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DMAt 2012 - Duperré

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<strong>2012</strong><br />

Diplôme des métiers d’arts<br />

Arts textiles<br />

) ) )<br />

Un laboratoire de questionnement<br />

et de savoir-faire<br />

Lise Brisson<br />

Préface<br />

Si vous avez envie de retrouver le<br />

questionnement de l’enfant ou celui<br />

du philosophe, qui dans sa maïeutique<br />

interroge inlassablement la matière et<br />

les concepts, je vous recommande de<br />

faire un détour au DMA textile.<br />

C’est une aventure sur deux ans pour<br />

quelques étudiants, heureux élus. Cela<br />

tient du De natura rerum en première<br />

année où sont données avec rigueur et<br />

fantaisie, les bases d’un lexique adapté<br />

à chaque technique explorée (tissage,<br />

broderie, tapisserie) pour arriver à en<br />

jouer et déjouer toutes les contraintes,<br />

comme la Règle et le Jeu, mais surtout<br />

à la manière pongienne du Parti pris des<br />

choses.<br />

En effet, l’étudiant choisit un thème, en<br />

résonance avec ses affinités électives,<br />

petite madeleine de ses territoires inté-


ieurs ou bien une problématique qui lui<br />

est chère et qui l’intrigue. Il va durant un<br />

an questionner cette matière : eau, sable,<br />

mousse, peau, moisissure, monstres,<br />

fourmi(s), mine de plomb, silence de suie,<br />

parfum de paysages, peur, noir, pliage,<br />

jardin, germination… par des expérimentations<br />

sous forme d’échantillonnages,<br />

utilisant des matériaux existants<br />

tout comme des matériaux détournés ou<br />

inventés. Il explore le dessus, le dessous,<br />

le yin, le yang, les constructions, les<br />

déconstructions… avec une invention<br />

foisonnante et rigoureuse tout autant<br />

que minutieuse.<br />

Cette première année porte l’étudiant<br />

vers une thématique qui court toute la<br />

deuxième année et mêle savamment<br />

recherche d’une haute technicité et<br />

réflexion d’ordre poétique où se<br />

répondent les mots, les images, les<br />

référents photographiques, plastiques,<br />

littéraires et les pensées sous forme<br />

de carnets, de boites, d’ouvrages qui<br />

accompagnent sa création.<br />

Je n’ai de cesse de penser à Ponge<br />

toujours, au Parti pris des choses. Sa<br />

recherche se serait plongée encore plus<br />

près des choses et de la matière pour<br />

traduire ce questionnement du langage<br />

par la matière elle-même.<br />

Il s’agit bien ici de «réveiller» les choses<br />

dans cette «Fabrique Dupetit-Thouars»,<br />

où soufflerait également un vent de L’eau<br />

et les rêves, de L’air et les songes de<br />

l’univers bachelardien par-delà toutes<br />

ces choses, avec un regard émerveillé.<br />

Lise Brisson<br />

Responsable des événements au musée Galliera<br />

) ) )<br />

)<br />

Camille Audra<br />

De pierre et de lumière<br />

camille.audra@gmail.com<br />

Lou-Anne Boehm<br />

Amazones<br />

loua.boehm@gmail.com<br />

Marion De Meo<br />

Marion, 22 ans, Gourmandologue<br />

marion.demeo@hotmail.fr<br />

Inès Leroy Galan<br />

Des ordres désordres<br />

ines.leroy@gmail.com<br />

Anthonin Guillem<br />

Le charme discret de la bourgeoisie<br />

anthonin.guillerm@gmail.com<br />

Fannie Jaulin<br />

Fourmi(s)<br />

fannie.jaulin@free.fr<br />

Nolwenn Le Scao<br />

Embrase-moi<br />

nolwenn.le.scao@orange.fr<br />

Éléonore Lespets<br />

Entretemps, Entrelieux<br />

eleonorelespets@gmail.com<br />

Clémentine Muret<br />

Dans la forêt quelque chose se trame...<br />

clementinemuret@hotmail.fr<br />

)<br />

Camille Nocus<br />

Megavirus<br />

camillenocus@hotmail.fr<br />

Marie Pouclet<br />

Plage mémoire<br />

pouclet.marie@gmail.com<br />

Margaux Saint Frison<br />

In Vino Voluptas<br />

margauxsaintfrison@gmail.com<br />

Marina Savani<br />

Birdies<br />

marina_savani@live.fr<br />

Laetitia Séverac<br />

Parfums de paysages<br />

laetitiaseverac@yahoo.fr<br />

Clémentine Udron<br />

Surfemme<br />

clementineudron@gmail.com<br />

Léa Verdeguer<br />

L’entre-monde<br />

lea.verdeguer@yahoo.fr<br />

Constance Vidalain<br />

Silence de suie<br />

constancevidalain@gmail.com<br />

revue de<br />

Projets


) ) )<br />

A l’ère de la mode actuelle qui renouvelle<br />

ses collections trois fois par saison, à<br />

l’ère du bruit, du stress, de la surconsommation<br />

du jetable, mais aussi de la dette,<br />

d’une apocalypse annoncée, pourquoi la<br />

cathédrale?<br />

)tissage<br />

Parce que c’est une architecture qui traverse<br />

le temps.<br />

Parce qu’il y règne un silence apaisant.<br />

Parce que s’y côtoient la pénombre et la<br />

lumière.<br />

Parce que c’est pour moi l’aboutissement<br />

sublime de la foi créatrice.<br />

Camille Audra<br />

De pierre et de lumière


) ) )<br />

Nous reconnaissons depuis longtemps<br />

l’existence de tribus en Afrique et en<br />

Amazonie, mais a-t-on jamais imaginé un<br />

instant qu’il pourrait en exister d’autres?<br />

Des tribus dont nous ne soupçonnons même<br />

pas l’existence. Peut être persiste-t-il<br />

encore des ethnies bien discrètes, résidant<br />

dans des territoires où elles sont sûres de ne<br />

pas être dérangées…<br />

)tapisserie<br />

«Les grandes profondeurs des océans<br />

nous sont totalement inconnues. La sonde<br />

n’a su les atteindre. Que se passe-t-il dans<br />

ces abîmes reculés? Quels êtres habitent<br />

et peuvent habiter à douze ou quinze milles<br />

au-dessous de la surface des eaux ? Quel est<br />

l’organisme de ces animaux ? On saurait à<br />

peine le conjecturer. »<br />

Jules Verne, «Vingt mille lieues sous les mers ».<br />

Lou-Anne Boehm<br />

Amazones


) ) )<br />

Nous sommes dans une société qui cultive<br />

le goût du sucré. C’est une consommation<br />

ludique qui renvoie à un plaisir d’enfance.<br />

La gourmandise est une nostalgie de<br />

l’enfance, du paradis perdu, du fruit défendu<br />

; les gâteaux, bonbons et sucreries font<br />

appel à la mémoire collective.<br />

Marion, 22 ans, Gourmandologue<br />

«Hugo ! A table !» Ces yeux s’écarquillent,<br />

son cœur s’emballe. Il entend alors quelqu’un<br />

monter l’escalier. Oh non. Il n’attend pas une<br />

seconde de plus et vide le sachet tout entier<br />

dans sa bouche. Ses joues se déforment sous<br />

la quantité de sucreries. Tout en continuant<br />

de mâcher, il s’empresse de ramasser tout<br />

le reste de bonbons et les pousse sous le lit.<br />

Dans l’urgence, sa bouche laisse échapper<br />

le succulent jus qui perle sur son tee-shirt.<br />

Les pas se rapprochent. Il se redresse et<br />

court vers la porte, qu’il claque en sortant.<br />

Tête baissée, il s’élance dans le couloir et<br />

percute violemment une masse solide. Il lève<br />

)tissage<br />

les yeux et découvre sa mère, étonnée et<br />

légèrement troublée. Ils échangent un regard<br />

bref, car déjà il s’est élancé dans l’escalier<br />

en lui criant «on mange quooooi ? Pas de la<br />

soupeeuuuh!»<br />

Hugo, 8 ans, Dragibovore<br />

Elle est belle. Rose, orange, violette, jaune,<br />

verte... Tout ce qu’elle aime. Elle brille, elle<br />

resplendit, elle l’adore. Ça doit être vraiment<br />

bon. Elle frissonne rien qu’en pensant à ce<br />

sucre si doux et si délicat qu’elle envie tellement.<br />

Seulement Rosie le sait, elle ne pourra jamais<br />

la manger. C’est un trésor, une chose si belle<br />

et si précieuse qu’elle ne pourrait la détruire.<br />

Elle se relève et se dirige vers sa chambre en<br />

regardant fixement son bijou, de peur qu’il<br />

disparaisse sous ses yeux.<br />

Rosie, 5 ans, Bonbophile<br />

Marion de Meo<br />

Marion, 22 ans, Gourmandologue


) ) )<br />

Une famille de la grande bourgeoisie et ses<br />

membres, réunis sous les armes d’un seul<br />

nom ; les Tissandier-Richmont, me servent<br />

de prétexte à une réinterprétation des<br />

signes d’un milieu.<br />

En effet, l’accumulation de codes culturels,<br />

identitaires et de stéréotypes en font une<br />

classe sociale visible. Ce que de nombreuses<br />

œuvres cinématographiques, littéraires ont<br />

sublimé, exagéré ou moqué. Cette liberté<br />

)broderie<br />

de ton, oscillant entre fascination et lucidité<br />

m’apparaît comme un moyen de mettre à<br />

jour les travers d’une famille et les codes<br />

de représentation de la bourgeoisie, non<br />

exempts de rigidité.<br />

Derrière la perfection, le décorum, on devine<br />

les failles et l’humanité de ses membres, le<br />

contraste est d’autant plus frappant que tout<br />

nous apparaît, à première vue, maîtrisé.<br />

Anthonin Guillem<br />

Le charme discret de la bourgeoisie


) ) )<br />

Tout n’est que désordre, nombre, angoisse.<br />

Peu à peu tout s’ordonne. Ne restent plus<br />

que calme et délicatesse.<br />

J’ai peur d’un grouillement de fourmis et<br />

cela me dégoûte. Cette masse indistincte<br />

provoque en moi une répulsion forte. Tout<br />

est flou, le tas, les fourmis, les mouvements.<br />

Car l’indistinction renvoie à une peur<br />

archaïque. La peur d’être envahi, souillé,<br />

enseveli, étouffé. Peut-être même jusqu’à<br />

la peur de la mort et de la souffrance. Mais<br />

cette peur est irrationnelle et ne provient<br />

que de l’imaginaire. Est-ce que de simples<br />

fourmis sont un danger ?<br />

)tissage<br />

Alors face à cette masse indistincte, je tente<br />

de distinguer des fourmis. Je m’approche.<br />

Et plus je m’approche, plus je suis fascinée.<br />

Je vois des formes singulières, des mouvements,<br />

des couleurs qui accèdent à une<br />

harmonie.<br />

La peur première a disparu. Je passe outre<br />

le fait que la fourmi soit considérée comme<br />

répugnante ou insignifiante. Je réapprends à<br />

observer, à contempler. Car il est difficile de<br />

voir la beauté des choses qui nous entourent.<br />

Il est rare d’être capté par des choses insignifiantes.<br />

On a perdu la naïveté de croire<br />

que même une fourmi peut être belle.<br />

Fannie Jaulin<br />

Fourmi(s)


) ) )<br />

Notre vie est régie par une série de<br />

normes et elles valent pour tous. Rigides,<br />

répétitives, systématiques, elles peuvent<br />

paraître comme un maillage étouffant. Cet<br />

ordre, au début, je m’en sers, j’en reprends<br />

les principes : grille, répétition, série.<br />

Perception d’un monde ordonné, donc<br />

rassurant.<br />

Cet ordre, après, je le surligne au point que<br />

le réel se brouille, commence à s’halluciner<br />

jusqu’à frôler l’illisibilité. Cet ordre enfin, je<br />

le disloque et c’est le corps tout entier qui se<br />

fragmente et offre d’infinies variations.<br />

)tapisserie<br />

Je me propose au travers de mon exploration,<br />

d’utiliser mes photographies en les tissant<br />

et inversement mes textiles deviennent<br />

des images en tant que telles.<br />

Le corps devient le lieu d’étranges découpes,<br />

recompositions, il est fantasmé, objetisé,<br />

explosé en une myriade de miroirs à travers<br />

des images de beauté, séduction.<br />

Les images que j’ai créées se veulent ainsi,<br />

faites de saccades, prêtes à s’articuler, à<br />

bouger, tout en restant des images fixes,<br />

imprimées.<br />

Inès Leroy Galan<br />

Des ordres désordres


) ) )<br />

Enveloppe lisse et blanche qui colle à<br />

l’Image. J’examine, j’explore, je fouille<br />

l’objet de mon désir. Je le décortique.<br />

J’atteins sa cause mécanique, complexe.<br />

Je fétichise sa substance et sa matière,<br />

friables. Je me l’approprie dans son entièreté.<br />

Mélange, je suis happée dans une fusion<br />

harmonique des Imaginaires. Comblée d’une<br />

somme sans reste, je m’emplis, déborde<br />

d’une totalité radieuse qui se veut éternelle.<br />

Espace transitionnel, violence d’un jardin<br />

floral qui s’épanouit et se répand comme un<br />

nuage de fumée ; une réalité à part.<br />

Un dialogue s’opère, les Imaginaires s’entretiennent<br />

mutuellement. Des signes subtils et<br />

clandestins se chevauchent, énigmatiques.<br />

)tissage<br />

Obligation d’entrer dans le brasier du sens,<br />

des impulsions électriques.<br />

Et tout à coup un autre paysage, une ombre<br />

ténue flotte douloureusement. Le son ne<br />

circule plus. Il assourdit, s’amortit dans un<br />

espace inerte, recoins morts de l’Imaginaire.<br />

Un mégot s’écrase sur du velours.<br />

Personnage plombé, je créais autour de moi<br />

des mondes. Figure de rêve qui ne parle pas.<br />

Ne repousse pas, laisse passer ce qui s’en<br />

va. Je me soumets à l’Imaginaire, épongée,<br />

désinvestie par le leurre épuisant de la<br />

mémoire.<br />

Nourris, remâche, ravale-le sans cesse,<br />

régurgite-le. De la tourbe mal éteinte resurgit<br />

un long cri.<br />

Nolwenn Le Scao<br />

Embrase-moi


) ) )<br />

Il y a des lieux qui me fascinent. J’aime<br />

parcourir les vestiges de la mémoire de ces<br />

lieux, deviner les modifications qui seraient<br />

lié au passage des propriètaires successifs,<br />

comme une généalogie des lieux.<br />

«Pourquoi les murs n’auraient-ils pas<br />

enregistré et superposé les vibrations affectives<br />

des occupants et visiteurs qui se<br />

sont succédés?» Robert Polidori.<br />

Je me suis interressée à trois lieux : une<br />

salle de bain, un boudoir et un jardin d’hiver.<br />

Ce sont des lieux réels ou fictifs, c’est la<br />

)broderie<br />

manière dont ils dialoguent entre eux qui me<br />

touche.<br />

Je cherche à travers ces trois lieux à<br />

montrer comment la mémoire fragmente<br />

le réel, le réinvente parfois, et superpose<br />

les espaces et les temps. J’aime évoquer<br />

des entrelieux, comme des entre-deux, des<br />

entre-temps.<br />

J’imagine des couches d’espaces-temps<br />

qui se dévoilent dans la profondeur du mur,<br />

soumis aux filtre du temps. On entre véritablement<br />

dans l’âme du mur.<br />

Éléonore Lespets<br />

Entretemps, Entrelieux


) ) )<br />

Avez-vous déjà été perdu dans une forêt la<br />

nuit, sans route ni lampadaire à l’horizon?<br />

Si c’est le cas, peut-être avez-vous feinté<br />

de garder votre sang froid et dc rester le<br />

plus courageux et le plus vaillant possible?<br />

Tout commence par une balade dans la<br />

forêt des plus banales. Émerveillement du<br />

randonneur face à ce qu’il voit. Vous avez un<br />

esprit très curieux. Vous vous attardez et<br />

vous cueillez des photos ça et là. Des écorces<br />

poilues, des troncs aux formes humaines,<br />

les «yeux» des arbres... Les étrangetés de<br />

la nature!<br />

Vous décidez de faire une halte pour<br />

reprendre des forces. Vous êtes seul(e) et<br />

la nuit commence à tomber. Vous n’avez pas<br />

fait attention à l’heure. Cette forêt est désormais<br />

plongée dans cette pénombre inquiétante.<br />

Vous vous remettez en chemin puis<br />

)tissage<br />

vous vous perdez. Vous ne reconnaissez<br />

plus rien. Mais la forêt aime jouer à cachecache<br />

et tendre des pièges... Elle s’anime, se<br />

transforme progressivement à la tombée de<br />

la nuit. Votre imagination commence à vous<br />

jouer des tours. Et Il fait déjà nuit noire.<br />

Certes, vous êtes déjà habitué au doux<br />

bruissement des feuillages dans le vent, aux<br />

écorces qui craquent et aux ululements des<br />

chouettes.<br />

Mais si un autre son venait perturber cette<br />

atmosphère monotone?<br />

Vous l’avez entendu ce bruit? Moi aussi..,<br />

A cet instant, une ombre se glisse près d’un<br />

tronc. Deux yeux féroces perçant l’obscurité<br />

semblent s’attarder sur... vous!<br />

A cet instant précis, vous devenez l’enfant<br />

terrorisé que vous avez été, l’enfant que<br />

vous êtes encore.<br />

Clémentine Muret<br />

Dans la forêt quelque chose se trame...


) ) )<br />

A chacun de découvrir sa peur. La mienne<br />

se cache sous ma phobie de la fin du monde.<br />

De ma volonté à la partager et à apprendre<br />

à y faire face, j’ai décidé d’étudier une<br />

catastrophe biologique inexpliquée et d’en<br />

explorer ses conséquences.<br />

Inquiétantes Dégradations<br />

D’étranges phénomènes se sont produits<br />

dans la ville nommée de nos jours zone A2K.<br />

Les habitants ont constaté avec effroi que<br />

leur lieu de vie se dégradait sans savoir<br />

pourquoi. Les vitres se fissuraient et les<br />

)tapisserie<br />

objets du quotidien se boursouflaient. Le plus<br />

effrayant est qu’ils ne pouvaient enrayer<br />

ce processus. Ils avaient beau enlever,<br />

nettoyer, remplacer, rien à faire : la dégradation<br />

persistait.<br />

Une équipe de scientifique est arrivée sur les<br />

lieux et a constaté avec horreur qu’un virus<br />

non identifié et d’origine inconnue était à<br />

l’origine de cette dégradation.<br />

Par mesure de sécurité, la zone contaminée<br />

a été mise en quarantaine et la population<br />

évacuée.<br />

Camille Nocus<br />

Megavirus


) ) )<br />

J’ai des souvenirs persistants. Penser à la<br />

mer est comme un besoin, pour prendre le<br />

temps de faire le vide. Je ne cherche pas à<br />

illustrer des moments vécus, je pense à ce<br />

que je ressentais : à la lumière, à l’espace<br />

immense autour de moi. Souvenirs d’un lieu<br />

mais pas d’un moment précis.<br />

J’ai vécu de très bons moments au bord de la<br />

mer, avec les personnes auxquelles je tiens,<br />

mais ce n’est pas revivre ces moments que<br />

je cherche. Je souhaite m’enivrer de mes<br />

souvenirs : des sensations, des odeurs, des<br />

couleurs gardées en mémoire en attendant<br />

de revenir. Dès lors que je n’illustrerais pas<br />

des moments vécus, ma mémoire travaillera<br />

autant que mon imagination. Puisque<br />

par définition la mémoire est sélective, je ne<br />

choisirai que ce qui me plait, que ce qui m’est<br />

agréable.<br />

Je me suis appliquée à chercher comment<br />

partager, rendre visibles et concrets mes<br />

souvenirs, d’abord grâce à l’image et à<br />

la lumière, puis par le biais de collections<br />

d’objets glanés, trouvés.<br />

)tapisserie<br />

Marie Pouclet<br />

Plage mémoire


) ) )<br />

Plongée dans l’ombre de ma cave, je retiens<br />

mon souffle, craignant de perturber<br />

le religieux silence dans lequel toutes ces<br />

bouteilles sommeillent. Je suis sensible à<br />

l’ordre parfait que leur excellence future<br />

exige. A leur habit de poussière, je devine<br />

leur histoire et leur âge.<br />

Puis vient ce délicieux instant de la dégustation,<br />

et la toute première goutte de liqueur<br />

roule sur ma langue pour atteindre<br />

ma gorge. Déjà je m’abandonne, je laisse le<br />

vin s’emparer de moi, j’accepte d’abord la<br />

précision décuplée des sensations, l’écho<br />

subtil des notes qui chantent, puis, peu à<br />

peu, un léger désordre des sens.<br />

...<br />

Je suis née, en 1989, dans l’amour du vin. On<br />

m’a nommée Margaux, comme ce Bordeaux<br />

long en bouche et aux accents profonds<br />

qu’affectionne mon père.<br />

)tissage<br />

Entourée d’amateurs de vin et passant<br />

les vacances en Bourgogne, je descends<br />

dans la petite cave familiale qui regorge de<br />

trésors. Là, je fouille, je me recueille et me<br />

sens vivante, si intimement liée à ce lieu<br />

chargé d’histoires.<br />

Je garde en mémoire les repas interminables,<br />

où l’on ne quitte pas la table avant<br />

trois heures de l’après midi. Je me souviens<br />

aussi des premières ivresses volées en<br />

cachette des parents, finissant les fonds de<br />

verres abandonnés.<br />

Je me rappelle du premier jour où je me suis<br />

appliquée à déguster un vin : c’était le mien,<br />

mon nom, mon année. Nous avions grandi<br />

ensemble, et je m’efforçais de l’éveiller avec<br />

le plus de respect et de précaution possible<br />

de sa lie, sur laquelle il avait reposé depuis<br />

si longtemps.<br />

Margaux Saint Frison<br />

In Vino Voluptas


) ) )<br />

Depuis longtemps je suis fascinée par les<br />

personnes piercées, tatouées cultivant<br />

un physique hors-normes pouvant parfois<br />

aller jusqu’à l’extrême et je me suis intéressée<br />

aux personnalités qui ont influencé<br />

ces comportements.<br />

Ma principale référence est Birdy, un<br />

personnage présent dans le film Freaks de<br />

Tod Browning tourné dans les années 1930. Il<br />

s’agit d’une femme atteinte de microcéphalie<br />

qui ne s’apitoie pas sur son sort mais qui au<br />

contraire accentue ses défauts à l’aide d’un<br />

costume grotesque d’oiseau.<br />

Elle ressemble à un oisillon tombé du nid.<br />

Mi-pelée, mi-ébouriffée, elle était presque<br />

)broderie<br />

pathétique mais avec une touche d’humour<br />

et d’auto-dérision, poussant jusqu’à<br />

l’extrême son handicap physique.<br />

Je me suis ensuite questionnée sur les<br />

origines de cette attirance pour l’hybridation<br />

entre l’humain et l’oiseau. L’oiseau a<br />

une symbolique très forte dans l’imaginaire<br />

collectif et inspire une fascination depuis<br />

la nuit des temps comme le mythe d’Icare,<br />

les Harpies et les Sirènes. Il s’agit ici de<br />

l’oiseau en majesté contrairement à Birdy<br />

qui représente l’oiseau dans ce qu’il a de plus<br />

pitoyable.<br />

Cette Femme oiseau est légendaire,<br />

mythique, séductrice, violente et morbide.<br />

Marina Savani<br />

Birdies


) ) )<br />

Il y a bien avant mon intérêt certain pour<br />

les parfums et les odeurs une volonté de<br />

parler du manque évident des paysages dans<br />

lesquels j’ai grandi et que je ne retrouve<br />

plus aujourd’hui à Paris.<br />

Lorsque je suis chez moi, un petit village en<br />

Auvergne, je retrouve des odeurs et des<br />

atmosphères qui n’ont pas changé, ou très<br />

peu. Depuis que je suis à Paris je ressens<br />

un réel vide, une profonde nostalgie de ces<br />

instants que je passe là bas.<br />

Quand je contemple les massifs montagneux,<br />

ou que je m’y promène, il y a quelque chose<br />

qui est encore plus puissant que ce que je<br />

vois, il s’agit des odeurs qui imprègnent ces<br />

moments et qui sont comme des auras de<br />

ces paysages, ces instants.<br />

)tissage<br />

Encore plus fort que ce que je vois, il y a ce<br />

que je sens. Alors je ferme les yeux, dans<br />

l’instant, et les paysages qui m’entourent<br />

prennent toute leur force. Les images sont<br />

dans ma tête. Je vois ces paysages à travers<br />

ces odeurs. Il y en a une multitude.<br />

Il m’est impossible de capturer ce que je<br />

sens, je ne peux capturer que ce que je vois.<br />

Mes photographies sont les éléments qui<br />

me donnent la possibilité de retrouver des<br />

sensations, des instants, et peut être des<br />

odeurs.<br />

Mes pellicules photographiques sont comme<br />

des flacons qui renfermeraient les parfums<br />

de ces instants passés sur ces massifs, à<br />

travers ces chemins, prés de ces points<br />

d’eau.<br />

Laetitia Sévérac<br />

Parfums de paysages


) ) )<br />

L’identité féminine actuelle se définit<br />

comme multiple. Aujourd’hui, les femmes<br />

ne sont plus cantonnées à un seul rôle<br />

défini par les conventions sociales : mère de<br />

famille, femme active, épouse modèle.<br />

J’ai travaillé sur ce jeu que met en place la<br />

femme actuelle, cette aptitude à changer son<br />

apparence, son rôle, son environnement.<br />

Je pars d’une femme banale et de son désir<br />

de transformation. Cette femme pourrait<br />

être moi, vous, n’importe laquelle qui aurait<br />

)broderie<br />

envie de s’imaginer en icône, en héroine de<br />

BD, en héroine tout court, bref en Surfemme.<br />

Mon inspiration comme mon esthétique<br />

trouvent leur source dans la culture de<br />

masse : bande dessinée ou film de série B.<br />

J’ai créé ainsi trois personnalités de femmes<br />

qui deviennent des rôles que n’importe quelle<br />

femme pourrait s’amuser à jouer et je leur ai<br />

inventé les panoplies adéquates que chacune<br />

d’entre nous pourrait endosser.<br />

Pour le plaisir.<br />

Clémentine Udron<br />

Surfemme


) ) )<br />

«Plus la matière est, en apparence, positive<br />

et solide, et plus la besogne de l’imagination<br />

est subtile et laborieuse.» Baudelaire.<br />

Mon projet repose sur ma curiosité pour le<br />

monde particulier de l’objet, plus précisément,<br />

pour son reste relatant ses traces<br />

visibles de vie et sa charge émotionnelle.<br />

Comment ce dernier subsiste-t-il à travers<br />

le temps ?<br />

Cette curiosité pour ce «jeu de hasard» du<br />

devenir de l’objet, de sa transformation au<br />

fil du temps, va être le fil conducteur de mes<br />

recherches.<br />

Le temps change la nature ainsi que la fonction<br />

de l’objet, c’est cette métamorphose,<br />

cette évolution qui m’interpelle et qui va<br />

)tapisserie<br />

m’amener à stimuler mon imaginaire lors de<br />

mes créations.<br />

Je choisis de travailler la «ruine» de l’objet<br />

«poupée» que je traite comme des vanités,<br />

telle une figure qui rappelle l’impermanence<br />

de notre vie face au temps qui passe. Mon<br />

choix se porte sur la poupée qui représente<br />

selon moi, une «relique» à la charge émotionnelle<br />

à part : un entre-monde (le vivant<br />

et le mort).<br />

Ces « poupées » n’ont plus l’aspect d’innocence<br />

et de candeur enfantine, ce sont<br />

désormais des rescapées, figures humaines<br />

inanimées, dépouilles d’un temps passé.<br />

Lors de mon projet, je me place en collectionneuse,<br />

en archéologue, je récupère, prélève<br />

leurs fragments, leurs restes.<br />

Léa Verdeguer<br />

L’entre-monde


) ) )<br />

«La vie commence par une naissance, une<br />

œuvre peut commencer sous l’empire de<br />

la destruction : règne des cendres, recours<br />

au deuil, retour de fantômes, nécessaire<br />

pari sur l’absence.» Georges Didi-<br />

Huberman<br />

Le feu s’apparente à la destruction, au néant,<br />

à la caducité, à la finitude et à la mort. Agent<br />

de transformation, il chauffe, cuit, brûle,<br />

consume, calcine, durcit ou liquéfie, détruit,<br />

annihile.<br />

La première constatation de cette absence<br />

c’est le noir, la matière noire. Cette couleur<br />

d’une beauté funèbre, à la fois profonde,<br />

déstabilisante et autoritaire. Étrange, em-<br />

)broderie<br />

preinte d’une poésie splendide et macabre.<br />

Ce noir qui, quand la lumière s’y reflète, se<br />

transforme, se transmute. Il la réfléchit, la<br />

module, la sculpte, la creuse, la métamorphose,…<br />

Ainsi, cette couleur paradoxale<br />

traite à la fois de l’ombre et de la lumière, de<br />

la mort et de la vie.<br />

Cette destruction, cette absence a laissé<br />

place à autre chose de l’ordre de l’empreinte.<br />

Le feu lèche, effleure le support et inscrit<br />

une sorte de trace. Il y a mémoire du feu…<br />

Ce vestige, ce rien du tout, ce tas informe<br />

de cendre révèle une existence propre. Ici,<br />

autre chose prend vie, s’élève et remplace<br />

cette absence qui n’est qu’éphémère.<br />

Constance Vidalain<br />

Silence de suie


École <strong>Duperré</strong><br />

11 rue Dupetit-Thouars<br />

75003 Paris<br />

Tél : +33 (0)1 42 78 59 09<br />

Fax: +33 (0)1 42 78 22 29<br />

Conception graphique :<br />

Stéphan Lozet<br />

Diplôme des métiers d’arts<br />

Arts textiles

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