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que c’est ma faute. Je <strong>de</strong>vrais arrêter <strong>de</strong> lui donner <strong>de</strong> l’argent.<br />
Je refuse d’entrer dans son jeu. Je ne lui permettrai pas <strong>de</strong> monter mon cousin contre moi.<br />
— Quelqu’un veut <strong>de</strong>s muffins ? proposé-je en les attrapant sur le plan <strong>de</strong> travail. Je les ai achetés hier<br />
chez Feuilles <strong>de</strong> thé.<br />
Matt reste silencieux. Grand-mère jette un regard en coin aux muffins en sirotant son café. A-t-elle vidé<br />
son sac ou bien se repose-t-elle avant <strong>de</strong> lancer une nouvelle salve <strong>de</strong> piques ?<br />
Elle lave sa vaisselle, puis s’approche <strong>de</strong> l’étagère où je l’ai vue ranger sa bible la veille.<br />
— Où est-elle ? s’exclame-t-elle en pivotant sur ses talons.<br />
— Où est quoi ? lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> Matt d’un ton détaché tout en glissant une tranche dans le grille-pain.<br />
— Ma bible.<br />
— Elle n’est pas sur l’étagère ? s’étonne-t-il en tendant le cou pour vérifier.<br />
<strong>Les</strong> yeux <strong>de</strong> grand-mère fon<strong>de</strong>nt sur moi.<br />
— Lequel <strong>de</strong> vous <strong>de</strong>ux me l’a prise ?<br />
— Je n’y ai pas touché, grand-mère, dis-je, surprise par son ton accusateur.<br />
— Vous savez très bien que je ne l’ouvre jamais, lui répond Matt.<br />
— Quelqu’un l’a changée <strong>de</strong> place. Je l’avais mise là hier soir. Elle est toujours là, insiste-t-elle.<br />
— Vous l’avez peut-être laissée dans une autre pièce sans faire attention, suggéré-je.<br />
— Je sais ce que je fais, merci.<br />
— Il arrive à tout le mon<strong>de</strong> d’égarer <strong>de</strong>s affaires, tenté-je <strong>de</strong> la raisonner. Je vais voir dans la<br />
bibliothèque.<br />
Ma proposition est tout autant inspirée par mon désir <strong>de</strong> m’éclipser que par celui d’ai<strong>de</strong>r grand-mère,<br />
qui a décidément l’air déterminée à créer <strong>de</strong>s histoires dans lesquelles je refuse <strong>de</strong> m’impliquer.<br />
Je vérifie d’abord sur son bureau, puis sur les tables et le <strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> la cheminée. Matt arrive <strong>de</strong>rrière<br />
moi et entreprend <strong>de</strong>s recherches plus poussées, sous les tables, sous les chaises et même sous une pile<br />
<strong>de</strong> magazines. Je repars vers le bureau, dont j’essaie d’ouvrir les tiroirs, ceux dans lesquels je l’ai<br />
surpris en train <strong>de</strong> fouiller le premier soir.<br />
— Ils sont fermés, me dit-il.<br />
— Où se trouvent les clés ?<br />
— Je ne sais pas. Il y a <strong>de</strong>s choses que grand-mère ne dit à personne.<br />
« Excepté à toi », pensé-je.<br />
— De toute façon, sa bible n’y serait pas, ajoute-t-il.<br />
— Comment peux-tu le savoir si les tiroirs sont inaccessibles ?<br />
Il me regar<strong>de</strong> fixement.<br />
— Je les ai déjà vus ouverts quand elle travaille. Ils sont pleins à craquer. Il serait impossible d’y<br />
loger un gros livre.<br />
Il se tourne pour examiner les étagères.<br />
— Tu es sûre que tu ne l’as pas empruntée et remise ailleurs par mégar<strong>de</strong> ? me <strong>de</strong>man<strong>de</strong>-t-il.<br />
— Bien sûr que oui !