Bulletin AMCP n° 2 - Association Montfort Culture et Patrimoine

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Histoire Locale
Les Charitons
Des charités se sont constituées au Moyen Âge en Normandie. Certaines confréries auraient été fondées
vers l’an mil et seraient une survivance d’anciennes sociétés nordiques introduites par les vikings.
Les charitons, hier comme aujourd’hui, conduisent les morts jusqu’à leur dernière demeure.
Au Moyen Âge, la mort était considérée comme un phénomène naturel qu’il n’y avait pas lieu de
redouter ; elle faisait partie de la vie quotidienne. La mort n’était pas cachée et il n’y avait aucune raison
d’écarter les enfants. Il n’y avait pas d’angoisse quant au salut individuel. Le monde médiéval était très
socialisé et peu enclin à s’interroger sur les responsabilités et mérites individuels.
À certaines époques du Moyen Âge, notamment au XIVème siècle, les épidémies, en particulier la peste,
ont fait des ravages considérables. Les charitons ramassaient les morts, victimes de ces épidémies, et les
enterraient.
La cérémonie des funérailles se réduisait alors à quelques rites élémentaires, en majorité laïques, avec
une simple absoute et une brève inhumation. Les morts étaient enterrés près des églises dans des
cimetières qui s’avéraient vite trop petits où les tombes ne faisaient l’objet d’aucune dévotion familiale
particulière.
Aujourd’hui on ne retrouve des charitons que dans le Pays d’Auge, le Pays d’Ouche, le Lieuvin et le
Roumois. Dans notre secteur, il y a des charités à Illeville-sur-Montfort, Appeville-Annebault, Écaquelon,
Condé, Saint Pierre des Ifs, Saint Georges du Vièvre, Saint Grégoire, Saint Martin Saint Firmin, Saint
Christophe sur Condé. Il y aurait eu une confrérie à Montfort-sur-Risle jusqu’au XVème siècle (je suis
preneur de toute information à ce sujet).
Chaque charité comporte normalement une douzaine de membres - ils sont plutôt de nos jours entre 5 et
9 membres – et est placée sous l’autorité d’un maître de charité.
Les charitons portent à l’épaule gauche un chaperon, sorte de large écharpe brodée. Autrefois ils étaient
également revêtus d’une soutanelle et d’un surplis.
Un premier chariton porte la bannière de velours incarnat, emblème de la charité. Il est escorté du
tintenellier qui est revêtu du tabart (sorte de dalmatique). Le tintenellier fait sonner deux petites cloches,
les tintenelles, accordées l’une sur le « la », l’autre sur le « sol ». Ils précèdent les autres charitons qui,
aux obsèques, portent le cercueil du défunt. Les charitons prennent place dans les stalles de l’église où
chacun tient un porte-torche (voir notamment les porte-torches d’Appeville-Annebault).
De nouveaux charitons sont intronisés chaque année. Ils s’engagent à respecter le règlement diocésain
des charités. Ces cérémonies d’intronisation, ainsi que les cérémonies de changement de maîtres au cours
desquelles l’ancien maître remet son chaperon de maître pour qu’en soit revêtu un autre chariton, se
déroulent lors d’offices dominicaux. L’ancien maître de charité devient alors prévôt ou échevin.
Les charitons ont leur propre chant « Frères des hommes, frères dans la charité, charité du Christ pour
tout homme… » dont les couplets rappellent qu’ils sont des serviteurs envoyés pour être proches de tous
ceux qui sont le corps souffrant du Christ.
L’an dernier le grand rassemblement diocésain des charitons s’est déroulé à Saint Georges du Vièvre. Il
a réuni 500 charitons et a accueilli une délégation des « charitables de Béthune » (Pas-de-Calais).
Dernièrement, la fête de la charité de Condé-sur-Risle s’est déroulée le 4 mars et a rassemblé les
charitons de plusieurs confréries du secteur.
Il faut aussi noter qu’à notre époque les charitons sont appelés à apporter une assistance aux prêtres pour
la préparation et le déroulement des offices.
A s s o c i a t i o n M o n t f o r t C u l t u r e e t P a t r i m o i n e – Mairie, 3 rue Saint Pierre ; 27290 Montfort sur Risle
Mèl : amcp@montfort-sur-risle.com - Site internet : www.montfort-sur-risle.com
Benoît Colliard