l'article en entier - Conseil National des Entreprises de Coiffure

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Lutter contre
l’absentéisme :
mission
impossible ?
Comment gérer l’absentéisme de ses salariés au sein du salon ? Vaste question
qui demande des réponses appropriées.
Lorsqu’on enquête auprès des chefs d’entreprise
du secteur de la coiffure, on
s’aperçoit que l’absentéisme est une
vraie préoccupation en termes de management.
C’est un sujet récurrent », explique
Michèle Duval, secrétaire générale du
Conseil national des entreprises de coiffure
(Cnec). « Nos adhérents nous adressent de
nombreuses questions sur la gestion de l’absentéisme
», confirme Mohamed Serhane,
juriste en droit social à la Fédération nationale
de la coiffure (FNC). Absences répétées
sans justificatifs, arrêts maladie à
répétition, voire abandon de poste, les cas
de figure sont nombreux.
Le coLLaborateur doit
justifier son absence
Tout salarié absent de son poste est dans
l’obligation d’informer et de justifier auprès
de l’employeur son absence non autorisée
dans les 48 heures. « En pareil cas, l’employeur
attend de recevoir un justificatif
médical », explique Mohamed Serhane.
Mais que faire si rien n’arrive ? « Après 3
jours d’absences injustifiées, il convient d’envoyer
une lettre de mise en demeure en recommandé
avec accusé de réception demandant
au salarié de reprendre son poste ou de
justifier de ses absences dans les plus brefs
délais », explique Mohamed Serhane. Si,
dans les 5 jours suivant la réception par le
salarié de la première lettre de mise en
demeure, il n’a pas répondu à cette dernière,
une deuxième devra lui être envoyée une
semaine après l’envoi de la première. « Il
est conseillé d’en envoyer une troisième, une
semaine également après l’envoi de la
deuxième, toujours en l’absence de manifestation
du salarié, précise le juriste. En tout
état de cause, à défaut de réponse dans les 5
jours suivant la réception de cette deuxième
lettre, il sera possible d’entamer la procédure
de licenciement pour motif personnel. » Les
absences injustifiées peuvent, en effet, constituer
un licenciement pour faute grave en
cas d’absence prolongée désorganisant l’entreprise.
« Rappelons qu’en cas de licenciement
pour faute grave, l’employeur est dispensé
de verser l’indemnité de licenciement et l’indemnité
de préavis, puisque la faute est d’une
importance telle qu’elle impose le départ
immédiat du salarié. Aucun préavis n’est
donc effectué, explique Mohamed Serhane.
Et l’employeur ne doit donc qu’une indemnité
compensatrice de congés payés, s’il reste
au salarié des congés payés acquis non
pris. »
Quand L’absentéisme
désorganise Le service
Immobilisation du salon, embauches d’intérimaires
à la dernière minute, augmentation
de la charge de travail pour les présents…
« L’employeur est très démuni face à une
succession d’absences justifiées par des arrêts
maladie qui s’enchaînent », commente le
juriste de la FNC. Ainsi, si ces arrêts de
travail peuvent être parfaitement justifiés,
certains patrons de salon ont la désagréable
surprise de visionner sur les réseaux sociaux
des photos de leur employé en parfaite santé,
festoyant alors qu’il est réputé être cloué au
lit. « Ces absences justifiées, mais non fondées,
sont une réalité et sont délicates à gérer pour
l’employeur », indique Mohamed Serhane.
Que faire en cas d’arrêt maladie manifestement
abusif ?
« La pratique de la contre-visite systématique
reste un procédé relativement simple à mettre
en place, puisqu’il suffit de faire appel à l’une
des nombreuses sociétés extérieures proposant
ce service. Mais, elle donne l’impression aux
salariés d’être soumis à une surveillance et peut
briser durablement la confiance des équipes, si
elle est exercée systématiquement, même pour
des arrêts dits “normaux” ; car, tout le monde
peut avoir la grippe », conclut Michèle

Duval. Peut-être plus adéquat : instaurer un
système « d’entretiens de retour » à la suite
d’absences trop longues ou trop fréquentes
d’un membre de l’équipe. Cet entretien n’a
pas pour but de sanctionner les arrêts de
travail, mais d’aider le salarié longtemps
absent à se réintégrer afin de diminuer les
risques de rechute.
Car les conséquences de l’absentéisme
peuvent vite devenir graves et coûteuses, à
la fois en termes d’image, de qualité, de
chiffre d’affaires, et de relations avec les
équipes. « Dans le secteur de la coiffure, on
trouve beaucoup de TPE où le propriétaire
du salon n’est accompagné que d’un seul collaborateur,
l’absentéisme de ce dernier désorganise
alors complètement la vie du salon »,
explique la secrétaire générale du Cnec.
« Les clients sont habitués à se faire coiffer
par une personne, et son absence les perturbe,
surtout lorsqu’il s’agit de clients âgés », précise
Lou Ann, gérante d’un salon de coiffure
rue Condorcet, à Paris dans le IX e .
« L’employeur doit garder à l’esprit qu’une
absence prolongée ou répétée même justifiée
est susceptible de fonder une cause réelle et
sérieuse de licenciement dès lors que cette
absence est de nature à perturber l’entreprise
», précise Mohamed Serhane.
Certes, la maladie ne peut pas constituer
pour l’employeur un motif de rupture du
contrat de travail. Car un licenciement fondé
sur l’état de santé du salarié serait discriminatoire
et susceptible d’être annulé devant
le tribunal des prud’hommes. L’article
L 1132-1 du Code du travail interdit de
licencier un salarié, notamment en raison
de son état de santé ou de son handicap.
« En revanche, ce texte ne s’oppose pas au
licenciement motivé, non par l’état de santé
du salarié, mais par la situation objective de
l’entreprise dont le fonctionnement est perturbé
par l’absence prolongée ou les absences répétées
du salarié », précise le juriste. À charge
pour l’entreprise de disposer d’éléments
concrets pour démontrer la réalité du préjudice
et du dommage causé dans l’organisation
du salon du fait de ces absences.
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Avant d’en arriver à de telles mesures, le professionnel
de la coiffure a intérêt à essayer de
prévenir l’absentéisme. « Il faut installer des
mesures préventives en amont. La solution réside
le plus souvent dans le dialogue entre managers
et salariés », insiste Michèle Duval. En effet,
pour limiter le nombre d’arrêts de travail, les
mesures coercitives s’avèrent souvent contreproductives.
« L’idéal est de remettre à plat l’organisation,
et d’essayer que chaque salarié ait un
samedi de libre par mois par exemple, car on sait
que très souvent l’absentéisme de courte durée se
situe plutôt en fin de semaine », explique Michèle
Duval. « Je n’ai qu’une employée et j’ai pris le
parti d’assurer moi-même la majorité des
samedis », témoigne Lou Ann.
prévention et sensibiLisation
Pour lutter efficacement contre l’absentéisme,
mieux vaut également privilégier une stratégie
ciblée sur les problèmes propres au salon. Une
telle démarche demande de bien étudier la situation
au préalable. « N’oublions pas que, dans le
secteur de la coiffure, l’absentéisme est souvent lié
à des maladies professionnelles, qu’il s’agisse d’allergies,
notamment de dermatoses ou de troubles
musculo-squelettiques », explique Michèle Duval.
Des mesures de prévention et de sensibilisation
des salariés à ces risques professionnels peuvent
s’avérer efficaces. Les épidémies de grippe ou de
gastro-entérite sont également à l’origine de
nombreux arrêts maladie. « Le chef d’entreprise a
la possibilité d’organiser et de prendre en main une
campagne de vaccination anti-grippe. Bien entendu,
il n’est pas possible d’obliger ses salariés à se faire
vacciner, mais il est tout à fait possible de les y
inciter », préconise la secrétaire générale du Cnec.
Dans les cas où l’absentéisme est lié à des conditions
de travail génératrices de stress, une réorganisation
peut être nécessaire. Des tâches répétitives,
des objectifs difficiles à atteindre, une cadence de
travail très élevée peuvent s’avérer difficiles à
supporter pour certains salariés. Donner plus
d’autonomie, fixer des objectifs plus raisonnables,
voire embaucher, peuvent contribuer à faire baisser
le stress et donc l’absentéisme.
Enfin, communiquer autour des conséquences
et du coût de l’absentéisme pour l’entreprise en
termes de perte de parts de marché, d’insatisfaction
des clients, de chute des ventes permet
aux salariés de prendre conscience des enjeux et
des conséquences éventuelles sur leur situation

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(baisse de leur participation salariale, menace
sur leur propre emploi, etc.). En outre, en
communiquant sur l’absentéisme, le dirigeant
émet le signal qu’il a décidé de faire bouger les
choses. Les collaborateurs qui ont recours à des
absences injustifiées sont ainsi amenés à reconsidérer
leur stratégie.
cdd, intérim comme remèdes
Si la situation perdure comment pallier l’absentéisme
? « Si le salarié est remplacé par un collaborateur
engagé en CDD, il est possible de
s’organiser en alignant la date de fin de son CDD
sur celle du retour du salarié absent, quitte à décaler
la fin du CDD en cas de renouvellement de l’arrêt
maladie », préconise Michèle Duval. En cas
d’absence brève et imprévue, le recours au CDD
est illusoire. « Le chef d’entreprise n’a pas le temps
de s’organiser. Il lui reste alors l’option de l’intérim,
solution coûteuse, mais efficace », commente
Michèle Duval. À la différence d’un contrat de
travail classique, le salarié intérimaire est sous
contrat avec une entreprise de travail temporaire,
qui le rémunère et se charge de toutes les
formalités liées à la gestion du personnel. Pour
l’employeur qui doit étoffer rapidement ses
équipes, la solution de l’intérim présente nombre
d’avantages. Le premier de ces avantages, et non
le moindre, c’est la réactivité des agences d’intérim.
En effet, la force des agences d’intérim,
c’est leur vaste fichier de candidats, qu’elles
connaissent bien pour les avoir déjà fait travailler.
Deuxième avantage : l’aménagement du terme
permet en fin de contrat, d’allonger ou de
raccourcir de quelques jours la durée du contrat,
ce qui peut être très utile pour le dirigeant. Autre
atout : l’agence d’intérim se charge de la majorité
des tâches administratives, l’édition des fiches
de paye, par exemple. Mais, cette solution n’est
pas systématiquement utilisée. « J’hésite à
recourir à l’intérim, témoigne ce dirigeant d’une
franchise Saint Algue, à Paris XI e . J’ai l’impression
que cette démarche est trop compliquée pour
assurer un remplacement de quelques jours. »
Enfin, certains professionnels qui gèrent plusieurs
salons s’organisent pour lutter contre l’absentéisme.
« Ils disposent de personnel volant, qu’ils
affectent au remplacement des absents en fonction
des besoins des salons concernés. Mais, cette
solution est réservée à un petit nombre de professionnels
», ajoute Michèle Duval.
Frédérique PERROTIN