adaptateurs sont ensuite ajoutés aux extrémités des sites de coupure pour que <strong>les</strong><br />
amorces puissent se fixer sur <strong>les</strong> fragments.<br />
Afin d'augmenter la quantité d'ADN, une pré-amplification est effectuée sur tous <strong>les</strong><br />
fragments par PCR (amorces sans nucléotides sélectifs). L'amplification sélective permet<br />
ensuite d'ajuster le nombre de fragments à observer.<br />
Puis, on injecte <strong>les</strong> échantillons dans le séquenceur afin d observer le polymorphisme.<br />
Avantages et désavantages de l AFLP<br />
Il faut savoir que la quantité de matériel nécessaire à cette analyse est assez faible, ce qui<br />
est un point positif pour <strong>les</strong> espèces menacées comme G. palustris.<br />
Les marqueurs n'exigent aucune connaissance antérieure concernant le génome, ils sont<br />
donc rapidement et facilement déterminab<strong>les</strong>.<br />
Cependant, ceux-ci sont dominants (<strong>les</strong> hétérozygotes ne peuvent pas être distingués des<br />
homozygotes dominants).<br />
Outre sa repro<strong>du</strong>ctibilité assez élevée, l AFLP est une méthode qui demande beaucoup de<br />
travail, mais qui est assez fiable et qui est plus facilement adaptable entre <strong>les</strong> espèces.<br />
Seule restriction, l achat d un séquenceur très onéreux.<br />
89
III/ Etude de la variabilité génétique<br />
Au total, 3 coup<strong>les</strong> enzyme/amorce ont été sélectionnés permettant de déterminer un total<br />
de 130 marqueurs pour 66,7% de marqueurs polymorphiques.<br />
Analyse de la variance moléculaire (AMOVA)<br />
Une analyse de la variance moléculaire (AMOVA) (Fig. 1) a montré une différenciation<br />
génétique très élevée entre <strong>les</strong> régions et entre <strong>les</strong> populations à l intérieur des régions<br />
indiquant un flux de gènes très faible.<br />
Entre <strong>les</strong><br />
indivi<strong>du</strong>s<br />
90<br />
Inter régions<br />
Inter<br />
population à<br />
l'intérieur des<br />
régions<br />
Figure 1 : Analyse de variance moléculaire (AMOVA)<br />
Analyse de coordonnées principa<strong>les</strong> (ACP)<br />
Une analyse de coordonnées principa<strong>les</strong> (ACP) (Fig. 2) a montré un clivage des<br />
populations en quatre groupes correspondant aux régions géographiques prélevées.<br />
Figure 2 : Analyse de coordonnées principa<strong>les</strong> des populations de Gladiolus palustris échantillonées
Les populations alsaciennes, forment le groupement le plus éloigné génétiquement, il<br />
existe donc une grande séparation historique entre ces stations et cel<strong>les</strong> <strong>du</strong> Jura (Légna,<br />
Ranchette), de l Ain (Mont d Ain, Nantua, Oyonnaxe) et de la Haute Savoie (Margencelle,<br />
Sciez, Perrignier, Faverges), situées plus au sud.<br />
La population des Rosses est à mi chemin entre l ensemble des populations jurassiennes et<br />
celui des populations de Haute-Savoie. Les Rosses sont cependant plus proches<br />
géographiquement de l ensemble Haute-Savoie.<br />
Les populations de l Ain forment également un ensemble, dont la distinction génétique<br />
peut être <strong>du</strong>e à l altitude des stations et la présence de massifs montagneux.<br />
Un test de Mantel a permis de mettre en évidence une corrélation significative entre<br />
l éloignement géographique et <strong>les</strong> distances génétiques des différentes populations (P =<br />
0,004).<br />
Dendrogramme des populations de Glaïeul des marais<br />
Un dendrogramme obtenu selon la méthode UPGMA (Fig.3) confirme <strong>les</strong> hypothèses<br />
fondées à partir de l ACP. Effectivement, on retrouve à nouveau un clivage historique bien<br />
marqué entre <strong>les</strong> populations alsaciennes <strong>du</strong> Bas-Rhin et <strong>les</strong> populations plus méridiona<strong>les</strong>.<br />
Figure 2 : Dendrogramme des populations de Glaïeul des marais<br />
prospectées, établi selon la méthode UPGMA en fonction des distances de Nei<br />
L ensemble composé des stations méridiona<strong>les</strong> se découpe en trois sous-groupes selon le<br />
dendrogramme, <strong>les</strong> populations de la forêt de Planbois et des prés de Faverges en Haute-<br />
Savoie et à la frontière suisse, <strong>les</strong> populations de l Ain et <strong>les</strong> populations <strong>du</strong> Jura.<br />
Ici encore on notera que la station des rosses est en marge de la région géographique à<br />
laquelle elle devrait appartenir.<br />
91
Problématique de renforcement de la station des Rosses<br />
Les données concernant la station des Rosses doivent être considérées avec prudence, car<br />
l analyse génétique de cette population n a été effectuée que sur trois indivi<strong>du</strong>s seulement, <strong>les</strong><br />
tests ont donc un pouvoir statistique très faible.<br />
En effet, la population des Rosses comptant très peu d indivi<strong>du</strong>s, il est question d un<br />
réenforcement à partir <strong>du</strong> site des prés de Faverges en Suisse, station la plus proche<br />
géographiquement. Dans ce genre de petites populations, il existe des risques accrus de<br />
consanguinité, ce qui peut être handicapant pour l avenir de la station qui se développera à<br />
partir d un pool génétique assez faible et qui risque donc d être plus sensib<strong>les</strong> aux<br />
perturbations <strong>du</strong> milieu. Il s agit d un problème qui doit être rencontré également sur d autres<br />
stations de Gladiolus palustris à faib<strong>les</strong> effectifs.<br />
Cependant, <strong>les</strong> analyses génétiques laissent envisager que <strong>les</strong> stations des Rosses et des<br />
prés de Faverges n ont pas la même histoire génétique, ce qui pourrait entraîner de nouveaux<br />
problèmes.<br />
En effet, on craint que ce genre de population ait sélectionné des gènes en rapport avec<br />
leur milieu lors de leur isolement historique et géographique. Les variations spatia<strong>les</strong> des<br />
conditions environnementa<strong>les</strong> peuvent entraîner une adaptation locale pour <strong>les</strong> populations<br />
végéta<strong>les</strong>, en particulier si le flux de gènes parmi <strong>les</strong> populations est faible (Becker U. et al.,<br />
In press) et l apport d indivi<strong>du</strong>s allogènes risque d amener des gènes récessifs délétères dans<br />
la population au risque de la faire disparaître au bout de quelques années.<br />
L utilisation d indivi<strong>du</strong>s d une population étrangère, dans certain cas, a seulement un<br />
impact mineur. Une rapide sélection ou introgression avec <strong>les</strong> populations loca<strong>les</strong> peut donner<br />
lieu à de bonnes adaptations similaires aux caractéristiques des indivi<strong>du</strong>s autochtones au<br />
niveau morphologique et écologique (Hodder K., Bullock J., 1997).<br />
La difficulté rencontré avec G. palustris est que cette plante met longtemps à se<br />
développer et à donner un indivi<strong>du</strong> repro<strong>du</strong>ctif à partir de graines, pourtant il faudrait<br />
pourvoir procéder à des rétrocroisements avec pollinisation en serre de 30 indivi<strong>du</strong>s sur<br />
plusieurs générations avant d envisager pourvoir mélanger deux populations éloignées<br />
génétiquement. Et ce afin de constater d une descendance viable.<br />
Ici, une gestion adaptée <strong>du</strong> site peut être un premier pas pour pallier à la disparition de<br />
cette station en ouvrant à nouveau le milieu.<br />
L établissement d une banque de graines par le prélèvement de plusieurs capsu<strong>les</strong> sur le<br />
site, voire un renforcement par des indivi<strong>du</strong>s obtenus par le croisement de plantes de la même<br />
population reste une alternative envisageable afin de conserver au mieux un patrimoine<br />
génétique qui semble se départir <strong>du</strong> reste des populations françaises. Au delà d une<br />
problématique de conservation de la station, il existe un aspect intéressant de conservation <strong>du</strong><br />
patrimoine génétique en lui-même qu il faut prendre en compte.<br />
IV/ En conclusion<br />
L analyse de génétique moléculaire réalisée sur Gladiolus palustris révèle un clivage<br />
historique au niveau génétique assez marqué entre <strong>les</strong> différentes populations prélevées au<br />
niveau français, ce clivage est d ailleurs corrélé avec l éloignement géographique assez fort<br />
de ces stations. Il est difficile d envisager l avenir de ces populations dans une vision globale,<br />
<strong>les</strong> sites étant très fragmentés géographiquement. Les stations de faib<strong>les</strong> effectifs qui ne sont<br />
pas gérées augmentent fortement leur risque de disparition notamment par fermeture <strong>du</strong><br />
milieu, cependant la gestion seule n est pas forcément la réponse à la diminution des menaces<br />
qui pèsent sur cette espèce.<br />
92
En parallèle d une gestion appropriée, des réintro<strong>du</strong>ctions peuvent être envisagées sur des<br />
stations historiques où l'espèce était présente par le passé, solution préférable au renforcement<br />
de stations encore existantes.<br />
Dans le but de préserver la diversité génétique de cette espèce, la conservation de toutes<br />
<strong>les</strong> populations existantes sera nécessaire et ce surtout au niveau des populations Alsaciennes<br />
qui forment ici le groupe le plus isolé géographiquement et génétiquement.<br />
Références bibliographiques<br />
Becker U., Colling G., Dostal P., Jakobsson A. et Matthies D., In press. Local adaptation in<br />
the monocarpic perennial Carlina vulgaris at different spatial sca<strong>les</strong> across Europe.<br />
Bulova T., 2002. Biologie, ekologie a rozsireni druhu Artemisia pancicii, Cardamine<br />
parviflora a Gladiolus palustris na Morave [Biology, ecology and distribution of<br />
Artemisia pancicii, Cardamine parviflora and Gladiolus palustris in Moravia]<br />
Burckel C., 200?. Nos Rieds, Une sélection de 24 diapositives éditées par le CRDP d'Alsace.<br />
Page consultée sur Internet le 15/02/06 à : http://www.crdpstrasbourg.fr/sciences/ried/NosRieds.pdf<br />
Danton P., Baffray M., 1995. Inventaire des plantes protégées de France. Gladiolus palustris<br />
Gaudin. Edition Nathan.<br />
Ferrez Y et Mombrial F, 2006. Préservation de Gladiolus palustris Gaudin en Franche-<br />
Comté. Proposition d un plan de conservation Conservatoire Botanique de Franche-<br />
Comté, DIREN de Franche-Comté, Conseil Régional de Franche-Comté, 29 p + annexes<br />
Hodder K., Bullock J., 1997. Translocation of native species in the UK: implications for<br />
biodiversity. Journal of Applied Ecology 1997, 43, 547-565.<br />
Käsermann C., Moser D.M., 1999. Fiches pratiques pour la conservation, plantes à fleurs et<br />
fougères, Etat: octobre 1999. OFEFP/CRSF/PRONATURA, 344 p. P.152-153. Disponible<br />
sur Internet le 29/08/06 à :<br />
http://www.villege.ch/cjb/rsf/fra/fiches/pdf/glad_palu_f.pdf#search=%22gladiolus%20palustris%22<br />
Kirschleger F., 1836 : Prodrome de la flore d Alsace.<br />
Mora F., Artéro A., Fév. 2006. Analyse <strong>du</strong> cortège des insectes florico<strong>les</strong> exploitant le glaïeul<br />
des marais (Gladiolus palustris).<br />
Vinciguerra L., 2001. Programme de conservation <strong>du</strong> Glaïeul des marais (Gladiolus palustris<br />
Gaudin) : actions conservatoires ex situ. Rapport n°2/10-2001, Conservatoire Botanique<br />
National Alpin, DIREN Rhône-Alpes, Conseil Régional Rhône-Alpes, Conseil Général de<br />
l'Ain, Conseil Général de Haute-Savoie, 47 p. + annexes.<br />
93
Cartographie forestière par télédétection :<br />
Cas de la forêt de chêne-liège de Benslimane (Maroc)<br />
Er-riyahi SABER 1 , Mouhssine RHAZI 2 , Laïla RHAZI 3<br />
1. Université de Provence, Aix-Marseille I, France. Email: e.saber@caramail.com<br />
2. Université Moulay Ismaïl, Faculté des Sciences et Techniques, Boutalamine, Errachidia,<br />
Maroc. Email: rhazimouhssine@yahoo.fr<br />
3. Université Hassan II, Faculté des Sciences Aïn Chock, Casablanca, Maroc. Email:<br />
rhazilaila@yahoo.fr<br />
Résumé<br />
Au Maroc, le chêne-liège s étend sur une superficie près de 350 000 ha (15% de la superficie<br />
mondiale des subéraies), principalement dans <strong>les</strong> régions de la Mamora, <strong>du</strong> Plateau Central et<br />
<strong>du</strong> Rif. Vaste d une superficie d environ 12 000 ha, la subéraie de Benslimane occupe la<br />
deuxième place après celle de la Mamora (135 000 ha).<br />
La subéraie de Benslimane assure la survie d une faune variée (plusieurs espèces de gibiers et<br />
de mammifères) et joue un rôle important dans la vie économique et sociale des populations<br />
riveraines (extraction de liège, récolte de bois, pâturage, glands, champignons etc.).<br />
Bien que cet écosystème présente un intérêt écologique et socio-économique<br />
considérable, il est malheureusement soumis à plusieurs menaces d origines naturelle et/ou<br />
anthropozoogène. Ces menaces con<strong>du</strong>isent à la ré<strong>du</strong>ction de la superficie de la subéraie et<br />
affectent négativement le développement des indivi<strong>du</strong>s de chêne-liège.<br />
Afin d évaluer l impact de ces menaces, une carte de végétation de 1955 et deux<br />
images satellitaires Landsat (TM et ETM+) acquises en 1987 et 2001 ont été utilisées. Les<br />
résultats obtenus, sur l évolution spatio-temporelle de cette formation forestière, sont discutés<br />
dans une perspective d apporter des éléments pour la gestion et la conservation de ce<br />
patrimoine naturel.<br />
Mots clés : Subéraie de Benslimane, télédétection, évolution spatio-temporelle.<br />
Intro<strong>du</strong>ction<br />
Le chêne-liège (Quercus suber) est une espèce endémique <strong>du</strong> bassin méditerranéen<br />
occidental présentant une plasticité écologique quant à la température et la pluviométrie. Il<br />
s étale à cheval sur <strong>les</strong> bioclimats subhumide et semi-aride (M hirit, 1995).<br />
Les forêts de chêne-liège couvrent approximativement 2 687 000 hectares au<br />
Portugal, en Espagne, au Maroc, en Algérie, en Tunisie, en Italie et en France (carte 1). Ces<br />
espaces forestiers sont très riches en termes de biodiversité. Ils présentent aussi une haute<br />
valeur économique (extraction de liège, lieu de pâturage, bois, glands, etc.).<br />
94
Carte 1 : Distribution <strong>du</strong> chêne-liège dans son aire géographique méditerranéenne et<br />
atlantique (en rouge, d après l Institut Méditerranéen <strong>du</strong> Liège, France. Site Internet :<br />
http://www.institut<strong>du</strong>liege.com).<br />
Au Maroc, le chêne-liège s étend sur une superficie près de 350 000 ha (15% de la superficie<br />
mondiale des subéraies), principalement dans <strong>les</strong> régions de la Mamora, <strong>du</strong> Plateau Central et<br />
<strong>du</strong> Rif (Hammoudi, 2002). La subéraie de Benslimane (carte 2), d une superficie d environ<br />
12 000 ha, est située dans la province de Benslimane, entre <strong>les</strong> deux agglomérations <strong>les</strong> plus<br />
importantes <strong>du</strong> Maroc (Rabat-Salé, Casablanca-Mohammedia). Elle est très diversifiée avec<br />
une dominance des formations naturel<strong>les</strong> : chêne-liège et thuya qui en représente 72,53%. Les<br />
peuplements de chêne-liège représentent 62,23%, <strong>les</strong> reboisements occupent 14,81 %, <strong>les</strong><br />
formations de thuya représentent 10,30 %, <strong>les</strong> essences secondaires (9,09 %) suivi des vides<br />
et clairières (3,57 %). Cette forêt appartient au domaine forestier de l état, à l exception de<br />
quelques parcel<strong>les</strong> distraites au profit des forces armées roya<strong>les</strong> (Bouhaloua et Et-Tobi, 2001).<br />
95
Carte 2 : Localisation géographique <strong>du</strong> Maroc et de la subéraie de Benslimane<br />
A l instar de la majorité des forêts marocaines, la subéraie de Benslimane a connu<br />
une dégradation sévère depuis le début <strong>du</strong> XX ème siècle et surtout à partir des années<br />
cinquante. Les causes naturel<strong>les</strong> et/ou anthropiques <strong>du</strong> recul <strong>du</strong> chêne-liège sont nombreuses.<br />
Les objectifs de ce travail étaient :<br />
1- l intégration des données de télédétection dans un système d information<br />
géographique afin d étudier la dynamique de la subéraie de Benslimane<br />
2- faire des propositions de gestion et de conservation <strong>du</strong>rable de ce patrimoine<br />
naturel sur la base des résultats obtenus.<br />
Matériel et Méthode<br />
L étude diachronique basée sur la télédétection et <strong>les</strong> systèmes d information<br />
géographique (SIG) est une démarche efficace dans l évaluation de la dynamique des<br />
géosystèmes. Les images satellitaires combinées aux documents anciens, sont d une grande<br />
utilité dans cette démarche.<br />
Les données de télédétection spatiale sont issues de deux scènes <strong>du</strong> satellite Landsat<br />
datées <strong>du</strong> 06 janvier 1987 et <strong>du</strong> 20 janvier 2001. Il s agit de données multispectra<strong>les</strong> avec une<br />
résolution de 30 m. Les deux images sont géoréférencées à l acquisition dans un système de<br />
projection UTM. Une carte de végétation au 1/200 000 (figure 1) établie par Théron et Vindt<br />
en 1955 a été également utilisée afin d élargir le pas de temps de l étude. La méthode utilisée<br />
consistait, d une part, à géoréférencer cette carte de végétation et à traiter <strong>les</strong> deux images<br />
satellitaires sous Idrisi ; d autre part, à cartographier <strong>les</strong> unités spatia<strong>les</strong> de la subéraie à partir<br />
de la carte de végétation géocodée et des deux compositions colorées sous ArcView GIS<br />
(figure 2).<br />
96
Figure 2 : Compositions colorées réalisées à partir des scènes Landsat 1987 (à<br />
gauche) et 2001 (à droite) sur la subéraie de Benslimane<br />
Résultats et discussion<br />
L analyse de la carte de végétation au 1/200 000 de 1955 et des images satellitaires<br />
Landsat (1987 et 2001), conjuguées aux observations de terrain permettent de saisir <strong>les</strong><br />
tendances d évolution de la subéraie de Benslimane et d évaluer la rapidité des<br />
transformations des structures spatia<strong>les</strong> entre ces trois dates. Les résultats de cette diachronie,<br />
présentés dans <strong>les</strong> cartes 3 et 4, mettent effectivement en exergue une régression des<br />
peuplements de chêne-liège. En effet, entre 1955 et 1987, la superficie de chêne-liège a<br />
régressé de 1500 ha alors que 235 ha de chêne-liège ont disparu entre 1987 et 2001, avec donc<br />
un total de 1735 ha sur une période de 47 ans (1955-2001). La régression des peuplements de<br />
chêne-liège était en faveur, des reboisements d eucalyptus et de pin, de la création de carrières<br />
et de l extension urbaine qui font partie intégrante des activités humaines. Les clairières qui<br />
apparaissent sur la carte 3 sont probablement le résultat de défrichements qui ont eu lieu entre<br />
1914 et 1950, pour alimenter <strong>les</strong> grandes vil<strong>les</strong> en bois de chauffage (Boudy, 1958). Aucun<br />
reboisement, dans la subéraie de Benslimane, n a été signalé à l époque par Théron et Vindt.<br />
Ceci explique que l intensité de la dégradation de la subéraie a pris de l ampleur après 1955.<br />
Le reboisement d eucalyptus (plante refusée par le bétail) dans <strong>les</strong> parties défrichées<br />
augmente la pression <strong>du</strong> pâturage sur le chêne-liège (Nafaa,1997), notamment sur <strong>les</strong><br />
plantu<strong>les</strong> posant ainsi un sérieux problème de régénération naturelle.<br />
L extraction <strong>du</strong> gravier, un des éléments <strong>les</strong> plus appréciés par <strong>les</strong> in<strong>du</strong>striels <strong>du</strong><br />
secteur de la construction, a con<strong>du</strong>it à la naissance d une grande carrière au dépens de la<br />
subéraie qui subi une dégradation continuelle au fur et à mesure que le chantier s élargit<br />
davantage.<br />
97<br />
Figure 1: Extrait de la<br />
carte de végétation au 1/200 000<br />
sur la subéraie de Benslimane<br />
(Théron et Vindt, 1955)
L extension de la ville de Benslimane a entraîné la destruction d une partie de la<br />
subéraie. Plusieurs indivi<strong>du</strong>s de chêne-liège ont été abattus pour préparer le terrain aux<br />
aménagements locatifs. L extension urbaine est liée à l augmentation <strong>du</strong> taux démographique<br />
dans cette ville qui combine à la fois l augmentation <strong>du</strong> taux de naissances et l installation de<br />
personnes venant notamment des vil<strong>les</strong> voisines comme Casablanca et Rabat.<br />
La contrainte climatique a <strong>du</strong> avoir également un effet négatif sur le peuplement de<br />
chêne-liège. La succession d années sèches affaiblissent le chêne-liège et le rendent<br />
vulnérable à toute attaque d insectes ravageurs et de champignons parasites.<br />
A la lueur de résultats trouvés dans le cadre de cette étude, il ressort clairement que<br />
<strong>les</strong> menaces qui pèsent sur la subéraie de Benslimane s intensifient continuellement. Ainsi, si<br />
des mesures de gestion rationnelle et de conservation de ce patrimoine biologique ne sont pas<br />
élaborées et prises en compte, la dégradation de cet écosystème forestier pourra atteindre un<br />
seuil où sa restauration sera probablement incertaine et sa réhabilitation sera très coûteuse<br />
financièrement. A ce stade actuel, il est encore possible de mettre au point un plan de gestion<br />
de cet espace forestier. Pour cela nous proposons quelques éléments à ce propos :<br />
(1) assurer une protection urgente des espaces <strong>les</strong> plus dégradés pour favoriser la<br />
régénération <strong>du</strong> chêne-liège par la création de zones protégées<br />
(2) diminuer la charge pastorale et améliorer la pro<strong>du</strong>ctivité fourragère des<br />
écosystèmes ouverts au parcours<br />
(3) lancer des campagnes de formation et de sensibilisation de la population locale et<br />
des usagers sur l intérêt patrimonial et l utilisation rationnelle des forêts afin d en assurer la<br />
pérennité. Les gardes forestiers, entre autres, peuvent jouer un rôle prépondérant sur cet<br />
aspect.<br />
Carte 3 : La subéraie de Benslimane en 1955<br />
98
Carte 4 : Dynamique de la subéraie de Benslimane entre 1987 et 2001<br />
Conclusion<br />
La superficie de la subéraie de Benslimane a connu depuis <strong>les</strong> années cinquante une<br />
diminution de 15% passant ainsi de 11412 ha en 1955 à 9677 ha en 2001, soit une perte<br />
annuelle de 37 ha de chêne-liège. Cette dégradation est attribuée aux actions combinées de la<br />
sécheresse et des multip<strong>les</strong> pressions humaines sur cet écosystème forestier. Conscient <strong>du</strong> rôle<br />
que joue cette subéraie, <strong>les</strong> pouvoirs publics ont pris un certain nombre de mesures en vue<br />
d atténuer ces dégradations. Le rajeunissement et l aménagement de la forêt ont été le but<br />
principal des efforts déployés par <strong>les</strong> services compétents malgré un manque de moyens<br />
humains et financiers.<br />
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Rabat.<br />
99
Protoco<strong>les</strong> de suivi, bases de données et cartographie pour<br />
mettre en évidence l'impact des activités anthropiques sur la<br />
diversité végétale<br />
Audrey MURATET, Jean-Claude ABADIE et Nathalie MACHON<br />
Conservatoire botanique national <strong>du</strong> Bassin parisien,<br />
UMR 5173 MNHN-CNRS-UPMC, Conservation des Espèces, Restauration et Suivi des Populations,<br />
Service <strong>du</strong> Patrimoine Naturel<br />
61 rue Buffon, 75005 Paris<br />
muratet@mnhn.fr ou machon@mnhn.fr<br />
Dans le monde entier, <strong>les</strong> changements d occupation des sols in<strong>du</strong>its par l homme<br />
façonnent et modèlent <strong>les</strong> dynamiques de la végétation sauvage et semi naturelle tels <strong>les</strong><br />
abandons des terres agrico<strong>les</strong> très répan<strong>du</strong>s en Europe et en Amérique <strong>du</strong> Nord depuis<br />
quelques décennies. A l inverse, certaines zones ont tendance à être gérées de manière plus<br />
intensive, avec des problèmes associés de pollution, de déchets et de perte de biodiversité<br />
comme <strong>les</strong> aires urbaines, par exemple. L impact anthropique peut être plus indirect. Il<br />
s exerce par exemple à travers le changement <strong>du</strong> climat ou <strong>les</strong> invasions biologiques qui<br />
bouleversent la répartition des espèces.<br />
La compréhension de ces processus qui perturbent la biodiversité et par voie de<br />
conséquence le fonctionnement des écosystèmes, est essentielle pour pouvoir prédire ce que<br />
peut devenir l environnement des êtres humains dans <strong>les</strong> sièc<strong>les</strong> à venir et ainsi permettre la<br />
mise en uvre de mesures de préservation.<br />
Afin d évaluer de façon précise l impact des activités humaines tel<strong>les</strong> que : <strong>les</strong><br />
changements climatiques, la fragmentation et la destruction des habitats naturels (comme<br />
l urbanisation par exemple) et <strong>les</strong> invasions biologiques, sur la biodiversité, l acquisition de<br />
nombreuses données de terrain sont nécessaires : des données d inventaires et des données<br />
caractérisant le milieu. El<strong>les</strong> permettent, par traitement statistique, de faire le lien entre <strong>les</strong><br />
activités humaines et la dynamique de la biodiversité et d en faire ressortir <strong>les</strong> processus<br />
impliqués.<br />
Au sein <strong>du</strong> Département « Ecologie et Gestion de la Biodiversité » <strong>du</strong><br />
Muséum national d Histoire naturelle, nous étudions plus particulièrement l impact des<br />
activités anthropiques sur la diversité végétale. Nos études se font à différentes échel<strong>les</strong> :<br />
A une échelle locale, plusieurs types de travaux sont en cours concernant divers types<br />
d activités humaines. Les plus importants sont <strong>les</strong> pratiques agrico<strong>les</strong>, la gestion des<br />
voies de transport terrestre (autoroutes ou routes), <strong>les</strong> aménagements des berges de<br />
rivières et l urbanisation.<br />
A une échelle plus large, des processus plus globaux sont étudiés.<br />
100
1. Études à une échelle locale<br />
Dans cette partie, nous prendrons en exemple la thèse d Audrey Muratet (1 er auteur de<br />
cet article) étudiant l impact de l urbanisation sur la diversité végétale car il s agit, à ce jour,<br />
<strong>du</strong> projet de recherche le plus avancé de notre laboratoire concernant l analyse des<br />
interactions entre la biodiversité et <strong>les</strong> activités humaines. De plus, l étude de la biodiversité<br />
urbaine et des mécanismes qui contrôlent sa dynamique est d une importance majeure car<br />
l urbanisation est une composante essentielle des processus de transformation <strong>du</strong> paysage sur<br />
la planète et une des premières causes d extinction des espèces (McKinney, 2006). C est<br />
pourquoi un nombre croissant d études de la biodiversité et plus particulièrement de la flore<br />
urbaine émergent (Pysek 1998, Zerbe et al. 2003, Godefroid 2001, Kent et al. 1999, Angold<br />
et al., 2006 Ricotta et al. 2001, Dana et al. 2002). C est dans ce contexte que nous avons<br />
entrepris une étude dans un département fortement urbanisé de la région parisienne, <strong>les</strong> Hautsde-Seine.<br />
Le but ultime était d aider <strong>les</strong> gestionnaires de l espace urbain à préserver au mieux<br />
la biodiversité de leur territoire. Nous avons cherché à mesurer la diversité floristique des<br />
différents habitats de ce département pour définir <strong>les</strong> plus intéressants. Puis nous avons pris<br />
en compte <strong>les</strong> différentes caractéristiques de l urbanisation pour évaluer leur impact sur cette<br />
diversité.<br />
Dans un contexte urbain, <strong>les</strong> méthodes d échantillonnage classiques ne sont pas<br />
adaptées. La probabilité de sélectionner des zones inaccessib<strong>les</strong> ou dépourvues de végétation<br />
est trop élevée en suivant un échantillonnage systématique (en effectuant des relevés à<br />
interval<strong>les</strong> réguliers) ou aléatoire (en sélectionnant aléatoirement la position des sites à<br />
inventorier) (Hayek et Buzas 1997). Pour cette étude, nous avons donc réalisé un<br />
échantillonnage stratifié des sites à étudier selon la méthode définie par Sukopp et Weiler<br />
(1988). Ainsi, <strong>les</strong> surfaces inventoriées dans <strong>les</strong> différents habitats sont proportionnel<strong>les</strong> aux<br />
surfaces tota<strong>les</strong> occupées par ces habitats sur le département. Les stations choisies selon cette<br />
méthode correspondent à une zone occupée par un seul type d habitat. Dans chacune des 986<br />
stations inventoriées entre 2001 et 2005, un inventaire floristique global de la flore vasculaire<br />
sauvage (espèces indigènes et naturalisées) a été effectué.<br />
L estimation de la diversité floristique d un site donné a été calculée de manière<br />
simple et objective à un niveau quantitatif avec (1) la richesse spécifique (nombre total<br />
d espèces répertoriées dans un site) et qualitatif avec (2) un indice de rareté (pour une espèce<br />
donnée cet indice correspond à la proportion de sites dans <strong>les</strong>quel<strong>les</strong> l espèce n a pas été vue.<br />
L indice de rareté d un site correspond ainsi à la moyenne des indices de rareté des espèces<br />
présentes sur ce site) et (3) un indice de naturalité (proportion d espèces indigènes sur le total<br />
d espèces indigènes et naturalisées). Nous avons ainsi pu établir la carte de la répartition de<br />
l intérêt floristique des sites sur l ensemble des Hauts-de-Seine. Comme atten<strong>du</strong>, <strong>les</strong> zones de<br />
forte biodiversité se trouvent en bord de Seine (Figure 1 zone A) et dans <strong>les</strong> forêts domania<strong>les</strong><br />
<strong>du</strong> département (Figure 1 zone B) tandis que la plaine in<strong>du</strong>strielle au nord (Figure 1 zone C)<br />
se révèle particulièrement pauvre. Les efforts de préservations devront se concentrer sur <strong>les</strong><br />
premières tandis que <strong>les</strong> efforts de restauration devront plutôt se porter sur <strong>les</strong> deuxièmes.<br />
101
B<br />
A<br />
Indice très élevé<br />
Indice élevé<br />
Indice moyen<br />
Indice faible<br />
Indice très faible<br />
Richesse Naturalité Rareté<br />
C<br />
Figure 1 : Distribution des trois indices d intérêt floristique (la richesse spécifique, la<br />
naturalité et la rareté) sur le département des Hauts-de-Seine obtenu à partir d une<br />
interpolation IDW (<strong>les</strong> zones de plus fort intérêt sont <strong>les</strong> plus sombres). A et B sont des<br />
exemp<strong>les</strong> de zones de fort intérêt : <strong>les</strong> berges de Seine et <strong>les</strong> forêts domania<strong>les</strong> ; C est un<br />
exemple d une zone de moindre intérêt : la zone in<strong>du</strong>strielle <strong>du</strong> nord <strong>du</strong> département.<br />
Les différents types et degrés d urbanisation présents sur le territoire d étude ont<br />
été définis à partir <strong>du</strong> Mode d Occupation des Sols (MOS). Le MOS, établi par l IAURIF<br />
(Institut d aménagement et d urbanisme de la région Île-de-France 2003), est issu de photos<br />
aériennes interprétées, de fichiers administratifs, de bulletins municipaux et de consultations<br />
des communes. Il décrit l'usage <strong>du</strong> sol sur toute l Île-de-France divisé en 83 classes. Cette<br />
information sur l occupation des sols a été cartographiée sur des plans au 1/5000 e et mise à<br />
jour tous <strong>les</strong> 4 ou 5 ans depuis 1982. Les 83 classes <strong>du</strong> MOS ont été regroupées en 9 classes<br />
pour notre étude (voir le tableau 1).<br />
102
Mode<br />
d Occupation des<br />
Sols<br />
Activités<br />
Logements collectifs<br />
Équipements<br />
Logements<br />
indivi<strong>du</strong>els<br />
Transports<br />
Chantiers et terrains<br />
vacants<br />
Espaces ruraux et<br />
urbains ouverts<br />
Définitions<br />
Zones d activités, Bureaux, entreprises,<br />
centres commerciaux<br />
É<strong>du</strong>cation, Santé, Administration,<br />
Cimetières, Électricité, Gaz, Pétrole<br />
Voies ferrées, Autoroutes, Aéroport,<br />
Parkings<br />
Espaces ruraux (Vergers, Pépinières,<br />
Cultures) et urbains ouverts (Parcs,<br />
Jardins, Golfs, Hippodromes, Terrains de<br />
sport)<br />
Eau<br />
Bois ou forêts<br />
Tableau 1 : Mode d Occupation des Sols divisé en neuf classes (IAURIF 2003)<br />
Pour identifier <strong>les</strong> types d urbanisation qui agissent sur l intérêt floristique d un site,<br />
nous avons donc relié leurs surfaces existant dans un rayon de 200 mètres autour de la station<br />
(voir exemple Figure 2) avec <strong>les</strong> différents indices d intérêt floristique de cette station.<br />
MOS en 9 classes<br />
Activités<br />
Bois ou forêts<br />
Chantiers et terrains vacants<br />
Eau<br />
Équipements<br />
Espaces ruraux et urbains ouverts<br />
Logements collectifs<br />
Logements indivi<strong>du</strong>els<br />
Transports<br />
Figure 2 : Représentation d un site échantillonné (polygone avec une bor<strong>du</strong>re épaisse<br />
au centre <strong>du</strong> cercle) avec <strong>les</strong> différents types de modes d occupation des sols présents autour<br />
<strong>du</strong> site dans un rayon de 200 m.<br />
103
Nous avons pu ainsi montrer, dans le cas des friches urbaines, que la présence de<br />
logements collectifs ou indivi<strong>du</strong>els dans un rayon de 200 m autour <strong>du</strong> site a un effet<br />
significativement négatif sur l indice de rareté. Nos résultats indiquent que la création de<br />
logements collectifs et indivi<strong>du</strong>els in<strong>du</strong>irait certainement une ré<strong>du</strong>ction de la qualité des<br />
friches urbaines voisines et plus généralement des espaces verts. A l inverse, la présence<br />
d eau (mares, lacs ou fleuve) serait corrélée positivement à la rareté des espèces observées<br />
(Muratet et al. <strong>2007</strong>). Les habitats humides sont généralement riches en espèces et abritent de<br />
nombreuses espèces rares à fort intérêt de conservation en milieu urbain. Ces résultats<br />
permettent d apporter quelques recommandations pour optimiser la gestion des terrains<br />
vagues ou autres types de sites, dans une optique de conservation de la biodiversité urbaine.<br />
Par exemple, <strong>les</strong> berges de la Seine sont le siège de nombreuses espèces intéressantes comme<br />
Cardamine impatiens L., Equisetum telmateia Ehrh. et Stachys palustris L. qui sont rares ou<br />
spécifiques à ce type d habitat à condition que ces berges ne soient pas bétonnées.<br />
D autres études portant sur des habitats ou des structures particulières sont également<br />
en cours au Muséum national d Histoire naturelle. El<strong>les</strong> concernent en particulier la flore des<br />
bor<strong>du</strong>res de champs cultivés pour savoir dans quelle mesure <strong>les</strong> pratiques agrico<strong>les</strong> ont un<br />
impact sur la biodiversité et si <strong>les</strong> mesures agri-environnementa<strong>les</strong> mises en pratique par <strong>les</strong><br />
agriculteurs ont bien <strong>les</strong> effets escomptés (thèse de Jean-Claude Abadie). El<strong>les</strong> concernent par<br />
ailleurs <strong>les</strong> infrastructures de transport terrestre pour définir <strong>les</strong> méthodes de gestion qui sont<br />
le moins destructrices pour la diversité végétale (thèses d Isabelle Le Viol et Louis De<br />
Redon).<br />
2. Études à l échelle nationale<br />
Les études sur de grandes échel<strong>les</strong> spatia<strong>les</strong> et temporel<strong>les</strong> sont essentiel<strong>les</strong> pour séparer<br />
<strong>les</strong> effets des processus autogéniques et des évènements stochastiques par rapport aux<br />
changements environnementaux plus gra<strong>du</strong>els sur la structure des communautés (von Oheimb<br />
<strong>2007</strong>). C est pourquoi des programmes nationaux de suivi de la biodiversité ont été entrepris<br />
dans beaucoup de pays. Les méthodes utilisées sont relativement diverses. Cependant, pour<br />
éviter d éventuels biais, el<strong>les</strong> se doivent d être simp<strong>les</strong> et bien standardisées (Brandt et al.<br />
2002). Trenkel et al. (2004) ont démontré que le choix de la méthode et de la période<br />
d échantillonnage peut avoir un impact important sur la perception de la structure et de la<br />
dynamique d'une communauté écologique. Pour cette raison, (1) <strong>les</strong> localisations où <strong>les</strong><br />
inventaires seront réalisés doivent être déterminés aléatoirement selon un protocole standard,<br />
(2) <strong>les</strong> observateurs doivent posséder un bon niveau de connaissance, aussi uniforme que<br />
possible entre eux ; (3) <strong>les</strong> relevés doivent être le plus exhaustifs possible sur la surface<br />
inventoriée, (4) <strong>les</strong> périodes de relevé doivent être <strong>les</strong> mêmes dans une région donnée où des<br />
caractéristiques environnementa<strong>les</strong> sont relativement homogènes. Les protoco<strong>les</strong> bien<br />
standardisés peuvent ainsi fournir des données robustes concernant la biodiversité présente<br />
dans divers habitats. Par exemple en Grande-Bretagne un programme de suivi appelé<br />
« Countryside Survey » (CS) a commencé en 1978 en utilisant une méthode<br />
d échantillonnage stratifiée aléatoire (Firbank et al. 2003 ; Haines-Jeune et al. 2003) et qui<br />
recense <strong>les</strong> plantes et <strong>les</strong> oiseaux. En Suisse, depuis 2001 un programme de suivi de la<br />
biodiversité (BDM) est en cours (Weber et al. 2004 ; Plattner et al. 2004) utilisant une<br />
méthode d échantillonnage systématique, incluant <strong>les</strong> plantes, <strong>les</strong> oiseaux, <strong>les</strong> mollusques et<br />
<strong>les</strong> lépidoptères. En France, un suivi temporel des oiseaux communs a débuté en 1989 (STOC<br />
; Julliard et al. 2003). Suivant ces exemp<strong>les</strong>, en partenariat avec <strong>les</strong> Conservatoires botaniques<br />
nationaux, nous entreprenons le lancement d un programme de suivi de la flore commune à<br />
l échelle de l ensemble de la France métropolitaine. L objectif est de mettre en relation <strong>les</strong><br />
104
changements observés sur la distribution des espèces au fil des années, avec <strong>les</strong> facteurs<br />
agissant sur cette distribution. La méthode utilisée dans ce programme est un inventaire<br />
systématique de 8 placettes de 10 m² dont <strong>les</strong> positions dans une maille de 1 km² sont fixes<br />
(figure 3).<br />
Figure 3 : Disposition des huit placettes dans la maille d un kilomètre carré. Chacune<br />
est indiquée par une lettre (majuscule en jaune). Pour chaque point se trouve un point de<br />
rechange (lettre minuscule en orange) qui pourra servir de substitution lorsque le point<br />
principal est inaccessible.<br />
La localisation de la maille kilométrique est, quant à elle, tirée au sort. Ces<br />
inventaires seront ensuite comparés avec <strong>les</strong> cartes d évolution <strong>du</strong> climat ou d utilisation <strong>du</strong><br />
sol afin d évaluer <strong>les</strong> impacts liés aux changements climatiques et aux autres perturbations<br />
anthropiques qui transforment <strong>les</strong> milieux naturels. Cette étude nous permettra de suivre<br />
l évolution temporelle de la répartition des principa<strong>les</strong> espèces de plantes communes de<br />
France et de déterminer <strong>les</strong> facteurs qui agissent sur cette évolution (agriculture,<br />
urbanisation ou des changements globaux).<br />
Une étude pilote a été menée à l échelle de l Ile-de-France pour tester des protoco<strong>les</strong><br />
et fournir une idée de la qualité des résultats à attendre. 50 mail<strong>les</strong> ont été tirées au sort<br />
préalablement (figure 4) dans <strong>les</strong>quel<strong>les</strong> <strong>les</strong> huit placettes ont été inventoriées.<br />
105
Figure 4 : Carte de répartition des 50 mail<strong>les</strong> échantillonnées en Île-de-France au cours des<br />
campagnes 2005 et 2006<br />
Cet échantillonnage est relativement adéquat puisque 67% des inventaires ont été<br />
effectués (aléatoirement) dans des zones cultivées, 23% en milieu forestier, et 10 % dans des<br />
zones urbaines, ce qui correspond assez fidèlement à la proportion de chacun de ces habitats<br />
en Ile-de-France.<br />
Dans <strong>les</strong> relevés, 429 espèces ont été recensées, ce qui représente 25% de l ensemble<br />
des espèces recensées à ce jour dans la région. On peut donc affirmer qu avec cette méthode<br />
simple, une partie significative de la flore est échantillonnée, même si il s agit de la fraction la<br />
plus commune (figure 5).<br />
106
Fréquence des espèces (en %)<br />
35<br />
30<br />
25<br />
20<br />
15<br />
10<br />
5<br />
0<br />
CCC CC C AC AR R TR RR<br />
statut de rareté<br />
Figure 5 : Fréquence des espèces par classe de rareté (CCC=extrêmement commun ; CC=très<br />
commun ; C=commun ; AC=assez commun ; AR=assez rare ; R=rare ; TR=très rare et<br />
RR=extrêmement rare). Le statut de rareté à 8 degrés a été défini par le CBNBP (2003).<br />
Les premiers résultats ont permis de montrer que la richesse spécifique dépendait en<br />
premier lieu <strong>du</strong> type d habitat dans lequel l inventaire floristique a été réalisé (forêt, champ,<br />
ville ) (50% de la variabilité expliquée), de la variabilité paysagère à l intérieur d une maille<br />
(paysage très hétérogène fait de beaucoup de petites parcel<strong>les</strong> diversifiées ou bien paysage<br />
très homogène (grandes cultures par exemple)) (26%) et de facteurs stationnels (roche mère<br />
(20%) et pente (4%)).<br />
Nous espérons que cette étude va s étendre rapidement au reste <strong>du</strong> territoire français<br />
pour que <strong>les</strong> grandes tendances d évolution de la répartition des espèces puissent être<br />
renseignées et intégrées dans <strong>les</strong> modè<strong>les</strong> prédictifs.<br />
En résumé, l ensemble de ces travaux montre que le travail <strong>du</strong> botaniste est d une<br />
extrême utilité pour la compréhension <strong>du</strong> fonctionnement de la biodiversité et la mise en place<br />
de mesures de conservation. En réalisant leurs inventaires, <strong>les</strong> botanistes apportent des<br />
données précieuses dont l analyse sera d autant plus facilitée s ils sont bien standardisés :<br />
Les sites échantillonnés doivent être représentatifs de la zone étudiée. En pratique, le<br />
mieux est de tirer leur localisation aléatoirement sur une carte. Dans <strong>les</strong> milieux où la<br />
flore est peu présente (comme en ville par exemple), il est préconisé de répertorier <strong>les</strong><br />
sites, au préalable, puis de tirer au sort ceux qui vont être étudiés, au pro rata de leur<br />
surface sur la zone.<br />
Les inventaires doivent être le plus exhaustif possible sur plusieurs placettes de tail<strong>les</strong><br />
standardisées dont la localisation dans le site doit se faire au préalable soit de façon<br />
systématique, soit de façon aléatoire.<br />
Pour être comparab<strong>les</strong>, <strong>les</strong> inventaires doivent être réalisés dans un laps de temps fixe<br />
(Archaux et al. 2006). Les espèces sont détectab<strong>les</strong> de façon séquentielle au cours de<br />
l année, il est donc préférable d effectuer tous <strong>les</strong> inventaires à la même saison.<br />
Ainsi, ces données prélevées selon <strong>les</strong> règ<strong>les</strong> définies plus haut, confrontées à des<br />
données de Mode d Occupation <strong>du</strong> Sol ou de climat, peuvent renseigner de façon efficace des<br />
modè<strong>les</strong> prédictifs. Grâce à ces modè<strong>les</strong>, en testant différents scénarios de gestion ou de<br />
climat, <strong>les</strong> scientifiques seront bientôt à même de fournir des conseils efficaces pour la<br />
préservation de la biodiversité.<br />
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109
Les apports <strong>du</strong> S.I.G dans l évaluation des impacts<br />
écologiques :<br />
Exemple de l aménagement d un fleuve pour la ré<strong>du</strong>ction<br />
<strong>du</strong> risque Inondation<br />
Marie-Pierre VECRIN-STABLO 1 , Julian BRANCIFORTI 1 , Emmanuel<br />
PEREZ 2 , Mathias VOIRIN 1 & Christelle JAGER 1<br />
1 : Bureau d études ESOPE<br />
52-54, rue de Metz - 57950 Hagondange - FRANCE<br />
E-mail : vecrin@bureau-etude-esope.com<br />
2 : Université de Liège<br />
Département en Sciences et Gestion de l Environnement - Laboratoire Eau et<br />
Environnement - Avenue de Longwy, 185 - 6700 Arlon - BELGIQUE<br />
1. Intro<strong>du</strong>ction<br />
Suite à d importantes crues dans le lit majeur de la Meuse, l Etablissement Public<br />
d Aménagement de la Meuse et de ses Affluents (EPAMA) a été chargé de définir une<br />
stratégie partagée, cohérente et solidaire d aménagement et de gestion des crues à l échelle <strong>du</strong><br />
bassin français <strong>du</strong> fleuve, de Neufchâteau (88) à Givet (08). Le scénario d aménagement<br />
envisagé prévoit l implantation de sept retenues en lit majeur, dans des secteurs déjà<br />
inondab<strong>les</strong>, non urbanisés, à l activité principalement agricole, en compensation à des<br />
protections localisées (recalibrage, coupure de boucle, remplacement de barrage à aiguil<strong>les</strong> et<br />
endiguement).<br />
Plus précisément, <strong>les</strong> retenues consistent en l aménagement de Zones de<br />
Ralentissement Dynamique des Crues (ZRDC). Ces ZRDC sont constituées de digues de<br />
retenue non pérennes, barrant transversalement le lit majeur et partiellement le lit mineur.<br />
El<strong>les</strong> garantissent le maintien des conditions norma<strong>les</strong> d écoulement pendant <strong>les</strong> périodes<br />
d étiage et de crues courantes afin de ne pas perturber le fonctionnement des milieux, et surstockent<br />
temporairement <strong>les</strong> eaux lors <strong>du</strong> passage des crues rares, ce qui entraîne un<br />
écrêtement des débits de pointe et un abaissement de la ligne d eau à l aval.<br />
Or <strong>les</strong> secteurs de la plaine alluviale de la Meuse concernés par ces ZRDC sont<br />
caractérisés par des complexes d habitats prairiaux et aquatiques remarquab<strong>les</strong> sur le plan de<br />
la biodiversité, en étroite relation avec le fonctionnement hydrique de la plaine alluviale. La<br />
vallée de la Meuse est en effet connue pour abriter de nombreuses espèces anima<strong>les</strong> et<br />
végéta<strong>les</strong> inféodées aux prairies alluvia<strong>les</strong>. Citons pour exemple le très emblématique Râle<br />
des genêts (Crex crex), oiseau typique de ces milieux et fortement menacé à l échelle<br />
mondiale depuis plusieurs décennies. La vallée de la Meuse correspond au principal site de<br />
nidification de l espèce en Lorraine.<br />
Au regard <strong>du</strong> caractère exceptionnel de certains habitats et espèces de la vallée de la<br />
Meuse, l EPAMA a initié une étude scientifique visant à construire et à valider un modèle<br />
capable de prédire l impact de ces aménagements sur le milieu naturel. Cette étude a pour but<br />
de répondre aux questions suivantes :<br />
- Des conséquences sur le milieu naturel sont-el<strong>les</strong> atten<strong>du</strong>es en amont des ouvrages, où<br />
<strong>les</strong> eaux d inondation seront temporairement sur-stockées ?<br />
- Si oui, de quelle nature et de quelle ampleur pour le milieu naturel ?<br />
110
Pour ce faire, la mission se compose en deux étapes. L étape 1 vise à la réalisation<br />
d un état de référence des zones d étude. L étape 2 consiste à construire le modèle prédictif<br />
des impacts écologiques des aménagements sur le milieu naturel.<br />
o Etape 1 : Réalisation d un état de référence des zones d étude :<br />
La première étape <strong>du</strong> travail a consisté à établir un état de référence écologique,<br />
au sein des secteurs concernés, sur la flore, l avifaune et l ichtyofaune. Ces trois<br />
compartiments biologiques constituent ainsi <strong>les</strong> descripteurs écologiques utilisés pour le<br />
modèle. Une étude de terrain réalisée en 2006 a ainsi permis de pro<strong>du</strong>ire d une part des<br />
cartographies d habitats et d espèces remarquab<strong>les</strong> pour chacun de ces groupes et d autre<br />
part des cartographies d enjeux écologiques, qui seront utilisées lors des étapes<br />
ultérieures.<br />
o Etape 2 : construction d un modèle prédictif des impacts écologiques des aménagements<br />
sur le milieu naturel :<br />
La seconde étape, en cours de réalisation, vise à construire un modèle prédictif<br />
anticipant la réaction des compartiments biologiques suivant <strong>les</strong> différents scénarii<br />
d aménagement hydraulique. Pour ce faire, <strong>les</strong> descripteurs écologiques seront confrontés<br />
aux paramètres agrico<strong>les</strong>, paysagers et hydrauliques (à savoir <strong>du</strong>rée et hauteur de<br />
submersion). L objectif est de mettre en exergue <strong>les</strong> variab<strong>les</strong> explicatives, c'est-à-dire <strong>les</strong><br />
facteurs qui ont une influence significative sur la présence des descripteurs écologiques.<br />
Cette démarche de modélisation con<strong>du</strong>ira à la pro<strong>du</strong>ction de cartographies prédictives des<br />
communautés végéta<strong>les</strong> et anima<strong>les</strong> atten<strong>du</strong>es suite aux aménagements proposés et donc à<br />
l évaluation des impacts des aménagements hydrauliques sur ces communautés.<br />
Le travail étant en cours de réalisation actuellement, seule la démarche retenue et le<br />
type de résultats atten<strong>du</strong>s sont présentés ici, tant pour le volet diagnostic <strong>du</strong> milieu naturel que<br />
pour le volet modélisation.<br />
2. Description de la zone d étude<br />
La zone d étude est constituée de sept entités, qui sont majoritairement situées dans<br />
le département de la Meuse et très ponctuellement dans <strong>les</strong> Ardennes. El<strong>les</strong> sont réparties<br />
entre Void-Vacon (55) au sud et Mouzon (08) au nord.<br />
Ces sept entités correspondent aux sept ouvrages qui sont envisagés dans la vallée de<br />
la Meuse. Sont concernés <strong>les</strong> ouvrages de Mouzon, Dun-sur-Meuse, Consenvoye, Dieue-sur-<br />
Meuse, Tilly-sur-Meuse, Saint-Mihiel et Void.<br />
Au total, ce sont près de 3900 ha qui ont fait l objet de prospections. Les zones<br />
d études correspondent en fait à tout secteur en amont d une ZRDC où une surcôte est<br />
atten<strong>du</strong>e dans le cas d une crue centennale.<br />
Longue de plus de 900 km, la Meuse prend sa source sur le plateau de Langres (en<br />
Haute-Marne), elle franchit entre autres Neufchâteau, Ver<strong>du</strong>n, Sedan puis Charleville-<br />
Mézières avant d arriver en Belgique. Elle parcourt ainsi près de 490 km en France. Une<br />
partie de son cours, entrecoupé de canaux, est navigable (de Givet à Saint-Mihiel).<br />
La Meuse est un département rural. Le fleuve coule dans une vallée élargie. Le lit<br />
majeur constitue ainsi une large plaine où la Meuse serpente et décrit de nombreux méandres.<br />
Essentiellement composé d écosystèmes prairiaux, le lit majeur n est ponctué que de<br />
quelques éléments boisés. Le paysage a été façonné depuis des sièc<strong>les</strong> principalement par<br />
l exploitation agricole. Cette exploitation agricole est restée pendant très longtemps<br />
traditionnelle. Malgré une intensification des pratiques agrico<strong>les</strong> depuis ces dernières<br />
décennies, le lit majeur reste encore dominé par <strong>les</strong> milieux ouverts prairiaux.<br />
111
La dominance de ces écosystèmes prairaux et pâturés s expliquent par <strong>les</strong><br />
inondations de la Meuse, qui rythment l usage agricole de la vallée. Les exploitations<br />
agrico<strong>les</strong> qui bordent la vallée sont ainsi essentiellement des exploitations d élevage (plus de<br />
90%) (Chambre d agriculture de la Meuse, 2006).<br />
Les cultures sont peu présentes dans le paysage, seu<strong>les</strong> quelques parcel<strong>les</strong> cultivées<br />
ponctuent le lit majeur (essentiellement <strong>du</strong> maïs, qui se prête le mieux à une exploitation en<br />
plaine inondable).<br />
C est pourquoi la Meuse et ses prairies sont aujourd hui encore dotées d une forte<br />
valeur écologique, tant d un point de vue floristique que faunistique, notamment<br />
avifaunistique. Parmi <strong>les</strong> espèces d oiseaux nicheurs <strong>les</strong> plus remarquab<strong>les</strong>, on citera<br />
notamment le Courlis cendré (Numenius arquata), le Tarier des prés (Saxicola rubetra) et le<br />
Râle des genêts (Crex crex).<br />
En fait, la vallée de la Meuse abrite des prairies alluvia<strong>les</strong> dont le déterminisme est<br />
étroitement lié au fonctionnement hydraulique de la vallée et à leur mode d exploitation. Ces<br />
milieux présentent un intérêt écologique très fort.<br />
3. Démarche retenue<br />
3.1. Etape 1 : réalisation d un état de référence des zones d étude<br />
La description de l état initial des zones d études répond à deux objectifs :<br />
- recueillir <strong>les</strong> données nécessaires à la construction <strong>du</strong> modèle (synthèse des données<br />
bibliographiques et expertises de terrain),<br />
- estimer <strong>les</strong> enjeux écologiques des zones concernées par le projet (avant la mise en<br />
uvre des aménagements).<br />
Les descripteurs écologiques sont retenus : la flore et <strong>les</strong> habitats, l avifaune et<br />
l ichtyofaune.<br />
Volet Flore et Habitats<br />
La description <strong>du</strong> compartiment végétal a été réalisée suivant plusieurs approches :<br />
- réalisation de 240 relevés phytosociologiques, suivant la méthode de Braun-Blanquet<br />
(1964),<br />
- cartographie des habitats des zones d étude, suivant la codification CORINE Biotopes<br />
(Bissardon et al., 1997),<br />
- recherche des espèces remarquab<strong>les</strong> et invasives. La définition des espèces<br />
remarquab<strong>les</strong> est basée sur Terrisse et Caupenne (1992), auxquel<strong>les</strong> sont ajoutées <strong>les</strong><br />
espèces mentionnées dans Vernier (2001) comme étant très rares en Lorraine. La<br />
définition des espèces invasives est quant à elle basée sur <strong>les</strong> travaux d Aboucaya<br />
(1999).<br />
Les expertises floristiques ont été réalisées de mai à septembre 2006.<br />
A l issue de ces expertises, différents jeux de données ont été pro<strong>du</strong>its et sont<br />
exploitab<strong>les</strong> pour l étape de modélisation. Tout d abord, la matrice des 240 relevés a été<br />
utilisée pour affiner la description des habitats rencontrés sur <strong>les</strong> zones d études. Ces relevés<br />
ont été confrontés à la littérature, et notamment aux nombreux travaux de l université de Metz<br />
portant sur <strong>les</strong> différentes vallées alluvia<strong>les</strong> <strong>du</strong> nord-est de la France (Grévilliot 1996 et<br />
Muller et al. 2000, entre autres).<br />
112
Cette matrice de relevés est également un outil de base pour la construction <strong>du</strong><br />
modèle (cf. Etape 2).<br />
Différentes bases de données complètent <strong>les</strong> résultats. Une base de données « espèces<br />
remarquab<strong>les</strong> » a été construite. Y sont notamment spécifiés <strong>les</strong> différentes espèces<br />
remarquab<strong>les</strong> recensées, leur statut, leur localisation ainsi que <strong>les</strong> effectifs rencontrés.<br />
De la même manière, une base de données « espèces invasives » a été construite.<br />
Concernant la base de données « habitats », elle renseigne, pour chaque polygone<br />
cartographié sur le terrain, différentes informations, qui permettent d une part sa description<br />
phytosociologique et d autre part l évaluation de l enjeu écologique qui lui est associé. Ainsi<br />
cette base contient <strong>les</strong> catégories suivantes : dénomination de l habitat, code CORINE<br />
Biotopes, Code Natura 2000 (si l habitat est reconnu d intérêt communautaire au titre de la<br />
directive Habitats/Faune/Flore), état de conservation, si l habitat abrite des espèces protégées<br />
ou au contraire des espèces invasives, si l habitat est déterminant ZNIEFF (suivant DIREN<br />
Lorraine, 2006), si l habitat est caractéristique de la vallée inondable, si il est artificialisé et<br />
son niveau de rareté au sein de la zone d étude.<br />
L ensemble de ces critères a permis la définition d une cotation qui se tra<strong>du</strong>it par un<br />
niveau d enjeu floristique. Plusieurs catégories sont retenues : enjeux floristiques très fort,<br />
fort, moyen et faible.<br />
L ensemble de ces informations a fait l objet de différents ren<strong>du</strong>s, sous forme de<br />
tableaux synthétiques et de cartographies (notamment cartographies des habitats, des espèces<br />
remarquab<strong>les</strong>, des espèces invasives et des enjeux floristiques de la zone d étude).<br />
3.1.1. Volet Avifaune<br />
La description des cortèges avifaunistiques a été réalisée suivant plusieurs<br />
approches :<br />
- Inventaire de l avifaune nicheuse, présente <strong>du</strong>rant la saison de nidification :<br />
Recensement des oiseaux chanteurs par la méthode des points d écoute<br />
(réalisation de 240 relevés), protocole adapté à partir de la méthode des IPA<br />
(Blondel et al., 1970),<br />
prospections complémentaires<br />
sorties nocturnes<br />
- Inventaire de l avifaune migratrice et hivernante, présente <strong>du</strong>rant la période<br />
internuptiale, via des prospections diurnes.<br />
Les expertises ornithologiques ont été réalisées entre février 2006 et février <strong>2007</strong>.<br />
De la même manière que pour la flore, <strong>les</strong> recensements avifaunistiques ont permis le<br />
recueil de nombreuses données, qui ont été intégrées à une base de données « avifaune ».<br />
Cette base de données constitue d une part la matrice de base pour la construction <strong>du</strong> modèle<br />
prédictif et d autre part, elle permet la définition des enjeux ornithologiques des différentes<br />
zones d études.<br />
3.1.2. Volet Ichthyofaune<br />
La première phase <strong>du</strong> volet ichthyofaune a visé à définir <strong>les</strong> espèces cib<strong>les</strong>. Ont été<br />
retenus le Brochet et la Loche d étang. Le travail de terrain a alors consisté à évaluer la<br />
qualité des habitats de ces espèces cib<strong>les</strong> en situation de référence.<br />
113
Pour le Brochet, l évaluation des fonctionnalités des populations pour l ensemble des<br />
phases de son cycle de vie (à savoir repro<strong>du</strong>ction, stades uf, larvaire, juvénile et a<strong>du</strong>lte) a été<br />
réalisée par une approche physique <strong>du</strong> cours d eau [indice de conformité d Inskip (Inskip,<br />
1982)].<br />
La méthode de l indice de conformité d Inskip est basée sur trois principa<strong>les</strong><br />
variab<strong>les</strong> : surface de la végétation hélophytique et prairiale (frayère, potentiel de<br />
repro<strong>du</strong>ction) ; surface de la végétation macrophytique (capacité d accueil) et stabilité des<br />
niveaux d eau dans <strong>les</strong> frayères (efficacité des frayères potentiel<strong>les</strong> à Brochet).<br />
Pour la Loche d étang, une comparaison de la cartographie des habitats optimaux de<br />
l espèce sur <strong>les</strong> zones d étude avec ses préférences d habitats connues dans la littérature<br />
scientifique a été effectuée.<br />
Les expertises piscico<strong>les</strong> ont été réalisées entre avril 2006 et avril <strong>2007</strong>.<br />
Concernant la problématique <strong>du</strong> brochet, la collecte de données s est articulée<br />
suivant différentes phases : établissement d une cartographie précise des sites potentiels de<br />
repro<strong>du</strong>ction de l espèce, établissement d une cartographie précise de la végétation aquatique<br />
et établissement d une topographie fine sur un échantillon représentatif et stratifié de frayèrestests<br />
identifiées au préalable.<br />
Ces différents jeux de données ont ensuite été confrontés aux paramètres<br />
hydrauliques.<br />
Afin de permettre un calcul automatique des indices, l ensemble des données<br />
collectées pendant <strong>les</strong> inventaires de terrain ainsi que <strong>les</strong> paramètres hydrauliques ont été<br />
intégrés dans une géodatabase unique. Ce système permet entre autre la gestion de différentes<br />
bases de données. Ces différentes bases de données sont liées par un schéma de relation et un<br />
système de requêtes afin de réaliser automatiquement <strong>les</strong> calculs nécessaires à l élaboration<br />
des indices.<br />
Cette géodatabase a permis la définition des différents indices pour chacune des<br />
ZRDC.<br />
Concernant la Loche d étang, le travail a consisté essentiellement en une phase de<br />
terrain, qui a permis d identifier différents sites comme potentiellement favorab<strong>les</strong> à la Loche<br />
d étang.<br />
Ces différents jeux de données piscico<strong>les</strong> ont ensuite été utilisés pour définir <strong>les</strong><br />
enjeux piscico<strong>les</strong>. Comme pour <strong>les</strong> autres groupes, <strong>les</strong> bases de données ont permis la<br />
réalisation de cartographie des enjeux piscico<strong>les</strong>.<br />
3.1.3. Synthèse des enjeux<br />
Les résultats issus des prospections et des analyses inhérentes à chaque groupe<br />
écologique ont été exploités afin de créer une dernière base de données, nommée « enjeux<br />
écologiques ». Dans cette base, sont synthétisés l ensemble des enjeux floristiques,<br />
avifaunistiques et piscico<strong>les</strong>. La confrontation de ces trois résultats a permis la définition des<br />
enjeux écologiques globaux. L approche utilisée pour la construction de cette base<br />
synthétique est additive, mais non soustractive. Ainsi l enjeu maximal est retenu, quelque soit<br />
le groupe écologique concerné. Par exemple, si un secteur présente un enjeu fort pour la flore<br />
mais faible pour l avifaune et <strong>les</strong> poissons, l enjeu global est défini comme fort, et non pas<br />
moyen. On retient ainsi toujours l enjeu maximal attribué.<br />
Comme précédemment, cette base de données a permis l élaboration de cartes<br />
synthétiques qui présentent <strong>les</strong> enjeux écologiques pour chacune des ZRDC.<br />
114
3.2. Etape 2 : Construction d un modèle prédictif des impacts écologiques des<br />
aménagements sur le milieu naturel<br />
3.2.1. Contexte théorique<br />
Les prairies alluvia<strong>les</strong> constituent des écosystèmes particuliers <strong>du</strong> fait de l alternance<br />
de périodes de submersion et d exondation. La <strong>du</strong>rée des inondations, le plus souvent<br />
hiverna<strong>les</strong>, conditionne la différentiation <strong>du</strong> tapis herbacé <strong>du</strong> système prairial. Il s avère donc<br />
que la végétation de ces milieux herbacés est directement orientée par le facteur hydrique en<br />
relation directe avec <strong>les</strong> inondations et la microtopographie <strong>du</strong> lit majeur. Un autre facteur agit<br />
également sur la composition floristique de tels milieux, il s agit <strong>du</strong> facteur anthropique. Bien<br />
que pris en compte dans le cadre de cette étude, ce facteur ne sera pas développé ici.<br />
Différents travaux réalisés par l université de Metz ont mis en évidence la<br />
structuration des groupements végétaux le long <strong>du</strong> gradient hydrique (figure 1). Les<br />
communautés végéta<strong>les</strong> subissent en effet des <strong>du</strong>rées d inondation et des fluctuations de la<br />
nappe d ampleurs différentes.<br />
Ainsi, au niveau topographique le plus élevé, <strong>les</strong> prairies sèches à Colchique<br />
d automne (Colchico-Festucetum pratensis) sont rarement inondées. Ce groupement prairial<br />
est dominé par des graminées tel<strong>les</strong> que Avenula pubescens, Arrhenatherum elatius et des<br />
espèces mésophi<strong>les</strong>, tel<strong>les</strong> que Sanguisorba minor, Colchicum autumnale.<br />
A un niveau intermédiaire, <strong>les</strong> prairies moyennement humides à Séneçon aquatique<br />
(Senecioni-Oenanthetum mediae) occupent de larges surfaces (en moyenne, plus de 85% des<br />
écosystèmes prairiaux de la plaine) et sont fréquemment inondées. Ce groupement végétal est<br />
également dominé par <strong>les</strong> graminées, tel<strong>les</strong> que Phleum pratense, Festuca pratensis. Les<br />
espèces mésophi<strong>les</strong> (Lotus corniculatus, Trifolium pratense) et mésohygrophi<strong>les</strong> (Senecio<br />
aquaticus, Achillea ptarmica) caractérisent cette association.<br />
Les prairies humides à Oenanthe fistuleuse (Gratiolo-Oenanthetum fistulosae) sont<br />
situées au niveau topographique le plus bas et sont le plus longuement inondées. Les espèces<br />
hygrophi<strong>les</strong> (Myosotis scorpioides, Mentha aquatica) et <strong>les</strong> hélophytes (Iris pseudacorus,<br />
Carex acutiformis) caractérisent ce groupement prairial.<br />
La figure 2 illustre un exemple des relations entre <strong>les</strong> groupements prairiaux, le<br />
gradient topographique et le niveau hydrique.<br />
Figure 1 : Illustration d une toposéquence de succession végétale classiquement observée en<br />
Vallée de la Meuse (source : Muller et al., 2000)<br />
115
Figure 2 : Relations entre <strong>les</strong> communautés végéta<strong>les</strong> et le niveau d eau pendant l hiver 1994/95<br />
(d après Grévilliot, 1996)<br />
250<br />
200<br />
150<br />
100<br />
50<br />
0<br />
23/11<br />
20/12<br />
13/01<br />
26/01<br />
07/02<br />
3.2.2. Hypothèses de travail<br />
Sur la base des relations présentées ci-dessus, il convient de s interroger sur <strong>les</strong><br />
conséquences des modifications des <strong>du</strong>rées de submersion de ces écosystèmes prairiaux,<br />
atten<strong>du</strong>es suite à la mise en uvre des ouvrages. La question à laquelle doit répondre le<br />
modèle est la suivante : <strong>les</strong> modifications des <strong>du</strong>rées de submersion atten<strong>du</strong>es dans le cadre<br />
des ZRDC sont el<strong>les</strong> de nature à modifier <strong>les</strong> cortèges floristiques des prairies ? Par exemple,<br />
le cortège floristique d une prairie mésohygrophile, sera-t-il modifié suite à la mise en uvre<br />
de l ouvrage et va-t il évoluer vers un cortège de prairie hygrophile ?<br />
De la même manière, si on note une modification des cortèges floristiques, <strong>les</strong><br />
cortèges faunistiques associés seront-ils modifiés ?<br />
3.2.3. Démarche retenue pour la construction des modè<strong>les</strong><br />
3.2.3.1. Volet flore, habitats et avifaune<br />
Dans un premier temps, le travail consiste à confronter <strong>les</strong> jeux de données<br />
écologiques avec <strong>les</strong> paramètres hydrauliques, calculés avant aménagement (état initial) afin<br />
de construire et valider un modèle explicatif d occurrence des habitats et des espèces<br />
remarquab<strong>les</strong>.<br />
Cette étape s attache à détailler <strong>les</strong> relations qui lient <strong>les</strong> descripteurs écologiques à<br />
certaines variab<strong>les</strong> explicatives (tel<strong>les</strong> que hauteurs, <strong>du</strong>rées de submersion). Dans l état initial<br />
(situation actuelle avant projet), ces relations peuvent être décrites par régression logistique, et<br />
la pertinence de chaque variable explicative peut être évaluée sur la base de tests statistiques.<br />
Seront ainsi éliminées certaines variab<strong>les</strong> hydrauliques, qui manifestement n influent pas sur<br />
la présence de certaines espèces végéta<strong>les</strong>, d oiseaux, ou de certains habitats. A l inverse, <strong>les</strong><br />
tests statistiques permettront de mettre en évidence <strong>les</strong> facteurs qui ont une influence<br />
significative sur la présence des descripteurs écologiques (exemple hypothétique : <strong>du</strong>rée<br />
moyenne de submersion en mars). Les variab<strong>les</strong> explicatives finalement retenues pourront<br />
être agrégées par régression logistique multiple (Lehman et al., 2002; Manel et al., 1999). Les<br />
résultats de cette modélisation consistent donc en des équations qui lient la probabilité de<br />
présence d un descripteur écologique à la valeur de différentes variab<strong>les</strong> explicatives.<br />
23/02<br />
116<br />
08/03<br />
22/03<br />
05/04<br />
Prairie mésophile Prairie mésohygrophile Prairie hygrophile<br />
26/04
Dans un second temps, <strong>les</strong> jeux de données écologiques seront confrontés aux<br />
paramètres hydrauliques à l état projet (c est-à-dire après la mise en place des ZRDC)<br />
calculés sur la base d un modèle hydraulique. Il résultera de cette étape un modèle des<br />
données écologiques atten<strong>du</strong>es, à l état projet.<br />
La dernière phase de la construction d un modèle réside dans sa validation, qui pourra se faire<br />
par validation croisée au sein de l échantillonnage des 7 ZRDC (« cross-validation » sur<br />
données indépendantes). Des indices d évaluation des modè<strong>les</strong> pro<strong>du</strong>its seront ensuite<br />
calculés et permettront d éliminer <strong>les</strong> modè<strong>les</strong> <strong>les</strong> moins pertinents pour ne retenir que <strong>les</strong><br />
modè<strong>les</strong> <strong>les</strong> plus efficaces à l usage.<br />
Il sera ainsi possible de pro<strong>du</strong>ire une cartographie prédictive des secteurs de présence<br />
potentielle des communautés végéta<strong>les</strong> et des espèces végéta<strong>les</strong> ou aviennes remarquab<strong>les</strong>, en<br />
fonction de différents scénarii d aménagements. Ce ren<strong>du</strong> cartographique rend possible<br />
l évaluation qualitative et quantitative des impacts des aménagements hydrauliques sur <strong>les</strong><br />
espèces et habitats concernés par <strong>les</strong> législations réglementant <strong>les</strong> atteintes portées à<br />
l environnement.<br />
3.2.3.2. Volet ichtyofaune<br />
Concernant le Brochet, la mission de modélisation n est pas dissociable de l étape 1,<br />
qui est déjà en elle-même un travail de modélisation de la fonctionnalité des frayères à l état<br />
initial. Afin de mener à bien cette étape, il s agit d utiliser <strong>les</strong> paramètres hydrauliques<br />
calculés à l état projet et de tester leur influence sur la fonctionnalité des frayères. Ce travail<br />
est réalisé, de la même manière que lors de l étape 1, grâce à l indice Inskip.<br />
Concernant la Loche d étang, l évaluation des impacts sera obtenue directement par<br />
comparaison de la surface des habitats optimaux à l état projet et à l état initial, qui sera une<br />
des sorties <strong>du</strong> modèle flore / habitats.<br />
4. Premières conclusions et perspectives<br />
Bien que l étude soit toujours en cours de réalisation actuellement, un premier bilan<br />
peut être tiré de ce travail.<br />
Concernant l étape 1, la réalisation de l état de référence a permis de confirmer le<br />
fort intérêt écologique des secteurs concernés, et ce pour <strong>les</strong> trois descripteurs appréhendés<br />
dans le cadre de cette étude. Cependant, bien que la littérature soit riche sur cette vallée, ce<br />
travail de terrain a également permis de mettre en exergue de nouvel<strong>les</strong> données. Par exemple,<br />
de nombreuses nouvel<strong>les</strong> stations botaniques d espèces végéta<strong>les</strong> protégées ont été<br />
découvertes au cours de ces prospections.<br />
Concernant l étape 2, la démarche présentée sera réitérée pour chaque espèce et<br />
habitat remarquable identifiés au cours de l étape 1. Cela permettra ainsi l évaluation des<br />
variations, qu el<strong>les</strong> soient positives ou négatives, quant aux potentialités d occurrence des<br />
habitats et des espèces remarquab<strong>les</strong> sur chacune des ZRDC étudiées.<br />
Cependant, cette étude comporte plusieurs limites. Tout d abord, seuls quelques<br />
groupes écologiques sont appréhendés. Il aurait été intéressant d inclure dans ce programme<br />
d autres groupes faunistiques, notamment l herpétofaune et l entomofaune. A noter que la<br />
présente étude n entre pas dans un cadre réglementaire. L ensemble des différents groupes<br />
faunistiques classiquement étudiés dans le cadre d une étude d impact sera étudié dès lors que<br />
<strong>les</strong> projets feront l objet d études réglementaires.<br />
Par ailleurs, dans le cadre de cette étude, seu<strong>les</strong> <strong>les</strong> zones amont sont prises en<br />
compte. En effet, le travail de terrain et la modélisation ne portent que sur <strong>les</strong> secteurs qui font<br />
l objet d un surstockage. Il serait pourtant très intéressant d évaluer <strong>les</strong> conséquences<br />
écologiques atten<strong>du</strong>es en aval des ouvrages.<br />
117
Enfin, de manière générale, rappelons que la modélisation <strong>du</strong> milieu naturel peut<br />
s avérer difficile. Les informations issues <strong>du</strong> modèle permettront de statuer sur <strong>les</strong><br />
probabilités d occurrence des espèces et des habitats. Mais il conviendra de s interroger sur<br />
<strong>les</strong> différents facteurs qui conditionneront <strong>les</strong> patrons de distribution des espèces (dynamique<br />
des populations, capacité de dispersion, de recolonisation et d installation des espèces,<br />
compétition interspécifique, ).<br />
Aussi, parallèlement à cette étude de modélisation, un suivi diachronique a été initié<br />
par l EPAMA sur la ZRDC de Mouzon, où l ouvrage est en cours de construction. L objectif<br />
de ce suivi in situ est de décrire et analyser <strong>les</strong> modifications effectives <strong>du</strong> milieu naturel suite<br />
à la mise en place de l ouvrage.<br />
Il sera ainsi possible de confronter <strong>les</strong> distributions potentiel<strong>les</strong> prédites par le<br />
modèle avec <strong>les</strong> distributions réel<strong>les</strong>, observées sur le terrain.<br />
5. Bibliographie<br />
Aboucaya A., 1999. Premier bilan d'une enquête nationale destinée à identifier <strong>les</strong> xénophytes<br />
invasifs sur le territoire français (Corse comprise). Actes <strong>du</strong> colloque "Les plantes<br />
menacées de France", Brest, 15-17 octobre 1997. Bull. Sco. Bot. Centre Ouest. N.S., n°<br />
spécial, 19. 463-482.<br />
Bissardon M., Guibal L. & Rameau J.C. 1997. CORINE Biotopes. Version originale. Types<br />
d habitats français. ENGREF. Atelier Technique des Espaces Naturels. 179 p.<br />
Blondel J., Ferry C. & Frochot B. 1970. La méthode des indices ponctuels d abondance<br />
(I.P.A.) ou des relevés par "stations d écoutes". Alauda 38 : 55-71.<br />
Braun-Blanquet J. 1964. Pflanzensoziologie. 3rd ed. Springer, Wien.<br />
Chambre d Agriculture de la Meuse. 2006. Enquête agricole préalable à la rédaction <strong>du</strong><br />
document d objectifs. Site FR 4112008 ZPS de la Vallée de la Meuse. 15 p + annexes +<br />
cartes.<br />
DIREN Lorraine. 2006. Modernisation des ZNIEFF en Région Lorraine. Espèces et habitats<br />
déterminants de Lorraine. Rapport DIREN Lorraine. 84p.<br />
Grévilliot F. 1996. Les écosystèmes prairiaux de la plaine alluviale de la Meuse lorraine :<br />
Phytosociologie, dynamique et fonctionnement, en relation avec <strong>les</strong> gradients hydriques et<br />
<strong>les</strong> modifications des pratiques agrico<strong>les</strong>. Laboratoire de Phytoécologie. Université de<br />
Metz. 217 p. + annexes.<br />
Inskip P. D. 1982. Habitat suitability index models : Northern Pike. Biological Service<br />
Program and Division of Ecological Services, Fish ans Wildlife Service FWS/OBS-<br />
82/10.17 july 1982, 40 p.<br />
Lehman A., Overton J.McC. & Austin, M.P. 2002. Regression models for spatial prediction :<br />
their role for biodiversity and conservation. Biodiversity and Conservation 11 : 2085-<br />
2092.<br />
Manel S., Dias J.M. & Ormerod S.J. 1999. Comparing discriminant analysis, neural networks<br />
and logistic regression for predicting species distributions: a case study with a Himalayan<br />
river bird. Ecological Modelling 120 : 337-347.<br />
Muller S., Branciforti J., Corbonnois J., Grandet G., Grévilliot F., Jager C., Krebs L., Mony<br />
F., Mony J.F., Selinger-Looten R. & Vécrin M.P. 2000. Biodiversité et fonctionnement<br />
des écosystèmes prairiaux inondab<strong>les</strong> des vallées alluvia<strong>les</strong> dans le Nord-est de la France.<br />
Application à leur gestion conservatoire et restauration. Programme National de<br />
Recherche sur <strong>les</strong> Zones Humides. Ministère de l Aménagement <strong>du</strong> Territoire et de<br />
l Environnement. Agence de l Eau Rhin-Meuse. Région Lorraine. 139 p.<br />
Terrisse J. & Caupenne M. 1992. OGAF-Environnement canton de Marennes (17). Etude<br />
écologique préalable. Ministère de l Environnement. DIREN Poitou-Charentes, LPO. 38 p.<br />
Vernier F. 2001. Nouvelle Flore de Lorraine. 544 p. Kruch Editeur.<br />
118
Evolution générale de la flore de Flandre (Belgique) entre<br />
1939-1971 et 1972-2004 : évaluation des changements en tenant<br />
compte de l intensité d inventaire.<br />
Wouter Van Lan<strong>du</strong>yt, INBO, Rue <strong>du</strong> Clinique 25, B-1070 Bruxel<strong>les</strong>,<br />
wouter.vanlan<strong>du</strong>yt@inbo.be<br />
Ivan Hoste, Jardin botanique national de Belgique, Domein van Bouchout, B-1860 Meise<br />
Leo Vanhecke, Jardin botanique national de Belgique, Domein van Bouchout, B-1860 Meise<br />
Intro<strong>du</strong>ction<br />
La région de Flandre ensemble avec la région Capital Bruxelloise est une région de<br />
13692 km². Cette région se trouve presque complètement dans le domaine phytogéographique<br />
Atlantique et il ya peut de variation d altitude (max. hauteur 287m) et de variations<br />
climatologiques. L occupation <strong>du</strong> sol est dominée par l agriculture et <strong>les</strong> urbanisations.<br />
Le début de la cartographie systématique de la flore en Belgique en générale et en<br />
Flandre en particulier se situe en 1939 quand Emile van Rompaey mis au point un système<br />
d inventaire au base d un maillage des kilomètres carrées sur toute le territoire de la Belgique.<br />
Avec des bordereaux des plantes la présence de toutes <strong>les</strong> espèces de plantes sauvages dans<br />
chaque maille doit être notée. En 1972 cette recherche résulte dans l Atlas de la Flore Belge et<br />
Luxembourgeoise (Van Rompaey & Delvosalle 1972). Dans cet atlas la distribution des<br />
espèces est présentée avec une maille de 16 km². Depuis la publication de cette atlas la<br />
cartographie de la flore en Belgique en générale en en Flandre en particulier continue avec la<br />
même méthodologie. En Flandre, depuis le début de 1995 la recherche floristique est<br />
coordonnée par l association Flo.Wer. Une des objectifs de cette nouvelle association dans le<br />
temps était de publier un nouvel atlas pour la Flandre. En 2006 cette objectif est réalisée par<br />
la publication de l Atlas de flore de la Flandre et de la région Bruxelloise (Van Lan<strong>du</strong>yt et al.<br />
2006).<br />
Méthodologie pour évaluer <strong>les</strong> changements de la distribution des espèces<br />
La réalisation de l Atlas de la flore vasculaire (1417 espèces) de Flandre et de<br />
Bruxel<strong>les</strong> a permis de comparer deux périodes de cartographie (1939-1971 et 1972-2004)<br />
(Hoste et al. 2006). En effet, le territoire de la Flandre a été cartographié pendant ces deux<br />
périodes (33 ans chacune) selon une méthode similaire, et pour toutes <strong>les</strong> mail<strong>les</strong> de synthèse<br />
(4 x 4 km) <strong>du</strong> réseau cartographique.<br />
Toutefois, <strong>les</strong> résultats des deux périodes ne sont pas faci<strong>les</strong> à comparer <strong>du</strong> fait d un<br />
inventaire plus intensif en 1972-2004 qu en 1939-1971. Pendant la première période, la<br />
plupart des mail<strong>les</strong> de 16 km² n avaient été prospectées que pour 1-3 unités de base (1km²),<br />
tandis que lors de la deuxième période au moins 4 unités de 1km² ont été prospectées dans<br />
presque toutes <strong>les</strong> mail<strong>les</strong> de 16 km² (avec même plus de 8 unités de 1 km² pour la moitié des<br />
mail<strong>les</strong>). Du fait de cet inventaire plus approfondi, le nombre moyen d espèces par carré de 4<br />
x 4 km a augmenté de 250 à 350. Même si l aire globale de la distribution des espèces n a pas<br />
changé, cel<strong>les</strong>-ci sont souvent mieux représentées dans la deuxième période. Pour pouvoir<br />
faire la distinction entre <strong>les</strong> changements réels de la flore en Flandre et l effet d intensité<br />
d inventaire, nous avons calculé le changement relatif de chaque espèce en le comparant avec<br />
le comportement de l ensemble des espèces (Telfer et al. 2002), celui-ci étant estimé par la<br />
relation entre le nombre des mail<strong>les</strong> de 16 km² occupés par <strong>les</strong> espèces pour <strong>les</strong> deux périodes<br />
(Fig. 1). La régression mesure l effet d intensité d inventaire. La valeur rési<strong>du</strong>elle des points<br />
(<strong>les</strong> espèces) vis-à-vis de la ligne de régression indique le changement réel (indice de<br />
changement). Un inventaire plus intensif a relativement moins d effet quand <strong>les</strong> espèces sont<br />
très communes ou très rares (Fig. 2).<br />
119
Pour chaque espèce on peut donc calculer un indice de changement. Ces indices<br />
varient entre +6.06 et -3.13. Le zéro indice qu il n y a pas de changements relatifs au<br />
changement général.<br />
période 1972-2004<br />
6<br />
4<br />
2<br />
0<br />
-2<br />
-4<br />
-6<br />
y = 1.0726x + 0.7858<br />
R 2 = 0.8606<br />
-8<br />
-6 -4 -2 0 2 4<br />
période 1939-1971<br />
Fig. 1: Relation entre le nombre de carrés IFBL occupés par espèce en 1939-71 et en 1972-<br />
2004. (transformation logit des variab<strong>les</strong> ; n = 857 sp.)<br />
nombre de carrés expectées dans la periode 1972-2004<br />
1000<br />
900<br />
800<br />
700<br />
600<br />
500<br />
400<br />
300<br />
200<br />
100<br />
0<br />
0 100 200 300 400 500 600 700 800 900 1000<br />
Nombre de carrés dans la période 1939-1971<br />
Fig. 2 : Relation entre le nombre de carrés IFBL occupés par <strong>les</strong> espèces en 1939-72 et le<br />
nombre des carrés atten<strong>du</strong>s en 1972-2004.<br />
120
Expansion et régression : résultats<br />
Expansion<br />
Parmi <strong>les</strong> 100 espèces qui ont expansé le plus fort 83 sont des néophytes, beaucoup<br />
plus que la portion des néophytes de toutes <strong>les</strong> espèces traitées dans l atlas (19 %). Entre ces<br />
100 espèces la moitié est des espèces qui ont été intro<strong>du</strong>ite dans notre région comme des<br />
plantes des jardins (Solidago gigantea, Heracleum mantegazium, Buddleja davidii). Autres<br />
néophytes en expansion sont intro<strong>du</strong>ite dans la région de Flandre par le transport des pro<strong>du</strong>its<br />
d agriculture (grains, aliments <strong>du</strong> bétail, laine) comme Coronopus didydymus (fig. 3) et<br />
Senecio inaequidens. Une groupe particulier sont <strong>les</strong> espèces associé a la culture <strong>du</strong> mais<br />
(Echinochloa muricata, Panicum dichotomiflorum, Setaria faberi, Setaria verticillata).<br />
Un autre groupe d espèces en expansion sont certaines espèces des milieux salins<br />
(Cochlearia danica,<br />
Puccinellia distans) qui sont plus limitées à des endroits à coté de la mer <strong>du</strong> Nord<br />
mais poussent également aux bords des autoroutes et d autres grand routes ou on utilise<br />
fréquemment le sel d épandage pendant l hiver.<br />
Fig. 3: Expansion de Coronopus didymi<strong>du</strong>s. Distribution dans la période 1939-1971 : carrés gris ;<br />
distribution dans la période 1972-2004 : point noirs.<br />
Régression<br />
Parmi <strong>les</strong> 100 espèces qui ont régressé <strong>les</strong> plus 8 espèces sont des archéophytes, 88<br />
des plantes indigènes, plus que leur proportion dans la totalité des espèces (5% et 75%). Des<br />
néophytes figurent presque pas dans ces 100 espèces, seulement 3 espèces (Lolium remotum,<br />
Camelina alyssum et Cuscuta epilinum) qui sont lié à la culture <strong>du</strong> lin qui a largement<br />
disparue dans cette région. Entres <strong>les</strong> archeophytes en régression il y a pas mal d espèces des<br />
cultures de blé (Centaurea cyanus, Ranunuculus arvensis (fig. 4), Delia segetalis).<br />
Les plus grands déclins des espèces indigènes se situent parmi <strong>les</strong> espèces des<br />
milieux oligotrophes, acides ou alcalins (landes, pelouses acides, étangs acides et<br />
oligotrophes, bas-marais alcalins). Les plantes des biotopes aquatiques ont régressé el<strong>les</strong> aussi<br />
à cause de l eutrophisation de l eau.<br />
121
Fig. 4: Régression de Ranunculus arvensis. Distribution dans la période 1939-1971 : carrés<br />
gris ; distribution dans la période 1972-2004 : point noirs.<br />
Fig. 5: Régression de Liparis loeselii. Distribution dans la période 1939-1971 : carrés gris ;<br />
distribution dans la période 1972-2004 : point noirs.<br />
Changements en rapport avec des valeurs indicatrices d Ellenberg<br />
On a comparé avec un ANOVA <strong>les</strong> indices de changement des différents classes de<br />
valeurs indicatrices de Ellenberg (Ellenberg et al. 1991) pour comparer <strong>les</strong> grandes directions<br />
des changements.<br />
Pour <strong>les</strong> valeurs qui indicent la richesse d azote <strong>du</strong> milieu (coefficient Ellenberg N),<br />
<strong>les</strong> espèces des milieux riches montrent une expansion relative comparée avec <strong>les</strong> espèces des<br />
milieux oligotrophes qui montrent une régression relative.<br />
Pour <strong>les</strong> valeurs de l acidité <strong>du</strong> milieu (coefficient Ellenberg R) <strong>les</strong> espèces des<br />
milieux acides sont en régression comparé aux espèces des milieux neutres et calcaires qui<br />
sont généralement stab<strong>les</strong>.<br />
Les indices des changements pour <strong>les</strong> valeurs de l humidité (coefficient Ellenberg F)<br />
indiquent que <strong>les</strong> espèces aquatiques et ceux des milieux très humides (marais) déclinent<br />
comparé aux autres espèces.<br />
Les indices des changements pour <strong>les</strong> coefficients d Ellenberg pour la lumière<br />
montrent peut de différences entres <strong>les</strong> milieux ombrageux et des milieux plus ouvertes.<br />
Néanmoins, dans certains région écologiques spécifiques comme la région des Dunes le long<br />
de la côte des milieux ouvertes on été largement remplacé par des milieux boisées (Provoost<br />
& Van Lan<strong>du</strong>yt 2001).<br />
122
Conclusion générale<br />
Malgré le fait que le nombre total d espèces en Flandre a augmenté, <strong>les</strong> différences<br />
floristiques entre <strong>les</strong> districts phytogéographiques sont moindres à cause de la disparition des<br />
milieux semi-naturels, de l agriculture intensive et de l expansion des zones d urbanisation.<br />
Le nombre d espèces par carré IFBL a augmenté, mais on a per<strong>du</strong> une partie de la diversité<br />
régionale spécifique. Les espèces en expansion sont surtout des espèces des habitats<br />
anthropogène qui sont en expansion dans une grande partie de l Europe.<br />
Références<br />
Ellenberg, H., Weber, H. E., Düll, R., Wirth, V., Werner, W., Paulißen, D., 1991.<br />
Zeigerwerte von Planzen in Mitteleuropa. Scripta Geobotanica 18, 1-248.<br />
Hoste, I., Van Lan<strong>du</strong>yt, W., Verloove, F., 2006. Landschap en flora in beweging,<br />
19de en 20ste eeuw. In Atlas van de Flora van Vlaanderen en het Brussels Gewest, réd. W.<br />
Van Lan<strong>du</strong>yt et al., pp. 45-67. Instituut voor Natuur- en Bosonderzoek & Nationale<br />
Plantentuin van België.<br />
Provoost, S., Van Lan<strong>du</strong>yt, W., 2001. The flora of the Flemish coastal <strong>du</strong>nes<br />
(Belgium) in a changing landscape. In Coastal <strong>du</strong>ne management, shared experience of<br />
European conservation practice. Proceedings of the European symposium Coastal Dunes of<br />
the Atlantic Biogeographical Region, Southport, northwest England, september 1998, eds. J.<br />
A. Houston, S. E. Edmondson, & P. J. Rooney, pp. 393-401. Liverpool University Press,<br />
Liverpool.<br />
Telfer, M. G., Preston, C. D., Rothery, P., 2002. A general method for measuring<br />
relative change in range size from biological atlas data. Biological Conservation 107, 99-109.<br />
Van Lan<strong>du</strong>yt, W., Hoste, I., Vanhecke, L., Van den Bremt, P., Vercruysse, E., De<br />
Beer, D., 2006. Atlas van de Flora van Vlaanderen en het Brussels Gewest, Instituut voor<br />
natuur- en bosonderzoek, Nationale Plantentuin van België & Flo.Wer, Brussel.<br />
Van Rompaey, E., Delvosalle, L., 1972. Atlas de la Flore Belge et Luxembourgeoise,<br />
Ptéridophytes et Spermatophytes, Jardin Botanique National de Belgique, Meise.<br />
123
Utilisation des images Alsat 1 pour la réalisation d'une carte<br />
d'occupation<br />
<strong>du</strong> sol des milieux semi-arides<br />
Cas de la région des Aurès- Algérie-<br />
Résumé:<br />
BENMESSAOUD H. * KALLA M. * DRIDI H. *<br />
* Laboratoire « Risques Naturels et Aménagement <strong>du</strong> Territoire »<br />
Faculté des sciences -Université El Hadj Lakhdar Batna- Algérie<br />
Email : ha123_m123@yahoo.fr Tél.: 075 98 15 55<br />
L'Algérie avec ses potentialités économiques, compte parmi <strong>les</strong> pays utilisateurs de<br />
l'information spatiale dans divers domaines, notamment dans la cartographie des ressources<br />
naturel<strong>les</strong>.<br />
Dans ce travail, nous allons essayer d'utiliser l'image de la nouvelle génération <strong>du</strong><br />
satellite Algérien Alsat 1(scène datée le 13 Mars 2005 est composée de 3 bandes spectra<strong>les</strong> de<br />
résolution 32m) pour la réalisation d'une carte d'occupation <strong>du</strong> sol et de l'environnement<br />
naturel de la région des Aurès.<br />
A cet effet, une approche méthodologique à été conçue où dans un premier temps, une<br />
composition colorée a été obtenue pour le repérage des échantillons et l'extraction des points<br />
d'appuis: ensuite une correction géométrique à été appliquée sur l'image afin de la<br />
géoréférencer par rapport à la carte topographique.<br />
Dans un second temps, une classification supervisée basée sur la méthode <strong>du</strong><br />
maximum de vraisemblance a été utilisée sur <strong>les</strong> trois canaux d'images. La carte d'occupation<br />
ainsi réalisée par la classification a fait ressortir <strong>les</strong> différents thèmes choisis (13 thèmes) où<br />
<strong>les</strong> grands ensemb<strong>les</strong> se distinguent nettement, caractérisant <strong>les</strong> différentes classes<br />
d'occupation <strong>du</strong> sol de la région.<br />
L'avantage de disposer d'informations récentes sur la région d'étude et d'identifier très<br />
vite <strong>les</strong> grands thèmes en présence et d'appréhender leur éten<strong>du</strong>e.<br />
Mots clés: Images Alsat 1 - Classification <strong>du</strong> maximum vraisemblance carte<br />
d'occupation <strong>du</strong> sol - Les Aurès.<br />
Intro<strong>du</strong>ction<br />
Actuellement, <strong>les</strong> zones arides et semi-arides, sont soumises à des pressions<br />
anthropiques importantes dont dépendent fortement <strong>les</strong> phénomènes, parfois irréversib<strong>les</strong>,<br />
de désertification et de dégradation de parcours.<br />
Ces zones nécessitent des inventaires synchroniques et diachroniques de leurs<br />
potentiels biologiques qui s appuient sur une bonne connaissance des ressources en place<br />
et des conditions éco-géographiques.<br />
La gestion efficace de ce patrimoine nécessite, au préalable, la cartographie et<br />
l inventaire des ressources disponib<strong>les</strong>.<br />
En plus de ces données statistiques, il est indispensable d assurer le suivi et la<br />
surveillance de la dynamique <strong>du</strong> milieu <strong>du</strong>e aux changements <strong>du</strong> couvert végétal s opérant<br />
sous l effet de plusieurs facteurs : dégradation <strong>du</strong> sol, surpâturage, intro<strong>du</strong>ction de la<br />
124
culture mécanisée, exploitation in<strong>du</strong>strielle, pharmaceutique et ménagère des ressources<br />
végéta<strong>les</strong> etc.<br />
Cette forte pression exercée sur <strong>les</strong> ressources exige une planification des activités et<br />
des interventions sur le territoire basée sur une connaissance plus précise des processus de<br />
dégradation <strong>du</strong> couvert végétal.<br />
Il est donc vital de développer des stratégies de surveillance et de gestion de<br />
l environnement et de l agriculture. Ces stratégies doivent reposer sur des moyens<br />
technologiques performants.<br />
L image satellitaire est de nos jours une source d information importante pour<br />
l observation de la surface terrestre.<br />
L Algérie avec ces potentialités économiques est parmi <strong>les</strong> pays utilisateurs de<br />
l information spatiale dans divers domaines notamment dans la cartographie des<br />
ressources naturel<strong>les</strong>.<br />
Les données utilisées dans cette étude concernent <strong>les</strong> images de la nouvelle génération<br />
<strong>du</strong> satellite Algérien Alsat1 <strong>du</strong> 13 Mars 2005 ayant une résolution au Sol de 32 mètres et<br />
de trois bandes spectra<strong>les</strong> dans le visible et le proche infra-rouge.<br />
Plate forme<br />
Charge utile<br />
(camera)<br />
Tableau N°01 : Caractéristiques techniques de Alsat1<br />
Altitude : 686 Km<br />
Inclinaison orbitale 98,2°<br />
Poids : 90Kg<br />
Répétitivité : 5 jours<br />
Période : 1 h 39 mn<br />
Elle est constituée de 2 cameras par bande<br />
spéciale (2 barrettes CCD de 10200 pixels canal)<br />
Focal 150 m<br />
Résolution spatial : 32 m<br />
Fouchée : 600 Km<br />
Bandes spécia<strong>les</strong> : Vert Rouge PI Rouge<br />
Champ de vue (FOV) : 23,62°<br />
Codage : 8 bits par pixel<br />
L objectif de ce travail est :<br />
d apprécier <strong>les</strong> champs d applications des données télé détectées à moyenne résolution<br />
spatiale des images Alsat 1 pour la mise en place d inventaires des ressources<br />
naturel<strong>les</strong> renouvelab<strong>les</strong> en zones aride et semi arides et la compréhension <strong>du</strong><br />
fonctionnent des écosystème en place.<br />
De réaliser une carte d occupation <strong>du</strong> sol à l échelle de la région des Aurès.<br />
La possibilité de disposer périodiquement des images Alsat 1 permettra le suivi de<br />
l évolution des zones pertinentes.<br />
Présentation de la zone d étude<br />
La région des Aurès, située à 500 Km au sud Est d Alger. Elle est limitée au Nord par<br />
la ville de Batna (Ouest) et la ville de Khenchela (Est) et au Sud par la Wilaya de Biskra .La<br />
région d étude couvrent une superficie total de 21. 000 Km²<br />
Géographiquement, la zone d étude se localise entre <strong>les</strong> méridiens (5° 08 et 7°01 ) et<br />
<strong>les</strong> parallè<strong>les</strong> (34°29 et 35°32 ).<br />
125
.<br />
Notre zone d étude est caractérisée par un climat de type méditerranéen semi aride au<br />
nord et aride au sud avec un hiver froid marqué par :<br />
Une faible pluviométrie ;<br />
Une longue saison de sécheresse ;<br />
Des gelées fréquentes.<br />
Ces conditions climatiques sont contraignantes pour le développement des<br />
cultures et de<br />
la végétation.<br />
Le paysage a l entoure comprend différentes écosystèmes qui est traditionnellement une<br />
zone d élevage, une zone de pastoralisme transhumant, avec localement des points de<br />
sédentarisation, <strong>les</strong> oasis, des forets, des cultures<br />
Ces caractéristiques <strong>du</strong> milieu physique et cel<strong>les</strong> notamment de l occupation <strong>du</strong><br />
sol confèrent à la région une vocation de type agro-sylvo-pastorale.<br />
La région se caractérise par de fortes dénivellations sur de courtes distances. Sur le<br />
versant Nord l altitude varie entre 1200 m et 2300 m. Sur le versant Sud elle descend au Nord<br />
à moins de 50 m.<br />
126
Ces fortes dénivellations ont des conséquences sur la répartition <strong>du</strong> climat et des<br />
ressources naturel<strong>les</strong>.<br />
Données utilisées :<br />
Cartes topographiques : 08 Coupures au 1/50.000 et deux cartes de 1/200.000 qui<br />
couvrent la région des Aurès ont été utilisées pour l étape de correction géométrique et<br />
<strong>les</strong> missions d échantillonnages de terrain.<br />
Image Alsat 1 : <strong>les</strong> données de l image prises le 13 Mars 2005 à 9h 38 avec une<br />
élévation solaire de 56,6°. El<strong>les</strong> sont représentées par une Fenêtre de 5541x3875<br />
pixels sur <strong>les</strong> canaux brû<strong>les</strong> B1, B2 et B3.<br />
Un GPS pour un repérage géographique précis des données de terrain dans <strong>les</strong><br />
missions d échantillonnages ainsi que pour la vérification de la réalité de terrain.<br />
Méthodologie de travail :<br />
La méthodologie générale de travail est représentée par l organigramme suivant:<br />
127
Les différentes phases concernant :<br />
La composition colorée :<br />
La composition colorée a été obtenue à partir d une superposition de trois canaux<br />
(B1B2, B3) de la scène.<br />
Elle a été utilisée comme une image de départ afin de guider <strong>les</strong> traitements d images,<br />
l échantillonnage au sol et l extraction des points d appui pour une éventuelle correction<br />
géométrique.<br />
128
Correction géométrique :<br />
Les corrections géométriques permettent de compenser en totalité ou une partie ces<br />
déformations de distorsion.<br />
Pour la correction géométrique de l image, un modèle polynomial de déformation de<br />
degré (2) a été adopté en utilisant (11) points d appui de référence.<br />
Classification de l image :<br />
C est le mode supervisée qui a été choisi pour réaliser <strong>les</strong> classifications <strong>du</strong> milieu. La<br />
méthode <strong>du</strong> maximum de vraisemblance a été retenue pour la classification d image.<br />
Cette méthode est considérée comme une technique puissante de classification. La<br />
règle de décision de cette méthode est basée sur la probabilité qu a un pixel d appartenir à une<br />
classe particulière.<br />
129
Missions d échantillonnages et réalité de terrain :<br />
Pour la réalisation et la conception de la carte d occupation <strong>du</strong> sol de la région des Aurès,<br />
nous nous basons sur <strong>les</strong> données de contacte de terrain qui ont été récoltées lors des<br />
missions d échantillonnages (printemps 2006). Ces missions ont été effectuées pour le<br />
repérage et la connaissance d un certain nombre de parcel<strong>les</strong> représentatives des différents<br />
types d occupation <strong>du</strong> sol que l on rencontre sur la zone d étude<br />
Les différentes classes qui ont été retenues sont :<br />
1 Forêt dense 7 Voile sableux<br />
2 Forêt clair maquis 8 Sol nu<br />
3 Maquis + Reboisements 9 Eau de Barrage<br />
4 Cultures irriguées 10 Cours d eau<br />
5 Parcours des steppes 11 Sebkha, chotts et sol humide<br />
6 Terrains rocheux 12 Urbain et agglomération<br />
130
Validation de la classification :<br />
Il est possible d évaluer <strong>les</strong> performances de cette classification en évaluant le<br />
pourcentage et le nombre de pixels correctement classés à l intérieur de chaque polygone test.<br />
La matrice de confusion illustre cette performance<br />
Tableau N° :02 : Matrice de confusion (en pixels et en %)<br />
L analyse de ce dernier montre la bonne performance de la classification.<br />
131
Résultats obtenus :<br />
Les résultats obtenus par la classification supervisée <strong>du</strong> maximum vraisemblance ont<br />
servi à dresser la carte d occupation <strong>du</strong> sol géoréférencée après l étape de correction<br />
géométrique.<br />
La carte d occupation <strong>du</strong> sol des Aurès représente des informations très importantes<br />
par l identification et l inventaire de l espace, en général <strong>les</strong> formations forestières, <strong>les</strong><br />
parcours, <strong>les</strong> cultures, <strong>les</strong> sols dépourvus de la végétation, <strong>les</strong> infrastructures ainsi que <strong>les</strong><br />
cours d eau qui sont bien identifiab<strong>les</strong>.<br />
Conclusion :<br />
L utilisation de l imagerie Alsat 1 a permis d obtenir <strong>les</strong> grandes classes d occupation<br />
<strong>du</strong> sol en un temps ré<strong>du</strong>it;<br />
Les informations extraites sont récentes et peuvent être intégrées dans la base de<br />
données qui sera élaborée;<br />
La possibilité de se disposer périodiquement des images Alsat 1 permettra le suivi de<br />
l évolution des zones semi-arides.<br />
Références:<br />
1- ABDESSEMED K. (1981) : Le cèdre de l Atlas (Cedrus atlantica Manetti)<br />
dans le massif de l Aurès et <strong>du</strong> Belezma - Etude phytosociologique, problème de<br />
conservation et d aménagement. Thèse Doctorat, Université d Aix-Marseille.<br />
2- BALLAIS J.L (1981) : Recherches géomorphologiques dans <strong>les</strong> Aurès<br />
(Algérie).<br />
Thèse doctorat- Université de Paris I, pp 572 + annexes + Cartes<br />
132
3- BENHANIFIA K. (2003) : Etude comparative des données Alsat 1 et Landsat<br />
ETM+ pour l évolution de l état des Forêts dans la région Ouest- Oran - Actes des<br />
journées techniques Alsat 1 / Utilisateurs Asal, 14 et 15 juillet 2003-Algerie.<br />
4- BENSAID A. (1997) : Traitement des données multi sources et conception<br />
d une base des données dans un SIG en vue de la caractérisation d une milieu physique :<br />
application à une zone steppique au Nord de Laghouat.<br />
Thèse de Magister, 122 pages, CNTS, Arziew- Algérie.<br />
5- BOYOSSORO H. K et al (<strong>2007</strong>) : Insécurité climatique et géorgiques en<br />
Côte d Ivoire : Etude <strong>du</strong> risque d érosion hydrique des sols dans la région semi-<br />
montagneuse de Man (Ouest de la Cote d Ivoire). Revue sécheresse, Volume 18, Numéro<br />
01, pp 29-37.<br />
6- DUBOIS J. M. et al (1997) : La réalité de terrain en télédétection : Pratiques<br />
et méthodes. Actes des journées scientifiques de Sainte-Foy- Agence Universitaire de la<br />
Francophonie- AUPELF-UREF, pp356.<br />
7- FERDINAND B. (1996) : Précis de télédétection, Volume2, Applications<br />
thématiques<br />
Eddition : Presse de l Université Du Québec, pp 617.<br />
8- FOJSTNG E. (1999) : Contribution de la Morphologie mathématique à la<br />
cartographie de l occupation <strong>du</strong> sol a partir d image SPOT (Région de l extrême Nord-<br />
Cameroum).Rapport de doctoral en télédétection, Réseau télédétection, AUPELF- UREF,<br />
pp91.<br />
9- GAROUANI A et al (1993) : Cartographie de l occupation <strong>du</strong> sol et des<br />
zones humides par télédétection dans la basse vallée de la Medjerda (Tunisie). Cinquième<br />
journées scientifiques <strong>du</strong> réseau de la télédétection de AUPELF- UREF,<br />
Tunisie, 21-24 Septembre 1993 ; pp : 163-170.<br />
10- HADDOUCHE I. (2002) : Utilisation de la télédétection pour l étude de la<br />
déforestation en milieu semi-aride- Cas de la région de Djelfa. Rapport de stage, 34 pages.<br />
133
Adaptation de la stratégie<br />
d intervention et des modalités de gestion<br />
pratiquées par le Conservatoire des Sites<br />
Lorrains à partir de l évolution de la<br />
connaissance floristique<br />
Pascale RICHARD Conservatoire des Sites Lorrains 14 rue de l Eglise 57930<br />
FENETRANGE, p.richard@cren-lorraine.fr<br />
Présentation <strong>du</strong> Conservatoire des Sites Lorrains<br />
Créé en 1984 sous forme associative, le Conservatoire des Sites Lorrains s est fixé<br />
pour mission la conservation des richesses biologiques et esthétiques des sites, milieux et<br />
paysages lorrains. Parmi <strong>les</strong> moyens statutaires, figurent aux côtés de la maîtrise foncière ou<br />
d usage de sites à enjeux biologiques forts, la réalisation d inventaires et l établissement de<br />
plans de gestion.<br />
Aujourd hui le CSL assure la protection et la gestion d un réseau de 206 sites pour<br />
environ 4000 ha, représentatif des grands types de milieux naturels régionaux, tourbières<br />
acides ou alcalines, prés salés, pelouses calcaires, étangs et prairies. Aux côtés de centaines de<br />
bénévo<strong>les</strong>, une équipe de 45 salariés uvre sur la base de financements de la C.E.E, <strong>du</strong><br />
Conseil Régional de Lorraine, de l Agence de l Eau Rhin-Meuse, de l Etat et de trois<br />
départements.<br />
Les actions <strong>du</strong> CSL s articulent sur 4 axes :<br />
La connaissance (plans de gestion, expertises sites et espèces, suivis scientifiques)<br />
La protection (acquisitions, baux emphytéotiques et conventions)<br />
La gestion (Chantiers en régie, chantiers en partenariat avec formations agrico<strong>les</strong>,<br />
Contrats avec exploitants agrico<strong>les</strong>)<br />
La valorisation (Equipement de site, Animations scolaires et Grand public).<br />
La prise en compte des enjeux floristiques intervient donc à 2 niveaux :<br />
lors de la mise en uvre de la protection à travers le choix des sites<br />
lors de la gestion des sites protégés à travers <strong>les</strong> objectifs de conservation à long<br />
terme.<br />
1 Intégration des enjeux floristiques dans la protection des sites<br />
1.1 Première stratégie d intervention : <strong>les</strong> sites naturels exceptionnels et<br />
<strong>les</strong> programmes européens<br />
A l issue de la première phase de l inventaire des ZNIEFF (Zones Naturel<strong>les</strong><br />
d Intérêt Faunistique et Floristique) qui aboutit dans <strong>les</strong> années 1988, pas moins de 650 sites<br />
furent identifiés en Lorraine. Cette base de connaissance ayant fait appel à de nombreux<br />
naturalistes bénévo<strong>les</strong> attribua une part de choix à la botanique. En effet, <strong>les</strong> botanistes<br />
régionaux et belges se mobilisèrent pour assurer la description et l inscription des milieux<br />
naturels connus pour leur richesse floristique. Cette phase d inventaire ZNIEFF fut l occasion<br />
de découvertes de sites exceptionnels comme entre autres <strong>les</strong> tourbières alcalines de<br />
Sarreguemines et de Villouxel. Ce travail permis une première vision de l état <strong>du</strong> patrimoine<br />
floristique.<br />
134
Aussi dans un premier temps le choix des sites à protéger fut basé sur une approche<br />
de sites exceptionnels dont la flore était une composante pesant fortement grâce à un bon état<br />
de connaissance. Ainsi <strong>les</strong> efforts de préservation portèrent avant tout sur des sites d intérêt au<br />
moins régional. Des programmes européens furent mise en uvre tel l ACNAT prés salés qui<br />
aboutit à l acquisition de 140 ha de sources et prairies halophi<strong>les</strong> dans la vallée de la Seille.<br />
D autres ambitieux programmes européens furent menés, dans <strong>les</strong> Vosges notamment sur <strong>les</strong><br />
tourbières à enjeux Tétras, et dans <strong>les</strong> vallées allluvia<strong>les</strong> de la Moselle et de la Meuse où <strong>les</strong><br />
problématiques d eau potable ou de crues furent incitatives auprès des financeurs.<br />
1.2. Seconde stratégie d intervention : <strong>les</strong> sites naturels remarquab<strong>les</strong><br />
De 1992 à 1995, le CSL a con<strong>du</strong>it pour <strong>les</strong> conseils généraux de Meuse, de Meurthe<br />
et Moselle et des Vosges des inventaires d Espaces Naturels Sensib<strong>les</strong>. A cette occasion, la<br />
mise à jour des ZNIEFF et la description de nouveaux sites ont porté à un millier le nombre<br />
de sites naturels remarquab<strong>les</strong>.<br />
Face à la nécessité de hiérarchiser <strong>les</strong> priorités d intervention de protection, une<br />
bioévaluation basée sur 8 critères fut mise en uvre sur la base de :<br />
Intérêt floristique<br />
Intérêt faunistique<br />
Rareté ou originalité des habitats<br />
Diversité des habitats<br />
Représentativité des habitats<br />
Degré de conservation<br />
Superficie<br />
Fragilité naturelle.<br />
La prise en compte de l enjeu « Flore » ne constitue alors pas une priorité en soi,<br />
mais <strong>du</strong> fait d une bonne connaissance de ce groupe et de son interrelation avec le concept<br />
d habitat (d ordre phytosociologique), la flore reste un enjeu important.<br />
Surtout cette approche a permis de relativiser l état de connaissance et de<br />
conservation par grands types de milieux dits naturels en Lorraine. Par exemple pour <strong>les</strong><br />
pelouses calcico<strong>les</strong> qui représentent 143 sites pour 3350 ha, l état de protection en 1996 est<br />
illustré comme suit :<br />
135
Si cette stratégie d intervention répondait à la problématique de conservation<br />
prioritaire des sites à forts enjeux patrimoniaux en revanche elle ne permettait pas de garantir<br />
de facto la conservation d espèces cib<strong>les</strong>. Aussi un troisième niveau de stratégie a été instauré.<br />
1.3. Troisième stratégie d intervention : l approche par groupe<br />
systématique, la Flore.<br />
En 1996, face à l effectif notable de pelouses calcaires préservées (soit 50 sites), le<br />
CSL a réalisé une expertise floristique qui lui a permis de réorienter le choix de nouveaux<br />
sites d intervention vers des stations de plante à préserver. Sur la base de 43 plantes typiques<br />
des pelouses et ayant un statut de protection ou de rareté, il fut identifié 8 espèces sans sites<br />
protégés (dont le Sabot de vénus).<br />
En application de cette démarche, la pelouse de Rosselange inscrite dans le vaste lot<br />
des pelouses régiona<strong>les</strong>, fut sélectionnée en tant que station unique pour l Euphorbe de<br />
Séguier (Euphorbia seguieriana Neck).<br />
De même, cette mise en perspective fut faite en 1998 pour la flore remarquable des<br />
zones humides soit 116 taxons. Ce travail a montré la fragilité <strong>du</strong> statut d une quinzaine de<br />
plantes classées en 7 catégories :<br />
1 - Plantes disparues ou éteintes (5 espèces)<br />
2 - Plantes en site unique non protégé (Pillularia globulifera, Bupleurum tenuissinum<br />
et Hammarbya paludosa)<br />
3 - Plante en site unique protégé (Carex appropinquata et Carex hartmanii)<br />
4 - Plantes en 2 à 3 sites sans site protégé (Potamogeton alpinus, Drosera longifolia)<br />
5 - Plantes en 2 à 3 sites dont au moins 1 protégé (Eleocharis quinqueflora, Liparis<br />
loeselii)<br />
6 Plantes connues sur plus de 3 sites, sans site protégé (Equisetum hyemale,<br />
Teucrium sordium, Alisma gramineum et Seneçio sarracenicus)<br />
7 Plantes connues sur plus de 3 sites dont au moins 1 site protégé (plus de 50<br />
plantes)<br />
Les prescriptions de cette analyse furent tra<strong>du</strong>ites concrètement par :<br />
- la réalisation de recherche de station pour des espèces comme Seneçon des fleuves<br />
(Seneçio sarracenicus L.) et la protection <strong>du</strong> site le plus important ( Belleville -54- site<br />
VNF)<br />
- la protection de nouvel<strong>les</strong> zones humides comme le marais de Lay St Rémy (Carex<br />
appropinquata).<br />
1.4 Bilan floristique des 3 stratégies de protection<br />
Sur la base des inventaires de flore réalisés au sein des 206 sites protégés et gérés par<br />
le CSL et compte tenu de la prise en compte des espèces revues au cours des 10 dernières<br />
années, nous pouvons dressé le bilan pour <strong>les</strong> 193 plantes protégées avérées présentes en<br />
Lorraine :<br />
72 % bénéficient d au moins 1 site protégé dont 64 % à travers le réseau de<br />
sites CSL<br />
l objectif de 85 % est possible à 10 ans, à travers la mise en place d un<br />
réseau ONF (14 plantes), et la poursuite de celui mis en uvre via le CSL, et<br />
<strong>les</strong> Parcs naturels régionaux.<br />
136
de plus pour plus d une dizaine de plantes, le nombre de sites à protéger doit<br />
être augmenté (Gratiola officinalis, Senecio sarracenicus)<br />
2. Intégration des enjeux floristiques dans la gestion des sites protégés<br />
2.1. Collecte et conservation des données floristiques<br />
C est lors de l établissement <strong>du</strong> plan de gestion que d importantes investigations sont<br />
faites pour tous <strong>les</strong> groupes et tout particulièrement pour la flore. Pour <strong>les</strong> espèces rares, leur<br />
localisation et leur dénombrement sont systématiques. De plus, un bilan floristique total et<br />
aussi exhaustif que possible est fait pour chaque site. Enfin, phase préalable à la cartographie<br />
des habitats, <strong>les</strong> relevés phytosociologiques constituent une base de 4000 relevés soit environ<br />
80000 données.<br />
Toutes ces données sont sauvegardées au sein de bases naturalistes adaptées et des<br />
liens vers des couches géographiques sur SIG sont en cours.<br />
2.2 Suivi des structures et compositions des habitats<br />
La première clé d entrée en terme d objectif de conservation à long terme est<br />
l habitat et, son bon état de conservation. C est en permettant le maintien des habitats dans<br />
des conditions écologiques favorab<strong>les</strong> que l on cherche à obtenir leur optimum, soit<br />
l expression d une flore typique comportant souvent des espèces cib<strong>les</strong> pour <strong>les</strong> habitats<br />
d intérêt européen.<br />
La flore intervient alors comme principale clé de lecture de ces habitats et de leur état<br />
de conservation. Des méthodes qualitatives ou quantitatives sont choisies selon <strong>les</strong> cas. A<br />
Pagny sur Meuse, un suivi diachronique d habitats est pratiqué depuis 1988 par le biais de 30<br />
placettes permanentes de 50 points. Avec une périodicité d environ 3 ans, ce dispositif totalise<br />
1200 données de fréquence spécifique qui peuvent être analysées par des méthodes<br />
statistiques classiques (Cf ci-dessous Analyse des Composantes Principa<strong>les</strong> des molinaies à<br />
Pagny sur Meuse).<br />
-- axe 2 (18% ) --><br />
1,5<br />
1<br />
0,5<br />
0<br />
-0,5<br />
-1<br />
Placettes molinaies CDEHKLM<br />
Cercle des corrélations : axe 1 et axe 2 (45% )<br />
Evolution<br />
NbreGes<br />
137<br />
Phrag<br />
sp sol nu<br />
Paturage<br />
Liparis<br />
sp cariçaie<br />
Fauche Molinie<br />
Junsub<br />
4 carex<br />
Nbre Esp<br />
Esp rares<br />
sp types<br />
-1,5<br />
-1,5 -1 -0,5 0<br />
-- axe 1 (27% ) --><br />
0,5 1 1,5
Ces résultats peuvent être affinés par groupes d espèces et par intensité<br />
de pression de pâturage.<br />
2.3 Conservation de population d espèces cib<strong>les</strong><br />
Lorsque le site protégé comporte des plantes de très fort enjeu patrimonial (espèce<br />
cible), la conservation de population viable est prescrite spécifiquement dans <strong>les</strong> objectifs à<br />
long terme <strong>du</strong> plan de gestion. C est notamment le cas <strong>du</strong> Liparis de Loesell , plante inscrite à<br />
la l annexe II de la Directive Habitats.<br />
En ce cas, des modalités spécifiques de suivi (et non de gestion qui el<strong>les</strong> se situent au<br />
niveau de l habitat) notamment par plan quadrillé ont été développées.<br />
138<br />
Dispositif de suivi <strong>du</strong><br />
Liparis de Loesell à Pagny sur<br />
Meuse (F-55)<br />
Méthode <strong>du</strong> plan quadrillé<br />
de 20mx20m pour 3 ha soit 77 zones<br />
de dénombrement
Les résultats de ce suivi sont exprimés en nombre de pieds et pourcentage de floraison :<br />
Année 1999 2000 2001 2002 2003 2004<br />
Nbr<br />
pieds<br />
489 576 431 418 1761 1780<br />
Taux<br />
floraison<br />
- 74% 60% 33% 41% 48%<br />
D autres cas de suivis diachroniques de stations d espèces par plans exhaustifs ou par<br />
plans quadrillés sont pratiqués sur <strong>les</strong> sites gérés par le CSL. Ces expériences de suivi de la<br />
flore remarquab<strong>les</strong> incitent aux conclusions suivantes :<br />
-> il faut rester prudent sur <strong>les</strong> conclusions car <strong>les</strong> temps de réponse peuvent être plus<br />
ou moins long et la compréhension des facteurs de dynamiques être multip<strong>les</strong> (liés ou non à<br />
la gestion)<br />
-> pour une même espèce l on peut noter une grande variation de dynamique selon<br />
<strong>les</strong> sites (difficile de transposer d un site à l autre).<br />
A la lumière des suivis floristiques pratiqués depuis quelques années sur <strong>les</strong> sites<br />
gérés par le CSL, nous pouvons établir des états de conservation comme suit :<br />
1. Bon état de conservation<br />
Liparis loeselii (Pagny sur Meuse)<br />
Gentiane pneumonanthe (Resson et autres sites <strong>du</strong> Barrois, mais à la limite de<br />
disparition à Jezainville)<br />
Fumana procumbens (tous sites)<br />
Orchis simia (Arnaville)<br />
Anemone sylvestris (tous sites)<br />
Cypéracées tourbières alcalines (tous sites)<br />
2. Mauvais état de conservation<br />
Pedicularis palustris (disparition de tous sites)<br />
Helichrysum arenarium (station relictuelle à Puttelange <strong>les</strong> thionville et disparition<br />
probable à court terme)<br />
Linum leonii (4 sites de présence pour 1 seul site à population notable - Arnaville)<br />
Seneçio paludosus (tous sites CSL mais autres stations dynamiques en Meuse)<br />
Conclusion<br />
La flore tant pour elle-même que pour sa capacité de tra<strong>du</strong>ction des habitats et de<br />
leur état de conservation constitue depuis la création <strong>du</strong> Conservatoire des Sites Lorrains, un<br />
enjeu et un outil fortement mobilisés.<br />
Si près 75% des plantes protégées possèdent au moins 1 station située en sites<br />
protégés, ceci ne peut être considéré comme suffisant. Aussi l actuel réseau de sites protégés<br />
se doit d être conforté pour assurer la sauvegarde à moyen et long terme des plantes <strong>les</strong> plus<br />
menacées possédant souvent le statut d espèces protégées. Un tel réseau de sites ne peut<br />
aboutir qu avec l appui des autres partenaires régionaux comme l ONF et <strong>les</strong> Parcs naturels<br />
régionaux.<br />
La gestion des sites protégés possédant des enjeux de plantes cib<strong>les</strong> passe par la<br />
réalisation de suivis spécifiques qui doivent permettre de mieux en connaître l écologie et de<br />
tester <strong>les</strong> méthodes de gestion. A noter toutefois que l on ne peut dissocier ce suivi de ceux<br />
pratiqués pour <strong>les</strong> habitats. Le bon état de conservation des habitats restent l objectif premier<br />
des plans de gestion, <strong>les</strong> plantes cib<strong>les</strong> s y exprimant de facto.<br />
139
Comment reconstituer <strong>les</strong> forêts <strong>du</strong> XVIIIe siècle d après<br />
<strong>les</strong> registres de martelages ?<br />
L exemple des hêtraies-chênaies lorraines<br />
Xavier Rochel<br />
Maître de Conférences<br />
Département de Géographie, Université Nancy 2<br />
xrochel@univ-nancy2.fr<br />
Intro<strong>du</strong>ction<br />
Etudes d impacts et plans de gestions de réserves éludent trop souvent l évolution des<br />
territoires concernés au cours des derniers sièc<strong>les</strong>. Géographes et historiens ont pourtant mis<br />
au point diverses techniques de reconstitution des paysages à partir des archives existantes.<br />
Ces reconstitutions ont souvent porté sur <strong>les</strong> finages cultivés, laissant de côté <strong>les</strong> espaces dits<br />
naturels, que la formation des chercheurs ne leur permettait pas de bien comprendre : le temps<br />
était à l étude de l openfield lorrain, de la châtaigneraie ardéchoise, ou <strong>du</strong> bocage normand, et<br />
sur <strong>les</strong> cartes réalisées, <strong>les</strong> bois n étaient représentés que par une plage uniformément verte.<br />
Aujourd hui, considérant qu une forêt n est, après tout, pas moins diversifiée qu un finage, <strong>les</strong><br />
chercheurs en géographie historique ont l opportunité de se rapprocher de l histoire de<br />
l environnement pour chercher à reconstituer l état passé des espaces boisés, voire des zones<br />
humides et autres espaces <strong>du</strong> saltus 3 .<br />
Parmi <strong>les</strong> sources utilisab<strong>les</strong> pour l Ancien Régime, <strong>les</strong> registres de martelages se<br />
distinguent par leur précision et l exhaustivité des informations apportées. Il s agit de<br />
registres sur <strong>les</strong>quels étaient enregistrées, jour après jour et arbre par arbre, toutes <strong>les</strong><br />
opérations sylvico<strong>les</strong> effectuées sur le terrain. Ils apportent donc des données quantitatives et<br />
sériel<strong>les</strong> inestimab<strong>les</strong> pour un travail précis sur la connaissance <strong>du</strong> passé des forêts ; surtout,<br />
toutes <strong>les</strong> informations apportées sont cartographiab<strong>les</strong> avec une précision plus ou moins<br />
grande. On cherchera ici à montrer <strong>les</strong> apports et <strong>les</strong> limites de ce type de source dans la<br />
reconstitution cartographique des hêtraies-chênaies de la Lorraine des Lumières. Si <strong>les</strong><br />
résultats de ces travaux sont relativement satisfaisants, et apportent une vue assez précise des<br />
peuplements de certaines forêts, ils restent diffici<strong>les</strong> à interpréter ; ces incertitudes ne seront<br />
ré<strong>du</strong>ites qu au prix de la multiplication des travaux de ce type, et de leur extension aux très<br />
riches archives des sièc<strong>les</strong> postérieurs.<br />
1. Une question ancienne, des sources nouvel<strong>les</strong><br />
1.1. L évolution des forêts, un classique de l histoire forestière<br />
La reconstitution de l état passé des forêts passe par l utilisation des archives<br />
naturel<strong>les</strong> (microrestes et macrorestes végétaux), mais aussi par <strong>les</strong> archives humaines. La<br />
palynologie apporte une vision éten<strong>du</strong>e dans le temps, assez précise quant aux espèces<br />
végéta<strong>les</strong> représentées (Galop 1998), mais relativement insatisfaisante quant à la<br />
spatialisation et la cartographie rétrospective des milieux. L anthracologie, elle, apporte<br />
des données plus localisées ; elle a par exemple con<strong>du</strong>it à d intéressants et ambitieux<br />
travaux de cartographie rétrospective des forêts pyrénéennes (Bonhôte 1998). En ce qui<br />
concerne <strong>les</strong> quatre derniers sièc<strong>les</strong>, <strong>les</strong> archives des forestiers apportent également une<br />
3 En témoignent <strong>les</strong> travaux <strong>du</strong> Groupe d Histoire des Forêts Françaises (GHFF, né en 1980)<br />
et de son petit frère le Groupe d Histoire des Zones Humides (né en 2002).<br />
140
pléthore d informations encore trop peu exploitées. Les géographes ont su, sur quelques<br />
sites bien documentés, pro<strong>du</strong>ire des travaux cartographiques relativement précis qui<br />
complètent et mettent en perspective <strong>les</strong> apports des archives naturel<strong>les</strong>. Suivant le plus<br />
souvent une méthode régressive, formalisée par Jean-Jacques Dubois notamment, ils ont<br />
pu établir l état des lieux de certains massifs à différentes dates, cartographier <strong>les</strong><br />
peuplements, localiser <strong>les</strong> interventions humaines, et éventuellement établir des modè<strong>les</strong><br />
d analyse de l évolution des milieux forestiers (Houzard 1980, Dubois 1989, Rochel 2004).<br />
Les textes réglementaires sont classiquement utilisés pour tenter de connaître le passé<br />
des forêts et l action des forestiers. Ils sont assez peu nombreux, clairs, faci<strong>les</strong> d accès,<br />
souvent imprimés. Ils sont censés régir l action des forestiers et de l administration, donc<br />
jouer un rôle fondamental dans l économie vosgienne, mais n allons pas croire que ces textes<br />
sont respectés à la lettre ! Par ailleurs leur contenu est souvent décevant. Il organise en détail<br />
la rémunération des officiers, le recrutement <strong>du</strong> personnel forestier, <strong>les</strong> droits de chacun, la<br />
procé<strong>du</strong>re ; mais la sylviculture en est presque absente, et <strong>les</strong> paysages brillent par leur<br />
absence.<br />
Les descriptions de forêts présentent un intérêt supérieur. On parle de « procèsverbaux<br />
de visites », ou de « visites et reconnaissances » de forêts ; il s agit évidemment de<br />
documents parmi <strong>les</strong> plus intéressants pour la reconstitution des paysages forestiers. Ce sont<br />
<strong>les</strong> sources écrites <strong>les</strong> plus couramment utilisées dans <strong>les</strong> tentatives d approche des paysages<br />
forestiers disparus. Malheureusement, faute de temps, <strong>les</strong> observateurs ne visitent<br />
généralement qu une fraction des forêts concernées ; <strong>les</strong> informations apportées sont<br />
ponctuel<strong>les</strong> et souvent limitées à une thématique précise. L accent est souvent mis sur ce qui<br />
va mal, ce qui peut laisser croire, à tort, que <strong>les</strong> peuplements sont totalement ruinés : le<br />
commissaire qui enquête sur des dégradations ne va décrire que <strong>les</strong> dégradations, et peu<br />
importe pour lui si la forêt est de chênes ou de hêtres. Les listes d arbres abattus ou surcenés,<br />
incendies, chablis, essarts et défrichements, laissent alors une désagréable impression de<br />
désastre.<br />
D autres documents écrits ont encore pu être prospectés. Il s agit en particulier de<br />
registres de rapports des forestiers (registres de délits forestiers), et de registres de rapports de<br />
bangards, ceux que l on appellera plus tard gardes champêtres (registres de mésus<br />
champêtres). Les procès-verbaux apportent de précieuses informations sur <strong>les</strong> activités en<br />
forêt, comme l élevage, et plus particulièrement sur <strong>les</strong> besoins en bois des communautés ; ils<br />
apportent aussi des témoignages d acteurs auxquels <strong>les</strong> archives d Ancien Régime accordent<br />
rarement la parole. Les rapports de forestiers méritent donc l attention que certains leur ont<br />
déjà accordé, à l instar de Daniel Berni, qui a exploré près de 18000 rapports extraits des<br />
archives de la maîtrise des Eaux et Forêts de Nancy (Berni 1997).<br />
Les comptes des gruyers apportent également des informations intéressantes quant aux<br />
revenus tirés des forêts ; ils permettent parfois de quantifier et de localiser <strong>les</strong> exploitations,<br />
comme en gruerie de Mortagne. Les accompagnent une masse de documents écrits :<br />
correspondances, acensements de scieries, rapports de toute sortes, de lourdes liasses dont<br />
l exploration, souvent décevante, laisse parfois apparaître, au détour d un document en<br />
apparence anodin, une information fondamentale, une précieuse donnée chiffrée.<br />
Derniers documents à avoir été exploités par <strong>les</strong> historiens et <strong>les</strong> géographes, <strong>les</strong><br />
registres de martelages représentent des sources autrement plus riches. Il s agit de registres<br />
sur <strong>les</strong>quels sont enregistrées toutes <strong>les</strong> opérations effectuées sur le terrain par <strong>les</strong> officiers<br />
forestiers, jour après jour, arbre par arbre, ou assiette de coupe par assiette de coupe. Deux<br />
famil<strong>les</strong> d opérations sont concernées :<br />
141
- <strong>les</strong> martelages proprement dits, au cours desquels <strong>les</strong> forestiers marquent de marteaux<br />
spéciaux <strong>les</strong> arbres à exploiter (martelages en abandon) ou, au contraire, <strong>les</strong> arbres à conserver<br />
(martelages en réserve) ;<br />
- <strong>les</strong> récolements, qui consistent à inspecter <strong>les</strong> exploitations de façon à reconnaître<br />
d éventuels délits.<br />
Le nom de « registres de martelages » a semblé le plus approprié ; mais ils sont parfois<br />
appelés ou intitulés « registres de délivrances », ou « registres d assiettes » (ce qui semble<br />
ré<strong>du</strong>cteur, puisque même en plaine une partie des exploitations ne se fait pas par assiettes). De<br />
tels documents apparaissent en Lorraine à partir de 1698, sans doute sous l influence<br />
française. Ils font partie des quatre registres ren<strong>du</strong>s obligatoires par l article XIX <strong>du</strong> règlement<br />
de 1701, équivalent lorrain de l ordonnance de 1669. Les archives départementa<strong>les</strong> de<br />
Meurthe-et-Moselle conservent ainsi des séries plus ou moins ininterrompues de registres<br />
datés de 1698 à 1791, concernant <strong>les</strong> grueries et maîtrises <strong>du</strong>ca<strong>les</strong>, notamment en Lorraine<br />
centrale.<br />
Longtemps, ces lourds registres mal écrits, emplis de termes ésotériques, ont rebuté<br />
l attention des chercheurs. Dans <strong>les</strong> répertoires de la série B des Archives de Meurthe-et-<br />
Moselle, Lepage qui fut pourtant un extraordinaire érudit <strong>les</strong> cite avec indifférence : « ces<br />
registres ne renferment point de mentions intéressantes. » Pourtant, le chercheur trouve là<br />
une pléthore d informations, le plus souvent chiffrées, qui se prêtent bien à la constitution<br />
d une base de données. Le travail de reconstitution peut donc se faire avec exhaustivité et<br />
efficacité, limitant ainsi au maximum <strong>les</strong> approximations qui sont toujours à craindre dans une<br />
étude de documents d archives.<br />
La cartographie est permise par <strong>les</strong> croquis réalisés, lors de chaque martelage,<br />
par l arpenteur de la maîtrise (figure 1). Ces croquis sont cotés en toises ou verges (la toise de<br />
Lorraine valant 2, 859 m) ; <strong>les</strong> coupes se suivant en tire et aire, il est possible de retracer un<br />
par un ces croquis sur un fond de carte récent, jusqu à obtenir le plan de l ensemble des<br />
coupes délimitées par <strong>les</strong> forestiers <strong>du</strong> temps des Lumières, un peu à l image d un puzzle, ou<br />
d une photographie dont le temps de pose serait de 25 à 30 ans.<br />
Figure 1 : croquis d arpenteur, 10 mai 1782, extrait d un registre de martelages de la maîtrise<br />
de Pont-à-Mousson ( A.D.M.-M. B 12250).<br />
142
1.2. Le cas des hêtraies-chênaies<br />
Cette méthode d exploitation des registres de martelages, déjà mise à<br />
contribution dans l étude géohistorique des forêts de la montagne vosgienne (Rochel 2004),<br />
devait être appliquée aux hêtraies-chênaies de basse altitude, où la modestie <strong>du</strong> relief facilite<br />
considérablement le travail.<br />
Ici, contrairement à la montagne vosgienne où domine la futaie jardinée, le taillis sous<br />
futaie est le traitement appliqué à la totalité des forêts. Deux strates composent le peuplement.<br />
Une strate de taillis, recépée à chaque rotation, fournit <strong>du</strong> bois de feu. Elle est surmontée<br />
d une strate de futaie composée de ce que l on appelle la réserve, c est-à-dire des arbres<br />
réservés lors des coupes <strong>du</strong> taillis, et destinés à atteindre un âge élevé. La réserve fournit <strong>du</strong><br />
bois d uvre, et <strong>les</strong> arbres <strong>les</strong> plus âgés sont en même temps <strong>les</strong> semenciers qui assurent le<br />
renouvellement <strong>du</strong> peuplement.<br />
Le traitement en taillis sous futaie est donc techniquement plus ar<strong>du</strong> que celui en taillis<br />
simple. Aux problèmes soulevés par le taillis s ajoutent <strong>les</strong> choix possib<strong>les</strong> pour la<br />
constitution et l entretien de la réserve. Le taillis sous futaie, solution sé<strong>du</strong>isante aux attentes<br />
de la société et de l économie d Ancien Régime, est loin d être parfait, en particulier parce<br />
qu il est très délicat à mettre en uvre.<br />
Première composante d un peuplement de taillis sous futaie, le taillis est<br />
périodiquement coupé sur une surface appelée assiette de la coupe. A chaque coupe de taillis,<br />
un certain nombre d arbres sont réservés et marqués ; ils seront épargnés par l exploitation de<br />
façon à pro<strong>du</strong>ire <strong>du</strong> bois d oeuvre et des semis qui assureront à la fois le renouvellement de la<br />
réserve et des souches épuisées <strong>du</strong> taillis. Les réserves de la première génération,<br />
théoriquement issues de semence, sont appelées baliveaux de l âge (bien qu el<strong>les</strong> n aient pas<br />
nécessairement l âge précis <strong>du</strong> taillis) ; cel<strong>les</strong> épargnées pour la seconde fois, âgées de une à<br />
deux fois l âge <strong>du</strong> taillis, sont appelées modernes ; cel<strong>les</strong> âgées de deux à trois fois l âge <strong>du</strong><br />
taillis sont <strong>les</strong> anciens, cel<strong>les</strong> âgées de plus de trois fois l âge <strong>du</strong> taillis sont <strong>les</strong> vieil<strong>les</strong><br />
écorces 4 . Ces quatre catégories d effectif théoriquement décroissant forment la composante<br />
futaie <strong>du</strong> taillis sous futaie. Le choix des arbres ainsi conservés est la plus lourde<br />
responsabilité <strong>du</strong> marteleur.<br />
D abord, quelle densité d arbres doit-on baliver ? Que le couvert soit trop épais, et l on<br />
risque de favoriser <strong>les</strong> essences d ombre en premier lieu le hêtre. Les rejets, qui nécessitent<br />
une certaine luminosité, ne seront pas nombreux ; le taillis sera famélique, et la pro<strong>du</strong>ction de<br />
bois de feu souffrira de ce choix exagérément prudent. Les jeunes brins attendront trop<br />
longtemps, souffreteux, à l ombre de leurs aînés. En outre, on risque de ne pas profiter d une<br />
glandée ou d une faînée qui pourrait permettre de recruter facilement de jeunes brins de belle<br />
venue... Faut-il, à l inverse, privilégier un balivage léger ? Dans cette hypothèse, le couvert<br />
exagérément ré<strong>du</strong>it donnera trop de lumière au sol, ce qui favorisera <strong>les</strong> essences de lumière :<br />
le chêne peut-être, mais aussi des bois blancs peu appréciés tels que le bouleau. Les jeunes<br />
brins risquent une concurrence excessive au sein d une souille abondante. De plus, <strong>les</strong><br />
disponibilités en bois d uvre seront ré<strong>du</strong>ites.<br />
Le choix <strong>du</strong> balivage, dans sa densité et sa répartition sur la coupe, détermine donc la qualité<br />
des rejets, leur vitesses de croissance, la quantité de jeunes brins issus de semence, <strong>les</strong><br />
essences présentes dans <strong>les</strong> deux étages : taillis et futaie.<br />
4 Ce sont là <strong>les</strong> appellations lorraines <strong>du</strong> XVIIIe siècle. Dans le système français classique, <strong>les</strong><br />
vieil<strong>les</strong> écorces ont 5 fois l âge <strong>du</strong> taillis ; <strong>les</strong> arbres de la catégorie inférieure sont <strong>les</strong><br />
bisanciens.<br />
143
Figure 2 : Principes <strong>du</strong> taillis sous futaie en Lorraine, pendant la période 1701-1789.<br />
Le choix <strong>du</strong> forestier n est pas neutre et son action le jour <strong>du</strong> balivage sera<br />
déterminante pour <strong>les</strong> décennies, voire <strong>les</strong> sièc<strong>les</strong> à venir. Bien souvent, faute de temps ou de<br />
disponibilités, le travail ne peut être fait que lorsque la feuillaison est déjà très avancée<br />
habituellement de la fin avril à la fin mai pour ce qui concerne la maîtrise de Pont-à-Mousson.<br />
Le sous-bois gêne alors le travail des marteleurs qui ne peuvent bien apercevoir <strong>les</strong> arbres<br />
voisins, encore moins apprécier la densité de la réserve ou l état sanitaire des anciens et<br />
vieil<strong>les</strong> écorces. Le balivage est donc particulièrement délicat à mener.<br />
Les modalités d application <strong>du</strong> taillis sous futaie sous l Ancien Régime, bien<br />
connues dans l ensemble depuis <strong>les</strong> travaux d Andrée Corvol, n ont pu rester sans<br />
conséquence sur la composition des forêts et sans doute sur la flore. L idée généralement<br />
admise aujourd hui est que le respect accordé aux arbres de la réserve par <strong>les</strong> forestiers a<br />
souvent con<strong>du</strong>it à la constitution d une réserve exagérément dense ; le couvert aurait con<strong>du</strong>it à<br />
des difficultés de recrutement des baliveaux, et surtout à une fuite <strong>du</strong> chêne, bien avant <strong>les</strong><br />
conversions à la futaie <strong>du</strong> siècle suivant (Corvol 1984, Rochel 2004). Les Archives<br />
Départementa<strong>les</strong> de Meurthe-et-Moselle renferment, parmi <strong>les</strong> registres de la maîtrise des<br />
Eaux et Forêts de Pont-à-Mousson, des registres de martelages 5 dont la précision et la<br />
continuité entre 1748 et 1792 peuvent permettre d affiner <strong>les</strong> réflexions actuel<strong>les</strong> sur l impact<br />
de la gestion d Ancien Régime sur <strong>les</strong> écosystèmes forestiers. Ce travail est en particulier<br />
appuyé par la reconstitution des massifs tels qu ils se présentaient dans la seconde moitié <strong>du</strong><br />
XVIIIe siècle.<br />
5 A.D.M.-M. B 12247 à 12250.<br />
144
2. Les hêtraies-chênaies de la maîtrise de Pont-à-Mousson<br />
Les essais de reconstitution ont porté sur des massifs domaniaux, seuls<br />
concernés par <strong>les</strong> registres utilisés. Certaines forêts, de petite taille, ont été ven<strong>du</strong>es après la<br />
Révolution ; el<strong>les</strong> peuvent donc avoir été défrichées ; c est le cas d une grande partie de la<br />
forêt de Mangeseille, ou de la forêt de Létricourt. L impossibilité de con<strong>du</strong>ire à l avenir, sur<br />
ces sites, des études comparatives entre peuplements actuels et forêts d il y a deux sièc<strong>les</strong> a<br />
con<strong>du</strong>it à privilégier l étude des forêts encore existantes. Les forêts domania<strong>les</strong> de Facq et<br />
Juré, Bois le Prêtre, et Puvenelle sont donc <strong>les</strong> trois principaux massifs prospectés dans le<br />
cadre de ce projet. Une reconstitution <strong>du</strong> bois de Ressaincourt a également été tentée, bien que<br />
la plus grande partie soit aujourd hui terrain militaire, ce qui rendra diffici<strong>les</strong> de futures<br />
prospections.<br />
2.1. La forêt de Puvenelle<br />
Ce massif imposant, localisé au sud-ouest de Pont-à-Mousson, s étend sur le<br />
revers des côtes de Moselle, à une altitude compris entre 220 et 350 m environ. Il fait partie<br />
de ces forêts qui occupent l essentiel des plateaux des côtes lorraines, sur un relief coupé de<br />
vallons secs parfois assez encaissés. Chêne et hêtre dominent <strong>les</strong> peuplements.<br />
Malheureusement, ce massif en un seul bloc, aux limites peu découpées, sans cours<br />
d eau, manque de points de repères susceptib<strong>les</strong> d aider à la compréhension des croquis<br />
d arpenteur. Le travail doit donc être réalisé à partir des seu<strong>les</strong> cotes indiquées dans <strong>les</strong><br />
registres ; une seule erreur de la part de l arpenteur peut en compromettre la réalisation. Par<br />
ailleurs, <strong>les</strong> ang<strong>les</strong> ne sont jamais indiqués ; un croquis montrant une coupe en forme de<br />
quadrilatère dont on ne connaît que <strong>les</strong> dimensions des quatre côtés peut être interprété de<br />
diverses façons. Il résulte que la reconstitution de la « marche des coupes », pour reprendre le<br />
vocabulaire <strong>du</strong> XVIIIe siècle, est insatisfaisante entre 1748 et 1764, puis entre 1785 et 1792 ;<br />
par prudence, ces coupes ne seront pas prises en compte. Il ne reste donc que <strong>les</strong> peuplements<br />
exploités entre 1765 et 1784, ce qui représente une ré<strong>du</strong>ction considérable des ambitions<br />
initia<strong>les</strong> <strong>du</strong> travail entrepris.<br />
La structure <strong>du</strong> peuplement semble relativement homogène ; avec une réserve<br />
équilibrée, conforme aux moyennes observées en Lorraine et dans le reste de la France <strong>du</strong><br />
Nord : plus de quarante baliveaux de l âge par hectare et trente modernes en moyenne. La<br />
composition des peuplements, en revanche, est nettement spatialisée. Le hêtre domine <strong>les</strong><br />
peuplements (81 % des réserves) ; mais le chêne domine fortement <strong>les</strong> environs <strong>du</strong> vallon de<br />
la Vau de Châtel, alors que cette zone de versants exposés au Nord-Est aurait pu être occupée<br />
par une belle hêtraie. Si le susbstrat et la topographie ne permettent pas d expliquer cette<br />
répartition des essences, le passé de l exploitation de la forêt est sans doute en cause. Situé au<br />
bas <strong>du</strong> massif, à portée de Dieulouard, ce canton a peut-être fait <strong>les</strong> frais d une exploitation<br />
intensive dans le passé, laquelle aurait favorisé le chêne <strong>du</strong> fait de coupes trop rapprochées.<br />
Les archives existantes ne permettent pas d informer ou de confirmer cette hypothèse ; si la<br />
cartographie obtenue est relativement précise, son interprétation pose problème.<br />
145
Figure 3 : la forêt de Puvenelle, structure des peuplements, 1765-1784.<br />
2.2. La forêt de Facq<br />
Aujourd hui partie de la forêt domaniale de Facq et Juré, la forêt de Facq est un<br />
massif de basse altitude (196 à 225 m) occupant, au Sud-Est de Pont-à-Mousson, une<br />
dépression très mollement vallonnée. Là encore, hêtre et chêne s y mêlent ; dans la seconde<br />
moitié <strong>du</strong> XVIIIe siècle, le hêtre représente 64 % des réserves. Que le chêne (<strong>les</strong> archives ne<br />
permettent pas de distinguer le sessile <strong>du</strong> pédonculé) ait été plus fortement représenté que sur<br />
le plateau de Puvenelle ne surprendra personne. Malheureusement, seu<strong>les</strong> <strong>les</strong> coupes de 1773<br />
à 1790 ont pu être replacées ; el<strong>les</strong> couvrent cependant la quasi-totalité <strong>du</strong> massif, à<br />
l exception de son extrémité occidentale, aujourd hui en partie défrichée.<br />
La structure des peuplements est, cette fois, nettement spatialisée. A l Est se<br />
trouvent <strong>les</strong> cantons <strong>les</strong> plus riches en bois, dont le taillis est exploité entre 1785 et 1789. Les<br />
anciens et vieil<strong>les</strong> écorces sont bien représentés. A l inverse, <strong>les</strong> peuplements occidentaux<br />
semblent bien plus pauvres (presque dix fois moins d anciens et de vieil<strong>les</strong> écorces) 6 . La<br />
composition semble répondre au même schéma, quoique de manière plus discrète ; le chêne<br />
est plus présent à l Ouest, tandis que le hêtre domine largement <strong>les</strong> peuplements préservés à<br />
l Est.<br />
6 Cette réserve plus riche à la fin de la période ne peut être considérée comme relevant d un<br />
changement de politique des officiers forestiers, car elle ne s observe qu à Facq. Elle résulte<br />
donc d une différenciation spatiale au sein <strong>du</strong> massif.<br />
146
Cette fois, l interprétation peut sembler aisée. A l Ouest se trouve la ville de<br />
Pont-à-Mousson ; la proximité immédiate de la ville a pu générer des prélèvements plus forts,<br />
un appauvrissement relatif de la réserve, et peut-être (comme à Puvenelle) une raréfaction <strong>du</strong><br />
hêtre au profit <strong>du</strong> chêne.<br />
Figure 4 : la forêt de Facq, structure des peuplements et part <strong>du</strong> chêne dans la réserve, 1773-1790.<br />
2.3. Le Bois le Prêtre<br />
La forêt domaniale <strong>du</strong> Bois le Prêtre, connue pour son histoire agitée et<br />
aujourd hui encore marquée des cicatrices <strong>du</strong> premier conflit mondial, est une forêt de plateau<br />
occupant, sur la côte de Moselle, un relief inégal centré sur le vallon <strong>du</strong> Père Hilarion. Les<br />
registres de la maîtrise de Pont-à-Mousson permettent de n en reconstituer qu une fraction ;<br />
en effet, des bois ecclésiastiques, réunis par la suite au domaine de l Etat, en occupaient la<br />
plus grande partie jusqu à la Révolution. La marche des coupes évite de ce fait la partie<br />
centrale <strong>du</strong> massif actuel et ne permet malheureusement pas d apprécier <strong>les</strong> différences entre<br />
versants qui auraient pu être particulièrement intéressantes.<br />
147
Les coupes de 1766 à 1786 montrent une structure assez mal équilibrée (sans<br />
prendre pour autant <strong>les</strong> formes très déséquilibrées constatées dans <strong>les</strong> hêtraies vosgiennes)<br />
avec 40 baliveaux, 38 modernes mais seulement 10 anciens et à peine une vieille écorce par<br />
hectare en moyenne. Cette réserve est inégalement répartie ; elle est dix fois plus riche aux<br />
extrémités Nord et Est qu au centre de l espace couvert par <strong>les</strong> coupes étudiées. Comme à<br />
Facq, la pauvreté de la réserve se double d une sur-représentation <strong>du</strong> chêne dans cette partie<br />
centrale. Là encore, une exploitation intensive aurait-elle défavorisé le hêtre ? La<br />
topographie, en tout cas, et <strong>les</strong> différences de substrat ne correspondent pas nettement aux<br />
différences rencontrées au sein <strong>du</strong> peuplement. Le registre évoque une explication très<br />
vraisemblable : l existence dans le passé de coupes extraordinaires dont le motif, l éten<strong>du</strong>e et<br />
la chronologie restent à déterminer.<br />
Figure 5. La forêt <strong>du</strong> Bois le Prêtre, structure des peuplements, 1766-1787.<br />
Conclusion<br />
Si <strong>les</strong> résultats de la reconstitution cartographique des peuplements sont relativement<br />
satisfaisants, leur interprétation reste problématique et ne pourra être facilitée que par la<br />
multiplication de tels travaux de géographie historique. Les archives pléthoriques <strong>du</strong> XIXe<br />
siècle apporteront sans doute une reconstitution plus détaillée, et des explications plus<br />
franches aux répartitions observées. A terme, l association de ce travail d archives avec<br />
l étude des forêts actuel<strong>les</strong> doit permettre de compléter la chaîne de données permettant un<br />
véritable travail rétrospectif et explicatif sur <strong>les</strong> forêts feuillues de Lorraine.<br />
Il reste que <strong>les</strong> registres de martelages aident à prendre à contre-pied, s il en était<br />
encore besoin, l idée héritée de l historiographie <strong>du</strong> XIXe siècle selon laquelle <strong>les</strong> forêts<br />
d Ancien Régime étaient dégradées, mal gérées, pillées par <strong>les</strong> communautés voisines. Une<br />
lecture rapide des archives, en particulier des requêtes et textes à caractère officiel (où,<br />
comme on le sait, la règle <strong>du</strong> jeu consiste à se lamenter pour attirer la sollicitude <strong>du</strong> prince ou<br />
148
de ses agents) peut donner une impression trompeuse ; mais dans <strong>les</strong> faits, la réserve est<br />
dense, le balivage se fait dans de bonnes conditions ; la rotation constatée est de 25 à 30 ans,<br />
ce qui est particulièrement long comparé aux cyc<strong>les</strong> moyens en France et même en Europe.<br />
D une manière générale, la forêt lorraine est préservée et gérée de manière remarquable au<br />
siècle des Lumières.<br />
Références bibliographiques<br />
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XVIIIème siècle (1747-1791). Administration forestière et répression des délits. Thèse doct.<br />
Droit, Univ. Nancy 2, 2 t. 582 p.<br />
BOYE P. 1909. Les Eaux et Forêts en Lorraine au XVIIIème siècle. Paris : Imprimerie<br />
Nationale, 43 p.<br />
CORVOL A. 1984. L Homme et l arbre sous l Ancien Régime. Paris : Economica, 1984, 757 p.<br />
DUHAMEL DU MONCEAU H.-L. 1766. De l exploitation des bois, ou moyens de tirer un<br />
parti avantageux des taillis, demi-futaies et hautes-futaies, et d en faire une juste estimation :<br />
avec la description des Arts qui se pratiquent dans <strong>les</strong> forêts. Paris : Guérin et Delatour, 2 t.<br />
706 p. + planches.<br />
GALMICHE. 1893. Etude sur <strong>les</strong> réserves des taillis sous futaie. B.S.F.F.C. t. II, 3-1893, p.<br />
108-119.<br />
GUYOT C. 1886. Les forêts lorraines jusqu en 1789. Nancy, Crépin-Leblond, 410 p.<br />
HUFFEL G. 1926. Les méthodes de l Aménagement forestier en France étude historique.<br />
Nancy-Paris-Strasbourg, Berger-Levrault, 1926, 231 p. (et : Anna<strong>les</strong> de l Ecole Nationale des<br />
Eaux et Forêts, t. 1, fasc. 2, 1927, 229 p. )<br />
HUSSON J.-P. 1991. Les hommes et la forêt en Lorraine. Paris, Bonneton, 318 p.<br />
HUSSON J.-P. 1997. L apport des cartes anciennes à la connaissance biogéographique des<br />
forêts. dans CORVOL A. ARNOULD P. HOTYAT M. (dir.) La forêt. Perceptions et<br />
représentations. Paris, l Harmattan, 1997, 401 p. (p. 25-32).<br />
MATHEY A. 1898. Les taillis sous futaie dans le bassin de la Saône. R.E.F. XXXVII, p. 689-<br />
703, 721-738, 753-765.<br />
MATHEY A. 1909. Traitement et aménagement d'un taillis sous futaie. B.S.F.F.C. vol. X, p.<br />
221-227.<br />
MONCHEREL. 1778. Commentaire sur <strong>les</strong> ordonnances de Lorraine, civile, criminelle, et<br />
concernant <strong>les</strong> eaux et forêts, combinées avec cel<strong>les</strong> de France. Bouillon : Société<br />
Typographique, pagination multiple.<br />
ROCHEL X. « Géographie historique et biogéographie : <strong>les</strong> apports des registres de<br />
martelages <strong>du</strong> XVIIIème siècle. Application à la hêtraie-sapinière vosgienne ». Dans<br />
BOULANGER P. TROCHET J.-R. où en est la géographie historique ? Actes <strong>du</strong><br />
colloque à l Université de Paris-Sorbonne, 12-14 septembre 2002, Paris :<br />
l Harmattan, 2005, p. 291-302.<br />
ROCHEL X. Gestion forestière et paysages dans <strong>les</strong> Vosges d après <strong>les</strong> registres de<br />
martelages <strong>du</strong> XVIIIe siècle. Essai de biogéographie historique. Thèse, géographie,<br />
université Nancy 2, 2004, 489 p.<br />
149
Comment valoriser <strong>les</strong> inventaires et cartographies <strong>du</strong> parc<br />
naturel régional de Lorraine ; programmes passés et à venir,<br />
l'observatoire <strong>du</strong> patrimoine naturel.<br />
Laurent GODÉ<br />
Responsable <strong>du</strong> service environnement <strong>du</strong> Parc naturel Régional de Lorraine<br />
Historique des connaissances botaniques <strong>du</strong> PnrL :<br />
Le parc naturel régional de lorraine, a été créé en 1974, en particulier au vu de son<br />
patrimoine naturel de zones humides (étangs, prairies, sources, cours d eau, mares, mares<br />
salées, marais alcalin ) mais aussi d éléments géologiques et paysagers tels que <strong>les</strong> côtes de<br />
Meuse et de Moselle.<br />
Ces milieux se répartissent sur <strong>les</strong> 220 000 ha des 189 communes <strong>du</strong> territoire Parc<br />
répartis sur 3 départements (Meurthe-et-moselle, Meuse et Moselle)<br />
Le travail d inventaire et de connaissances botaniques de ce territoire n a<br />
vraiment débuté qu à partir de 1985 : avec «l inventaire des espèces végéta<strong>les</strong> <strong>les</strong> plus<br />
remarquab<strong>les</strong> de la flore <strong>du</strong> PNRL » par Pierre Dardaine. Puis vinrent une série de<br />
recherches plus actives :<br />
1989: « sites d intérêt floristique <strong>du</strong> PNRL » par Serge Muller<br />
Entre1980 et 1990: de nombreux travaux sur <strong>les</strong> ZNIEFF, <strong>les</strong> messico<strong>les</strong> et <strong>les</strong> vallons<br />
froids furent engagés<br />
Dès 1993: des campagnes plus exhaustives de terrain débutèrent avec « l atlas<br />
communal »<br />
1997: début de 8 années d inventaires sur <strong>les</strong> prairies <strong>du</strong> Parc (avec <strong>les</strong> jardins et<br />
Conservatoires Botaniques de Nancy, l université de Metz et de nombreux bureaux<br />
d études).<br />
1997: début d inventaires de la flore des étangs (puis ponctuellement jusqu en 2006)<br />
1999: début des inventaires Natura 2000 (Rupt de Mad, Lindre, forêt de la reine,<br />
vallée de la Seille, vallée de l Esch, étangs de Lachaussée )<br />
2006: début de modernisation des ZNIEFF (sur 3 ans)<br />
Ainsi, en <strong>2007</strong>, ce sont pour l instant 1257 taxons botaniques référencés sur 1441 de<br />
la flore Lorraine sauvage.<br />
Un des plus importants outils de connaissance <strong>du</strong> patrimoine végétal <strong>du</strong> Parc est sans<br />
conteste le programme « Atlas communal »<br />
Mis en place en 1993, cet outil a pour ambition de réaliser l inventaire <strong>du</strong> patrimoine<br />
naturel des 189 communes <strong>du</strong> Parc, de le cartographier, de le hiérarchiser et de restituer cette<br />
information aux communes.<br />
Les financeurs principaux son le Conseil Régional, l Etat (via la Diren) et le conseil<br />
général de Moselle.<br />
Les objectifs principaux sont :<br />
Pour le territoire,<br />
INFORMATION : partage des connaissances <strong>du</strong> patrimoine naturel commun :<br />
milieux et espèces remarquab<strong>les</strong> et nature « ordinaire » aux habitants.<br />
CONNAISSANCE : intégrer ces éléments dans <strong>les</strong> mesures d aménagement <strong>du</strong><br />
territoire (élus).<br />
150
Pour le Parc naturel régional de Lorraine,<br />
CONNAISSANCE : ce sera la base des connaissances des richesses écologiques<br />
(milieux, faune, flore) avec une description détaillée et cartographiée des espaces non<br />
urbanisés.<br />
EXPERIMENTAL : traitements et analyses d images satellites pour corréler<br />
l information de terrain et envisager des mises à jour plus rapides..<br />
AGIR : suite aux restitutions en communes, mettre en place des mesures de gestion<br />
et de protection des milieux ou espèces remarquab<strong>les</strong>.<br />
Pour cela, au sein <strong>du</strong> service environnement <strong>du</strong> Parc, existe une équipe «SIG-Atlas<br />
communal » malheureusement pour le moment ré<strong>du</strong>ite à une seule personne.<br />
La chronologie d un Atlas communal est la suivante.<br />
D abord, présentation <strong>du</strong> programme en mairie et si la commune accepte, un avis aux<br />
habitants est lancé afin de savoir si certains refusent l accès de leurs parcel<strong>les</strong> à des fins<br />
d inventaire. En parallèle, il y a recueil des données existantes (bibliographie, audit ) suivi<br />
des inventaires et cartographies de terrain. De retour au bureau, l intégration des données sous<br />
ArcView 3.2 commence et permet d obtenir des cartes thématiques puis la conception des<br />
documents qui feront l objet de restitution publique (avec diaporama et verre de l amitié ).<br />
Le données cartographiques issues des inventaires de terrain correspondent à<br />
Carte d occupation <strong>du</strong> sol<br />
Carte de typologie des milieux<br />
Carte des périmètres et zones d inventaires<br />
Carte des VALEURS ECOLOGIQUES (synthèse)<br />
Ces dernières valeurs sont scindées en 5 degrés : Sans intérêt remarquable, Intérêt<br />
local, Intérêt Parc, Intérêt Régional et Intérêt National à International.<br />
Il y est également fait mention des périmètres et zones d inventaires (ZNIEFF, ENS, Natura<br />
2000 ).<br />
Pour aboutir à tout cela, de très nombreuses fiches de terrain sont remplies d un très grand<br />
nombre d information, en particulier sur <strong>les</strong> espèces, mais pour l instant une faible<br />
valorisation de cette information est réalisée. Une première étape est franchie en ce moment<br />
avec, par exemple, la signature d une convention de mutualisation des données floristiques<br />
avec l association <strong>Floraine</strong>. Ainsi, un grand nombre des informations de l Atlas vont<br />
retrouvées une nouvel<strong>les</strong> vie dans leur informatisation pour l Atlas des plantes de Lorraine.<br />
De même, pour le Parc, se met en place en <strong>2007</strong> un atlas interactif sur Internet, donnant pour<br />
l instant de l information globale sur le territoire mais qui va bientôt se développer via la<br />
création d un observatoire <strong>du</strong> patrimoine naturel. Les objectifs de ce programme sont de<br />
suivre et évaluer la Charte <strong>du</strong> Parc, de rassembler et partager l information avec <strong>les</strong><br />
associations, <strong>les</strong> partenaires, <strong>les</strong> habitants au travers d une base de données interactives et<br />
d organiser avec <strong>les</strong> partenaires et acteurs régionaux de l environnement l information<br />
échangeable sur <strong>les</strong> données naturalistes.<br />
Cet observatoire servira également à agglomérer <strong>les</strong> données cartographiques pour un suivi<br />
spatial de la répartition des espèces et de l évolution des territoires. En particulier, ces<br />
cartographies et base de données seront utilisées pour établir et poursuivre <strong>les</strong> cartographies et<br />
études nécessaires à l application d une politique active basée sur <strong>les</strong> réseaux et corridors<br />
écologiques (en cours).<br />
Nous espérons que ces phases en cours de développement permettront à tous <strong>les</strong> acteurs de la<br />
connaissance et de la protection des milieux naturels lorrains de se réunir et de mutualiser<br />
leurs données pour en faveur d une préservation accrue de la biodiversité en Lorraine.<br />
151
La flore <strong>du</strong> canton de Genève (Suisse): inventaire, analyse et<br />
Liste Rouge<br />
Cyrille LATOUR, Nicolas WYLER & Catherine LAMBELET-HAUETER<br />
Conservatoire et Jardin botaniques de la Ville de Genève<br />
Situé à l'extrême ouest de la Suisse, au carrefour des domaines atlantique, continental et<br />
méditerranéen, le canton de Genève possède une flore très diversifiée sur un territoire pourtant<br />
modeste. Sa superficie limitée et sa topographie très peu accidentée ont ren<strong>du</strong> possible un inventaire<br />
exhaustif de l'ensemble des plantes vasculaires qui y croissent, en utilisant <strong>les</strong> mail<strong>les</strong> kilométriques <strong>du</strong><br />
réseau topographique suisse comme unité d'échantillonnage. Outre des informations généra<strong>les</strong> portant<br />
sur le canton dans son ensemble, notamment la répartition de chaque espèce, le nombre de famil<strong>les</strong>, de<br />
55<br />
555<br />
5<br />
5<br />
55<br />
5555<br />
55555<br />
55<br />
555<br />
5<br />
5 5<br />
55<br />
5555 5 5 555<br />
55 555<br />
@ @ 555<br />
555 5 555<br />
@ 5 5 55555 5<br />
555 5 5555 5<br />
@ 5555<br />
@ 55<br />
5 5 5<br />
5 5 5<br />
5<br />
5<br />
555<br />
Répartition de Galium sylvaticum.<br />
genres et d espèces présents, ou encore leur<br />
provenance géographique, des analyses plus fines<br />
portant sur la répartition de divers facteurs ont été<br />
effectuées à partir des données de présence de chaque<br />
taxon au sein des mail<strong>les</strong> kilométriques, en particulier<br />
la répartition des valeurs écologiques et des groupes<br />
écologiques, permettant une première subdivision <strong>du</strong><br />
canton en secteurs floristiques. Enfin, cette étude<br />
constitue un "état 0" de la flore selon une méthode<br />
standardisée et repro<strong>du</strong>ctible.<br />
Les données récoltées <strong>du</strong>rant cet inventaire ont également été mises à profit pour évaluer<br />
l'impact des paramètres paysagers sur la<br />
répartition de la richesse spécifique de la flore <strong>du</strong><br />
canton, en utilisant des modè<strong>les</strong> statistiques associés à<br />
un système d'informations géographiques (SIG).<br />
L'objectif était de réaliser des prédictions de la<br />
répartition spatiale de la richesse floristique à trois<br />
niveaux: la flore dans son ensemble, <strong>les</strong> espèces<br />
menacées et <strong>les</strong> espèces rares. Les modè<strong>les</strong> expliquent<br />
jusqu'à 80 % de la répartition de la richesse spécifique.<br />
Par conséquent, <strong>les</strong> variab<strong>les</strong> paysagères constituent de<br />
bons prédicteurs dans le cadre de cette problématique.<br />
Les conclusions de cette étude devraient permettre de<br />
faire des propositions de gestion, afin d'assurer la<br />
conservation de cette flore très diversifiée.<br />
Une application concrète des résultats de la cartographie de la flore <strong>du</strong> canton de Genève a<br />
été l'élaboration d'une Liste Rouge des plantes vasculaires <strong>du</strong> canton, venant affiner <strong>les</strong> données<br />
disponib<strong>les</strong> au niveau national. Les résultats à l'échelle kilométrique de la cartographie de la flore <strong>du</strong><br />
canton étant insuffisants pour évaluer <strong>les</strong> effectifs des populations des espèces rares et leur localisation<br />
précise, un inventaire complémentaire a été effectué. Cette Liste Rouge représente un instrument<br />
indispensable pour la protection de la nature, notamment en matière de mise en priorité des actions de<br />
conservation. En mettant en évidence l'importance de la conservation des taxons menacés, elle<br />
constitue un levier efficace pour la protection des espèces. Enfin, une Liste Rouge a également un<br />
impact sur le monitoring général de la biodiversité.<br />
152<br />
Modélisation de la<br />
richesse floristique.
Les groupements végétaux de la cédraie <strong>du</strong> massif de Chélia<br />
« Aurès Algérie»<br />
BEGHAMI Yassine 1 , DE BELAIR Gérard 2<br />
1-Université de Biskra, 2-Université d'Annaba<br />
Intro<strong>du</strong>ction<br />
A l inverse des pays <strong>du</strong> nord de la méditerranée <strong>les</strong> formations forestières de la rive<br />
sud et est de la méditerranée sont en régression (QUEZEL, 2000). Cette régression est in<strong>du</strong>ite<br />
surtout par une action anthropique très marquée <strong>du</strong>e à une surexploitation (surpâturage<br />
permanent, coupes illicites et incendies de forêt) de ces milieux très fragi<strong>les</strong> et qui sont de<br />
plus soumis à des contraintes naturel<strong>les</strong> localement sévères. Bien enten<strong>du</strong> que cette régression<br />
ne se limite pas non seulement aux milieux forestiers mais menace dans une moindre mesure<br />
la biodiversité des zones pré-forestière et non forestière. Pour diagnostiquer et proposer <strong>les</strong><br />
remèdes possib<strong>les</strong>, un état des lieux de la végétation s avère le point de départ pour toute<br />
évaluation de cette régression.<br />
En consultant la littérature relative aux cédraies <strong>du</strong> Maghreb et notamment<br />
cel<strong>les</strong> des Aurès, peu de recherches et travaux phytosociologiques lui ont été consacrées<br />
(ABDESSAMED, 1981). D une manière plus globale la description des groupements<br />
végétaux de l Algérie reste encore peu définie ou peu connues (BEN ABID, 1994). Aussi<br />
faut-il souligner qu aucune recherche systématique récente dans le domaine de la flore<br />
méditerranéenne au Maghreb, et spécialement cel<strong>les</strong> des montagnes de Est algérien (Aurès).<br />
Notre approche se base sur un échantillonnage stratifié visant à déterminer <strong>les</strong> facteurs<br />
écologiques responsab<strong>les</strong> <strong>du</strong> déterminisme de la végétation <strong>du</strong> massif de Chelia (BEGHAMI,<br />
2003 ; BEGHAMI et al. in prep). L objectif est la définition de groupements végétaux et leur<br />
répartition selon le gradient écologique ainsi établi.<br />
Présentation <strong>du</strong> site<br />
Le site d étude se situe dans l Est algérien à environ 200 km de la mer Méditerranée,<br />
sur <strong>les</strong> montagnes de l Atlas saharien (Fig.1).<br />
Fig.1 : Présentation<br />
<strong>du</strong> site<br />
Carte des points-chauds de biodiversité végéta<strong>les</strong> dans le bassin méditerranéen ( VELA & BENHOUHOU <strong>2007</strong>,<br />
sous-presse)<br />
153
Il se trouve ainsi à moins de 60 Km de la première oasis <strong>du</strong> Sahara (la palmeraie de<br />
Khérane), et est soumis à des influences climatiques très diffici<strong>les</strong> (notamment un vent sec et<br />
chaud venant <strong>du</strong> sud). La calotte sommitale de ce massif est l unique paysage dans <strong>les</strong> Aurès<br />
et le Belezma portant une végétation de physionomie particulière, dominée par des<br />
« orophytes épineuses en coussinet ».<br />
Fig.2 : Carte des secteurs phytogéographiques dans le<br />
nord de l Algérie (QUEZEL & SANTE 1962)<br />
Le massif de chélia est localisé à l intérieur des coordonnées géographiques<br />
suivantes : de 35°1724 à 35°2315 de latitude Nord et 6°4549 à 6°3353 de longitude Est.<br />
La lithologie de ce massif étant composite : <strong>les</strong> strates <strong>du</strong> Barrémien et de l Aptien affleurent<br />
sous un faciès gréseux, l Albien par un faciès Flysch et le Cénomanien présente un faciès<br />
marno-calcaire (Fig.3).<br />
Quant à la pluviométrie moyenne annuelle, ce massif reçoit une tranche d eau qui<br />
varie en fonction de l altitude et de l orographie de la montagne, de 500 jusqu à 1000 mm par<br />
an.<br />
Le massif de Chélia est parcouru par <strong>les</strong> étages bioclimatiques de végétation allant <strong>du</strong><br />
semi-aride supérieur jusqu à l humide.<br />
154
Fig. 3 : CARTE GEOLOGIQUE (LAFFITE, 1939)<br />
1<br />
4 Km<br />
Flysch de<br />
l Albien<br />
Méthodologie<br />
Notre contribution est portée sur la définition et la cartographie des<br />
groupements végétaux <strong>du</strong> massif de Chelia. L échantillonnage stratifié est le plus adéquat<br />
pour ce genre d étude. La lithologie de ce massif est hétérogène, nous l utiliserons donc<br />
comme critère principal de stratification pour subdiviser le domaine à étudier en sous<br />
ensemb<strong>les</strong>. Il en résulte 4 sous ensemb<strong>les</strong> : <strong>les</strong> marno-calcaires <strong>du</strong> cénomanien, <strong>les</strong> Flysch de<br />
l albien, <strong>les</strong> grés de l aptien et enfin <strong>les</strong> grés <strong>du</strong> barrémien. A l intérieur de chaque strate<br />
définie par la lithologie nous opérons un nouveau découpage en tenant compte des critères<br />
floristico-écologiques (formation végétale au sens physionomique, la pente, l orographie et<br />
l altitude). Au total 37 relevés ont été effectués <strong>du</strong>rant 2 compagnes <strong>du</strong> printemps<br />
(BEGHAMI, 2003). Sur chaque relevé la liste de toutes <strong>les</strong> espèces vasculaires a été dressé, la<br />
détermination est faites en se basant principalement de la flore de l Algérie (QUEZEL et<br />
SANTA, 1962).<br />
Après avoir récolter <strong>les</strong> données relatives à la végétation, un tableau à deux<br />
entrées a été élaboré (BEGHAMI, 2003). En effet <strong>les</strong> espèces végéta<strong>les</strong> sont disposées en<br />
lignes et <strong>les</strong> relevées en colonnes. Au total 189 espèces ont été inventoriées, à l intersection<br />
des lignes et des colonnes nous avons noté la présence ou l absence de l espèce. Ce tableau a<br />
subi l analyse factorielle des correspondances. Le diagramme suivant résume l enchaînement<br />
de l analyse.<br />
Notons que <strong>les</strong> espèces de fréquence inférieure à 3 ont été éliminées de l analyse afin<br />
de se concentrer sur le signal dominant et effacer le « bruit » <strong>du</strong>e aux espèces trop rares.<br />
Résultats<br />
D après l analyse factorielle relative au plan formé par le premier et le<br />
deuxième facteur : nous pouvons discriminer 4 sous-ensemb<strong>les</strong>, ce qui signifie que le massif<br />
de Chelia est partagé par 4 principaux groupements végétaux (Fig.4).<br />
155<br />
Grès de l Aptien<br />
Grés <strong>du</strong> Barrémien<br />
Marno-calcaire de<br />
cénomanien<br />
Cône de déjection<br />
torrentielle
Fig. 4 : Carte de l analyse factorielle des correspondances<br />
relative au plan 1.2 Sur 37 relevés x 111 espèces végéta<strong>les</strong>.<br />
Graphe des valeurs propres.<br />
Si nous examinons la distribution de ces groupements le long d un gradient<br />
bioclimatique (Q2) nous constatons qu il n a pas une indivi<strong>du</strong>alité nette. L indivi<strong>du</strong>alité<br />
observée lors de l analyse n est que l effet de l échantillonnage. La répartition de la<br />
végétation de ce massif peut être représentée ainsi par une structure en écaille qui manifeste<br />
une transition gra<strong>du</strong>elle et progressive, phénomène connu sous le terme continuum écologique<br />
(Fig.5).<br />
156<br />
0.582<br />
0 38<br />
0
Fig. 5 : Structure en écaille des groupements végétaux <strong>du</strong> massif de Chélia suivant un<br />
gradient croissant de Q2 (d'après le diagramme proposé par Godron cité par CORRE,<br />
1970 ; GOUNOT 1969)<br />
5<br />
Chaque groupement englobe un certain nombre de relevés, ainsi <strong>les</strong> cordonnées<br />
des relevés de chaque groupement ont été utilisées pour une représentation spatiale des<br />
groupements prédéfinies dans le massif de Chélia (Fig.6).<br />
Fig.6: Répartition spatiale des groupements végétaux <strong>du</strong> massif de Chélia<br />
Aurès, Algérie<br />
7<br />
157<br />
9<br />
1<br />
Q
Aussi avons-nous tenté de représenter <strong>les</strong> groupements végétaux de ce site sur un<br />
profil topographique de direction Nord-Ouest / Sud-Est en fonction de la lithologie, de<br />
l altitude et de l orographie en passant par le point culminant (2328 m) (Fig.7).<br />
ysch de<br />
l'Albien<br />
Fl<br />
Fig.7 : Répartition des groupements végétaux <strong>du</strong> massif de Chélia le long<br />
d un profil topographique de direction Nord-ouest Sud-Est en passant par le<br />
point culminant 2328m.<br />
L analyse multidimensionnelle de la végétation nous a con<strong>du</strong>it à définir 4<br />
groupements végétaux fortement reliés à un gradient bioclimatique combinant altitude de la<br />
station et exposition générale de la montagne. En réalité, il n existe pas une indivi<strong>du</strong>alité nette<br />
de ces groupements, et <strong>du</strong> fait de la variation progressive des facteurs écologiques<br />
déterminants, on constate une transition gra<strong>du</strong>elle d un groupement à l autre (continuum<br />
écologique), la discontinuité n étant que le fait de l échantillonnage.<br />
326<br />
Grés<br />
Marno<br />
calcaire de cénomanien<br />
158<br />
Gré<br />
s <strong>du</strong> Barrémien<br />
G<br />
rés de<br />
Flysch<br />
de l'Albien
Conclusion<br />
Jusqu à présent, la seule carte de végétation disponible était une carte des formations<br />
végéta<strong>les</strong> déterminée sur la base de la seule physionomie (espèce dominante). Notre approche<br />
phyto-écologique permet d appréhender le découpage spatial de la végétation selon une<br />
méthode de description écologique.<br />
Il est important de mieux cerner l écologie <strong>du</strong> Cèdre dans une zone soumise à des<br />
contraintes anthropiques de plus en plus sévères (surpâturage, érosion, coupes illicites) qui<br />
s ajoutent à des contraintes naturel<strong>les</strong> déjà très fortes. De tel<strong>les</strong> recherches seront poursuivies<br />
dans l avenir afin d établir un diagnostic diachronique de la dynamique régressive de cette<br />
végétation, dans l espoir de rétablir une gestion écologique et conservatoire de ce massif<br />
forestier.<br />
Bibliographie<br />
ABDESSAMED K. 1981 : Le cèdre de l Atlas (Cedrus atlantica M.) dans <strong>les</strong> massifs<br />
de l Aurès et Belezma. Etude phytosociologique et problèmes de conservation et<br />
d aménagement. Thèse de docteur Ingénieur. Univ. Aix- Marseille 199p.<br />
BEGHAMI Y. 2003 : Contribution a l etude de la flore et de quelques paramètres de<br />
l environnement de la cédraie <strong>du</strong> massif de chélia Aurès Algérie<br />
BENABID A. - 1994 : Biogéographie et phytodynamique des cédraies de l Atlas Cedrus<br />
atlantica (Manetti). Ann. Rech. For. Maroc, 27 (spécial), Vol.1, IXXXVI & 1-361 62-75<br />
CORRE J. 1987 : Cours post-universitaire pour l aménagement intégré des territoiresvaleur<br />
indicatrice de la végétation - Commission Française pour l U.N.E.S.C.O 139p<br />
GOUNOT M. 1969 : Méthodes d étude quantitatives de la végétation. Masson.314p.<br />
LAFFITE R.- 1939 : Esquisse géologique de l Aurès. Thèse ès sciences- Paris France<br />
QUEZEL et SANTA. (1962, 1963) : Nouvelle flore de l Algérie et des régions désertiques<br />
méridiona<strong>les</strong> p1170 (Ed.) C.N.R.S paris 7.<br />
159
Typologie phytosociologique et croissance des peuplements<br />
de pin d'Alep dans le massif des Ben-Imloul (Aurès).<br />
KHERCHOUCHE Dalila (1), KAABECHE Mohammed (2)<br />
Dans <strong>les</strong> Aurès, le massif des Beni-Imloul abrite l'une des plus bel<strong>les</strong> forêts de<br />
Pinus halepensis Mill. Il constitue l'un des sites où la diversité biologique et écologique est<br />
exceptionnellement riche.<br />
Malheureusement, cette pinède constitue le dernier rempart contre l'avancée <strong>du</strong> désert, elle<br />
est limitée au Sud par la première oasis (Palmeraie de Kheïrane).<br />
Afin de préserver cette biodiversité et donc pour pratiquer une gestion sylvicole efficace, le<br />
forestier a besoin de connaître l'influence <strong>du</strong> milieu sur la croissance et la pro<strong>du</strong>ction des peuplements.<br />
La composition floristique constitue le reflet biologique de l'ensemble des variab<strong>les</strong><br />
écologiques d'une station. Il est donc amené à tenter d'établir une relation végétation-croissance à<br />
partir des peuplements existants.<br />
Ainsi 17 stations couvrant toutes <strong>les</strong> variations possib<strong>les</strong> des conditions <strong>du</strong> milieu ont été<br />
échantillonnées dans la pinède des Beni-Imloul. Dans chaque station trois types de relevés ont été<br />
réalisés : dendrométrique, écologique et phytosociologique (sur une aire minimale de 100 m 2 ).<br />
Le relevé dendrométrique nous a permis de modéliser la croissance en hauteur<br />
dominante à partir d'analyses de tiges et définir 4 classes de croissance ou de fertilité.<br />
Pour la mise en évidence de la relation végétation croissance, deux aspects ont été comparés<br />
: l'un synécologique et l'autre autoécologique.<br />
Selon la première approche, la corrélation entre <strong>les</strong> groupements végétaux et <strong>les</strong> classes de<br />
croissance a été faible, par contre la prise en compte des espèces séparément (autoécologie) a permis<br />
de dégager des espèces caractéristiques ou indicatrices pour chaque classe de croissance.<br />
Ces espèces peuvent servir alors de bio-indicateurs sur la fertilité de la station et<br />
fournir assez rapidement au gestionnaire forestier un outil de diagnostic simple pour choisir <strong>les</strong> modes<br />
de sylviculture <strong>les</strong> mieux adaptés pour ces peuplements.<br />
Cet outil permettra également d'apprécier <strong>les</strong> stations <strong>les</strong> plus favorab<strong>les</strong> aux reboisements<br />
<strong>du</strong> pin d'Alep dans cette zone (même en l'absence de peuplements) dont la pérennisation de la forêt<br />
reste primordiale.<br />
Mots clé :<br />
Biodiversité, phytosociologie, pin d'Alep, végétation, Beni-Imloul, Croissance,<br />
Typologie, Synécologie, autoécologie.<br />
(1) Département d'Agronomie, Faculté des Sciences, Université de Batna<br />
05000 (Algérie). E-mail: d.kherchouche@yahoo.fr<br />
(2) Département de Biologie, Faculté des Sciences, Université de Sétif 19000<br />
(Algérie). E-mail: kaabeche2@yahoo.fr<br />
160
Evolution de la distribution des espèces messico<strong>les</strong><br />
dans deux régions <strong>du</strong> Nord-Est de la France<br />
Fried Guillaume 1 , Cadet Emilie 1 & Hoff Michel 2 .<br />
1 UMR 1210 Biologie et Gestion des Adventices, INRA, ENESAD, UB,<br />
17 rue Sully, BP 86510, F-21065 Dijon<br />
2 Herbier de l Université Louis Pasteur, Institut de Botanique<br />
28, rue Goethe, 67000 Strasbourg<br />
Contexte et objectifs. Les espèces messico<strong>les</strong> sont des plantes annuel<strong>les</strong> inféodées aux<br />
céréa<strong>les</strong> d hiver. El<strong>les</strong> ont été intro<strong>du</strong>ites en Europe occidentale avec <strong>les</strong> céréa<strong>les</strong>, par différentes<br />
voies, depuis le Proche Orient et le Bassin méditerranéen. Au cours <strong>du</strong> XX ème siècle, ces espèces ont<br />
subi une forte régression <strong>du</strong> fait de l intensification des pratiques agrico<strong>les</strong>. Un Plan national d action<br />
pour la conservation des plantes messico<strong>les</strong> a été initié en 1998. Ce plan prévoit entre autres objectifs<br />
des actions d inventaires, afin d actualiser <strong>les</strong> connaissances sur la répartition passée et présente de ces<br />
espèces. Dans ce cadre, ce travail vise à établir la cartographie temporelle des espèces messico<strong>les</strong> dans<br />
deux régions <strong>du</strong> Nord-Est de la France, historiquement citées comme riches en messico<strong>les</strong> (Alsace et<br />
Côte-d Or), afin de déterminer : i) l évolution <strong>du</strong> statut des différentes espèces et ii) de localiser <strong>les</strong><br />
zones historiquement et actuellement <strong>les</strong> plus riches en messico<strong>les</strong>.<br />
Matériels et méthodes. Dans un premier temps, une base de données regroupant toutes <strong>les</strong><br />
observations de ces espèces a été établie à partir de différentes sources. Les données anciennes<br />
couvrant le XIX ème et le début <strong>du</strong> XX ème siècle ont été compilées à partir de différents herbiers de<br />
l Université Louis Pasteur de Strasbourg (STR) et <strong>du</strong> Muséum de l Arquebuse de Dijon, de manuscrits<br />
de botanistes, de flores anciennes <strong>du</strong> XIX ème siècle, etc. Des bases de données informatisées (base<br />
Brunfels de la Société Botanique d Alsace et base Flora <strong>du</strong> Conservatoire Botanique national <strong>du</strong><br />
Bassin parisien) ont permis de couvrir la période la plus récente. Les informations relevées se<br />
répartissent en quatre catégories : (1) temporelle : date de récolte ou d observation, (2) spatiale :<br />
commune et parfois lieu-dit ou coordonnée géographique précise, (3) écologique : habitat, type de sol,<br />
altitude, etc., et plus rarement (4) démographique : taille de la population. Dans un second temps, des<br />
prospections de terrain ont été effectuées, en 2004 en Alsace et en 2005-2006 (en cours) en Côte-d Or.<br />
Ces prospections ont été con<strong>du</strong>ites en suivant deux règ<strong>les</strong> de priorité, visite prioritaire : i) dans <strong>les</strong><br />
stations encore connues récemment et ii) dans <strong>les</strong> secteurs localisab<strong>les</strong> d après <strong>les</strong> données anciennes<br />
(coordonnées précises, lieux-dits), puis, dans un rayon plus large (dans l ensemble de la commune).<br />
Les données ont été réparties au sein de trois périodes chronologiques : avant 1970 (i.e. avant le<br />
processus d intensification), de 1970 à 1990 et après 1990.<br />
Principaux résultats. (1) En Alsace, ce travail a permis de classer <strong>les</strong> espèces messico<strong>les</strong> en 4<br />
catégories suivant l évolution de leur statut : 21 espèces ont disparues avant 1990, 19 espèces sont en<br />
danger dont 7 au bord de l extinction (1 ou 2 stations relictuel<strong>les</strong>), 7 espèces sont en régression<br />
accusée sans être menacée à court terme et 15 espèces se maintiennent plus ou moins. En Côte-d Or,<br />
<strong>les</strong> premiers résultats semblent montrer que la situation est moins précaire, avec le maintien de<br />
plusieurs espèces non revues récemment en Alsace (Bupleurum rotundifolium, Nigella arvensis, etc.).<br />
(2) La cartographie a permis de faire émerger quelques zones géographiques plus propices aux espèces<br />
messico<strong>les</strong>, correspondant soit à un type d habitat particulier (zones combinant des terres calcaires<br />
filtrantes et un climat plus chaud, favorab<strong>les</strong> aux espèces <strong>les</strong> plus xéro-thermophi<strong>les</strong>), soit à une région<br />
agricole ayant conservé des pratiques extensives (exemple de l Alsace Bossue où la polycultureélevage<br />
et l utilisation de semences de fermes restent favorab<strong>les</strong> à Bromus secalinus). Le travail de<br />
cartographie permet ainsi d orienter de futures campagnes de prospections plus fines et de délimiter<br />
<strong>les</strong> zones <strong>les</strong> plus favorab<strong>les</strong> à la conservation des différentes espèces. (3) La connaissance des<br />
répartitions anciennes et actuel<strong>les</strong> apportée par ce travail a considérablement amélioré la perception <strong>du</strong><br />
statut des espèces par rapport aux publications récentes. De manière annexe, ce travail a permis de<br />
mettre en évidence des zones historiquement sous prospectées (Alsace Bossue et Sundgau en Alsace et<br />
Nord <strong>du</strong> Châtillonais en Côte-d Or) qui mériteraient une attention plus particulière des botanistes.<br />
161
Les écosystèmes forestiers en Lorraine et en Alsace<br />
Raymonde VIRION<br />
Inventaire forestier national<br />
14, rue Girardet CS 4216<br />
54042 NANCY CEDEX<br />
Courriel : raymonde.virion@ifn.fr<br />
Depuis 1992, l Inventaire forestier national effectue des relevés écologiques et floristiques<br />
tout au long de l année sur toutes ses placettes de sondage en France métropolitaine, la base de<br />
données nationale contient actuellement plus de 100 000 placettes géoréférencées réparties dans tous<br />
<strong>les</strong> milieux forestiers.<br />
Le poster proposé est constitué de deux parties illustrant différentes possibilités de<br />
représentation des relations entre <strong>les</strong> plantes et leur milieu dans <strong>les</strong> écosystèmes forestiers :<br />
La première partie donne une carte de répartition des types de sol en Lorraine et en Alsace<br />
ainsi que la liste des données stationnel<strong>les</strong> relevées par l IFN sur ses points de sondage.<br />
Des exemp<strong>les</strong> de graphiques réalisés sur une région forestière nationale illustrent quelques<br />
possibilités de représentation de l importance des facteurs influençant la croissance des<br />
arbres forestiers.<br />
La seconde partie permet de voir la diversité des types de forêts dans <strong>les</strong> régions<br />
considérées, <strong>les</strong> indices calculés à partir des relevés de végétation avec la méthode<br />
Ecoflore* permettent de caractériser <strong>les</strong> niveaux trophique et hydrique des régions<br />
forestières. Les cartes de répartition d espèces figurant sur le poster sont cel<strong>les</strong> de l Atlas<br />
des plantes de Lorraine qui intègre <strong>les</strong> données floristiques IFN après examen et validation<br />
par FLORAINE.<br />
Les données écologiques et floristiques de l IFN peuvent être utilisées pour l élaboration de<br />
documents typologiques (catalogues et guides de stations forestières), l étude des habitats forestiers<br />
et le zonage de facteurs de risque pour la santé des forêts.<br />
Les données floristiques constituent un intégrateur permettant de définir <strong>les</strong> milieux<br />
naturels existants et le croisement avec <strong>les</strong> données dendrométriques permet<br />
d établir des relations avec la croissance des arbres.<br />
*Ecoflore :<br />
BARTOLI (M.), TRAN-HA (M.) - Logiciel ECOFLORE ONF, 1999.<br />
BARTOLI (M.), TRAN-HA (M.), LARGIER (G.), DUMÉ (G.), LARRIEU<br />
(L.) Ecoflore : un logiciel simple de diagnostic écologique. - RFF, vol. LII,<br />
n°6, 2000, pp. 530-547.<br />
BRUNO (E.), BARTOLI (M.) - Premiers enseignements de l utilisation <strong>du</strong><br />
logiciel ECOFLORE pour traiter <strong>les</strong> relevés botaniques de l IFN. RFF, vol.<br />
LIII, n° 3-4, 2001, pp. 391-396.<br />
162
Cartographie des espèces patrimonia<strong>les</strong> et son utilisation dans<br />
la gestion forestière<br />
Pascal Holveck ONF Alsace MF Bischofslaeger 67710 Wangenbourg<br />
La connaissance précise des localités d espèces patrimonia<strong>les</strong> est incontournable pour<br />
évaluer <strong>les</strong> enjeux environnementaux, et appréhender <strong>les</strong> règ<strong>les</strong> de gestion nécessaires au maintien de<br />
la biodiversité dans <strong>les</strong> forêts gérées par l Office National des Forêts.<br />
Celle-ci doit passer par un outil informatique cartographique, afin de donner une répartition<br />
spatiale des espèces patrimonia<strong>les</strong>. La localisation sur un fond de plan doit être précise (carte IGN,<br />
orthophotos )<br />
Ces prises de données au niveau <strong>du</strong> terrain ne nécessitent pas de grandes compétences<br />
informatiques, avec un minimum de moyens matériels sans budget excessif.<br />
Matériels utilisés :<br />
- un PC avec bonne capacité de stockage et mémoire suffisante<br />
- un GPS Garmin 76 avec antenne<br />
- un logiciel de cartographie : Fgis (logiciel gratuit jusqu en sept/05)<br />
- un logiciel d échange PC-GPS : G7toWin<br />
- un logiciel de conversion au format shape (.shp) : Convert LT<br />
- fonds cartographiques : IGN (scans couleur 25000, orthophotoplans géoréférencés)<br />
Méthodologie :<br />
La localisation des espèces d intérêt patrimonial est prise à l aide <strong>du</strong> GPS en s assurant<br />
d une bonne réception satellitaire (3D minimum).<br />
Les données issues <strong>du</strong> GPS sont déchargées sur PC au format texte (.txt). Ce fichier est<br />
ensuite repris et converti en un fichier shape (.shp), utilisable dans tous <strong>les</strong> logiciels cartographiques.<br />
Les coordonnées géographiques (X,Y) sont versés dans une table attributaire (Thème) dont<br />
on renseigne <strong>les</strong> champs définis au préalable.<br />
Dans notre cas, <strong>les</strong> champs de la table utilisés sont <strong>les</strong> suivants :<br />
- ID : numéro d identification de la donnée<br />
- ESPECE : nom de genre + espèce + sous-espèce (voire variété)<br />
- LIEU_DIT : localisation <strong>du</strong> lieu-dit le plus proche (carte IGN)<br />
- FORET : type et nom de la foret (FD, FC ou FI ou privée)<br />
- PARCELLE : nom de la parcelle forestière<br />
- COMMUNE : nom <strong>du</strong> territoire communal de la donnée<br />
- DEPARTEMENT : numéro <strong>du</strong> département de la donnée<br />
- STATUT_PROTECTION : NA1, NA2 : protection nationale ; DH5 : Directive habitat annexe 5 ;<br />
PR_ALSACE : protection régionale Alsace ; LR_ALSACE : liste rouge Alsace.<br />
- X et Y : coordonnées géographiques en Lambert 2 éten<strong>du</strong> ou WGS 84<br />
- DATE : date de la prise de donnée<br />
- DECOUVREUR : nom de la personne ayant découvert l espèce<br />
Utilisations :<br />
Les données patrimonia<strong>les</strong> sont communiquées et utilisées par différents gestionnaires<br />
forestiers de terrain pour :<br />
- connaissance des ressources biodiversité d une foret : espèces + milieux remarquab<strong>les</strong><br />
- prise en compte dans la gestion forestière : exploitation, débardage, travaux de routes<br />
- intégrer <strong>les</strong> données patrimonia<strong>les</strong> dans <strong>les</strong> Aménagements forestiers (gestion <strong>du</strong>rable).<br />
D utilisation facile, ces données informatisées permettent également des échanges entre<br />
botanistes pour vérification des localisations et améliorer la base de données régiona<strong>les</strong>.<br />
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Bases de données historiques pour l élaboration de l atlas de la<br />
Flore de Lorraine<br />
Jean Paul KLEIN 1 et François VERNIER 2<br />
L élaboration de l atlas des plantes de Lorraine nécessite la consultation des Flores anciennes et des<br />
herbiers. Depuis le XVIIIe siècle <strong>les</strong> botanistes ont parcouru la Lorraine et ont consignés <strong>les</strong> données<br />
de terrain. La littérature botanique concernant la région est abondante : Flores, Floru<strong>les</strong>, catalogues de<br />
plantes, synthèses bibliographiques, atlas des ptéridophytes, manuels, guides <strong>du</strong> botaniste,<br />
monographies, essais de géographie botanique, thèses, brochures, notes d herborisation, carnets de<br />
terrain, publications en séries, listes rouges, listes réglementaires, etc. Parmi <strong>les</strong> ouvrages de références<br />
il faut citer <strong>les</strong> Flores de France, <strong>les</strong> Flores régiona<strong>les</strong> de Lorraine et <strong>les</strong> Flores départementa<strong>les</strong><br />
(Meuse, Moselle, Vosges).<br />
Les archives de plantes desséchées constituées par <strong>les</strong> herbiers et <strong>les</strong> centuries présentent non<br />
seulement un intérêt historique et scientifique pour <strong>les</strong> études taxonomiques mais aussi pour l étude de<br />
l évolution <strong>du</strong> tapis végétal. El<strong>les</strong> sont aussi un bon outil de vérification de la littérature de l époque<br />
des récoltes.<br />
L ensemble des archives papiers (littérature botanique) et des plantes desséchées (herbiers)<br />
établissent <strong>les</strong> bases pour analyser l évolution spatio-temporelle de la flore de Lorraine. Ainsi, <strong>les</strong><br />
données historiques sont capita<strong>les</strong> pour l étude des plantes envahissantes ou simplement nouvel<strong>les</strong><br />
pour la région. En revanche, <strong>les</strong> données anciennes manquent pour certains groupes systématiques<br />
comme celui des Renoncu<strong>les</strong> aquatiques car <strong>les</strong> botanistes ne faisaient pas la distinction entre <strong>les</strong><br />
différentes espèces.<br />
Enfin, <strong>les</strong> banques de données consultab<strong>les</strong> sur internet facilitent la collecte des informations<br />
avec un gain de temps appréciable par rapport aux bibliothèques.<br />
Mots-clés : Lorraine, Atlas, Flore de Lorraine, herbiers, base de données.<br />
1 98 Rue des Capucins 55200 COMMERCY email : jean.paul.klein@wanadoo.fr<br />
2 77 Grande rue, Résidence le Village, 54180 HEILLECOURT<br />
email :francois.vernier@numericable.fr<br />
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