Léon Rosenthal, Notre musée, l'art expliqué par les œuvres…

Voilà l'objet auquel cet album essaye de concourir. Il propose un recueil de pages choisies,
illustres ou caractéristiques. Elles sont accompagnées d'explications brèves, destinées uniquement
à en faciliter l'intelligence, et de commentaires succincts. Ces commentaires ne demandent pas à être
littéralement acceptés : suggestions incomplètes, discutables, ils guideront l'attention, apprendront
à regarder, à comparer, à comprendre, à sentir; ils susciteront des réactions personnelles, amorceront
la curiosité, serviront de prétextes aux interventions des professeurs.
Les programmes actuels commencent au 15 e siècle.
Avant de les aborder, il semble nécessaire de rappeler,
au moins par quelques traits, les grandes époques
qui ont précédé l'ère moderne et dont le rayonnement
s'est exercé et s'exerce encore sur les artistes.
L'Égypte éveille, dans nos souvenirs, quelques
images familières, sphynx scribe accroupi, pylônes,
obélisques où se reflètent un instinct de grandeur,
de pérennité et un esprit très vif d'observation.
La Grèce a instauré le culte du Beau; elle a révélé
au monde le sens du rythme, de la mesure, la délectation
spirituelle; elle a visé à la perfection. Athènes,
au 5 e siècle, a dressé, sur l'acropole, le Parthénon où
la puissance dorienne et le sourire de l'lonie s'unissent
en une grandiose sérénité : mutilé, dépouillé, il garde
encore, par l'équilibre de ses lignes tranquilles, de ses
volumes amples et simples, par le jeu raffiné des
proportions, par l'ordre, l'autorité d'une conception
lucide; la matière y apparaît soumise aux lois de
l'esprit. Le Dionysos, sculpté, par PHIDIAS, pour
Le Parlhênor
Cl. A litui ri.
l'un de ses frontons, rappelle que les Grecs, par une
éducation attentive, façonnaient des hommes libres
aux corps harmonieux. Le corps humain, considéré
comme l'expression suprême de la beauté sensible,
ce présente ici dans un magnifique équilibre, dans sa
PHIDIAS. — Dfanyins.
Cl. Brmm H C".
plénitude physiologique; la tête intelligente et calme
est digne d'un Dieu.
L'art grec a été vivant et multiple, il a constamment
évolué. Au 4 e siècle, la Diane de Gables,
peut-être d'après PRAXITÈLE (p. 2), témoigne une
recherche exquise de grâce, la déesse austère devient
une jeune fille gracieuse occupée à sa toilette. La
Victoire de Samothrace, au début du 3 e siècle
(p. 2), montre, après la conquête d'Alexandre,
à la période hellénistique, un art grandiloquent,
emphatique, dramatique.
Les siècles passent. Rome conquiert le monde
occidental, elle emprunte les formes helléniques
pour ordonner la vie publique et ériger temples,
forums, basiliques, cirques, thermes, dont les ruines
nous imposent encore le respect.
Le Christianisme paraît; il méprise la beauté plastique
célébrée par les Grecs, mais il invite l'art à
concourir à l'exaltation des âmes et lui ouvre des
champs infinis. Cependant l'Empire romain s'épuise;
il survit à Constantinople où, sous la triple action
du génie antique, du Christianisme et de l'Orient se
constitue un art original : l'art byzantin, puissant,
solennel et somptueux. Mais l'Occident s'écroule et
les Barbares germaniques, installés sur le sol romain,
commencent la lente gestation d'un ordre nouveau.