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la ministre belge quitte la présidence du parti qu'elle a créé ... - Milquet

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46<br />

SA CAPACITÉ D’INDIGNATION<br />

EST RESTÉE INTACTE<br />

16 décembre 1995.<br />

Gérard Deprez félicite<br />

Joëlle <strong>Milquet</strong><br />

pour son discours lors<br />

<strong>du</strong> 50 e anniversaire<br />

<strong>du</strong> PSC.<br />

Benoît Lutgen et<br />

Joëlle <strong>Milquet</strong> : « Je ne<br />

veux pas être une<br />

belle-mère pour lui ! »<br />

Paris Match. Après une sco<strong>la</strong>rité sans<br />

faute — le droit à l’UCL, une<br />

spécialisation à Amsterdam —, vous<br />

avez entamé, il y a vingt-cinq ans, un<br />

parcours professionnel fulgurant :<br />

grands cabinets d’avocats, assistante<br />

à l’UCL, assistante parlementaire,<br />

secrétaire politique <strong>du</strong> groupe PSC au<br />

Sénat, chef de cabinet adjoint d’un<br />

<strong>ministre</strong>, conseillère communale,<br />

secrétaire politique, puis viceprésidente<br />

et présidente <strong>du</strong> PSC et <strong>du</strong><br />

cdH, première échevine, <strong>ministre</strong> de<br />

l’Emploi et de l’Egalité des chances.<br />

Quel parcours !<br />

Joëlle <strong>Milquet</strong>.A <strong>la</strong> vérité, les titres<br />

ne m’intéressent pas. Je ne comptais pas<br />

faire une carrière dans <strong>la</strong> politique<br />

active.<br />

Allons, vous n’êtes pas fière de vous ?<br />

Ce n’est pas important, ce sont les<br />

projets qui m’intéressent.<br />

« J’ai encore très<br />

envie d’un enfant »<br />

Ce n’est tout de même pas un parcours<br />

commun !<br />

Ce<strong>la</strong> s’est enchaîné. Mon ambition<br />

n’a jamais été de me mettre en avant.<br />

Au départ de ma carrière, j’étais une<br />

technicienne, une femme de dossiers, je<br />

n’avais pas l’envie de me vendre sur des<br />

listes électorales. Mais Gérard Deprez<br />

m’a repéré et il a insisté pour que je<br />

devienne secrétaire politique <strong>du</strong> <strong>parti</strong>.<br />

J’ai accepté parce que c’était une<br />

fonction de l’ombre comme celles que<br />

j’avais accomplies dans les années<br />

précédentes, notamment comme<br />

assistante parlementaire. Et puis le<br />

président m’a demandé d’être sa<br />

première suppléante lors d’élections, et<br />

je suis devenue sénatrice sans en avoir<br />

eu le projet.<br />

PARIS MATCH DU 1 ER AU 7 SEPTEMBRE 2011<br />

Comme quoi, il y a des rencontres<br />

déterminantes dans <strong>la</strong> vie<br />

professionnelle.<br />

Oui, j’ai eu de <strong>la</strong> chance. Les choses<br />

ne se seraient pas passées comme ce<strong>la</strong><br />

sans Gérard Deprez.<br />

La chance, c’est un peu court !<br />

Il y a bien sûr ce que l’on vaut. Mais<br />

encore une fois, je n’ai jamais eu de p<strong>la</strong>n<br />

de carrière. Pas plus aujourd’hui<br />

qu’hier. Pendant toutes ces années de<br />

<strong>présidence</strong>, je n’ai jamais préparé<br />

l’après. Je suis dans l’action, dans le<br />

présent. Par exemple, mon poste de<br />

vice-Première au fédéral, je l’avais<br />

négocié pour André Antoine et,<br />

finalement le <strong>parti</strong> m’a demandé d’en<br />

prendre <strong>la</strong> charge...<br />

Magnifique parcours, mais très lisse.<br />

Pas une aspérité, pas de révolte. Une<br />

bonne élève, une bonne patronne, une<br />

bonne mère. Vous ne vous mettez pas<br />

un peu trop <strong>la</strong> pression ?<br />

Non. La révolte, elle est là. Ma<br />

capacité d’indignation est restée intacte.<br />

C’est elle qui m’a con<strong>du</strong>it vers une<br />

activité où l’on peut essayer de faire<br />

bouger les choses. Le parcours lisse<br />

aurait été de chercher un boulot où<br />

j’aurais très bien gagné ma vie, de<br />

m’occuper plus de ma famille et de<br />

moi-même. Point barre. Objectivement,<br />

<strong>la</strong> trajectoire professionnelle que j’ai<br />

choisie implique pas mal de sacrifices.<br />

C’est une vie <strong>du</strong>re. Journées très<br />

longues, exposition aux critiques, le<br />

sentiment que l’on a parfois de se<br />

trouver sur un siège éjectable. Je ne me<br />

p<strong>la</strong>ins pas. De toute manière, je me sens<br />

portée par mes convictions.<br />

Selon certains de vos col<strong>la</strong>borateurs,<br />

vous êtes excessivement exigeante. Le<br />

genre à demander un rapport sur ceci<br />

ou ce<strong>la</strong> le vendredi soir à 22 heures...<br />

La vie politique ne s’arrête jamais!<br />

Il peut y avoir une urgence à tout<br />

moment. Un fait de société, une<br />

déc<strong>la</strong>ration, un effondrement de <strong>la</strong><br />

Bourse, que sais-je? Quelque chose qui<br />

nécessite un commentaire, une prise de<br />

position, une décision... Oui, je suis très<br />

exigeante dans mon travail. Quand je fais<br />

une note, chaque phrase, chaque virgule<br />

est soupesée. Ce qui est paradoxal, c’est<br />

que, d’un autre côté, il y a <strong>du</strong> désordre<br />

dans ma voiture, j’oublie mes clés, j’arrive<br />

en retard... Terriblement cartésienne<br />

dans le boulot, assez <strong>la</strong>tine dans <strong>la</strong><br />

logistique, je résumerais.<br />

A l’occasion de votre récente sortie sur<br />

le « décret Robin des Bois », certains<br />

vous ont reproché d’être une « droguée<br />

des médias », de vouloir absolument<br />

« exister » au prix de déc<strong>la</strong>rations<br />

intempestives…<br />

Ce truc-là, ça m’a bien énervé. Moi,<br />

je ne suis pas le genre à téléphoner<br />

d’un conseil des <strong>ministre</strong>s pour<br />

critiquer un confrère. J’ai refusé<br />

beaucoup de demandes médiatiques<br />

dans ma carrière. Je ne me suis jamais<br />

déguisée comme d’aucuns! On ne voit<br />

jamais mon mari dans les journaux. Il<br />

ne supporte pas ce<strong>la</strong>. On tient tous les<br />

deux à préserver un jardin secret. Je ne<br />

donne pas de photo de moi en maillot<br />

sur <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ge. Je suis toujours restée dans<br />

le cadre que m’impose ma fonction. En<br />

plus, avant cette polémique, il y avait un<br />

an qu’on me reprochait d’être très<br />

discrète! Mais je l’étais par souci de<br />

mener au mieux mon job de négociateur<br />

institutionnel. J’ai travaillé dans l’ombre,<br />

rencontré des tas de gens, pro<strong>du</strong>it des<br />

notes que l’on retrouve très <strong>la</strong>rgement<br />

dans les discussions en cours.<br />

Et donc, il y a eu « Robin des Bois »...<br />

Oui. Eh bien, l’école, c’est important<br />

pour moi. Ensuite, Marie-Dominique<br />

Simonet est une <strong>ministre</strong> de<br />

l’enseignement exceptionnelle, qui<br />

occupe un poste explosif sans être<br />

toujours soutenue par sa propre<br />

majorité. Quand j’ai dit qu’il fal<strong>la</strong>it<br />

revoir ce décret, c’était en parfaite<br />

synergie avec elle et André Antoine.<br />

C’était même à leur demande expresse.<br />

Après ce<strong>la</strong>, dire que je fais les choses<br />

sans concertation avec mes <strong>ministre</strong>s,<br />

pour faire parler de moi, ce n’est pas<br />

sérieux.<br />

Quel conseil donneriez-vous à votre<br />

successeur ?<br />

Aucun! Je ne veux pas être une<br />

belle-mère pour Benoît. Je serai là de<br />

manière confidentielle quand il en<br />

exprimera le besoin. Nous sommes très<br />

complices.<br />

Lutgen, Tobback, Wathelet, De Croo,<br />

Michel... Quand on lit les pages<br />

politiques des journaux <strong>belge</strong>s, c’est en<br />

même temps un bain de jouvence et une<br />

seconde jeunesse, vous ne trouvez pas?<br />

Ce n’est pas le père de Benoît qui<br />

l’a fait arriver là où il est. Il est revenu<br />

d’Angleterre à 31 ans pour exercer une<br />

fonction de base dans le <strong>parti</strong>. Ensuite,<br />

il a fait lui-même son chemin. Je suis de<br />

celles et de ceux qui ont repéré ses<br />

qualités. J’ai décidé de le <strong>la</strong>ncer. Je sais de<br />

qui je parle. Benoît, c’est tout sauf un fils<br />

à papa. Idem pour Melchior Wathelet: je<br />

suis allée le chercher. Il a beaucoup<br />

hésité, car son ambition première était de<br />

devenir avocat. A 33 ans, c’est un <strong>ministre</strong><br />

<strong>du</strong> Budget impeccable. Grandes capacités<br />

intellectuelles et tout-terrain. Certes, il a<br />

le nom et même le prénom de son père.<br />

Et alors?<br />

Vos enfants préparent-ils déjà leur<br />

joyeuse entrée ?<br />

Déjà, mes enfants ne s’appellent<br />

pas comme moi. Avec ce qu’ils ont vu<br />

des implications personnelles de <strong>la</strong> vie<br />

politique, je ne crois pas que je leur ai<br />

donné l’envie de se <strong>la</strong>ncer dans cette<br />

direction. Ils feront de toute manière ce<br />

qu’ils veulent, mais j’attends d’eux qu’ils<br />

s’engagent dans <strong>la</strong> vie collective, qu’ils<br />

se bougent pour des causes. Raphaël,<br />

19 ans, termine sa deuxième candi de<br />

droit. Laura a 17 ans et elle sort de rétho<br />

avec l’intention de faire le droit. Sacha<br />

a 12ans et il rentre en deuxième<br />

humanité. C<strong>la</strong>ra, quant à elle, rentre en<br />

quatrième primaire. Elle a déjà 9 ans.<br />

Hé<strong>la</strong>s...<br />

Ah, il en faudrait une petite ou un petit<br />

en plus ?<br />

J’en ai très envie. Cette fois, nous<br />

ferons famille d’accueil.<br />

Question rituelle : « Si c’était à refaire ? »<br />

Sans doute serait-ce <strong>la</strong> même chose.<br />

De temps à autre, j’imagine une vie où<br />

j’aurais passé le cap de mon désamour<br />

pour les maths, <strong>la</strong> chimie et <strong>la</strong> physique.<br />

Médecin, ce<strong>la</strong> aurait été un passionnant<br />

métier. Mais je suis heureuse. Il ne faut<br />

jamais regarder derrière.<br />

Une vie réussie, en somme ?<br />

Attention à l’autosatisfaction! Il y<br />

a plein des choses qui manquent.<br />

J’aimerais avoir le temps de m’investir<br />

de manière plus personnelle dans des<br />

actions plus concrètes. Je souhaiterais<br />

avoir plus de temps pour <strong>la</strong> réflexion.<br />

Pour un enrichissement spirituel et<br />

intellectuel. On est mangé par<br />

l’immédiateté alors que le sens de<br />

l’existence interpelle. La vie va si vite! ■<br />

« IL FAUT UN GOUVERNEMENT<br />

ÉCONOMIQUE MONDIAL »<br />

Paris Match. Au bénéfice d'une croissance<br />

raisonnable, le chômage a diminué depuis que vous<br />

êtes <strong>ministre</strong> de l'Emploi. Encore faut-il s'entendre<br />

sur ce qu'est un emploi ! Les temps <strong>parti</strong>els, titresservices<br />

et autres formules subsidiées ne<br />

rapportent pas gros aux travailleurs concernés…<br />

Joëlle <strong>Milquet</strong>. C'est une nécessité. Sans ce<strong>la</strong>,<br />

on serait à 20 % de chômage avec des jeunes sans<br />

espoir. On est en pleine crise économique et si, en<br />

Belgique, elle n'a pas encore eu de répercussions<br />

importantes en termes de licenciement, c'est parce<br />

que nous avons pris des tas de mesures anticrise<br />

pour limiter <strong>la</strong> casse (chômage économique<br />

augmenté, ré<strong>du</strong>ction <strong>du</strong> temps de travail, etc.)<br />

100 000 emplois ont été sauvé de cette manière.<br />

Avec les mesures win-win, on a mis plus de 80 000<br />

personnes à l'emploi. C'est un tremplin formidable,<br />

notamment pour des jeunes sans qualifications. Les<br />

titres-services, ce sont des vrais contrats, indexés,<br />

qui sortent les personnes <strong>du</strong> travail au noir. Ce<strong>la</strong> dit,<br />

l'avenir est préoccupant, une crise de l'emploi<br />

s'annonce partout en Europe.<br />

Selon l'Institut pour le développement <strong>du</strong>rable,<br />

60 % de <strong>la</strong> croissance de l’emploi est liée en<br />

Belgique à des subsides importants de l'Etat... Or,<br />

on annonce des coupes budgétaires considérables.<br />

La politique actuelle reste soutenable dans <strong>la</strong> mesure<br />

où il faut tenir compte de l'effet retour des subsides. Par<br />

exemple, en sortant des personnes <strong>du</strong> travail au noir, les<br />

titres-services ont un effet retour de 50% au moins. Le<br />

win-win, ce sont des jeunes qui échappent au chômage<br />

et que l'on forme en même temps.<br />

50 % des sa<strong>la</strong>riés <strong>belge</strong>s gagnent moins de 1 740 €<br />

nets par mois. C'est suffisant ?<br />

On doit valoriser le travail, c'est fondamental.<br />

Je suis très sociale, mais je veux aussi que le sens de<br />

l'effort soit récompensé. Il y a des choses qui ne vont<br />

pas. Exemple parmi d'autres de piège à l'emploi : le<br />

chômeur qui gagne 1 200 euros comme chef de<br />

famille n'est pas taxé, le travailleur qui gagne à peine<br />

plus est taxé à <strong>parti</strong>r de <strong>la</strong> tranche de revenu de 500<br />

euros. Le différentiel entre celui qui travaille et celui<br />

Avec ses enfants :<br />

« Avec ce qu'ils ont vu<br />

des implications personnelles<br />

de <strong>la</strong> vie<br />

politique, je ne crois<br />

pas que je leur ai<br />

donné l'envie de se<br />

<strong>la</strong>ncer dans cette<br />

direction. »<br />

ne travaille pas est trop faible. Il faut augmenter <strong>la</strong><br />

quotité exonérée des revenus <strong>du</strong> travail, 6 000 euros<br />

actuellement, pour <strong>la</strong> porter à 9 000 euros, de sorte<br />

d’augmenter les sa<strong>la</strong>ires poches les plus bas. Dans<br />

cette tranche de revenus, ce<strong>la</strong> fait quelques<br />

250 euros net en plus par mois. Qu'il y ait de plus en<br />

plus de travailleurs pauvres est inacceptable.<br />

Des Didier Bellens et autres qui affichent des<br />

rémunérations de plusieurs millions d'euros par an,<br />

ce sont des gens qui auraient une idée géniale par<br />

heure ?<br />

Non, je ne crois pas. Ce type de rémunérations est<br />

tout à fait excessif. Les sa<strong>la</strong>ires <strong>du</strong> privé pour des<br />

fonctions de ce type sont tout à fait démesurés. Ce<br />

n'est pas normal que les Premiers <strong>ministre</strong>s passent leur<br />

temps à désigner des gens qui gagnent le quintuple<br />

d'eux alors qu'en tant que chefs de gouvernement, ils<br />

doivent faire face à des responsabilités bien plus<br />

importantes. Il y a une crise de <strong>la</strong> gouvernance dans le<br />

secteur privé.<br />

Où des gens surpayés ne brillent pas<br />

nécessairement par une grande lucidité, voire<br />

provoquent des dégâts sociaux considérables...<br />

C'est pourquoi il faut injecter une dose<br />

d'éthique dans l'économie et <strong>la</strong> finance. Un retour<br />

vers plus de régu<strong>la</strong>tion. Il faut une révolution<br />

internationale. On ne réalise pas à quel point ce qui<br />

arrive est dramatique. Nos démocraties n'en sont<br />

plus. Qui dirige ? Les Etats, avec leurs élus légitimes,<br />

sont devenus les objets d'agences de notation, des<br />

acteurs privés qui n'ont aucune légitimité. Quand ces<br />

agences condamnent des pays qui ont investi pour<br />

sauver des banques, je me demande où l'on va ! C'est<br />

n'est plus l'idée que l'économie domine le politique.<br />

C'est encore plus grave : des groupuscules sans<br />

légitimité dictent leur loi aux démocraties <strong>du</strong> monde<br />

entier. La restauration de <strong>la</strong> primauté <strong>du</strong> politique sur<br />

l'économie est le plus grand défi <strong>du</strong> XXI e siècle. Les<br />

structures socio-économiques actuelles ne sont plus<br />

<strong>du</strong> tout adaptées à des enjeux devenus p<strong>la</strong>nétaires. Il<br />

faut un gouvernement économique mondial, une<br />

sorte d'ONU socio-économique.<br />

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