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AVEC DU SENS - Vallée de l'Ubaye

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© Bertrand Bodin<br />

Ces gestes, nul ne peut les mettre en œuvre s’il ne possè<strong>de</strong> un<br />

« contingent », une licence qui s’achète à l’état, un droit <strong>de</strong> moudre.<br />

À l’origine <strong>de</strong> la farine, il y a évi<strong>de</strong>mment le blé. Robert produit le<br />

sien sur la base d’un blé qui affiche 60 ans d’âge, retrouvé au grenier.<br />

« Il se reproduit tranquillement, je n’en achète pas. Il n’y a pas<br />

beaucoup <strong>de</strong> rentabilité, c’est sûr ! Pour boucler la boucle, je fais<br />

aussi mon propre levain et du pain. Je blute, c’est-à-dire je sépare le<br />

son <strong>de</strong> la farine, à 50 %. La petite particule <strong>de</strong> blé contre la peau, moi<br />

je la laisse, on laisse plus <strong>de</strong> déchets, c’est certain, mais aussi une<br />

meilleure qualité. Aujourd’hui dans les usines, on est à 80 %. Les<br />

déchets allaient à l’époque aux cochons, aux lapins, aux poules. On<br />

<strong>de</strong>vait nourrir tout le mon<strong>de</strong> : la famille plus les bêtes. Le déchet, <strong>de</strong><br />

20 % aujourd’hui, on ne peut plus l’utiliser pour le bétail. » Soisson<br />

- blé barbu, tendre -, florence aurore – blé sans barbe, <strong>de</strong>mi-dur - et<br />

seigle, la bonne recette mixe les trois, selon <strong>de</strong>s pourcentages qui<br />

différent. « Notre mélange savant à nous, c’est le grand-père qui l’a<br />

écrit. » Auparavant, on laissait le blé mûrir <strong>de</strong>ux ou trois mois dans<br />

les coffres en bois <strong>de</strong> l’étage, sans le toucher. Aujourd’hui, on laisse<br />

moins <strong>de</strong> temps au blé… comme à toutes choses. « Pourtant, il faut<br />

que la farine ait ce que nous appelons du « plancher », que le blé ait<br />

été conservé dans le bois, que la farine ne soit pas livrée tout <strong>de</strong><br />

suite. Quand mon blé pousse, il faut que je le trie au moulin, parce<br />

que je n’utilise pas <strong>de</strong> désherbant, il se trouve donc mélangé à <strong>de</strong>s<br />

graines <strong>de</strong> coquelicot, d’ail, <strong>de</strong> chénopo<strong>de</strong>, <strong>de</strong> chardons… » La<br />

vantarelle, sorte <strong>de</strong> gros van, gratte la première petite pellicule du<br />

grain <strong>de</strong> blé, en le projetant contre une grille, une grosse râpe.<br />

« La vraie farine<br />

à l’ancienne<br />

a le goût <strong>de</strong> bois<br />

et <strong>de</strong> pierre. »<br />

Plus d’infos :<br />

Moulin d’Abriès :<br />

http://robert.martin9.free.fr • Tél. 04 92 81 11 42<br />

mOUlIn d’AbRIèS 13<br />

« La qualité vient<br />

du grain <strong>de</strong> blé<br />

mais aussi <strong>de</strong> la<br />

façon dont on<br />

écrase la farine » Les meules en silex, qui proviennent <strong>de</strong> cailloux<br />

récupérés à la Barge, en Haute-Ubaye, ont été fabriquées ici il y a<br />

trois siècles. Le tailleur assemblait les cailloux (une seule meule<br />

trouvée ici est d’un seul tenant : le bloc a été transporté et taillé sur<br />

place), puis le maréchal-ferrant la cerclait. Le meunier s’occupait<br />

ensuite personnellement <strong>de</strong> son surfaçage : son secret <strong>de</strong> farine<br />

tenait là, dans sa façon <strong>de</strong> ciseler la meule. La vraie farine à<br />

l’ancienne a le goût <strong>de</strong> bois et <strong>de</strong> pierre. De fraîcheur aussi, celle <strong>de</strong><br />

l’eau bien crue contre la pierre (la farine n’est pas bonne si elle<br />

chauffe). « Aujourd’hui, on utilise beaucoup d’inox, <strong>de</strong> plastique, le<br />

goût est altéré » déplore le meunier d’Abriès. Et s’il utilise aujourd’hui<br />

<strong>de</strong>s go<strong>de</strong>ts en métal <strong>de</strong> sa fabrication, il laisse pendus à l’entrée les<br />

antiques go<strong>de</strong>ts en couenne (peau <strong>de</strong> cochon). Hommage à ce temps<br />

révolu que ce « <strong>de</strong>rnier <strong>de</strong>s Mohicans » s’attache à faire vivre, au<br />

moins dans les souvenirs.

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