Patrick Cauvin L'amour aveugle

Univers. Peut-être une vingt-cinquième place au
concours de Monsieur Muscle à Carpentras. Et encore,
catégorie troisième âge.
C’est drôle ! Je ne peux pas me trouver devant une
glace sans faire l’idiot. Je me demande à quel âge cela me
passera. Je suis sûr, par exemple, que M. Duverrier,
proviseur de lycée, ne joue pas les Tarzans dans sa salle
de bain.
Slip orange. Là, je me suis nettement laissé influencer
par la publicité. A force d’attendre la correspondance à
Richelieu-Drouot, devant une gigantesque affiche
représentant trois malabars bronzés en slips de couleur,
en train de boire du whisky dans une cabine de yacht, j’ai
fini par en acheter un. Mettre un nouveau slip, c’est
toujours recommencer un peu une nouvelle vie. Et puis
quoi, c’est les vacances. Il est bon de se faire tout neuf. Je
commence par le slip. Le yacht viendra plus tard.
La douche a chassé les vapeurs d’alcool. Ça va me
permettre de finir le Dubonnet. Il m’en reste un fond de
bouteille, dans le buffet, que je garde pour mon usage
personnel. J’ai du whisky pour les visiteurs, ça fait plus
chic, plus dans le vent, mais quand je suis seul, je me
garde le Dubonnet.
Je dois être un Français moyen : 1,72 m, 69 kilos, un
peu chauve, légère myopie, professeur, prends des poses
devant la glace, une chance que je ne m’appelle pas
Dupont, bien que Jacques Bernier ne soit pas
particulièrement original.
Treize heures cinq, et j’ai encore plein de choses à
faire : demander à la concierge de faire suivre mon