Rencontre avec Alain Michel La Fondation Hommes de Parole à l ...

I
Rencontre avec Alain Michel
Fondateur de « Hommes de Parole »
La Fondation Hommes de Parole à l’initiative de
cette rencontre
Quinze années de terrain comme président et directeur de l’ONG EquiLibre passées à tenter de soulager
les conséquences des conflits ont conduit Alain Michel à créer la Fondation Hommes de Parole afin d’agir
non seulement sur les conséquences mais prioritairement sur les causes. Par la publication de livres
d’entretiens et une pratique intense de la rencontre et du dialogue, la Fondation œuvre depuis cinq
ans à informer et à réunir. Sa neutralité, son intégrité reconnues et la proximité qu’elle entretient avec
les populations lui permettent de pressentir les actions nécessaires et de rassembler des personnalités de
toutes tendances. Elle a ainsi réuni à Caux (Suisse) en juin 2003 une quarantaine de personnalités de
premier plan autour du conflit israélo-palestinien, afin de poser les bases de l’Alliance pour une Culture de
Paix.
«Il est absurde de continuer à soigner les maladies dues à l’eau polluée sans
désinfecter l’eau du puit.»

En quoi des Imams et des Rabbins peuvent-ils vraiment construire la paix ?
« Ce ne sont plus les
gouvernements, les hommes
politiques ou les militaires seuls
qui feront la paix, ce sont
prioritairement les populations. »
Rencontre avec Alain Michel
« Une paix signée par les gouvernements sans l’accord des populations est une paix de
fausse sécurité, une paix froide, instable et donc sans véritable avenir. C’est pourquoi,
ce ne sont plus les gouvernements, les hommes politiques ou les militaires qui feront
seuls la paix, ce sont prioritairement les populations.
Aujourd’hui elles sont épuisées de tous ces conflits et ne demandent que sécurité et
sérénité.
Pour cela et pour arrêter le cycle infernal des violences, il est nécessaire de délégitimer
les agressions sans cesse alimentées par les discours des intégristes.
Aujourd’hui ce sont en priorité des « religieux » extrémistes car beaucoup parmi eux
s’autoproclament abusivement « religieux » …, qui entretiennent et développent la
violence et la haine, avec Dieu comme alibi alors que trop souvent silencieux, ce sont
tous les autres religieux qui, en rétablissant la place de Dieu dans la Vérité, peuvent et
doivent conduire à la paix.
Dans les médias, seuls les extrémistes s’expriment alors qu’ils représentent moins de 10
% des religieux.
Pourquoi les autres ne s’expriment-ils pas suffisamment ? Peut-être parce qu’ils ont
peur, tout simplement. Le terrorisme n’a pas d’autre fin que de terroriser, pour obtenir
la soumission. Et comme ils ne se réunissent pas en nombre suffisant, ils n’ont
probablement pas assez conscience de leur force ou plutôt, ils n’ont pas fait l’expérience
de leur pouvoir.
Nous attendons des religieux qu’ils prennent publiquement position contre l’extrémisme,
le terrorisme, la pauvreté. Ils devraient condamner très fermement toutes les violations
des droits de l’Homme.
C’est il me semble de leur devoir. Nous attendons autre chose que le silence même si ce
silence s’explique souvent par les pressions exercées dans certaines communautés.
De se réunir nombreux pour ce Congrès, venant du monde entier permettra aux
religieux de prendre des décisions qui obtiendront la force du nombre. Elles légitimeront
alors toutes les positions précédemment isolées souvent impossibles à exprimer.»

Rencontre avec Alain Michel
N’est-ce pas une énième rencontre inter-religieuse ?
« Ce n’est pas seulement la rencontre qui est exceptionnelle, c’est aussi
l’impact de cent responsables religieux, juifs et musulmans unis, qui
manifestent cette coexistence pacifique devant les caméras et dans les
journaux du monde entier. »
« Ce n’est pas une rencontre inter-religieuse, c’est d’abord une rencontre de religieux. Il ne s’agit
pas de débattre de concepts, de dogmes, d’interprétation de textes ou des diverses formes de
spiritualités. C’est une rencontre « religieuse » dans le sens originel du terme qui est « relier », une
rencontre qui a l’objectif de relier les hommes entre eux. Dieu est trop souvent utilisé comme source
de division alors qu’Il est source de relation harmonique. Ces responsables et dignitaires de l’Islam et
du Judaïsme qui vont enfin discuter face à face, vont prouver à nouveau cette volonté de coexistence
pacifiée en vivant et en travaillant ensemble durant quatre jours.
Ce n’est pas la rencontre qui est exceptionnelle, c’est l’impact de cent responsables religieux, juifs et
musulmans réunis, qui manifestent cette volonté de coexistence harmonieuse devant les caméras et
dans les journaux du monde entier. Les juifs de Jérusalem les verront, les musulmans d’Indonésie et
d’Irak les verront. En Palestine, en Europe, aux États-Unis, au Pakistan, tout le monde verra que
cette volonté de coexistence pacifique est possible et tous pourront enfin en tirer les bonnes
conclusions. »
Les Chrétiens sont-ils exclus de ce Congrès ?
Les Chrétiens ne sont absolument pas exclus du Congrès, bien au contraire. Une quinzaine de
personnalités chrétiennes seront présentes lors de la rencontre.
Les Chrétiens ont une place privilégiée de « médiateurs » car ils connaissent bien les différentes
sensibilités. Ils seront interprètes, experts et témoins.
Aujourd’hui, même si les Chrétiens sont particulièrement concernés par la souffrance au Moyen-
Orient par exemple, ils ne sont plus la cause principale des tensions. Ils vivent en relative bonne
harmonie avec les uns et les autres.
Par ailleurs, il existe aujourd’hui, un dialogue permanent entre l’Islam et le Christianisme, le Judaïsme
et le Christianisme mais le dialogue « formel » entre l’Islam et le Judaïsme, n’existe pratiquement
pas. L’un des objectifs de ce Congrès est de participer à son rétablissement sans lequel aucune paix
n’est envisageable.

« Cela va certainement contribuer à changer le regard des juifs et des
musulmans à travers le monde, mais aussi le regard du monde sur les
juifs et les musulmans.
L’utilisation de Dieu pour la violence ne sera plus valable.»
Pourquoi des chefs religieux ? Pourquoi ne pas avoir choisi des personnalités
laïques de haut niveau représentant l’Islam et le Judaïsme?
Parce que les religieux invités, Oulémas, Imams, Rabbins dirigent d’importantes communautés dans
le monde entier et ont un véritable pouvoir. Ils influencent considérablement les populations et
peuvent être leurs représentants auprès des hommes politiques. En tant que chefs religieux, ils
peuvent dans certaines circonstances influencer aussi les gouvernements, pour les aider ou les inciter
à prendre des décisions qui servent la paix et l’Homme.
Dans ce sens, les chefs religieux ont un réel pouvoir de « transformation » dont ne disposent pas
encore les laïcs. L’objectif principal de cette rencontre est que le Congrès ne se termine pas
seulement par de bonnes paroles, mais par des décisions effectives. Dans ce sens, les chefs religieux
ont le poids et le pouvoir nécessaires pour que des actes importants et concrets soient mis en route
dès la fin du Congrès avec tous les moyens et l’efficacité attendus.
Qu’est ce que cette rencontre va changer ?
Rencontre avec Alain Michel
« Cela va certainement contribuer à changer le regard des juifs et des musulmans à travers le
monde, mais aussi le regard du monde sur les juifs et les musulmans.
L’utilisation de Dieu pour la violence ne sera plus valable. Les fidèles pourront voir les convergences
et la volonté de coexistence que leurs chefs spirituels ont manifestées. Cette coexistence pacifiée, ils
pourront la refaire chez eux, entre voisins de palier ou entre pays voisins. C’est presque toujours la
méconnaissance de l’autre et donc la peur de l’autre qui fait le lit des intégrismes.
Chacun de ces chefs religieux musulmans et juifs viendra avec sa volonté de paix pour exprimer ses
idées et écouter celles des autres sur les actions à entreprendre. Au sortir de cette rencontre, peutêtre
aurons-nous, entre autres, des projets concernant l’éducation et le regard entretenu dès l’école
entre les deux communautés. Peut-être que des projets seront organisés dans les cités et les villes
européennes contre l’islamo phobie et l’antisémitisme. D’autres projets naîtront pour que des actions
communes reliant les enfants juifs et musulmans voient le jour. Peut-être des écoles rabbiniques et
islamiques se créeront-elles pour canaliser l’enseignement des Imams et des Rabbins, et ainsi
désapprouver les positions intégristes aux yeux de tous. Et bien sûr, peut-être arriverons-nous dans
le monde entier, à rendre définitivement hors la loi toutes les violences destructrices exercées au
nom de Dieu. »