Messe d'installation du père Charles Fazilleau - Diocèse Poitiers
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<strong>Messe</strong> d’installation <strong>du</strong> <strong>père</strong> <strong>Charles</strong> <strong>Fazilleau</strong><br />
Cerizay - 1 er septembre 2012<br />
22 ème Dimanche ordinaire<br />
A l’écoute de l’Evangile et <strong>du</strong> livre <strong>du</strong> Deutéronome, la première lecture, on peut<br />
penser que ces deux textes ont été choisis par la liturgie pour les situer en contraste, sinon en<br />
opposition.<br />
Alors que les pharisiens et les scribes sont stigmatisés par Jésus en raison de leur observance<br />
de la loi, Moïse, dans le Deutéronome appelle au respect scrupuleux de cette même loi.<br />
L’erreur à ne pas commettre, lorsque nous lisons ou écoutons la Bible, ce serait de choisir un<br />
texte et de refuser l’autre.<br />
La Nouveau Testament n’a pas effacé ou supplanté l’Ancien Testament ; Ancien Testament<br />
qu’il est préférable d’appeler le Premier.<br />
Il n’y a rien de mauvais dans la Loi de Dieu.<br />
Chaque jour, dans l’office <strong>du</strong> milieu <strong>du</strong> jour, les religieux, les prêtres, les diacres, et sans<br />
doute plusieurs parmi vous, nous disons ou nous chantons le psaume 118.<br />
C’est le plus long psaume de la Bible, et il ne fait que chanter la bonté et la beauté de la loi de<br />
Dieu ; il multiplie les synonymes pour parler de cette loi.<br />
Dénonçant l’hypocrisie des pharisiens, Jésus ne dénonce pas la loi mais ce qu’ils en font : non<br />
pas ce qui relie mais ce qui sépare.<br />
Or, la loi relie : dans la Bible, la loi relie Dieu aux hommes ; la loi est un chemin qui à la fois<br />
exprime la proximité de Dieu et en même temps guide les hommes et les femmes sur leur<br />
chemin.<br />
Selon les commentaires rabbiniques, il y a dans la Bible 365 commandements, 365 lois.<br />
Autrement dit, aucun jour de l’année n’est en dehors de l’attention de Dieu.<br />
C’est bien de cela dont il est question, la loi est une bénédiction pour l’homme, elle est le<br />
signe que Dieu bénit l’homme, ne le laisse pas errer, dans un seul face-à-face avec lui-même,<br />
mais l’accompagne et le guide ; c’est le sens de chacune de ces lois.<br />
C’est par la Loi, par ces multiples lois, que Dieu exprime sa justice, sa bienveillance pour<br />
nous tous.<br />
La première fois où apparaît une loi dans la Bible, c’est dès la création de l’homme, et cette<br />
loi est double, elle est à la fois une autorisation et une interdiction :<br />
« Le Seigneur Dieu prescrivit à l’homme : ‘’Tu pourras manger de tout arbre <strong>du</strong> jardin, mais<br />
tu ne mangeras pas de l’arbre de la connaissance <strong>du</strong> bonheur et <strong>du</strong> malheur car, <strong>du</strong> jour où tu<br />
en mangeras, tu devras mourir’’ » Genèse 2, 16-17.<br />
Plusieurs choses que je veux ici souligner.<br />
D’abord, la loi.<br />
Si elle est une interdiction, si elle pose une limite – ici, la loi manifeste simplement à<br />
l’homme qui n’est pas l’auteur de sa propre vie – la loi est d’abord une autorisation, elle<br />
révèle à l’homme ses capacités de vie et d’action.<br />
« Tu pourras manger de tout arbre » ; autrement dit, le monde est confié à l’homme.<br />
Avant d’être borné par ses limites, l’homme est d’abord un être en capacités ; en capacités de<br />
vie, d’action, de liberté.<br />
Ceci explique ce que toute la Bible dira ensuite de la Loi.<br />
Elle est un bienfait ; elle est le signe de la bénédiction de Dieu.<br />
Le premier objet de la loi, c’est donc de séparer, autrement de poser la limite.<br />
Refuser la loi, c’est supprimer la limite, et donc s’identifier à l’autre.<br />
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Il n’y a de vie en société, pour nous, il n’y a de vie en Eglise que là où existe la différence,<br />
non qui isole ou sépare, mais qui relie.<br />
Lorsque l’on refuse cette différence, on cherche à être l’autre, on ne supporte plus qu’il soit<br />
différent de moi.<br />
L’homme veut devenir une femme ; l’a<strong>du</strong>lte voudrait toujours garder la jeunesse de l’enfant ;<br />
parfois le laïc voudrait être prêtre.<br />
Aujourd’hui, vous accueillez un prêtre que je vous envoie pour être votre pasteur.<br />
Le prêtre montre que pour vivre votre foi vous ne vous suffisez pas.<br />
Ce n’est pas une communauté chrétienne qui se donne son pasteur, vous le recevez.<br />
Mais la réciproque est aussitôt appelée.<br />
Le prêtre est appelé à recevoir ce que vous êtes ; à prendre en compte votre histoire.<br />
Et enfin, l’un et l’autre, le prêtre et la communauté chrétienne ne doivent jamais oublier qu’ils<br />
ne sont pas l’Eglise catholique à eux tous seuls.<br />
Et c’est la loi qui rappelle cela : la loi que sont d’abord des Ecritures auxquelles nous ne<br />
pouvons ni ajouter ni retrancher quoi que ce soit.<br />
Et c’est aussi la loi qui définit la prière chrétienne comme un prière reçue et non comme<br />
constamment laissée à la libre invention de ceux qui s’en saisiraient.<br />
Heureuse loi qui nous délivre de la toute-puissance et de l’autosuffisance.<br />
Heureuse loi qui nous révèle que l’autre m’est absolument nécessaire pour vivre, comme je lui<br />
suis absolument nécessaire.<br />
Le Père <strong>Fazilleau</strong> devient le responsable de votre Secteur pastoral, il y exerce désormais la<br />
charge curiale.<br />
Cette charge s’enracine dans les sacrements de la vie chrétienne, il devra en exercer ses trois<br />
dimensions dont nous trouvons les figures dans la Bible : roi, prêtre et prophète.<br />
Prophète, il doit annoncer l’Evangile, il doit ancrer dans la foi de l’Eglise.<br />
Dans quelques jours commencera l’année de la foi, je suis certain qu’il ne manquera pas de<br />
vous aider à vivre cette année pour vous affermir dans la foi reçue de l’Eglise, la foi dont il<br />
vient de renouveler sa profession.<br />
Prêtre, il doit vous guider dans la prière, et par elle vous tourner vers le Seigneur.<br />
Enfin, il est roi. Ce mot exprime qu’il est appelé à servir, servir la communion de l’Eglise,<br />
servir son dynamisme missionnaire.<br />
Il le fera aussi en assurant la charge de gouvernement qui appartient à la mission <strong>du</strong> curé.<br />
Cette mission de gouvernement existe différemment, elle a plusieurs sources.<br />
Le gouvernement peut émaner <strong>du</strong> peuple, c’est le cas dans une démocratie.<br />
Le gouvernement peut venir de la naissance, et nous sommes dans une monarchie.<br />
Dans l’Eglise, le gouvernement vient de Dieu et d’un sacrement, celui de l’Ordre.<br />
Au contraire de rendre tout puissant celui qui l’exerce, ceci exprime la limite de tout pouvoir<br />
dans l’Eglise : sans cesse il doit être remis à Dieu, mis sous la critique de l’Ecriture et de<br />
l’Esprit Saint.<br />
Pourtant, servir dans l’Eglise, c’est aussi gouverner, c’est indiquer une direction, c’est faire<br />
des choix et les assumer, au risque parfois de se retrouver seul en première ligne.<br />
Même si cela nous est donné, à nous, les prêtres et les évêques, par un sacrement, celui de<br />
l’Ordre, ceci demeure dans la main de Dieu, c’est lui qui guide son Eglise, lui qui chaque<br />
matin nous demande de nous remettre entre ses mains, lui aussi qui nous rappelle que l’Esprit<br />
Saint à été donné à nos frères et sœurs autant qu’à nous ; je parle ici pour chacun de nous.<br />
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Il se pourrait aussi, parfois, que même les prêtres, et les évêques…, reçoivent quelque force et<br />
lumière de l’Esprit Saint.<br />
Il y a encore peu d’années, la grande majorité des prêtres <strong>du</strong> diocèse venait des communes <strong>du</strong><br />
bocage.<br />
Combrand, qui est une des communes <strong>du</strong> cerizéen a donné nombre de prêtres dont plusieurs<br />
exercent toujours un ministère dans le diocèse.<br />
Aujourd’hui, vous accueillez un prêtre qui est né dans la Vienne ; c’est aussi dans la Vienne<br />
qu’il a exercé son ministère ainsi qu’à Paris.<br />
Il vous arrive avec ses caractéristiques, avec son âge, aussi avec l’expérience <strong>du</strong> patronage<br />
qu’il a dirigé pendant trois ans à Paris.<br />
C’est pour ce qu’il est que je lui ai demandé de venir parmi vous.<br />
En France, il est de bon ton de stigmatiser la mondialisation.<br />
Il est vrai que celle-ci est néfaste lorsqu’elle détruit les histoires et les cultures locales au<br />
profit de la culture mainstream et des comportements standardisés.<br />
Mais la mondialisation c’est aussi ce qui développe l’échange entre les cultures et le<br />
sentiment que l’humanité est une.<br />
Il est bon que le diocèse vive aussi quelque chose de cette mondialisation.<br />
Comptant deux départements, eux-mêmes très contrastés – Mauléon ce n’est pas Niort – c’est<br />
une richesse de partager les expériences des uns et des autres.<br />
Mais, Cerizay est aussi marqué par cela ; en raison <strong>du</strong> développement de l’in<strong>du</strong>strie, vous<br />
avez accueilli des familles venant d’autres pays, <strong>du</strong> Portugal en particulier.<br />
La juste attitude alors est de savoir s’enrichir mutuellement et de se réjouir de ce que sont les<br />
uns et les autres.<br />
Cette attitude est noble, estimable, mais, pour nous, elle a un autre fondement, c’est celui de<br />
notre foi.<br />
Là est le fondement de notre unité.<br />
Le prêtre reçoit cette mission de signifier que tout ce que nous sommes doit être fondé dans la<br />
foi ; seul ce qui s’édifie sur le Christ est fort et est juste.<br />
Ceci n’oblitère pas nos projets, nos idées, mais les passe au crible de la foi pour leur donner<br />
leur vraie solidité.<br />
Ne craignez pas de vous exposer au Seigneur ; il décape nos idées et nos projets, mais pour<br />
nous les rendre plus solides.<br />
Mgr Pascal WINTZER<br />
Archevêque de <strong>Poitiers</strong><br />
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