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36<br />
VIGNOBLES INFOS<br />
la revue du club <strong>de</strong>s propriétaires <strong>de</strong> grands crus<br />
L’EMPIRE AU MILIEU<br />
DES VIGNES<br />
couv1
S<br />
SOMMAIRE<br />
Le vignob<strong>le</strong> <strong>de</strong> Sancerre<br />
2<br />
4<br />
5<br />
6<br />
8<br />
11<br />
Édito<br />
Débat<br />
Faut-il craindre <strong>le</strong>s investisseurs chinois ?<br />
Actualité<br />
culture<br />
Un Manga mieux que la critique<br />
Portfolio<br />
Portraits chinois<br />
L’œil<br />
Zoom : dynasties étrangères<br />
et bor<strong>de</strong>laises<br />
Figure : Pierre Bérot, directeur<br />
<strong>de</strong>s caves Tail<strong>le</strong>vent<br />
12<br />
13<br />
14<br />
15<br />
16<br />
<strong>La</strong> main<br />
Métho<strong>de</strong> : Contre-attaque pour<br />
contrefaçon<br />
Patrimoine : GFV du Château<br />
German-Marbuzet à Saint-Estèphe<br />
Les papil<strong>le</strong>s<br />
Bala<strong>de</strong> : Week-end à Sancerre<br />
Dégustation : Les Châteuneuf-du-Pape<br />
du GFV Font <strong>de</strong> Michel<strong>le</strong><br />
Accords : Sauternes et cuisine chinoise<br />
Abécédaire
millésime 2012,<br />
<strong>le</strong>s Chinois à<br />
Bor<strong>de</strong>aux : fautil<br />
s’angoisser ?<br />
Patrick Ribouton<br />
CHINE. Ces cinq <strong>le</strong>ttres sont sur toutes <strong>le</strong>s bouches<br />
ou presque… Croissance fulgurante, explosion <strong>de</strong> la<br />
consommation, multiplication <strong>de</strong>s millionnaires…<br />
<strong>La</strong> Chine millénaire n’a jamais été aussi éclatante. El<strong>le</strong> attise tous<br />
<strong>le</strong>s espoirs mais nourrit aussi tous <strong>le</strong>s fantasmes. Après Château<br />
<strong>de</strong> Viaud à <strong>La</strong>lan<strong>de</strong>-<strong>de</strong>-Pomerol, Château <strong>de</strong> Gevrey-Chambertin<br />
en Bourgogne, c’est un élégant domaine <strong>de</strong> Saint-Émilion,<br />
Château Belfont-Belcier qui passe sous pavillon Chinois…<br />
Alors, <strong>le</strong>s Chinois vont-ils prendre <strong>le</strong> contrô<strong>le</strong> <strong>de</strong> notre vignob<strong>le</strong>,<br />
faire main basse sur notre culture, sur notre histoire ?<br />
N’hésitez pas à nous faire part <strong>de</strong> vos réactions :<br />
Email : cpgc@lafrancaise-am.com<br />
Le Club <strong>de</strong>s Propriétaires <strong>de</strong> Grands Crus,<br />
173 Bd Haussmann, 75008 Paris<br />
Le passé est riche en enseignements. Avant eux, Hollandais,<br />
Anglais, Belges ont acquis en nombre <strong>de</strong>s domaines français<br />
prestigieux. Cette démarche, loin d’être inquiétante, doit au<br />
contraire nous rassurer car l’implication économique est d’autant<br />
plus forte que l’intérêt pour la chose vinico<strong>le</strong> et son commerce<br />
est grand. Ces investissements sont clairement <strong>de</strong>s révélateurs<br />
d’intérêt. Une autre chose est certaine : <strong>le</strong>ur présence renforce<br />
l’activité d’un marché foncier déjà très animé…<br />
Rassurés sur ce point, au <strong>le</strong>n<strong>de</strong>main <strong>de</strong>s vendanges, <strong>le</strong>s viticulteurs<br />
font néanmoins <strong>le</strong>urs comptes. Et là… nouveau motif<br />
d’inquiétu<strong>de</strong>. Les déclarations <strong>de</strong> récolte trahissent partout en<br />
France une importante contraction <strong>de</strong>s volumes. <strong>La</strong> faute aux<br />
conditions climatiques qui ont multiplié <strong>le</strong>s épiso<strong>de</strong>s <strong>de</strong> coulure<br />
(non fécondation <strong>de</strong>s baies lors <strong>de</strong> la floraison). Sans pouvoir y<br />
trouver un quelconque réconfort, ils constatent aussi que <strong>le</strong>urs<br />
confrères italiens et espagnols partagent <strong>le</strong> même sort.<br />
Le marché <strong>de</strong>s vins, qui enregistrait déjà <strong>de</strong>puis quelques années<br />
<strong>de</strong>s niveaux <strong>de</strong> production <strong>le</strong>s plus faib<strong>le</strong>s jamais connus au cours<br />
<strong>de</strong>s quinze <strong>de</strong>rnières années, risque d’être bousculé. Conjuguée à<br />
la poussée croissante <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> mondia<strong>le</strong>, cette importante<br />
et bruta<strong>le</strong> contraction pourrait bien al<strong>le</strong>r jusqu’à provoquer une<br />
pénurie… El<strong>le</strong> génèrera pour <strong>le</strong> moins une tension sur <strong>le</strong>s prix<br />
favorab<strong>le</strong> aux productions vinico<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s moins nob<strong>le</strong>s.<br />
Les membres du Club <strong>de</strong>s Propriétaires <strong>de</strong> Grands Crus peuvent,<br />
quant à eux, être sereins. Leurs investissements sont assis sur un<br />
modè<strong>le</strong> économique spécifique et non délocalisab<strong>le</strong>, dont la <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />
mondia<strong>le</strong> grandit…<br />
<strong>La</strong> mondialisation peut fina<strong>le</strong>ment aussi avoir du bon…<br />
ÉÉDITO
DDÉBAT<br />
2<br />
PEUR SUR LA VIGNE ?<br />
Depuis 2008, investisseurs et amateurs <strong>de</strong> vin chinois acquièrent<br />
régulièrement <strong>de</strong>s propriétés vitico<strong>le</strong>s, particulièrement dans <strong>le</strong> Bor<strong>de</strong>lais.<br />
Faut-il s’inquiéter pour notre patrimoine ?<br />
En 1838, Stendhal décrivait ainsi <strong>le</strong> Château Cos<br />
d’Estournel, en première <strong>de</strong> couverture, que Louis-Gaspard<br />
d’Estournel <strong>de</strong> Maniban, à l’époque propriétaire, avait entrepris<br />
<strong>de</strong> faire bâtir : « Je crois plutôt que c’est un chai… Ce bâtiment,<br />
fort élégant, d’une brillante cou<strong>le</strong>ur jaune clair, n’est à<br />
la vérité d’aucun sty<strong>le</strong> ; cela n’est ni grec, ni gothique, cela est<br />
fort gai et serait plutôt dans <strong>le</strong> genre chinois ».<br />
En 2010, au beau milieu <strong>de</strong> l’entrée du Château<br />
Grand Moueÿs, en Entre-<strong>de</strong>ux-Mers, trône un<br />
bouddha.<br />
<strong>La</strong> différence entre ces <strong>de</strong>ux propriétés ? Au<br />
xix e sièc<strong>le</strong>, on évoquait la Chine pour ce caprice<br />
architectural d’un richissime et excentrique Bor<strong>de</strong>lais.<br />
Au xxi e sièc<strong>le</strong>, cette statue très symbolique<br />
<strong>de</strong> la culture asiatique revêt une toute autre<br />
signification. Car <strong>le</strong> château est passé dans <strong>le</strong>s<br />
mains d’un riche dirigeant chinois. Le sty<strong>le</strong> néogothique<br />
a dû s’accommo<strong>de</strong>r <strong>de</strong> la plastique asiatique,<br />
une manière <strong>de</strong> marquer son territoire… Le Bor<strong>de</strong>lais <strong>de</strong>viendrait-il<br />
Chinois ? Depuis 2008, une trentaine <strong>de</strong> châteaux<br />
est passée, assez discrètement, sous pavillon rouge et jaune, <strong>le</strong><br />
tout <strong><strong>de</strong>rnier</strong> étant Château Bel<strong>le</strong>font-Belcier, Cru Classé <strong>de</strong><br />
Saint-Émilion, à ce jour la plus prestigieuse <strong>de</strong>s acquisitions. Ce<br />
qui reste fort peu au regard <strong>de</strong>s quelques 7 400 exploitations que<br />
compte <strong>le</strong> Bor<strong>de</strong>lais. Faut-il se réjouir ou non <strong>de</strong> cette nouvel<strong>le</strong><br />
donne culturel<strong>le</strong> et économique ? <strong>La</strong> Chine est-el<strong>le</strong> en train <strong>de</strong><br />
s’approprier notre patrimoine vitico<strong>le</strong>, Bor<strong>de</strong>aux en particulier ?<br />
Quel<strong>le</strong>s confrontations faut-il craindre ?<br />
<strong>La</strong> toute première serait culturel<strong>le</strong>. Si el<strong>le</strong> existe, el<strong>le</strong> reste<br />
tout-à-fait amica<strong>le</strong>. En témoigne l’intronisation en septembre<br />
<strong><strong>de</strong>rnier</strong>, par la Jura<strong>de</strong> <strong>de</strong> Saint-Émilion, <strong>de</strong> l’actrice Zhao Wei,<br />
célèbre dans son pays et propriétaire <strong>de</strong>puis 2011 du Château<br />
Monlot, Grand Cru <strong>de</strong> Saint-Émilion. Les jeunes asiatiques,<br />
<strong>de</strong> plus en plus nombreux à venir travail<strong>le</strong>r dans <strong>le</strong>s châteaux, à<br />
la production, à la commercialisation ou à la communication, <strong>le</strong><br />
« Comment<br />
<strong>le</strong>s chinois<br />
réagiraient si on<br />
achetait 10 m <strong>de</strong><br />
la murail<strong>le</strong> <strong>de</strong><br />
Chine ? »
© Frédéric Demesure / Yann Kerveno – Vinexpo<br />
confient tous : <strong>le</strong> premier attrait du vin tient dans cette culture<br />
qu’il symbolise : c’est <strong>le</strong> mariage du chic et <strong>de</strong> la convivialité,<br />
<strong>de</strong> la réussite et <strong>de</strong> la connaissance. D’ail<strong>le</strong>urs, pour <strong>le</strong>s travaux<br />
entrepris par <strong>le</strong>s Chinois nouveaux propriétaires, <strong>le</strong>s consignes<br />
sont strictes : préserver l’âme <strong>de</strong>s lieux. « Je veux gar<strong>de</strong>r <strong>le</strong> plus<br />
possib<strong>le</strong> <strong>le</strong>s éléments d’origine. Je veux montrer aux compatriotes<br />
qui viendront nous rendre visite ce qu’est la culture française<br />
», confie Haiyan Cheng, la toute première Chinoise à être<br />
<strong>de</strong>venue propriétaire en 2008 avec <strong>le</strong> Château <strong>La</strong>tour-<strong>La</strong>gens.<br />
L’autre confrontation avec <strong>le</strong>s Chinois, nettement plus<br />
polémique, est économique et financière. Mais c’est en<br />
Bourgogne que monte pour l’instant la contestation et <strong>le</strong><br />
mécontentement. En août <strong><strong>de</strong>rnier</strong>, l’investisseur chinois Louis<br />
Ng Chi Sing a racheté <strong>le</strong> château <strong>de</strong> Gevrey-Chambertin pour<br />
la somme <strong>de</strong> 8 millions d’euros. Alors que sa va<strong>le</strong>ur avait été<br />
estimée par <strong>de</strong>s professionnels à 3,5 millions d’euros. Pour<br />
Daniel Caron, directeur <strong>de</strong> la Safer en Côte d’Or : « Après <strong>de</strong>s<br />
années <strong>de</strong> maîtrise <strong>de</strong>s prix et du patrimoine, la profession se<br />
retrouve impuissante pour préempter… sans compter qu’avec<br />
<strong>le</strong>s faib<strong>le</strong>s volumes attendus en 2012, nous ne sommes pas à<br />
l’abri <strong>de</strong> voir une accélération <strong>de</strong>s transactions si <strong>le</strong>s viticulteurs<br />
« Au moins,<br />
<strong>le</strong>s Chinois<br />
importeront<br />
<strong>de</strong>s vrais<br />
Bor<strong>de</strong>aux ! »<br />
sont mis en difficulté économique ». Pour Jean-Michel Guillon,<br />
prési<strong>de</strong>nt du syndicat <strong>de</strong>s vignerons <strong>de</strong> Gevrey-Chambertin,<br />
« c’est un emblème qui disparaît ; si on inversait <strong>le</strong>s rô<strong>le</strong>s ? Si<br />
<strong>de</strong>s investisseurs français rachetaient 10 mètres, 50 mètres<br />
<strong>de</strong> la murail<strong>le</strong> <strong>de</strong> Chine, comment <strong>le</strong>s Chinois réagiraientils<br />
? ». À Bor<strong>de</strong>aux, <strong>le</strong>s contestataires restent muets. Seuls <strong>le</strong>s<br />
pragmatiques s’expriment. Pour Didier Marcellis, du Château<br />
Sérilhan : « Pour l’instant, ce sont <strong>de</strong>s investissements plaisirs.<br />
Quant au fait que l’argent circu<strong>le</strong>, ça ne me choque pas. Cela fait<br />
du sang neuf. » Pour Pascal Collotte, du Château Jean Faux :<br />
« On a bien vendu Château <strong>La</strong>grange aux Japonais ! Moi je suis<br />
ravi qu’on apporte <strong>de</strong> l’oxygène et une autre vision, c’est comme<br />
ça qu’on évolue. Et puis, au moins, <strong>le</strong>s Chinois importeront <strong>de</strong>s<br />
vrais Bor<strong>de</strong>aux et pas <strong>de</strong>s faux ! »<br />
Le vignob<strong>le</strong> <strong>de</strong> Bor<strong>de</strong>aux, symbo<strong>le</strong> parfait <strong>de</strong> cet « art <strong>de</strong> vivre<br />
à la française », n’aurait sans doute pas acquis cette aura prestigieuse<br />
sans <strong>le</strong>s Britanniques, <strong>le</strong>s Hollandais, <strong>le</strong>s Germaniques et<br />
d’autres encore (lire notre artic<strong>le</strong> page 8). Si <strong>le</strong> vin français n’est<br />
pas inscrit au départ dans la culture chinoise, sa tradition inspire<br />
aux Chinois respect et admiration. Deux vertus suffisantes<br />
pour raison gar<strong>de</strong>r ? ■<br />
DDÉBAT<br />
3
A<br />
ACTUALITÉ<br />
4<br />
Nouveau classement<br />
<strong>de</strong> Saint-Émilion :<br />
82 châteaux au sommet<br />
Le classement <strong>de</strong> Saint-Émilion est <strong>le</strong> seul révisab<strong>le</strong><br />
régulièrement <strong>de</strong>puis 1955 . Le nouveau classement<br />
2012 consacre 82 propriétés avec 64 Grands<br />
Crus Classés et 18 Premiers Grands Crus<br />
GFV<br />
Classés. Pour obtenir la précieuse men- du Domaine<br />
tion sur l’étiquette, chaque cru a dû <strong>de</strong>s Roches Neuves :<br />
justifier sa <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> manière<br />
une plus-value<br />
très précise et très complète : état<br />
<strong>de</strong> 29 à 53 %<br />
se décomposait ainsi pour <strong>le</strong>s<br />
Grands Crus Classés : 50 %<br />
pour la dégustation, 20 % pour<br />
la notoriété, 20 % pour <strong>le</strong> terroir<br />
et <strong>le</strong> foncier, 10 % pour la conduite vitivinico<strong>le</strong><br />
<strong>de</strong> l’exploitation. Une note minima<strong>le</strong> <strong>de</strong> 14<br />
sur 20 était nécessaire. Pour <strong>le</strong>s Premiers Grands Crus<br />
Classés, il fallait respectivement 30 % , 35 % ,<br />
30 % et 5 % . Une note minima<strong>le</strong> <strong>de</strong> 16 sur 20<br />
était nécessaire. Château Pavie et Château Angélus<br />
rejoignent <strong>le</strong> cerc<strong>le</strong> très fermé et prestigieux <strong>de</strong>s Premiers<br />
Grands Crus Classés A . Château Valandraud,<br />
initiateur et premier « vin <strong>de</strong> garage » <strong>de</strong> l’AOC accè<strong>de</strong><br />
au gra<strong>de</strong> <strong>de</strong> Premier Grand Cru Classé B . Pour Jean-<br />
Luc Thunevin, <strong>le</strong> propriétaire : « Cela va nous ai<strong>de</strong>r<br />
Mention « Château » :<br />
la France entre en résistance<br />
précis du foncier vitico<strong>le</strong>, noto-<br />
Les Américains souhaiteraient importer en Europe <strong>de</strong>s bouteil<strong>le</strong>s<br />
portant la mention « Château ». Si l’Europe semb<strong>le</strong> prête<br />
à cé<strong>de</strong>r, c’est un tollé à Bor<strong>de</strong>aux où « la mention “Château”<br />
désigne un vin d’AOC issu à 100 % <strong>de</strong> raisins récoltés et vinifiés<br />
sur la propriété », selon la Fédération <strong>de</strong>s Grands Vins <strong>de</strong> Bor<strong>de</strong>aux.<br />
Aux États-Unis, <strong>le</strong> droit se contente seu<strong>le</strong>ment <strong>de</strong> 75 % <strong>de</strong><br />
raisins issus d’un terroir donné pour attribuer une appellation.<br />
Le terme est protégé à l’échel<strong>le</strong> européenne<br />
<strong>de</strong>puis plus <strong>de</strong> vingt ans. Avec pour<br />
objectif <strong>de</strong> lutter contre la banalisation.<br />
Trois cents autres mentions « traditionnel<strong>le</strong>s<br />
» sont très rég<strong>le</strong>mentées comme<br />
« clos », « nob<strong>le</strong> » ou « so<strong>le</strong>ra ». Si <strong>de</strong>s<br />
négociants américains obtenaient<br />
riété et moyens <strong>de</strong> promotion Les associés du GFV ont dit oui à la vente en ap- cette autorisation en Europe, ils<br />
pour la développer, mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> prouvant très largement l’offre <strong>de</strong> vente qui <strong>le</strong>ur était<br />
pourraient ensuite commercia-<br />
distribution, cotation <strong>de</strong>s vins,<br />
facteurs techniques concou-<br />
soumise par Thierry Germain, exploitant <strong>de</strong> la propriété<br />
<strong>de</strong>puis plus <strong>de</strong> vingt ans. Cette opération exceptionliser<br />
<strong>le</strong>urs « Châteaux » dans <strong>de</strong>s<br />
pays comme la Chine, premier<br />
marché <strong>de</strong>s vins <strong>de</strong> Bor<strong>de</strong>aux…<br />
rant à l’excel<strong>le</strong>nce <strong>de</strong>s vins<br />
produits. <strong>La</strong> note fina<strong>le</strong> sur 20<br />
nel<strong>le</strong> réserve aux investisseurs une profitabilité <strong>de</strong><br />
tout premier ordre : un TRI (avantage vin inclus)<br />
variant <strong>de</strong> 6,60 % à 23,35 % selon <strong>le</strong>ur date<br />
BRIC mais<br />
pas <strong>de</strong> Broc !<br />
d’entrée. On comprend mieux dès lors<br />
Selon une étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’IWSR (Interna-<br />
pourquoi 94 % <strong>de</strong>s associés votants<br />
ont entériné ce projet.<br />
tional Wine and Spirit Research), <strong>le</strong> PIB<br />
du BRIC (Brésil, Russie, In<strong>de</strong>, Chine) a augmenté<br />
<strong>de</strong> 7 %. Le marché du vin dans ces<br />
car nous sommes en<strong>de</strong>ttés, <strong>le</strong>s banquiers vont pouvoir<br />
quatre pays émergents <strong>de</strong>vrait augmenter <strong>de</strong><br />
80 % dans <strong>le</strong>s 5 années à venir. <strong>La</strong> France figure parmi<br />
<strong>le</strong>s premiers exportateurs (premier en Chine et en Russie, troisième<br />
en In<strong>de</strong>, quatrième au Brésil). Au Brésil, pays aussi producteur<br />
<strong>de</strong> vin, <strong>le</strong>s importations connaissent une forte hausse<br />
passant <strong>de</strong> 2,6 millions <strong>de</strong> caisses en 2007 à 8,6 millions en<br />
2011. En In<strong>de</strong>, un accord <strong>de</strong> libre-échange avec l’Union Européenne<br />
est en cours <strong>de</strong>puis quelques années. Actuel<strong>le</strong>ment,<br />
<strong>le</strong>s taxes sur l’importation <strong>de</strong> vins s’élèvent à 150 %. En Chine,<br />
<strong>le</strong>s importations <strong>de</strong> vins enregistrent une hausse <strong>de</strong> 73 % entre<br />
2010 et 2011 avec 70 % <strong>de</strong> vins <strong>de</strong> Bor<strong>de</strong>aux (la première<br />
chaine <strong>de</strong> bar à vins 100 % Bor<strong>de</strong>aux a ouvert récemment ses<br />
portes à Shanghaï). Selon <strong>le</strong> cabinet d’analyses international<br />
Euromonitor, la Chine représentera bientôt 85 % <strong>de</strong> l’augmentation<br />
prévue au sein <strong>de</strong> la BRIC. En Russie enfin, si <strong>le</strong>s impor-<br />
réévaluer nos actifs ».<br />
tations <strong>de</strong> vins ont chuté <strong>de</strong> 17 % par rapport à 2010, el<strong>le</strong>s ont<br />
augmenté <strong>de</strong> 44 % par rapport à 2009.
UN MANGA<br />
MIEUX QUE<br />
ROBERT PARKER ?<br />
Née en 2004, la col<strong>le</strong>ction<br />
Manga japonaise Les<br />
Gouttes <strong>de</strong> Dieu, est un<br />
formidab<strong>le</strong> vecteur <strong>de</strong><br />
notoriété et <strong>de</strong> vente pour<br />
<strong>le</strong>s grands vins français.<br />
« Dans Les Gouttes <strong>de</strong> Dieu, nous décrivons<br />
<strong>le</strong> vin comme un alcool donnant libre cours<br />
à l’imagination et à l’inspiration. Nous<br />
pensons que <strong>le</strong> succès <strong>de</strong> notre œuvre rési<strong>de</strong><br />
peut-être dans <strong>le</strong> fait qu’il a effacé cette<br />
image austère du vin, celui-ci et <strong>le</strong> manga<br />
se mettant mutuel<strong>le</strong>ment en va<strong>le</strong>ur. »<br />
Tadashi Agi et Shu Okimoto, <strong>le</strong>s auteurs<br />
<strong>de</strong> ce manga japonais qui en est aujourd’hui<br />
à son 25 e volume, ne doutaient pas un instant<br />
<strong>de</strong> son succès. Car ce genre <strong>de</strong> ban<strong>de</strong><br />
<strong>de</strong>ssinée, très populaire dans <strong>le</strong>ur pays,<br />
est lu par toutes <strong>le</strong>s classes socia<strong>le</strong>s. Mo<strong>de</strong><br />
d’expression traditionnel<strong>le</strong> par excel<strong>le</strong>nce,<br />
il est un formidab<strong>le</strong> vecteur <strong>de</strong> mo<strong>de</strong>rnité.<br />
Incontestab<strong>le</strong>ment, Les Gouttes <strong>de</strong> Dieu ont<br />
contribué et contribuent encore à ancrer la<br />
© Éditions Glénat<br />
dimension culturel<strong>le</strong> du vin au Japon. Au<br />
départ, une intrigue : un prestigieux œnologue<br />
japonais décè<strong>de</strong>. L’héritage <strong>de</strong> sa cave<br />
extraordinaire reviendra à l’un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux<br />
frères ennemis qui résoudra 12 énigmes<br />
sur 12 vins. Le gagnant découvrira alors<br />
« Les Gouttes <strong>de</strong> Dieu », <strong>le</strong> mystérieux<br />
treizième vin. Mi-réaliste, mi-fantaisiste,<br />
chaque volume s’appuie sur <strong>le</strong> nekketsu ou<br />
« sang bouillant » où <strong>le</strong> héros s’enflamme<br />
pour son sujet jusqu’à <strong>de</strong>venir un sommelier<br />
confirmé. L’univers du vin est abordé<br />
avec une gran<strong>de</strong> richesse d’informations et<br />
<strong>de</strong> précision. Rien n’est oublié : vigne, vin,<br />
terroirs, cépages, vignerons, régions.<br />
Château Le Puy 2003, cru bor<strong>de</strong>lais désigné<br />
« Les Gouttes <strong>de</strong> Dieu », vendu initia-<br />
Les Gouttes <strong>de</strong> Dieu,<br />
25 volumes, éditions Glénat<br />
www.<strong>le</strong>sgouttes<strong>de</strong>dieu.fr<br />
<strong>le</strong>ment 15 euros, est revendu sur la place <strong>de</strong><br />
Hong Kong 1 000 euros ! Les ventes <strong>de</strong> la<br />
propriété se sont envolées en Asie <strong>de</strong> plus<br />
<strong>de</strong> 30 % ! Château Poupil<strong>le</strong> 1999, Côtes<strong>de</strong>-Castillon<br />
évoqué dans <strong>le</strong> tome 9, est<br />
introuvab<strong>le</strong> aujourd’hui et Philippe Caril<strong>le</strong>,<br />
son heureux propriétaire, par<strong>le</strong> d’un volume<br />
d’activité augmenté aussi <strong>de</strong> 30 % en Asie.<br />
Le discret Château Mont-Pérat 2001 s’est<br />
littéra<strong>le</strong>ment arraché auprès <strong>de</strong>s importateurs<br />
asiatiques : 20 000 bouteil<strong>le</strong>s vendues<br />
en un temps record. En Corée, <strong>le</strong>s parts <strong>de</strong><br />
marché du vin ont balayé cel<strong>le</strong>s <strong>de</strong>s alcools,<br />
passant <strong>de</strong> 30 à 70 % !<br />
Une <strong>le</strong>çon <strong>de</strong> communication et <strong>de</strong> commercialisation<br />
à méditer par <strong>le</strong>s critiques et<br />
experts traditionnels du vin.<br />
C<br />
CULTURE<br />
5
P<br />
PORTFOLIO<br />
6<br />
BORDEAUX, « WHAT ELSE » ? Ils sont jeunes et asiatiques, aiment l’art <strong>de</strong> vivre<br />
Wanxu Zhao,<br />
28 ans<br />
Chinoise<br />
Ouvrière viti-vinico<strong>le</strong><br />
au Château Sérilhan,<br />
Cru Bourgeois du Médoc,<br />
à Saint-Estèphe.<br />
« J’adore la culture<br />
française et <strong>le</strong> vin.<br />
Mon rêve, c’était <strong>de</strong><br />
venir en France pour<br />
étudier. En Chine,<br />
Bor<strong>de</strong>aux est la<br />
capita<strong>le</strong> mondia<strong>le</strong> du<br />
vin. Et ici, la vie est<br />
tel<strong>le</strong>ment calme ! »<br />
Hui-i Wei,<br />
28 ans,<br />
Taiwanaise<br />
Assistante <strong>de</strong> réception,<br />
anime <strong>le</strong> profil <strong>de</strong> la<br />
propriété sur SinaWeibo.com<br />
au Château Haut-Bailly,<br />
Cru Classé <strong>de</strong> Graves, à<br />
Léognan.<br />
« À Taiwan et à<br />
Hong Kong, mes<br />
amies qui ont réussi<br />
se retrouvent <strong>le</strong> weekend<br />
autour d’une<br />
bouteil<strong>le</strong> <strong>de</strong> bor<strong>de</strong>aux<br />
en regardant un film<br />
français. C’est chic et<br />
romantique ! »
à la française. Choisir <strong>le</strong> vin et à Bor<strong>de</strong>aux ? Une évi<strong>de</strong>nce.<br />
Zhang Jiakai,<br />
25 ans,<br />
Chinois<br />
Assistant commercial<br />
et marketing,<br />
Groupe Bernard Magrez<br />
« J’aurais pu<br />
choisir la Bourgogne<br />
mais la distribution<br />
reste traditionnel<strong>le</strong><br />
et la production<br />
limitée. Alors, j’ai<br />
choisi Bor<strong>de</strong>aux pour<br />
son potentiel <strong>de</strong><br />
développement en<br />
Chine et pour la vil<strong>le</strong><br />
que j’adore ! »<br />
Nerissa Chan,<br />
25 ans,<br />
Chinoise<br />
Gui<strong>de</strong> interprète au<br />
Château Kirwan,<br />
Cru Classé 1855,<br />
à Margaux.<br />
« Venir à Bor<strong>de</strong>aux,<br />
c’était une évi<strong>de</strong>nce<br />
pour moi. Car pour<br />
nous, en Chine,<br />
Bor<strong>de</strong>aux et ses<br />
châteaux symbolisent<br />
tout <strong>le</strong> charme <strong>de</strong><br />
la culture française.<br />
C’est <strong>le</strong> vin par<br />
excel<strong>le</strong>nce ! »<br />
P<br />
PORTFOLIO<br />
7
ŒL’ŒIL<br />
zoom<br />
8<br />
BORDEAUX SINGULIER PLURIEL<br />
Le vignob<strong>le</strong> bor<strong>de</strong>lais a construit sa notoriété avec <strong>le</strong>s Britanniques, <strong>le</strong>s Hollandais,<br />
<strong>le</strong>s Germaniques et bien d’autres encore. Petit rappel historique.<br />
« Quel<strong>le</strong> est l’occupation étrangère la plus longue<br />
subie par <strong>le</strong>s Médocains ? L’occupation française, bien sûr, qui<br />
dure <strong>de</strong>puis 1453. » C’est la question que posent, pour s’amuser,<br />
<strong>le</strong>s Médocains aux visiteurs anglais. Mais ils pourraient<br />
tout aussi bien la poser aux Hollandais, aux Al<strong>le</strong>mands ou aux<br />
Espagnols. Tous ont joué un rô<strong>le</strong> primordial dans l’histoire du<br />
vignob<strong>le</strong> bor<strong>de</strong>lais au point que <strong>le</strong>ur goût pour <strong>le</strong>s bor<strong>de</strong>aux a<br />
formé <strong>le</strong>ur notoriété mondia<strong>le</strong>.<br />
Thomas Barton, commerçant irlandais, a posé ses valises en<br />
France en 1723 pour s’instal<strong>le</strong>r définitivement à Bor<strong>de</strong>aux,<br />
port directement relié à celui <strong>de</strong> Cork. Doué pour <strong>le</strong>s affaires,<br />
il <strong>de</strong>vient rapi<strong>de</strong>ment « French Tom », une fi-<br />
gure bor<strong>de</strong>laise. Hugh, son petit-fils, perpétue<br />
la saga familia<strong>le</strong> : il acquiert Château <strong>La</strong>ngoa<br />
et s’associe avec un Breton huguenot dans un<br />
négoce, Barton et Guestier. Plus tard, Anthony<br />
Barton, <strong>de</strong>venu propriétaire en 1983, n’aura <strong>de</strong><br />
cesse <strong>de</strong> hisser <strong>le</strong>s Châteaux <strong>La</strong>ngoa et Léovil<strong>le</strong>-<br />
Barton au sommet <strong>de</strong> l’appellation Saint-Julien.<br />
Châteaux parmi <strong>le</strong>s plus beaux du Médoc, il<br />
y règne un art <strong>de</strong> vivre tout droit inspiré du<br />
xviii e sièc<strong>le</strong>.<br />
<strong>La</strong> famil<strong>le</strong> <strong>La</strong>wton a traversé la Manche au<br />
xvii e sièc<strong>le</strong> pour débarquer à Bor<strong>de</strong>aux et tenter<br />
d’y faire fortune. En 1740, Abraham <strong>La</strong>wton crée la première<br />
maison <strong>de</strong> courtage <strong>de</strong> vins <strong>de</strong> Bor<strong>de</strong>aux. Il avait compris qu’un<br />
courtier protestant et étranger pouvait rég<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s rapports d’argent<br />
souvent diffici<strong>le</strong>s entre <strong>le</strong>s propriétaires et <strong>le</strong>s négociants.<br />
Au début du xx e sièc<strong>le</strong>, la famil<strong>le</strong> Lichine, poussée par la Révolution<br />
d’Octobre, quitte la Russie pour l’Amérique puis la<br />
France. En 1951, l’Américain A<strong>le</strong>xis Lichine achète <strong>le</strong> prieuré<br />
<strong>de</strong> Cantenac et change tout, à commencer par <strong>le</strong> nom : Cantenac<br />
<strong>de</strong>vient Prieuré-Lichine. Il n’aura <strong>de</strong> cesse <strong>de</strong> remo<strong>de</strong><strong>le</strong>r <strong>le</strong><br />
vignob<strong>le</strong>, quatrième Grand Cru Classé du Médoc en 1855. Le<br />
château a été cédé en 1999 mais <strong>le</strong> nom, inscrit dans <strong>le</strong> marbre<br />
bor<strong>de</strong>lais du classement prestigieux, est resté.<br />
Venu <strong>de</strong> Hambourg avec son épouse, Jean-Henri Schÿ<strong>le</strong>r s’instal<strong>le</strong><br />
à Bor<strong>de</strong>aux la première moitié du xviii e sièc<strong>le</strong>. Son but :<br />
« Les habitants<br />
<strong>de</strong> Bor<strong>de</strong>aux<br />
sont venus<br />
<strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s<br />
contrées du<br />
mon<strong>de</strong> civilisé. »<br />
raccourcir <strong>le</strong>s circuits commerciaux entre sa maison <strong>de</strong> négoce<br />
hanséate et <strong>le</strong> vignob<strong>le</strong> girondin. En 1739, il crée avec Auguste<br />
Schrö<strong>de</strong>r la maison Schrö<strong>de</strong>r & Schÿ<strong>le</strong>r. Le goût pour <strong>le</strong>s vignes<br />
ne viendra qu’un sièc<strong>le</strong> plus tard, avec l’achat du « bouscat »,<br />
cette maison <strong>de</strong> campagne que tout Bor<strong>de</strong>lais aime alors à possé<strong>de</strong>r<br />
dans la gran<strong>de</strong> banlieue. En 1925, la famil<strong>le</strong> Schÿ<strong>le</strong>r achète<br />
Château Kirwan pour 200 000 francs or. Kirwan, du nom d’un<br />
négociant irlandais qui l’avait lui-même acheté au xviii e sièc<strong>le</strong>.<br />
Johann-Jakob Bethmann s’est installé à Bor<strong>de</strong>aux en 1740, à<br />
l’âge <strong>de</strong> vingt-quatre ans. Il <strong>de</strong>viendra un grand négociant-<br />
armateur <strong>de</strong>s Chartrons. En 1867, A<strong>le</strong>xandre <strong>de</strong> Bethmann<br />
est élu maire <strong>de</strong> Bor<strong>de</strong>aux. En 1945, Château<br />
Olivier, Grand Cru Classé <strong>de</strong> Graves, entre<br />
dans la famil<strong>le</strong>. Jean-Jacques <strong>de</strong> Bethmann, <strong>le</strong><br />
propriétaire, imposera en 1981 <strong>le</strong>s barriques<br />
neuves pour l’é<strong>le</strong>vage <strong>de</strong>s vins.<br />
Le marquis Doua <strong>de</strong> <strong>La</strong> Colonilla a acheté Château<br />
Margaux en 1802, pour 651 000 francs, en<br />
moins d’une semaine ! Certes <strong>le</strong> vin l’intéressait,<br />
mais ce qu’il voulait par-<strong>de</strong>ssus tout, c’est<br />
construire l’un <strong>de</strong>s plus beaux châteaux du Médoc.<br />
Ce qui fut fait, <strong>de</strong> 1810 à 1816, par l’architecte<br />
Louis Combes, élève <strong>de</strong> Victor Louis. Il<br />
mourra avant <strong>de</strong> l’habiter. En 1836, un autre<br />
Espagnol se porte acquéreur, A<strong>le</strong>xandre Aguado, grand banquier<br />
étranger venu en terre médocaine tout comme <strong>le</strong>s Rosthchild.<br />
Il paie alors la somme <strong>de</strong> 1 350 000 francs. Commence<br />
alors un temps où <strong>le</strong> château <strong>de</strong>vient un lieu fréquenté par <strong>de</strong>s<br />
intel<strong>le</strong>ctuels et <strong>de</strong>s artistes. Toute la bonne société y tient salon.<br />
L’aventure espagno<strong>le</strong> s’achève en 1879, à la revente <strong>de</strong> la propriété<br />
au gouverneur <strong>de</strong> la Banque <strong>de</strong> France Pil<strong>le</strong>t-Willn pour<br />
5 500 000 francs.<br />
Quai <strong>de</strong>s Chartrons : <strong>le</strong> nec plus ultra <strong>de</strong> l’i<strong>de</strong>ntité bor<strong>de</strong>laise,<br />
<strong>le</strong> quartier historique <strong>de</strong>s hôtels particuliers, une sp<strong>le</strong>n<strong>de</strong>ur <strong>de</strong><br />
l’architecture du xvii e sièc<strong>le</strong>. Et pourtant ! Britanniques, Hollandais<br />
et Germaniques étaient certes <strong>de</strong>s marchands reconnus<br />
mais malheureusement ils étaient aussi protestants ! Ces courtiers<br />
et ces négociants, snobés par <strong>le</strong>s propriétaires <strong>de</strong>s châteaux,
ont dû s’instal<strong>le</strong>r contraints et forcés dans ce quartier hors <strong>de</strong>s<br />
remparts qui ceinturaient autrefois la vil<strong>le</strong>. De cette exclusion<br />
est née une solidarité indéfectib<strong>le</strong>, un sentiment d’être différent,<br />
une vie communutaire unique et exclusive. Ce fameux art <strong>de</strong><br />
vivre à l’anglaise « so chic », cet esprit <strong>de</strong>s Chartrons, tant revendiqué<br />
dans l’histoire bor<strong>de</strong>laise, vient <strong>de</strong> là, curieux paradoxe !<br />
S’il faut, une fois encore, montrer à quel point <strong>le</strong> vignob<strong>le</strong> <strong>de</strong><br />
Bor<strong>de</strong>aux s’est façonné grâce aux étrangers venus s’y instal<strong>le</strong>r, il<br />
suffit <strong>de</strong> regar<strong>de</strong>r l’architecture, ref<strong>le</strong>t parfait <strong>de</strong> cette influence<br />
étrangère. Un seul exemp<strong>le</strong>, <strong>le</strong> sty<strong>le</strong> anglais néo-Tudor, avec ses<br />
hauts pignons chantournés, ses fenêtres géminées avec ses baies<br />
JEAN-HENRI SCHŸLER<br />
ET SES TROIS<br />
ENFANTS : NATHALIE,<br />
YANN ET SOPHIE.<br />
UNE DYNASTIE<br />
FAMILIALE DEPUIS LE<br />
xviie SIÈCLE.<br />
à plusieurs meneaux, ses bow-windows et ses cheminées tout en<br />
hauteur, illuminent <strong>le</strong>s Châteaux Cantenac-Brown et <strong>La</strong>nessan.<br />
Ambiance gothique digne d’un roman <strong>de</strong> Walter Scott ! Derrière<br />
la rigueur <strong>de</strong> l’architecture classique, Bor<strong>de</strong>aux arbore rue<br />
<strong>de</strong> Turenne une enfila<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>de</strong>meures anglicanes.<br />
L’âme <strong>de</strong> Bor<strong>de</strong>aux ? Johanna Schopenhauer l’a fort bien résumée<br />
: « C’est <strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s provinces <strong>de</strong> France, <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s<br />
pays d’Europe et même <strong>de</strong> toutes <strong>le</strong>s contrées du mon<strong>de</strong> civilisé<br />
que sont venus <strong>le</strong>s habitants <strong>de</strong> Bor<strong>de</strong>aux qui vivent côte à côte,<br />
comme s’il en avait toujours été ainsi, dans un esprit <strong>de</strong> famil<strong>le</strong><br />
très agréab<strong>le</strong> et empreint d’une gran<strong>de</strong> sociabilité. » ■<br />
ŒL’ŒIL<br />
zoom<br />
9
ŒL’ŒIL<br />
zoom<br />
10<br />
« LES JAPONAIS ONT POUR LE VIN<br />
CE CÔTÉ KELLY DE CHEZ HERMÈS ! »<br />
Le groupe Tail<strong>le</strong>vent est implanté<br />
au Japon <strong>de</strong>puis 1994.<br />
Pour PIERRE BÉROT, directeur<br />
<strong>de</strong>s caves <strong>de</strong> la maison, ce marché<br />
est sans doute l’un <strong>de</strong>s plus<br />
qualitatifs au mon<strong>de</strong>.<br />
Pierre Bérot<br />
Signe particulier : entré chez<br />
Tail<strong>le</strong>vent en 1992, à l’âge <strong>de</strong> vingt<br />
ans. N’en est parti qu’une seu<strong>le</strong> fois :<br />
pour travail<strong>le</strong>r une année entière sur<br />
un domaine, histoire d’apprendre la<br />
vigne et <strong>le</strong> vin <strong>de</strong> A à Z.<br />
Son moteur : admirer pour avancer<br />
et travail<strong>le</strong>r.<br />
Jean-Clau<strong>de</strong> Vrinat fut son maître et<br />
lui a tracé la voie.<br />
Il adore : <strong>le</strong>s associations<br />
inattendues. Savourer un œuf<br />
meurette en dégustant un grand vin<br />
et savourer un petit vin en mangeant<br />
du homard.<br />
Son credo : « <strong>le</strong> terrain, <strong>le</strong> terrain<br />
et <strong>le</strong> terrain ». Pour trouver <strong>de</strong>s vins<br />
rares, il n’arrête jamais d’arpenter <strong>le</strong>s<br />
vignob<strong>le</strong>s.
Vignob<strong>le</strong>s <strong>Infos</strong> : Tail<strong>le</strong>vent fut <strong>le</strong> tout premier à<br />
s’instal<strong>le</strong>r au Japon en 1994. Un vrai ta<strong>le</strong>nt <strong>de</strong> visionnaire… ?<br />
Pierre Bérot : « On était au début <strong>de</strong>s années 1990, au sommet<br />
<strong>de</strong> l’économie japonaise. Sapporo, l’un <strong>de</strong>s géants <strong>de</strong> la distribution<br />
<strong>de</strong> bière et propriétaire d’un quartier entier dans <strong>le</strong><br />
quartier d’affaires d’Ebisu Gar<strong>de</strong>n à Tokyo, rêvait du restaurant<br />
parfait français. Il investira dans ce projet fou : construire une<br />
réplique d’un château d’inspiration Louis XIII, en important<br />
chaque matériau <strong>de</strong> France ! Le Château Restaurant Tail<strong>le</strong>vent-<br />
Robuchon a ouvert ses portes en 1994. Il restera <strong>le</strong> meil<strong>le</strong>ur restaurant<br />
français en Asie jusqu’en 2004, date <strong>de</strong> sa fermeture.<br />
Joël Robuchon était en cuisine, Jean-Clau<strong>de</strong> Vrinat en sal<strong>le</strong> :<br />
6 étoi<strong>le</strong>s Michelin dans un même lieu ! On n’avait jamais vu ça.<br />
L’image était lancée. Tail<strong>le</strong>vent a ouvert en 2004 une première<br />
cave, puis d’autres partout au Japon : Tokyo bien sûr, Osaka,<br />
Kyoto, Yokohama… »<br />
L’importation <strong>de</strong>s vins français en Asie est exponentiel<strong>le</strong> et<br />
nos meil<strong>le</strong>urs crus partent en nombre là-bas. Pour vous, c’est<br />
un bien ou un mal ?<br />
« Pour ce qui concerne <strong>le</strong>s Japonais, franchement je n’ai pas <strong>le</strong><br />
sentiment que notre patrimoine bouteil<strong>le</strong>s parte chez eux. Je<br />
reviens du Japon toujours enchanté, voire émerveillé <strong>de</strong> voir à<br />
quel point ils font honneur à nos vignob<strong>le</strong>s. En trois décennies,<br />
ils ont acquis une culture incroyab<strong>le</strong> sur <strong>le</strong> vin. Ils savent<br />
tout, absolument tout, sur <strong>le</strong>s terroirs, <strong>le</strong>s crus, <strong>le</strong>s cépages, <strong>le</strong>s<br />
régions. Le manga Les Gouttes <strong>de</strong> Dieu, diffusé à <strong>de</strong>s millions<br />
d’exemplaires, donne une parfaite idée <strong>de</strong> la place qu’occupe <strong>le</strong><br />
vin au Japon (ndlr : voir notre page Culture). »<br />
Que viennent chercher <strong>le</strong>s clients dans vos boutiques ?<br />
« Tail<strong>le</strong>vent a toujours véhiculé une image très française. Si en<br />
France, nous vendons <strong>de</strong>s vins <strong>de</strong> tous <strong>le</strong>s pays, pas question au<br />
Japon. On y trouve donc exclusivement <strong>de</strong>s vins français. C’est<br />
ce que veu<strong>le</strong>nt nos clients et rien d’autre quand ils viennent<br />
chez nous. Presque toutes <strong>le</strong>s régions y sont présentes car c’est<br />
un marché vraiment mûr. Ils adorent <strong>le</strong> côté frais <strong>de</strong>s blancs<br />
alsaciens qui, en plus, s’accor<strong>de</strong>nt très bien avec <strong>le</strong>s poissons et<br />
<strong>le</strong>s tempuras. Mais ce qu’ils aiment par-<strong>de</strong>ssus tout, ce sont <strong>le</strong>s<br />
bourgognes. Ils ont une affection particulière pour cette région<br />
historique aux terroirs comp<strong>le</strong>xes et rares. Ça col<strong>le</strong> parfaitement<br />
avec <strong>le</strong>ur soif d’apprendre. Ils adorent trouver un Chambol<strong>le</strong>-<br />
Musigny « Les Amoureuses » ou un Meursault « Les Perrières ».<br />
Pour eux, la Bourgogne a une histoire fantastique. »<br />
Qu’est-ce qui vous frappe particulièrement dans cette passion<br />
pour <strong>le</strong> vin ?<br />
« Les Japonais n’ont aucun préjugé, aucune barrière en matière<br />
<strong>de</strong> vin. Ils ne sont pas <strong>de</strong>s buveurs d’étiquette. Et surtout, ils<br />
aiment passionnément la rareté. Ils recherchent une cuvée rare<br />
comme ils recherchent <strong>le</strong> sac Vuitton <strong>numéro</strong>té ou une coque<br />
utra-personnalisée pour <strong>le</strong>ur iPad. Ils ont ce côté Kelly <strong>de</strong> chez<br />
Hermès qu’on ne retrouve nul<strong>le</strong> part ail<strong>le</strong>urs. »<br />
Le profil <strong>de</strong> vos clients ?<br />
Des femmes, que <strong>de</strong>s femmes ! Tout simp<strong>le</strong>ment parce que <strong>le</strong>urs<br />
maris travail<strong>le</strong>nt <strong>de</strong>s heures et <strong>de</strong>s heures. Ce sont el<strong>le</strong>s qui<br />
achètent <strong>le</strong>s vins, el<strong>le</strong>s passent <strong>le</strong>ur vie dans <strong>le</strong>s magasins. Ce<br />
sont el<strong>le</strong>s aussi qui viennent à nos cours <strong>de</strong> dégustation. El<strong>le</strong>s<br />
sont assidues et impliquées. El<strong>le</strong>s viennent <strong>de</strong>s classes aisées <strong>de</strong><br />
la population. » ■<br />
Tail<strong>le</strong>vent :<br />
la marque d’un<br />
savoir-faire familial<br />
1946 : André Vrinat ouvre à Paris <strong>le</strong><br />
restaurant Tail<strong>le</strong>vent.<br />
1987 : ouverture à Paris <strong>de</strong>s Caves <strong>de</strong><br />
Tail<strong>le</strong>vent.<br />
1973 : obtention <strong>de</strong> la troisième étoi<strong>le</strong><br />
Michelin.<br />
1994 : ouverture à Tokyo du Château<br />
Restaurant<br />
Tail<strong>le</strong>vent-Robuchon.<br />
2011 : acquisition du Groupe<br />
Tail<strong>le</strong>vent par <strong>le</strong>s frères<br />
Gardinier.<br />
2012 : ouverture <strong>de</strong> la Brasserie 110 <strong>de</strong><br />
Tail<strong>le</strong>vent.<br />
2013 : ouverture d’une cave à<br />
Beyrouth.<br />
ŒL’ŒIL<br />
figure<br />
11
MLA MAIN<br />
métho<strong>de</strong><br />
12<br />
©ONTRE-ATTAQUE<br />
POUR CONT<br />
® EFAÇON<br />
Victimes <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur succès en Chine, <strong>le</strong>s vins <strong>de</strong><br />
Bor<strong>de</strong>aux sont aussi copiés qu’appréciés.<br />
Comment lutter contre cette tradition loca<strong>le</strong> ?<br />
Être premier a <strong>de</strong>s avantages mais aussi <strong>de</strong>s inconvénients.<br />
Château <strong>La</strong>fite Rothschild est Premier Grand Cru<br />
Classé. Sur la liste du classement <strong>de</strong> 1855, il est premier nommé.<br />
Cette place d’honneur est pour <strong>le</strong>s Chinois un signe qui<br />
ne trompe pas : c’est <strong>le</strong> meil<strong>le</strong>ur <strong>de</strong>s grands crus. Si l’on ajoute<br />
que, dans l’Empire du Milieu, on aime d’une part la tradition et<br />
d’autre part offrir <strong>de</strong>s ca<strong>de</strong>aux coûteux comme marque <strong>de</strong> respect,<br />
au palmarès <strong>de</strong> la contrefaçon <strong>de</strong> bouteil<strong>le</strong>, Château <strong>La</strong>fite<br />
Rothschild est en toute logique <strong>le</strong> premier à être copié. Les bons<br />
jours, on peut dire d’un air amusé « qu’il y a plus <strong>de</strong> <strong>La</strong>fite 1982<br />
en Chine qu’il n’en a jamais été produit ». Les mauvais jours, on<br />
constate avec amertume que 65 % <strong>de</strong>s vins <strong>de</strong> Bor<strong>de</strong>aux vendus<br />
en Chine sont <strong>de</strong>s faux (selon l’Union <strong>de</strong>s Fabricants). Des centaines<br />
<strong>de</strong> millions d’euros <strong>de</strong> perte sèche. Car, entre juin 2010 et<br />
juin 2011, <strong>le</strong> marché <strong>de</strong>s vins <strong>de</strong> Bor<strong>de</strong>aux a progressé <strong>de</strong> 100 %<br />
en va<strong>le</strong>ur (donnée Comité Interprofessionnel <strong>de</strong>s vins <strong>de</strong> Bor<strong>de</strong>aux).<br />
Alors, comment lutter contre ce préjudice dans un pays<br />
où la contrefaçon tient lieu <strong>de</strong> culture et d’activité économique<br />
à p<strong>le</strong>in temps ?<br />
Des outils sophistiqués permettent <strong>de</strong> rendre infalsifiab<strong>le</strong>s <strong>le</strong>s<br />
bouteil<strong>le</strong>s. <strong>La</strong> plupart utilise la technologie <strong>de</strong>s smartphones.<br />
Le CIVB a mis en place une base <strong>de</strong> données, validée par la<br />
répression <strong>de</strong>s frau<strong>de</strong>s, qui recense tous <strong>le</strong>s châteaux. Une application<br />
dédiée permet à l’acheteur d’une bouteil<strong>le</strong> <strong>de</strong> vérifier<br />
si cette <strong>de</strong>rnière y figure bien. Des sociétés spécialisées ont mis<br />
au point un système <strong>de</strong> carte-mémoire permettant d’enregistrer<br />
via l’étiquette <strong>le</strong>s variations <strong>de</strong> température et d’humidité au<br />
cours d’un transport. À chaque étape <strong>de</strong> transit, <strong>le</strong>s informations<br />
contenues sur la carte doivent être visées et vérifiées à<br />
l’ai<strong>de</strong> d’un smartphone : un moyen <strong>de</strong> contrô<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s lieux où a<br />
circulé <strong>le</strong> vin et aussi qu’il n’a pas été dénaturé. Lisib<strong>le</strong> lui aussi<br />
sur smartphones, ce co<strong>de</strong> à bul<strong>le</strong>s apposé sur <strong>le</strong>s scellés qui protègent<br />
<strong>le</strong>s caisses, mis au point par la société Prooftag. Comme<br />
pour la cosmétique, une molécu<strong>le</strong> non altérante mais immédiatement<br />
i<strong>de</strong>ntifiab<strong>le</strong> peut être introduite dans une bouteil<strong>le</strong>.<br />
Pour <strong>le</strong>s millésimes anciens, une technologie pointue se sert <strong>de</strong><br />
la radioactivité infinitésima<strong>le</strong> dégagée par <strong>le</strong> verre pour savoir<br />
si la bouteil<strong>le</strong> date d’avant <strong>le</strong> passage du nuage <strong>de</strong> Tchernobyl<br />
ou même d’avant <strong>le</strong> lancement <strong>de</strong> la première bombe H !<br />
Seuls <strong>le</strong>s premiers sont imités. Un bien pour un mal ou un mal<br />
pour un bien ? ■
UN GFV AU CŒUR DE SAINT-ESTÈPHE<br />
Château German Marbuzet possè<strong>de</strong> un vignob<strong>le</strong>-jardin sur l’appellation médocaine la plus singulière.<br />
Son grand terroir et un travail sur-mesure donnent un vin remarquab<strong>le</strong>.<br />
Une prestigieuse appellation du Médoc<br />
<strong>La</strong> géographie <strong>de</strong> l’appellation marque <strong>de</strong> singulières différences<br />
avec ses voisines. Deux corniches en forme <strong>de</strong> <strong>de</strong>mi-lune du<br />
Sud à l’Est face à la Giron<strong>de</strong> accentuent l’originalité du vignob<strong>le</strong><br />
stéphanois. <strong>La</strong> haute, <strong>de</strong> 23 à 25 mètres, est constituée <strong>de</strong> sols<br />
grave<strong>le</strong>ux argilo-calcaires idéal pour <strong>le</strong> Cabernet-Sauvignon ;<br />
la moyenne, <strong>de</strong> 15 à 17 mètres, comporte <strong>de</strong>s sols plus argi<strong>le</strong>ux<br />
favorab<strong>le</strong>s à l’hydratation <strong>de</strong> la vigne.<br />
I<strong>de</strong>ntité et mo<strong>de</strong>rnité<br />
Au chai, on observe <strong>le</strong> même souci <strong>de</strong> perfection et <strong>de</strong> mo<strong>de</strong>rnité<br />
maîtrisée. Tri sévère <strong>de</strong>s raisins, vinification parcellaire en petites<br />
cuves inox, en béton ou bois. Le « plus » ? Une « vinification<br />
intégra<strong>le</strong> » sur une partie <strong>de</strong> la récolte. Les raisins sont placés<br />
directement dans <strong>le</strong>s barriques, où <strong>le</strong>s fermentations alcoolique<br />
et malolactique se dérou<strong>le</strong>nt. Cette pratique apporte un soyeux<br />
unique dans la structure du vin. L’é<strong>le</strong>vage dure ensuite 18 mois.<br />
Un vignob<strong>le</strong>-jardin<br />
En 2009, Hubert <strong>de</strong> Boüard, propriétaire du prestigieux<br />
Château Angélus à Saint-Émilion, <strong>de</strong>vient conseil <strong>de</strong> la<br />
propriété. Le suivi du vignob<strong>le</strong> est permanent pour préserver<br />
<strong>le</strong>s sols et respecter la plante. Un cahier <strong>de</strong>s charges rigoureux<br />
dicte <strong>de</strong>s règ<strong>le</strong>s minutieuses pour la conduite du vignob<strong>le</strong> : tail<strong>le</strong><br />
sévère, ren<strong>de</strong>ments limités, lutte raisonnée, pas d’herbici<strong>de</strong>s, sols<br />
travaillés, enherbement.<br />
Élégance et gourmandise<br />
Le sty<strong>le</strong> <strong>de</strong> Château German Marbuzet <strong>le</strong> place d’emblée parmi<br />
<strong>le</strong>s références <strong>de</strong> l’appellation. Jeune, il affiche une robe carmin<br />
profon<strong>de</strong> et exha<strong>le</strong> <strong>de</strong>s arômes <strong>de</strong> fruits <strong>de</strong>s bois, <strong>de</strong> tabac et <strong>de</strong><br />
réglisse. Puissant et raffiné, son équilibre, sa fraîcheur et la trame<br />
précise <strong>de</strong> ses tanins sont un gage assuré <strong>de</strong> bon vieillissement.<br />
MLA MAIN<br />
patrimoine<br />
13
P<br />
PAPILLES<br />
bala<strong>de</strong><br />
14<br />
Accès<br />
• Train : Paris-Bercy /Tracy-sur-Loire : 3 h<br />
• Autoroute : <strong>de</strong>puis Paris A 77, sortie 28<br />
Sé<strong>le</strong>ction<br />
Où dormir ? Où manger ?<br />
• <strong>La</strong> Chaumière, (Châteaux & Hôtels<br />
Col<strong>le</strong>ction, Tab<strong>le</strong> Remarquab<strong>le</strong>),<br />
2 rue Paul <strong>La</strong>snier<br />
18700 Aubigny-sur-Nère<br />
☎ 02 48 58 04 01<br />
www.hotel-restaurant-la-chaumiere.com<br />
lachaumiere.hotel@wanadoo.fr<br />
Où manger ?<br />
• <strong>La</strong> Pomme d’Or, (BIB Gourmand),<br />
20 / 45 €<br />
rue <strong>de</strong> la Panneterie, 18300 Sancerre<br />
☎ 02 48 54 13 30<br />
• <strong>La</strong> Tour (une étoi<strong>le</strong> Michelin),<br />
Menus <strong>de</strong> 25 à 100 €<br />
Nouvel<strong>le</strong> Place, 18300 Sancerre<br />
☎ 02 48 54 00 81<br />
info@la-tour-sancerre.fr<br />
www. la-tour-sancerre.fr<br />
• <strong>La</strong> Côte <strong>de</strong>s Monts Damnés<br />
Menus <strong>de</strong> 34 à 71 €<br />
D 183, 18300 Chavignol<br />
☎ 02 48 54 01 72<br />
www.montsdamnes.com<br />
Le plus ?<br />
• À visiter absolument<br />
<strong>La</strong> Maison <strong>de</strong>s Sancerre à Sancerre<br />
Ouvert du 1er avril au 11 novembre<br />
☎ 02 48 54 11 35<br />
www.maison-<strong>de</strong>s-sancerre.com<br />
Dans un superbe lieu, vous apprendrez<br />
tout sur <strong>le</strong>s vins, <strong>le</strong>s terroirs, <strong>le</strong>s vignerons,<br />
sans compter la boutique et un<br />
programme riche en événements.<br />
• Les sablés <strong>de</strong>s Dames d’Aubigny<br />
Pâtisserie <strong>de</strong>s Dames<br />
5 rue <strong>de</strong>s Dames<br />
18700 Aubigny-sur-Nère<br />
☎ 02 48 58 05 73<br />
Pour se réga<strong>le</strong>r <strong>de</strong> sablés et <strong>de</strong> ga<strong>le</strong>ttes<br />
au bon goût <strong>de</strong> beurre<br />
WEEK-END À SANCERRE<br />
À moins <strong>de</strong> 3 heures <strong>de</strong> Paris, <strong>le</strong> village <strong>de</strong> Sancerre a gardé tout son<br />
caractère médiéval avec son superbe beffroi et son ancien château<br />
féodal. Non loin et non moins charmant, Chavignol a donné son<br />
nom au célèbre crottin <strong>de</strong> chèvre. Tout autour, <strong>le</strong> vignob<strong>le</strong> s’éta<strong>le</strong> sur<br />
<strong>le</strong>s coteaux. Une escapa<strong>de</strong> faci<strong>le</strong> et dépaysante.<br />
• LE VIGNOBLE<br />
Superfice : 2926 hectares.<br />
AOC : 14 communes : Bannay, Bué,<br />
Crézancy, Menetou-Ratel, Ménétréol,<br />
Montigny, Saint-Satur, Sainte Gemme,<br />
Sancerre, Sury-en-vaux, Thauvenay,<br />
Veaugues, Verdigny et Vinon.<br />
• LES DOMAINES<br />
<strong>La</strong> va<strong>le</strong>ur sûre :<br />
Domaine Vacheron<br />
1 rue du puits Poulton, 18300 Sancerre<br />
☎ 02 48 54 09 93<br />
vacheron.sa@wanadoo.fr<br />
Vignob<strong>le</strong> : 43 ha en bio et biodynamie<br />
Cépages : Sauvignon Blanc, Pinot Noir<br />
Les vins : 5 cuvées parcellaires en blanc,<br />
1 cuvée parcellaire en rouge<br />
Coup <strong>de</strong> cœur : Sancerre Les Romains<br />
2009 (blanc)<br />
Cépages : Pinot Noir pour <strong>le</strong>s rouges,<br />
Sauvignon Blanc pour <strong>le</strong>s blancs.<br />
Sols : terres blanches argilo-calcaires,<br />
caillottes très pierreuses et calcaires,<br />
terres argilo- silicieuses.<br />
<strong>La</strong> découverte :<br />
Domaine du Pré Semelé<br />
Maimbray, 18300 Sury-en-Vaux<br />
☎ 02 48 79 33 50<br />
rjc.raimbault@orange.fr<br />
Vignob<strong>le</strong> : 14 ha<br />
Cépages : Sauvignon Blanc, Pinot Noir<br />
Les vins : 2 cuvées en blanc, 1 cuvée<br />
en rouge<br />
Coup <strong>de</strong> cœur : Sancerre cuvée<br />
Camil<strong>le</strong> 2010 (rouge)
DES RACINES FORTES ET UN STYLE À PART<br />
Vignob<strong>le</strong>s <strong>Infos</strong> a dégusté <strong>le</strong>s Châteauneuf-du-Pape du GFV du domaine Font <strong>de</strong> Michel<strong>le</strong>.<br />
Typicité et finesse sont <strong>le</strong>s maîtres-mots à retenir.<br />
• LES MILLÉSIMES<br />
Malgré une petite récolte, <strong>le</strong> 2010 est une superbe année pour<br />
l’appellation. « Achetez <strong>le</strong>s Rhône 2010 avant <strong>le</strong>s Chinois ! »,<br />
avait conseillé à l’époque, dans <strong>le</strong> Financial Times, la célèbre critique<br />
anglaise Jancis Robinson. Les vins sont riches, comp<strong>le</strong>ts et<br />
promis à un long vieillissement.<br />
En 2011, <strong>le</strong>s saisons ont été chamboulées : un printemps estival,<br />
un été printanier et un automne « été indien » ont permis <strong>de</strong><br />
récolter <strong>de</strong>s raisins sains et <strong>de</strong> maturité idéa<strong>le</strong>. <strong>La</strong> récolte fut bel<strong>le</strong><br />
en qualité et en quantité. Les vins sont juteux et solaires.<br />
• L’ESSENTIEL<br />
Situation : en contrebas <strong>de</strong> Châteauneuf-du-Pape, un seul<br />
tenant exposé Sud-Est<br />
Superficie : 16 hectares<br />
Sols : ga<strong>le</strong>ts roulés, argilo-calcaires, marnes sab<strong>le</strong>uses<br />
Cépages : rouges : Grenache noir, Mourvèdre, Syrah, Cinsault,<br />
Counoise, Muscardin<br />
blancs : Grenache blanc, Clairette, Roussanne, Bourbou<strong>le</strong>nc<br />
• Châteauneuf-du-Pape, cuvée traditionnel<strong>le</strong>, blanc, 2011<br />
Une robe or pâ<strong>le</strong> lumineuse et limpi<strong>de</strong> attire l’œil. Au nez, on est<br />
immédiatement séduit par <strong>de</strong>s aromes délicats et comp<strong>le</strong>xes <strong>de</strong><br />
f<strong>le</strong>urs fraîches et tisanières - acacias, til<strong>le</strong>ul - et aussi <strong>de</strong> citron et<br />
d’épices douces. En bouche, on retrouve la magie du terroir : la<br />
ron<strong>de</strong>ur <strong>de</strong>s ga<strong>le</strong>ts roulés, la minéralité <strong>de</strong>s pierres, la cha<strong>le</strong>ur du<br />
climat. Au final, un grand blanc, aussi élégant que puissant, avec<br />
un formidab<strong>le</strong> potentiel <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>.<br />
• Châteauneuf-du-Pape, cuvée traditionnel<strong>le</strong>, rouge, 2010<br />
<strong>La</strong> cou<strong>le</strong>ur rubis profon<strong>de</strong> et vive rappel<strong>le</strong> l’origine enso<strong>le</strong>illée<br />
et lumineuse <strong>de</strong> ce vin. Le nez dévoi<strong>le</strong> <strong>de</strong>s notes mêlées <strong>de</strong> baies<br />
et <strong>de</strong> petits fruits rouges, augmentées d’une touche légère <strong>de</strong><br />
réglisse. En bouche, on est surpris par la délicatesse <strong>de</strong>s tanins<br />
et un fruité flui<strong>de</strong> et charnu. <strong>La</strong> fina<strong>le</strong> s’étire sur <strong>de</strong>s notes <strong>de</strong> zan<br />
avec un côté strict tonique et rafraîchissant. L’ensemb<strong>le</strong> est très<br />
réussi. Ce vin, grâce à son terroir et à un savoir-faire indubitab<strong>le</strong>,<br />
montre que l’appellation peut donner, sous un so<strong>le</strong>il ar<strong>de</strong>nt et un<br />
climat sec, <strong>de</strong>s cuvées élégantes et digestes.<br />
• Châteauneuf-du-Pape, cuvée Étienne Gonnet, rouge, 2010<br />
Avec cette cuvée issue exclusivement <strong>de</strong> vieil<strong>le</strong>s vignes parcellaires,<br />
on pénètre dans <strong>le</strong> mon<strong>de</strong> plus rare <strong>de</strong>s grands vins taillés<br />
pour la gar<strong>de</strong> et donc plus secret dans <strong>le</strong>ur jeunesse. <strong>La</strong> robe<br />
carmin est impeccab<strong>le</strong>ment colorée. Le nez laisse <strong>de</strong>viner <strong>de</strong>s<br />
arômes profonds <strong>de</strong> cerise noire et <strong>de</strong> fruits rôtis, puis <strong>de</strong>s notes<br />
finement anima<strong>le</strong>s. En bouche, après une attaque en douceur,<br />
<strong>le</strong> palais se tapisse <strong>de</strong> tanins serrés et fins, enrobés d’un fruité<br />
voluptueux et chic. Ce vin est équilibré et remarquab<strong>le</strong>ment bien<br />
construit. Un grand châteauneuf-du-pape à laisser vieillir pour<br />
en apprécier toute la dimension.<br />
EN CONCLUSION<br />
Il y a incontestab<strong>le</strong>ment une « patte » dans ces vins. <strong>La</strong> famil<strong>le</strong><br />
Gonnet montre une maîtrise savante dans la compréhension du<br />
terroir et dans <strong>le</strong> sty<strong>le</strong> <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs vins. Les trois bouteil<strong>le</strong>s goûtées ici<br />
gar<strong>de</strong>nt <strong>le</strong> caractère enso<strong>le</strong>illé et fruité <strong>de</strong> l’appellation Châteauneuf-du-Pape<br />
avec ce supplément d’élégance et <strong>de</strong> profon<strong>de</strong>ur qui<br />
fait la marque <strong>de</strong>s grands domaines.<br />
P<br />
PAPILLES<br />
dégustation<br />
15
P<br />
PAPILLES<br />
accords VOYAGE EN ORIENT EXTRÊME<br />
16<br />
Et si la meil<strong>le</strong>ure escorte possib<strong>le</strong> pour <strong>le</strong> sauternes était la cuisine chinoise ? Avec el<strong>le</strong>, il n’y aucune<br />
barrière, aucun mariage impossib<strong>le</strong> avec un grand liquoreux. Aux saveurs comp<strong>le</strong>xes <strong>de</strong>s mets chinois, <strong>le</strong><br />
vin oppose un répondant exceptionnel. Ou plutôt un accord quasi absolu. Tommy Shan, du restaurant<br />
bor<strong>de</strong>lais Au Bonheur du Palais, aime autant la cuisine raffinée que <strong>le</strong>s grands vins. Il a imaginé une<br />
rencontre entre Château Suduiraut 2005, Grand Cru Classé <strong>de</strong> Sauternes, et la très réputée cuisine <strong>de</strong><br />
Sichuan. Un spectac<strong>le</strong> en trois actes raconté par son metteur en scène.<br />
LA FRAÎCHEUR ET L’ACIDULÉ<br />
« Le douceâtre et l’acidulé sont <strong>de</strong>s saveurs essentiel<strong>le</strong>s dans la culture<br />
culinaire chinoise. <strong>La</strong> plupart du temps, on aime ces saveurs dans la<br />
cuisine mais on rechigne à <strong>le</strong>s retrouver dans un vin. Pourtant, quand<br />
el<strong>le</strong>s s’expriment avec maîtrise et imagination, comme dans ce Château<br />
Suduiraut, l’harmonie avec <strong>le</strong> plat est immédiate et évi<strong>de</strong>nte. Comme<br />
avec <strong>le</strong>s <strong>La</strong>mel<strong>le</strong>s <strong>de</strong> porc à l’aigre-doux Yuxiang : l’acidité du vin, renforcée<br />
par <strong>de</strong>s notes fraîches d’ananas et <strong>de</strong> fruits exotiques donne parfaitement<br />
la réplique au moel<strong>le</strong>ux <strong>de</strong> la vian<strong>de</strong> et la sauce Yuxiang qui<br />
a cette particularité <strong>de</strong> mélanger <strong>le</strong>s saveurs épicée, salée, acidulée et<br />
sucrée. »<br />
LA COMPLEXITÉ ET LE RAFFINEMENT<br />
« <strong>La</strong> cuisine chinoise remonte au 3 e sièc<strong>le</strong> avant l’ère chrétienne avec<br />
comme apothéose, ce fameux repas sino-mongol qui se mange en trois<br />
jours ! Cel<strong>le</strong> <strong>de</strong> la province <strong>de</strong> Sichuan comporte 23 saveurs. Un grand<br />
sauternes réussit à combiner la subtilité et la comp<strong>le</strong>xité. Dans <strong>le</strong> Pou<strong>le</strong>t<br />
à la crème <strong>de</strong> sésame bang-bang, la richesse <strong>de</strong>s saveurs, <strong>le</strong> grillé <strong>de</strong>s<br />
graines <strong>de</strong> sésame, l’amer du radis et du gingembre, <strong>le</strong>s parfums du<br />
basilic et <strong>de</strong> la coriandre se mê<strong>le</strong>nt aux arômes profonds du vin, <strong>le</strong> pamp<strong>le</strong>mousse,<br />
<strong>le</strong> jasmin, <strong>le</strong> caramel, l’aman<strong>de</strong>. »<br />
LA DOUCEUR ET LE FEU<br />
« <strong>La</strong> tradition <strong>de</strong> Sichuan mê<strong>le</strong> avec la vian<strong>de</strong> <strong>le</strong>s épices et <strong>le</strong>s légumes<br />
forts en goût. L’hui<strong>le</strong> rouge <strong>de</strong> piment, <strong>le</strong> poivre anesthésiant avec par<br />
exemp<strong>le</strong> <strong>le</strong>s champignons noirs, <strong>le</strong>s carottes, <strong>le</strong> brocoli. Dans <strong>le</strong> Bœuf<br />
braisé aux piments dit “cuit à l’eau”, l’incendie du palais que provoquent<br />
<strong>le</strong>s épices brutes vient s’éteindre grâce à l’onctuosité du vin. On oublie<br />
tota<strong>le</strong>ment la sensation sucrée du sauternes, <strong>le</strong> velouté et la <strong>de</strong>nsité <strong>de</strong><br />
sa texture agissent comme une étoffe soyeuse. »<br />
Au Bonheur du Palais – 74 rue Paul Louis <strong>La</strong>n<strong>de</strong> – 33000 Bor<strong>de</strong>aux – 05 56 94 38 63 – tommy.shan33@gmail.com
© CI V B –<br />
ODÉ Curieusement, la plupart <strong>de</strong>s vins blancs<br />
secs qui présentent cette note iodée ne sont pas issus<br />
d’un terroir proche d’un littoral. Rare exception à cette<br />
règ<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s musca<strong>de</strong>ts, nés tout près <strong>de</strong> l’Atlantique,<br />
dévoi<strong>le</strong>nt cette touche marine. Précisons que l’arôme<br />
iodé est rarement dominant dans un vin, il est souvent<br />
associé à <strong>de</strong>s nuances citronnées et flora<strong>le</strong>s et aussi<br />
à une touche minéra<strong>le</strong>. Les chablis, issus du cépage<br />
Chardonnay, n’ont pas vu la mer <strong>de</strong>puis <strong>le</strong> Jurassique.<br />
Pourtant, ils frappent souvent par cette note iodée et<br />
minéra<strong>le</strong>. Si cette <strong>de</strong>rnière vient sans aucun doute du<br />
si<strong>le</strong>x présent dans <strong>le</strong> sol, certains pensent que <strong>le</strong> terroir,<br />
très riche en coquil<strong>le</strong>s d’huîtres fossi<strong>le</strong>s, n’est pas<br />
étranger à <strong>le</strong>ur goût iodé, vif et acidulé. Une chose est certaine<br />
cependant, un vin au caractère iodé se marie souvent très bien<br />
avec <strong>le</strong>s coquillages, notamment <strong>le</strong>s huîtres. <strong>La</strong> senteur vivifiante<br />
du vin rejoint alors cel<strong>le</strong> <strong>de</strong>s vacances au bord <strong>de</strong> la mer…<br />
INAO Créé en 1935, l’Institut National <strong>de</strong>s Appellations<br />
d’Origine est <strong>le</strong> gardien du temp<strong>le</strong> <strong>de</strong>s produits. Appellation<br />
d’Origine, Indication Géographique Protégée, <strong>La</strong>bel Rouge,<br />
STG et Agriculture Biologique en sont <strong>le</strong>s signes officiels<br />
d’i<strong>de</strong>ntification <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur origine et <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur qualité. L’Inao est en<br />
charge <strong>de</strong> la délimitation <strong>de</strong>s aires géographiques protégées.<br />
Les commissions qui siègent pour attribuer ou non <strong>le</strong>s précieuses<br />
mentions s’appuient sur <strong>le</strong> travail scientifique <strong>de</strong> géologues,<br />
<strong>de</strong> pédologues, d’agronomes, d’historiens, <strong>de</strong> géographes,<br />
<strong>de</strong> sociologues et d’ethnologues. Chaque AOC fait l’objet d’un<br />
décret et d’un cahier <strong>de</strong>s charges extrêmement précis. Le vin<br />
bénéficie d’une AOC suite à une procédure d’agrément. Récemment,<br />
cette procédure a été confiée aux syndicats vitico<strong>le</strong>s <strong>de</strong>venus<br />
pour l’occasion OGD, Organismes <strong>de</strong> Gestion et <strong>de</strong> Défense.<br />
<strong>La</strong> première naissance d’une AOC en 1936 ancra l’Inao<br />
dans un rô<strong>le</strong> incontestab<strong>le</strong>. Mais on assiste <strong>de</strong>puis quelques<br />
années à une sérieuse remise en question <strong>de</strong> sa prétendue mission<br />
<strong>de</strong> défense et sauvegar<strong>de</strong> du patrimoine vitico<strong>le</strong> français.<br />
Notamment par bien <strong>de</strong>s vignerons réputés et reconnus comme<br />
ar<strong>de</strong>nts « terroiristes ». Pour eux, l’esprit <strong>de</strong> Joseph Capus, du<br />
baron Pierre Le Roy et d’Édouard Barthe, <strong>le</strong>s instigateurs du<br />
décret-loi du 30 Juil<strong>le</strong>t 1935, est <strong>de</strong> plus en plus dévoyé. Quand<br />
l’AOC, synonyme <strong>de</strong> bien national, était aux seu<strong>le</strong>s mains <strong>de</strong>s<br />
fonctionnaires, il manquait la vision d’un savoir-faire. Maintenant<br />
qu’el<strong>le</strong> est entre <strong>le</strong>s mains <strong>de</strong>s professionnels, c’est une<br />
vision <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur patrimoine qu’ils défen<strong>de</strong>nt et plus vraiment d’un<br />
patrimoine. René Renou, charismatique prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> l’Inao<br />
dans <strong>le</strong>s années 2000 et aujourd’hui décédé, avait parfaitement<br />
cerné cette dérive <strong>de</strong> l’intérêt général vers l’intérêt particulier :<br />
« L’Inao <strong>de</strong>man<strong>de</strong> aux syndicats <strong>de</strong> proposer <strong>le</strong>s conditions <strong>de</strong><br />
production, et il exerce sa tutel<strong>le</strong> en s’assurant que <strong>le</strong>s <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s<br />
ne sont pas dérivantes sur certains points : économie à court<br />
terme, industrialisation, banalisation, standardisation, technicisation<br />
visant à perdre l’expression du terroir ».<br />
IRRIGATION L’irrigation <strong>de</strong>s vignob<strong>le</strong>s français a<br />
longtemps été un sujet tabou car on l’assimilait aux pires techniques<br />
<strong>de</strong> « mouillage » du vin à l’époque où l’on faisait « pisser<br />
la vigne ». Mais la Californie, <strong>le</strong> Chili, l’Australie, l’Afrique<br />
du Sud autorisent <strong>de</strong>puis toujours l’irrigation <strong>de</strong>s vignes. Cet<br />
argument économique <strong>de</strong> la filière vitico<strong>le</strong> française, <strong>de</strong> plus<br />
en plus confrontée à la compétitivité mondia<strong>le</strong>, a été entendu.<br />
En 2006, un décret a autorisé l’irrigation. El<strong>le</strong> reste cependant<br />
interdite pour tous <strong>le</strong>s vins entre <strong>le</strong> 15 août (ou la véraison) et la<br />
récolte. Pour <strong>le</strong>s AOC, l’irrigation est autorisée après la récolte<br />
et jusqu’au 1er mai. Mais l’interdiction peut être <strong>le</strong>vée entre <strong>le</strong><br />
15 juin (ou la floraison) et <strong>le</strong> 15 août (ou la véraison). ■<br />
A<br />
ABÉCÉDAIRE
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est édité par <strong>La</strong> <strong>Française</strong> Real Estate Managers<br />
SAS au capital <strong>de</strong> 1 220 384 €<br />
pour <strong>le</strong> Club <strong>de</strong>s Propriétaires <strong>de</strong> Grands Crus<br />
<strong>La</strong> <strong>Française</strong> Real Estate Managers est une société<br />
du groupe <strong>La</strong> <strong>Française</strong> AM ISSN : 1952-6725<br />
Dénomination socia<strong>le</strong> <strong>de</strong> l’éditeur : LA FRANCAISE REM<br />
Forme juridique : SAS au capital <strong>de</strong> 1 220 384 €<br />
Adresse du siège social : 173, bou<strong>le</strong>vard Haussmann 75008 Paris<br />
Représentant légal : Xavier Lépine<br />
Directeur <strong>de</strong> la publication : Xavier Lépine<br />
Responsab<strong>le</strong> <strong>de</strong> la rédaction : Patrick Ribouton<br />
Conception graphique & direction artistique : Culturevin<br />
Rédaction : Claire Brosse<br />
Iconographie et photographies : Christophe Goussard<br />
sauf p. 2, 3, 14, 2 e & 3 e <strong>de</strong> couv : D.R.<br />
Photos p.12 & 15 et photogravure : Philippe Mesa<br />
Impression : Imprimerie Val<strong>le</strong>y à Lyon<br />
Date <strong>de</strong> parution : décembre 2012<br />
<strong>La</strong> <strong>Française</strong> AM, 173 bou<strong>le</strong>vard Haussmann, 75008 Paris<br />
Tél. : 01 44 56 10 00 - Fax : 01 44 56 11 00<br />
EV0108 - décembre 2012