Eli Lotar : un photographe professionnel et militant en - Histoire ...
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D’<strong>en</strong>trée, la production du je<strong>un</strong>e <strong>Lotar</strong> est mise <strong>en</strong> opposition avec l’œuvre de celle qu’il<br />
appelle « La Walkyrie de la photographie » 5 : Germaine Krull, suj<strong>et</strong> du précéd<strong>en</strong>t numéro. A<br />
« l’aridité des suj<strong>et</strong>s » 6 de Krull, <strong>Lotar</strong> répond par <strong>un</strong>e démarche singulière, il est le<br />
<strong>photographe</strong> « l’affût des choses étranges » 7 . L’article de Gallotti s’articule autour de sept<br />
photographies, publiées antérieurem<strong>en</strong>t dans des revues de reportages comme Vu. Gallotti<br />
place le travail du <strong>photographe</strong> sous le sceau de « l’étrang<strong>et</strong>é ». A c<strong>et</strong>te « étrang<strong>et</strong>é » s’ajoute<br />
la désobligeance <strong>et</strong> la désolation des suj<strong>et</strong>s de <strong>Lotar</strong>, comme l’exprime Jean Gallotti :<br />
« (…) des suj<strong>et</strong>s dont l’indig<strong>en</strong>ce est <strong>en</strong>core presque par tout le monde considéré comme de<br />
la laideur » 8<br />
Les propos de Gallotti interpell<strong>en</strong>t <strong>et</strong> nous perm<strong>et</strong>t<strong>en</strong>t de p<strong>en</strong>ser qu’<strong>un</strong> surréaliste n’aurait pas<br />
nié les avoir écrit. A propos de « Ce vice imp<strong>un</strong>i, la lecture », photographie <strong>en</strong> plan serré de<br />
doigts glissant sur <strong>un</strong>e feuille de papier recouverte d’alphab<strong>et</strong> braille <strong>et</strong> prise lors d’<strong>un</strong><br />
reportage à l’hôpital des Quinze-Vingt <strong>en</strong> 1928, Gallotti écrit :<br />
« Mais nous ne pouvons nous déf<strong>en</strong>dre de remarquer, <strong>en</strong> même temps, combi<strong>en</strong>, vus de c<strong>et</strong>te<br />
manière, <strong>un</strong> index, <strong>un</strong> médius <strong>et</strong> <strong>un</strong> auriculaire ressembl<strong>en</strong>t à des jambes de p<strong>et</strong>its garçons<br />
chaussées de guêtres de laine ? Ici <strong>en</strong>core l’étrang<strong>et</strong>é nous incite à des rapprochem<strong>en</strong>ts que<br />
le <strong>photographe</strong> n’a pas cherchés. » 9<br />
Le texte de Gallotti constitue <strong>un</strong> rare exemple de la réception critique de <strong>Lotar</strong> à l’époque.<br />
Aussi, avant même sa publication dans l’organe surréaliste Docum<strong>en</strong>ts, la production<br />
photographique de <strong>Lotar</strong>, réalisée dans <strong>un</strong> contexte journalistique, prés<strong>en</strong>te des affinités avec<br />
<strong>un</strong> état esprit « surréaliste » que Gallotti refuse néanmoins de m<strong>en</strong>tionner comme tel, tout <strong>en</strong><br />
concédant rapidem<strong>en</strong>t l’influ<strong>en</strong>ce de Man Ray sur la pratique photographique <strong>professionnel</strong><br />
du je<strong>un</strong>e <strong>photographe</strong>.<br />
Tâchons de prolonger la réflexion de Gallotti <strong>et</strong> d’expliciter dans quelle mesure sa démarche<br />
comporte des affinités avec le surréalisme. Autrem<strong>en</strong>t dit, de quelle manière le surréalisme<br />
infléchit sa pratique photographique ?<br />
A partir de 1929, après sa rupture avec Germaine Krull, <strong>Lotar</strong> se rapproche du groupe du café<br />
« Les Deux Magots », composé <strong>en</strong> grande partie de surréalistes dissid<strong>en</strong>ts ou de « réprouvés »<br />
5 Ibidem, p. 605<br />
6 Ibidem, p. 605<br />
7 Ibidem, p.605<br />
8 Ibidem, p.605<br />
9 Ibidem, p.605<br />
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