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TROMEL Marie-Louise - Paroisse de Quéven

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<strong>TROMEL</strong> <strong>Marie</strong>-<strong>Louise</strong><br />

Marion du Faouët (<strong>Marie</strong>-<strong>Louise</strong> Tromel) Le Faouët ,1717 – Quimper, 1755<br />

Femme <strong>de</strong> chez nous, entrée dans la légen<strong>de</strong>, née miséreuse, révoltée <strong>de</strong>vant l’opulence <strong>de</strong>s riches, <strong>de</strong>venue chef<br />

<strong>de</strong> ban<strong>de</strong>s, volant les riches pour donner aux gueux, traquée sans cesse et finalement condamnée au gibet.<br />

Il était cinq heures du matin, ce samedi 9 mars 1748.A <strong>Quéven</strong>, dans la nuit qui s ‘achevait, seuls les pas du<br />

be<strong>de</strong>au allant sonner l’angélus claquaient du bruit <strong>de</strong> ses sabots. A la faible lueur <strong>de</strong> la chan<strong>de</strong>lle <strong>de</strong> suif qu’il venait<br />

d’allumer, quelle ne fut pas sa stupeur <strong>de</strong> voir la porte <strong>de</strong> l’église forcée et entr’ouverte. A l’intérieur, les hosties<br />

jonchaient le sol, le tabernacle était vi<strong>de</strong>, les troncs fracturés et la sacristie dévastée.<br />

Pressant le pas du mieux qu’il pût, à mi-chemin du presbytère, il fit part <strong>de</strong> sa découverte à l’abbé Gabriel<br />

PITONAYS, son recteur. Avec quelques fidèles qui avaient rejoint le sanctuaire pour la première messe, ils<br />

s’interrogèrent quant aux auteurs éventuels <strong>de</strong> ce sacrilège. « Encore un coup <strong>de</strong> la ban<strong>de</strong> à Marion ! » se dirent-ils. Ils<br />

ne se trompaient pas.<br />

Mais qui était-elle donc cette aventurière fort redoutée, chef d’une ban<strong>de</strong> <strong>de</strong> brigands qui <strong>de</strong>puis <strong>de</strong>s années<br />

écumaient la région ?<br />

Née dans la misère en campagne faouëtaise, le 6 mai 1717, cette gran<strong>de</strong> et belle rousse portant élégamment<br />

coiffe et tablier <strong>de</strong> son pays, était la fille <strong>de</strong> Phélicien <strong>TROMEL</strong>, un pauvre bûcheron, casseur <strong>de</strong> bois à l’occasion,<br />

gagnant à peine 5 à 6 sous par jour, et d’Hélène QUERNEAU, qui, pour nourrir sa marmaille, roulait sa brouette <strong>de</strong> foire<br />

en foire, <strong>de</strong> pardon en pardon, afin d’y vendre sa maigre pacotille.<br />

Alors qu’elle était toute petite, Marion fut contrainte <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r les vaches, faute à ses parents <strong>de</strong> pouvoir payer<br />

l’école. Lorsqu’elle <strong>de</strong>vint adolescente, placée comme servante à Lorient chez les <strong>de</strong>moiselles JAFFRE, quai <strong>de</strong>s In<strong>de</strong>s,<br />

la rébellion qui couvait en elle se transforma en révolte. A voir en ville une telle opulence, <strong>de</strong>s tapis moëlleux et <strong>de</strong>s<br />

bijoux, <strong>de</strong>s tables bien garnies et <strong>de</strong>s mobiliers <strong>de</strong> valeur, à force d’entendre leur neveu ne parler que d’accostages <strong>de</strong><br />

bateaux remplis <strong>de</strong> trésors et d’étoffes précieuses, <strong>de</strong> croiser dans les rues <strong>de</strong>s équipages empanachés, vêtus <strong>de</strong> soie<br />

brillante, qui soupesaient dans leurs poches <strong>de</strong> pleines poignées <strong>de</strong> pièces, la petite campagnar<strong>de</strong>, assise seule dans<br />

un coin <strong>de</strong> la cuisine, ressassait déjà en elle <strong>de</strong> terribles vengeances.<br />

Devenue autoritaire, désobéissante et irascible, on la congédia. Mais cela lui importait peu. L’envie d’être riche<br />

<strong>de</strong>venait irrésistible. L’aventure commença à Quimperlé, au len<strong>de</strong>main du Pardon <strong>de</strong>s Oiseaux. Les quelques liards que<br />

lui avaient rapportés les cerises qu’elle avait chapardées la comblait déjà <strong>de</strong> joie. Mais quand son frère Corentin lui<br />

remit en douce la bourse qu’il avait dérobée à un marchand <strong>de</strong> bestiaux titubant, alors Marion, cette fois, exultait. Quel<br />

plaisir pour cette écorchée vive <strong>de</strong> sentir les pièces d’or et d’argent dans les poches <strong>de</strong> sa camisole, <strong>de</strong> pouvoir les<br />

palper et <strong>de</strong> s’amuser à les faire tinter….<br />

Elle eut une idée. De nuit, les chemins et les bois étaient propices. Pourquoi donc ne pas mettre à profit ces<br />

soirs <strong>de</strong> fête, <strong>de</strong> foires et <strong>de</strong> pardons, quand maquignons, marchands et noctambules rentrent à leurs villages portant<br />

sur eux d’importantes sommes, montants <strong>de</strong> leurs transactions ou <strong>de</strong> leurs ventes <strong>de</strong> bétail ? Bien que mariée à Henri<br />

PEZRON et déjà maman d’une petite Alice, elle décida un jour d’organiser avec les compagnons <strong>de</strong> travail <strong>de</strong> son mari,<br />

une expédition qui s’avéra fructueuse.<br />

Devenue à l’âge <strong>de</strong> dix-huit ans chef d’une ban<strong>de</strong> <strong>de</strong> brigands dont plusieurs <strong>de</strong>viendront ses amants après<br />

l’emprisonnement <strong>de</strong> son mari, et avec la complicité d’un homme <strong>de</strong> petite noblesse qui avait fonction <strong>de</strong> receleur, elle<br />

forma une <strong>de</strong>uxième ban<strong>de</strong> puis une troisième – celle-là même qui fractura notre église et qui était conduite par René<br />

MACHEREZ, un gars <strong>de</strong> <strong>Quéven</strong> que les rapports <strong>de</strong> gendarmerie désignaient comme étant « l’homme à la veste<br />

verte ».<br />

Pillant fermes et tavernes, rançonnant nobles et bourgeois, dévalisant piétons et attelages, assommant les<br />

récalcitrants, Marion et ses complices, <strong>de</strong>s mendiants, <strong>de</strong>s défavorisés, <strong>de</strong>s voyous encadrés par <strong>de</strong>s bandits <strong>de</strong> grands<br />

chemins, étaient <strong>de</strong>venus la terreur <strong>de</strong> toute la région. Au point que le roi Louis XV s’en émut et que le clergé ordonna<br />

partout aux fidèles <strong>de</strong> dénoncer ce qu’ils savaient et ceux qu’ils connaissaient. Ses aventures étaient <strong>de</strong>venues<br />

légendaires. Sans cesse recherchée par la maréchaussée, plus précisément <strong>de</strong> Plouay à Guémené et <strong>de</strong> Carhaix à<br />

Quimperlé, changeant constamment <strong>de</strong> repères, elle et ses bandits étaient, disait-on, imprenables.<br />

Elle fut cependant arrêtée quatre fois. Faisant valoir sa qualité <strong>de</strong> mère <strong>de</strong> famille et faisant mine <strong>de</strong> s’amen<strong>de</strong>r,<br />

elle obtint <strong>de</strong>s jugements <strong>de</strong> clémence. Ce qui ne l’empêcha pas <strong>de</strong> continuer avec une quatrième puis une cinquième


équipe. Certains <strong>de</strong> ses compagnons furent emprisonnés. D’autre, comme notre compatriote René MACHEREZ, furent<br />

condamnés le 19 février 1759 à dix ans <strong>de</strong> galère. Quant à notre aventurière, à la suite d’un vol, reconnue dans les rues<br />

<strong>de</strong> Nantes le 21 octobre 1754, elle comparut <strong>de</strong>vant le tribunal <strong>de</strong> Quimper qui impérativement la réclamait. Condamnée<br />

à être pendue, on la fait monter dans une charrette pour la conduire au lieu du supplice. Il est six heures du soir. La<br />

foule, avi<strong>de</strong> <strong>de</strong> sensations, se presse. La potence se dresse <strong>de</strong>vant elle. Une cloche tinte au clocher voisin. Un frère<br />

cor<strong>de</strong>lier, crucifix à la main, se précipite pour l’exhorter à la prière. Elle se repent publiquement.<br />

…. Tout est consommé. Il ne reste plus qu’un corps pantelant qui se balance entre ciel et terre, celui <strong>de</strong> Marion<br />

du Faouët. Elle venait d’avoir 38 ans<br />

René Kermabon, Renouveau, n°208, février 1997

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