stress et empathie: nous ne sommes pas egaux - Florence SKALSKI
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<strong>Florence</strong> <strong>SKALSKI</strong> Newsl<strong>et</strong>ter juin 2012 http://www.sophrologue-reflexologue.com<br />
STRESS ET EMPATHIE: NOUS NE SOMMES PAS EGAUX<br />
U<strong>ne</strong> variation du gè<strong>ne</strong> codant le récepteur de l'ocytoci<strong>ne</strong> –la «molécule du bonheur»–<br />
module notre aptitude à éprouver de l'<strong>empathie</strong> <strong>et</strong> notre réactivité face au <strong>stress</strong>.<br />
© Yalayama / Shutterstock<br />
Le contact de la paume d’u<strong>ne</strong> main chaude suscite la confiance <strong>et</strong> provoque la libération d’ocytoci<strong>ne</strong><br />
dans le cerveau.<br />
Serions-<strong>nous</strong> tous égaux face aux deux composantes socio-émotion<strong>ne</strong>lles que sont la<br />
gestion du <strong>stress</strong> <strong>et</strong> l'<strong>empathie</strong>?<br />
Non.<br />
Des variations génétiques <strong>nous</strong> y rendent plus ou moins sensibles, révèlent les récentes<br />
études de plusieurs psychologues américains. Sarina Rodrigues, de l'Institut de recherche<br />
sociale <strong>et</strong> de la personnalité <strong>et</strong> Laura Saslow du Département de psychologie de<br />
l'Université de Californie, <strong>et</strong> leurscollègues de l'Université d'État de l'Oregon, ont montré<br />
qu'u<strong>ne</strong> variation du gè<strong>ne</strong> codant le récepteur de l'ocytoci<strong>ne</strong> (OXTR) est responsable de<br />
notre plus ou moins bon<strong>ne</strong> maîtrise du <strong>stress</strong>, ainsi que de notre degré d'<strong>empathie</strong> (la<br />
capacité à ressentir les sentiments <strong>et</strong> les émotions d'autrui, à devi<strong>ne</strong>r s'ils sont heureux<br />
ou tristes).<br />
Tantôt désignée sous le nom de molécule du bonheur, tantôt d'hormo<strong>ne</strong> de l'amour,<br />
l'ocytoci<strong>ne</strong> joue un rôle déterminant dans les échanges sociaux. Les premières études<br />
ont montré qu'elle stimule l'accouchement en provoquant des contractions de l'utérus<br />
chez la femme enceinte, <strong>et</strong> favorise l'attachement de la mère à son enfant. Par ailleurs,<br />
elle tisse les liens entre individus <strong>et</strong> renforce les relations de confiance. Et ce n'est <strong>pas</strong><br />
tout, car des suj<strong>et</strong>s auxquels on a administré de l'ocytoci<strong>ne</strong> par voie intranasale révèlent<br />
des sig<strong>ne</strong>s comportementaux étonnants: leur générosité envers les autres augmente <strong>et</strong><br />
ils sont plus aptes à «lire dans les yeux» de leur interlocuteur.<br />
Pour en revenir aux travaux de l'équipe de S. Rodriguez <strong>et</strong> L. Saslow, le lien entre <strong>stress</strong><br />
<strong>et</strong> <strong>empathie</strong> n'est <strong>pas</strong> tout à fait évident. Stress <strong>et</strong> <strong>empathie</strong> sont néanmoins influencés
par l'ocytoci<strong>ne</strong> car on sait que c<strong>et</strong>te molécule agit à la fois sur la partie<br />
<strong>ne</strong>uroendocrinien<strong>ne</strong> du <strong>stress</strong> – elle frei<strong>ne</strong> la production de cortisol libérée en réponse<br />
au <strong>stress</strong> – <strong>et</strong> sur les bases <strong>ne</strong>urologiques de la cognition sociale dans le cerveau – dont<br />
l'<strong>empathie</strong> fait partie.<br />
Ce gè<strong>ne</strong> existe sous deux formes – les allèles – notées A <strong>et</strong> G – qui <strong>ne</strong> diffèrent que par un<br />
maillon de la chaî<strong>ne</strong> de nucléotides, u<strong>ne</strong> adéni<strong>ne</strong> A ou u<strong>ne</strong> guani<strong>ne</strong> G. Un individu, qui<br />
hérite d'un allèle de chacun de ses parents, peut présenter l'u<strong>ne</strong> ou l'autre des trois<br />
combinaisons possibles du gè<strong>ne</strong> : AA, AG ou GG. Plusieurs études ont révélé que la<br />
présence de l'allèle A augmenterait les risques d'autisme, un trouble caractérisé par des<br />
difficultés à interagir avec autrui. En se fondant sur ce dernier résultat, ils ont donc<br />
décidé de répartir les 200 suj<strong>et</strong>s testés en deux groupes: d'u<strong>ne</strong> part les individus AA ou<br />
AG, d'autre part les suj<strong>et</strong>s GG.<br />
Ils ont d'abord mesuré leur niveau d'<strong>empathie</strong> au moyen d'un test inventé par le<br />
psychologue Simon Baron-Cohen, spécialiste de l'autisme, «le test de lecture dans les<br />
yeux». Au sein d'un même groupe, les femmes ont montré u<strong>ne</strong> plus grande capacité que<br />
les hommes à discer<strong>ne</strong>r les émotions d'autrui simplement en les regardant dans les yeux.<br />
Tous sexes confondus, les suj<strong>et</strong>s GG devi<strong>ne</strong>nt mieux les sentiments que les individus AA<br />
<strong>et</strong> AG.<br />
Qu'en est-il de leur degré de réactivité face au <strong>stress</strong>?<br />
Pour y répondre, les chercheurs ont mesuré le rythme cardiaque des participants en<br />
situation de <strong>stress</strong> (un son strident désagréable est régulièrement émis, <strong>et</strong> il peuvent<br />
l'anticiper grâce à un décompte affiché sur un écran). Les suj<strong>et</strong>s GG sont plus calmes <strong>et</strong><br />
contrôlent mieux leur rythme cardiaque que les autres: on constate que leur rythme<br />
cardiaque accélère moins à l'approche du son que chez les suj<strong>et</strong>s AA ou AG.<br />
C<strong>et</strong>te étude dévoile les prédispositions génétiques face à la gestion du <strong>stress</strong> <strong>et</strong> au<br />
développement de l'<strong>empathie</strong>. Ces résultats sont focalisés sur les facteurs génétiques,<br />
mais il est évident que les facteurs sociaux <strong>et</strong> environ<strong>ne</strong>mentaux sont aussi essentiels à<br />
la construction de l'<strong>empathie</strong> <strong>et</strong> de la confiance, ainsi qu'à la communication.<br />
Emilie AUVROUIN pour Cerveau & Psycho